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La petite alternance

p. 85-104


Texte intégral

1L’événement est rarement là où on l’attend. Pendant la campagne électorale, les média avaient braqué leurs projecteurs sur la région Nord/Pas-de-Calais. Les enjeux du scrutin dépassaient largement le cadre septentrional : la rivalité entre Michel Delebarre et Marie-Christine Blandin avait un temps empoisonné l’atmosphère au sein du gouvernement, puisque Dominique Voynet avait fait du maintien de celle-ci à la présidence du conseil régional un casus belli. La droite régionale faisait aussi la une des quotidiens nationaux : Philippe Vasseur annonça très tôt son intention de ne pas refuser les voix du Front National si d’aventure celles-ci se portaient sur lui lors de l’élection du président. Un peu plus tard, la droite nordiste étala ses divisions au grand jour, avec le dépôt de deux listes concurrentes menées par Colette Codaccioni et Jean-Louis Borloo.

2Au lendemain du scrutin, les projecteurs nationaux désertèrent la région Nord/Pas-de-Calais. Déçue par son score, Marie-Christine Blandin retira dans les quarante-huit heures sa candidature à la présidence du conseil régional. Et Philippe Vasseur, prisonnier d’une arithmétique électorale qui rendait sa candidature improbable, renonça à solliciter les voix du Front National. Michel Delebarre fut donc élu sans coup férir dans le fauteuil qu’il convoitait depuis douze ans, le jour même où la droite s’alliait au Front National dans cinq régions pour conserver la présidence.

3Le scrutin régional mérite pourtant d’être analysé : l’élection de conseillers régionaux Lutte Ouvrière, le semi-échec des Verts, la percée de Jean-Louis Borloo et la nouvelle progression du Front National attirent l’attention, autant que la victoire de Michel Delebarre. Pour saisir la singularité du scrutin, il faut pourtant ne jamais oublier que les comportements électoraux s’inscrivent dans le temps et dans l’espace.

I – Le scrutin de 1998 dans la chaîne des consultations

4Donner du sens à des résultats électoraux nécessite de les comparer avec des élections de référence. Mais gare aux effets d’optique : le choix du référent dicte le commentaire. Vu des régionales de 1992, de la présidentielle de 1995 ou des législatives de 1997, le scrutin du mois de mars revêt des significations différentes. La multiplicité des regards portés, pour nécessaire qu’elle soit, conduit l’observateur à la prudence. Mais elle permet aussi d’apprécier les effets des modes de scrutin sur le comportement électoral des habitants du Nord/Pas-de-Calais.

Un scrutin, deux départements, trois regards

5Les résultats du scrutin du 15 mars 1998 sont les suivants.

Tableau 1 Résultats des élections régionales dans le Nord et le Pas-de-Calais (en % des suffrages exprimés, et en sièges)

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Vu de 1992 : Recomposition et clarification du paysage politique régional

6L’appréciation des résultats du scrutin de 1998 au regard de celui de 1992 est particulièrement difficile. En 1992, l’offre électorale était éclatée : dans la plupart des départements s’opposaient le PC, le PS, les Verts, Génération Ecologie, UPF et le FN, auxquels venaient souvent s’ajouter d’autres petites listes. En 1998, l’effacement de Génération Ecologie et la constitution de listes uniques par la Gauche plurielle réduisent la configuration de base à trois listes : Gauche plurielle, Droite UDF-RPR, Front National. Dès lors, la comparaison par force, au niveau national, est impossible. Seule est concevable une comparaison plus globale. Mais celle-ci doit être effectuée avec la plus grande prudence car, en six ans, le paysage politique national s’est profondément transformé. Il faut rappeler qu’à l’approche des élections régionales de 1992, les Verts, alors animés par Antoine Waechter, défendaient une ligne politique fondée sur le « ni droite, ni gauche », tandis que Génération Ecologie, présidée par Brice Lalonde, alors ministre de François Mitterrand, avait pour objectif d’ancrer à gauche une partie de l’électorat écologiste. L’élection du président du conseil régional Nord/Pas-de-Calais contribua à modifier la donne : Génération Ecologie soutint la candidature de Jean-Louis Borloo, avant que Marie-Christine Blandin ne soit finalement élue avec le soutien des élus régionaux socialistes et communistes. Aujourd’hui, les Verts constituent un des pôles de la gauche plurielle, tandis que Brice Lalonde flirte avec Démocratie Libérale. Ainsi, il faut se résoudre à comparer les scores de la gauche plurielle à l’aune du total des voix obtenues par les listes communistes, socialistes et vertes en 1992, tout en sachant qu’à l’époque, les Verts, n’appartenaient pas à la gauche.

7Mesuré en ces termes, le rapport gauche-droite, à l’échelon national, ne s’est pas profondément modifié depuis 1992 (tableau 2). A peine a-t-il été infléchi : avec 36,48 % des suffrages exprimés, la « gauche plurielle » ne progresse, en France métropolitaine, que de 1,28 % par rapport au total des voix recueillies il y a six ans par les listes socialistes, communistes, divers gauche et vertes ; avec 35,85 %, la droite républicaine n’abandonne que 1,35 % en six ans. Le Front National progresse légèrement (+ 1,39 %) tandis que CPNT s’effrite (-1,24 %). La percée la plus spectaculaire est à mettre au compte de l’extrême-gauche, qui obtient pour la première fois des élus régionaux, tandis que Génération Ecologie disparaît de la scène électorale.

8Le tableau 2 montre que les évolutions enregistrées dans le Nord et dans le Pas-de-Calais sont conformes aux évolutions nationales : progrès de l’extrême-gauche, du FN et des listes sans étiquette ; recul de la droite, de CPNT et des listes Génération Ecologie et divers écologie. La seule exception concerne la gauche plurielle, dans le département du Pas-de-Calais. Alors que celle-ci progresse au niveau national, le total des listes communistes, socialistes et vertes est en recul par rapport à 1992 : la gauche avait alors profité de l’absence de liste d’extrême-gauche qui, cette fois, atteint 6,35 %.

9Toutefois, l’intensité de ces évolutions varie. Ainsi, dans le Nord, la droite républicaine n’a manifestement pas tiré profit de l’absence de liste CPNT. Les deux listes UDF et RPR enregistrent au contraire un recul marqué (– 5,37 %) par rapport au total des trois listes de droite présentes en 1992, tandis que le FN progresse de façon plus importante dans ce département (+ 2,98 %) qu’au niveau national. Loin de permettre à l’opposition de ratisser plus large, la concurrence des listes Borloo et Codaccioni a probablement désorienté l’électorat de droite. En revanche, les listes de la gauche plurielle progressent plus fortement (+ 2,64 %) qu’au niveau national, malgré la présence de Génération Ecologie. Au total, les listes se réclamant de la gauche gouvernementale ou de l’écologie maintiennent leur audience (+ 0,11 %), alors qu’elles s’érodent de manière sensible sur l’ensemble de la France métropolitaine (– 3,86 %). La progression départementale de Lutte Ouvrière (+ 3,14 %) est identique à sa progression nationale, tandis que les listes apolitiques enregistrent un gain légèrement plus important (+ 2,92 %).

10Ainsi, le phénomène qui retient le plus l’attention est la relative stabilité du corps électoral, et notamment la stabilité de la « gauche plurielle ». D’ailleurs, ses composantes ne gagnent qu’un siège au conseil régional : car si les socialistes et leurs alliés comptent désormais 29 élus (+ 2) et les Verts 9 (+ 1), les communistes ne disposent plus que de 13 conseillers régionaux (– 2). Comment expliquer que, dans ces conditions, la gauche ait pu reconquérir la présidence du conseil régional ?

11Deux éléments doivent être avancés. S’il faut d’abord souligner le recul de la droite, qui ne compte plus que 35 élus (– 5), il faut surtout insister sur la rebipolarisation de l’assemblée régionale. En 1992, la gauche PS-PC disposait certes d’une majorité relative face à la droite (42 élus contre 40), mais le jeu était d’autant plus ouvert que 8 Verts, 6 Génération écologie et 2 CPNT étaient susceptibles de rallier l’un des deux camps. Six ans plus tard, le PC et le PS disposent toujours de 42 élus. Mais les 9 élus Verts sont cette fois fortement arrimés à la gauche plurielle. Face à cette majorité relative de 51 sièges, la droite ne pouvait compter, outre ses 35 élus, que sur le renfort éventuel des 2 élus CNPT, sauf à rechercher les voix des 18 élus FN. Mais qui sait si les 7 élus LO n’auraient pas alors voté en faveur de Michel Delebarre ?

Tableau 2 Des élections régionales de 1992 à celles de 1998 (en % des suffrages exprimés)

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Vu de 1995 : Recul de la droite

12La comparaison des scrutins de 1995 et de 1998 montre que, depuis l’élection présidentielle, la gauche plurielle n’a que peu progressé par rapport au total des scores réalisés par Lionel Jospin, Robert Hue et Dominique Voynet. En revanche, les listes de droite ne retrouvent pas le score totalisé par Jacques Chirac, Edouard Balladur et Philippe de Villiers : en France métropolitaine, leur recul atteint presque 8 %. La désaffection qui frappe la droite ne profite pas à l’extrême-droite, qui ne progresse pas par rapport à 1995, mais à des listes sans étiquette (CPNT, GE, listes féminines...) qui ne dépassent que rarement 5 % des suffrages exprimés.

13Le tableau 3 montre que, là encore, les évolutions enregistrées dans le Nord et dans le Pas-de-Calais sont conformes à celles observées au plan national : progrès de la gauche plurielle, effondrement de la droite, stagnation de l’extrême-droite ; la seule exception concerne l’extrême-gauche qui progresse très légèrement dans le Pas-de-Calais alors qu’elle recule au plan national. Seule l’intensité de ces évolutions varie : ainsi, la gauche plurielle récolte les fruits d’une implantation locale ancienne en progressant davantage dans la région (+ 3,37 % dans le Nord et + 4,06 % dans le Pas-de-Calais) que sur l’ensemble du territoire national. Mais le phénomène le plus significatif est sans doute le sévère recul qu’enregistre la droite dans le département du Pas-de-Calais (– 10,11 %). La difficulté éprouvée par Philippe Vasseur à rassembler l’électorat de Jacques Chirac ne profite guère au Front National, lui aussi en retrait par rapport à 1995 (– 3,36 % par rapport au total Le Pen + Cheminade), mais plutôt aux listes femmes et CPNT, qui frôlent à deux les 10 %. La consultation du 15 mars 1998 montre, une fois de plus, que, dans le Pas-de-Calais, plus le scrutin a une dimension locale, plus la gauche est avantagée et, a contrario, que plus il a une dimension nationale, plus la droite est susceptible d’en tirer profit.

Tableau 3 De l’élection présidentielle de 1995 (1er tour) aux élections régionales de 1998 (en % des suffrages exprimés)

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Vu de 1997 : Recul de la Gauche

14Entre les législatives et les régionales, la droite et l’extrême droite apparaissent étonnement stables. En revanche, la gauche plurielle et les écologistes sont en net recul, tandis que l’extrême-gauche et les listes sans étiquette progressent.

15Le tableau 4 montre que l’évolution observée dans le département du Nord est, au point près, conforme aux mouvements nationaux. Le département du Pas-de-Calais évolue, lui, de façon singulière. Si la droite et l’extrême droite s’effritent légèrement, le repli de la gauche plurielle (-10,96 %), de cinq points supérieur à son recul national, n’est que très partiellement compensé par les gains de l’extrême-gauche (+ 3,67 %). A l’évidence, le scrutin départemental de liste est moins favorable aux socialistes du Pas-de-Calais que le scrutin uninominal en vigueur pour les élections législatives. La droite et l’extrême-droite ne tirent guère avantage du recul de la gauche. En revanche, les « divers » progressent dans des proportions beaucoup plus importantes (+ 9,02 %) qu’au niveau national, grâce au succès de la liste CNPT, absent du scrutin l’année dernière.

Tableau 4 Des élections législatives de 1997 (1er tour) aux élections régionales de 1998 (en % des suffrages exprimés)

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Scrutin national ou scrutin local ?

16L’analyse des résultats électoraux permet, au-delà de l’appréciation des performances des uns et des autres, de cerner les capacités de mobilisation de chaque force en fonction du mode de scrutin, et d’appréhender les effets de ces différents modes de scrutin. Pour mettre à jour ces différences, nous avons calculé pour chaque force politique sa « performance relative » dans les deux départements du Nord et du Pas-de-Calais lors de quatre consultations récentes : présidentielle (1er tour) de 1995, législatives (1er tour) de 1997, régionales et cantonales (1er tour) de 1998. La « performance relative » désigne ici, pour une force considérée, l’écart entre son score départemental et sa moyenne nationale.

17Le tableau 5-1 montre que le vote d’extrême-gauche obéit très largement à des considérations nationales. Les enjeux spécifiques de chaque consultation et le mode de scrutin ne semblent pas influer sur les résultats des mouvements trotskistes dans le Nord et dans le Pas-de-Calais, où leurs candidats font toujours légèrement mieux que sur l’ensemble du territoire national. Une remarque cependant : le tableau 5-1 témoigne clairement que Lutte Ouvrière n’a pas tiré parti de l’absence de liste communiste dans le département du Nord. En revanche, la présence d’une liste communiste dans le Pas-de-Calais n’empêche pas LO de faire près de 2 points de plus qu’au plan national.

Tableau 5-1 Score de l’extrême-gauche depuis 1995 (en % des suffrages exprimés)

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18Les tableaux 5-2 et 5-3 indiquent que les performances relatives de la gauche et de la droite dépendent fortement du type de consultation. Plus la consultation a un caractère local, plus la performance relative de la gauche est bonne et celle de la droite mauvaise. Symétriquement, plus la consultation est nationale, plus la performance relative de la gauche est mauvaise, et celle de la droite bonne. Mais les logiques à l’œuvre dans les deux départements ne sont pas tout à fait identiques.

19Dans le Nord, les performances relatives de la gauche et de la droite varient d’abord en fonction de l’espace institutionnel, c’est-à-dire du niveau auquel les élus sont appelés à exercer leur mandat. Plus l’enjeu est local, et plus la performance relative de la gauche dans le Nord est bonne : + 2,24 à la présidentielle et + 3,63 aux législatives, + 4,85 aux régionales, + 8,16 aux cantonales. La performance relative de la droite obéit à une logique inverse : – 5,39 à la présidentielle et – 6,44 aux législatives, – 7,49 aux régionales, – 9,40 aux cantonales.

20Dans le Pas-de-Calais, en revanche, c’est l’espace d’agrégation qui explique avant tout les variations des performances relatives de la gauche et de la droite. Plus les suffrages sont agrégés à un niveau fin, meilleure est la performance relative de la gauche : + 5,96 pour la présidentielle, + 6,06 pour les régionales (scrutin de liste départemental), + 11,30 pour les législatives (scrutin de circonscription), + 16,12 pour les cantonales. Les élections locales qui se déroulent au scrutin uninominal majoritaire semblent ainsi particulièrement favorables aux socialistes du Pas-de-Calais. La performance relative de la droite obéit à une logique inverse. L’élection présidentielle ou le scrutin régional lui est moins défavorable que les scrutins uninominaux.

Tableau 5-2 Total gauche plurielle + écologistes depuis 1995 (en % des suffrages exprimés)

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Tableau 5-3 Total droite + divers depuis 1995 (en % des suffrages exprimés)

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21Enfin, on remarque que la performance relative du Front National est d’autant meilleure que l’enjeu de la consultation est national. Dans le Nord comme dans le Pas-de-Calais, l’élection présidentielle et, à un degré moindre, les élections législatives, sont les scrutins où le parti de Jean-Marie Le Pen maximise ses résultats. En revanche, le scrutin régional lui est peu favorable. L’élection cantonale fait curieusement exception à la règle. Ainsi, dans le Nord, c’est aux cantonales que l’écart entre le score départemental et le score national est le plus élevé (+ 3,10). Mais cela ne tient pas à une progression de la moyenne départementale du Front National, mais à un tassement sensible de sa moyenne nationale, consécutif à sa mauvaise tenue dans les petits cantons des départements ruraux. En revanche, il résiste mieux dans le Pas-de-Calais et, surtout, dans le Nord.

Tableau 5-4 Scores de l’extrême-droite depuis 1995 (en % des suffrages exprimés)

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II – Les forces politiques dans leurs territoires

22Pour indispensable qu’il soit, l’examen des scores départementaux des listes candidates ne suffit pas à la compréhension du scrutin. Ces scores ne constituent jamais que des moyennes, qui dissimulent des comportements géographiquement différenciés. C’est pourquoi nous avons projeté les résultats électoraux dans les trente-huit circonscriptions législatives du Nord/Pas-de-Calais afin de mieux cerner les évolutions locales, mais aussi pour éclairer le vote Lutte Ouvrière, la rivalité à gauche entre Michel Delebarre et Marie-Christine Blandin, la compétition à droite entre Philippe Vasseur et Jean-Louis Borloo et, enfin, la progression du Front National.

Tableau 6-1 Les résultats des élections régionales de 1998 dans le Nord (par circonscription, en % des suffrages exprimés)

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L’extrême gauche

23Comme en 1995, Lutte Ouvrière dépasse la barre des 5 % tant dans le Nord que dans le Pas-de-Calais, ce qui lui permet de faire son entrée au conseil régional. Le phénomène le plus significatif est probablement le caractère étale du vote LO, dont rend compte un écart-type peu élevé (1,00 dans le Nord ; 1,18 dans le Pas-de-Calais). Le parti d’Arlette Laguiller dépasse les 4 % de suffrages exprimés dans toutes les circonscriptions de la région, à trois exceptions près (9e et 21e du Nord, 3e du Pas-de-Calais). Mais il ne dépasse les 7 % qu’à trois reprises (16e du Nord, 12e et 13e du Pas-de-Calais).

Tableau 6-2 Les résultats des élections régionales de 1998 dans le Pas-de-Calais (par circonscription, en % des suffrages exprimés)

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24Surtout, les chiffres ne confirment pas la thèse selon laquelle LO tirerait profit des listes d’union PC-PS. En effet, LO fait mieux dans le Pas-de-Calais, où le PC présentait sa propre liste, que dans le Nord, où les communistes avaient accepté de se ranger derrière Michel Delebarre. Pourtant, on ne saurait reprocher aux communistes du Pas-de-Calais, partisans d’une ligne « orthodoxe » à l’intérieur de leur parti, d’avoir ouvert un espace politique à LO.

25L’hypothèse selon laquelle LO se nourrirait du déclin du PC retient davantage l’attention. L’analyse des résultats au niveau de la circonscription montre ainsi que LO réalise ses meilleurs scores dans des zones où le Parti Communiste est historiquement bien implanté, notamment dans l’ouest du bassin minier, alors que ses résultats sont en général moins bons dans les terres qui lui furent toujours rétives. Le vote LO aux élections régionales est corrélé positivement avec le vote Hue à l’élection présidentielle (coefficient de corrélation = 0,57). Mais la carte du vote communiste ne recouvre qu’approximativement celle du vote LO. Pour exemple, le parti trotskiste frôle les 7 % dans la 12e circonscription du Nord, où Robert Hue dépassait à peine 10 % il y a trois ans ; en revanche, il ne réalise que 5 % dans la 19e circonscription du Nord, là où le secrétaire général du Parti Communiste avait totalisé plus de 25 % des suffrages en 1995.

26A ce stade de l’analyse, il faut néanmoins distinguer le Nord du Pas-de-Calais. Dans le Nord, les liens sont ténus entre le vote LO (ou la progression du vote LO) et l’évolution du score de la liste de la Gauche rassemblée entre 1992 et 1998. Dans le Pas-de-Calais, en revanche, le vote LO est inversement corrélé tant avec l’évolution du vote communiste (coefficient de corrélation = – 0,59), qu’avec celle du vote socialiste (coefficient = – 0,32) ou du vote vert (coefficient = – 0,23). Au total, il y a, dans le Pas-de-Calais, une corrélation inverse très forte entre le vote LO et l’évolution des scores des listes de la gauche plurielle (coefficient = – 0,80).

27En définitive, la structure du vote LO apparaît fragile. Ainsi, elle enregistre ses plus mauvais scores dans les bastions de ses adversaires (21e circonscription du Nord, détenue par Jean-Louis Borloo, et 3e circonscription du Pas-de-Calais, fief de Philippe Vasseur). Et elle n’atteint jamais les 6 % des suffrages exprimés dans la métropole lilloise, là où les Verts réalisèrent leurs meilleurs scores.

La gauche plurielle

28A gauche, le Nord/Pas-de-Calais apparaît comme une région singulière. Alors que des listes uniques sont composées dans une majorité de départements, la rivalité entre Michel Delebarre et Marie-Christine Blandin débouche sur des listes séparées, tant dans le Nord que dans le Pas-de-Calais. Quant au Parti Communiste, il a choisi de rallier Michel Delebarre dans le Nord, et de partir sous ses propres couleurs dans le Pas-de-Calais, derrière Rémy Auchedé.

29A la veille du scrutin, les interrogations étaient nombreuses. Elles portaient d’abord sur la hauteur des scores des listes présentées par les Verts. Avec seulement 8,76 % dans le Nord et 7,54 % dans le Pas-de-Calais, leur espoir de conserver la présidence du conseil régional s’envole. Mais, à la différence de l’électorat LO, l’électorat Verts apparaît géographiquement structuré. Dans le Nord, le département est coupé en deux : on constate que les Verts réalisent leurs sept plus mauvais scores dans les sept circonscriptions situées dans les arrondissements de Cambrai, de Valenciennes et d’Avesnes, où ils ne dépassent jamais 7,5 % des suffrages exprimés. En revanche, leur score est toujours supérieur à ce chiffre dans les circonscriptions situées dans les arrondissements de Dunkerque, Lille et Douai. Mais c’est dans la métropole lilloise que la liste de Marie-Christine Blandin réalise ses performances les plus significatives : elle dépasse les 10 % dans sept circonscriptions sur onze, et réalise même plus de 13 % dans trois circonscriptions lilloises (1re, 2e et 3e circonscriptions). Tout se passe comme si l’épicentre du vote vert était situé à Lille : plus l’on s’éloigne de la capitale régionale, plus le score de la liste de Marie-Christine Blandin est modeste. Dans le Pas-de-Calais, les scores des écologistes apparaissent à la fois plus faibles et plus homogènes, puisque la liste menée par Jean-François Caron ne dépasse jamais 10 %.

30Même s’il reste inférieur au résultat attendu, le score réalisé par les Verts pénalise la liste conduite par Michel Delebarre qui, avec 31,37 % des suffrages exprimés, recule de 3,78 % par rapport au total des scores réalisés par Lionel Jospin et Robert Hue en 1995. Cette fois, on voit clairement que l’épicentre du vote Delebarre est situé à Dunkerque : par rapport à la présidentielle de 1995, la liste de la « gauche rassemblée » progresse de plus de 5 % dans la 13e circonscription tandis qu’elle est stable dans les 12e et 14e circonscription. En revanche, dans le reste des circonscriptions du département du Nord, la liste Delebarre abandonne entre 1,75 % et 6,13 % par rapport au total Jospin + Hue. Mais, additionnées, les listes de la gauche plurielle (Delebarre, Blandin et Rokia) sont en progrès (+ 3,37 %) par rapport au total des scores recueillis en 1995 par Lionel Jospin, Robert Hue et Dominique Voynet. On a déjà souligné que ce chiffre était supérieur au gain national moyen de la gauche plurielle (+ 1,19 %). Mais il s’agit là d’une moyenne qui cache d’importantes disparités. Les listes issues de la gauche plurielle gagnent près de 12 % à Dunkerque Est (13e circonscription), mais elles reculent dans les trois circonscriptions du valenciennois (19e, 20e et, surtout, 21e circonscriptions), fief de Jean-Louis Borloo.

31Dans le Nord, PS et PC avaient donc choisi de faire liste commune derrière Michel Delebarre, contrairement à 1986 et 1992. Le comportement de l’électorat communiste constituait une des clefs du scrutin : allait-il accepter d’apporter ses suffrages à la liste conduite par le député-maire de Dunkerque ?

32Le tableau 7 montre que l’écart entre le score de la liste Delebarre en 1998 et l’addition de ceux obtenus par les socialistes et communistes en 1992, stable au niveau du département, ne varie que faiblement circonscription par circonscription. Encore faut-il indiquer immédiatement que les variations les plus fortes sont enregistrées dans les terres de Jacques Legendre (18e) et Alain Bocquet (20e), tous deux têtes de liste il y a six ans. La liste de Michel Delebarre profite cette fois de l’effacement de Jacques Legendre dans la 18e circonscription, mais pâtit de celui d’Alain Boquet dans la 20e circonscription. Ailleurs, l’évolution des scores de la « gauche rassemblée » n’excède jamais + ou – 3 points. En outre, ces variations ne sont pas dictées par le niveau du score obtenu par la liste Bocquet en 1992 : la « gauche rassemblée » progresse notamment dans quelques-unes des circonscriptions où le PC réalisait un score élevé il y a six ans, notamment au Quesnoy (22e), à Douai (17e) et à Valenciennes Sud (19e) ; mais elle est en recul à Lille (1e, 2e et 3e circonscriptions), où le PC est depuis longtemps en-deça des 10 %. Tout juste peut-on remarquer que les trois circonscriptions détenues par le PC (16e, 19e et 20e) figurent dans la seconde moitié de cette liste, peut-être parce que l’électorat communiste y est moins habitué qu’ailleurs à « voter socialiste ».

33Dans le Pas-de-Calais, PS et PC présentaient des listes séparées. Comme toujours, le PC réalise ses meilleurs scores dans le bassin minier (10e, 11e, 12e, 13e et 14e circonscriptions), où il dépasse 16 % des suffrages exprimés, tandis qu’il n’atteint pas 5 % dans la campagne arrageoise, l’arrondissement de Montreuil et l’audomarois (1e, 3e, 4e et 8e circonscriptions). Le scrutin régional fut difficile pour le PC. Avec 11,44 % des suffrages exprimés, il recule de 2,85 % par rapport aux régionales de 1992. Bien entendu, ce recul se traduit au niveau local : le PC ne progresse que dans la 2e circonscription (Arras Nord), où il gagne 1,16 %, grâce probablement à la présence sur sa liste de Jean-Marie Alexandre, maire (MDC) de Souchez. Partout ailleurs, il recule. Il abandonne ainsi plus de 5 % dans deux circonscriptions du bassin minier (10e et 12e). Par rapport au score réalisé par Robert Hue en 1995, la liste communiste connaît aussi un recul sensible (– 2,47 %). Elle ne progresse que dans les terres de Rémy Auchedé et de Jean-Marie Alexandre (11e et 2e circonscriptions, c’est-à-dire Cambrin et Arras Nord), ainsi que dans le calaisis (7e circonscription), fief de Jean-Jacques Barthe.

34Avec 26,34 des suffrages exprimés, le PS recule par rapport au total des listes Josèphe (PS) et Calero (DVG) de 1992. Par rapport au score réalisé par Lionel Jospin à la présidentielle de 1995, la liste socialiste progresse légèrement (+ 1,16 %). Hormis dans la 8e circonscription, qui était l’ancienne circonscription de Roland Huguet, où il gagne 7,24 %, le PS réalise toujours un score proche de celui réalisé par le leader de la gauche trois ans auparavant. On a déjà souligné que le scrutin de liste convenait mal aux socialistes du Pas-de-Calais.

Tableau 7 Evolution des scores des listes de la gauche rassemblée de 1992 à 1998 dans le département du Nord (par circonscription, en % des suffrages exprimés)

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La droite républicaine

35La droite républicaine partait, elle aussi, en ordre dispersé. Deux listes menées par Jean-Louis Borloo et Colette Codaccioni s’affrontaient dans le Nord, comme en 1992. Mais, alors qu’il y a six ans, la liste Legendre avait été investie par le RPR et l’UDF, la situation était cette fois très embrouillée. Colette Codaccioni, investie par le RPR, bénéficiait du soutien de Philippe Vasseur, tête de liste UDF dans le Pas-de-Calais ; Jean-Louis Borloo, soutenu pour sa part par la plupart des élus UDF du département du Nord, comptait sur sa liste un certain nombre d’élus gaullistes, dont Jacques Donnay, président du conseil général. Dans le Pas-de-Calais, Philippe Vasseur, investi par l’UDF et le RPR, fut concurrencé par une liste « divers droite » se réclamant de Jean-Louis Borloo, constituée à la dernière minute.

36Il y a six ans, Jacques Legendre était arrivé en tête dans le Nord, avec 20,66 % des suffrages exprimés, devant Jean-Louis Borloo, qui obtint 12,96 %. Il devançait son concurrent dix-neuf fois sur vingt-quatre, le maire de Valenciennes n’arrivant en tête que dans les 19e, 20e, 21e, 22e et 23e circonscriptions. Jean-Louis Borloo ne franchissait la barre des 20 % que dans le valenciennois (19e, 20e et 21e circonscriptions), tandis qu’il était en dessous des 10 % dans douze des vingt-quatre circonscriptions du département.

37Au terme d’une campagne particulièrement âpre, le maire de Valenciennes devance cette fois Colette Codaccioni, qui ne totalise que 11,50 %. En six ans, la situation s’est inversée. Alors que son audience électorale était, en 1992, limitée au valenciennois, il réussit cette fois à étendre son influence sur l’ensemble du département. Il ne réalise jamais moins de 10 %, et dépasse 20 % à dix reprises. En revanche, Colette Codaccioni se trouve dans la situation inverse. Elle ne franchit la barre des 20 % qu’à deux reprises. Elle est en dessous des 10 % dans dix cas, et n’arrive pas à faire plus de 5 % dans les trois circonscriptions du valenciennois (19e, 20e et 21e). Jean-Louis Borloo arrive devant l’ancien ministre d’Alain Juppé dans dix-neuf des vingt-quatre circonscriptions du département. Il n’est devancé par sa rivale que dans cinq lieux : outre la 1re, où elle fut élue députée en 1993, il s’agit de la 11e (Armentières) et de la 17e (Douai), jadis terre d’élection de Françoise Hostalier et de Jacques Vernier, respectivement second et troisième de sa liste, ainsi que des 13e et 15e circonscriptions (Dunkerque Est et Hazebrouck). En d’autres termes, l’audience électorale de Colette Codaccioni s’est rétractée, et se limite désormais aux terres de ses plus proches soutiens.

38Le tableau 8 permet de comprendre comment le rapport de forces s’est inversé à droite. Par rapport à 1992, Jean-Louis Borloo progresse partout, sauf dans la 19e circonscription. Colette Codaccioni, elle, fait moins bien que Jacques Legendre dans les vingt-quatre circonscriptions du département. Un jeu de vase communicant fonctionne sur l’ensemble du département. Il y a ainsi une corrélation inverse exceptionnellement forte entre les progrès du vote Borloo et les reculs du vote Codaccioni-Legendre de 1992 à 1998 (coefficient de corrélation = – 0,86).

39Les transferts entre les deux listes n’ont pas la même intensité dans tous les lieux. Ils sont particulièrement importants dans les fiefs des leaders départementaux de l’UDF et du RPR qui se sont ralliés à Jean-Louis Borloo, et notamment ceux de Marc-Philippe Daubresse (4e circonscription, Lille Ouest), Gérard Vignoble (ancien député de la 8e circonscription, Roubaix Ouest), candidat sur la liste Legendre en 1992, ou Thierry Lazaro (6e circonscription, Pont-à-Marcq).

40Le maire de Valenciennes progresse également dans les terres en jachère. Il profite ainsi de la défection de René Vandierendonck, candidat sur la liste Legendre en 1992, pour améliorer ses positions dans la 7e circonscription (Roubaix Est). Les transferts sont aussi très importants dans la 9e circonscription, même si René Lecerf, maire RPR de Marcq-en-Baroeul, ne soutenait officiellement aucune des deux listes. Toutefois, la présence sur la liste Borloo d’une de ses adjointes, Joëlle Longueval, et surtout, d’Isabelle Frémaux, présentée comme « collaboratrice du maire de Marcq-en-Barœul » sur les bulletins de vote, constituaient un signal clair adressé aux électeurs.

41On remarque enfin que Colette Codaccioni ne parvient pas à endiguer la progression de son adversaire là où elle bénéficiait du soutien affiché d’élus UDF ou RPR. Elle cède beaucoup de terrain à son rival dans les 17e et 18e circonscriptions (Douai et Cambrai), malgré l’engagement à ses côtés de Jacques Vernier et de Jacques Legendre. Elle recule même légèrement dans son ancienne circonscription (1re, Lille Sud).

Tableau 8 Evolution des scores des listes de la droite républicaine de 1992 à 1998 dans le département du Nord (par circonscription, en % des suffrages exprimés)

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42En revanche, la liste divers droite présentée dans le Pas-de-Calais par Raphaël Desrousseaux avec le parrainage de Jean-Louis Borloo réalise un score insignifiant (2,02 %). Cette liste ne parvient pas à rééditer le score de la liste qu’Annie Wable avait menée dans des conditions identiques il y a six ans (7,25 %). Elle ne dépasse jamais 4 %, alors que la liste Wable avait franchi la barre des 5 % dans douze circonscriptions sur quatorze, et qu’elle avait même fait plus de 10 % dans quatre d’entre elles. En revanche, Philippe Vasseur progresse de 2,89 % par rapport au score de la liste menée par Léonce Deprez en 1992. Outre dans sa propre circonscription (3e, Saint-Pol-sur-Ternoise), Philippe Vasseur progresse de façon sensible dans les circonscriptions de l’arrageois (1re et 2e) et du boulonnais (5e et 6e), où Annie Wable avait enregistré ses meilleurs résultats il y a six ans.

Le Front National

43Avec 17,39 % dans le Nord et 12,10 % dans le Pas-de-Calais, le Front National poursuit sa progression. Dans le Nord, le FN ne réalise jamais moins de 13 %, et se situe au-delà des 20 % à Roubaix (7e et 8e), Tourcoing (10e), Dunkerque Ouest (12e) et Maubeuge (23e). Dans le Pas-de-Calais, il ne franchit jamais la barre des 20 %. Il enregistre ses meilleurs scores dans le bassin minier (11e, 12e, 13e et 14e) où il devance même la liste Vasseur à trois reprises (12e, 13e et 14e). En revanche, il fait moins de 10 % en milieu rural, et notamment à Saint-Pol-sur-Ternoise (3e), Montreuil (4e) et Saint-Omer (8e).

44Par rapport à 1992, il gagne 2,98 % dans le Nord et 1,53 % dans le Pas-de-Calais. Mais le tableau 9 montre que la structure géographique de leur progression diffère dans le Nord et dans le Pas-de-Calais.

45Le département du Nord est clairement coupé en deux. Dans la métropole lilloise, le Front National progresse peu. Ses gains sont faibles, et ne dépassent jamais 2 %, sauf dans deux circonscriptions de la banlieue populaire de Lille, à Seclin (5e) et Armentières (11e). Il recule même légèrement à trois reprises, notamment dans ses zones de force de Roubaix Ouest (8e) et Tourcoing Nord (10e). En dehors de la métropole lilloise, où le Front National réalise traditionnellement des scores inférieurs à sa moyenne départementale, la liste Lang affiche partout des progrès sensibles, toujours supérieurs à 2 %, sauf à Avesnes (24e). Le bond est spectaculaire dans le dunkerquois (12e, 13e et 14e) où ses gains dépassent 5 %. Dans la 12e circonscription, le Front National gagne même 12 % en six ans, passant de 13,12 % à 25,16 % entre 1992 et 1998 ! Ce double mouvement (stagnation dans les zones de force, progrès dans les zones de faiblesse) se traduit par une plus grande homogénéité des scores du Front National dans le département du Nord (l’écart-type passe de 4,05 à 3,47 de 1992 à 1998).

46Le département du Pas-de-Calais est, lui aussi, coupé en deux. En dehors du bassin minier, la progression du FN est faible. Elle n’est jamais supérieure à 2 %, et le parti de Jean-Marie Le Pen recule même à Arras Ouest et Saint-Pol-sur-Ternoise (1re et 3e circonscriptions). Dans le bassin minier, où le Front National réalise depuis quelques années ses meilleurs scores départementaux, la liste d’Eric Iorio enregistre partout des progrès compris entre 2 % et 5 %. En d’autres termes, la dynamique à l’œuvre dans le Pas-de-Calais est rigoureusement inverse à celle observée dans le département du Nord : le Front National y progresse davantage dans ses zones de force que dans ses zones de faiblesse, ce qui se traduit par une moins grande homogénéité des scores du Front National (l’écart-type passe de 2,13 à 3,47 de 1992 à 1998).

Tableau 9 Evolution du score du Front National de 1992 à 1998 dans le Nord et le Pas-de-Calais (par circonscription, en % des suffrages exprimés)

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47Mais, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, il faut relever la forte corrélation entre les progrès du vote LO et ceux du vote FN dans le Nord (coefficient de corrélation = 0,60) et plus encore dans le Pas-de-Calais (0,78). Cela signifie que les lieux où le Front National et Lutte Ouvrière gagnent du terrain sont les mêmes. Dans le Nord, il s’agit des zones situées en dehors de la métropole lilloise et, dans le Pas-de-Calais, du bassin minier. C’est, bien entendu, le signe que ces territoires sont en train de se déstructurer sur le plan politique. Les plaies des bouleversements économiques et sociaux qui ont affecté ces lieux depuis la fin des années 1970 sont loin d’être cicatrisées, bien au contraire.

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