Trotsky et Naville
p. 83-99
Texte intégral
1Le Trotsky vivant1 de Pierre Naville commence par l’évocation de sa première rencontre à Moscou, en novembre 1927, avec le futur fondateur de la IVe Internationale, au lendemain de son exclusion du comité central du Parti communiste soviétique, à la veille de son exclusion du parti lui-même et à l’avant-veille de son exil forcé à Alma-Ata.
2Dans ces souvenirs publiés trente-cinq ans après cette première rencontre, Naville manifeste une fascination intellectuelle pour celui dont il a fait alors la connaissance. La vision qu’il nous transmet en 1962 est-elle bien celle de 1927 ou n’est-elle pas embellie en fonction de la trajectoire ultérieure de Naville ? En effet, ce parcours l’a mené en 1939 à rompre avec la IVe Internationale puis à se livrer à une activité politique qui, pendant une dizaine d’années, le conduira à mettre entre parenthèses le nom même de Trotsky dans ses écrits ? En un mot, cette vision n’est-elle pas une sorte de compensation de cette décennie silencieuse ? Un fait significatif me paraît en témoigner. Lorsque Naville rencontre Trotsky, en 1927, ce dernier sort d’une vigoureuse bataille politique contre la direction stalino-boukharinienne du Parti communiste qui porte sur les problèmes internes de l’URSS et sur la révolution en Chine, question centrale pour l’Opposition unifiée depuis une bonne année et sur laquelle Trotsky a longuement polémiqué et écrit. Lorsqu’en 1952 Naville publie un ouvrage consacré à la Chine2, il ne cite pas une seule fois le nom de Trotsky et ne fait pas la moindre référence aux analyses de celui dont il avait jadis lu les écrits sur la Chine avec un vif intérêt.
3Peut-on alors voir dans le récit de 1962, dont chaque page ou presque manifeste une profonde admiration pour la personne de Trotsky, une forme de « rachat » de ce long silence ? On ne peut certes pas apporter de réponse catégorique mais la question mérite d’être posée.
4On a, en tout cas, avec Trotsky vivant3, une véritable sublimation littéraire, une héroïsation de Trotsky un peu similaire à celle qu’opère Deutscher dans sa trilogie sur Le prophète armé, Le prophète désarmé, Le prophète hors-la-loi4, peut-être pour les mêmes raisons. Naville comme Deutscher qui ont abandonné le trotskysme à peu près au même moment semblent tentés d’élever la personne même ou le personnage de Trotsky le plus haut possible. Sous des formes différentes, les deux hommes séparent ainsi de plus en plus l’homme de son héritage politique et, plus encore, de ses héritiers politiques. Cette distinction est plus aisée à comprendre chez Deutscher que chez Naville. En 1938, Deutscher, membre du groupe trotskyste polonais, s’était opposé à la proclamation de la IVe Internationale alors que Naville, après l’assassinat de Rudolf Klement en juillet, avait été le principal organisateur de la conférence de proclamation. Pour Deutscher la IVe Internationale n’était dès sa naissance qu’un fantôme, une sorte de répétition mécanique et caricaturale, donc mort-née, de la IIIe Internationale. Pierre Naville, quant à lui, affirmera dans ses carnets5, en 1944, la caducité des conceptions trotskystes en mettant davantage en question les trotskystes d’alors que Trotsky lui-même.
Pierre Naville, sur le marchepied du wagon qui était venu attendre Léon Trotsky à Esbjerg (Danemark) débarquant de Dunkerque en janvier 1932.

Fonds Naville, bibliothèque du CEDIAS-Musée social
5Chez l’un comme l’autre, cela engendre un lyrisme verbal, sensible chez Naville dès le portrait physique qu’il fait de Trotsky :
« […] dans ce visage sculptural une fossette et les yeux bleus de ciel, irisés par le verre des lunettes, jettent une gaîté et même une joie qui donnent à toute la tête je ne sais quelle fierté intelligente et loyale, le signe même du courage et de la possession de soi. »6
6L’héroïsation de Trotsky est plus nette encore dans le chapitre final du Trotsky vivant qui a une tonalité d’hagiographie épique. Saluant ce « virtuose excitant de l’intelligence et de l’exécution », Pierre Naville chante :
« Le caractère de ce chef qui apparaît de plus en plus exemplaire : je dis de ce chef, c’est-à-dire de cette tête qui sut commander et obéir et, en tous temps, se dominer […]. Exemplaire, Trotsky le restera […] exemplaire dans les revers comme les victoires, dans les efforts comme dans l’attente […]. De tels hommes ne laissent pas seulement une histoire, la trace brillante d’actions et d’œuvres plus ou moins réussies, le souvenir d’interventions où le génie suppléait aux circonstances… Ils élaborent aussi, par-delà les besoins de leur époque et de leur Parti, cet ensemble d’idées et de préceptes qui font d’eux pour longtemps les nourriciers d’une civilisation […]. Son nom lui-même […] est devenu le synonyme d’un esprit de révolution consubstantiel à l’homme. »7
7Il note d’ailleurs très explicitement :
« Je ne cherche pas à faire ici le bilan des idées dont Trotsky fut le champion, mais à relever quelques traits du caractère où ces idées ont pris leur forme, du style qu’elles avaient acquis ».
8On trouve étrangement la même réserve chez Jean Van Heijenoort qui, après avoir été le secrétaire-garde du corps de Trotsky et avoir développé avec vigueur ses propres conceptions politiques sous le pseudonyme de Marc Lorris, note dans Sept ans auprès de Léon Trotsky8 : « Je n’ai pas cru opportun de mêler à ces souvenirs un examen critique de la personnalité de Léon Trotsky, de ses idées et de son caractère ». Gérard Rosenthal, dans Avocat de Trotsky9, ne fait pas la même distinction entre le portrait de l’homme et son activité politique qu’il évoque brièvement dans son préambule, mais adopte pratiquement la même attitude, sans doute pour les mêmes raisons : Gérard Rosenthal avait rompu avec l’organisation trotskyste française et le trotskysme en 1948, près de trente ans avant d’écrire son livre de souvenirs.
9Comparant Trotsky aux Jansénistes, Naville écrit : « L’héroïsme moral et intellectuel était son élément, plus encore que le courage physique comme il fut celui des fameux solitaires »10. Et il qualifie le Journal tenu par Trotsky en 1935 « d’exercice de l’héroïsme moral. Héroïsme, tel est le mot-clé de ce portrait avec ceux de chef et d’exemplaire »11. La comparaison avec les Jansénistes est peut-être plus éclairante qu’il n’y paraît au premier regard : quel héritage ont en effet laissé derrière eux ces personnages héroïques auxquels Trotsky ressemblerait si fort ? Rien par eux-mêmes, et à travers quelques élèves, des œuvres littéraires sans aucune influence réelle sur le présent. Pascal occupe certes une place au Panthéon littéraire, mais le jansénisme, mort depuis deux bons siècles et dont il est l’unique porte-parole que l’on lise encore, n’a laissé aucun héritage vivant dans la pensée contemporaine. L’héroïsme ne prouve rien quant à la validité des idées : le protopope Avakkum mourut pour quelques causes dérisoires, telle la façon de faire le signe de croix ou d’orthographier le mot « Jésus », refusant sur ces points les réformes que le patriarche Nikon avait décidé d’introduire. Des Vieux croyants sont morts sur le bûcher pour refuser ces modifications de pure forme qui ne portaient en rien sur le contenu de leur foi. On peut à la fois admirer leur courage et s’étonner de leur aveuglement. Naville ne va pas aussi loin que Deutscher qui considère que Trotsky a consacré les dix dernières années de sa vie à une activité dérisoire, mais son Trotsky vivant s’achève, significativement, sur un hommage à Trotsky écrivain. « Au cours des années, la forme de ses écrits prenait une tournure sereine, intelligente au plus haut degré, et d’une beauté due à la propriété des matériaux comme à l’achèvement architectural »12. La forme ici l’emporte clairement sur le fond, réduit à une simple « propriété des matériaux ».
10Il est enfin symptomatique que l’on puisse lire ces lignes exaltées dans un court chapitre où Naville précise : « Je ne cherche pas à faire le bilan des idées dont Trotsky fut le champion »13. Ainsi plus haute est la figure même de Trotsky, plus il apparaît comme un personnage hors du commun, plus grand est l’hommage rendu à sa personne et plus restreint apparaît l’intérêt porté à l’héritage proprement politique.
11Si l’on ne peut affirmer l’identité de la conception de Deutscher et de celle de Naville, elles ont néanmoins en commun cette héroïsation. Deutscher, qui consacre beaucoup plus de place au train blindé de la guerre civile qu’à la IVe Internationale, pousse jusqu’à son terme cette vision de Trotsky. Ce dernier s’est en effet, à ses yeux, fourvoyé les dix dernières années de sa vie en discutant à l’infini de questions de troisième ordre avec des Pygmées. Il écrit ainsi, en évoquant en particulier le groupe trotskyste français :
« Les questions en litige étaient si peu importantes et les querelles si ennuyeuses, que même la participation de Trotsky ne suffit pas à leur donner le degré de signification requis pour qu’elles soient incluses dans sa biographie ».
12Ainsi Deutscher gomme-t-il ces questions alors même que Trotsky jugeait son activité en exil comme le moment le plus important de sa vie politique. Deutscher continue : « Avec les années cette participation prit des formes pitoyables et parfois tout à fait grotesques »14. Deutscher oppose donc le Trotsky de la révolution triomphante qu’il décrit avec un souffle quasiment épique et celui du stalinisme victorieux.
13Certes Naville n’écrit pas la même chose et il serait malhonnête de porter à son crédit ou à son débit les remarques dédaigneuses de Deutscher. Mais si Trotsky est une figure héroïque de chef exemplaire, l’inefficacité et les multiples déchirures au sein de la IVe Internationale ne peuvent venir que de l’inadaptation d’une pensée – le trotskysme – au réel, ou/et aux carences des « médiocres » (selon le mot de Deutscher) qui entourent Trotsky et que ce dernier a plus ou moins choisis. L’héroïsation même de Trotsky est souvent le contrepoint d’une dévalorisation politique de son combat en exil, de 1929 à son assassinat.
14Naville a incontestablement déployé, aux côtés de Trotsky, et pendant douze ans, une activité politique intense, une activité marquée par de nombreuses dissensions, de multiples désaccords et de vives tensions. Leur collaboration est conflictuelle dès le printemps 1929 lorsque Trotsky, contraint à l’exil à Prinkipo, s’attache à constituer l’Opposition de gauche internationale. Trotsky juge Naville trop intellectuel et laxiste sur les problèmes d’organisation. Il critique son long article sur l’écrivain Panait Istrati15 comme reflétant « le milieu journaliste intellectuel »16. Dans une lettre à Rosmer, il affirme :
« C’est un grand danger si au lieu d’éduquer Naville lui-même on le laisse éduquer les autres. Il est trop intellectuel et trop fraîchement venu de l’école surréaliste et puis souvariniste. Et quand je souligne parfois qu’il est trop intellectuel c’est pas pour lui causer du mauvais sang mais pour attirer son attention sur un trait qui peut l’empêcher de s’approcher (pour la première fois) de la classe ouvrière »17.
15Dans une lettre à Rosmer du 27 juillet 1930, Trotsky corrige pourtant quelque peu le tir :
« Dans mes dernières lettres à vous j’ai employé à l’égard de Naville des expressions brutales qui dépassent de beaucoup ma pensée. Je me suis dit : Rosmer me comprendra, des exagérations pareilles dans une lettre entre amis n’expriment que le besoin de souligner quelque chose, d’attirer l’attention d’autrui […]. Je devrai être plus prudent dans l’avenir, dans mes lettres amicales, avec des allégations personnelles et des expressions énergiques. »18
16Mais Trotsky n’en abandonne pas pour autant les « expressions énergiques » : « Un jour », raconte Pierre Naville, « voulant vaincre une de mes résistances, Trotsky me dit dans un chuchotement, en saisissant un bouton de ma veste : “Tenez P., voilà un intellectuel petit-bourgeois. Vous avez dix pour cent de P.”. J’en ai les larmes aux yeux… ». « Eh bien cela se corrige » commente Trotsky. D’après Naville « petit-bourgeois » signifie pour Trotsky « la courte vue, l’hypocrisie, la satisfaction de soi, la phrase… »19. Le mot désigne surtout le culte de soi qui conduit l’individu à placer sa propre personne au-dessus des nécessités et des besoins du combat collectif.
17Naville souligne la sensibilité extrême de Trotsky sur les questions pratiques qu’il lui reprochait de dédaigner :
« Il s’irritait bien souvent de notre typographie déficiente et peu soignée, des fautes d’impression, du retard dans les envois, de la négligence des traducteurs, du vague des informations. Il pressait, morigénait, exhortait, expliquait, enseignait, exigeait. Ce regard d’aigle repérait de haut par où les grandes affaires dépendent du soin que l’on accorde aux moindres »20.
18Qu’entend donc Trotsky, auteur de Littérature et révolution, et entre autres d’une étude très fine et perspicace sur Voyage au bout de la nuit, par « intellectuel » ou « trop intellectuel » ? Il désigne par là un goût si prononcé pour les débats d’idées qu’il repousse au second plan, voire ignore, les questions, fondamentales pour lui, de l’organisation. Il souligne en effet ce que Marx avait mis en lumière : la classe ouvrière en soi n’est qu’un objet d’exploitation, déchirée par la concurrence entre ses membres, elle ne devient classe pour soi, c’est-à-dire consciente de ses intérêts collectifs et de ses fins que par l’organisation (syndicale et politique). Trotsky stigmatise le dédain de l’organisation sous le nom de « souvarinisme ». Souvarine aime écrire, polémiquer, mais n’a jamais rien construit et ne construira jamais rien.
19La collaboration entre Naville et Trotsky a été le plus souvent conflictuelle, parce que Trotsky reprochait à Naville, qui en était le principal dirigeant et le théoricien, toutes les faiblesses d’une organisation trotskyste française, déchirée par de vifs conflits de tendance qui prenaient souvent le pas sur l’organisation d’une activité méthodique et suivie : avatars dont l’un a été, jusqu’en 1934, l’opposition Naville/Raymond Molinier. Ce dernier, né comme Naville en 1904, avait une culture théorique et politique limitée (Marguerite Rosmer disait de lui qu’il n’avait jamais lu une ligne de Marx). Mais c’était un véritable praticien, militant dynamique et plein d’initiative. Ces qualités et sa capacité à régler les problèmes enchantent d’abord Trotsky qui voit en lui le contraire même des militants débordants d’idées mais insoucieux des questions d’organisation ou incapables de les affronter, catégorie dans laquelle il range Naville. Bref, Molinier est pour lui une sorte d’anti-Naville.
20En 1929, après une visite de Molinier à Prinkipo, visite au cours de laquelle il règle toute une série de questions pratiques, dont la location de la maison où s’installe Trotsky, ce dernier voit un moment en lui, à cause de son allant et de sa détermination, la préfiguration du militant révolutionnaire de demain. Il déchantera vite.
21Un jour de 1931 à Prinkipo, Trotsky déclare à Naville : « Vous avez un sens tragique de l’organisation »21. Naville commente : « Il faisait allusion à des querelles intérieures de l’organisation française. Mais quel ton pour ce qui me paraissait en l’occurrence assez futile ! ». Cela ne lui semblait sans doute pas futile en 1931 quand il était alors engagé dans une difficile bataille contre le groupe de Molinier et de ses amis. Il ajoute : « À trente ans de distance je vois partout là un signe fatal. C’est vrai, si j’en juge par tout mon passé, j’ai eu, j’ai encore ce sens ! ». Et il complète : « C’est sur la scène du Parti que se jouent les tragédies supérieures aujourd’hui. Quel Parti ? Ce prince moderne, harcelant et maudit, fatal au peuple, fatal à la personne… Le destin à notre époque c’est le Parti… »22. À l’époque, l’intelligentsia et les médias n’évoquent qu’un seul parti avec un P majuscule : le Parti communiste. Est-ce à lui que pense Naville ? Ou est-ce au PSU de Rocard auquel il appartient alors ? Ou au Parti comme catégorie ou idée sans incarnation concrète à cette époque ?
22Dès la constitution de la Ligue communiste un vif antagonisme dresse l’un contre l’autre Naville, allié à Alfred Rosmer, et Raymond Molinier qui y anime avec Pierre Frank une « aile » dite « marxiste ». Cet antagonisme se manifeste par exemple dans le domaine syndical. Cela nécessiterait de longs développements : de manière générale, Trotsky reproche à Naville et Rosmer leur considération pour les syndicalistes, à ses yeux opportunistes, de l’Opposition unitaire, qui s’est constituée contre la politique de grèves et manifestations systématiques imposée par le PCF à la Confédération générale du travail unitaire (CGTU) au sein de cette même CGTU, au lieu d’y mener un travail politique de fraction pour y recruter des « bolcheviksléninistes » (tel est le nom officiel de ceux que les staliniens appellent les « trotskystes »). Cet antagonisme est l’une des causes des scissions de la petite organisation trotskyste française. Les relations difficiles entre Trotsky et Naville se compliquent du fait que Léon Sedov, tout à la fois fils et adjoint de Trotsky, soutient Molinier. En décembre 1930, ce dernier écarte Naville de la direction de la Ligue communiste, qui rassemble les opposants de gauche à partir de 1930. Naville et Rosmer accusent alors Molinier d’être un aventurier politique, d’user de « méthodes bureaucratiques » et même de faire chanter ses camarades à l’occasion. Molinier, il est vrai, utilise les ressources que lui procure sa société de recouvrement de fonds aux méthodes expéditives pour peser sur la vie d’une organisation sans moyens, et dont les militants vivent tous dans la gêne sinon dans la misère. De Prinkipo, loin du théâtre des querelles, Trotsky a tendance à penser que les critiques de Naville et Rosmer sur les « méthodes » de Molinier, qu’il n’a guère le moyen de vérifier, recouvrent des divergences de fond. Il constate par exemple avec un vif mécontentement que la conférence internationale organisée (après de longs mois d’une molle préparation) le 6 avril 1930 par Rosmer et Naville n’adopte aucun texte au prétexte que les délégués italiens, sceptiques, ont fait « une semi-défection ». Aux yeux de Trotsky, on brasse des idées mais on ne prend aucune mesure pour les traduire en actes. Il juge de façon politique, et non morale, ce qui est pour lui une forme de dilettantisme.
23Rosmer va alors s’éloigner, Naville, quant à lui, va rester. Et c’est lui que Trotsky contacte pour le projet, vite abandonné, de quitter Prinkipo pour la France. Naville co-organise un voyage à Copenhague où Trotsky a été invité par les étudiants socialistes danois en novembre 1932 puis, avec les frères Molinier23, son installation en France en juillet 1933. Il tente même une démarche, qui s’avérera sans effet, à Londres par l’intermédiaire du dirigeant de l’Independant Labour Party, Fenner Brockway, pour obtenir l’asile de Trotsky en Angleterre.
24Pierre Broué résume ainsi l’opinion de Trotsky sur Pierre Naville :
« Il juge Naville trop intellectuel, comprend mal son passé surréaliste, le juge éloigné de la mentalité ouvrière, lui reproche une attitude hautaine avec d’autres militants, ses conceptions d’organisation qui le rapprochent, dit-il même, du souvarinisme et forge, pour toutes ses faiblesses, le néologisme de navillisme ».
25Il ajoute :
« Liova (Sedov) et Frankel (secrétaire de Trotsky) qui sont tous deux hostiles à Naville et en liaison avec Molinier, l’encouragent avec prudence dans cette attitude »24.
26Si l’on en juge par le témoignage de Jean Van Heijenoort, qui fut pendant sept ans secrétaire de Trotsky, cette prudence n’est pas évidente. Il écrit, en effet, qu’à Prinkipo :
« le climat dans l’entourage de Trotsky était de façon marquée antinavilliste. Liova et Frankel, sans parler des frères Molinier, étaient, dans leur appréciation de Naville, bien moins nuancés que Trotsky, qui, en dépit des désaccords avec Naville et bien que souvent très irrité contre lui, conservait du respect pour ses qualités intellectuelles. Dans la chambre que je partageais avec lui, Frankel gardait sur le dessus d’une armoire deux numéros de la Révolution surréaliste pour les montrer aux nouveaux venus et leur faire ainsi voir les horreurs du passé surréaliste de Naville »25.
27Les souvenirs de Van Heijenoort ne permettent guère de savoir ce que sont ces désaccords avec Naville. Dans son souci de ne pas écrire une histoire politique, Van Heijenoort préfère les petits détails, souvent banals, de la vie quotidienne aux questions politiques. Il n’éclaire donc guère le lecteur sur les raisons de l’antinavillisme qui règne dans l’entourage de Trotsky.
28Les jugements sévères qu’il porte sur lui n’empêchent nullement Trotsky de dialoguer avec Naville. Après la victoire de Hitler en Allemagne, il formule un double constat : d’une part, pour avoir fait des sociaux-démocrates l’ennemi principal et pour avoir refusé de se battre pour l’unité avec eux contre le nazisme, l’Internationale communiste et le Parti communiste allemand portent une énorme responsabilité dans cette victoire ; d’autre part, l’Internationale communiste a validé à l’unanimité cette politique désastreuse ; elle n’est donc plus qu’un cadavre politique pour la révolution. Il propose donc de passer d’une activité d’opposition dans les partis communistes à la constitution d’organisations indépendantes, c’est-à-dire de passer du stade de fraction à l’intérieur des partis communistes à celui de parti. Il sollicite à ce propos l’avis de Naville. Il lui écrit le 31 juillet 1933. Prenant appui sur les deux premières lignes des thèses de Naville qui affirme avec un solide optimisme : « La Ligue communiste poursuit en France la tâche de direction communiste du prolétariat »26, il souligne qu’une telle mission relève plus d’un parti que d’une fraction interne à un parti et invite Naville à persévérer en ce sens.
29Mais les désaccords politiques entre Naville et Trotsky sont nombreux. Trotsky constate qu’à partir de 1933, à cause de la menace des fascismes victorieux en Italie et en Allemagne, et après l’écrasement des ouvriers autrichiens par les milices du catholicisme dit social, les adhésions ouvrières se multiplient à la SFIO. Celle-ci vient de rompre avec les néo-socialistes de Marcel Déat. Une gauche s’y développe. La situation est la même en Espagne. En août 1934, Trotsky réussit à convaincre la majorité des « bolcheviks-léninistes » français d’entrer dans la SFIO. Naville s’y oppose violemment de crainte que les trotskystes n’y perdent leur identité. Au contraire, Molinier soutient « l’entrisme ». La moitié des trotskystes suit alors Molinier à la SFIO et ils y proclament une tendance « bolchevikléniniste ». Molinier se hâte alors d’exclure Naville contre l’avis de Trotsky. Celui-ci a pourtant écrit le 6 août 1934 : « Les différences avec Pierre Naville sont des divergences de principe »27. Naville est à ses yeux le représentant d’une activité purement idéologique et proclamatoire d’un groupe de propagande isolé, à l’opposé d’une efficacité réelle au sein d’un mouvement de masse. La pureté des principes invoquée par Naville lui paraît le masque même de l’inaction28. Malgré tout Naville et ses partisans entrent à la SFIO, bon gré, mal gré, quelques mois plus tard29.
30Sept mois après cette entrée, le rapprochement de la SFIO et du PCF conduit à une véritable chasse aux trotskystes au sein de la SFIO. Treize dirigeants des Jeunesses de la Seine sont exclus. Trotsky soutient alors Naville, partisan du départ, alors que Molinier s’y oppose. Malgré tout Trotsky souligne encore et toujours « sa [de Naville] façon non dialectique, abstraite, journalistique de penser ». Il conclut « le camarade Naville est le moins indiqué comme secrétaire à l’organisation, malgré ses qualités indiscutables »30.
31Cependant pour lui : « Le plus important c’est que Naville puisse comprendre qu’on l’estime beaucoup, qu’on veut rester amical à son égard, mais qu’on ne tolérera pas de sa part la moindre trace de moliniérisme »31, grief au premier coup d’œil extraordinaire adressé à un homme qui s’est constamment dressé contre Molinier. Trotsky ici ne fait pas allusion aux qualités spécifiques des individus Naville ou Molinier mais à la « clique » qu’il reproche à chacun d’eux de fabriquer ; pour lui chacun des deux hommes regroupe autour de lui des partisans sur la base d’affinités (ou d’inimitiés) personnelles plutôt que sur celle de véritables accords ou divergences politiques. Au contraire, la tendance ou la fraction est un regroupement sur une plate-forme politique qui la distingue d’autres regroupements. La véritable chasse internationale aux trotskystes organisée par le Kremlin qui, à partir de 1936, les accuse d’être des agents fascistes tend à les isoler, à rendre difficile une activité réelle dans les usines et les syndicats et facilite la transformation des désaccords en querelles apparemment idéologiques et stériles.
32C’est surtout sur les questions pratiques (régularité de la parution de la presse, de la tenue de réunions, de la rentrée des cotisations, soin apporté à la confection des journaux et des tracts, transmission régulière des informations, etc.) que portent les critiques de Trotsky. Le 19 juin 1936 regrettant que le Parti ouvrier internationaliste (POI) – formé par la fusion des deux groupes trotskystes antérieurs dirigés l’un par Pierre Naville, l’autre par Raymond Molinier – n’ait pas fait d’effort pour avoir une imprimerie qui aurait assuré son indépendance, il écrit : « Naville n’a malheureusement pas le moindre intérêt pour ce genre de chose »32.
33La nécessité de rassembler une masse de témoignages pour répondre aux falsifications innombrables des deux premiers procès de Moscou (août 1936-janvier 1937) suscite une nouvelle vague de critiques sur le dilettantisme et le manque de sérieux de Naville. Le 16 janvier 1937, n’ayant toujours pas reçu les témoignages qu’il réclame depuis plusieurs mois, Trotsky, furieux, écrit : « Il paraît que l’affaire est entre les mains de Naville. Il faut l’obliger à terminer ce travail ou bien nous l’accuserons de sabotage et même pire »33. La tension entre les deux hommes va croissant sur ce sujet. Le 29 mai 1937 dans une lettre à Sedov, Trotsky reproche à Naville d’avoir « fait preuve d’une négligence criminelle »34 dans la collecte des documents pour la commission internationale d’enquête sur les procès de Moscou. Trotsky a eu beaucoup de peine à obtenir la mise en place de cette commission. Il a d’abord été paralysé quatre mois en Norvège, où il avait trouvé refuge après son expulsion de France. Le gouvernement social-démocrate l’a mis en résidence surveillée, lui a interdit toute communication avec l’extérieur et l’a placé sous la surveillance d’un chef de la police notoirement fasciste qui sera plus tard ministre de la police du gouvernement nazi de Quisling. Les staliniens ont lancé une campagne contre la commission, déclarant « gâteux » son président, le philosophe américain John Dewey, et y ont infiltré un agent, Carlton Beals. Aussi Trotsky supporte-t-il fort mal la négligence – désinvolte à ses yeux – avec laquelle les trotskystes français dirigés par Naville s’occupent de chercher et transmettre les témoignages nécessaires. En octobre 1936, Naville et ses camarades ont exclu Molinier et son groupe, qui forment alors le Parti communiste internationaliste à côté du POI, et contre lui. Trotsky juge désormais impossible la cohabitation avec Molinier et son PCI.
34La question des rapports avec Gide provoque un regain de tension entre les deux hommes. Naville a d’abord dénoncé le ralliement de Gide au stalinisme. Après la publication de Retour d’URSS35, Naville tente d’organiser un rapprochement entre Gide et Trotsky, voire une rencontre. En novembre 1936, puis en janvier 1937, il essaie d’intéresser Trotsky, alors au Mexique, où il est arrivé en janvier 1937, à Gide, annonçant que ce dernier serait prêt à se rendre à Coyoacan. Il doit cependant constater, en mars 1937, que Gide refuse de se prononcer publiquement sur les procès de Moscou, ce qui ne peut guère encourager Trotsky, tout entier engagé dans la bataille contre eux, à lui consacrer du temps. En effet, Gide n’accepte pas de participer au comité contre les procès de Moscou, de l’appuyer et d’apporter le moindre soutien à la commission d’enquête américaine et à son président John Dewey.
35Aussi lorsqu’en janvier 1938, Naville reproche à Trotsky de ne pas avoir utilisé à sa juste valeur le Retour d’URSS de Gide, et d’accorder à des « médiocrités » l’intérêt qu’il a refusé de prêter à Gide, Trotsky explose :
« Vos reproches à mon adresse concernant Gide sont absolument faux. C’est à vous qu’il faut les adresser. Jamais vous n’avez donné un conseil ou une information qui aurait pu nous orienter ici. Tout ce que nous vous avons écrit sur Gide devait plutôt nous inciter à la réserve. Vous avez toujours souligné que Gide ne voulait nullement s’engager, qu’il voulait rester plus ou moins “au-dessus de la mêlée”… Quand vous dites maintenant que je prête attention à des médiocrités c’est vous qui êtes responsable de ce malentendu déplorable. »36
36Malgré les réserves de Trotsky sur sa désinvolture dans l’accomplissement des tâches pratiques, c’est Naville qui présente le rapport introductif à la Conférence de fondation de la IVe Internationale le 3 septembre 1938, à la place de Rudolf Klement, assassiné quatre mois plus tôt et à qui le Guépéou a volé tous les documents préparatoires. Naville est, en effet, le principal dirigeant français et international du mouvement présent à cette conférence. L’organisation américaine du Socialist workers party (SWP), qui rassemble à elle seule près de la moitié des effectifs de la IVe Internationale à cette époque (un peu plus de 2000 sur environ 5000) n’est pas profondément impliquée dans la vie de l’Internationale, jusqu’alors essentiellement européenne.
37Neuf mois plus tard, pourtant, Naville va rompre avec Trotsky, le trotskysme et la IVe Internationale. Il le fera pour des raisons, dans la forme et le fond, assez similaires à celles qui avaient provoqué la crise de 1934. En juin 1938, le congrès de la SFIO a exclu de ses rangs les dirigeants de la fédération de la Seine (membres de la Gauche révolutionnaire de Marceau Pivert) qui ont formé le Parti Socialiste Ouvrier et Paysan (PSOP) fort d’environ 6 000 militants. Trotsky conseille aux 350 trotskystes d’y entrer. Naville s’y oppose car il juge dangereux de dissoudre l’organisation trotskyste dans une formation aux positions floues, et ce à la veille d’une guerre qui contraindra les trotskystes à l’illégalité.
38Trotsky est tout à fait prêt à ménager sa position. Ainsi, confiant aux trotskystes américains le règlement de cette question, il leur propose le 18 avril 1939 d’obliger tous les membres du POI à entrer dans le PSOP en précisant :
« Naville et 2 ou 3 autres ne doivent pas entrer dans le PSOP mais devraient consacrer leur activité au Secrétariat international (S.I.). […] La revue Quatrième Internationale devient une publication du S.I. pour tous les pays de langue française. Le comité de rédaction sera composé de Naville, quelques autres camarades français, un camarade belge, un camarade américain et un de la jeunesse. Il paraîtra deux fois par mois ».
39Trotsky ajoute :
« Il serait très difficile pour Naville et quelques autres de travailler dans le PSOP et il n’est pas sûr qu’ils y seraient acceptés. La proposition de décision ci-dessus réglerait cette question avec un minimum de frictions. »37
40Le 22 avril 1939, constatant que le Secrétariat International de la IVe Internationale ne fonctionne plus depuis l’assassinat de Rudolf Klement, Trotsky écrit :
« Naville est maintenant son secrétaire, mais y étant en minorité dans le S. I. sur la question française […]. Il semble qu’il se contente de ne plus le convoquer. Son attitude, comme toujours dans les situations critiques, c’est la résistance passive, à la section française comme au S.I. »38
41Quinze jours plus tard, pour permettre à Naville de sauver la face, il propose que le Secrétariat International nomme une commission de trois membres comprenant Naville pour assurer le suivi des décisions prises et empêcher les désaccords de se muer en affrontements politiques. Cela ne modifie en rien son jugement. Au contraire, en avril 1939, Trotsky fait de Naville le parfait exemple d’un certain type de militants érodés par la succession des épreuves par lesquelles ils sont passés :
« Il y a en France des camarades comme Naville et d’autres qui sont venus à nous il y a quinze, seize ans, alors qu’ils étaient encore de tout jeunes gens ; ce sont maintenant des hommes mûrs et, pendant toute leur vie consciente, ils n’ont reçu que des coups subis, que des défaites, de terribles défaites, et ils en ont l’habitude […] ils sont capables de bonnes analyses, mais ils n’ont jamais été capables de pénétrer dans les masses, d’y travailler, ils n’ont jamais pu apprendre à le faire. »39
« Une » de la revue Quatrième Internationale, no 12-13, sept. -oct. 1938.

Fonds Naville, bibliothèque du CEDIAS-Musée social
42L’aventure du trotskysme s’interrompt alors brusquement pour Naville. Il est exclu en juin 1939 de la IVe Internationale pour son refus de remettre au S.I., dont il est pourtant membre, la gestion de la revue Quatrième Internationale dont il devait continuer à assurer la rédaction. Naville, à ma connaissance, ne répond pas à cette décision par une déclaration publique et cesse alors toute activité politique officielle. Trotsky n’évoquera plus jamais son nom, sauf une fois à l’occasion d’un lapsus où il le confond avec Pierre Frank, le bras droit de Molinier. On peut sans doute considérer que Naville fait partie de ceux qui, face à la guerre, cèdent au découragement. C’est le cas de nombreux dirigeants de la IVe Internationale du Chinois Chen Du Xiu au Français Fred Zeller…
43Quatorze mois plus tard Trotsky est assassiné par un agent de Staline. Alain Cuénot souligne dans sa thèse :
« Pierre Naville conscient de la fragilité et de l’inexpérience des militants pour beaucoup trop jeunes et de la faiblesse de la structure politique de la IVe Internationale en vient à penser que la mort de Léon Trotsky pourrait bien signifier la mort du Trotskysme. »40
44Il semble que Naville enterrera effectivement le trotskysme cinq ans plus tard en 1944-1945. En effet, dans des notes, il définit sa « rupture avec le trotskysme »41. Affirmant que la guerre de 1939-1945 n’est pas une guerre impérialiste – c’est-à-dire qu’elle n’est pas une guerre pour un nouveau partage du monde et des marchés mondiaux – il considère les analyses de Trotsky sur cette question comme désuètes, dénonce les « formules passe-partout sur la guerre impérialiste et le défaitisme révolutionnaire », qualifie comme « une erreur et une absurdité la cristallisation du trotskysme comme théorie politique »42 et stigmatise le « gauchisme sénile » et « la sclérose maladive » du Parti communiste internationaliste.
45Le contenu et la pratique politique ultérieure de Pierre Naville permettent de dire que de l’héritage trotskyste, il ne lui restera politiquement rien.
46Aussi lorsqu’il publie en 1962 son Trotsky vivant, Naville dissocie-t-il radicalement l’homme de son action et de ses conceptions politiques (sauf à propos de sa lutte en URSS en 1926-1927) qu’il résume alors sous le mot « idées ». En fait, il y représente Trotsky comme le grand, voire grandiose général d’une petite armée morte. Trotsky aurait jugé ambigu cet hommage à l’homme qu’il était. En effet, pour lui, il y a fondamentalement deux conceptions du monde : une selon laquelle au début était le verbe et l’autre selon laquelle, au début était l’action. Et il se situait bien sûr dans ce second camp.
47Ainsi Naville prônera-t-il, dans les années 1940 à 1960, un nouveau Front populaire. Or, pour Trotsky, le Front populaire, en défendant farouchement la propriété des moyens de production (ainsi que d’ailleurs l’Empire colonial français) trahit les intérêts historiques de la classe ouvrière. Et pour lui, la question du Front populaire est fondamentale : un révolutionnaire ne peut ni soutenir le Front populaire ni, encore moins, en être membre. Comme Jacques Duclos le rappelait en effet dans son fameux article de L’Humanité du 27 juin 1936, intitulé « Les radicaux ont raison », le Front populaire se prononce contre toute expropriation, si modeste ou partielle soit-elle, du Capital.
48Le trotskysme comme courant spécifique est né, même s’il ne se réduit nullement à cet aspect originel, d’une analyse de la caste bureaucratique, de ses privilèges, de son caractère réactionnaire, contre-révolutionnaire, bref du stalinisme. En rejetant l’analyse trotskyste du capitalisme et de la guerre, Naville rejette aussi cet aspect originel fondamental. En mars 1956, il qualifie ainsi l’URSS et les démocraties populaires de « socialismes » au pluriel, avant de préciser un peu plus tard qu’il s’agit de « socialismes d’état », donc de sociétés socialistes quand même43. La différence est très grande avec la définition trotskyste d’« état ouvrier dégénéré », qui signifie que les bases économiques et sociales de l’État sont le socle économique du socialisme, mais que ces états ne sont pas socialistes parce que, dirigés par une bureaucratie parasitaire totalitaire, ils connaissent une différenciation sociale croissante, un renforcement de l’État et de la bureaucratie parasitaire, une absence totale de démocratie, et que le maintien de la bureaucratie à leur tête engendre le risque croissant de rétablissement du capitalisme.
Notes de bas de page
1 Pierre Naville, Trotsky vivant, Paris, Éditions Julliard, coll. « Dossiers des Lettres nouvelles », 1962, 198 p.
2 Pierre Naville, La Chine future, Paris, Éditions de Minuit, 1952, 238 p.
3 Pierre Naville, Trotsky vivant, op. cit.
4 Isaac Deutscher, Trotsky, tome 1 : Le Prophète armé, 1879-1921 (1962) ; tome 2 : Le Prophète désarmé, 1921-1929 (1964) ; tome 3 : Le prophète hors-la-loi, 1929-1940 (1965), Paris, Julliard.
5 Pierre Naville, Mémoires imparfaites. Le temps des guerres, Paris, Éditions de la Découverte, 1987, 282 p.
6 Pierre Naville, Trotsky vivant, op. cit., p. 16.
7 Ibid., p. 189-190.
8 Jean Van Heijenoort, De Prinkipo à Coyoacan, Sept ans auprès de Léon Trotsky, Paris, Les Lettres nouvelles/Maurice Nadeau, 1978, p. 8.
9 Gérard Rosenthal, Avocat de Trotsky, Paris, Laffont, 1975, 330 p.
10 Pierre Naville, Trotsky vivant, op. cit., p. 141.
11 Ibid., p. 141-142.
12 Ibid., p. 198.
13 Ibid., p. 189.
14 Isaac Deutscher, Le prophète hors-la-loi…, op. cit., p. 91.
15 Pierre Naville, « Panaït Istrati », La Vérité, no 3, p. 1.
16 Léon Trotsky, Alfred et Marguerite Rosmer, Correspondance, 1929-1939, Paris, Gallimard, p. 76.
17 Ibid., p. 121.
18 Ibid., p. 168.
19 Pierre Naville, Trotsky vivant, op. cit., p. 89.
20 Ibid., p. 84-85.
21 Ibid., p. 88.
22 Ibid., p. 88-89.
23 Henri Molinier, frère de Raymond, joua également un rôle important dans le mouvement trotskyste.
24 Pierre Broué, Trotsky, Paris, Fayard, 1988, p. 677-678.
25 Jean Van Heijenoort, De Prinkipo à Coyoacan…, op. cit., p. 46.
26 Léon Trotsky, Œuvres, Paris, EDI, 1978, t. 2, p. 53.
27 Ibid., 1979, t. 4, p. 172.
28 Trotsky affirme : « Naville et ses camarades répètent les mêmes phrases générales sur l’indépendance ». Il juge avec ironie : « Pour eux il semble au fond que le plus important soit d’être indépendant de la classe ouvrière, des masses, des changements de la situation, de la réalité tout entière. Ces camarades remplacent le travail politique dans les masses par un monologue. Leur politique suit une ligne de moindre résistance, la politique de l’autosatisfaction, couverte par les formules d’une intransigeance fictive […]. Les sectaires qui cherchent toujours à se préserver eux-mêmes par une indépendance formelle ont toujours tendance à capituler devant la réalité dès qu’elle leur marche sur les pieds » (ibid., p. 174). Le 16 décembre 1934 Trotsky écrit une nouvelle page de son portrait critique : « Naville représentait le conservatisme, l’attitude attentiste, l’esprit de discussion en cénacle, le souvarinisme […]. Lors du tournant Naville a cherché à couvrir son opportunisme par des formules intransigeantes. Il a qualifié l’entrée de capitulation parce qu’au fond il était effrayé par la perspective d’une lutte farouche contre un appareil puissant. Il est beaucoup plus tranquille à défendre en vase clos le principe de l’intransigeance » (ibid., p. 272).
29 Par une ironie dont l’histoire est coutumière, en 1944-1945, dans une situation certes différente mais marquée également au sceau de l’effervescence sociale et politique révolutionnaire, Naville qualifiera les trotskystes de talmudistes acharnés à répéter des formules sans souci de l’analyse de la réalité.
30 Léon Trotsky, Œuvres, op. cit., t. 7, p. 237.
31 Ibid.
32 Léon Trotsky, Œuvres, op. cit., t. 10, p. 111.
33 Ibid., t. 12, p. 104.
34 Ibid., t. 14, p. 82.
35 André Gide, Retour de l’URSS, Paris, Gallimard, 1936, 137 p.
36 Léon Trotsky, Œuvres, op. cit., t. 16, p. 126.
37 Ibid., t. 21, p. 115.
38 Ibid., p. 123.
39 Ibid., p. 50.
40 Alain Cuénot, Biographie intellectuelle d’un révolutionnaire marxiste : Pierre Naville (1904-1993), Thèse d’histoire, Université Paris XIII, 2002, 2 vol., 734 p.
41 Archives Pierre Naville, Bibliothèque du CEDIAS-Musée social, Paris [abrégées par la suite en APN]. Cf. Alain Cuénot, Biographie intellectuelle…, thèse citée, p. 253.
42 APN, « Quelques réflexions sur le trotskysme », 15 janvier 1945. Cf. Alain Cuénot, Biographie intellectuelle…, thèse citée, p. 254.
43 Léon Trotsky, Défense du marxisme, Préface de Pierre Naville, Paris, EDI, 1972, p. 17-20.
Auteur
Historien, Centre d’Études et de Recherches sur les Mouvements Trotskystes et Révolutionnaires
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