Dépassements

1Le point commun de toutes celles et ceux qui remédient tient à l’acceptation de ce principe, qu’il faut certainement ajouter à la liste des règles de rencontrologie : « Dans chacune de nos activités, ce que nous fabriquons nous dépasse1. » Ce qu’a vécu Betty Hill la dépasse. Est-ce fabriqué par elle ? Ce n’est pas fabriqué par elle, car elle est sincère en son discours. Ce n’est pas fabriqué par elle, mais c’est un coup de son imagination qui a produit une effiction inédite par l’imaginaire ambiant de son époque. C’est donc presque comme si c’était fabriqué par elle. Par sa manière de remédier. Il y a eu une situation qui a dépassé tous celles et ceux qui ont contribué à cette fabrication et qui en ont vécu l’expérience. Le coup de l’imagination a été un coup de remédiation.

2Si elle n’a rien fabriqué, s’il ne lui est rien arrivé, si elle n’a pas fait exprès, si elle n’a pas voulu cette action, elle n’a alors rien décidé volontairement pour sa vie future. Voici pourquoi il y a besoin d’une nouvelle discipline psychologique, connectée au futur, connectée à la volonté, qui vienne équiper la volonté avec des nouveaux concepts. La psychologie prédifictionnelle. Il faut redonner de la volonté à Betty Hill.

3Mais pourquoi donc est-ce important, la volonté ? Parce que tous celles et ceux qu’emportent des rencontres sentent leur volonté leur échapper. Parce qu’en remédiant, nous acceptons le dépassement de notre volonté. Parce que c’est mieux pour nos vies et pour qu’il nous arrive de croire que nous avons une volonté.

4Comment se fabrique cette volonté ? Par l’usage maximal de la pensée. Par le jeu avec nos fictions, et par la possibilité de se les inventer, de pouvoir les vivre et les incarner.

5Il est arrivé un évènement à Betty Hill, une rencontre à laquelle elle n’a pas compris grand-chose. Ça a été l’arrivée soudaine d’une action inédite. Qui avait tout à voir avec de la fiction et avec l’usage que l’on en fait. Bien plus qu’avec sa volonté.

6Et pourtant, la volonté de Betty Hill insiste à s’affirmer à travers tout ce qu’elle a dit et fait. Simplement, sa rencontre l’a poussée à admettre que sa volonté se trouvait dépassée par ce qu’elle avait vu, vécu, dit, fait, subi et fabriqué.

7En ce sens, l’expérience de Betty Hill est à relier avec celle de Nastassja Martin. De relier le réel. De se dépêtrer avec les phénomènes qui nous surviennent. Le réel, cette nuisance conceptuelle, nous empêtre. Afin de ne plus avoir affaire à l’usage de ce concept, l’H.M.O. peut apprendre à relier, à se relier, avec toutes les Entités Terrestres, et avec les E.T. de l’Espace. Et ainsi, passer du réel au relié.

La politesse de s’occuper et d’être préoccupé, jusqu’à soucouper

8Ceci pensé, qu’en faisons-nous ?

9Comment procéder ?

10Il faudrait un dispositif !

11Un dispositif serait l’intermédiaire qui permettrait.

12Mais attention alors aux effets du dispositif.

13Un dispositif est un moyen. Il permet de remédier et de relier.

14Le dispositif va être un intermédiaire. Par cet intermédiaire, l’autre ne va pas être identique à ce qu’il est. Une rencontre, ce n’est pas rencontrer l’autre tel qu’il est lui-même. C’est rencontrer l’autre avec moi. L’autre dans la rencontre, pas l’autre tel qu’en lui-même. Pour rencontrer un chimpanzé, il y avait besoin de l’humaniser.

15Le monde est plein. Mais nous pouvons encore continuer à le remplir. Une rencontre, c’est toujours pour ajouter. La rencontre ajoute à ce qui est déjà. On ne retire rien pour effectuer une rencontre. Au contraire, on ajoute une couche d’apparences. On s’habille pour la rencontre. On n’effectue pas une rencontre nu. Nous ne rencontrerons pas nus de nous-mêmes. Nous rencontrons aussi avec nos artifices, avec nos dispositifs, avec nos fictions.

16Il n’y a aucune vérité dans une rencontre. Il y a des parades et des paravents. Des intermédiaires. La vérité est une nuisance conceptuelle. Et il n’y aura pas de vérité, claire et distincte, que nous pourrons tirer d’une rencontre. Plutôt des confusions. Aucun savoir n’est sûr. Nous serons uniquement occupés, et préoccupés. Et ce sera bien suffisant.

17La rencontre nous fait devenir plus raisonnables, car plus modestes. Nos énoncés n’oseront plus nous influencer comme s’ils étaient seuls au monde. La rencontrologie sert au moins à cela, savoir qu’avec nos énoncés, il y a les énoncés des autres. Règle de rencontrologie : il faut apprendre à être polis envers les autres dans nos énoncés.

18Être polis. Tout nous y invite avec la catastrophe climatique et écologique. La politesse consiste à bien nommer. Et à tenter de rencontrer.

19C’est ce à quoi nous invite Natasha Meyers :

Ce n’est clairement pas le moment pour se faire des ennemis. […] Je propose que nous sortions de ce tragique fantasme anthropocentrique, pour nous enraciner fermement dans cette époque que je veux appeler le Planthropocène. Le Planthropocène nomme une ère ambitieuse, une ère qui doit être marquée par un profond engagement pour la collaboration. Ceci est un appel à changer les termes de la rencontre. […] Nous avons donc besoin d’une planthropologie2.

20Comment faire rencontre avec des plantes ? Le planthropocène nous oblige à la rencontrologie. Avec les plantes.

21Je cite Natasha Myers afin de me prouver que je ne suis pas seul. Si je peux élaborer des pensées hétérodoxes à nos conceptions encore si proches et bien souvent actuelles, c’est qu’il y a des penseuses qui le permettent, parce que, en les lisant, on se sent moins seul. Et c’est aussi que ces penseurs nous font envisager des rencontres avec nos dissemblables : ours, chimpanzés, plantes, E.T.3 Ces rencontres nous aident à aller plus avant, à se déplacer, à aller aux limites. Nous sommes faits pour rencontrer, mais nous ne savons pas rencontrer.

22Planthropocène. Nos conceptions du non-humain sont encore trop étroites et excluantes. Les savants et les chercheurs pensent désormais avec les non-humains. Il y a des non-humains partout ! Les singes, les poissons, les poulpes ouvreurs de bocaux, les chimpanzés appuyeurs de boutons, les forêts, les arbres des forêts équatoriales, les champignons, les robots, les esprits, les entités invisibles, les radionucléides, les bosons de Higgs, etc. Les listes s’allongent chaque jour, mais, de manière très étonnante, qui me surprend, on n’y trouve guère d’E.T. même si, de toutes les entités non-humaines, ce sont les plus inédites, parce que les plus inconnues. Tout ce non-humain, comment en rendre-compte avec la langue ? Pierre Guyotat va nous être utile. Voici ce qu’écrit le philosophe Ray Brassier, un des fondateurs du réalisme spéculatif, en lisant Eden, Eden, Eden de Pierre Guyotat :

Ce serait une erreur de penser que Guyotat substitue une perspective non-humaine au point de vue humain, ou qu’il a simplement aboli la distinction entre humain et non-humain. En fait, l’écriture de Guyotat opère une double abstraction : de l’humain au non-humain et du non-humain à l’humain. Elle ne mélange et ne confond pas simplement l’humain et le non-humain (même si cela fait partie de sa stratégie) ; mais elle prétend encore moins à atteindre une vision absolue, sans perspective, de la réalité en elle-même. Elle construit une nouvelle sorte de perspective4, jusque-là inconnue dans l’écriture, où les points de vue humains et non-humains sont pliés l’un dans l’autre5.

23Mais que se passerait-il si, à l’âge du Planthropocène, on s’avisait d’effictionner une rencontre entre des E.T. qui ne se rencontrent jamais ?

24Je note ce moment, rapproché de quelques mois, en 1961, où une rencontre inédite aurait pu avoir lieu, dans une fiction planthropocénique, non pas au sens où les plantes y domineraient la scène, mais parce que les rencontres y pousseraient côte à côte, sans préjugés de races, de classes, ni d’espèces.

25Le 31 janvier 1961, le chimpanzé Ham est envoyé dans l’Espace par la NASA. Depuis novembre 1957, et la mise en orbite de la chienne Laïka par les Soviétiques, les deux puissances concurrentes expérimentent l’Espace par l’intermédiaire de plusieurs souris, quelques chiens et différents singes.

26Ham est le premier chimpanzé décollant en fusée afin de vérifier là-bas la possibilité qu’y dure un peu la vie. Il amerrit vivant.

27Quelques mois après, Betty Hill et son mari Barney vivent ce qu’ils pourront raconter seulement deux années plus tard, un enlèvement par ce qu’ils appelleront des extraterrestres.

28La même année, il y eut un chimpanzé spatial et une abduction humaine par des E.T. En 1961, les Américains, en pleine possession de leur puissance, ont envoyé un chimpanzé dans l’espace avec une fusée. La même année, deux Américains ont dit avoir été enlevés par des E.T. Ils disent être montés à bord de la soucoupe volante, et avoir été emportés dans l’espace.

29Qu’a su Ham de nos intentions ? A-t-il su qu’il avait été dans l’espace ? Qu’a-t-il pu comprendre de ce qui se passait au juste ?

30Qu’ont pu comprendre Betty et Barney Hill de ce qu’ils ont rencontré ? Ils ont mis deux années avant de pouvoir dire ce qui leur était arrivé.

31Il faudrait faire cette hypothèse, avec Aimé Michel et Pierre Lagrange, nous serions les chimpanzés des E.T. Nous ne serions pas en capacité de compréhension du phénomène de la rencontre6.

32Et si nous avions proposé au chimpanzé Ham de retourner dans l’Espace ? Comment aurait-il pu anticiper et exprimer ce que cela lui fait ? Serait-il reparti volontairement ?

33Les savants américains de la NASA l’ont envoyé non pas en tant que représentant de son espèce, mais en tant que ressemblant au corps d’un homme spationaute, afin de vérifier que le corps serait capable de résister à l’Espace et continuerait de fonctionner avec usage du cerveau. Ham avait des tests logiques à effectuer pendant son voyage spatial. Il n’a jamais été le représentant des chimpanzés. Nous n’avons pas utilisé son savoir. Il fut, là encore, humanisé. On s’en est servi comme d’un équivalent d’homme.

34Que se serait-il passé si nous n’avions pas écrasé ses particularités ? Est-ce que Ham aurait eu un partage d’expérience avec d’autres chimpanzés ? De quel type ?

35Je pense à Betty Hill. Je pense aux premiers abductés, qui ne pouvaient pas partager. A-t-elle pensé à ce que Ham a compris ? Se sont-ils rencontrés dans ses pensées ? Dans son imagination ? Se rencontrent-ils maintenant, ici, dans cette fiction théorique que j’esquisse à leur propos ?

36Betty Hill ne l’a peut-être pas pensé ainsi, mais elle aurait eu de quoi se laisser embrouillée par cette hypothèse, plausible, qui ne devrait jamais être balayée avec dédain par ceux qui sont trop certains de leur savoir : pourrions-nous être les chimpanzés des E.T.7 ?

Conception / confusion

37La rencontrologie est un état de conception. Elle n’est pas une discipline, elle ne peut pas et elle ne veut pas être une discipline. Le rencontrologie est une mise en élan théorique. Elle est animée par un refus de s’institutionnaliser en tant que discipline. Car l’institution, malgré ses mérites et ses nécessités, est ce qui sans cesse bloque, freine, délégitime, toutes les formes de rencontres, comme toutes les formes de pensées hétérodoxes.

38Les experts sont précieux, mais il faudrait toujours faire bégayer les experts. Un expert qui ne bégaye pas est dangereux. C’est un sachant qui refuse le risque constant, la menace omniprésente et intimidante des savoirs hétérodoxes. Règle de rencontrologie : plus on pense en savoir, plus on se mettra en position de bégayer, d’être terriblement troublé.

39Ne jamais être sous l’emprise d’une seule théorie, ni d’une seule méthode, ni d’une seule signification des mots dont on hérite ou qu’on se donne. Rechercher tous azimuts, et pousser aux limites. Pousser au-delà. Sinon, c’est pour rien. Sinon, ce n’est pas assez.

40C’est pourquoi j’essaie de penser avec les E.T. C’est pourquoi je les désigne par les lettres E.T., afin de ne pas savoir. Pour avoir à me demander à chaque emploi si je vise, ou si j’atteins, les Extra-Terrestres, les Espèces Technologiques, les Espèces Terriennes, les Entités Terrestres. Je m’oblige ainsi à la non-exclusion. Par un geste de confusion.

41La rencontrologie est un processus de confusion érigé en état de conception.

Entroplie

42Règle de rencontrologie : toute rencontre augmente l’entroplie.

43L’entropie est un concept établi par des disciplines scientifiques. Il se fait réapproprier par celles et ceux qui n’ont pas peur des confusions. Son étymologie provient du grec. Elle signifie transformation. L’entropie caractérise le niveau de désorganisation et d’utilisabilité d’un système8.

44L’entroplie ajoute à l’entropie des plis.

Entroplie = entropie + plie (plier l’entropie)

45Ces plis forment des interstices d’inconnus entre nos certitudes. Ces plis devraient avoir raison de nos formes.

46Quel serait l’évènement le plus considérablement inédit auquel nous puissions assister tout en continuant encore d’exister ? C’est vers cet événement que tend l’entroplie. Ce serait le maximum de désordre et de confusion, celui de l’incompréhensible, de tous les inconnus. Comment rassembler et faire sens et sensation avec ? Ce serait l’épreuve du vertige surphysique pour plusieurs entités humaines, des professeurs et des chercheurs, juste avant leur expérience de personne collective.

47L’entroplie accomplit le pli commun de ce qui pense comme un. Règle de rencontrologie : une rencontre a lieu lorsque plusieurs entités arrivent à penser commune autre.

48L’entroplie mesurerait l’état de désindividualisation et de désorganisation des systèmes après une rencontre hétérodoxe. Et nous savons par les historiens à quel point l’arrivée de quelques Européens sur le continent américain a fait subir un état d’entroplie maximale aux diverses populations habitant ces espaces.

J’attends, le glissement, c’est l’entroplie tant pis, et ainsi j’ai amalgamé l’hétérodoxie maximale ! Que n’en serai-je ?

49Une grande mélancolie avant un changement d’état. Des professeurs et des chercheurs vont se transformer en personnes collectives, et alors peut-être tout changera. Ils sont en attente.

50L’entroplie pourrait qualifier aussi l’émotion de celui qui sent qu’il va rencontrer, qui est en attente. L’attente de la rencontre, des émotions, des sensations.

51On ne rencontre pas sans les sensations9. Il y a de l’émotion. Il y a de l’entroplie.

52Et comment alors rendre compte ? Comment établir le compte-rendu d’une rencontre ? Comment mesurer le degré d’entroplie ? Il faudrait faire usage aussi de la fiction10. La possibilité du compte-rendu passe par la théorie fictionnelle et la fiction théorique.

Un cas d’entroplie

53Voici une possibilité, en faisant usage de l’entroplie, cette nouvelle émotion, cette attente de la rencontre, de se sentir désorganisé en soi. Dépasser la simple organisation de ses organes, sortir de son quotidien organique, pour cet autre à rencontrer.

54Cela passe par un récit, dont le compte-rendu s’élève à la puissance de la fiction. Cela passe par une figure, dont la mise en scène a peut-être vertu d’effiction.

À quel moment cela avait-il commencé ? Comme il ne savait répondre aux questions exorbitantes du soir, il sombra.
Un vertige surphysique le mit en l’état d’une décantation de laquelle il ne voulait sortir qu’après avoir résolu les problèmes. Ou du moins, c’était présent, en son corps et à même ses fictions. Non un pressentiment dont il se méfiait, mais une intuition. Il aurait voulu que tout soit différent. Qu’importe parfois, il vivait.
Assis sur un fauteuil, cuir rugueux marron de vieille vache, ses yeux vagues vers le salon, désoccupé à voir dans l’entièreté. Serait-ce possible encore de trouver des solutions ? Quand tout ensemble se mêlent les décisions et les possibilités, le flou des énoncés. Qui pourrait-il qui serait lui ?
Il ne sait, mais cela viendra. Que cela survienne ! Comment devra-t-il faire, qui soit par lui, mais aussi avec tous les autres ? Les Intelligences-non-Acheiropoïètes, les corps transformés et les peuples non-modernes. Le nombre n’en finit pas de se dénombrer, il en est à des milliers, et les concepts généraux achoppent contre les singularités. Il y a lui et lui, et lui et eux. De plusieurs, ils sont déjà un groupe et une entité distincte. Assez entropliée pour qu’il faille observer les actions dans les détails, pour mesurer les différences. Tous sont là et il les admet. De plus en plus de plis et de replis.
Il les admet en son sein. Il voudrait tant penser avec. La tâche le contraint à la fulgurance dont il se sent incapable. Caché en lui, plié, l’illégitime, cette erreur psychologique, elle l’empêche. Qu’en ferait-il qui soit lui ? Il ne sait. Il attend. Sa pièce est vivante de son corps, il est là encore, en saurait-il par lui ?
L’attente est longue de la réflexion. Les Baruya formaient une présence, leur transformation était d’une rapidité exemplaire. Ils étaient à la période néolithique en 1940, et la génération d’après déjà scolarisée à l’école des modernes11. Voici ce qui fut fait. Il en était ainsi, et aussi pour les Inuits.
Il le savait. Il en était. Il en était instruit. Les langues se mêlaient, s’emmêlant au point qu’il ne parlait plus. L’effet du vertige… Trop de plis et trop de replis. Le silence de l’entroplie.
Qu’un jour vienne, qu’il se souvienne, le voyage ne disposait plus de l’horizon indépassable. L’aller aux limites, ce leitmotiv définitif, le contraignait à son salon. Parce que s’y trouvait le savoir de toutes les possibilités, le futur serait à admettre de tant de connaissances, il suffisait, oui, de se mettre en état. Il ne serait pas fictionnaire pour rien !
Qu’y aurait-il de quotidien à le rappeler ainsi ? L’entroplie qui était lui et le serait encore tant que de son corps et alors de sa personne, de toutes ses actions et de l’ensemble de ses fictions, il puisse se mettre en état créatif ? Qu’enfin de sa volonté surgisse le maximum de création ! Parce qu’il est encore humain.
La biologie commande impérieusement à toutes ses inclinations et à son échelle de sensations. Son corps est doté, hormis le manque constant de douleurs et de maladies, des mêmes capacités que les corps romains, grecs, chinois, indiens des siècles antérieurs. Sa mort, seulement, sera d’un temps plus lointain de sa vie. Non, il le savait, les enfants disposaient d’une génétique choisie et d’outils à transformation. Il pensait être un des derniers, jusqu’à attendre de n’être plus.
Mais déjà avait commencé, pour lui et quelques-uns dans son genre, un léger débordement de son état, une bribe…
Ou un évènement…
Une action inédite…
Ils ne s’en remettront pas.
Quelque chose s’était passé, qui remettait en question, qui les assurait que continueraient les actions des formes d’intelligences malgré eux. Ou avec eux, c’était selon. Il faudrait qu’ils le décident, prochainement, là, maintenant, à venir, dans les jours et les mois, prochainement. Que de ces solutions qu’ils formuleront, ils soient inclus eux aussi, et leur humanité, alors…

55Lui dont je parle, et avec qui j’invente en fiction, en fiction théorique et en théorie fictionnelle, il est en train de se transformer en personne collective. C’est une de nos possibilités futures, et la rencontrologie aura aussi affaire avec les futurs. Nous y reviendrons.

56Il est en transformation, ce qui lui permettra de rencontrer cet état de la personne collective.

57Je trouve des exemples comme celui-ci dans les cas rapportés par Tobie Nathan. Il dit qu’il est professeur d’ethnopsychiatrie. Je le soupçonne d’être rencontrologue. Il nous prévient, et moi avec vous : « Pour appréhender un autre qui n’est pas un semblable, il faut lui céder notre corps et notre âme, du moins le temps de la rencontre12. »

58Il va falloir s’habituer à des formes de dire. Nous ne rendrons plus compte comme nous l’avions fait jusqu’ici. J’entends encore trop souvent les anciens termes employés de nos vétustes conceptions.