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Espaces de pouvoir, espaces d’autonomie en Allemagne

 | 
Hélène Miard-Delacroix
, 
Guillaume Garner
, 
Béatrice von Hirschhausen

Les territoires d'identification

Aménagement de l’espace et ambitions réformatrices dans l’expérience des cités-jardins

Elsa Vonau

Texte intégral

1Au cours du XIXe siècle, les sociétés industrielles furent touchées par le phénomène d’urbanisation, à des degrés divers et selon des chronologies décalées. Malgré ces différences de conjoncture, les observateurs de ces mutations sociales formulèrent en des termes assez semblables le diagnostic de ce qu’ils percevaient comme une « crise urbaine » : la ville, révélateur de la « question sociale », servit non seulement de toile de fond, mais fournit aussi une grille d’intelligibilité à l’explication des transformations sociales. Conséquence des interférences entre le regard porté sur l’environnement urbain et le décryptage des formes sociales, le discours réformateur accorda une grande attention aux formes de spatialisation du social. Et d’une manière particulièrement prononcée dans l’Empire allemand, où l’urbanisation, tardive et intense, accrut la visibilité des recompositions territoriales et où la construction politique de l’État allemand mit en jeu une dimension territoriale qui s’imprima sur cette lecture « spatiale » des problèmes sociaux.

2La diffusion, au tournant du siècle, d’un projet urbain inspiré d’une expérience anglaise, celui de la Gartenstadt, révèle de manière exemplaire l’impact spécifique de ces questions d’« espace » sur le projet réformateur allemand. La conception que les réformateurs allemands ont développée à partir de l’expérience anglaise des cités-jardins revêtit effectivement des enjeux aussi bien sociaux que politiques : la cité-jardins, ville construite de toutes pièces, planifiée selon les lois de l’hygiène et du confort urbain, limitée dans son extension, posait, à travers son aménagement rationnel, le cadre idéal d’une sociabilité rénovée autant qu’elle contribuait à renforcer, grâce à une distribution équilibrée de ces ensembles urbains sur le territoire national, l’unification politique du pays. Malgré les aspects politiques mis en jeu par l’aménagement des cités-jardins, ce projet n’entendait pas entamer la souveraineté du pouvoir politique, c’est-à-dire remettre en cause la suprématie de l’État : les réformes ne devaient pas se déployer sur le terrain politique ou institutionnel, c’est au contraire l’espace public – au sens de Öffentlichkeit – qui devait fonder la trame du projet réformateur.

3La mise en œuvre du projet des cités-jardins en Allemagne offre donc l’occasion d’explorer le questionnement qui sert de fil conducteur à cet ouvrage, l’articulation entre espace territorial et espaces d’exercice du pouvoir. Plus particulièrement, nous nous demanderons ici comment l’aménagement de l’espace a servi de support aux ambitions réformatrices qui guidaient l’expérience des cités-jardins. Aborder cette question nous conduira à resituer l’expérience des cités-jardins dans le champ plus étendu de la réforme sociale en Allemagne. Cette mise en perspective nous permettra alors de montrer que, tout en s’inscrivant dans la continuité de l’action développée par les autres associations réformatrices, ce projet a tiré sa force d’une lecture performative des milieux qui a fait de l’espace public le terrain d’essai d’une réforme dont les enjeux furent aussi politiques. La construction d’une cité-jardins à Strasbourg mettra alors en évidence comment cette lecture a pu également libérer de nouvelles catégories d’intervention sur l’espace, débouchant aussi sur des réformes institutionnelles.

1. L’aménagement de l’espace au cœur du projet réformateur

Aménagement de l’espace et connaissance du social

  • 1 Il s’agit du Friedrichshagener Dichterkreis, auquel succèdera la Neue Gemeinschaft. Sur les origine (...)
  • 2 To-morrow : a Peaceful Path to Real Reform, tel était le tire de l’ouvrage dans lequel l’anglais Eb (...)
  • 3 On trouvera une description de la cité-jardins dans : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Die deutsc (...)
  • 4 Sur l’origine et le programme de cette association créée dans le contexte de l’unification allemand (...)
  • 5 Ibid., p. 173.
  • 6 Ibid., p. 171-172.
  • 7 Voir notamment : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Gartenstadtbewegung, op. cit., p. 6.
  • 8 Voir notamment Kampffmeyer Bernhard, « Bodenreform und Praxis » in : Gartenstadt, no 1-2, p. 1, sup (...)
  • 9 « Mais les mots écrits ou prononcés ne suffisent pas à sortir la masse des individus de leur léthar (...)
  • 10 Voir notamment Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Programm der DGG, Schlachtensee, Verlag der Deuts (...)
  • 11 L’idée de Praxis au nom de laquelle les réformateurs de la DGG ont justifié leur démarche et leur c (...)

4En 1902, des réformateurs allemands, impliqués depuis les années 1890 dans des projets communautaires1, changèrent le cap de leur activité, sans toutefois renoncer à la volonté de rénover la mosaïque sociale, et fondèrent la Deutsche Gartenstadtgesellschaft, association chargée de promouvoir en Allemagne la diffusion du projet des cités-jardins selon les principes d’Ebenezer Howard2. Ces villes, destinées à accueillir toutes les couches de la population et à poser le cadre, grâce à une composition rationnelle des espaces, d’un nouveau mode de gestion du social3, semblaient effectivement apporter de nouvelles solutions à la question sociale. En s’employant à diffuser cette expérience, la Deutsche Gartenstadtgesellschaft DGG – s’inscrivit donc dans la logique qui guidait l’action réformatrice depuis la seconde moitié du XIXe siècle et que le Verein für Sozialpolitik avait largement contribué à définir. Cette association phare du champ réformateur, créée en 1873, entendait œuvrer pour la consolidation de l’État allemand en mettant en œuvre des moyens de pacification sociale4 : elle préconisait une meilleure connaissance de la réalité sociale, condition au déploiement d’un interventionnisme approprié5. Selon cette conception, la démarche réformatrice, et partant toute action politique, devaient reposer sur une bonne connaissance de la réalité sociale : la constitution d’une véritable science sociale, étayée par la constitution d’enquêtes statistiques et de monographies, fondait le socle des activités réformatrices, mais également des décisions législatives6. S’inscrivant dans cette continuité, la DGG se définit comme une association de propagande7, qui, si elle n’entendait pas entamer les prérogatives des pouvoirs publics8, s’attribuait un rôle pionnier dans la promotion de nouveaux modes d’intervention inspirés d’une connaissance approfondie de la réalité sociale9, mais aussi d’une nouvelle gestion du social expérimentée dans l’enceinte des cités-jardins10. Valorisation de la connaissance, démarche expérimentale – « Praxis »11 –, et visée prescriptive : tels étaient les pôles qui encadraient justement l’action de la Deutsche Gartenstadtgesellschaft et qui mettent en valeur le rôle particulier que la propagande de la DGG attribua à la composition des formes spatiales.

  • 12 « Des milliers de fils nous relient à notre environnement. Nous sommes constamment soumis à l’influ (...)
  • 13 Comme en témoigne l’importance que les fondateurs de la DGG ont accordé à l’image et aux représenta (...)

5C’est effectivement à travers le prisme de l’organisation spatiale que les promoteurs du projet des cités-jardins abordèrent le social12 et c’est à partir d’une enquête sur les milieux13 qu’ils approfondirent leur connaissance du social. Conformément à la logique qui établissait le savoir comme prémice de l’action politique, cette mise en forme spatiale du social ne modela pas seulement le regard qu’ils portaient sur la société de leur temps, elle détermina leur action et déboucha sur une lecture performative de l’espace. Cette lecture, fruit des fonctions attribuées à la réforme sociale, fut déterminée en outre par le statut accordé à l’opinion publique – Öffentlichkeit – dans la propagande de la DGG.

Projet réformateur et constitution d’une Öffentlichkeit

  • 14 Voir le bilan détaillé des activités de propagande qui clôt systématiquement les numéros de la revu (...)
  • 15 On se reportera par exemple au récit de la création du Ortsgruppe de Chemnitz : DGG, Gartenstadt, 3 (...)
  • 16 Pour une mise en perspective de ces conceptions dans le contexte plus large de la réforme sociale, (...)
  • 17 Voir notamment Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Programm der DGG, op. cit.

6Pour réaliser les deux objectifs – connaissance et prescription – assignés à l’œuvre réformatrice, les promoteurs du projet des cités-jardins confortèrent la visibilité et la solidité institutionnelle de la jeune association en favorisant son implantation au niveau local. Les activités de propagande des premières années débouchèrent notamment sur l’organisation d’expositions itinérantes et la tenue de conférences au sein du vaste réseau associatif de la réforme sociale14 si bien que la DGG réussit rapidement à tisser un maillage étendu d’associations locales, les „Ortsgruppen“, relais de l’association mère, destinées à promouvoir le succès pratique de la propagande : c’est en effet le jeu des alliances et des coalitions d’intérêt à l’échelle locale qui favorisa la construction des cités-jardins15. L’enracinement local de la DGG, s’il apparaissait comme une étape nécessaire à la consolidation institutionnelle de la jeune association, ainsi qu’à la réalisation pratique de son programme – c’est-à-dire la construction –, visait aussi la constitution d’un espace public. À cet égard, les promoteurs de l’expérience des cités-jardins ne faisaient que reprendre à leur compte les conceptions qui, depuis la seconde moitié du XIXe siècle, orientaient l’action des réformateurs sociaux16 : grâce à la mise en place d’un réseau associatif s’étendant à l’ensemble du territoire national, sorte de creuset qui brasserait des acteurs venus de tous bords, les fondateurs de la DGG œuvraient pour la synergie des forces et des initiatives17, condition à l’instauration d’un nouvel espace public, forum qui servirait de laboratoire à un nouveau modèle de paix sociale.

7Certes, en prônant l’alliance des compétences et des opinions au sein d’un vaste réseau associatif en marge du politique, les fondateurs de la DGG n’innovaient pas. La mise en œuvre de ce catéchisme réformateur révèle néanmoins des aspects plus originaux. Cette profession de foi se greffa effectivement sur les projets de construction des cités-jardins, l’espace de la cité-jardins servant de terrain d’essai à ces modèles associatifs.

2. Espace public et lecture performative de l’espace

Cité-jardins et espace public : consolidation de l’esprit communautaire

  • 18 Osthaus Karl-Ernst, « Gartenstadt und Städtebau » in : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Bauordnun (...)
  • 19 Biel F., Wirtschaftliche und technische Gesichtspunkte zur Gartenstadtbewegung, Leipzig, H. A. Ludw (...)

8En 1911, au seuil de cinq années d’expériences accumulées, l’Assemblée générale de la DGG dressait un inventaire des principes urbanistiques de la cité-jardins : style épuré et organique, petites parcelles, maisons bâties en rangée, jardin conçu comme la prolongation de l’habitat toujours aménagé derrière la maison, séparation des voies de circulation et des voies « résidentielles », valorisation des bâtiments publics par des effets d’optique ou de relief18. Alors que la construction des cités-jardins commençait à s’ordonner selon un programme réglé, la cité-jardins renvoyait à une physionomie précise. Le terme s’était répandu dans la vie quotidienne pour désigner un type particulier d’aménagement devenu familier19.

  • 20 Muthesius Stefan, The English Terraced House, New Haven, Londres, Yale University Press, 1982, p. 1 (...)
  • 21 Pour plus de précisions sur ce mode de construction en rangée, on se reportera à la note 1 de l’art (...)
  • 22 Voir Huber Victor Aimé, « Über innere Kolonisation », article de 1846, publié in : Frank Hartmut, S (...)

9C’est la nostalgie d’une communauté organique qui imprima au projet architectural élaboré au fil des expériences de construction un profil et une cohérence spécifiques. La construction des maisons en rangée, Reihenhäuser, le plus souvent imposée par la réduction des coûts de construction, y trouva ainsi sa justification esthétique. Copiée de l’architecture des cités anglaises20, la construction des maisons en rangée était peu développée au tournant du siècle en Allemagne, hormis dans certaines régions où elle figurait parmi les traditions locales comme à Brême ou dans certaines cités ouvrières construites au XIXe siècle21. Elle définit pourtant rapidement un trait typique de l’architecture des cités-jardins. Cette évolution n’allait pas de soi : au tournant du siècle, les réformateurs honnissaient les modes d’habitat collectif qui entravaient le cloisonnement de la vie privée22. Le mouvement allemand des cités-jardins inversa la tendance et légitima cette nouvelle forme architecturale qui dotait la communauté d’une physionomie particulière.

10Cette physionomie était en partie caractérisée par l’importance dévolue aux espaces publics, jardins, places ou rues qui dans leur aménagement exprimaient l’idée du voisinage, de la rencontre. Mais le point d’ancrage de la communauté, le socle du lien organiciste, c’était bien entendu le territoire sur lequel la cité était construite : l’architecture des cités-jardins valorisait de manière particulière la thématique de l’enracinement. Migge, engagé comme architecte-paysagiste dans de nombreuses cités-jardins, donna chair aux motifs de l’enracinement et de l’appartenance développés au même moment par les différents organes du mouvement Heimat, en les plaçant au cœur de sa théorie esthétique :

  • 23 Migge résume en ces quelques lignes les travaux qu’il publia avant 1914 sur la réforme nécessaire d (...)

Ce que l’on appelle la maison de campagne „Landhaus“ du citadin actuel n’a plus rien de commun avec le terroir sur lequel elles sont bâties. Leurs silhouettes, ces constructions surannées avec ces toits romantiques et leurs meubles encombrants […] sont le signe sentimental et coquet d’une nature idéalisée et trompeuse. […] Une maison ne peut être considérée comme un corps, un organe de la nature qu’à partir du moment où elle prend racine dans le sol et y croît comme une plante23.

  • 24 Id., « Die kleinen Gärten in der Gartenstadt » in : Gartenstadt, no 4, avril 1913, p. 68.
  • 25 Migge indique que le décor végétal mural favorise le « glissement » de l’édifice vers le jardin : I (...)

11Effectivement, le principe esthétique édicté par Migge devint progressivement un trait saillant de l’architecture des cités-jardins. Les architectes, par le jeu de certains détails architecturaux, n’ont cessé de rappeler la symbolique prééminente du territoire dans l’aménagement des cités-jardins. Le socle des maisons fut ainsi doté d’une importance particulière, parfois traité comme un élément décoratif24. Le décor végétal qui ornait les façades ne contribuait pas seulement au pittoresque de la cité, il arrimait à proprement parler les bâtiments au territoire25. Les théories de Camillo Sitte trouvèrent leur expression adéquate dans l’urbanisme des cités-jardins qui adaptait l’architecture des bâtiments à la topographie. Enfin, le mobilier de la cité-jardins, qu’il s’agisse des bancs sur les places publiques ou devant les maisons, tout en étant une survivance des traditions villageoises, contribuait lui aussi à asseoir les habitants dans un lieu particulier et à ancrer leur sentiment d’appartenance à une communauté.

  • 26 Nous devons nous contenter de signaler ici les interférences qui existent entre les conceptions de (...)

12L’espace public des cités-jardins apparaissait donc comme la surface de projection du lien communautaire, et par ricochet de la cohésion nationale26. Cet aspect n’a pas de quoi surprendre alors que cette approche organiciste du social caractérisait plus généralement la démarche des réformateurs sociaux. Nous avons souligné plus haut que le souci de l’unité nationale et de son maintien guida l’action du Verein für Sozialpolitik. En articulant ce discours idéologique au programme architectural des cités-jardins, les acteurs impliqués dans l’expérience des cités-jardins ont accordé aux formes spatiales une force particulière dans la mise en œuvre d’un projet social : la lecture performative de l’espace dont rend compte l’architecture des cités-jardins a libéré de nouvelles catégories d’intervention destinées à la gestion du social, octroyant aux réformateurs de nouvelles marges de manœuvre en dehors du champ politique. C’est ce que révèle la mise en scène de l’espace public des cités-jardins qui obéit à un programme de promotion culturelle.

Promotion culturelle et aménagement d’un espace public

  • 27 Kampffmeyer Hans, « Gartenstadt und Baukunst » in : Moderne Bauformen. Monatshefte für Architektur, (...)
  • 28 Id., Gartenstadt und ästhetische Kultur, tract no 6, Schlachtensee-Berlin, Verlag der DGG, p. 13.

13La DGG ne cessa d’insister sur l’importance de la culture dans la cité-jardins. Elle s’interrogea notamment sur les moyens à mettre en œuvre pour offrir au plus grand nombre une éducation culturelle27. C’est par une mise en scène de l’espace urbain qu’elle espérait réaliser cette démocratisation de l’héritage culturel. Cette mise en scène remplissait en effet deux fonctions. En ponctuant l’environnement immédiat des habitants de citations culturelles, la visée pédagogique du programme esthétique des cités-jardins se doublait d’une volonté heuristique. Dans la cité-jardins, la promotion culturelle tirait parti de la vie quotidienne. L’institution de « coopératives artistiques » – Kunstgenossenschaften – préconisée par les responsables de la DGG, devait satisfaire la transmission du bon goût : elles supervisaient aussi bien l’acquisition d’ustensiles domestiques que celle des reproductions artistiques destinées à la décoration des maisons28. Les habitants étaient en effet incités, par des concours, à décorer leurs maisons et jardins :

  • 29 Id., Die Gartenstadtbewegung, Leipzig, Teubner, 1913, p. 95.

Pour encourager l’aménagement soigné et élégant des jardins, on pourrait, comme cela a déjà eu lieu dans la cité-jardins anglaise, distribuer des prix ; je ne serais cependant pas partisan d’octroyer de l’argent mais plutôt une belle lithographie réalisée par des artistes, un vase aux couleurs fraîches, un bon livre. Ainsi, on ne transmettrait pas seulement à la personne primée un souvenir durable, mais aussi un sentiment de joie de vivre qui trouverait une expression digne29.

  • 30 Ibid., p. 104.

14L’introduction de cours de peinture envisagée par la DGG s’inscrivait dans cet esprit. Loin d’être conçus comme la transmission d’un bagage théorique, ces cours devaient, par un apprentissage pratique, développer le sens esthétique des habitants. On entendait leur apprendre à décorer leur environnement immédiat, notamment par la peinture des volets ou des meubles30 :

Quelle occasion fabuleuse de réveiller et de développer le plaisir de la couleur qui existe encore chez beaucoup !

  • 31 Rüdiger vom Bruch applique à l’origine ce questionnement au mouvement réformateur dans son ensemble (...)
  • 32 Kampffmeyer H., Gartenstadtbewegung, op. cit., p. 89-90.

15Cette orientation esthétique, si elle alignait l’expérience allemande des cités-jardins sur les conceptions de l’art social qui imprégnaient plus largement le champ de la réforme sociale au niveau européen, consacrait aussi la spécificité du projet allemand. Les différentes représentations communautaires qui jalonnèrent l’unification politique de l’État se greffèrent effectivement sur ces conceptions si bien qu’il faut s’interroger, comme le faisait Rüdiger vom Bruch au sujet du mouvement réformateur dans son ensemble, sur la nature de l’idéal social qui sous-tendait le programme culturel des cités-jardins : décrivait-il l’harmonisation des différences au sein d’un tout « pluraliste » ou au contraire la nostalgie d’une harmonie communautaire fusionnelle qui transcenderait les tensions31 ? Il est impossible de répondre à la question de manière tranchée : la cité-jardins, si elle semblait offrir un cadre idéal à la renaissance de l’organisation corporative32, s’affirma également comme le terrain d’essai de nouveaux modes de participation démocratique.

  • 33 Brenne Winfried, Bruno Taut. Meister des farbigen Bauens in Berlin, Berlin, Deutscher Werkbund Berl (...)
  • 34 Certaines façades de Falkenberg rappellent les façades de la renaissance. Certains détails – boiser (...)
  • 35 « Hier wohnen lauter Arbeiter und die haben ja keinen Geschmack ! » in : Der Falkenberg, no 3, 1916 (...)

16Il suffit, pour s’en convaincre, de considérer les expériences que tenta l’architecte Bruno Taut dans les cités-jardins de Falkenberg et de Magdebourg, en introduisant de façon osée la couleur sur les façades des maisons33. Il ne cherchait pas uniquement à agrémenter le quotidien des habitants d’un décor harmonieux, mais entendait faire participer les habitants de la cité à un programme esthétique. Ainsi, il appliquait l’art des peintres à l’architecture, son usage de la couleur étant fondé sur une connaissance poussée des alliances chromatiques. Son architecture, loin de se résumer à une coulisse bigarrée, faisait, par le truchement de motifs picturaux, référence à diverses traditions culturelles34. L’art descendait dans la rue : on comprend mieux pourquoi la cité-jardins de Falkenberg, cible des critiques, fut à l’époque comparée à une palette de peinture – „Tuschkastensiedlung35. La cité-jardins devenait une sorte de musée vivant et son architecture était à la fois le lieu et l’objet de l’exposition. Un des chefs de file de la DGG, Hans Kampffmeyer, envisagea, dans cette logique, la création d’un musée dans la cité-jardins, non comme un sanctuaire destiné à recueillir des collections, mais comme un lieu de rencontre parsemé de sculptures, ou agrémenté de bains et dont les murs auraient été tapissés de fresques :

  • 36 Ibid., p. 96.

Je souhaiterais que les œuvres d’art présentes dans la cité-jardins soient plus proches des habitants et agissent sur le développement de leur vie intérieure plus qu’ils ne le feraient dans le musée le mieux aménagé. Si l’on venait à dépenser de l’argent pour l’achat de tableaux, il conviendrait de faire réaliser par un bon peintre de belles fresques aux murs des salles de réunion afin de pouvoir, à chaque rencontre, en jouir de manière inédite. Et l’on pourrait orner de sculptures les bâtiments et les puits les plus majestueux de la cité afin de contenter et de rassasier la vue des passants. Ou bien l’on pourrait les placer dans des bains d’eau ou d’air pour que les habitants apprennent à prendre goût à la beauté de leur corps et au soin de ses formes36.

  • 37 Voir notamment vom Bruch Rüdiger, « Gesellschaftliche Funktionen und politische Rollen des Bildungs (...)
  • 38 Wolfgang Kaschuba a montré, à partir d’un corpus de mémoires et de récits autobiographiques de la p (...)

17Le rôle assigné à l’espace dans la transmission d’un patrimoine culturel s’inscrivait dans un mouvement plus général qui, au tournant du siècle, percevait les tensions sociales comme l’expression d’une « crise culturelle ». Dans cette logique, la culture était conçue, par des élites issues d’une bourgeoisie à multiples facettes, comme un moyen de fédérer, au-delà des clivages sociaux, territoriaux et politiques, une société autour de valeurs partagées37. Partant, ces élites réactivaient un idéal hérité de la première moitié du XIXe siècle38 qui fut transposé dans la communauté des cités-jardins. Ainsi, dans l’esprit des responsables de la DGG, le musée, dans la cité-jardins, figurait non seulement comme institution culturelle mais aussi comme lieu de rencontre qui avait vocation à fédérer la communauté des habitants autour d’un programme culturel. Dans son acception de la culture, le mouvement des cités-jardins rejoignait la conception presque mystique des élites éclairées du tournant du siècle : non pas accumulation encyclopédique de savoirs éteints mais références communes autour desquelles se créerait un nouveau consensus social.

18La mise en œuvre de ce programme culturel à travers l’aménagement de la cité semble révéler la signification qu’a pu revêtir la démarche réformatrice dans un régime autoritaire : création d’un nouvel espace public, support de réformes sociales menées en marge du politique. Dans certaines conjonctures, cette lecture performative de l’espace a néanmoins débouché sur des réformes institutionnelles. Ainsi à Strasbourg, où la création d’une cité-jardins nous donne l’occasion d’examiner dans quelle mesure cette lecture performative a pu engendrer de nouvelles catégories d’intervention, ferment d’un nouveau mode de gestion urbaine.

3. Construction de la cité-jardins du Stockfeld à Strasbourg : instrument d’un type inédit de politique urbaine

La cité-jardins du Stockfeld, conséquence de la modernisation et de la spécialisation de l’administration strasbourgeoise

  • 39 Stéphane Jonas esquisse le contexte dans lequel cette construction fut projetée : Jonas Stéphane, « (...)
  • 40 Ibid., p. 202-203.

19La construction de la cité-jardins du Stockfeld, à Strasbourg, constituait l’un des volets d’une politique ambitieuse de grands travaux, inaugurée par une municipalité énergique et audacieuse. La cité-jardins, projetée dès 1907, était effectivement destinée à accueillir la population ouvrière que la percée d’une grande artère s’étendant du Nord au Sud de Strasbourg allait déloger39. Ce ne fut pourtant pas la municipalité qui prit en charge la construction, elle fut déléguée à une Société coopérative de construction, la Gemeinnützige Genossenschaft, créée en 1899 sur son initiative40.

  • 41 Alexander Dominicus dresse un tableau des différentes facettes de la gestion urbaine initiée par la (...)
  • 42 Voir Socolopo (société coopérative de logements populaires), Historique depuis la fondation, Strasb (...)
  • 43 Voir « Wohnungsamt » in : Verwaltungsbericht der Stadt Strasburg i. E. für die Zeit vom 1. April 19 (...)
  • 44 Dominicus A., Straßburgs deutsche Bürgermeister, op. cit., p. 17.
  • 45 Jonas S., « Stockfeld… », op. cit., p. 209.
  • 46 Dominicus A., Straßburgs deutsche Bürgermeister, op. cit., p. 57.

20Malgré ce transfert de compétence, l’aménagement de la cité-jardins du Stockfeld peut être appréhendé comme l’un des versants d’une réforme plus globale de la gestion urbaine, initiée à Strasbourg à partir de 187141. Premier indice de la spécificité et des enjeux de ce projet de construction dans la réforme institutionnelle de l’administration municipale, les acteurs qui dominaient le conseil de surveillance et le comité directeur de la gemeinnützige Genossenschaft lorsque l’édification de la cité fut projetée : si le nombre élevé des représentants municipaux saute aux yeux, un examen plus approfondi laisse apparaître la prédominance des acteurs d’un des services de l’administration municipale, le Wohnungsamt, et la détention par les adjoints – Beigeordnete – de fonctions-clefs42. La présence de ces acteurs semblait alors inscrire ce projet de construction dans un mouvement plus large de spécialisation et de modernisation des services municipaux. Le Wohnungsamt, créé en 1905, constituait effectivement l’un des services d’une administration municipale qui vouait aux affaires sociales une place importante. Il coordonnait les questions relatives au logement, de l’inspection des logements insalubres à la promotion de l’habitation économique dont la cité-jardin du Stockfeld constitua le premier projet d’envergure43. Les adjoints – Beigeordnete – impliqués dans le projet de la cité-jardins témoignaient, quant à eux, de la professionnalisation des services municipaux inaugurée en 189644 : fonctionnaires salariés, ils avaient été nommés à la tête de l’administration municipale pour y remplacer les notables bénévoles. Fait intéressant : cette relève fut prise par des hommes qui, trentenaires, appartenaient à la même génération et étaient impliqués dans le mouvement de la réforme sociale. On s’attachera, pour ne citer qu’un exemple, à la figure emblématique d’Alexander Dominicus qui occupa de surcroît une position centrale dans le projet de la cité-jardins : à la tête de la Société coopérative de construction, il présida aussi le jury du concours destiné à sélectionner les plans de la future cité-jardins45. Dominicus n’était pourtant pas, à l’origine, un spécialiste des questions d’habitat populaire : entré à 27 ans dans l’administration en tant que fonctionnaire en détachement, il fut d’abord l’assistant de von der Goltz, responsable du département des affaires sociales, qui le forma et l’initia aux questions sociales. Puis, ses compétences et sa connaissance du terrain social lui valurent d’être nommé au poste d’inspecteur du logement qui venait d’être créé46. Ce poste, créé pour la première fois dans l’histoire de l’Empire allemand, constitua un levier dans sa carrière et les fonctions qui lui furent confiées à la tête du projet des cités-jardins signalaient cette promotion.

Description des espaces, enquête sur les milieux : l’expertise comme support de la modernisation de l’administration strasbourgeoise

  • 47 Ibid., p. 23.
  • 48 Socolopo, Historique, op. cit., p. 33.
  • 49 Il s’agit des rapports publiés par Nikolas Geissenberger, chef des services statistiques et mention (...)

21La trajectoire professionnelle de Dominicus n’est pas seulement l’indice du mouvement de professionnalisation qui a sous-tendu l’organisation des services municipaux de Strasbourg, elle rend également compte de l’impact, sur la réforme de la politique urbaine menée à Strasbourg, d’une conception particulière de l’expertise dans laquelle l’attention portée à l’espace et à son arrangement a joué un rôle déterminant. Les acteurs impliqués dans le projet de la cité-jardins, et plus largement engagés dans la promotion du département des affaires sociales, témoignent en effet du rôle moteur joué par les « spécialistes » : professionnels de l’administration, ils affichaient, à l’instar de Dominicus, une compétence particulière pour les affaires sociales. En outre, le nouveau type de gestion sociale inauguré par l’administration strasbourgeoise, et dont le projet des cités-jardins constituait une facette, consacrait le privilège accordé par le Verein für Sozialpolitik à la science et au savoir dans l’action réformatrice. Alexander Dominicus était docteur en droit de l’Université de Strasbourg. Le maire de la ville, Rudolf Schwander, très impliqué dans le projet, était docteur en sciences politiques47. Enfin, le Dr. Van Calker, professeur de droit de l’Université de Strasbourg, siégea de 1909 à 1919, au titre de conseiller municipal, au Conseil de surveillance de la société de construction et de gestion de la cité du Stockfeld48. Enfin, autre signe de la place accordée au savoir dans la démarche réformatrice, la décision de construire une cité-jardins fut très liée à l’importante production de rapports, d’enquêtes et de statistiques relatives à la situation de l’habitation populaire49.

22Cette dernière précision n’a pas valeur d’anecdote : elle montre au contraire à quel point l’enquête sur les milieux de vie, plus largement le regard porté sur l’espace et son aménagement, a participé de la définition de l’expertise comme instrument de politique sociale. Spécialiste de la question sociale, Dominicus était également un homme de terrain. Cet inspecteur du logement tirait avant tout son expérience et son savoir des enquêtes qu’il avait réalisées sur les logements insalubres. Et il y a fort à parier que c’est cette expérience du terrain qui lui valut de diriger l’entreprise du Stockfeld. Le projet de la cité du Stockfeld témoigne donc de l’importance qu’a eue l’attention à l’espace et à son occupation – par le truchement des enquêtes et des rapports chiffrés – dans l’émergence de nouvelles catégories d’intervention sur l’espace et la mise en œuvre de réformes institutionnelles.

 

23Les conceptions de la réforme sociale se greffèrent sur le projet des cités-jardins développé au sein de la DGG. Néanmoins, c’est l’espace, considéré à la fois comme surface de projection des réalités sociales et comme instrument d’intervention sur le social, que le projet plaça au centre de l’action réformatrice. L’enquête nous a permis d’observer comment cette lecture performative de l’espace avait gouverné l’aménagement de la cité-jardins, l’espace public devenant le terrain d’essai de nouveaux modes de participation démocratique. La construction d’une cité-jardins à Strasbourg nous a donné l’occasion d’analyser une constellation singulière : ce projet est effectivement apparu comme un des volets, mais également comme la consécration d’une politique urbaine qui entendait, dans la logique réformatrice, accorder l’action politique à une meilleure connaissance du social, cette connaissance reposant entre autres sur une lecture des formes spatiales.

Notes

1 Il s’agit du Friedrichshagener Dichterkreis, auquel succèdera la Neue Gemeinschaft. Sur les origines de la Deutsche Gartenstadtgesellschaft, voir notamment : Hart Julius, « Friedrichshagen. Aus meinen Lebenserinnerungen » in : Velhagen § Klasings Monatsheften, 1919, p. 652-656. Ainsi que : Cepl-Kaufmann Gertrud, Kauffeldt Ralf, « Friedrichshagener Dichterkreis » in : Wülfing Wulf (dir.), Handbuch literarisch-kultureller Vereine, Gruppen und Bünde 1825-1933, Stuttgart, Metzler, 1998, p. 112-126.

2 To-morrow : a Peaceful Path to Real Reform, tel était le tire de l’ouvrage dans lequel l’anglais Ebenezer Howard avait développé l’idée de la Garden city et qui servait de référence aux réformateurs impliqués dans la création de la Deutsche Gartenstadtgesellschaft.

3 On trouvera une description de la cité-jardins dans : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Die deutsche Gartenstadtbewegung, Berlin-Schlachtensee, Verlag der Deutschen Gartenstadt-Gesellschaft, 1911.

4 Sur l’origine et le programme de cette association créée dans le contexte de l’unification allemande, voir : vom Bruch Rüdiger, « Bürgerliche Sozialreform im deutschen Kaiserreich » in : vom Bruch Rüdiger, Bürgerlichkeit, Staat und Kultur im Kaisserreich, Stuttgart, Steiner, 2005, p. 166-272. On se reportera en particulier aux pages 166-190.

5 Ibid., p. 173.

6 Ibid., p. 171-172.

7 Voir notamment : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Gartenstadtbewegung, op. cit., p. 6.

8 Voir notamment Kampffmeyer Bernhard, « Bodenreform und Praxis » in : Gartenstadt, no 1-2, p. 1, supplément à Hohe Warte, 4e année, 1908.

9 « Mais les mots écrits ou prononcés ne suffisent pas à sortir la masse des individus de leur léthargie résignée, il faut les amener à voir. Nos expositions itinérantes y contribuent avec succès. S’appuyant sur de nombreuses vues, des plans et des maquettes, des plans d’aménagement et un abondant matériau statistique relatifs aux cités-jardins allemandes et étrangères, elles montrent d’une manière édifiante ce qui a déjà été réalisé et comment les hommes, grâce à l’entraide, ont accru leurs faibles forces. », description du projet de la DGG in : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Gartenstadtbewegung, op. cit., p. 12.

10 Voir notamment Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Programm der DGG, Schlachtensee, Verlag der Deutschen-Gartenstadt-Gesellschaft, 1904, Abschnitt b).

11 L’idée de Praxis au nom de laquelle les réformateurs de la DGG ont justifié leur démarche et leur conception de la réforme sociale attribue à l’expérimentation – au sens de « bonne pratique », Good practice – un rôle central dans l’action réformatrice. Voir notamment : Kampffmeyer B., « Bodenreform », op. cit. p. 1.

12 « Des milliers de fils nous relient à notre environnement. Nous sommes constamment soumis à l’influence de notre milieu. » : cette phrase, extraite du numéro de la revue Hohe Warte dans lequel les fondateurs de la DGG ont décrit le projet des cités-jardins et défini leur programme, résume de manière de manière exemplaire cette approche du social. In : „Gartenstadtnummer“, Hohe Warte, vol. 3, cahier no 1, 1906, p. 107.

13 Comme en témoigne l’importance que les fondateurs de la DGG ont accordé à l’image et aux représentations plastiques pour transmettre la connaissance d’autres modéles de vie et d’autres types d’organisation sociale. Voir également la description du programme de la DGG in : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Gartenstadtbewegung…, op. cit., p. 12.

14 Voir le bilan détaillé des activités de propagande qui clôt systématiquement les numéros de la revue publiée par la DGG.

15 On se reportera par exemple au récit de la création du Ortsgruppe de Chemnitz : DGG, Gartenstadt, 3e année, no 1, janvier 1909, p. 14 : « Bericht über die Ortsgruppe Chemnitz der DGG und Gartenstadtgenossensschaft Chemnitz E.G.M.b.H. ».

16 Pour une mise en perspective de ces conceptions dans le contexte plus large de la réforme sociale, voir : vom Bruch R., « Sozialreform… », op. cit., p. 170.

17 Voir notamment Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Programm der DGG, op. cit.

18 Osthaus Karl-Ernst, « Gartenstadt und Städtebau » in : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Bauordnung und Bebauungsplan. Vorträge gehalten auf der Jahresverssammlung der DGG, op. cit., p. 39.

19 Biel F., Wirtschaftliche und technische Gesichtspunkte zur Gartenstadtbewegung, Leipzig, H. A. Ludwig Degener, 1920, p. 8. Voir aussi : Deutsche Gartenstadt-Gesellschaft, Gartenstadtbewegung…, op. cit., p. 3.

20 Muthesius Stefan, The English Terraced House, New Haven, Londres, Yale University Press, 1982, p. 1 suiv.

21 Pour plus de précisions sur ce mode de construction en rangée, on se reportera à la note 1 de l’article de : Fehl Gerhard, « Gartenstadt-Bebauung oder schematische Reihenhaus-Bebauung ? Zum Konflikt um die Bebauungsweise neuer Siedlungen ab 1918, dargestellt am Werk des Essener Architekten Josef Rings » in : Bollerey Franziska (dir.), Im Grünen wohnen, im Grünen planen, Hambourg, Christians, 1990, p. 189-227.

22 Voir Huber Victor Aimé, « Über innere Kolonisation », article de 1846, publié in : Frank Hartmut, Schubert Dirk (éd.), Lesebuch zur Wohnungsfrage, Cologne, Pahl-Rugenstain, 1983, p. 124.

23 Migge résume en ces quelques lignes les travaux qu’il publia avant 1914 sur la réforme nécessaire de l’architecture de la maison familiale et de la conception du jardin individuel : Migge Leberecht, Deutsche Binnenkolonisation. Sachgrundlagen des Siedlungswesens, Berlin, Deutscher Kommunal-Verlag G.M.B.H, 1926, p. 52.

24 Id., « Die kleinen Gärten in der Gartenstadt » in : Gartenstadt, no 4, avril 1913, p. 68.

25 Migge indique que le décor végétal mural favorise le « glissement » de l’édifice vers le jardin : Ibid.

26 Nous devons nous contenter de signaler ici les interférences qui existent entre les conceptions de la communauté forgées par le mouvement du cité-jardins et la thématique nationale développée autour de l’idée de la Heimat dans le mouvement de protection de la Heimat. Ce sont les références au territoire et à sa symbolique qui constituent le point d’achoppement de ces représentations.

27 Kampffmeyer Hans, « Gartenstadt und Baukunst » in : Moderne Bauformen. Monatshefte für Architektur, vol. 3, 1908, p. 91.

28 Id., Gartenstadt und ästhetische Kultur, tract no 6, Schlachtensee-Berlin, Verlag der DGG, p. 13.

29 Id., Die Gartenstadtbewegung, Leipzig, Teubner, 1913, p. 95.

30 Ibid., p. 104.

31 Rüdiger vom Bruch applique à l’origine ce questionnement au mouvement réformateur dans son ensemble. Vom Bruch Rüdiger, « Kulturbegriff, Kulturkritik und Kulturwissenschaften um 1900 » in : vom Bruch R., Bürgerlichkeit…, op. cit., p. 94.

32 Kampffmeyer H., Gartenstadtbewegung, op. cit., p. 89-90.

33 Brenne Winfried, Bruno Taut. Meister des farbigen Bauens in Berlin, Berlin, Deutscher Werkbund Berlin e.V., Verlagshaus Braun, 2005.

34 Certaines façades de Falkenberg rappellent les façades de la renaissance. Certains détails – boiseries, tenants de fenêtre et de portes – portent les traces de l’architecture pratiquée dans le Nord de l’Europe – Finlande, Hollande.

35 « Hier wohnen lauter Arbeiter und die haben ja keinen Geschmack ! » in : Der Falkenberg, no 3, 1916, p. 10.

36 Ibid., p. 96.

37 Voir notamment vom Bruch Rüdiger, « Gesellschaftliche Funktionen und politische Rollen des Bildungsbürgertums im Wilhelminischen Reich » ; id., « Kulturbegriff, Kulturkritik und Kulturwissenschaften um 1900 » in : vom Bruch R., Bürgerlichkeit…, op. cit., p. 52 et p. 84.

38 Wolfgang Kaschuba a montré, à partir d’un corpus de mémoires et de récits autobiographiques de la première moitié du XIXe siècle, comment certains lieux de sociabilité, comme les clubs d’amateurs de théâtre, ou certaines villes universitaires comme Tubingen furent perçus par les contemporains comme les modèles d’une culture bourgeoise universelle au sein de laquelle fusionnaient différents groupes bourgeois : Kaschuba Wolfgang, « Deutsche Bürgerlichkeit nach 1800. Kultur als symbolische Praxis » in : Kocka Jürgen (dir.), Bürgertum im 19. Jahrhundert. Deutschland im europäischen Vergleich, Göttingen, Vandenhoeck und Ruprecht, 1988, p. 22-26.

39 Stéphane Jonas esquisse le contexte dans lequel cette construction fut projetée : Jonas Stéphane, « La création de la cité-jardins de Stockfeld à Strasbourg 1907-1912 » in : Hudemann Rainer, Wittenbrock Rolf (dir.), Stadtentwicklung im deutsch-französisch-luxemburgischen Grenzraum (19. u. 20. Jh.), Sarrebruck, SDV Saarbrücker Druckerei und Verlag, 1991, p. 201.

40 Ibid., p. 202-203.

41 Alexander Dominicus dresse un tableau des différentes facettes de la gestion urbaine initiée par la municipalité de Strasbourg : Dominicus Alexander, Straßburgs deutsche Bürgermeister Back und Schwander 1873-1918, Francfort-sur-le-Main, Diesterweg, 1939.
Pour une description de la politique du logement inaugurée par la municipalité, voir aussi : Cornelißen Christoph, « Deutsch-Französische Wohnungspolitik in Straßburg 1886-1929 » in : Cornelißen Christoph, Fisch Stefan, Maas Annette (dir.), Grenzstadt Straßburg. Stadtplanung, kommunale Wohnungspolitik und Öffentlichkeit 1870-1940, St. Ingberg, Röhring, 1997, p. 23-101.

42 Voir Socolopo (société coopérative de logements populaires), Historique depuis la fondation, Strasbourg, 1923, p. 32-33.

43 Voir « Wohnungsamt » in : Verwaltungsbericht der Stadt Strasburg i. E. für die Zeit vom 1. April 1900 bis 31. März 1910, Strasbourg, Fischbach, 1916.

44 Dominicus A., Straßburgs deutsche Bürgermeister, op. cit., p. 17.

45 Jonas S., « Stockfeld… », op. cit., p. 209.

46 Dominicus A., Straßburgs deutsche Bürgermeister, op. cit., p. 57.

47 Ibid., p. 23.

48 Socolopo, Historique, op. cit., p. 33.

49 Il s’agit des rapports publiés par Nikolas Geissenberger, chef des services statistiques et mentionnés dans : Cornelißen C., « Wohnungspolitik … » op. cit., p. 69-70. Mais aussi des nombreuses enquêtes réalisées dans le cadre de l’inspection des logements : Dominicus A., Straßburgs deutsche Bürgermeister, op. cit., p. 56 et suiv.

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