1 Poème écrit par Vinicius Pereira, lauréat du troisième prix du concours « Escrevendo o Futuro » [Écrire l’avenir] en 2007, dans le cadre de l’Olympiade de langue portugaise, organisée par la Fondation Banque Itaú. Il a été publié dans la rubrique de Mônica Bergamo, dans le journal Folha de São Paulo le 10 juillet 2008 (Vinícios habitait alors un campement du MST dans l’État de Minas Gerais). Un campement est un endroit provisoire où les familles s’installent en attendant une terre, alors qu’un assentamento est un espace régularisé par le gouvernement, où vivent les familles, dès lors nommées assentadas. Toutes les traductions sont de l’auteur, sauf mention explicite.
2 Ce sont tout d’abord des prêtres et des membres de l’Église qui entreprennent à partir de 1975 un minutieux travail d’enquête sur les injustices et les assassinats commis au Brésil contre des paysans pauvres. La Commission Pastorale de la terre (CPT) et les Communautés ecclésiastiques de base (CEB) proposent depuis leur création une manière typique d’agir, constituée par l’enquête et la dénonciation dans un cadre de non-violence, capable de susciter l’indignation morale au-delà du pays. Le MST s’est constitué à l’intérieur de « ce monde » et, même s’il est devenu un mouvement laïc, il conserve une culture de la solidarité, de la discipline et de l’abnégation que l’on trouve rarement dans les mouvements sociaux en Europe.
3 Dans le cadre de notre recherche sur le MST, nous avons mené entre 2000 et 2003 une première enquête ethnographique, dans un groupe de familles Sans terre. 39 entretiens et 28 récits de vie ont été réalisés. Entre 2013 et 2016, nous avons réalisé une deuxième enquête centrée sur des jeunes Sans terre, à partir de l’observation et de deux récits de vie. Les familles qui ont fait l’objet de cette enquête vivent et travaillent ensemble depuis 1993, dans une coopérative agricole, la COPAVI (il s’agit d’un assentamento du Mouvement, nom donné à la propriété conquise par la lutte des Sans terre). La COPAVI se situe à deux kilomètres de la ville de Paranacity dans le nord-est de l’État du Paraná (Bleil, 2013).
4 La définition mentionnée ici comprend des phénomènes collectifs liés à des affects, des mémoires, des identités, des idéologies et des utopies forgées dans la vie quotidienne des acteurs. La culture politique n’est pas acquise une fois pour toutes mais elle nécessite un travail systématique à travers lequel des acteurs « donnent du sens à ce qu’ils disent et à ce qu’ils font » (Cefaï, 2001a, p. 93).
5 Pour apporter leur participation effective, chaque famille doit, par exemple, planter 500 arbres durant l’année ou renforcer son lien avec la société en faisant don de produits alimentaires (Bogo, 1998, p. 18).
6 VI Congresso Nacional do MST, Programa agrário do MST. Brasília, février 2014.
7 On peut citer pour exemple la forte diminution de la consommation de boissons gazeuses, habitude fortement ancrée dans la culture alimentaire des Brésiliens. Au cours de nos derniers séjours auprès des militants de la COPAVI, nous avons pu constater l’importance croissante des préoccupations de santé alimentaire.
8 La firme Monsanto est l’entreprise qui fait le plus souvent l’objet de critiques dans les textes.
9 Entretien avec João Pedro Stédile, 11 mai 2004.
10 Le recadrage par rapport au « droit à la propriété » a été réalisé au départ par l’Église, lors de la publication du document A igreja e os problemas da terre, en 1980. On peut y lire que la terre est un don de Dieu à tous les hommes. La propriété de la terre est conditionnée à l’usage que l’on en fait. Les évêques établissent une distinction entre la « terre d’exploitation » et la « terre de travail ». Le fait que la famille habite la terre et la cultive doit lui donner le droit de la posséder. La « terre d’exploitation » est extrêmement critiquée, étant donné qu’elle s’oppose à la vie. Rechercher le profit cumulatif, des gains démesurés, est contraire à la fraternité et à la justice, valeurs qui doivent prévaloir parmi les membres d’une société chrétienne (p. 21-29).
11 Cette violence, qui se traduit par de nombreux assassinats de militants, est construite par les médias brésiliens et par les propriétaires de terre. En 2003, lors d’une marche de 800 personnes pour occuper une ferme dans le sud du pays, un tract anonyme a circulé, dans lequel on pouvait voir une incitation à exterminer les Sans terre, décrits comme des rats (Bleil, 2009).
12 Alexandre avait deux ans quand ses parents ont décidé d’aller vivre dans un campement du MST. Au moment de l’entretien, ce militant était père d’un bébé mais il n’était pas marié et ne vivait pas avec la mère de son enfant. Entretien réalisé le 15 décembre 2015 à la COPAVI, Paranacity, où Alexandre effectuait un stage.
13 École de Formation Milton Santos, située dans l’État du Paraná.
14 Les deux ans et demi de formation en Technique d’administration des coopératives (TAC) sont partagés entre l’école et les fermes. L’Institut technique de capacitation et de recherche (ITERRA) a été fondé en 1995 dans l’État du Rio Grande do Sul.
15 Pour Alexandre, marxiste et non croyant, la participation aux occupations n’était pas motivée par un intérêt personnel : il a participé avec des amis à des occupations qui avaient pour but d’aider des familles démunies à trouver une terre. L’occupation avait donc un caractère de formation politique et identitaire.
16 Pour John Dewey, c’est dans l’expérience que nous forgeons nos valeurs ; nos désirs étant liés à la capacité de valuation, processus qui va du « chérir » ou « tenir pour précieux » jusqu’à l’« évaluation » (Bidet et al., 2011, p. 5-64).