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PME et grandes entreprises en Europe du Nord-Ouest XIXe - XXe siècle

 | 
Jean-François Eck
, 
Michel-Pierre Chélini

II. La prévalence des PME

Les Fabriques de Laire, pionnières de la chimie des corps odorants à Calais (1876-1914)

Eugénie Briot

Texte intégral

1En 1867, à l’occasion de l’exposition universelle de Paris, le chimiste Georges de Laire écrit :

  • 1 August Wilhelm von Hoffmann, Georges de Laire et Charles Girard, Matières colorantes dérivées de l (...)

« Nous ne sommes plus au temps où une industrie exigeait de longues années pour se créer, de plus longues encore pour se développer et se répandre au loin. […] De nos jours, à peine une découverte utile est-elle faite, une application heureuse est-elle trouvée, qu’elles sont publiées, décrites dans les journaux scientifiques, les revues techniques et autres ouvrages périodiques, et surtout dans les recueils des brevets. Les voilà devenues le point de départ de mille recherches, de mille expériences nouvelles, que chacun exécute avec sa tournure d’esprit particulière, ses connaissances, son instruction spéciale : le savant, dans le but d’ajouter un chapitre suivant à la science, l’industriel, avec l’espoir d’une utilisation matérielle. De ces efforts multiples et très différents, de ce labeur incessant de toute une légion de travailleurs, sort une industrie, qui n’est pas plutôt née qu’elle est grande et prospère. »1

2La société que Georges de Laire fonde une dizaine d’années plus tard, rue Saint-Charles à Grenelle, sur la base des travaux réalisés avec son ami Charles Girard sur les matières colorantes, ne vient pas contredire ces observations. En quelques années, elle devient le plus gros producteur français de corps odorants de synthèse, et à ce titre, l’un des acteurs majeurs de l’industrie mondiale de la parfumerie. Plus de 135 ans après sa fondation, près de 110 après son implantation sur son site actuel à Calais, la société Calaire Chimie, aujourd’hui propriété du groupe belge Tessenderlo, fait encore travailler environ 250 personnes, pour un chiffre d’affaires de 26 millions d’euros en 2009. Au cours de l’histoire, sa taille a souvent varié, la situant parfois à la limite de la moyenne et de la grande entreprise, si l’on se réfère à la définition fixée par la Commission européenne. La pérennité de cette entreprise, demeurée familiale jusqu’en 1981, en fait avant tout un cas singulier.

3Nous ne souhaitons pas pour autant assimiler ici pérennité et efficacité. Si la survie de l’entreprise constitue bien en soi une réussite, la notion d’efficacité nous semble dépasser ce seul critère. En l’absence de tout accès à des sources comptables susceptibles de fonder l’efficacité entrepreneuriale sur des critères financiers par ailleurs discutables (tels la marge commerciale, le taux de profit ou le taux d’endettement), le critère de l’innovation, reposant sur les compétences scientifiques et de réseaux de Georges de Laire (1836-1908), puis de son neveu Edgar de Laire (1860-1941), nous a semblé mieux que d’autres rendre compte de leurs qualités d’entrepreneurs au sens schumpetérien du terme, hommes d’innovation avant même d’être hommes de gestion.

  • 2 Joseph A. Schumpeter, Théorie de l’évolution économique : recherches sur le profit, le crédit, l’i (...)

4La figure de Schumpeter domine en effet la problématique de l’innovation, dont il fait dès 1912 un objet d’analyse dans sa Théorie de l’évolution économique2. Il la lie étroitement au rôle de l’entrepreneur, qui en escompte un profit et qui se trouve à l’origine de la « combinaison nouvelle » des facteurs d’offre, susceptible de créer une rupture endogène des routines du circuit. Cette conception a pour conséquence de placer l’innovation à l’intérieur de la structure de production. Pour autant, la question de l’origine de cette innovation, exogène ou endogène à la structure de production, est aussi centrale que difficile à circonscrire complètement dans le contexte de redistribution de l’industrie de la parfumerie à la fin du XIXe et au début du XXe siècle.

  • 3 Bernadette Bensaude-Vincent et Isabelle Stengers, Histoire de la chimie, Paris, La Découverte, 199 (...)

5Envisagée du point de vue de l’histoire des sciences, et non plus de l’industrie, cette dichotomie rejoint la distinction entre les catégories de « chimie pure » et « chimie appliquée », débat central inscrit dans la lignée des Cours de philosophie positive d’Auguste Comte (1830), qui érige en critère de civilisation la séparation entre science pure et recherche orientée vers la technique, et des déclarations de Justus von Liebig dénonçant, dans sa biographie de Francis Bacon (1863), l’utilitarisme de la science3.

6Nous nous proposons de discuter ici cette notion schumpetérienne de l’innovation, en la confrontant au cas spécifique des matières premières synthétiques de l’industrie de la parfumerie française, et de voir dans quelle mesure la problématique sur le caractère endogène de l’innovation recouvre exactement ou non celle de l’application de la recherche à l’industrie.

  • 4 Patrick Fridenson, « Les organisations : un nouvel objet », in Annales ESC, 1989, vol. 44, no 6, p (...)

7Patrick Fridenson le souligne en effet avec Alfred Chandler : les changements de stratégie ne sont susceptibles de rencontrer le succès que s’ils s’accompagnent de changements de structure des organisations4. Face à l’intensification de l’environnement concurrentiel et à la redistribution des acteurs de la parfumerie à la fin du XIXe siècle, l’industrie place ainsi au cœur de ses enjeux l’intégration des instances de recherche en matière d’innovation. Nous nous appliquerons à en mettre en évidence les mécanismes et à en décrire les modalités dans le cas des Fabriques de Laire.

8Nous avons choisi de nous intéresser à cette problématique de l’efficacité comprise en termes d’innovation et à ses implications en termes d’application de la recherche et de structure de l’organisation, pour la période 1876-1914 qui voit émerger les premiers succès des Fabriques de Laire sur les fondements d’une innovation technologique majeure, les corps odorants d’origine synthétique, et s’affermir leur réussite autour de deux sites industriels, à Issy-les-Moulineaux, en banlieue parisienne, et à Calais. Après avoir retracé le contexte dans lequel s’inscrit la naissance de l’industrie des corps odorants en France, nous analyserons la dynamique d’innovation continue au fondement du succès de l’implantation des Fabriques de Laire, pour identifier enfin les inflexions stratégiques décisives qui ont ancré dans la durée le développement de leur activité.

L’industrie française de la parfumerie à la fin du XIXe siècle

  • 5 Charles-Louis Barreswil, « La parfumerie en 1862 », in Charles Laboulaye éd., Annales du Conservat (...)
  • 6 Alfred Picard, Exposition universelle internationale de 1900 à Paris. Le bilan d’un siècle (1801-1 (...)

9Le secteur de la parfumerie connaît en France au XIXe siècle un essor remarquable. Représentant un peu moins de 2 millions de francs en 18105, la production d’articles de parfumerie s’élève à 80 millions en 1900, pour dépasser le seuil des 100 millions en 19126. Les progrès de l’hygiène, dont Alain Corbin et Georges Vigarello ont étudié les mécanismes complexes, interviennent pour expliquer le développement d’un vaste marché où la savonnette parfumée, dont les ventes représentent alors environ la moitié du chiffre d’affaires de l’industrie, tient une large place. Ce produit fait en effet figure d’instrument premier d’une lutte contre la crasse dont l’enjeu est symbolique, en assurant à bon compte au bourgeois un élément de distinction olfactif, tout autant que purement hygiénique. Du point de vue de la production, l’industrialisation du secteur est parallèlement marquée tout au long du siècle par un certain nombre d’évolutions technologiques majeures qui en augmentent très significativement la productivité et font chuter de façon importante les coûts de production. L’extraction des matières premières naturelles par les solvants volatils, qui vient s’ajouter au procédé de distillation à la vapeur d’eau connu et maîtrisé de très longue date, marque ainsi l’une des innovations les plus notables, en apportant de nouveaux produits à l’industrie.

  • 7 Eugène Charabot, Les parfums artificiels, Paris, Baillière et fils, 1900, p. 240.

10Mais la plus significative de ces innovations, celle qui consolide de la plus sûre manière la fortune des parfumeurs, reste aussi la plus discrète, imperceptible du point de vue des consommateurs. Les corps odorants artificiels, utilisés de façon significative en parfumerie à partir des années 1880, marquent un bouleversement de toute l’industrie. Ils permettent en quelques années d’accéder à des matières premières olfactivement très puissantes et beaucoup moins chères que leur équivalent naturel. C’est le cas par exemple de l’héliotropine à odeur d’héliotrope, synthétisée en 1869 par les chimistes Fittig et Mielk, dont la préparation, industrielle dès 1874, s’obtient avec un excellent rendement. L’ampleur des variations de prix est extrêmement importante : entre 1879 et 1899, le prix du kilogramme d’héliotropine est divisé par 100, passant de 3 790 F à 37,5 F7. Il en est de même des prix des autres matières premières d’origine synthétique principalement utilisées en parfumerie. Par les économies qu’elle entraîne pour les parfumeurs qui utilisent ces produits, la synthèse de corps odorants artificiels, en ouvrant de nouveaux segments de marché à des produits rendus plus accessibles, compte pour beaucoup dans le formidable essor de l’industrie de la parfumerie au XIXe siècle.

11René-Maurice Gattefossé, lui-même propriétaire des établissements Gattefossé, producteurs de matières premières pour la parfumerie à Lyon, dresse en ces termes le tableau de cette industrie à la veille de la Première Guerre mondiale :

  • 8 René Maurice Gattefossé, Nouveaux parfums synthétiques, 2e édition, Paris, Libraire centrale des s (...)

« Avant la guerre, la fabrication des parfums de synthèse était répartie entre vingt-cinq à trente usines : un petit nombre se spécialisaient dans les grosses productions de chimie pure, les fabriques de matières colorantes apportant leur appoint en “corps intermédiaires” utilisables par les laboratoires de parfumerie. Vingt usines de seconde importance et laboratoires annexés aux distilleries d’huiles essentielles de la région grassoise s’occupaient de préférence de la transformation chimique des constituants naturels. Enfin, trois fabriques étaient affectées exclusivement à la préparation du musc artificiel. Nous ne citerons que pour mémoire quelques laboratoires de particuliers, appartenant à des chimistes de recherches et produisant de préférence des nouveautés rares et coûteuses. Nous devons signaler aussi les succursales fondées en Suisse par plusieurs firmes françaises qui allaient y chercher la liberté d’emploi de plusieurs réactifs et des mesures administratives plus larges. »8

12Parmi les fabriques se spécialisant dans les grosses productions évoquées en premier lieu par Gattefossé, les usines de Laire dominent très largement le marché. C’est sur cette innovation, la synthèse de corps odorants artificiels, que Georges de Laire, en entrepreneur avisé, construit la réussite de son industrie.

Une dynamique d’innovation continue

Au commencement était la vanilline

  • 9 Eugénie Briot et Robert de Laire, « Edgar de Laire » in Itinéraires de chimistes 1857-2007. 150 an (...)
  • 10 Archives de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), brevet no 45 826 du 6 juillet (...)
  • 11 Archives de l’INPI, brevet no 48 033 du 2 janvier 1861.
  • 12 Archives de l’INPI, brevets no 57 557 du 3 mars 1863, pour le marron d’aniline, pris à Lyon ; no 7 (...)
  • 13 Brevet no 102 055, du 2 février 1874.
  • 14 Contrairement au cas du musc artificiel ou de l’ionone qui ne sont pas chimiquement identiques au (...)
  • 15 E. Charabot, « Les parfums artificiels à l’Exposition universelle », in Revue générale de chimie p (...)

13La Société Georges de Laire et Cie est fondée en 1876, par Georges de Laire9. Ses travaux, réalisés pour la plupart en collaboration avec son ami Charles Girard, portent d’abord sur les matières colorantes. Dès le début des années 1860, Georges de Laire et Charles Girard découvrent le bleu10, puis le violet de rosaniline11. Les brevets en sont bientôt exploités par la Société Renard frères et Franc, à Lyon (La Fuchsine), qui fabrique depuis plusieurs années déjà le rouge d’aniline. Jusqu’en 1867, les dépôts de brevets se succèdent12. Retiré de la société La Fuchsine en 1868, Georges de Laire, l’un des tout premiers en France, comprend l’importance des parfums de synthèse et décide de s’engager dans cette voie nouvelle, en fondant au 92, rue Saint-Charles à Grenelle une première usine principalement destinée à la fabrication de la vanilline, « givre » de la vanille naturelle, obtenu à partir de la coniférine, selon le procédé mis au point en 187413 par Ferdinand Tiemann et Wilhelm Haarmann14. Il figure en cela parmi les pionniers de l’industrie des corps odorants de synthèse, au même titre que ces deux derniers en Allemagne. L’usine Haarmann & Reimer destinée à cette production est construite à Holzminden (Basse-Saxe)15.

  • 16 Justin Dupont, « L’industrie des parfums artificiels », in La Nature, 1900, 28e année, 2e semestre (...)
  • 17 En 1981, c’est la société Haarmann & Reimer qui reprend les activités des Fabriques de Laire dans (...)
  • 18 Archives de l’INPI, brevet no 111 903 du 18 mars 1876 : Georges de Laire, « Brevet d’invention pou (...)
  • 19 Georges Jaubert, « La vanilline au point de vue fiscal », in Revue générale de chimie, tome 12, ja (...)

14Mais, réalisant bientôt la difficulté de se procurer en quantités suffisantes la matière première indispensable à une production régulière de vanilline (en 1881 l’exploitation d’un résineux abattu ne permet d’obtenir qu’une cinquantaine de grammes de coniférine, et le kilogramme de vanilline atteint alors un prix de vente de 8 000 à 9 000 francs16), Georges de Laire entreprend en collaboration avec Ferdinand Tiemann et Wilhelm Haarmann des recherches sur un nouveau procédé de préparation. Il en naît une solide amitié entre ces trois chimistes, à l’origine des liens très étroits qui unissent jusqu’à aujourd’hui le nom de de Laire à celui de Haarmann et Reimer17. Et, le 6 mai 1876, Georges de Laire dépose le brevet français pour la préparation de la vanilline par l’acétyleugénol, obtenu à partir de l’essence de clous de girofle18. Utilisée en parfumerie, la vanilline, dont le parfum est quarante fois plus puissant que celui de la vanille naturelle19, est aussi employée comme arôme alimentaire, particulièrement dans le chocolat, dont elle tempère l’amertume. Elle va supplanter dans cet emploi la cannelle et la fleur d’oranger jusque là couramment utilisées et permettre un développement considérable de l’industrie de la chocolaterie et de la biscuiterie. C’est sur ce procédé de fabrication d’un produit bientôt indispensable, la vanilline, que Georges de Laire fonde les premiers succès de son entreprise.

Les succès du musc et de la violette

  • 20 J. Dupont, « L’industrie des parfums artificiels », op. cit.

15Jusqu’en 1890, il se consacre uniquement au développement de son usine de Grenelle et à l’industrie des parfums de synthèse (héliotropine, aubépine, aldéhyde acétique à odeur de jacinthe, etc.). Au rang des plus importants d’entre eux, figurent le musc de synthèse, l’ionone et le terpinéol. Dès 1888, la Société Georges de Laire et Cie commence en effet l’exploitation du brevet du musc Baur, premier corps odorant de synthèse capable de remplacer en industrie le musc naturel. L’année suivante, de Laire prépare industriellement et introduit en parfumerie le terpinéol à odeur de lilas ou de muguet. Son prix est extrêmement bas (12 francs le kg en 1900), ce qui permet de l’utiliser pour les préparations dont les prix sont les plus modiques et, comme il est inaltérable sous l’action des alcalis, il est particulièrement employé en savonnerie20. En 1892 enfin, Georges de Laire et Ferdinand Tiemann publient en collaboration leurs travaux sur la racine d’iris, au terme de plusieurs années de recherches méthodiques en vue de la découverte de l’irone, puis de l’ionone, premier corps de synthèse permettant de reproduire le parfum de la violette.

  • 21 Archives de l’INPI, brevet no 229 683 du 27 avril 1893 : Ferdinand Tiemann, « Brevet d’invention p (...)

161892 est aussi l’année où Georges de Laire se retire pour laisser les rênes de sa société à son neveu Edgar de Laire, son collaborateur depuis 1887, après une formation de chimiste reçue dans le laboratoire de Ferdinand Tiemann. Edgar de Laire poursuit les travaux de son oncle dans le domaine de la chimie des parfums. La Société de Laire et Cie, ayant acquis la propriété du brevet français sur les ionones déposé par Tiemann en 1896 et celle de ses certificats d’addition21, l’une de ses premières réalisations d’envergure consiste précisément en la préparation industrielle de l’ionone, dont le succès commercial est considérable. Dès lors, la plus belle réussite est assurée pour longtemps à l’entreprise, car la violette représente entre tous le parfum favori du XIXe siècle. La Mode illustrée le proclame avec ferveur et conviction :

  • 22 La Mode illustrée, 37e année, no 24, dimanche 14 juin 1896, p. 191.

« En ce moment, le parfum préféré pour le mouchoir est la violette. […] Applaudissons ce choix : la violette, infiniment plus fine, plus douce, plus distinguée, est bien le parfum qui convient aux femmes comme il faut. »22

  • 23 Roger & Gallet : parfumeurs et créateurs, 1806-1989, Exposition du Musée municipal de Bernay, 3 ju (...)

17Si la violette est appréciée de longue date, son succès ne se dément pas dans les années qui suivent la synthèse de l’ionone. En 1910, ce sont par exemple cinq lignes de parfums à la violette qui coexistent chez Roger & Gallet : Violette de Parme (créé en 1880), Violette ambrée (1890), Vera Violetta (1892), Violette merveilleuse (1905) et Violette Rubra (1910). La seule ligne Vera Violetta compte en 1905, 31 références, correspondant à 16 produits différents23. Les plus grands noms de la parfumerie se fournissent en ionone chez de Laire.

  • 24 E. Charabot, « Les parfums artificiels à l’Exposition universelle », in Revue générale de chimie p (...)
  • 25 Archives de Laire, plis cachetés.

18Ainsi, en l’espace d’une quinzaine d’années, sur la base de ses découvertes liées à la production de la vanilline, Georges de Laire donne naissance à un acteur majeur de l’industrie chimique française, vérifiant l’intuition formulée en 1867. Intrinsèque à l’entreprise, puisque Georges de Laire lui-même, puis son neveu Edgar, en sont la source principale, l’innovation s’appuie cependant dès les débuts des Fabriques de Laire sur une collaboration étroite avec Ferdinand Tiemann et Wilhelm Haarmann. Dépassant le seul cadre scientifique, cette collaboration s’étend au champ commercial, lorsqu’il s’agit d’exploiter les brevets dont les recherches ont été menées conjointement, et de se partager les marchés français et allemand. Dans cette première phase de croissance de l’entreprise, les applications touchent presque exclusivement la parfumerie. À l’Exposition universelle de 1900, la vitrine de De Laire et Cie présente près de deux cents produits différents24. Dans les années qui suivent, le rythme d’innovation ne ralentit pas : pas moins de 121 plis cachetés sont déposés entre 1896 et 191325.

Développer de façon durable l’activité

La diversification, sources d’équilibre des activités

19Pour autant, si la production de corps odorants de synthèse compte pour une grande part dans la renommée de la société, Edgar de Laire s’emploie également à en diversifier les productions. En 1904, les Fabriques de Laire commencent la fabrication de café décaféiné, commercialisé sous la marque Sanka. La même année, Edgar de Laire dépose un brevet pour une matière plastique thermodurcissable obtenue à partir de l’urée et du formaldéhyde, qu’il baptise maléaze. Il s’agit là du premier brevet déposé dans le monde concernant la fabrication d’une résine, quatre mois avant que Baekeland ne dépose un brevet voisin pour un corps qu’il dénomme bakélite. La maléaze présente l’intérêt de reproduire l’aspect du marbre. À partir de ce corps, les Fabriques de Laire produisent des objets très divers : jetons de casino rouges, jaunes, marbrés, utilisés dans les casinos de Nice, d’Aix-les-Bains, etc. ; boîtes à poudres et pots de crème de luxe, destinés à des maisons de parfumerie aussi prestigieuses que Guerlain ou Coty. La préparation pratique du camphre à partir de l’essence de térébenthine compte alors également au nombre des productions les plus importantes des usines de Laire. Aux côtés des parfums synthétiques et des plastiques, l’industrie pharmaceutique constitue ainsi le troisième grand pôle d’activité d’une société dont la production ne cesse de s’accroître en même temps qu’elle se diversifie.

Adapter la structure à la croissance

20Pour faire face à ce développement rapide de l’activité, Edgar de Laire adapte la structure juridique de l’entreprise à sa croissance, en engageant plusieurs transformations de la Société de Laire et Cie. En 1901, elle devient société anonyme, sous la raison sociale Fabriques de produits de chimie organique de Laire, souvent plus simplement désignées sous le nom de Fabriques de Laire. Wilhelm Haarmann est membre du conseil d’administration, tandis que plusieurs professeurs de chimie comptent au nombre des actionnaires de la société.

21Autre bouleversement, touchant cette fois les structures de production : en 1905, l’usine de Grenelle, fondée par Georges de Laire, expropriée pour les travaux du métropolitain, est déplacée à Issy. Commencée dès 1897, l’usine d’Issy, aux portes de Paris, abrite les activités de production et le siège social de l’entreprise. Implantée au 129, quai des Moulineaux, sur un terrain en bordure de ligne de chemin de fer, le long des quais de la Seine, et à l’angle du pont qui relie Billancourt à Issy, l’usine jouit d’une situation particulièrement favorable.

22En 1905, les Fabriques de Laire font cependant l’achat à Calais d’un terrain de plus de dix hectares, entre le canal menant au port et la ligne de chemin de fer vers Lille et Bruxelles. Cette situation présente de réels avantages : une implantation portuaire ouverte sur le commerce avec l’Angleterre, les États-Unis, les Pays-Bas et l’Allemagne, une vaste surface non construite autour de l’usine, assurant la sécurité des riverains, un climat venteux permettant la dissipation des fumées. L’usine qui y est construite, principalement employée à la fabrication de camphre synthétique, est la première en France qui développe cette production à l’échelle industrielle. Le site d’Issy s’oriente dès lors de plus en plus nettement vers les travaux de préparation fines et spéciales (parfumerie et pharmacie notamment) et la recherche scientifique, tandis que Calais est réservé à la fabrication de volumes plus importants.

23En 1904 enfin, est implantée à Maywood, dans la banlieue de New York, une usine principalement destinée à la fabrication de la vanilline et de l’ionone, en collaboration avec Haarmann et l’Américain Schaefer, qui couvre les besoins du marché nord-américain.

Protéger les actifs immatériels de l’entreprise

  • 26 « Notice sur Georges de Laire », in Bulletin de la Société de chimie de France, 1909, tome 5, 5 ja (...)

24Un aspect important de l’activité des Fabriques de Laire consiste à protéger les actifs immatériels de l’entreprise, fruits de l’effort d’innovation soutenu depuis la fondation de la société. Revers du succès industriel, les Fabriques de Laire doivent en effet constamment lutter contre la contrefaçon, sans parvenir à véritablement l’entraver, tant en France qu’à l’étranger. En 1914, ce ne sont ainsi pas moins de dix procès qui sont engagés en France, et deux en Angleterre, tous remportés : une « série de victoires désastreuses, regrette Edgar de Laire dès 1909, qui n’arrêtaient rien et coûtaient fort cher financièrement et, plus encore, comme temps perdu »26.

  • 27 Albert Salmon, De l’industrie chimique pharmaceutique, thèse présentée à l’École supérieure de pha (...)

25Dans la même optique de préservation des ressources scientifiques, à la suite de Georges et Edgar de Laire, dont les talents de chimistes ont fondé les premiers succès de l’entreprise, les Fabriques de Laire s’attachent à s’entourer des meilleurs collaborateurs, puisant à l’extérieur les ressources susceptibles d’entretenir la dynamique d’innovation de l’entreprise. En 1919, en vue de la reconstruction de l’activité de l’usine qui a beaucoup souffert de la guerre, elles emploient à la tête de leurs services de fabrication sept chimistes diplômés des écoles supérieures de chimie : deux d’entre eux proviennent de l’Institut de chimie appliquée, un de l’École de physique et chimie, deux de l’École de chimie de l’université de Besançon, un de l’Institut de Lille ; une femme, enfin, est licenciée ès sciences. Le personnel de fabrication et d’entretien comprend alors 400 personnes, hors personnel de vente27, chiffre qui situe les Fabriques de Laire bien au-delà des limites de la PME fixées aujourd’hui par la Commission européenne. À la même époque, Raymond Delange, collaborateur du chimiste Charles Moureu (1863-1929), alors professeur au Collège de France, devient chef des services scientifiques. Cette recherche des meilleurs collaborateurs scientifiques, recrutés à l’échelle nationale, trouve son pendant dans l’importance donnée à la création olfactive.

26À cet effet, Edgar de Laire est épaulé dès les années 1895 par son épouse Marie-Thérèse qui travaille à trouver des applications olfactives à toutes les substances de parfumerie fabriquées par la Société. S’efforçant de fondre dans des parfums commercialisables les notes parfois violentes issues de la synthèse, elle témoigne d’un sens esthétique que les plus grands parfumeurs s’accordent à reconnaître et à louer. À partir de 1926, les Fabriques de Laire s’attachent également les services du parfumeur Edmond Roudnitska, salué aujourd’hui comme le plus grand parfumeur de l’après-guerre.

Conclusion

27Les années 1876-1914 ont ancré sur des bases solides le succès des Fabriques de Laire. Georges, puis Edgar de Laire apparaissent comme des figures archétypales de l’entrepreneur schumpetérien, modifiant par l’innovation les conditions technologiques de la production et créant ainsi les conditions génératrices du profit. Dans un tel contexte, c’est ce critère de l’innovation que nous avons souhaité retenir comme indicateur de l’efficacité. En entrepreneurs avisés, ils construisent, à partir de la réussite de la vanilline puis de l’ionone, les conditions de la pérennité de la société. L’élargissement de l’offre (1876-1905), la réorganisation de la production (1901-1905) et la mise en place de structures efficaces pour protéger les actifs immatériels de l’entreprise et préserver ses ressources scientifiques (1905-1919) en marquent les trois temps.

28Une dynamique d’innovation soutenue permet à l’entreprise de diversifier ses activités de parfumerie vers des domaines tels que l’industrie pharmaceutique, les plastiques et le café décaféiné Sanka, la recherche trouvant ainsi des applications dans des débouchés commerciaux que les Fabriques de Laire n’hésitent pas à créer elles-mêmes. L’adaptation de la structure juridique de l’entreprise et la redistribution de sa production sur les sites d’Issy et de Calais témoignent de la capacité d’adaptation des entrepreneurs face à la croissance de l’entreprise, en même temps qu’elles illustrent la recommandation chandlerienne selon laquelle une évolution de stratégie, en l’occurrence la diversification de la production, doit s’accompagner d’un changement de structure de l’organisation. Ce changement de structure n’est pas le reflet d’une externalisation de la recherche pour les Fabriques de Laire. L’innovation, qui reste de source endogène, trouve au contraire des applications dans de multiples domaines. Ce caractère endogène de l’innovation semble rester pour les Fabriques de Laire une volonté, malgré l’étroitesse des relations avec Ferdinand Tiemann et Wilhelm Haarmann, autant qu’une nécessité en termes de protection industrielle. La lutte contre la contrefaçon et une politique de recrutement des meilleurs collaborateurs, à l’échelle nationale, interviennent enfin comme autant de dispositifs susceptibles d’ancrer ces succès dans la durée, en entretenant des sources d’innovation endogènes à la société.

29Au terme d’une quarantaine d’années d’implantation et de développement, les Fabriques de Laire présentent le visage original d’une entreprise dont les recherches ont dicté les voies de diversification vers des marchés somme toute très différents. Si la parfumerie de luxe offre un débouché aux productions de matières plastiques, ce qui lui permet en cela de rejoindre les parfums artificiels, leur portefeuille de clients s’étend à des secteurs aussi divers que la pharmacie ou les casinos. De même, leur implantation sur deux sites de production, Issy-les-Moulineaux et Calais, les place dans une posture singulière, avec la possibilité d’agrandir significativement l’un des deux (Calais), et les confronte au choix de s’étendre très au-delà du volume de la moyenne entreprise ou au contraire de rester dans ce périmètre d’activité.

30Les années 1960 marquent l’heure d’une première série de choix et la redistribution de l’entreprise autour de deux activités maîtresses. Les Fabriques de Laire emploient alors environ 550 personnes, 200 à Issy-les-Moulineaux et 350 à Calais. L’option retenue est d’abandonner certaines productions, pour resserrer l’activité autour de la pharmacie et de la parfumerie. En 1960, la production du café décaféiné Sanka est arrêtée, puis en 1962 celle de la maléaze, concurrencée par de nouveaux plastiques, moins denses et moins chers. En 1965, après un premier accident survenu en 1961 qui l’avait détruit entièrement, l’atelier camphre est une seconde fois touché par une importante explosion. L’activité, fortement concurrencée par la production chinoise, beaucoup moins chère, est à son tour abandonnée.

31Jusqu’en 1980, la production s’articule autour de l’ionone à odeur de violette, de l’iraldéine, du produit appelé « fût 5 » (ingrédient principal de l’un des grands succès de l’après-guerre, le parfum Femme, de Rochas), de l’isobutylquinoléine qui représentent environ 30 % du chiffre d’affaires et, dans le secteur de la pharmacie, des dérivés du cyanure de benzyle : le noyau pénicilline (acide phénylacétique) et les amphétamines (phénylacétate de potassium). Les effectifs s’élèvent alors à 250 personnes. À cette date, les Fabriques de Laire sont cédées : le pôle pharmaceutique, dont les activités sont presque toutes regroupées à Calais, est vendu à Delagrange, tandis que l’usine d’Issy ferme. Le pôle parfumerie rejoint de son côté la société Haarmann & Reimer, avec laquelle les liens historiques sont demeurés forts. À l’heure où de grands groupes multinationaux sont en voie de constitution dans ces deux secteurs, il ne semble plus possible, pour une moyenne entreprise, de mener ces activités de front. Cette scission représente donc aussi un moyen d’assurer la pérennité de l’activité.

  • 28 La crise économique a depuis durement affecté l’entreprise, dont le chiffre d’affaires a reculé de (...)

32En somme, au terme de cette analyse, la structure de production calaisienne qui emploie en 2010, 250 personnes environ, paraît avoir trouvé jusqu’à la crise de 2008 son mode de gestion naturel grâce à un volume de moyenne entreprise28. La stratégie de diversification, pertinente au début du XXe siècle, qui avait été au fondement du développement, a laissé place à la redistribution régionale d’une activité spécialisée, articulant l’activité d’un groupe à l’échelle de la moyenne entreprise, à l’heure où ne semble plus de mise le miracle industriel spontané dont Georges de Laire s’émerveillait.

Notes

1 August Wilhelm von Hoffmann, Georges de Laire et Charles Girard, Matières colorantes dérivées de la houille : Exposition universelle de 1867 à Paris, Paris, P. Dupont, 1867, p. 3.

2 Joseph A. Schumpeter, Théorie de l’évolution économique : recherches sur le profit, le crédit, l’intérêt et le cycle de la conjoncture, Paris, Dalloz, 1935, 591 p.

3 Bernadette Bensaude-Vincent et Isabelle Stengers, Histoire de la chimie, Paris, La Découverte, 1993, p. 135.

4 Patrick Fridenson, « Les organisations : un nouvel objet », in Annales ESC, 1989, vol. 44, no 6, p. 1472.

5 Charles-Louis Barreswil, « La parfumerie en 1862 », in Charles Laboulaye éd., Annales du Conservatoire impérial des Arts et Métiers, Paris, Librairie scientifique industrielle et agricole d’Eugène Lacroix, 1re série, tome 4, 1863, p. 273.

6 Alfred Picard, Exposition universelle internationale de 1900 à Paris. Le bilan d’un siècle (1801-1900), tome V : « Industrie chimique. Industries diverses. Économie sociale », Paris, Imprimerie nationale, 1906, p. 115. Les chiffres de la production de produits de parfumerie que donne Alfred Picard sont les suivants : 12 millions de francs en 1836, 18 millions en 1856, 26 millions en 1866, 45 millions en 1878, 70 à 75 millions en 1889 et 80 millions en 1900.

7 Eugène Charabot, Les parfums artificiels, Paris, Baillière et fils, 1900, p. 240.

8 René Maurice Gattefossé, Nouveaux parfums synthétiques, 2e édition, Paris, Libraire centrale des sciences Desforges, Girardot et Cie, 1927.

9 Eugénie Briot et Robert de Laire, « Edgar de Laire » in Itinéraires de chimistes 1857-2007. 150 ans de chimie en France avec les présidents de la SFC, Paris, EDP Sciences, p. 123-127. Je remercie ici très sincèrement Robert de Laire pour les différents entretiens qu’il m’a accordés. Les sources concernant Georges de Laire et Edgar de Laire sont également : « Notice sur Georges de Laire », in Bulletin de la Société de chimie de France, 1909, tome 5, 5 janvier 1909, 8 pages ; « Discours d’investiture », extrait des procès-verbaux des séances, séance du vendredi 24 janvier 1913, ibidem, 1913, tome 13, p. 195 ; « Discours de fin de mandat », extrait des procès-verbaux de séances, séance du vendredi 23 janvier 1914, ibidem, 1914, tome 15, p. 217-219 ; Centenaire de la Société chimique de France (1857-1957), Paris, Masson, 1957 ; Archives nationales, LH 1446/71, dossier Edgar de Laire ; Archives de la SFP, Fabrique de produits de chimie organique de Laire, notice des produits pour la parfumerie, 1914 ; prix courants des produits pour la parfumerie, janvier 1926 ; notice des produits pour la parfumerie, 1939.

10 Archives de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), brevet no 45 826 du 6 juillet 1860.

11 Archives de l’INPI, brevet no 48 033 du 2 janvier 1861.

12 Archives de l’INPI, brevets no 57 557 du 3 mars 1863, pour le marron d’aniline, pris à Lyon ; no 70 876 du 21 mars 1866 pour le bleu de phénylamine ; no 75 168 du 21 février 1867 pour la mauvaniline ; no 75 168 du 25 février 1867 pour le violet et le bleu d’éthyl-mauvaniline.

13 Brevet no 102 055, du 2 février 1874.

14 Contrairement au cas du musc artificiel ou de l’ionone qui ne sont pas chimiquement identiques au produit naturel avec lesquels ils présentent des analogies olfactives, la vanilline est le principe aromatique le plus actif de la gousse de vanille. En 1872, Carles en avait fourni une analyse, fixé la formule exacte et préparé un certain nombre de dérivés (Carles, Étude chimique du givre de vanille, Association française pour l’avancement des sciences, 1873, mentionné par Septimus Piesse, Chimie des parfums et fabrication des essences, Paris, J.-B. Baillière et fils, 1903, p. 196, citant Eugène Charabot, Les parfums artificiels, Paris, J.-B. Baillière et Fils, 1900).

15 E. Charabot, « Les parfums artificiels à l’Exposition universelle », in Revue générale de chimie pure et appliquée, 1901, tome 4, p. 178.

16 Justin Dupont, « L’industrie des parfums artificiels », in La Nature, 1900, 28e année, 2e semestre, p. 299.

17 En 1981, c’est la société Haarmann & Reimer qui reprend les activités des Fabriques de Laire dans le domaine de la chimie des parfums.

18 Archives de l’INPI, brevet no 111 903 du 18 mars 1876 : Georges de Laire, « Brevet d’invention pour un « procédé de préparation de la vanilline », 2 p.

19 Georges Jaubert, « La vanilline au point de vue fiscal », in Revue générale de chimie, tome 12, janvier-décembre 1909, p. 19.

20 J. Dupont, « L’industrie des parfums artificiels », op. cit.

21 Archives de l’INPI, brevet no 229 683 du 27 avril 1893 : Ferdinand Tiemann, « Brevet d’invention pour un nouveau corps dénommé pseudo-ionone et ses diverses transformations avec leur application industrielle, notamment en parfumerie » et certificats d’addition des 18 septembre 1893, 21 octobre 1893, 17 novembre 1893, 19 décembre 1894, 6 octobre 1897, 30 décembre 1897, 8 avril 1898, 7 juin 1898, 14 janvier 1899, 21 janvier 1899, 26 octobre 1900, 10 avril 1901 et 7 juin 1901, 64 p.

22 La Mode illustrée, 37e année, no 24, dimanche 14 juin 1896, p. 191.

23 Roger & Gallet : parfumeurs et créateurs, 1806-1989, Exposition du Musée municipal de Bernay, 3 juin - 3 septembre 1989, Bernay, Association pour la promotion de la culture à Bernay, 1987, p. 49-50.

24 E. Charabot, « Les parfums artificiels à l’Exposition universelle », in Revue générale de chimie pure et appliquée, 1900, tome 3, p. 268.

25 Archives de Laire, plis cachetés.

26 « Notice sur Georges de Laire », in Bulletin de la Société de chimie de France, 1909, tome 5, 5 janvier 1909, p. IV.

27 Albert Salmon, De l’industrie chimique pharmaceutique, thèse présentée à l’École supérieure de pharmacie, Université de Nancy, Melun, Impr. E. Legrand, 1919, p. 205.

28 La crise économique a depuis durement affecté l’entreprise, dont le chiffre d’affaires a reculé de 52 % en 2009, et qui a subi une suppression de 51 postes en 2010.

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