1Tous mes remerciements aux organisateurs pour les deux journées si enrichissantes consacrées à Boulogne. C’est aussi l’occasion de rappeler l’œuvre des anciens étudiants de l’ULCO qui, réunis dans leur association du GRHAAL (Groupement d’Historiens Anciens et Actuels du Littoral), ont publié en 2009, un livret sur l’histoire des locaux que nous avons la chance d’occuper et qui auparavant avaient accueilli le premier musée de Boulogne. Enfin, je veux remercier Jean-Philippe Maupin, un de nos tout premiers étudiants, qui dans son excellente maîtrise sur L’Anticomanie à Boulogne au début du XIXe siècle (1995) a produit un travail de recherche important. Ce travail m’a été d’une grande aide dans la rédaction de cette communication.
2Dominique Poulot, « L’invention de la bonne volonté culturelle : l’image du musée au XIXe siècle », dans M. Rebérioux (dir.), L’expression plastique au XIXe siècle : regards d’aujourd’hui, Le Mouvement social, no 131, avril-juin 1985, p. 39 : « David d’Angers, nourri de références à la Grande Révolution, note dans ses carnets […] Le prétexte en est une conversation avec Goethe sur le principe des choses, au cours des deux mois que l’artiste passe à Weimar en 1829 » : Souvenirs de David d’Angers, Paris, Le Cerf, p. 43 : « Moi je pense que si des hommes vertueux et savants s’étaient chargés d’instruire les hommes réunis dans les temples en hiver et sur des lieux élevés en été ; si, dans ces temples, on consacrait un monument aux hommes qui ont honoré le genre humain par leurs vertus ou par leurs talents ; si, auprès de ces temples, il y avait des musées, enfin tous les produits du génie ; si enfin des hommes savants étaient chargés de donner des leçons de morale en faisant connaître les ouvrages de la nature et du génie humain, alors on aurait un culte digne du grand Être, et qui serait fait pour agrandir l’homme et rendre l’homme meilleur. »
3D. Poulot, op. cit., p. 37, n. 2. Ch.-C. Le Cœur, Considérations sur les musées de province, Paris, Vignancourt, 1872, p. 17 : « Les esprits sérieux devraient comprendre que les Musées ne sont pas seulement une affaire de luxe, une satisfaction donnée à quelques hommes de goût ; mais qu’ils sont ouverts gratuitement pour tous au délassement et à l’étude et qu’ils tendent à devenir de plus en plus populaires comme ils le sont déjà dans quelques villes. Ne peut-on également les considérer comme un moyen latent de moralisation et d’instruction ? À la vue des portraits des bienfaiteurs de l’humanité, à la vue des portraits des guerriers qui ont contribué à la défense et à la gloire de la patrie, le respect et l’admiration s’imposent aux masses et font vibrer en elles les fibres du bien et du patriotisme. Les faits historiques représentés les intéressent et les instruisent ou développent au moins en elles le désir de l’instruction. »
4Aubin Louis Eleuthérophile Millin de Grandmaison (1759-1818), Dictionnaire des Beaux-Arts, 1806, Paris, rééd. Crapelet-Desroy, 1838, II, p. 503-504. Une loi de 1802 interdit à toute réunion particulière de prendre le nom soit de lycée soit d’institut, afin de préserver les appellations officielles ; le terme de « musée » n’était pas interdit mais tomba en désuétude et les défunts lycées prirent le nom de sociétés d’émulation. Sur le statut idéologique du musée sous l’empire, cf. D. Poulot « Les musées à la gloire de l’Empire », Gazette des Beaux-Arts, octobre 1981, p. 27-131.
5Arrêté consulaire du 14 fructidor an IX (1er sept.1801) : sur proposition de Chaptal, les consuls décident que 15 villes recevront des collections de tableaux, pris dans les musées du Louvre et de Versailles, « après qu’il aura été disposé aux frais de la commune une galerie convenable pour les recevoir ». Voir D. Poulot, Une histoire des musées de France (XVIIIe-XXe s.), Paris, La Découverte, 2005.
6D. Poulot, « L’invention… », op. cit., n. 2, p. 47, n. 63 : « Cf. le Répertoire général des collectionneurs de la France publié par E. Renart à Maisons-Alfort depuis 1893. Celui de 1908 contient plus de 10 500 amateurs, classés par spécialités, et environ 1 200 marchands. Un supplément paraît en 1912. Globalement, une fois les possesseurs de bibliothèques mis hors-concours, ce sont les “objets d’art en tous genres” qui l’emportent, suivis immédiatement des dessins, eaux-fortes et gravures. Viennent ensuite, et presque à égalité, les objets d’archéologie et de haute curiosité et les tableaux ou sculptures. Cette foule hétéroclite de menus collectionneurs n’a pas suscité d’études, au rebours d’amateurs plus opulents et plus favorisés par l’historiographie (par exemple A. Boime, “Les hommes d’affaires et les arts en France au XIXe siècle”, Actes de la Recherche en sciences sociales, 28, 1979, p. 57-75 ou les travaux sur les marchands célèbres). »
7Cité par E. Usquin, « Le musée de Montpellier », Réunion des sociétés des Beaux-Arts, II, 1878, p. 105. Georges Chantal, « Collections privées, collections publiques : un dialogue permanent », dans Loïc Vadelroge (dir.), Les musées de province dans leur environnement, Sociabilité, Culture et Patrimoine, Cahiers du GRHIS no 4, 1996, Publications de l’Université de Rouen, no 218, p. 26.
8Théodore Zeldin, Histoire des passions françaises, 1848-1945, t. III, Goût et corruption, Paris, Le Seuil, 1981, p. 121-122 : « Les collections provinciales se développèrent au petit bonheur […] L’œil non averti risquait d’être plus embrouillé qu’inspiré par l’aspect hétéroclite de la plupart des musées. Les salaires du personnel étaient faibles, si bien que beaucoup de conservateurs de musées étaient des amateurs, souvent à temps partiel. Il n’est pas étonnant que l’on ait qualifié les musées de province du début du siècle de “prisons de l’art”. »
9D. Poulot, « L’invention… », op. cit., n. 2, p. 37.
10M. Agulhon, préface au catalogue La sociabilité en Normandie, Rouen, 1983, p. 11 : « pour ces familles dont la disposition du temps constituait la supériorité et l’avantage aussi évidemment que la disposition de richesse brute ».
11D. Poulot, « L’invention… », op. cit., n. 2, p. 46.
12J. -P. Chaline, « Une sociabilité culturelle : les sociétés savantes en Haute Normandie », dans M. Agulhon, op. cit., n. 10, p. 149-151 : « c’est le XIXe siècle qui, sans conteste, s’affirme comme l’âge d’or de cette forme intellectuelle de sociabilité : alors que la Révolution avait supprimé les ci-devant Académies et Sociétés d’agriculture (respectivement trente-trois et une vingtaine sous Louis XVI), première expression de cette poussée associative, les diverses sociétés savantes dépassent le chiffre de 200 en 1850, rien que pour la province ; elles seront environ un millier en 1914, plus quelque 400 à Paris, apogée que contrarieront les crises et mutations du XXe siècle. » Sur le XVIIIe siècle, J.-P. Chaline et D. Roche, Le siècle des Lumières en province, Paris, Mouton, 1978.
14Jacques-François Henry, Calendrier historique, topographique du district de Boulogne-sur-Mer, Dunkerque, Denys-Monfort, 1791 ; idem, Étrennes historiques, géographiques, civiles et littéraires du district…, Boulogne, Dolet, 1792 ; idem [avec Delporte membre de la Société d’agriculture], Description topographique du ci-devant district de Boulogne…, publié par la Société d’agriculture An VI (1797) ; idem, Essai historique, topographique et statistique sur l’arrondissement communal de Boulogne-sur-Mer, 1810.
15Daniel Haigneré, Dictionnaire historique et archéologique du département du Pas-de-Calais. Arrondissement de Boulogne, Arras, Sueur-Charruey, t. I, 1880, p. 372 : « Vote du Conseil Municipal portant création d’une École gratuite de Dessin. Cette école a été réunie au collège en 1835. »
16Mémoires de la Société d’agriculture de Boulogne-sur-Mer, 1823, p. 71. Voir aussi la contribution de D. Talleux dans ce volume.
17Procès-verbal manuscrit : Arch. du musée, pièce no 2631.
18Antoine-Jacques-Joseph Demarle (1786-1864) : pharmacien, secrétaire de la Société d’agriculture, du commerce et des arts de Boulogne-sur-Mer (à partir de 1812), membre du Conseil municipal de Boulogne-sur-Mer (juillet 1829 à 1831, puis de nouveau à partir de 1837), membre du conseil d’administration de la Bibliothèque de Boulogne, chevalier de la Légion d’honneur en qualité de major de la garde nationale de Boulogne-sur-Mer (1er mai 1838).
19Peintre et collectionneur né à Montreuil-sur-Mer (1777) et mort à Paris (1828). Il émigre en 1792 à l’âge de 15 ans, et sa famille s’installe à Londres ; il est exposant honoraire à la Royal Academy. Peintre d’histoire naturelle, il expose plusieurs grandes aquarelles à Londres, à Piccadilly, dans l’Egyptian Hall ou Musée de William Bullock, puis à Paris. Il en offre à Louis XVIII qui le nomme premier peintre d’histoire naturelle. À sa mort, la ville de Boulogne-sur-Mer achète sa collection. Le vicomte de Barde « domicilié place du Carrousel à Paris », écrit Demarle, « s’est attaché par goût à former dans ses voyages un cabinet d’histoire naturelle et d’antiquités qui est ouvert tous les jeudis aux amateurs. » Les raisons qui poussent le vicomte à se dessaisir de sa collection tiennent à ce qu’il a décidé de quitter Paris et, malgré « les offres avantageuses qui lui avaient été faites […], il s’est jusqu’ici refusé à les accepter car sa collection aurait été dispersée en diverses mains ». C’est, poursuit Demarle, parce que le vicomte de Barde considère que sa collection est « propre à former le premier noyau d’un cabinet d’histoire naturelle », qu’il préférerait la céder indivise à une municipalité désireuse de créer un muséum.
20D. Haigneré, op. cit., p. 373 : « 4 novembre. – Ouverture du musée communal, dont le noyau fut une collection d’amateur, M. le vicomte de Barde. – La direction de cet établissement a été confiée d’abord à une Commission, instituée à titre provisoire, le 22 février 1827, et définitivement constituée le 27 février 1837. Les membres en étaient nommés à vie par le préfet sur la présentation de leurs collègues. Ces dispositions règlementaires ont été brisées le 12 mai 1873 par un arrêté de M. Auguste Huguet, maire de Boulogne, qui a établi une nouvelle commission, formée d’administrateurs à la nomination du maire. »
21L’Annotateur boulonnais du 1er septembre 1825 donne un compte rendu détaillé, et les 3, 10, 17 et 24 novembre 1825, on trouve des articles décrivant le musée. P. -J. Bertrand, Précis de l’histoire physique, civile et politique de la ville de Boulogne-sur-Mer et de ses environs, depuis les Morins jusqu’en 1814, Boulogne, 1828, p. 122-123 : « Une sorte d’enthousiasme s’est emparé des esprits en faveur du Muséum : aussi s’est-il enrichi d’une manière remarquable, depuis sa fondation, par les dons qui lui ont été faits. Le Boulonnais, si fertile en événements, était devenu très riche en antiquités et en monuments historiques ; chaque jour on en découvrait en fouillant la terre ; mais comme il n’existait pas de collection, ces objets se trouvaient perdus ou dispersés. Aussitôt qu’on put leur trouver un centre de réunion, chacun s’empressa de les y apporter ; cela même engage plusieurs personnes à faire des recherches ; elles ne se bornèrent plus aux antiquités, elles s’occupèrent aussi de minéralogie, d’ornithologie, de conchyliologie, etc., et il en résulta un goût décidé pour l’étude des sciences naturelles, dû à la seule influence de la création du Muséum. Le Boulonnais était aussi amplement fourni de productions étrangères, par suite des voyages maritimes. Ici c’étaient des ornements chinois ; là des porcelaines du Japon, des armes et des vêtements de sauvages, ailleurs de magnifiques coquilles, des graines de toute espèce, des coraux, des madrépores, des oiseaux, etc. Le Muséum en fut encore doté ; et ce qui doit donner la certitude que cet établissement deviendra de plus en plus important, c’est qu’il n’est pas un seul navire expédié pour les contrées lointaines qui ne soit muni de la caisse nécessaire à renfermer l’hommage que le navigateur se propose de faire à son retour. »
22Les Feuilles d’Annonces, 10 novembre 1825, no 563, p. 10-13.
23Dutertre-Delporte et Dutertre-Yvart pour la section de Minéralogie ; Henry Griset pour la section Botanique ; Demarle et Leducq pour la section Zoologie ; J. -B. Isnardy, Alexandre Marmin et Horeau pour la section Antiquités et curiosités diverses ; de Rincquesen, Henry Marguet et J. -B. Aloy pour la section Dessins, peintures et sculptures.
24Arch. du musée, registre 41.
25Musées Municipaux de Boulogne-sur-Mer Guide par le Dr H.-E. Sauvage, Boulogne-sur-Mer, 1898.
26D. Poulot, « L’invention… », op. cit., n. 2, p. 41.
27Pierre Angrand, « La conquête ingriste d’un département : le Tarn-et-Garonne », Actes du Colloque international Ingres et son influence, Montauban, 1980, p. 36. D. Poulot, « L’invention… », op. cit., n. 2, p. 41-45, « Le musée et l’école ».
28Arch. du musée, registre 41, séance du 15 septembre 1828.
29La Boulonnaise, 1er septembre 1829.
30Arch. du musée. Lettre envoyée au maire par un certain Coffiez : « Autant dans l’intérêt de l’École de Dessin que pour être fixé sur la dépense qu’occasionnerait la réunion à Boulogne d’une collection de statues antiques, j’ai visité l’atelier du Musée Royal où je me suis fait remettre le catalogue détaillé que j’ai l’honneur de vous envoyer… ». Un exemplaire de ce catalogue qui contient la liste des 244 plâtres commercialisés à cette date par l’atelier de moulages du Musée Royal est conservé aux archives municipales.
31Arch. du musée, registre 41 (1825-1834), PV de la séance du 10 août 1827. La suite des événements confirme le rôle central joué par J.-B. Aloy dans cet épisode de l’histoire des collections muséales. C’est d’ailleurs à cette action que son souvenir était associé dans la mémoire de ses contemporains comme en témoignent ces quelques lignes extraites de l’éloge funèbre que prononça son collègue Henri Marguet lors de son décès : « Les services qu’il a rendus à cette ville sont trop nombreux pour être détaillés ; mais il en est quelques-uns qui sortent de la ligne ordinaire, et qu’il convient de rappeler dans cette circonstance solennelle. Vous pressentez, Messieurs, que je veux vous parler de la création de la galerie des antiques, qui a précédé le Muséum à la prospérité duquel il a si puissamment contribué. C’est, en effet, M. Aloy qui a fait la première proposition de la Galerie des Antiques. C’est par sa puissante intervention que les difficultés d’exécution ont été aplanies, et par son appel aux Boulonnais que cette belle galerie a été ouverte sous les auspices du conseil municipal, qui a voté les fonds d’installation, et qu’elle a été garnie des précieuses statues qui la remplissent. Un aussi beau succès a eu du retentissement, et à cette galerie ont été rattachées, comme par enchantement, les autres galeries qui font en ce moment l’admiration des étrangers, et qui portent envie aux nationaux », « Discours de M. Marguet, Vice-Président de la Société, prononcé sur la tombe de M. Aloy, Président de la Société », Procès-Verbaux de la Société d’agriculture, du Commerce et des Arts, t. III, 1833-1835, p. 87-90.
32Arch. du musée, registre 41 (1825-1834), août 1827.
33La Boulonnaise, 18 décembre 1827.
34Arch. du musée, registre 41 (1825-1834), PV de la séance du 15 septembre 1828. Cet ensemble comprenait la Vénus Media, l’Adonis, la tête de Laocoon père, deux jambes de la Vénus Media, deux jambes du Germanicus, deux pieds de gladiateur et un écorché. Dans son édition du 2 octobre 1828, L’Annotateur boulonnais qui tient une chronique régulière des dons faits au Muséum enregistre cette donation en y ajoutant « une tête d’Apollon. » Le même journal avait signalé l’arrivée au Muséum – antérieure au don du marquis de Rincquesen – « d’une moyenne statue en composition imitant le stuc, modelée sur l’antique, qui fut rapportée de Rome en 1741 par M. le comte de Grenon » (L’Annotateur boulonnais, 24 avril 1828) dont les archives du Musée ne gardent pas trace. Sur Antoine Joseph Michel Romagnesi (1776-1852), qui fut parmi les premiers à utiliser la technique du carton-pierre, voir Emmanuel Benezit, Dictionnaire critique et documentaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs…, Paris, Gründ, 1976, t. IX, p. 59.
35L’aristocratie est représentée par de Bazinghen et d’Harambault qui financent ensemble l’acquisition de Diane et la Biche ; par le baron Le Cordier qui choisit Le Germanicus ; par de Clocheville, père et fils, qui se décident pour Adonis. Quatre représentants de la dynastie des Adam participent à la souscription : Alexandre-Joseph Adam (1760-1841) et son fils Achille Adam-Carmier (1794-1872), financent l’achat du Laocoon ; Alexandre Adam-Ternaux (1790-1886) et son frère Hercule Adam-Wissocq (1796-1885), celui du Silène et le jeune Bacchus.
36J. -B. Aloy, receveur de l’enregistrement, pour l’Antinous ; Horeau, trésorier de la mairie, pour le Tireur d’épine ; Leducq, docteur en médecine pour le Vase de la ville d’Athènes ; Wissocq, président du tribunal, pour le Torse de Belvédère ; Bouchard-Chantereaux, commerçant, qui finance l’achat de la Vénus accroupie ; Dutertre père, notaire, l’Antinoüs du Vatican ; Fontaine père, député, et son fils, tous deux propriétaires, le Gladiateur Borghèse ; Gaillon, receveur de douanes, le Bacchus ; Gros et Noël, tous deux juges, la Cérès Assise ; Grandsire-Bellevalle, le maire de Boulogne à cette date, le Jason dit Cincinnatus ; Henri-Faudier, suppléant du juge de paix, le Petit faune Borghèse ; Lissès, avocat, L’Apollon Sauroctone ; Rouxel, médecin, le Faune en repos du Capitole ; Sansot, ancien officier de la garde Impériale, l’Apollon du Belvédère ; Sauvage, constructeur de navire, la Vénus Callipyge.
37Arch. du musée, registre 41 (1825-1834), PV de la séance du 14 août 1829.
38Ibid. Malgré quelques critiques de détail, le consentement du public fut unanime pour saluer la qualité du travail accompli par Jean-Baptiste Aloy et ses collègues. On en trouve un écho dans La Boulonnaise du 3 novembre 1829 qui donne une description assez précise de l’aménagement de la salle et de ses imperfections : « Les souscripteurs du Muséum, invités par messieurs les Administrateurs à visiter la galerie des Antiques, ouverte aujourd’hui pour la première fois, se sont empressés de se rendre à cet appel. Dire que leur attente a été surpassée, que tous ont fait l’éloge de la beauté de la salle, de la distribution des statues, ce n’est que se rendre l’écho du Musée, c’est répéter ce que les Administrateurs eux-mêmes ont entendu pendant toute la durée de l’exposition. Il était impossible, en effet, de tirer un meilleur parti du local : dès l’entrée on est frappé de cette réunion de statues, rangées sur trois files, dont toutes les poses sont différentes […] Le jour, qui vient du haut de la salle, est très bien disposé pour éclairer cette assemblée de dieux et de héros […] Il est à regretter, cependant, que l’Apollon Pythien, Jason et Diane à la Biche, placés dans le fond de la salle, ne soient pas mieux éclairés : le dieu du jour et sa sœur, relégués dans un endroit obscur, nous paraissent un contresens qu’il suffit d’indiquer, et qui ne peut subsister longtemps. On aurait pu, ce nous semble, éviter ce défaut, en plaçant ces chefs-d’œuvre dans le milieu des parties latérales de la Galerie, au lieu d’autres statues de moindre mérite. On a fait aussi une autre observation, moins importante à la vérité, mais qui mérite d’être accueillie : les piédestaux des statues placées le long des murs n’ont que trois côtés : pourquoi cette économie ? Une statue doit être vue dans toutes ses parties, examinée dans ses moindres détails et sous toutes ses faces. Si, lorsque vous tournez autour de l’Apollon du Belvédère, votre vue tombe sur trois planches disjointes, le charme est détruit, l’illusion cesse ; c’est comme si vous voyiez Oreste, dans la coulisse, plaisantant avec Pyrrhus, qu’il vient de tuer. »
39C’est sans doute au comte de Forbin qu’il est ici fait allusion. Directeur des Musées Royaux depuis le 1er juin 1816, il favorisa l’enrichissement des collections de moulages du Louvre en créant, en 1819, un « Musée de plastique ». Son action en faveur du développement des activités commerciales de l’Atelier fut tout aussi déterminante. Son attitude tranche avec celle du comte de Clarac, conservateur des Antiques du Louvre de 1818 à 1847, qui s’est peu intéressé à la question des moulages.
40S’agit-il de Thomas Couture (Senlis 1815 – Villiers-le-Bel 1879) ?
41Arch. du musée, registre 41 (1825-1834). Dans un court avertissement J.-B. Aloy donne une liste, non exhaustive, des sources auxquelles il a puisé les descriptions et commentaires dans son catalogue. Sont cités : deux anthologies, Les Annales du Musée de Landon [Deux éditions successives, une entre 1801 et 1810, l’autre entre 1824 et 1826] et le Musée de peinture et de sculpture ou recueil des principaux tableaux, statues et bas-reliefs des collections publiques et particulières de l’Europe, réalisé par Reveil [Publié à Paris entre 1828-1834] ; un catalogue purement érudit, la Description des antiques du Musée Royal réalisé par Ennio-Quirino Visconti et le comte de Clarac [Publié en 1820. C’est de ce catalogue qu’Aloy a tiré presque la totalité de commentaires] ; un essai théorique enfin, les Recherches sur l’art statuaire chez les Anciens et les Modernes d’Emeric-David. Les moulages étaient très à la mode au XIXe s. Les conservateurs de musées avaient la tendance à habiller la nudité qui choquait : Th. Zedin, op. cit. : « Le musée de Vaucouleurs (Meuse), fondé en 1893, habillait ses moulages de statues antiques de caleçons en papier. » C’est Adolphe Gérard, dans son Catalogue Méthodique de la Bibliothèque de Boulogne-sur-Mer (tome I, p. 379), qui attribue la paternité de cette publication à J.-B. Aloy. Les archives du Musée ne disent rien sur elle. Seule exception à ce silence, l’allusion faite dans le procès-verbal de la séance du 1er novembre 1829, l’administration décide alors « que le petit livre explicatif pour les statues et bas-reliefs sera vendu 1 franc … »
42Yves-Marie Hilaire, « L’essor culturel et artistique à l’apogée de la vie mondaine (1850-1880) », dans Alain Lottin (dir.), Histoire de Boulogne-sur-Mer : ville d’Art et d’Histoire, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2014, chapitre XII, « Loisirs et vie de l’esprit dans une cité balnéaire au XIXe siècle », p. 321-344 : « Cet essor artistique est encouragé par un véritable mécénat organisé entre 1836 et 1870 par la Société des amis des arts de Boulogne-sur-Mer fondée par Demarle. À partir de 1837, une exposition de peinture se tenait tous les deux ans pendant la saison ». Cf. J. Brunet, Nouveau Guide dans Boulogne-sur-Mer et ses environs, Boulogne-sur-Mer, 1859.
43Frédéric Morand, L’année historique de Boulogne-sur-Mer. Recueil de faits et d’événements intéressant l’histoire de cette ville, et rangés selon leurs jours anniversaires, Boulogne-sur-Mer, Vve Deligny, 1858 [commence l’année 608], p. 56 : « En 1830. Ordonnance royale qui autorise la ville de Boulogne à accepter la donation faite par M. Delalande au musée de cette ville. 600 articles d’histoire naturelle. »
44Arch. du musée, registre 43 (1838-1854), PV de la séance du 15 novembre 1839.
45Arch. du musée, registre 43 (1838-1854).
46F. Morand, op. cit., p. 58-59 : « à savoir : 2 918 pour la minéralogie et la géologie, dont 565 appartenant à la géologie du Boulonnais ; 3 034 pour la botanique ; 195 polypiers ; 101 radiaires ; 2 403 pour la conchyliologie ; 7 531 pour l’entomologie ; 168 crustacées ; 380 poissons ; 371 reptiles ; 3 980 pour l’ornithologie, dont 3 474 oiseaux et 506 œufs ; 447 pour la mammalogie ; 201 pour l’anatomie comparée ; 6 563 pour la numismatique, dont 4 845 monnaies grecques, coloniales, égyptiennes, consulaires, romaines, gauloises, françaises, de prélats et barons, obsidionales, étrangères ; 67 papiers-monnaie et 1 651 médailles ; 2 295 antiquités égyptiennes, grecques, gallo-romaines, romaines, moyen-âge, indiennes et péruviennes ; parmi les antiquités égyptiennes se fait remarquer une momie avec ses magnifiques sarcophages ornés de brillantes peintures hiéroglyphiques et remontant au temps de Rhamsès, vers l’an 1511 avant Jésus-Christ : le corps serait celui d’un prêtre d’Osiris nommé Nhêphsmnouth. Enfin, 1 286 curiosités et objets à l’usage de peuples divers, 1 260 échantillons de commerce, 176 statues et œuvres d’architecture (épreuves d’art en plâtre) et 113 tableaux complètent cet inventaire » ; p. 140, mention d’autres objets en détail.
47Sur ces marchands d’antiques, voir les fiches en ligne de la BnF. Paulette Pelletier-Hornby, « Collectionneurs et commerce d’antiquités au XIXe siècle : les frères Dutuit et leurs réseaux », Journée d’Études à l’INHA, 2018 : https://venteantique.hypotheses.org/1028
48Arch. du musée, registre 44 (1854-1868), PV de la séance du 19 août 1861.
49Monuments inédits d’Antiquité figurée grecque, étrusque et romaine, recueillis et publiés par M. Raoul-Rochette. Première partie, cycle héroïque, Paris, Imprimerie Royale, 1833. A. Millin, L’Orestéide ou description de deux bas-reliefs du Palais Grimani à Venise, Paris, Bureau des annales encyclopédiques, 1817.
50Il a été réédité en 2011.
51« Note d’un archéologue sur la collection des vases grecs de Mr. CLF Panckoucke », p. 1 : cette note précède le catalogue de Dubois et semble être rédigée par Panckoucke lui-même.
53Arch. du musée, registre 44 (1854-1868), PV de la séance du 19 août 1861.
56Voir aussi la contribution de J.-L. Podvin dans ce volume.
57Le premier article consacré aux vases de Boulogne est paru en allemand dans l’Archäologischer Anzeiger de 1889, p. 184-187, par M. Maximilian Meyer.
58François Lissarrague, « Entre livre et musée, la collection Panckoucke », dans Annie-France Laurens, Krzystof Pomian (dir.), L’Anticomanie. La collection d’antiquités aux XVIIIe et XIXe siècles, Paris, EHESS, 1993, p. 235.
59Jules Paublan, Histoire de Boulogne-sur-Mer, Calais, Martin, 1939, p. 34
60François Lissarrague, « Entre livre et musée… », p. 236.
61Ainsi le no 65 = New York 41 162 193 ; no 408 = New York 41 162 190 ; no 411 = Paris, BN 393 ; et l’œnochoé de la vente Beugnot, no 43, achetée par Panckoucke est aujourd’hui au Louvre, G 570.
62Arch. du musée, registre (1916-1930).
63Arch. du musée, registre 44 (1854-1868). Le musée de Boulogne a effectivement reçu des tableaux et des antiquités de la collection Campana ; envois des 28 février et 4 avril 1863.
64Arch. du musée, registre 45 (1868-1906), PV du 8 décembre 1892
65F. Lissarrague, op. cit., n. 58, p. 236. Il faut préciser que, jusqu’en 1872, les conservateurs du musée étaient des bénévoles. Arch. mun. de Boulogne-sur-Mer, 2 R 146, rapport du 20 novembre 1874. Dans le même rapport on lit à la rubrique : « Ce qui a été fait : rien. »
66Voir E. Poitier, in R. de Lasteyrie, Album archéologique des Musées de province, Paris, 1890, p. 66-101, en part. p. 68. Dr. E. -D. Sauvage, Musées Municipaux de Boulogne-sur-Mer. Guide, Boulogne-sur-Mer, Vve Cabre, 1898.
67Le successeur de Longpérier est en train de classer les vases Campana et de rédiger le catalogue dont le tome 1 paraît en 1896 ; il n’a guère le temps de se rendre à Boulogne. Sur A. de Longpérier, cf. P. de Chenevières, Souvenirs d’un Directeur des Beaux-Arts, rééd. Paris, 1979, p. 113 : « Rien ne lui manquait pour être tout bonnement un conservateur modèle […], rien si ce n’est d’appliquer au bon ordre des inventaires et à la publication des catalogues de ses antiques l’esprit de suite qu’il mit, vingt ans durant, à se dérober à de telles besognes essentielles. »
68E. -D. Sauvage, op. cit., n. 66.
69Arch. mun. de Boulogne-sur-Mer, 2 R 46 : commission du Musée, séance du 12 mars 1918 où l’on propose des mesures de protection ; séance du 6 août 1918 où l’on constate l’ampleur du désastre.
70Arch. du musée, registre (1932-1958), PV du 17 février 1949 et du 27 octobre 1949.
71C’est tout l’intérêt des recherches récentes sur ce sujet : cf. Cécile Colonna et al., Trésors de l’Antiquité. Céramiques grecques du musée de Boulogne-sur-Mer, Lille, Invenit, 2019.
