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Les Goncourt dans leur siècle

 | 
Jean-Louis Cabanès
, 
Pierre-Jean Dufief
, 
Robert Kopp
, 
et al.

Chapitre I. Les Goncourt et l'histoire

Les Goncourt, historiens de la Révolution et du Directoire

Jean-Paul Clément

Texte intégral

Un naturalisme pointilliste

1Pour les frères Goncourt, le XVIIIe siècle était non seulement le Grand Siècle, mais le seul – leur Antiquité à eux. Cette époque, qui n’était nullement à la mode et qu’ils contribuèrent à rétablir, s’est complu à laisser sur elle une abondance de témoignages de détail, d’histoires vraies (comme celle de Restif), de chroniques. On sait que ce sont les Mémoires de Bachaumont qui firent concevoir aux Goncourt l’ambition de faire pour leur époque ce qu’il avait fait pour la sienne ; d’où le Journal commencé par les deux frères, le 2 décembre 1851. Leur Histoire de la société française pendant la Révolution, publiée en 1854, inaugure une série de huit livres consacrés à l’Ancien Régime finissant, qui requit leurs auteurs pendant une dizaine d’années et dont le plus connu – sinon le meilleur – est sans doute La Femme au XVIIIe siècle.

2Leur gourmandise du fait vrai, de l’anecdote, explique sans doute que les Goncourt aient fait leurs premières armes en tant qu’historiens du XVIIIe siècle, de la Révolution et du Directoire, avant de passer au roman. Le premier, Charles Demailly, date de 1860, et Manette Salomon, considéré comme leur chef-d’œuvre, de 1867. Ce glissement de l’histoire à la fiction les a desservis aux yeux de la critique.

3Sainte-Beuve, qui définit excellemment l’art des Goncourt comme « un mouvement dans la couleur », fait référence à deux reprises dans les Causeries du lundi à leur Vie de Marie-Antoinette. Mais dans une causerie du lundi consacrée aux Mémoires du duc de Luynes, il fait montre d’une condescendance amusée. Si le duc de Luynes fournit, écrit-il, « un canevas tout uni d’une partie du règne de Louis XV », il ajoute : « […] si l’on veut broder là-dessus des fleurs, et semer des couleurs, c’est affaire à MM. de Goncourt, qui sont si bien informés d’ailleurs et si friands de toutes ces choses du XVIIIe siècle. »

  • 1 Bibelots : « Ensemble d’objets de parade qui se mettent sur des étagères dans un salon, tels que l (...)

4Certains écrivains qui ont connu les Goncourt à l’époque du Grenier, tel Henri de Régnier dans son Journal, parlent du « patriarche du bibelot »1. Et Albert Thibaudet, dans son Histoire de la littérature, écrit : « Les Goncourt sont entrés dans le roman par l’histoire, dans le roman anecdotique par l’histoire anecdotique, dans le document contemporain par le document du XVIIIe siècle. Ils avaient derrière eux, quand ils débutèrent comme romanciers, dix ans de bibelotage, de livres d’ailleurs excellents sur l’art du XVIIIe siècle, etc. »

5Thibaudet doit tout de même concéder que cette histoire de la société et des mœurs du temps de Louis XV et de la Révolution leur avait valu la considération de Michelet, qui en admira le style, « qui, dit-il, donnait à voir d’une manière spéciale les objets d’art du XVIIIe siècle. »

6Historiens et romanciers, les Goncourt transposent au fond La Comédie humaine dans l’histoire du XVIIIe siècle en puisant à toutes les sources, visibles ou ensevelies mais que leur œil sait détecter et faire sourdre. Ils nous emportent dans « ce mouvement dans la couleur », qu’accompagne la sensation du vrai, le sentiment de toucher à la vérité d’une époque. Nous avons affaire non à un pesant naturalisme bardé d’idéologie, mais à un naturalisme léger, rapide et pointilliste. L’impression des événements vus à travers ces mille et une taches de couleur, forme un tableau.

7Leur côté « brocanteur », leur curiosité toujours à l’affût et leur prodigieux génie littéraire donnent brio et brillant à leur Histoire de la société française pendant le Directoire (parue en avril 1855 et rééditée depuis chez Slatkine, 1971, et Le Promeneur, 1992). Il est temps, je crois, de réhabiliter cette œuvre historique qui ne s’inscrit pas dans les détours attardés du « style artiste », mais nous donne à voir, toute vive et dans son tumulte, la société française – ou plus exactement la société parisienne – à une époque où Paris fait et défait les rois et les gouvernements.

Une histoire humaine et sociale

8L’Histoire de la Restauration et du Directoire est une prodigieuse entreprise d’érudition, une collecte intense de tous les libelles, annales, journaux ; de toutes ces feuilles éphémères et qui donnent le ton et la « couleur » d’une époque, de préférence aux mémorialistes, source moins sûre, qui recréent le passé autour d’un personnage.

  • 2 Préface aux Maîtresses de Louis XV, Firmin-Didot, 1860, pp. VIII-IX, cité par Robert Kopp dans sa (...)

L’histoire sociale, écrivent-ils dans la préface aux Maîtresses de Louis XV, s’attachera à l’histoire qu’oublie ou dédaigne l’histoire politique. Elle sera l’histoire privée d’une race d’hommes, d’un siècle, d’un pays. Elle étudiera et définira les révolutions morales de l’humanité, les formes temporelles et locales de la civilisation. […] Elle entrera dans les intimités et dans la confidence de l’âge humain qu’elle se sera donnée mission d’évoquer. Elle représentera cet âge sur son théâtre même, au milieu de ses entours, assis dans ce monde de choses auquel un temps semble laisser l’ombre et comme le parfum de ses habitudes. Elle redira le ton de l’esprit, l’accent de l’âme des hommes qui ne sont plus. Elle fera à la femme, cette grande actrice méconnue de l’histoire, la place que lui a faite l’humanité moderne dans le gouvernement des mœurs et de l’opinion publique. […] Elle cherchera partout l’écho, partout la vie d’hier ; elle s’inspirera de tous les souvenirs et des moindres témoignages pour retrouver ce grand secret d’un temps qui est la règle de ses institutions : l’esprit social […]2.

  • 3 Ibid., p. XXVIII.

9L’image du passé que les Goncourt vont capter n’est pas celle d’individus exceptionnels, mais de la société parisienne inspectée à tous les étages. En cela, ils préfigurent l’école des Annales de Lucien Febvre et Marc Bloch, et les historiens des mentalités, par leur éloignement affiché de l’histoire officielle, politique et diplomatique. Ils estiment qu’elle a déjà été faite. « Fabuleuse avec Hérodote, oratoire avec Thucydide et Tite-Live, elle est humaine avec Tacite. L’histoire humaine, voilà l’histoire moderne ; l’histoire sociale, voilà la dernière expression de cette histoire3. »

10Ainsi que le remarque Robert Kopp dans sa préface au Journal des deux frères, leurs modèles sont Juvénal, Plutarque, Tallemant des Réaux, Sébastien Mercier ou Restif de la Bretonne, Pline l’ancien, Buffon ou Cuvier, qui enseignaient l’histoire naturelle.

11Les Goncourt sont en effet les pionniers d’une histoire des mentalités, qu’il s’agisse des pratiques religieuses, d’une histoire du vêtement, de l’hygiène, d’une histoire de l’alimentation, des mœurs de table, d’une histoire de la famille et de l’éducation, d’une histoire de la politesse et des coutumes, du mariage, d’une histoire de la lecture et de la vie des théâtres, d’une histoire des jeunes gens et des vieillards, de la prostitution et des femmes du monde. Bref ils suggèrent d’innombrables pistes dont ils ont eux-mêmes suivi quelques-unes.

12Leur champ d’investigation est aussi étendu que possible, depuis les ragots de cour jusqu’aux salons de 1789, sans omettre de rapporter fidèlement, avec talent et perspicacité, la vie des théâtres et de camper de nombreux portraits dont les plus réussis sont ceux de Chamfort, de Mirabeau, de Mme Roland, de Mme Tallien, de Mme de Staël, etc. Les massacres de Septembre et les épisodes de la Terreur semblent se dérouler sous nos yeux.

Une histoire subjective fondée sur des sources objectives

13Avant de parcourir cavalièrement la période 1789-1799, on peut apporter deux réserves au travail des Goncourt. Tout d’abord, leur histoire est objective par tous les faits et documents qu’elle rassemble, mais aussi subjective car elle s’emploie à nier radicalement les bienfaits de 1789 et à montrer « l’énormité de l’enflure, de la blague, du dénaturement de la presse, des journaux et des livres libéraux à propos des principes et des phénomènes de la Révolution » (30 mai 1861). Il est parfois difficile de situer précisément telle année ou telle autre, notamment dans l’histoire du Directoire – bien qu’ils concentrent leur attention sur les grandes dates : 1789, l’an II, 1795 et 1797, année du retour des royalistes auxquels ils portent leur sympathie.

14Seconde réserve : les Goncourt ne précisent pas, dans la masse des documents qu’ils nous apportent comme un précieux butin, où se place sur l’échiquier politique tel ou tel journal, tel écrit d’humeur aujourd’hui disparu et dont même les recensions de Hatin ne tiennent pas compte ; ce sont parfois des feuilles qui naissent et disparaissent dans la même journée. Pour nourrir leur vision, ils puisent pêle-mêle chez l’abbé Barruel, contrerévolutionnaire notoire, aussi bien que dans le Courrier d’égalité, défenseur de la Révolution. Tout est mêlé, contracté, et forme un tissu si serré qu’il est difficile de faire jouer l’esprit critique. C’est une histoire subjective puisée dans des sources objectives.

L’esprit dominant des Goncourt

15L’influence débilitante de la passion démocratique sur la vie quotidienne des individus est une question qu’ils aborderont à nouveau au début de Germinie Lacerteux (1865). Pour eux, l’instinct démocratique mine et sape la civilisation. Partant de l’idée que le XVIIIe siècle, jusqu’à 1789, représente le comble de la perfection, ils projettent leur vision de la vie parisienne, sous-tendue par le sentiment d’une décadence inexorable et irréversible des arts de la société, de la conversation, des salons, des fêtes – même s’ils estiment que l’évolution historique est aveugle. Ce qui donne lieu à d’innombrables railleries à la Rivarol et à des bons mots qui émaillent les deux ouvrages, dans un style qui les met souvent à l’unisson des citations extraites des innombrables documents qu’ils ont rassemblés pour non seulement étayer mais rédiger page à page leur Histoire de la Révolution et du Directoire.

16Une sorte de délectation morose fait des Goncourt les Des Esseintes de cette fin du XVIIIe siècle dont la décadence est le credo.

Salons de 1789

  • 4 Jules et Edmond de Goncourt, Histoire de la société française pendant la Révolution, Bibliothèque (...)

17Dès l’ouverture, les Goncourt nous entraînent à leur suite dans leur lieu de prédilection : les salons de 1789. C’est à travers la mondanité qu’ils vont observer les premiers signes annonciateurs de bouleversements immenses. Ces misogynes qui idolâtrent les femmes ne peuvent leur pardonner d’avoir rompu avec le modèle du XVIIIe siècle des salons dont elles sont l’âme, et qui en 1789 « tombent en politique » – première déchéance du « siècle idéal » : « Une maîtresse de maison n’est plus cette modératrice d’un cercle tranquille, et qui, en son hospitalière impartialité, accueillait chaque dire d’une oreille patiente. “C’est – dit une femme – une Penthésilée assise près d’une table à thé, tremblante de fureur, et, au milieu des violents débats, se brûlant les doigts, et répandant une tasse de thé sur sa robe” [Aperçu de l’État des mœurs, par H. Maria Williams, an IX]4. »

  • 5 Ibid., p. 6-7.

18L’aristocratie libérale se fait tiers-état. Mme Necker, écrivent les Goncourt, « recevait du haut de son mari ». Elle tenait son salon en « femme sans naissance, bienfaisante sans charité, vertueuse sans grâce, ayant une grande vanité et un petit orgueil, spirituelle, mais de cet esprit raisonnable et froid qui préside une conversation plutôt qu’il ne l’avive […] ». L’engouement passager pour Necker dans les premiers mois des États généraux avait gagné l’aristocratie : l’idole du lieu, « manœuvrant pesamment sa lourde personne de commis, entretient l’évêque d’Autun, qui sourit pour ne pas parler ». Mme de Lauzun, de toutes les femmes « la plus douce et la plus timide », devient avec 1789 une véritable Érinye : on l’a vue, « lors du renvoi de M. Necker, attaquer dans un jardin public un inconnu qui parlait mal de cette idole et lui dire des injures […] »5.

  • 6 Ibid., p. 8.

19Au passage les Goncourt, guindés dans leur aristocratisme, se gaussent des mauvaises manières de l’avocat Target dans le salon de la vénérable maréchale de Beauvau, pourtant toute acquise à la cause du ministre des Finances. « Pauvre vieille maréchale, écrivent-ils, qui croyait gouverner l’État et l’opinion publique avec ce Tiers qu’elle choyait, qu’elle caressait, qu’elle pensait toujours tenir au-dessous d’elle et à distance, et qui déjà, par les doigts de Target, prend familièrement du tabac dans la boîte qu’elle tenait ouverte et qu’elle manque de laisser tomber d’indignation6 ! » Invention ? non : lettre inédite de la maréchale de Créqui, publiée par Fournier avec une introduction de Sainte-Beuve.

  • 7 Ibid., p. 4.

20Dans les salons, on lit des libelles – tel Qu’est-ce que le tiers-état ? de Sieyès. On change de costume, de langage ; le roi n’est plus que le « pouvoir exécutif ». « Alors les élégantes manquent le spectacle pour l’assemblée nationale, s’indignent les Goncourt ; si bien que les billets de tribune s’échangent contre des billets d’Opéra ou des Bouffons français, et encore avec six livres de retour. – Presque toutes, les femmes adoptent l’opinion de l’Opinion7. » Une opinion qui ouvre grand la porte – dans cette Révolution qui prétend s’identifier à la liberté – à la naissance même de l’intolérance, après le règne de Voltaire !

Évolution des mentalités

  • 8 Ibid., p. 402.

21Dès cette époque l’intolérance point, anodine d’abord – conformisme dans le costume, dans les comportements – mais révélatrice, et qui invinciblement conduit jusqu’à la Terreur en passant par toutes sortes de phases, parmi lesquelles les Goncourt relèvent entre autres la pratique du tutoiement. Qui vouvoie est aristocrate, et donc suspect. À en croire un patriote, le vouvoiement est une « minauderie » contraire à l’égalité. « La France, écrivent les Goncourt, est tombée en tutoiement. Le domestique tutoie le maître, l’ouvrier le patron ; et le fils tutoie le père […]. – « Il n’y a pas de vous dans la République et tous les citoyens sont des toi » [La Parfaite égalité ou le Tu et les Toi, comédie en trois actes en prose, par le citoyen Dorvigny, Théâtre national, 3 nivôse, an II]8. »

Peinture de la vie parisienne

22Dans ce foisonnement de faits, de notations, de traits, dans ce récit souvent fiévreux, haletant, au diapason de la période révolutionnaire, les Goncourt embrassent toute la scène parisienne : les académies qu’on supprime car assimilées à un « Tribunal aristocratique permanent » (Mercure de France, octobre 1790) qui porte le cachet de cette volonté d’égalitarisme qui fait le fond de la Révolution ; l’art que délaisse le pinceau d’un David, érigé en grand maître des cérémonies de la Terreur. Les auteurs s’intéressent aux nouvelles formes de convivialité : les « soupers fraternels », les cafés, les lieux de fête, surgis au gré des événements et qui en sont le reflet ; à l’abandon ou la destruction volontaire du patrimoine : parmi les premiers, ils dénoncent le vandalisme révolutionnaire, qu’ils assimilent à « l’anéantissement de la civilisation ».

  • 9 Ibid., p. 353.

23Leur compréhension est globale et d’une grande perspicacité, qui assimile la Révolution à une révolution culturelle : elle ne touche pas seulement la cime de la société mais aussi tous ceux qui ont œuvré obscurément au progrès de la civilisation et à son embellissement. Ils écrivent : « […] les boutiques des marchands de modes se transformeront en ateliers […]. Les marchands de carrosses deviendront de bons charrons ; les orfèvres se feront serruriers. Mort à tout ce qui n’est pas de première utilité, de première nécessité ! mort aux mains blanches ! […] Mort à tout ce qui fait la vie intelligente, sensuelle ! mort à tout ce qui l’adoucit, l’ennoblit, l’embellit, la polit ! » Se produit une sorte d’animalisation de la société, qui prend la forme sous leur plume d’une boutade : « Il prend aux archontes de la République française, comme à Voltaire lisant Rousseau, envie d’aller à quatre pattes ; et l’utopie où ils marchent à reculons, c’est le retour à l’état de nature9. »

24Même quête dans leur histoire du Directoire. Nous nous promenons avec eux dans tous les lieux à la mode. Nous y rencontrons des personnages marquants, et là les Goncourt procèdent non pas par quelques touches, mais par une véritable visite commentée des lieux de plaisir : Monceau, l’Élysée, le Palais Égalité, Tivoli, Ruggieri et ses fêtes, la réception d’un ambassadeur turc, Velloni, le petit Coblentz, mais aussi la vie sociale, la morale, l’amour, le jeu, la prostitution, régnant sous le règne de la Vertu et qui connaît alors un regain de débordement.

  • 10 Jules et Edmond de Goncourt, Histoire de la société française pendant le Directoire, Gallimard, «  (...)

25Les Goncourt ne se bornent pas aux classes régnantes de la société. Ils s’intéressent aussi à la vie des humbles. « Que de familles indigentes poursuivies par le souvenir des anciennes richesses ! s’exclament-ils. Vieille mère, jeunes sœurs aux abois, qu’un fils soutenait, les aidant à vivre, et à qui la réquisition vient arracher ce fils qui leur donnait à manger et les consolait en leur détresse10 ! »

  • 11 Ibid.

« […] Bomare, l’auteur du Dictionnaire d’Histoire naturelle traduit dans toutes les langues, réduit aux deux onces de pain noir, va sur le soir, à l’âge de soixante-sept ans, chercher des glaçons à la rivière, pour les faire fondre et boire », alors que les banquiers, qui règnent en forçant les cours, « centuplent leurs profits. Et tandis que les millions font bientôt boule de neige, les centaines de mille livres se dégraissent rapidement, et viennent à rien ; en sorte que, la France entrée en convalescence de l’agiotage, – les fortunes énormes restent debout, plus énormes, et la misère retombe sur tous, plus générale encore et plus profonde11. »

De quelques thèmes

26À travers cette rétrospective animée, une ligne continue traverse les deux ouvrages des Goncourt, de chapitre en chapitre : les femmes, les pratiques religieuses, les arts, la politisation à outrance de la société.

Les femmes

  • 12 Ibid., p. 184.

27Premier thème : les femmes et leurs métamorphoses, prises qu’elles sont dans le tourbillon de la Révolution, directrices et victimes des modes et des idées. « Les femmes sont des premières à satisfaire à ces corvées de l’attention ; les hommes ne sont que les comparses de ces fêtes : elles en sont les actrices12. »

  • 13 Révolution, p. 372.

[Elles] manquent d’une grâce et de ce quelque chose de leur sexe qui est le charme même des actrices de l’histoire : elles ne sont pas femmes ; elles sont de cette mascula proles dont parle le poète13.

  • 14 Ibid., p. 322-323.

28Les femmes des salons ont donné le ton au début de la Révolution : Mme de Lauzun, Mme de Condorcet. Dans une course sans repos, nous passons des salons aristocratiques ou des salons bourgeois à ceux de Mme Roland, égérie des Girondins, de M. et Mme Bailly, la directrice de la Comédie française, enfermée sous la Terreur aux Madelonnettes. « Miracle français ! s’exclament les Goncourt, les prisons sont des salons. » La grande porte a beau être ouverte sur la place de la Révolution, ce sont des lieux de compagnie plaisante pour les royalistes et les républicains malchanceux. « À Port Libre, c’est un petit monde républicain dont Vigée est le poète, dont un M. Matras est le vice-poète, dont Mlle Bétisy est la cantatrice, Mme Lachabeaussière la Sapho ; un petit monde qui a son café, trois promenades, celle des Palissades, qui est le préau des larmes et des tristesses […]. S’il fait froid le soir, l’on se réunit en ce grand foyer, au fond du corridor du premier, le salon. Chacun apporte sa lumière. […] Vigée couronne le souper-ambigu d’une lecture de l’Épître à Contat, ou de l’Ode à la Liberté, à moins que le baron de Wittersback ne régale la société d’un peu de musique. Si c’est la fête de l’Être-Suprême, les dames entonnent les strophes d’une hymne de Vigée ; on danse la carmagnole en grande ronde, à grands chœurs ; puis c’est l’air : Si vous aimez la danse, puis la Marseillaise14. »

29Avec le Directoire, on tombe encore de plusieurs crans. En dépit des beaux et admiratifs portraits de Mme Tallien, Julie Talma, Germaine de Staël, Mlle Lange, Julie Candeille, la Saint-Huberti, la Clairon – Mme Récamier curieusement absente –, la société de Paris a changé. Ce sont les thermidoriens (Fréron, Tallien, etc.), les riches acquéreurs de biens nationaux, les fournisseurs aux armées, les ministres corrompus costumés par David, qui tiennent le haut du pavé. Mais aspirés par la nostalgie de l’Ancien Régime, ils s’en veulent les imitateurs, les copieurs, les « singeurs ».

30L’Ancien Régime n’est pas mort. Il demeure une nostalgie mais il est grossièrement « imité », avec ce mot d’ordre : après la Terreur, le plaisir – alors que par ailleurs « on spécule sur la famine ». Les « merveilleuses » et les « incroyables » n’inventent rien, ne s’intéressent qu’au décor, par essence éphémère, et portent même, comme sous Louis XVI, leur goût vers une anticomanie de pacotille.

  • 15 Directoire, p. 147.

31« Ces femmes de la nouvelle France, écrivent les Goncourt, ces caricatures qui se démènent pour être plaisantes, le facile butin pour les rieurs ! et que la malice est spirituelle contre elles à bon marché ! […] C’est la Madame Angot de Maillot. Madame Angot ! il faut voir madame Angot ! Il faut voir Corse dans le bonnet chamarré de rubans jaunes de madame Angot ! Madame Angot qui se pâme devant le rat de cave Girard, son futur gendre, drapé en chevalier de la Girardière ! Madame Angot disant : Queue magnière ! Queue galantise ! Il faut dire : C’est incroyable ! en pensant à madame Angot ! […] Éclairage aux bougies au théâtre d’Émulation pour madame Angot, qui manque de talocher sa fille pour lui apprendre à aimer le chevalier ! Madame Angot demandée par les ambassadeurs ! Madame Angot qui s’oublie à engueuler du plus dur et de plus vert une harangère de sa famille ! Madame Angot qui fait venir le Directoire chez Nicolet ! Madame Angot, en syncope, repoussant le flacon de Girard, et criant d’une voix mourante : “Non, non, donnez-moi plutôt une goutte d’eau-de-vie !” [...]15. »

  • 16 Ibid., p. 145.

32Je ne résiste pas au plaisir de vous lire ce portrait savoureux et vengeur contre les femmes du Directoire, ces femmes du peuple brusquement emportées dans le vertige de l’ascension sociale : « Pauvres femmes, écrivent-ils, persécutées de santé ! Pauvres femmes, qui voient une dénonciation dans leur teint, et qui courent après l’atonie des femmes de l’ancien régime ! Pauvres femmes, dont les plus consciencieuses, pour brider cet appétit qui s’emporte, cette carnation qui s’empourpre, cet embonpoint qui déborde, se font phlébotomiser ! [Paris, par Pujoulx] – Et comprenez l’étonnement des vieux médecins : ils ont passé leurs jeunes années à fortifier, à engraisser, à colorer les gracieuses alanguies du XVIIIe siècle ; trente ans, ils n’ont été employés qu’à donner du ton à la génération féminine de Louis XV, et les voilà requis de pâlir, de maigrir, de débiliter les riches tétonnières du Directoire ! Le dur martyre16 ! », etc.

  • 17 Ibid., p. 184.

33Les Goncourt ne se contentent pas de rassembler les faits, de nous faire découvrir tous ces personnages, « génération d’insectes » qui passent, vite emportés par le temps qui court, les modes du jour qui se démodent le lendemain sur le petit théâtre parisien. Qui se souvient de Théis Pipelet, célébrée comme la « Sappho parisienne, amie du bien dire, de la rime riche et des droits de son sexe »17, des cabaretiers ou des traiteurs célèbres ?

La religion et le néant

34Allant plus profond, les Goncourt s’intéressent aussi au phénomène religieux : le renouveau de la spiritualité fait partie de leur enquête ; ils le traitent comme un fait, tout comme les autres. L’analyse s’accompagne toujours – et c’est là un trait caractéristique –, par quelques touches cursives et rapides ; l’évocation de lieux. La religion n’est pas désincarnée ; elle s’intègre dans un apparat tout particulier qu’aucun autre historien n’avait donné jusqu’alors, leur délectation se portant, en « décorateurs » qu’ils sont, vers les pompes et cérémonies – ce qui nous vaut ainsi un grand morceau d’éloquence pour la pompe funèbre de Marat.

35Le retour de la religion connaît politiquement son acmé en 1797, année à laquelle les Goncourt accordent une importance très grande. La religion devient un motif politique lorsque les royalistes constitutionnels s’emparent du pouvoir – avant que Fructidor ne les en chasse. Les deux frères jubilent de rapporter – ce qui est historiquement vrai – qu’alors Camus, qu’ils surnomment « le patriarche de l’Église constitutionnelle » (et qui en effet est le principal rédacteur de la Constitution civile du clergé de 1790), vient de livrer sa fille morte aux prêtres non jureurs (Journal des hommes libres, germinal an V).

  • 18 Ibid., p. 187.

36Puis nous passons au temple de la théophilantropie, inventée par La Réveillère-Lépeaux, et ses « autels couleur d’aurore ». Vient ensuite une charge contre La Harpe et ses palinodies, « cette plume vieillie dans les répétitions des sarcasmes de Voltaire ». C’est Benjamin Constant qui parle, cité par les Goncourt. « Quoi ! s’indignent-ils, ce complimenteur de la Commune de 1793 ! ce panégyriste du Comité de salut public […] Quoi ! ce La Harpe, qui imprimait, le 3 frimaire de l’an II : “Quand les charlatans à sceptre et à couronne sont tombés, les charlatans à étoles et à mitres ont pris le parti de descendre de leurs tréteaux et de jeter le masque.” Oui, ce même La Harpe est chrétien. “Nos jours ont vu se renouveler le prodige d’Augustin combattant l’erreur qu’il avait propagée.” [Politique chrétienne] La Harpe est chrétien. […] Il est chrétien six ans après Septembre, indigné trois ans après les crimes, brave trois ans après le danger18 ! »

37Les Goncourt étudient également le « philosophisme », c’est-à-dire la pensée des Idéologues, génération abâtardie des Lumières, mais s’intéressent aussi aux adeptes d’une « religion du néant », à la dégradation de l’homme dans ce qu’il a de plus sacré.

  • 19 Révolution, p. 405-406.

38La mort, qu’ils estiment avoir été déshonorée par la Révolution, requiert leur attention et nous vaut quelques morceaux d’anthologie. Après avoir évoqué le mariage, conclu à la va-vite « au pied de l’autel de la patrie enguirlandé » et « sous la statue de la liberté », ils écrivent, se référant à un Essai sur la propagation de la musique en France, sa conservation et ses rapports avec le gouvernement, de Leclerc (1796) : « […] les funérailles prirent le caractère de célérité d’un débarras de voirie. Les parents, tout enhaillonnés par prudence et par peur, hurlant la carmagnole, pour faire leur douleur patriote, escortent le long de la route du Champ du repos bordée de jalons tricolores, à demi courant, débandés, se hâtant, le cercueil drapé d’un drap mortuaire tricolore, qu’on va enfouir grand train, – tous le bonnet rouge sur la tête, précédés d’un commissaire en bonnet rouge, menant le cortège bizarre au pas rapide19. »

Les arts

39Troisième ligne directrice : la Révolution a innové en politique, où elle a eu la prétention de régénérer le genre humain en changeant les noms de rues, en supprimant le calendrier grégorien pour le remplacer par celui de Fabre d’Églantine. Elle a contraint les Français à changer le temps et les mœurs. En revanche, les Goncourt observent que l’art, la peinture, la musique, les « arts sérieux » n’ont pas connu ce renouvellement ; ainsi, la mode de la bergerie traverse intacte la Révolution.

  • 20 Directoire, p. 185.

40Demoustier, professeur au Lycée, qui en ces temps de violence et de sang continue à jouer « le Berquin de l’amour » comme Barrère était « l’Anacréon de la guillotine » : « S’il n’a mis des mouches et des pompons à la philosophie de Newton, s’il n’a mis du galant dans la gravitation, il a enjolivé le Styx, Marivaux descendu aux enfers de Virgile, il a fait lécher à Cerbère les jolis petits pieds d’Émilie. Et pour le Lycée, les charmantes bluettes qu’il cueille aux champs à Villers-Cotterets, dans les bois de Noue ! Là, il a entrevu la chaumière qu’il veut partager avec “sa mie” ; la haie d’aunes, le ruisseau, la salle à manger petite, la chambre de l’hospitalité, et le jardin qui sera un potager :… Je veux que l’on y cueille/Une salade en cueillant un bouquet20 ! »

  • 21 Révolution, p. 296.

41Le théâtre s’éteint, pris en étau par l’idéologie révolutionnaire. Ainsi les Goncourt ont-ils patiemment recensé toutes les pièces de l’an II : Mucius Scévola, la Mort de Marat, Marat dans le Souterrain des Cordeliers, Jean-Jacques Rousseau au Paraclet, la Royauté abolie, le Congé des volontaires, les Crimes de la féodalité, le Cri de la Patrie, les Brigands de la Vendée, l’Apothéose du jeune Barra, Buzot roi du Calvados ; l’Apothéose du jeune Viala, où « le jeune héros de la Durance reçoit comme cadeau de noces d’Isidore, l’épouseur de sa cousine Pétronille, un bonnet rouge » ; les Émigrés aux terres australes, du citoyen Gamas : « […] c’est plaisir de voir huer, écrivent-ils, le prince, le baron, le président, l’abbé, le financier, la présidente, la marquise, l’évêque, la religieuse, les moines, toute la ci-devant société21. »

42Les Goncourt s’indignent : la France, c’est le sourire du XVIIIe siècle ; le rire dans son excès est une invention de la Révolution – car les extrêmes se touchent, « le monstrueux et l’hyperbolique du comique ».

Frémissements d’un renouveau dans les arts

43Mais le renouveau vient, et les historiens de l’art que sont les Goncourt le notent avec beaucoup de finesse. Au Salon du 1er thermidor an VI, Gérard s’annonce « tout jeune par cette simple, réfléchie et tranquille composition, le Bélisaire, où revit un souvenir de l’antiquité, moins académique que chez David […] Girodet endort Endymion, et le caresse de rayons assoupis […]. Guérin est le peintre de la douleur. Il a le coloris vrai, le dessin pur, la sobriété de l’ordonnance. […] Isabey, […] dont les miniatures sont célébrées par le vaudeville, qui rime : On demande un portrait : il vous rend un miroir » ; Isabey, qui pour eux surpasse la Rosalba. Fragonard, Redouté et Van Spaendonck, “qui cueillent des fleurs sur leurs palettes”. Houdon, qui “semble mouler le marbre sur la nature”. Le paysage avec Bidault, Bertin, Valenciennes, Boilly, qui “promène la gouache sur les plumes, les linons, et les basins rayés” ».

  • 22 Directoire, p. 211-214.

L’art du Directoire a la vieillesse de Greuze, écrivent les Goncourt ; il a la jeunesse de l’héritier de la dynastie des Vernet : Horace Vernet ; il a la jeunesse d’un fougueux élève de David : Gros. Il a la maturité de Prudhon22.

  • 23 Ibid., p. 167.

44Mais ces frémissements de l’art, annonciateurs d’un renouveau, ne résument pas – loin de là – l’art du Directoire, qui est un art du fugitif, du mouvement, du plaisir. Les beaux‐arts, ce sont avant tout les arts décoratifs. Ils ne sont plus le monopole de l’aristocratie. C’est dans l’efflorescence des cafés, des restaurants, des lieux de plaisir, que ces arts se développent à merveille. Les Goncourt se font les portraitistes de cette bimbeloterie d’un instant, mais créatrice à sa manière, appliquée à la satisfaction d’un plaisir immédiat. Ainsi les fêtes du Tivoli, boulevard des Italiens, ou la boutique du glacier Garchy : « De grandes glaces encastrées dans des panneaux de bois orangé, d’un beau vernis avec des chambranles bleu céleste, reflètent les galants costumes. Pendues au plafond, de belles lampes de cristal de roche versent une lumière tamisée. Autour des tables d’acajou, autour des chaises étrusques, Garchy circule “très important et très civil” ; d’un signe, il fait servir ses biscuits aux amandes du meilleur genre, et ses “divines glaces qui jaunissent en abricots ou s’arrondissent en pêches succulentes” [Parisiens, voyez ce que vous étiez en 1788, et voyez ce que vous êtes aujourd’hui]23. »

Croissance du rôle de l’État

  • 24 Chateaubriand, Essai sur les révolutions, livre I, chapitre XIV, éd. Maurice Regard, Gallimard, «  (...)

45La Révolution, à regarder de près, est faite de gens très ordinaires. « Ces gens apparus dans la majesté des catastrophes empruntent à la scène de la Terreur je ne sais quoi de surhumain qui les sauve d’être démesurés. Ils bénéficient de la guillotine, et ils passent géants dans les souvenirs émus, comme des dieux que les peuples enfants faisaient de leurs peurs. » Point de vue partagé par Chateaubriand dans les Mémoires d’outre-tombe et dans l’Essai sur les révolutions (1797) : « Ces esprits raréfiés au feu de l’enthousiasme républicain [les jacobins], et pour ainsi dire réduits, par leurs scrutins épuratoires, à la quintessence du crime, déployèrent […] une énergie dont il n’y a jamais eu d’exemple […]24. »

  • 25 Directoire, p. 142.

46Tous les observateurs, Tocqueville et de notre temps Bertrand de Jouvenel dans Du pouvoir (1945), ont montré que toutes les révolutions « liquident la faiblesse et accouchent de la force ». Ils l’ont fait en historiens politiques. Les Goncourt le font à leur manière, et c’est un point de méthode qu’il faut souligner. Ils observent que l’administration s’est, sous le Directoire, considérablement développée. Elle est devenue pléthorique. « La Révolution, en centuplant les rouages administratifs, a fait pulluler les fonctionnaires publics, écrivent-ils. Les bureaux se multiplient à l’infini. […] Les agences exécutives, les comités, nourrissent des armées d’employés. Cent dix-sept commis gâchent au comité de législation une besogne que cinq hommes éclairés et travailleurs mèneraient à bonne fin […]. » Et de donner un exemple qu’ils tirent d’une feuille intitulée Des Comités et des Commissions, qui ne manque pas de sel : « […] la commission de l’instruction publique, ayant besoin de deux voies de charbon, les obtient par un arrêté du comité de salut public, ordonnant à la commission du commerce de les mettre à sa disposition, et à la commission des transports de les faire porter de l’île Louviers au local de la commission de l’instruction publique ; voilà trois commissions exécutives en correspondance, et un arrêté du principal comité du Gouvernement revêtu de sept signatures, le tout pour deux voies de charbon25 ! »

47L’étude des Goncourt sur la Révolution et le Directoire s’achève par une vive dénonciation qui n’est plus historique mais pamphlétaire : l’aristocratie de l’argent a remplacé celle de la naissance ; « la tyrannie de l’ouvrier […] va être la tyrannie des siècles futurs : la tyrannie brutale du nombre inintelligent » (28 janvier 1884).

  • 26 Ibid., p. 311-312.

48En quelques pages, Jules et Edmond Goncourt s’érigent en Fouquier-Tinville de la contre-révolution. Le ton est âpre, l’ironie absente. La ruine de la France, l’homme pris aux champs pour la frontière, les collines sans vigne, le champ sans culture, des routes qui ne sont plus carrossables. Les loups, laissés libres par la Révolution, reprenant cette terre sauvage. Une France mal famée, barrée par les voleurs, une France traînée en faillite, qui n’exporte plus, qui chôme. Les lettres ravalées, les rentiers non payés, du sang partout : « […] du sang au nord, du sang au midi, du sang à l’ouest, du sang à l’est, – du sang partout ! le sang engraissant cette terre des vengeances ! […] des croyances et des désespérances, des appétits et des plaies […] Des consciences où le juste et l’injuste sont confondus, […] l’avilissement des esprits […] La France ! comme un convive à la fin d’une orgie […]. » Et cette France est lasse, « dégoûtée de la Révolution », comme le dira Cambacérès lui-même ; « lasse de luttes, d’efforts, de cris, d’anathèmes, d’enthousiasmes, de fièvres, d’ivresses, de tempêtes, de triomphes, d’angoisses ; – la France lasse de révolutions, de coups d’État, de constitutions, de législatures ; lasse de 10 août, lasse de Thermidor, lasse de Prairial, lasse de Fructidor ; – lasse de vaincre, lasse d’être sauvée », etc. Et l’ouvrage se termine ainsi : « Un homme, un général de vingt-huit ans, porte l’espoir de ce troupeau d’hommes aux abois26. »

  • 27 Ibid., p. 313.

49La philippique se termine par une curieuse pensée que je vous livre : « Louis XV régnant, comme si Dieu laissait parfois entrer le génie dans la vue de ses providences, Jean-Jacques Rousseau disait de la Corse, au livre II, au chapitre dixième de son Contrat social : “J’ai quelque pressentiment que cette petite île étonnera l’Europe.”27.

Notes

1 Bibelots : « Ensemble d’objets de parade qui se mettent sur des étagères dans un salon, tels que les chinoiseries, les petits paniers, laques, et même bronzes » (Littré).– Bimbelots : « Jouets d’enfants ». Un bimbelotier est un fabricant de jouets d’enfants.

2 Préface aux Maîtresses de Louis XV, Firmin-Didot, 1860, pp. VIII-IX, cité par Robert Kopp dans sa préface au Journal, Robert Laffont, collection « Bouquins », 1989, t. I, p. XXIX.

3 Ibid., p. XXVIII.

4 Jules et Edmond de Goncourt, Histoire de la société française pendant la Révolution, Bibliothèque Charpentier, 1914, p. 3. Référence désormais abrégée en : Révolution, suivi de la pagination.

5 Ibid., p. 6-7.

6 Ibid., p. 8.

7 Ibid., p. 4.

8 Ibid., p. 402.

9 Ibid., p. 353.

10 Jules et Edmond de Goncourt, Histoire de la société française pendant le Directoire, Gallimard, « Le Promeneur », 1992, p. 125. Référence désormais abrégée en : Directoire, suivi de la pagination.

11 Ibid.

12 Ibid., p. 184.

13 Révolution, p. 372.

14 Ibid., p. 322-323.

15 Directoire, p. 147.

16 Ibid., p. 145.

17 Ibid., p. 184.

18 Ibid., p. 187.

19 Révolution, p. 405-406.

20 Directoire, p. 185.

21 Révolution, p. 296.

22 Directoire, p. 211-214.

23 Ibid., p. 167.

24 Chateaubriand, Essai sur les révolutions, livre I, chapitre XIV, éd. Maurice Regard, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1978, p. 84.

25 Directoire, p. 142.

26 Ibid., p. 311-312.

27 Ibid., p. 313.

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