La guerre, ultima ratio des ducs de Bourgogne ? Argument guerrier et autorité du prince législateur (fin xiv^e – début xv^e siècle)

La nécessité pour nombre de princes d’obtenir l’accord des sujets pour prélever un impôt conduisit à l’essor d’une argumentation destinée à justifier ce dernier au nom de la nécessité. Des voix s’élevèrent même pour dénoncer là un jeu rhétorique voisinant avec le mensonge où le train de vie de la cour se trouvait financé « sous ombre des guerres ». La stratégie argumentative adoptée par les ducs de Bourgogne entre 1384 et 1419 montre certes que l’argument est facilement employé dans la négociation des aides en Flandre, mais est loin d’être dominant pour la collecte des aides. Les ducs sont sensibles aux préoccupations des villes, qui sont d’abord le commerce et la paix, n’hésitant pas à invoquer les mariages comme motif de l’impôt. L’analyse des ordonnances ducales démontre également que ce sont bien souvent les villes qui invoquent la guerre pour obtenir des concessions et privilèges, arguant de leur fidélité et leur soutien, et en font un argument de leur propre fiscalité. D’ailleurs, le discours appliqué aux villes et aux nobles se rejoint dans un même éloge du service et du sacrifice qu’il faut récompenser, ce qui permet de justifier l’octroi de privilèges particuliers. Le champ d’application de l’argumentation par la guerre est en fait très vaste et peut justifier le développement des privilèges commerciaux, la réduction de la fiscalité ou la suppression d’offices princiers. Il n’est pas le reflet d’une domination univoque sur un peuple aisément trompé et réduit au silence : villes et nobles s’en emparent pour obtenir des privilèges. En outre, il tend à voir son importance réduite au fur et à mesure que le souvenir et les effets de la guerre s’éloignent.