Je tweete donc je suis ?

1 Sysomos. (2014). Twitter Statistics – In-depth Report by Sysomos on Twitter’s Growth. Repéré à http://www.sysomos.com/insidetwitter/twitter-stats-2010/.

2 Cette enquête repose sur la triangulation de diverses techniques d’investigation qualitative et quantitative de manière à comprendre les raisons qui poussent certains individus à être hyper-actifs sur Twitter. Nous sommes partis d’un enquêté, Thomas. Nous avons importé (avec son consentement) des données de son compte Twitter pour constituer une base de données comportant les liens de plus de 15 000 membres appartenant à ce réseau. Ces données ont permis de produire une cartographie nous permettant de caractériser les utilisateurs connectés à notre individu selon notamment l’appartenance à des « clusters », c’est-à-dire des groupes d’utilisateurs que le logiciel de cartographie employé (Gephi) nous a permis de rassembler par le biais de calcul de coefficient de modularité, soulignant ainsi des effets de « communautés » : des « groupes » d’utilisateurs fortement reliés entre eux et engagés dans des interactions récurrentes. Nous avons effectué une analyse quantitative du réseau en question, pour repérer le type des utilisateurs et ainsi constater la part importante d’« hyperactifs » dans le réseau de notre enquêté. En d’autres termes, des individus qui conversent. Nous avons mené ensuite un entretien exploratoire libre avec Thomas en s’intéressant aux raisons pour lesquelles cet utilisateur tweetait avec autant d’intensité (plus de 100 tweets par jour en moyenne). Dans ce cadre, nous l’avons soumis à un exercice projectif durant lequel il devait produire une représentation graphique de son réseau (évidemment sans voir celle produite dans le cadre de la cartographie) de manière à pouvoir comparer les deux modèles ainsi créés. Enfin, nous avons mené 9 autres entretiens avec des Tweeteurs de son réseau à savoir 8 hommes et 1 femme. La plupart étaient des étudiants, âgés de 19 à 32 ans. Ils ont été choisis pour leurs liens « forts » avec l’enquêté initial (sur la base du nombre d’interactions, de l’existence d’une sociabilité construite sur le réseau et parfois qui s’est poursuivie hors Twitter). Les entretiens ont tous eu lieu en face-à-face, entre Bordeaux, Paris, Versailles et région parisienne et ont été également l’occasion de consulter avec eux leur compte Twitter.

3 C’est-à-dire le message adressé directement à un autre individu, autrement dit une pratique conversationnelle.

4 « Hierarchical OLS regression of survey results from 317 Twitter users found that the more months a person is active on Twitter and the more hours per week the person spends on Twitter, the more the person gratifies a need for an informal sense of camaraderie, called connection, with other users. Controlling for demographic variables does not diminish this positive relationship. Additionally, frequency of tweeting and number of @replies, public messages between Twitter users, mediate the relationship between active Tweeter use and gratifying a need for connection ».

5 Pour répondre à cette deuxième question nous avons articulé trois concepts sociologiques nous semblant intéressants pour interroger la notion d’identité. Premièrement, nous nous sommes placés du côté de l’interactionnisme symbolique (à l’image de beaucoup de productions anglophones étudiant Twitter), nous centrant sur les interactions entre les individus. Nous avons exploité plus particulièrement la notion d’identité numérique telle que présentée par Laura Robinson (Robinson, 2007) qui réactualise les théories de Goffman. Dans le cadre de son approche, l’identité n’existe que par les interactions successives entre acteurs, permettant au « moi » de devenir « soi » parce qu’il y a interactions. L’identité existe ainsi dans la dialectique entre l’acteur et les autres. Nous avons essayé de comprendre la nature des interactions entre les utilisateurs enquêtés dans le but de comprendre leurs motivations. Deuxièmement nous avons réactualisé la notion de « carrière » telle que développée par Becker (1963) afin de pouvoir caractériser le processus révélé par la phase exploratoire et nous permettre de comprendre comment l’utilisateur pouvait devenir un utilisateur actif engagé dans des échanges conversationnels. Troisième et dernière approche : nous sommes sortis de l’interactionnisme symbolique et avons exploité le concept de « singularité » tel que développé par Danilo Martuccelli (2010), pour comprendre l’articulation entre individuation et besoin d’appartenance. Enfin, en termes méthodologiques, nous avons mené des entretiens semi-directifs avec des utilisateurs actifs de Twitter sur la base de l’existence d’interactions réelles et fréquentes entre les enquêtés, appartenant tous au réseau de notre enquêté de la phase exploratoire afin de pouvoir prendre en considération les interactions effectives entre les utilisateurs.

6 Des outils existant sur ordinateur pour suivre facilement des fils d’actualité.

7 Il est possible de typifier les identités selon trois critères : l’instrumentalisation du compte, la préservation de l’anonymat et l’adéquation avec la personnalité réelle. Notre typologie fait dialoguer deux continuums différents : d’une part la place de l’énonciateur par rapport à la personnalité réelle, entre le « moi », le « soi » et « l’autrui ». D’autre part le rapport de distance entretenu face à l’audience, selon que l’utilisateur décide de se cacher, de s’afficher ou de s’exposer dans le rapport conversationnel. Le croisement des deux aboutis aux idéotypes suivants : le moi-caché, le soi-affiché et l’autrui-exposé.