1 ․ Μῦθος désigne en 22b 5 l’histoire de Phoronée, Niobé, Deucalion et Pyrrha ; en 22c 7, le terme se rapporte à la légende du cataclysme provoqué par la chute du char de Phaéton, distinguée de la « vérité » d’une explication astronomique. En 23b 5, Timée oppose les « mythes » pour enfants que sont les croyances des Athéniens relatives à leur passé, à la mémoire millénaire du prêtre égyptien. En 26c 8, le terme marque le contraste entre le récit utopique de l’entretien d’hier – qui décrit une cité ressemblant à la Callipolis de la République – et celui que leur promet Critias, transposition dans la réalité du précédent (même opposition en 26e 4). Mais au sens de récit cosmologique (29d 2, 59c 6, 68d 2, 69b 1), le terme μῦθος n’est jamais chargé des connotations précédentes et apparaît interchangeable avec λόγος – comparer 29d 2 avec 29c 2, 59c 6 avec 59c 8, 68d 2 avec 67d 2 et 68b 7. Muthos ajoute tout au plus la nuance d’une narration comportant une conclusion, entendue comme achèvement du récit et morale de l’histoire (69b 2).
2 Pour G. Vlastos (« The Disordely Motion in the Timaeus », [1936], repris dans Studies in Plato’s Metaphysics, op. cit., p. 382) et L. Brisson (Le Même et l’Autre dans la structure ontologique du Timée de Platon, [1974], Sankt Augustin, Akademia Verlag, 19942, p. 104), εἰκώς est le mot décisif.
3 Selon le texte du manuscrit A, qui est aussi celui que lisaient Cicéron et Chalcidius. Une variante intéressante, ἀκινήτοις (« inébranlables »), donnée par les mss F, W et Y, n’est retenue par aucun éditeur.
4 Par exemple : « Voilà donc ce que nous supposons (ὑποτιθέμεθα) être le principe du feu et des autres corps, poursuivant selon un raisonnement vraisemblable accompagné de nécessité (κατὰ τὸν μετ’ ἀνάγκης εἰκότα λόγον) » (53d 5, cf. 48e 6 sur l’hypothèse du paradigme). Voir M.I. Santa Cruz, « Le discours de la physique : eikôs lógos », dans Interpreting The Timaeus-Critias, T. Calvo, L. Brisson (eds), Sankt Augustin, Akademia Verlag, 1997, p. 133-140, p. 137.
5 Cf. par exemple Phéd., 67a 8, Rép., III, 406c 1, Tim., 24d 6, 53b 3.
6 Contrairement aux beautés terrestres, la Beauté elle-même n’est pas dans quelque chose (Banq., 211a 8, cf. Rép., VII, 516b 4-5 et Phèdre, 247e 1-3).
7 Cf. Rép., V, 479c et Phil., 24d 3-4 et 24e 7-25a 2.
8 D. Sedley fait observer que des particules sphériques n’auraient pu être décomposées et reformées par réarrangement des mêmes éléments (équivalents des triangles de base). Ce qui conduit à la question de savoir pourquoi Platon fait des quatre solides des réalités instables à la différence des triangles eux-mêmes (Creationism and Its Critics in Antiquity, Berkeley, Los Angeles, London, University of California Press, 2007, p. 117, n. 53). Il eût été possible en tout cas de proposer une physique dans laquelle ce sont les solides construits sur le cercle qui eussent été les tout premiers éléments indestructibles de l’univers.
9 Voir l’introduction historique au livre XII des Éléments d’Euclide par T. Heath (The Thirteen Books of Euclid’s Elements, with Introduction and Commentary, Cambridge, Cambridge University Press, 19252, vol. III, p. 365-368).
10 En lisant θεόν et non θεός, mais la construction de la phrase reste difficile.
11 Sur cet argument singulier, voir les analyses de D. Keyt (« The Mad Craftsman of the Timaeus », Philosophical Review 80, 1971, 230-235), de R. Petterson (« The Unique Worlds of the Timaeus », Phoenix 35, 1981, 105-119), et de G. Santas (« The Form of The Good in Plato’s Republic », Philosophical Enquiries, 1980, repris dans Plato 1, Metaphysics and Epistemology, G. Fine (éd.), Oxford, 1999, p. 247-274).
12 Éventualité qui, de plus, offre un moyen plus sûr pour obtenir la proportionnalité requise, les quatre solides réguliers ne se disposant qu’« autant que faire se peut » selon celle-ci (32b 5, cf. 53e). Voir la discussion du problème et des diverses solutions apportées par les commentateurs par L. Brisson, Le Même et l’Autre, op. cit., p. 367-388.
13 Cf. Du ciel, 279b 32-280a 1, cf. 280a 29, Phys., 251b 14, Mét., 1172a 2, De l’âme, 406b 26.
14 Dans une autre perspective, les Lois soutiennent également cet ordre de génération : ψυχὴν μὲν προτέραν γεγονέναι… σῶμα δὲ δεύτερόν τε καὶ ὕστερον (896c 3 ; cf. 896 a 6 et surtout 967d 6-7).
15 P. Hadot, « Physique et poésie dans le Timée de Platon », Revue de Théologie et de Philosophie 113, 1983, 113-133, repris dans Études de Philosophie Ancienne, Paris, Les Belles Lettres, 1998, p. 277-305, p. 296 (cf. p. 283-288).
16 Voir mon article « D’une causalité démiurgique en cosmologie et en éthique », dans Plato’s Philebus, J. Dillon, L. Brisson (eds), Sank Augustin, Academia Verlag, 2010, p. 342-347.
17 H. Cherniss, Aristotle’s Criticism, op. cit., p. 607, parle de la personnification d’une « logical abstraction, “intelligent causation” in general ».
18 Pour une présentation « mécaniste » de la nécessité « persuadée », voir G. R. Morrow, « Necessity and Persuasion in Plato’s Timaeus », dans Studies in Plato’s Metaphysics, op. cit., p. 421-437, notamment p. 429-431.
19 Cette tension entre une science déductive a priori et une reconstruction rationnelle a posteriori se retrouve dans les lectures divergentes de « l’astronomie véritable » proposées par G. Vlastos (« The Role of Observation in Plato’s Conception of Astronomy », dans Science and the Sciences in Plato, J.P. Anton (ed.), New York, 1980, p. 1-30) et A.P.D Mourelatos (« Plato’s “Real Astronomy” : Republic VII. 527 D-531 D », ibid., p. 33-73).