Le music-hall au centre de la ville mécanisée. Ambiguïtés des machines entre érotisation et technophobie

1 Gustave Kahn, La femme dans la caricature française, Paris, A. Méricant, 1907, p. 281.

2 Ibid., p. 287.

3 Voir Giovanni Lista, « Esthétique du music-hall et mythologie urbaine chez Marinetti », dans Claudine Amiard-Chevrel (dir.), Du cirque au théâtre, Lausanne, L’Âge d’Homme, 1983, p. 48-64.

4 Gustave Fréjaville, Au music-hall, 4^e éd., Paris, Éditions du Monde nouveau, 1923, p. 17.

5 Patrick Désile, « Une “atmosphère de nursery du diable”. Pantomime de cirque et premier cinéma comique », 1895, n^o 61, septembre 2010, p. 116-117.

6 Entretenant un rapport ambigu au savoir et à la vulgarisation, les artistes qui présentent ce type d’expériences prolongent surtout l’ancienne magie des récréations scientifiques en l’adaptant à la forme scénique explosive du numéro de music-hall, où doivent primer l’instantanéité des réactions chimiques, l’enchaînement rapide des effets visuels et le contact avec les spectateurs. Voir par exemple l’affiche du Professeur Benelly qui est reproduite en couverture du Nouvelliste des concerts, cirques et music-halls, n^o 324, 9 mars 1906, s.p.

7 Villiers de L’Isle-Adam, « La machine à gloire », dans Contes cruels, Paris, C. Lévy, 1883, p. 72.

8 François Albera, « Le paradigme cinématographique », 1895 revue d’histoire du cinéma, n^o 66, printemps 2012, p. 22.

9 Louis Renoz, « Tout à l’électricité », Le Nouvelliste des concerts, cirques et music-halls, n^o 143, 19 septembre 1902, p. 1.

10 Voir Walter Benjamin, « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproduction mécanisée », dans Écrits français, Paris, Gallimard, 1991, p. 177-220.

11 David Mayer, « “Quote the Words to Prompt the Attitudes”: The Victorian Performer, the Photographer, and the Photograph », Theatre Survey, vol. 43, n^o 2, novembre 2002, p. 231.

12 Gustave Fréjaville prend au début de son ouvrage cette précaution méthodologique : « Le café-concert, les cabarets, le cirque, la foire cœxistent avec le music-hall et les échanges sont si actifs des uns à l’autre qu’il est nécessaire de les étudier ensemble » (Au music-hall, op. cit., p. 18).

13 Sur l’histoire du cinéma forain, voir Jean-Jacques Meusy, Cinémas de France, 1894-1918. Une histoire en images, Paris, Arcadia éditions, 2009.

14 Voir Thomas Grimm, « Chronique », Le Voyageur forain, n^o 4, 1^er décembre 1883, p. 1. L’auteur souligne précisément l’impact de ce développement du voyage en train sur l’offre des forains : « Pour répondre aux exigences toujours croissantes du public, les forains ont dû faire des prodiges. Ils ont eu recours à la vapeur, à l’électricité, aux inventions les plus bizarres ; leurs recettes ont doublé, il est vrai, mais en même temps leurs frais se sont accrus dans une plus grande proportion. »

15 Lors du colloque « Le mouvement du cinéma. Théories et pratiques : histoires et historiographies » (Université de Lausanne, 18-19 novembre 2014), Laurent Le Forestier a rappelé, dans une communication intitulée « Le cinéma, invention “automaboule” », que le « principe de l’expédition ferrée » s’applique dans le domaine du spectacle de scène, tandis que le développement du cinéma serait plus directement lié à l’essor de l’industrie automobile, ce qui se traduit d’ailleurs par une « ambivalence fondamentale du cinéma vis-à-vis de l’automobile », entre fascination et « autophobie ».

16 Voir en particulier la description de la « chambre générale du Grand Clavier de la Machine » (« La machine à gloire », op. cit., p. 80-81).

17 Les brevets d’invention classés dans la catégorie « Bimbeloterie » contiennent des descriptions d’appareils conçus spécialement pour les scènes de music-hall. Voir par exemple M^me Zula, Attraction pour music-hall, etc., brevet d’invention, n° 339 164, 13 novembre 1903, Institut national de la propriété industrielle.

18 Giovanni Lista, Loïe Fuller, danseuse de la Belle Époque, 2^e éd., Paris, Hermann, 2006, p. 161.

19 Laurent Guido rappelle que, dans le domaine des danses serpentines, les numéros de Loïe Fuller ont suscité une multitude de vocations, mais il préconise de ne pas appréhender ces phénomènes uniquement en termes d’imitation ou de contrefaçon tant les techniques circulaient alors à la faveur de mélanges, d’amplifications et de parodies sur les scènes de music-hall (voir son étude « Entre spectacles paradoxaux et dispositifs techniques : retour sur les danses serpentines du premier cinéma », dans Gilles Mouëllic et Laurent Le Forestier (dir.), Filmer l’artiste au travail, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013, p. 125-148).

20 Ben Singer, Melodrama and Modernity: Early Sensational Cinema and Its Contexts, New York, Columbia University Press, 2001, p. 96-99.

21 Sur cette notion, voir Gilbert Simondon, « Psychosociologie de la technicité », in Sur la technique, Paris, Presses universitaires de France, 2014, p. 84-87.

22 Voir Alain Beltran et Patrice A. Carré, La fée et la servante. La société française face à l’électricité, XIX^e-XX^e siècle, Paris, Belin, 1991, p. 135-156.

23 On se méfie ainsi de l’accentuation des contrastes lumineux entre les espaces éclairés accueillant les promeneurs et les zones d’ombre où se réfugient les malfaiteurs de tout poil (s.a., « L’éclairage du bois », Le Matin, s.n., 13 août 1898, p. 1).

24 [Victor de Cottens], La Revue des Folies-Bergère, manuscrit, 1904, Archives nationales, F¹⁸ 1508.

25 Gustave Kahn, L’esthétique de la rue, Paris, E. Fasquelle, 1901, p. 240.

26 Voir Henry Fouquier, « Les théâtres », Le Figaro, n^o 4, 4 janvier 1893, p. 6.

27 J. Oudot et A. Branger, La Revue du Moulin, manuscrit, 1904, Archives nationales, F¹⁸ 1506, souligné dans le texte.

28 [Noms illisibles], Ah voui va !, manuscrit, 1905, Archives nationales, F¹⁸ 1511.

29 Un monsieur en habit noir, « La soirée parisienne », Le Journal, n^o 99, 4 janvier 1893, p. 3.

30 [Victor de Cottens], op. cit., souligné dans le texte. Sur ce sujet, voir notre étude « Rêve d’artiste. La collaboration de Georges Méliès aux spectacles du Châtelet et des Folies-Bergère », in André Gaudreault et Laurent Le Forestier (dir.), Méliès, carrefour des attractions, Rennes, Colloque de Cerisy/Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 129-141. Sur le contexte nord-américain, voir Gwendolyn Waltz, « 20 Minutes or Less: Short-Form Film-and-Theatre Hybrids – Skits, Sketches, Playlets, and Acts in Vaudeville, Variety, Revues, &c. », dans Kaveh Askari, Scott Curtis, Frank Gray, Louis Pelletier, Tami Williams et Joshua Yumibe (dir.), Performing New Media, 1890-1915, New Barnet, John Libbey Publishing, 2014, p. 245-253.

31 Olympia Théâtre, programme, 15 décembre 1903, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, 4-PRO-0027 (RES), souligné dans le texte.

32 Si de tels numéros basés sur l’interprétation de poupées mécaniques sont récurrents au music-hall dans les années 1900, des artistes avaient rendu populaire une gestuelle saccadée reproduisant les mouvements de l’automate, notamment sur la scène de l’Opéra avec Coppélia (1870), puis sur celle de l’Opéra-Comique avec Les Contes d’Hoffmann (1881), où le jeu automatique avait été particulièrement remarqué : « Mais l’énorme effet de l’acte est pour M^lle Isaac, en poupée de Nuremberg : robe de satin, rose brodée d’argent, bourrelet en satin rose, perruque blonde. Non seulement on l’a acclamée dans ses couplets de l’automate, mais quand elle s’est enfuie, avec la marche rapide et les mouvements secs d’une poupée qu’on a trop remontée, la salle entière l’a forcée à revenir et à recommencer sa sortie. » (Un monsieur de l’orchestre, « La soirée théâtrale », Le Figaro, n^o 42, 11 février 1881, p. 3). Bien entendu, il est aussi intéressant de faire le rapprochement entre ces performances et l’« Andréide » imaginée par Villiers de L’Isle-Adam dans son roman L’Ève future, où l’auteur cite d’ailleurs Hoffmann en épigraphe (Paris, Brunhoff, 1886, p. 4).

33 Adolphe Brisson, « Les revues », Le Temps, n° 15500, 23 novembre 1903, s.p.

34 Alain Boillat, « L’imaginaire social de la téléphonie. Les dispositifs fictifs du XX^e siècle d’Albert Robida et l’archéologie du “cinéma parlant” », in François Albera et Maria Tortajada (dir.), Ciné-dispositifs. Spectacles, cinéma, télévision, littérature, Lausanne, L’Âge d’Homme, 2011, p. 239-244.

35 Tom Gunning, « From the Kaleidoscope to the X-Ray: Urban Spectatorship, Poe, Benjamin, and Traffic in Souls (1913) », Wide Angle, vol. 19, n^o 4, octobre 1997, p. 25-63.

36 Dès les années 1900, cette scrutation des images sera précisément sollicitée par des films de fiction montrant des détectives à l’œuvre, comme ceux produits par la société Pathé autour de l’un de ses personnages emblématiques, Nick Winter.

37 Robert Darras, « Révélation », Le Supplément, n^o 2056, 14 octobre 1902, p. 3.

38 Paul-Émile Chevalier, « Semaine théâtrale », Le Ménestrel, n^o 43, 26 octobre 1907, p. 338.

39 Guillaume Apollinaire, « Un beau film », in L’Hérésiarque & Cie, Paris, Stock, 1910, p. 240.

40 W. Drancourt, « Le looping dans le vide », La Nature, n^o 1594, 12 décembre 1903, p. 31-32.

41 [Lafargue et Mouget], Les Surprises, manuscrit, 1902, Archives nationales, F¹⁸ 1489.

42 Ibid., souligné dans le texte.

43 Thierry Lefebvre, La chair et le celluloïd. Le cinéma chirurgical du docteur Doyen, Brionne, J. Doyen, 2004, p. 51-59.

44 On peut se rappeler l’article anonyme dans lequel la mise en scène du film Le Sacre d’Édouard VII dans l’atelier de prise de vues de Georges Méliès est associée à une supercherie (s.a., « Édouard VII à Montreuil. Couronnement truqué », Le Petit Bleu, n^o 35, 23 juin 1902, p. 1).

45 Jean Lorrain, « La truqueuse du bois », dans Une femme par jour. Femmes d’été, Paris, Borel, 1896, p. 73-81.

46 Charles Clairville et Adrien Vély, Y a du linge !, manuscrit, 1904, Archives nationales, F¹⁸ 1506.

47 Ibid.

48 Ces termes exprimaient plus largement une attitude de rejet ou de détestation des machines et de leurs effets.

49 Voir Laurent Guido, « Vers l’être “électro-humain” : dispositifs visuels de la danseuse mécanique aux XIX^e et XX^e siècles », dans Olivier Asselin, Silvestra Mariniello et Andrea Oberhuber (dir.), L’ère électrique/The Electric Age, Ottawa, Les Presses de l’Université d’Ottawa, 2011, p. 155-180.

50 Barrasford’s Alhambra, programme, février 1907, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, 8-PRO-0084 (RES).

51 Olympia Théâtre, programme, 24 novembre 1905, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, 4-PRO-0027 (RES).

52 Eldorado, programme, 30 janvier 1907, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, 4-PRO-0062 (RES).

53 S.a., « Théâtres », Le Temps, n° 15359, 4 juillet 1903, s.p.