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Fabula agitur

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Malika Bastin-Hammou
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Filippo Fonio
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Pascale Paré-Rey

Pratiques théâtrales et apprentissage des langues et cultures de l'Antiquité : une vieille histoire

Le Groupe de théâtre antique de la Sorbonne ou du « bonheur » de « rendre vivants, complets, des chefs d’œuvre » (Roland Barthes)

Ève-Marie Rollinat-Levasseur

Texte intégral

  • 1 Les archives du Groupe de théâtre antique ont été déposées au département des Arts du spectacle de (...)

1Si le Groupe de théâtre antique de la Sorbonne (GTA) n’a joué de pièces en grec ni en latin mais en français, l’aventure exceptionnelle de cette troupe de théâtre universitaire met en lumière de nombreux enjeux caractéristiques de la pratique théâtrale en contexte scolaire ou universitaire dans le cadre de l’apprentissage des langues – et en particulier dans celui des langues anciennes. L’importance et le retentissement des spectacles donnés ainsi que la longévité extraordinaire du groupe, qui s’est constitué en 1936 pour ne s’éteindre qu’à la toute fin des années 1960, ont permis la conservation de nombreux documents (lettres, documents administratifs, coupures de presses, témoignages, plaquettes pour les représentations1), ce qui offre au chercheur contemporain un corpus riche à étudier – chose rare pour le théâtre universitaire et pour le théâtre amateur. Ces archives sont autant de traces qui témoignent de la façon dont ce groupe a abordé la lecture et la mise en scène des textes anciens. Mais elles dévoilent aussi comment s’articulent la pratique théâtrale et le domaine des études dans le contexte institutionnel d’une université. Ainsi, l’aventure dans laquelle des générations d’étudiants se sont lancés, les difficultés auxquelles ils ont été confrontés, les stratégies qu’ils ont mises en œuvre pour les surmonter sont exemplaires d’une histoire unique tout en illustrant des problématiques récurrentes de la pratique théâtrale à l’école ou à l’université. Nous retracerons rapidement l’histoire du groupe en insistant sur sa création qui a donné l’esprit de la troupe. Puis nous analyserons ses choix pour la mise en scène du théâtre antique et ce que ces partis pris révèlent à la fois du rapport à l’Antiquité et du rapport au théâtre. Enfin, l’étude de l’organisation et du fonctionnement de la troupe nous fera évoquer la façon dont elle a été perçue et ce qu’elle a pu représenter sur les plans institutionnel, intellectuel et artistique.

2L’histoire du Groupe de théâtre antique de la Sorbonne est étroitement liée à celle de l’université de Paris des années 1930 jusqu’à son démembrement en application de la loi Faure. Son étude conduit à reconsidérer l’image de la Sorbonne qui, après 1968, a semblé incarner des modes d’enseignement traditionnels et conservateurs ainsi qu’un rapport au savoir tourné vers le passé : car elle témoigne non seulement de ce que l’université de Paris a longtemps été un lieu d’innovations pédagogiques qui conduisaient les professeurs et les étudiants à entretenir des relations familières et chaleureuses, mais aussi de ce que des liens y étaient tissés avec les avant-gardes artistiques.

  • 2 Cohen, 1956, p. 436.

3La fondation même du groupe, nommé rapidement GTA, a été rendue possible par un contexte favorable. En effet, l’université de Paris a vu naître plusieurs troupes au milieu des années 1930. Un Groupe de théâtre moderne a d’abord été lancé et parrainé en 1933 par Félix Gaiffe, professeur de littérature dont la chaire prend alors le titre d’Histoire des techniques du théâtre : cette troupe marque les esprits mais disparaît rapidement, Félix Gaiffe étant mort prématurément la même année. Cependant, un autre groupe de théâtre, les Théophiliens, était fondé parallèlement sous l’égide du grand médiéviste Gustave Cohen pour jouer des œuvres du répertoire du Moyen Âge pendant plus de vingt ans. Cette troupe et son mentor, qui ont eu un rôle déterminant dans la création et le développement du GTA trois ans plus tard, lui sont intrinsèquement liés, raison pour laquelle nous nous attardons ici sur elle. Gustave Cohen a raconté maintes fois et avec délectation les débuts de cette troupe alors qu’il donnait cours à ses étudiants de licence sur Le Miracle de Théophile, texte par lequel les étudiants se faisaient « “étendre” aux examens » : leur ayant asséné que « nos amphithéâtres ne sont pas là pour la dissection des cadavres, mais pour la Résurrection des Morts » – formule qu’il aimait à reprendre –, il sut les inciter à « incarn[er] les divers personnages du Miracle » pour les jouer « dans un décor approprié2 ». Des étudiants et des étudiantes lui ont alors demandé de leur écrire une adaptation « assez modernisée pour être compréhensible » et pour être jouée.

  • 3 Ibid., p. 428.
  • 4 Cohen, 1953 ; texte tapuscrit français dans les archives du rectorat de Paris (20020476/348).

4Gustave Cohen, qui les réunissait régulièrement chez lui, a invité Léon Chancerel, ancien de la troupe de Jacques Copeau et fondateur des Comédiens routiers au sein des scouts de France, inlassable promoteur du théâtre amateur, chantre du renouvellement du théâtre : Chancerel a offert à cette jeune troupe de théâtre universitaire certains de ses comédiens pour les aider dans leur travail théâtral. Cohen, qui a obtenu de nombreux appuis au sein de l’université de Paris, est parvenu à faire jouer Le Miracle de Théophile dans la salle des thèses (aujourd’hui la salle Louis Liard), devant un public enthousiaste composé de professeurs, d’étudiants, de personnalités mais aussi des grands rénovateurs du théâtre de l’époque, par exemple Gaston Baty3. À partir de là, les Théophiliens n’ont cessé de jouer, sont sortis des amphithéâtres de la Sorbonne, ont fait des tournées, en France et à l’étranger : en 1952, au Brésil, ils ont ainsi été vus « par des foules évaluées à plus de 20 000 personnes4 », ce qui donne la mesure de leur réputation. D’emblée, les Théophiliens ont su articuler la lecture des textes médiévaux à la recherche en littérature tout en s’investissant dans une authentique approche esthétique du fait théâtral : leur travail de mise en scène a servi de mise à l’épreuve des thèses que Cohen avançait sur l’agencement des décors et sur le jeu médiéval ; ils se sont dégagés des codes du théâtre commercial et de ceux des fêtes de bienfaisance pour se lancer dans des expérimentations scéniques inédites.

  • 5 Cohen, 1956, p. 438.

5C’est précisément à la suite de représentations des Théophiliens qu’en janvier 1936, deux étudiants, le jeune Roland Barthes et son camarade Jacques Veil, sont venus trouver Gustave Cohen pour lui faire part de leur « projet de fondation d’un groupe antique5 ». Celui-ci les a encouragés et aidés avec tous les appuis que pouvait gagner sa notoriété pour faire connaître la troupe et mettre son travail en valeur. Il leur a offert immédiatement le concours des Théophiliens – c’est pourquoi les histoires des deux groupes ont des zones de porosité. Il les a mis en contact avec des proches de Chancerel et de Copeau, notamment Maurice Jacquemont, comédien et metteur en scène, ce qui a engagé ces étudiants dans un certain rapport au théâtre, fait d’exigences à la fois intellectuelles, techniques et esthétiques. Cohen les a aussi invités à se tourner vers le grand traducteur Paul Mazon, professeur de langue et littérature grecques à l’université de Paris, membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres de l’Institut de France : depuis ce moment jusqu’à sa mort en 1955, Paul Mazon a toujours soutenu et suivi le GTA, répondant aux questions que pouvaient lui poser les étudiants, les orientant dans leurs lectures, les recommandant auprès de différents collègues spécialistes de telle ou telle question archéologique. Ce qui frappe aujourd’hui, c’est la dimension que le GTA a prise dès sa fondation : les statuts ont été rapidement déposés ; Roland Barthes en a été le premier président et n’a pas ménagé sa peine – comme en témoigne une abondante correspondance avec les différents interlocuteurs permettant de mener à bien le projet ; un comité directeur a été créé et les répétitions, comme les réunions de travail, n’ont cessé de se succéder.

  • 6 Après-guerre, Jacquemont a été l’un des acteurs de la décentralisation théâtrale, en participant à (...)
  • 7 Jean Dasté a élaboré son jeu théâtral auprès de Copeau et de Chancerel notamment par le travail du (...)
  • 8 Lettre manuscrite de Léon Chancerel à Roland Barthes, s. d. [1936], BnF Arts du spectacle, cote 4-C (...)
  • 9 Ibid.
  • 10 Cohen, 1956, p. 438. Voir aussi les articles de presse recueillis par Granboulan-Peltier, 2004.
  • 11 Voir Ertel, 2004, p. 322.

6Cette organisation lourde a permis à la troupe des « Antiques » de présenter dès 1936 une adaptation qu’ils ont eux-mêmes élaborée des Perses d’Eschyle. La mise en scène était de Maurice Jacquemont, ancien Comédien routier auprès de Chancerel et membre des Copiaus de Jacques Copeau6. La musique était créée par Jacques Chailley, alors jeune musicologue et compositeur, déjà auteur des partitions pour les Théophiliens. Les costumes étaient dessinés par l’artiste Jean Bazaine mais réalisés par les étudiants eux-mêmes. Les masques étaient conçus par Jean Dasté7, proche lui aussi de Copeau, et fabriqués par les membres du groupe. Cette mise en scène a donc à la fois été entièrement portée par les étudiants et soutenue par les professeurs de l’université de Paris ainsi que par l’avant-garde théâtrale et artistique. La première représentation des Perses a été donnée devant plus de mille spectateurs, non dans un théâtre ni dans un amphithéâtre, mais en extérieur, dans la cour de la Sorbonne – Léon Chancerel a dû lui-même faire la queue pendant une heure pour accéder à sa place8. Elle a connu un succès retentissant : elle a « passionné » les spectateurs, ainsi que Chancerel l’a immédiatement écrit à Barthes pour féliciter la troupe du « magnifique effort dont les conséquences p[ouvaient] avoir tant d’importance dans la pleine et profonde rénovation en cours de la vie dramatique française9 ». Gustave Cohen, lui, a évoqué le « long frisson10 » qui a parcouru le public devant cette représentation : elle rompait avec les codes scéniques alors en usage en France et avec les lectures psychologisantes des textes anciens. De fait, le rôle clé donné au chœur et le jeu scénique impliqué par le port des masques ont transformé la lecture de la tragédie11. Le GTA a donc semblé lui aussi d’emblée renouveler l’art théâtral.

  • 12 Voir Douche, 2012.
  • 13 Voir L’Arche, numéro spécial, Le Groupe de théâtre antique de la Sorbonne, 1962, p. 32, archives du (...)
  • 14 Que le groupe monte des textes aux programmes des cours de l’université figure même dans ses statut (...)

7Comme les Théophiliens, le Groupe de théâtre antique a continué de jouer en Sorbonne tout en entamant de grandes tournées en France et à l’étranger : tout au long de son histoire, cette troupe composée d’une trentaine d’étudiants a amplement participé au rayonnement de l’université de Paris. Si Les Perses est resté le spectacle majeur du GTA, qui l’a inlassablement remis en scène pendant plus de trois décennies, et même pendant la Seconde Guerre mondiale, la troupe a peu à peu ajouté d’autres pièces à son répertoire : Amphitryon de Plaute en 1938 dans une adaptation donnée par le grammairien Alfred Ernout et sur des partitions de Maurice Emmanuel, compositeur alors réputé pour sa connaissance des rythmes de l’Antiquité12 ; en 1939, Antigone de Sophocle (traduction des étudiants eux-mêmes) ; en 1947, Agamemnon et, en 1949, les Choéphores (traductions de Paul Mazon) ; en 1950, Médée d’Euripide (traduction de Louis Méridier) ; en 1957, Le Soldat fanfaron de Plaute ; en 1958, Les Sept contre Thèbes d’Eschyle (traduction d’un ancien du groupe, Jacques Lacarrière) ; en 1961, L’Orestie d’Eschyle ; puis encore des textes médiévaux, pour poursuivre le travail des Théophiliens dont la troupe avait disparu peu après la mort de Gustave Cohen en 195513. Autant d’œuvres aux programmes de licence ou d’agrégation14, autant d’œuvres réputées difficiles à jouer, longues et exigeantes : un répertoire que des compagnies professionnelles, soucieuses de leurs gains, ne pouvaient se permettre de créer.

  • 15 Voir Ertel, 2004, p. 324. La plasticité de l’interprétation politique des œuvres jouées, Les Perses(...)

8Si le GTA a donné quelques comédies latines, la troupe s’est surtout consacrée aux tragédies, considérant que ce répertoire était plus accessible à des amateurs que les comédies, lesquelles requièrent des acteurs une technique de jeu plus élaborée et plus maîtrisée. Les pièces phares n’ont cessé d’être reprises, mais toujours dans de nouvelles mises en scène : les générations d’étudiants qui se succédaient ont eu soin de réinterroger les textes qu’ils montaient, s’inspirant des travaux passés du groupe, aidés souvent par des anciens, mais toujours animés par l’envie d’aller plus loin dans la compréhension et l’interprétation des œuvres qu’ils portaient à la scène. Aussi le GTA ne s’est-il pas figé : il a pu sembler épouser son temps quand le retour aux sources était prisé15 mais aussi rester une troupe d’avant-garde jusqu’à la fin des années 1960, pendant la guerre d’Algérie et au début des mouvements de contestations étudiantes, alors même qu’il continuait à jouer des textes antiques.

  • 16 Voir dans ce volume l’article de A.-S. Noel.

9C’est que la recherche sur les textes antiques comme sur les textes médiévaux a conduit ces troupes universitaires à rompre avec les habitudes spectaculaires d’un public formé au théâtre classique et familier du jeu conventionnel de la plupart des compagnies professionnelles. Ces textes sont en effet radicalement éloignés de la culture du xxe siècle. Ils ont été écrits dans des langues qui ne sont plus pratiquées, qu’il faut traduire, et posent des difficultés irréductibles de compréhension. Longtemps transmis par manuscrits, alors que les textes ont été conservés sous forme écrite après leur création scénique, ils sont souvent lacunaires et leur établissement se fait à force d’hypothèses philologiques. Les représentations pour lesquelles ils ont été composés s’inscrivaient dans un contexte politique et religieux dont nous sommes désormais coupés. Ces œuvres ont été conçues pour un spectacle total, fait de paroles, chants, danses et musiques tout à la fois, non pas pour un théâtre de texte comme leur seule étude pourrait nous conduire à le croire. Enfin, ces spectacles, élaborés par des citoyens pour leur cité avaient en quelque sorte une dimension populaire : c’est précisément ce qui a pu enthousiasmer tous ceux qui, des années 1930 aux années 1960, espéraient que la pratique de nouvelles formes théâtrales pourrait avoir des incidences sociales et politiques, participer à la pleine formation des citoyens, et même construire l’Europe16.

  • 17 Cohen, 1956, p. 17.

10L’influence du GTA et des Théophiliens aura donc pu être double. Ils ont participé pleinement à la formation des spectateurs et au renouvellement du théâtre français, dans l’esprit du Cartel et du Théâtre populaire. En effet, ces années de la création du groupe ont été aussi celles du Cartel : le metteur en scène Louis Jouvet, en association avec Gaston Baty, Charles Dullin et Georges Pitoëff, s’érigeant contre les pratiques commerciales des théâtres de boulevard, s’est attaché à promouvoir l’interprétation scénique et esthétique du théâtre de texte. Puis, après-guerre, cela a été la grande aventure du Théâtre populaire soutenue par Jeanne Laurent, alors sous-directrice des spectacles et de la musique à la direction générale des Arts et Lettres, et portée notamment par Jean Vilar avec le festival d’Avignon et par la création des premiers centres dramatiques nationaux : cette politique a cherché à démocratiser le théâtre et à former le public en lui offrant des mises en scène exigeantes des grands textes du répertoire ou d’œuvres contemporaines. Les Théophiliens, comme très vite le Groupe de théâtre antique, ont entretenu des liens étroits avec ces acteurs du renouveau du théâtre français. Ainsi, tout amateurs qu’ils étaient, les Théophiliens et les « Antiques » ont contribué à faire entrer le théâtre français dans l’ère de la mise en scène. Dans le même temps, Cohen pouvait louer leur façon d’avoir rendu « une littérature qu’on croyait morte » « vivante, agissante, émouvante17 » : ils avaient réussi à arracher ces chefs-d’œuvre aux seules dissections des érudits ou aux exercices scolaires pour les donner à « aimer » par les étudiants et par un public plus vaste.

  • 18 Ibid. p. 325.

11Comment les étudiants du GTA ont-ils mis en scène ces œuvres ? Ils n’ont cessé d’alterner entre des adaptations de traductions existantes et des traductions qu’eux-mêmes faisaient des textes qu’ils travaillaient. Dans les deux cas, cela supposait une lecture fine des textes sources et une écriture qui pouvait se prêter à une mise en voix dans un espace scénique. Aussi l’établissement du texte s’accompagnait-il de discussions entre les membres du groupe ainsi qu’avec leurs professeurs, Paul Mazon d’abord, Louis Séchan, puis Fernand Robert. Le travail de mise en scène de ces textes conduisait ainsi les étudiants à demander à leurs maîtres de s’expliquer ou de préciser leurs choix de traduction ou, inversement, permettait à ces professeurs de passer à l’épreuve de la scène leurs hypothèses philologiques. Des recherches en archéologie, en histoire de l’art, en musicologie venaient étayer les choix de mise en scène : ainsi peut-on trouver dans les archives de Maurice Jacquemont une série de photos avec des indications sur les sources, par exemple des vases antiques, ou des références historiques et civilisationnelles permettant de guider la création des costumes d’Antigone. Dans la mythologie du GTA, ces « recherches collectives » sont fondatrices. Mais, selon les époques, ces discussions ont engagé tout le groupe ou n’ont concerné que quelques membres : lorsque Évelyne Ertel en a fait partie, en 1960, seuls quelques-uns s’adonnaient à ce travail sur le texte pendant que les autres se répartissaient les diverses tâches pour mener les spectacles à bien18. Cependant, c’est bien par ces inlassables recherches que le GTA a été pleinement un théâtre universitaire, liant étroitement la pratique théâtrale au renouvellement de l’étude des textes.

  • 19 Texte manuscrit non signé, projet de note d’intention du groupe, s. d. [1949], archives du rectorat (...)
  • 20 Note pour la presse, s. d. [vers 1956], archives du rectorat de Paris 20020476/348.
  • 21 Chailley, 1962, p. 11-12, archives du rectorat de Paris 20020476/348.
  • 22 Ibid. p. 12.

12L’objectif de mettre en scène ces textes antiques au xxe siècle a fait immédiatement surgir une tension entre une volonté de reconstitution archéologique du théâtre grec ou latin et une adaptation à la réalité de la scène contemporaine. Cette double contrainte était parfaitement perçue et commentée dans les programmes distribués lors des représentations. Mais elle était toujours résolue par l’affirmation que le groupe œuvrait à « respecter à la fois le texte et la rampe, transmettre l’esprit sans trahir la lettre19 ». Les Antiques n’ont cessé d’affirmer qu’ils faisaient un travail de reconstitution par souci de vérité mais que l’éloignement historique et l’absence de données archéologiques fiables et complètes les conduisaient à chercher à restituer « l’esprit de la tragédie » ancienne et non « sa forme extérieure20 ». Un exemple donne la mesure de l’entreprise : c’est à Jacques Chailley, encore étudiant en musicologie en 1936 déjà spécialisé dans la musique médiévale, que la troupe a demandé de composer les partitions pour plusieurs de ses tragédies, Les Perses, Antigone, et Agamemnon. Celui-ci a expliqué comment il était parti d’une analyse de textes grecs et de la structure des tragédies pour construire sa partition, comment il avait suivi « les indications » prodiguées par Platon et Aristote pour faire chanter le chœur à l’unisson, sans accompagnement, de façon monodique, comment il avait encore suivi « les données rythmiques de la scansion grecque » pour établir le schéma rythmique de sa musique. Mais il a aussi ajouté avoir composé pour ces tragédies en refusant de « faire œuvre purement archéologique », en les abordant « en compositeur et en créateur » – on voit derrière ces termes ce qu’il pouvait y avoir d’enjeux pour le jeune compositeur qu’il était –, et tout en « restituant avec le respect dû à une œuvre immense l’atmosphère musicale qui fut celle de sa conception21 » ! C’est pourquoi Jacques Chailley a dit finement n’avoir voulu reconstituer ni aulos ni cithare. Il avait choisi de composer pour les ondes Martenot, instrument électronique alors des plus récents (conçu en 1917 et présenté à l’Opéra de Paris en 1928) et très prisé par les jeunes metteurs en scène qui avaient des visées esthétiques : « il ne nous déplaît pas de voir le plus moderne des instruments appelé à rejoindre les plus anciens comme symbole de l’alliance que nous avons recherchée entre les plus strictes données de la tradition et l’esprit d’aujourd’hui que nous nous sommes efforcés d’y faire pénétrer22 ». Ces propos, exemplaires des discours tenus de façon récurrente sur les partis pris esthétiques du groupe, illustrent l’ambiguïté fondatrice du travail du GTA, toujours partagé entre son souci de redonner vie aux textes anciens et le désir de faire de leurs mises en scène un terrain d’expérimentations théâtrales.

  • 23 Voir Brasillach, 2003, p. 137-156 et Gignoux, 1984.
  • 24 Interview d’A. Steiger par Y. Lorelle dans Combat, 28 février 1961, « Réveil du théâtre antique ? S (...)

13Car le choix du GTA de se faire accompagner par de jeunes artistes déjà engagés dans des recherches esthétiques et de les solliciter encore lorsque certains sont devenus des professionnels reconnus, tels Chailley, Jacquemont, Dasté ou Bazaine, mais aussi Maurice Jarre, Jean Gillibert, Bertrand Jérôme, Jacques Lacarrière, est un signe fort de sa volonté d’inscrire sa pratique théâtrale dans la création artistique qui lui est contemporaine. Sans doute certains membres ont-ils eu la tentation de perpétuer la mémoire des créations passées et de reprendre textes, décors, masques ou costumes qui avaient assuré la gloire de la troupe. Sans doute le fait de faire appel, même après la guerre, à des artistes dans la lignée de Copeau a-t-il participé à donner une identité esthétique forte au groupe23. Mais la troupe a aussi construit sa réputation parce qu’elle se risquait toujours à remettre en question son travail. Elle a modifié sans cesse les costumes, les masques, introduit des cothurnes pour grandir les comédiens, choisissant de ne faire paraître sur scène que des étudiants, sous prétexte que seuls des hommes jouaient en Grèce ancienne, ou bien donnant les rôles féminins à des étudiantes. Elle n’a jamais fait table rase du passé du GTA grâce aux anciens du groupe, tout en prenant le risque de s’ouvrir à de nouvelles interprétations des mêmes textes. Elle a osé s’en remettre à des metteurs en scène amateurs ; elle a aussi fait appel à des artistes confirmés, au risque de les voir se servir du GTA pour faire connaître leurs partis pris esthétiques. Ainsi la troupe a-t-elle choisi en 1961 de se tourner vers André Steiger, jeune metteur en scène de trente-trois ans enthousiasmé par l’œuvre de Brecht et par les représentations qu’en avait récemment donné le Berliner Ensemble à Paris : il s’agissait pour lui de faire jouer Les Choéphores avec l’intention de « dégager l’aspect social et juridique de l’œuvre » en « abandonnant la reconstitution dans le costume, au profit de signes très clairs » dans une orchestration pour « saxo, violoncelle, trompettes et cor anglais24 ». Cette approche a paru trop brechtienne à certains membres du groupe et à une partie de son public ; elle ne l’était pas assez pour Steiger ; mais elle a été suffisante pour que la troupe universitaire du GTA apparaisse encore comme un acteur incontournable du théâtre contemporain.

14Par là, l’histoire de ce groupe a montré à l’université comme au théâtre leur vocation : les recherches des étudiants sur le théâtre antique, leur intérêt pour le détail des textes, leur ouverture à tous les arts (musique, arts visuels, techniques corporelles) venaient prouver qu’il n’y a pas de théâtre ni d’étude sur le théâtre sans interdisciplinarité, qu’il n’y a pas de théâtre sans mise à l’épreuve de la mise en voix et en espace des textes dramatiques. L’importance que le GTA a toujours donnée au travail de la gestuelle et de l’expressivité a été fondamentale, d’autant que longtemps, la plupart des étudiants de cette troupe de théâtre universitaire émanaient de la faculté des lettres. Ces étudiants ont ainsi montré que le théâtre devait être le lieu où se joue la plus haute littérature à travers une pratique scénique qui engageait physiquement les acteurs avec des ambitions esthétiques assumées.

  • 25 R. Barthes, 25 novembre 1961, texte publié dans L’Arche, numéro spécial, Le Groupe de théâtre antiq (...)
  • 26 Ertel, 2004, p. 325.
  • 27 Ibid., p. 327.

15La longue histoire du GTA fait apparaître de façon récurrente quelques questions qui touchent à la nature et au fonctionnement du théâtre universitaire, tant dans ses relations avec l’université qu’avec le théâtre professionnel. La question de l’identité de ce groupe qui a traversé trois décennies en est une : alors que souvent les troupes universitaires sont éphémères ou sont liées à la personnalité forte d’un animateur ou d’un professeur (tel a été le cas pour les Théophiliens portés par la personnalité de Gustave Cohen), le GTA a perduré en restant une troupe composée d’étudiants, comme le voulaient ses statuts et son rattachement à l’université de Paris. Plusieurs documents le rappellent. Cela indique que le problème se posait à deux niveaux : soit parce que la troupe avait à affronter la difficulté récurrente d’intégrer de nouveaux étudiants alors que ses membres se volatilisaient « appelés par d’autres tâches », soit parce que certains d’entre eux s’y attardaient au-delà du temps de leurs études et parce que les artistes professionnels qui y participaient pouvaient éclipser les étudiants du groupe. Comment une troupe peut-elle garder son identité alors que ses membres se succèdent ? Les archives témoignent de ce que la réputation de la troupe a construit sa mémoire – et le fait de toujours garder Les Perses à son répertoire y a contribué – mais que celle-ci a souvent été approximative. C’est sans doute le désir de faire du théâtre ensemble dans l’enthousiasme et la solidarité mis au service de la mise en scène de textes anciens que la troupe s’est construit un esprit. Roland Barthes l’a souligné en 1961 dans l’un des rares textes qu’il a accepté de composer sur son expérience au GTA : s’il évoque bien « la volonté de rendre vivants, complets, des chefs-d’œuvre auxquels les étudiants n’accèdent en général que d’un point de vue philologique », il a surtout mis en valeur le « souci avant tout d’être un groupe d’étudiants, et non d’amateurs de théâtre », le « bonheur » de faire une œuvre « réellement collective, réellement anonyme25 » – un des principes fondateurs du GTA a été l’anonymat de ses membres, dont les noms n’étaient jamais révélés au public par refus de starification et sans doute par idéologie politique. Quoique portant un regard assez critique sur ses deux années au GTA dans les années 1960, ayant souffert de la lourdeur de sa hiérarchie et du machisme d’un grand nombre de ses camarades, Évelyne Ertel a elle aussi mis en relief « l’attachement que suscitait chez chacun le sentiment de vivre une expérience fabuleuse26 ». En témoigne encore le succès ultérieur de la reprise exceptionnelle des Perses en 1987 par des « anciens » du GTA de toutes les générations, lesquels ont pu jouer à nouveau la tragédie d’Eschyle devant 2 500 spectateurs dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne27. Les lettres que nous pouvons trouver dans les archives révèlent bien sûr de nombreuses tensions dans le groupe tout au long de cette trentaine d’années : mais elles ont su toujours s’effacer devant cette identité collective élevée au rang de mythe fondateur et inviolable. Le soutien constant de l’université de Paris à la troupe est sans doute le signe que cette institution avait compris que le GTA participait activement à animer la vie étudiante, qu’il était une école de la vie citoyenne et qu’il contribuait ainsi à la réalisation des missions de l’université.

  • 28 Lettre manuscrite de Paul Mazon à Roland Barthes du 17 novembre 1936, BnF Arts du spectacle, cote 4 (...)
  • 29 Lettre du doyen de la faculté des lettres au recteur de l’académie de Paris du 31 mars 1939, archiv (...)
  • 30 Lettre du chef des services culturel du CROUS de Paris à Monsieur le recteur de Paris du 10 décembr (...)
  • 31 Voir par exemple la lettre manuscrite de quatre pages du professeur Fernand Robert au recteur de Pa (...)
  • 32 Voir dossier technique, archives du rectorat de Paris 20020476/348.
  • 33 Ce rôle pédagogique du GTA a sans doute été notable au moment où s’est institutionnalisé un cursus (...)

16La question de l’articulation entre la pratique théâtrale et les études a été clairement affichée par le répertoire de la troupe. Cela ne signifie pas pour autant que le théâtre universitaire garantisse les bons résultats de ses membres : en 1936, Paul Mazon s’est ainsi ému du faible taux de réussite des « Antiques » au certificat de licence, se demandant si ceux-ci voulaient « faire croire aux autres étudiants qu’on ne travaille plus sa licence dès qu’on en fai[sait] partie28 ? » En 1939, interrogé sur l’opportunité que le GTA aille jouer aux Chorégies d’Orange, le doyen de la faculté des lettres, Joseph Vendryes, n’a pas manqué de rappeler l’intérêt du théâtre universitaire pour le développement de la camaraderie entre étudiants, mais il a aussi souligné que de telles tournées ne sauraient être soutenues par l’université si elles devaient avoir lieu pendant l’année universitaire car « elles ne sont pas sans inconvénient pour le travail régulier » et que si elles se déroulaient sur le temps des vacances, cela ne saurait engager l’université29. Autant de témoignages qui attestent de la fragilité de ce lien entre la pratique théâtrale, extracurriculaire, et le domaine académique. Cependant, la pratique théâtrale modifie les relations avec le corps professoral : les lettres des professeurs adressées au GTA, à ses présidents successifs, ne cessent de témoigner de relations bienveillantes, familières et intellectuelles qui se sont tissées année après année. Malgré cela, le GTA a pu paraître – trop – indépendant : dans les années 1960, Nils Persson, ancien membre et président du GTA, devenu directeur des services culturels du CROUS, chargé d’enquêter sur la troupe s’est inquiété de savoir si le groupe maintenait un contact avec des professeurs – condition nécessaire pour que la troupe pût obtenir les aides matérielles qu’elle demandait – et s’est vu obligé d’indiquer à sa hiérarchie qu’il « sembl[ait] bien que le Monsieur le Professeur Robert ait le souci de ne pas s’imposer au groupe et qu’il ne soit consulté qu’épisodiquement30 ». Des professeurs ont aussi été sollicités pour attester de la qualité du travail de la troupe, condition là aussi nécessaire pour que le GTA garde ses soutiens institutionnels31. Enfin, l’investissement de la troupe au sein de l’université a pu conduire à une forme de renversement, le GTA se donnant un rôle didactique. Il a participé à des conférences sur le théâtre, parfois à l’invitation de professeurs. Il a conçu des programmes pour faire découvrir aux spectateurs l’histoire du théâtre. Il a monté des expositions sur le théâtre antique, à l’occasion des vingt-cinq ans de la troupe ou encore dans le cadre de la Semaine de l’université en 1953, mettant en parallèle sur de grands tableaux muraux des documents archéologiques, des documents didactiques et des archives de leurs propres mises en scène32… Par ces actions, le GTA a assurément joué un rôle crucial dans le renouvellement de la transmission de la culture antique auprès des publics estudiantins33. Il est ainsi certain que l’implication dans le groupe a permis à certains de ses membres de s’initier aux missions et aux arcanes du fonctionnement d’une institution comme l’université : nul doute que cette activité a aidé ceux d’entre eux qui se sont destinés à des carrières universitaires, politiques ou administratives, tels Nikita Elisséef, grand orientaliste, Marie Dienesch, spécialiste du jeu dramatique et sa sœur Marie-Madeleine Dienesch, secrétaire d’État à trois reprises ou Nils Persson, investi dans le développement des œuvres universitaires.

17La question de savoir si la participation au GTA pouvait conduire à l’entrée dans le monde du théâtre semble ne pas avoir été posée en ces termes alors qu’elle est bien sous-jacente à la pratique du théâtre universitaire. Certes, la plupart des membres ne sont pas devenus artistes ni comédiens ou metteurs en scène professionnels. Certains si, cependant, et non des moindres, tels Jean-Pierre Miquel ou Jean Gillibert : leur passage au GTA a sans doute joué le rôle de ce que nous appelons aujourd’hui préprofessionnalisation ou encore il a servi de tremplin pour lancer leur carrière artistique. La démarcation entre l’activité extra-universitaire et l’activité professionnelle n’est pas toujours nette pour le théâtre universitaire et tel a bien été le cas pendant les trois décennies du GTA.

  • 34 Voir lettre manuscrite de Jean Ritz, alors président du GTA, au recteur, 24 mars 1944, archives du (...)
  • 35 Voir le programme de l’hommage à Paul Mazon, 23 juin 1955, archives du rectorat de Paris (AJ-16-918 (...)
  • 36 Voir note tapuscrite à ce sujet, non signée, s. d. [vers 1950], BnF Arts du spectacle, 4-Col-33 (12 (...)

18Cette question surgit parfois plus nettement à travers les documents qui évoquent les finances du groupe. Par définition, comme le théâtre amateur, le théâtre universitaire ne fait pas de profit et ne rémunère pas ses membres. Mais il peut rémunérer des artistes qui l’aident dans son activité, ce qui ne laisse pas de susciter des discussions pour savoir qui peut être payé et à quel prix : les archives du GTA témoignent que ces questions étaient récurrentes. Qui plus est, la gestion des spectacles, la location des ondes Martenot, la confection des costumes ou des masques avaient un coût : il fallait donc des recettes pour subvenir à de telles dépenses. Et le GTA a pu effectivement gagner de l’argent, et même suffisamment pour donner le fruit de ses représentations aux camarades prisonniers pendant la guerre34 ou encore à un village de Céphalonie détruit par un séisme en 195335. Mais il est ainsi arrivé que le GTA ait à répondre aux médisances qui prétendaient que la troupe était un « théâtre marron36 », lequel aurait profité indûment de subventions de l’université pour faire du théâtre commercial et rayonner bien loin de la seule Sorbonne à travers ses innombrables tournées. C’est que, même si le GTA n’a cessé de chercher activement des sources de financements et a parfois été au bord du gouffre financier, les activités et le succès de cette troupe universitaire ont pu irriter bien des troupes professionnelles qui peinaient à trouver des spectateurs, ne pouvaient pas compter sur des subsides publics, et n’avaient pas toujours ni l’ambition artistique ni des comédiens du niveau de ceux de cette troupe universitaire.

  • 37 Chailley, 1962, p. 12.

19Le destin unique du GTA montre ainsi que le théâtre universitaire a un statut complexe et toujours en tension tant dans ses rapports avec le monde universitaire qu’avec celui de la création théâtrale et artistique. La troupe a su en faire une force. Entrer dans la troupe signifiait s’initier et s’exercer à la pratique théâtrale : des talents se sont parfois révélés pleinement. Mais le groupe restait pleinement amateur, avec toute la fragilité de la qualité artistique que cela implique : quelques critiques ont parfois signalé dans les journaux qu’un comédien ou une comédienne – qui restait anonyme – brillait tout particulièrement tandis que le chœur ne chantait pas toujours juste ou qu’on entendait moins bien un des acteurs. Le GTA, le public et les critiques ont considéré que ces défauts de la pratique amateur retrouvaient les conditions de production de son répertoire, s’appuyant sur l’idée – inexacte – que les comédiens de l’Antiquité n’étaient pas des acteurs professionnels. Jacques Chailley a pu affirmer dans un programme que « les imperfections mêmes de ces [comédiens amateurs] sont un élément de vérité qui a sa beauté37 » : de fait, cette fragilité des expériences scéniques du GTA a permis aux spectateurs d’entendre et de voir ce que la technique des comédiens professionnels fait quelquefois sonner comme un artifice. L’histoire de cette troupe témoigne ainsi de ce que la pratique théâtrale vivifie le rapport aux textes anciens et à leur étude, permet aux élèves ou aux étudiants d’avoir un rôle actif dans leur apprentissage et de se former ensemble, dans l’enthousiasme et la solidarité, par l’expérimentation qu’implique la pratique théâtrale, laquelle engage l’être tout entier, corps et esprit.

Bibliographie

Références citées

Barthes Roland, « Je ne demande pas mieux… », L’Arche, numéro spécial, Le Groupe de théâtre antique de la Sorbonne, 1962, p. 28-29.

Douche Sylvie (éd.), Amphitryon de Maurice Emmanuel. Musique de scène d’après Plaute, Paris, PUPS, 2012.

Brasillach Robert, « De René Rocher aux étudiants de la Sorbonne », dans C. Meyer-Plantureux (éd.), Animateurs de théâtre, Baty, Copeau, Dullin, Jouvet, les Pitoëff [1936], Bruxelles, Éditions Complexe, 2003, p. 137-156.

Cardon-Quint Clémence, « Des lettres impures ? Les lettres modernes, de l’institutionnalisation à la consécration (1946-1980) », Histoire de l’Éducation, 129, janvier-mars, 2011, p. 39-84.

Cohen Gustave, « I Teofiliani della Sorbona », Rivista di studi teatrali, 5, 1953, p. 33-43.

Cohen Gustave, « Expériences théophiliennes », dans Études d’histoire du théâtre en France au Moyen Âge et à la Renaissance, Paris, Gallimard, 1956, p. 423-447.

Ertel Évelyne, « La tragédie grecque “réhabilitée”. Le Groupe de Théâtre Antique de la Sorbonne, 1936-1974, suivi de Dialogue avec trois “Anciens”, Jean Gillibert, Jean-Pierre Miquel et Jacques Lacarrière », Théâtre/Public, 70-71, 1986, p. 43-51.

Ertel Évelyne, « Grandeur et décadence du théâtre universitaire », dans M.-M. Mervant-Roux (dir.), Du théâtre amateur. Approche historique et anthropologique, Paris, CNRS Éditions, 2004, p. 319-344.

Gignoux Hubert, Histoire d’une famille théâtrale. Jacques Copeau – Léon Chancerel. Les Comédiens-Routiers. La décentralisation dramatique, Lausanne, L’Aire théâtrale, 1984.

Granboulan-Peltier Nathalie, Les Perses d’Eschyle par le Groupe de Théâtre antique (1936-1962), mémoire de master de l’Université Paris-Ouest, C. Biet (dir.) [accessible à la théâtrothèque Gaston Baty, Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3], 2004.

L’Arche, numéro spécial, Le Groupe de théâtre antique de la Sorbonne, 1962.

Autres sources

Duguet Anne-Marie, Le théâtre universitaire, thèse [déposée à la Théâtrothèque Gaston Baty, Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3 D-18], J. Duvignaud (dir.), Université de Tours, 1970.

Lacarrière Jacques, L’Été grec, Paris, Plon, 1975.

Patron Sylvie, « Le Groupe de Théâtre Antique de la Sorbonne », Comédie Française. Les Cahiers, 23, 1997, p. 48-53.

Vasseur-Legangneux Patricia, Les Tragédies grecques sur la scène moderne. Une utopie théâtrale, Villeneuve d’Ascq, Presses du Septentrion, 2004.

Notes

1 Les archives du Groupe de théâtre antique ont été déposées au département des Arts du spectacle de la BnF (cote 4-Col-33 [9-88]) – nous avons pu jusqu’à présent n’en consulter qu’une partie. Nous avons aussi dépouillé les dossiers qui lui sont consacrés dans les archives du rectorat de Paris (AJ-16-9188) et du CROUS (20020476/348) versés aux Archives nationales ainsi qu’à la Société d’histoire du théâtre (R-163) ou encore au Fonds Jacquemont déposé à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris (ART Fonds Jacquemont, Boîte 1). En novembre 2016, É. Ertel m’a en outre accordé un long entretien en complément de ses articles sur le GTA et je l’en remercie vivement.

2 Cohen, 1956, p. 436.

3 Ibid., p. 428.

4 Cohen, 1953 ; texte tapuscrit français dans les archives du rectorat de Paris (20020476/348).

5 Cohen, 1956, p. 438.

6 Après-guerre, Jacquemont a été l’un des acteurs de la décentralisation théâtrale, en participant à la création du Centre dramatique de l’Ouest, puis en dirigeant le Studio des Champs-Élysées. Il est resté si fidèle au GTA qu’il a accepté à plusieurs reprises d’assurer de nouvelles mises en scène, celle d’Amphitryon en 1938, d’Agamemnon en 1947, de Maître Pathelin en 1962. Voir Bibliothèque historique de la Ville de Paris (Fonds Jacquemont, ART Fonds Jacquemont, Boîte 1).

7 Jean Dasté a élaboré son jeu théâtral auprès de Copeau et de Chancerel notamment par le travail du masque, qui leur semblait être le vecteur du renouvellement de la gestuelle du comédien et de l’interprétation des personnages. Après-guerre, Jean Dasté lance le mouvement de décentralisation théâtrale d’abord à Grenoble puis à la Comédie de Saint-Étienne.

8 Lettre manuscrite de Léon Chancerel à Roland Barthes, s. d. [1936], BnF Arts du spectacle, cote 4-Col-33 (15) 1936.

9 Ibid.

10 Cohen, 1956, p. 438. Voir aussi les articles de presse recueillis par Granboulan-Peltier, 2004.

11 Voir Ertel, 2004, p. 322.

12 Voir Douche, 2012.

13 Voir L’Arche, numéro spécial, Le Groupe de théâtre antique de la Sorbonne, 1962, p. 32, archives du rectorat de Paris 20020476/348.

14 Que le groupe monte des textes aux programmes des cours de l’université figure même dans ses statuts, à l’article 2 ; voir archives du rectorat de Paris AJ-16-91188 pochette 85525.

15 Voir Ertel, 2004, p. 324. La plasticité de l’interprétation politique des œuvres jouées, Les Perses et Antigone, notamment, a permis au groupe d’être loué par des spectateurs d’engagements très différents et de jouer pendant toute la guerre en zone occupée et en zone libre, alors que certains membres, par exemple Nikita et son frère Vadim Elisséeff, qui en était le président en 1942, participaient activement à la Résistance.

16 Voir dans ce volume l’article de A.-S. Noel.

17 Cohen, 1956, p. 17.

18 Ibid. p. 325.

19 Texte manuscrit non signé, projet de note d’intention du groupe, s. d. [1949], archives du rectorat de Paris, AJ-16-9188, pochette 85525. Ces motifs se retrouvent sous différentes formulations dans les différents textes de présentation du GTA.

20 Note pour la presse, s. d. [vers 1956], archives du rectorat de Paris 20020476/348.

21 Chailley, 1962, p. 11-12, archives du rectorat de Paris 20020476/348.

22 Ibid. p. 12.

23 Voir Brasillach, 2003, p. 137-156 et Gignoux, 1984.

24 Interview d’A. Steiger par Y. Lorelle dans Combat, 28 février 1961, « Réveil du théâtre antique ? Steiger met en scène l’Orestie à la Cité universitaire ». Voir aussi l’article de J. Paget dans Combat, 10 mars 1961 ; à la Cité universitaire, Les Choéphores et Les Euménides d’Eschyle, dans le fonds de la Société d’histoire du théâtre (R-163).

25 R. Barthes, 25 novembre 1961, texte publié dans L’Arche, numéro spécial, Le Groupe de théâtre antique de la Sorbonne, 1962, p. 28.

26 Ertel, 2004, p. 325.

27 Ibid., p. 327.

28 Lettre manuscrite de Paul Mazon à Roland Barthes du 17 novembre 1936, BnF Arts du spectacle, cote 4-Col-33 (15).

29 Lettre du doyen de la faculté des lettres au recteur de l’académie de Paris du 31 mars 1939, archives du rectorat de Paris 20020476/348.

30 Lettre du chef des services culturel du CROUS de Paris à Monsieur le recteur de Paris du 10 décembre 1963, réf. SL/64, archives du rectorat de Paris 20020476/348.

31 Voir par exemple la lettre manuscrite de quatre pages du professeur Fernand Robert au recteur de Paris du 16 mai 1964, archives du rectorat de Paris 20020476/348.

32 Voir dossier technique, archives du rectorat de Paris 20020476/348.

33 Ce rôle pédagogique du GTA a sans doute été notable au moment où s’est institutionnalisé un cursus de lettres modernes (créé en 1946 et concurrent des lettres classiques à partir des années 1960, soit au moment de la disparition du groupe). Sur le contexte de ces disciplines, voir Cardon-Quint, 2011.

34 Voir lettre manuscrite de Jean Ritz, alors président du GTA, au recteur, 24 mars 1944, archives du rectorat de Paris 20020476/348.

35 Voir le programme de l’hommage à Paul Mazon, 23 juin 1955, archives du rectorat de Paris (AJ-16-9188).

36 Voir note tapuscrite à ce sujet, non signée, s. d. [vers 1950], BnF Arts du spectacle, 4-Col-33 (12).

37 Chailley, 1962, p. 12.

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