Les collectivités locales et le marketing : un mariage d’exception ?
Le cas des services et équipements sportifs de la communauté d’agglomération de Caen la mer
p. 235-255
Texte intégral
Introduction
1Actuellement en France, plus de 36 000 collectivités territoriales (36 673 communes, 101 départements, 26 régions) doivent satisfaire les besoins de pratique d’au moins 14 millions de sportifs (Bourg et Nys, 2003). Le développement récent de l’intercommunalité reconnaît l’existence d’une nouvelle entité dans la gestion des équipements culturels et sportifs (en 2001, 77 % des communautés d’agglomération ont choisi comme compétence additive à leurs compétences obligatoires le domaine culturel et sportif). Les structures intercommunales, acteurs émergents face à l’émiettement municipal, permettent la mutualisation des dépenses d’aménagement et d’équipement, la mise en commun du fonctionnement de services publics afin de rendre leurs actions plus efficaces et de s’adapter aux évolutions de l’espace (étalement urbain) (Alvergne et Tautelle, 2002). Réaliser des économies d’échelle, construire une vision globale du territoire et harmoniser les politiques restent, selon Jourdan et Charrier (2002), les raisons fondamentales justifiant l’intercommunalité notamment celle visant les équipements et services sportifs.
2Au-delà des mutations connues affectant le milieu sportif (privatisation du sport professionnel, contractualisation des relations, désengagement de l’Etat, européanisation et mondialisation du sport, commercialisation des valeurs du sport, diversification des pratiques sportives (Loret, 1995, 2002) etc.), toute collectivité territoriale est amenée à gérer les paradoxes suivants pour assurer son fonctionnement :
logique « usager » et logique « client » ;
objectif de satisfaction sociale et objectif de rentabilité des actions marketing ;
décisions des élus en application de leur programme politique et décisions des gestionnaires soumis aux contraintes du marché.
3L’étude de la communauté d’agglomération de Caen (Caen la mer), qui doit adapter son patrimoine sportif à la diversité des attentes de ses publics, servira de champ d’étude, à titre d’illustration, pour l’approche des applications marketing menées par les collectivités territoriales.
4Le dispositif méthodologique s’appuie sur la mise en place de la politique sportive communautaire relatée, au cours d’entretiens, par des élus et des responsables administratifs1.
Fiche signalétique de la communauté d’agglomération Caen La Mer |
• Localisation : département du Calvados en Basse-Normandie |
5Cet article s’intéresse sous un angle principalement marketing, d’une part, à la relation liant une ville ou un territoire aux usagers des services publics et s’inscrivant dans le champ local de l’offre éducative, récréative et sociale publique et, d’autre part, à la prise de décision publique dans un contexte systémique. Objets de bien des critiques et d’attentes spécifiques, les services publics dans leur ensemble semblent avoir admis la confusion des genres entre la notion d’usager et la notion de client, au-delà du sens étymologique des termes. En outre, répondre aux intérêts pluriels, voire divergents, des clients du service public, au même titre que les offreurs privés, implique l’application d’outils marketing. En effet, les concepts, démarches et opérations mis en œuvre par les organisations privées, notamment dans le secteur des services, présentent un indéniable intérêt pour les organisations non marchandes, soucieuses d’améliorer la qualité de leur offre. Aussi peut-on qualifier l’association du marketing et de la gestion du patrimoine sportif public d’union singulière.
1. Client et usager : le mélange des genres
6Lorsqu’on associe les services publics sportifs à la démarche marketing, certains auteurs comme Desbordes et al. (1999) parlent de mariage de raison, d’autres comme Tribou (2002) avancent la spécificité d’un marketing public appliqué au sport. Quel que soit l’éclairage que l’on souhaite donner à l’application des méthodes et des techniques marketing par la sphère sportive non marchande, le cœur du débat se focalise sur la logique du client à intégrer. Cette intention manifeste d’acceptation de la logique du client résulte de la prise en compte de trois phénomènes.
7Tout d’abord, il est possible de comparer le service public sportif à un colosse aux pieds d’argile. Face à la force croissante des organisations sportives privées et à la diversité des attentes des pratiquants, les services sportifs territoriaux sont déstabilisés ; ces derniers doivent alors œuvrer pour maximiser leur utilité sociale s’ils veulent perdurer sur le marché sportif. Un deuxième constat concerne le glissement progressif d’une logique d’usager à une logique de client dans les services publics. Enfin, le credo du client repose sur la qualité des services, attente prioritaire gouvernant le marché des services sportifs publics. En effet, pour les Français, la pratique sportive vise avant tout des objectifs de santé, de détente, de plaisir, de défoulement.
1.1. Un colosse aux pieds d’argile
8La métaphore du colosse aux pieds d’argile vise à souligner la puissance d’intervention des collectivités territoriales dans le domaine sportif, puissance toute relative au regard de l’évolution des composantes du marché (comportements de consommation, concurrents, conditions environnementales économiques, sociologiques, juridiques etc.).
1.1.1. Le poids des collectivités dans le domaine sportif
9Force est de constater l’importance des dépenses sportives des collectivités (régions, départements et communes), pour répondre aux besoins de pratique des individus. Leur part équivaut à près d’un tiers des dépenses totales, en 2000 (tableau 1), et a cru de 98 % de 1994 à 2000 selon le ministère des sports (passage de 3,82 à 7,58 milliards d’euros). Ces efforts d’investissement révèlent une volonté d’implication de la part des collectivités territoriales dans le financement public du sport ; ils expriment la reconnaissance du sport comme outil d’une politique sociale.
Tableau 1. La dépense sportive en France (2000)
Agents économiques | En milliards d’euros | En % |
Ménages | 12,49 | 50,90 |
TOTAL | 24,55 | 100,00 |
Source : Stat-Info, septembre 2002
1.1.2. La vulnérabilité de l’intervention des collectivités
10Contrairement à ce que le sens commun veut nous faire admettre, le sport n’est pas intemporel. En effet, l’organisation du milieu sportif évolue dans un environnement mouvant et avec les motivations de ses différents acteurs. En reconnaissance des attraits pédagogiques et du statut d’utilité publique des activités physiques, la stratégie commune des organisations sportives non marchandes a eu longtemps pour principe : proposer un service basique et tenter de répondre à la demande du plus grand nombre. Or, le temps où le sport se vendait comme une discipline est révolu (Loret et al., 1993). Pour le service public, l’amélioration de la relation avec l’usager est, en ce début de siècle, lourde d’enjeux. Celui-ci doit affirmer sa légitimité dans un univers qui le remet en cause et tente de lui opposer des solutions alternatives (univers concurrentiel du champ sportif). De plus, le service public doit développer ses ressources propres en complément des financements publics devenus souvent insuffisants. Aussi est-il contraint d’honorer les obligations d’une gestion saine et d’opter pour des actions débouchant sur de réels résultats ayant des retombées à la fois économiques et en termes de satisfaction des usagers.
11Un tel constat met en relief trois questions essentielles au cœur desquelles se situent les usagers :
Peut-on marier pour le meilleur l’intérêt général et l’intérêt économique ?
La maximisation de l’utilité sociale s’accorde-t-elle avec la recherche de rentabilité ?
Une gestion rigoureuse sous diverses contraintes conduit-elle à une satisfaction du plus grand nombre ?
12L’alchimie de ces interrogations est à l’origine de la déstabilisation des services publics, phénomène accentué par la pression concurrentielle du secteur privé et une perte de foi des pratiquants en les institutions sportives nationales. Face à de telles oppositions, encore appelées contradictions ou paradoxes, la gestion publique doit cerner le juste compromis, au sens d’état intermédiaire, en écartant toute ambition de solution maximale. Maintenir une position de leader sur le marché des services sportifs requiert donc un emprunt aux techniques de la sphère marchande par les collectivités territoriales mais n’induit pas une compromission quelle qu’elle soit.
1.1.3. L’issue marketing pour s’adapter
13Face à l’impérieuse nécessité de rentabilité des sites sportifs, l’appel aux techniques marchandes est le dernier recours pour les organisations publiques ; il faut alors se tourner vers le client.
14L’exemple des piscines met bien en évidence les solutions commerciales retenues par le communauté d’agglomération, Caen la mer. Le fait même d’affirmer une cohérence de tarifs pour l’accès aux équipements et d’élargir les horaires d’ouverture au public correspond à une ébauche de démarche marketing. Il s’agit toutefois d’une réponse apportée dans l’urgence aux attentes des usagers dans un contexte d’harmonisation des équipements transférés. Les responsables de la politique sportive communautaire ont bien conscience des insuffisances de telles mesures. En effet, la connaissance imparfaite des usagers et l’historique de chaque commune pour l’exploitation des services sportifs relativisent la teneur de cette démarche marketing.
15Dès lors, si la réussite peut se résumer à la réduction des déficits, à l’accroissement des fréquentations des équipements et à l’amélioration des services sportifs, une restructuration généralisée doit être envisagée à partir de la maîtrise et de la gestion de l’information. A titre d’exemple, mieux connaître les nageurs nécessite d’investir dans des systèmes informatiques, implantés dans chaque piscine, pour collecter des informations individualisées. Ces données socio-démographiques et comportementales doivent permettre de dégager des tendances, de comprendre les habitudes de consommation afin de prendre les décisions les plus idoines.
16L’implication de la communauté d’agglomération dans les dépenses sportives est importante mais elle masque une faiblesse réelle. Cette dernière se rattache à un manque de professionnalisation marketing des gestionnaires des services publics. Certes, il ne faut pas faire preuve d’amnésie pour gérer au mieux le patrimoine sportif communautaire mais il semble nécessaire de dépasser la phase d’apprentissage car le concept de client remplace aujourd’hui celui d’usager (Lacasse et Thoenig, 1996).
1.2. Quand le client se substitue à l’usager
17Courtisé par les secteurs privé et public, l’individu aux multiples facettes (usager, consommateur, citoyen/contribuable, électeur, patient etc.), dont l’expertise est de plus en plus aiguisée dans sa consommation, devient un client dans sa signification moderne élargie. A qui incombe la mutation de l’usager en client ? Comment intègre-t-on la logique client dans les services publics ?
1.2.1. Un individu en quête de sens
18La consommation de produits sportifs, au sens marketing du terme, peut être reconsidérée dans une approche postmoderne, à mi-chemin entre la communauté et la société, entre le lien social (communautaire) et le lien organique (sociétaire) (Cova et Cova, 2001 ; Rémy, 2001 ; Hetzel, 2002). Dans ce cadre conceptuel, l’individu est perçu comme acteur de sa consommation ; il se construit une identité à coups de symboles et de référents culturels et sportifs. Dans cet univers postmoderne, tout est bon à prendre et à assembler selon son libre choix. Les nouvelles pratiques de glisse illustrent bien cette mutation de l’individu qui recherche des produits et services dont la valeur de lien permet la mise en relation de tribus sociologiques, parfois éphémères mais toujours sélectives (Loret, 1995). Ce désir de communauté repose sur le partage d’émotions, une recherche de participation et d’expériences. Les nouvelles pratiques sportives urbaines auto-organisées doivent alors faire l’objet d’une attention particulière de la part des collectivités territoriales car elles ne peuvent pas être négligées dans l’élaboration d’une offre d’équipements et de services publics.
19Au cœur de ces constats se situe donc l’individu qui se forge une identité à partir de trois emplois : celui d’usager, celui de citoyen/ contribuable et celui de consommateur. Y a-t-il confusion entre ces trois attributions ? S’agit-il de rôles différents joués dans des situations spécifiques ?
1.2.2. L’individu multidimensionnel
20Définir l’usager, le consommateur et le citoyen/contribuable, doit permettre de mieux percevoir la place occupée par l’individu dans l’espace sportif local. L’usager est un terme générique qui met en avant l’utilisation de la prestation publique. Pour sa part, le citoyen jouit de droits civiques et est tenu d’accomplir un certain nombre de devoirs dont celui de voter, c’est-à-dire de participer à la décision publique ; son implication est d’autant plus justifiée qu’il est aussi un contribuable. Quant au consommateur, c’est la personne qui utilise des biens ou des services pour la satisfaction de ses besoins.
21La distinction prégnante entre ces trois emplois assumés par l’individu repose sur le concept de droits reconnus. En effet, si ces derniers sont entendus pour le citoyen/contribuable et le consommateur, l’usager a été trop longtemps peu écouté par les services publics. Or, aujourd’hui, l’usager est un consommateur. Il s’agit alors d’appréhender l’individu de manière holistique. Aussi assiste-t-on à une évolution du concept d’usager vers celui de client, au-delà du champ sémantique des termes. Sommes-nous passés de l’anonymat à la personnalisation de l’utilisateur ?
1.2.3. L’approche client de l’usager
22Au travers de cet abord de l’utilisateur, la véritable nécessité qui s’impose aux services sportifs publics est leur rénovation et leur efficacité sociale. Si les utilisateurs ne sont pas satisfaits, ils risquent de s’orienter vers la sphère privée, voire le regroupement tribal. La gestion des services sportifs publics, visant à concilier l’intérêt général et les intérêts particuliers, doit accorder à l’usager la place qui lui revient de droit même si, pour ce faire, la notion de client se substitue à celle d’usager. Cette évolution n’est pas que sémantique ; elle sous-tend l’idée selon laquelle les collectivités territoriales doivent être à l’écoute des attentes de tous, en reconnaissance des droits de ces derniers et adapter leur offre en conséquence.
23La jeunesse de la communauté d’agglomération Caen la mer ne permet pas, à ce jour, de citer un exemple précis d’application de la logique client. Néanmoins, les actions menées précédemment dans un cadre communal, comme les stages sportifs proposés aux jeunes à partir des résultats d’une enquête menée auprès des familles, seront étendues à l’agglomération (Bourhis, 2002). Le directeur général adjoint de la communauté d’agglomération projette de créer une base de données sur les habitants afin de construire une offre de services sportifs autour des attentes des utilisateurs. Un travail est en cours de réalisation pour segmenter le marché sportif local ; il s’agit d’un nouvel outil, le géomarketing, qui permet l’analyse d’un marché en accordant une place prépondérante aux critères de localisation géographique. Les applications du géomarketing seront triple : dresser un diagnostic de la situation des équipements et des services sportifs en fonction de critères géographiques ; maximiser l’exploitation des structures existantes et envisager de nouvelles créations ; cibler des actions de marketing direct (ex. : proposition de stages, de cours etc.) par zone géographique. Il s’agit d’initier une nouvelle approche marketing du marché ; trop souvent les collectivités ont apporté des réponses non différenciées à une demande évaluée globalement.
24Désormais, la demande sportive apparaît plurielle, individuelle, variant dans le temps et basée sur une recherche de qualité.
1.3. Le credo du client : un service de qualité
25La qualité d’un service public n’est pas de même nature que celle d’un produit de grande consommation. En effet, l’offre publique résulte d’un processus hypercomplexe par sa prise en compte de la diversité des besoins des acteurs en jeu.
1.3.1. L’absence d’antinomie entre « qualité » et « services publics »
26Trop longtemps, un décalage s’est installé entre le niveau de prestations du secteur public et celui du secteur privé. Sous couvert d’un prix défiant toute concurrence et d’un service pour tous, il était demandé aux usagers d’accepter une qualité moyenne des prestations. Néanmoins, l’usager, de plus en plus acteur de sa consommation, évalue les offres, compare les services et choisit celui qui satisfera au mieux son besoin. En outre, sa prise de parole s’exprime sur la scène publique et se traduit par de nombreuses critiques à l’encontre des services offerts par les collectivités territoriales. Son jugement se forge sur l’équipement sportif (ex. : espace, sanitaires etc.), sur l’encadrement, l’accueil etc., c’est-à-dire qu’il s’inscrit dans une vision de qualité totale.
27Même si l’usager forme une attitude identique quelle que soit la nature du prestataire de services, la notion de qualité d’un service public n’est pas tout à fait de même construction que celle d’un produit ou service commun. En effet, en premier lieu, il s’agit de satisfaire des missions d’intérêt général définies démocratiquement, en considération d’une multiplicité d’acteurs aux intérêts pluriels, souvent divergents, voire contradictoires. En second lieu, la volonté d’offrir un service public au moindre coût mobilise l’ensemble des parties prenantes, c’est-à-dire les utilisateurs, le personnel des collectivités et les fournisseurs de biens et services.
28Selon les responsables de la communauté d’agglomération Caen la mer, ce n’est pas une nouveauté ; « les directions des services publics notamment territoriaux ont dû souvent restructurer leur organisation interne et travailler sur la démarche qualité en intégrant la logique de la relation client », précise le directeur général adjoint des services à la population.
1.3.2. Le client : le co-producteur d’un service de qualité
29Au-delà de leur notion d’intangibilité, les services présentent deux grands traits communs qui les opposent au marché des biens :
le client fait partie intégrante du système de servuction dont les deux principales particularités sont : la consommation et la production simultanées des services ; la coproduction entre le consommateur et le prestataire sachant que la délivrance du service requiert une participation plus ou moins grande du client qui fonde, en partie, le niveau de qualité intrinsèque du service ;
les relations et les interactions du personnel en contact avec le client, tant dans l’instant que dans la durée, sont d’une importance déterminante.
30La conséquence de ces deux traits caractéristiques est que la construction de l’offre de services met plus spécialement l’accent sur la qualité, tant au niveau de la conception que de la réalisation du service. Ce dernier point implique la mobilisation du personnel, sorte de pré-requis à une action externe efficiente. Tout nouvel acte vers le client est préalablement « vendu » à l’ensemble du personnel interne, en général, et au personnel en contact, en particulier.
31Jean-Michel Laudrin, chargé de l’aménagement et de l’environnement à la communauté d’agglomération Caen la mer, définit ainsi le défi qualité que la communauté d’agglomération de Caen doit relever : « le défi qualité est là ; il s’agit de fidéliser les clients publics par la qualité, la créativité et l’évolution des services conformément à leur demande tout en ne s’écartant pas de la finalité qui reste d’intérêt général ». En outre, l’intérêt porté aux relations puise son essence dans une réalité économique simple : les pressions concurrentielles ont conduit nombre d’organisations à privilégier des stratégies de rétention de la clientèle en valorisant leurs liens avec celle-ci.
32L’instauration d’une qualité totale dans la proposition d’un service public implique, en termes de relations, un engagement à long terme de la part de l’organisation et l’établissement d’une connaissance réciproque. Toutefois, la relation est fondamentalement asymétrique ; la responsabilité de la relation dépend exclusivement de la collectivité territoriale, prestataire de services.
33La satisfaction des usagers est donc le principal facteur explicatif de leur fidélité et de la performance à long terme de l’organisation.
2. Marketing et gestion du patrimoine sportif : une union singulière
34Comme le rappellent Noisette et Vallerugo (1996), le marketing a fait son entrée dans l’univers de l’Etat et des collectivités locales par le canal de la communication avec le public et les usagers, dès les années 1970. Appliqué au développement local, le marketing est alors une réponse, d’une part, au développement territorial soumis aux contraintes de la globalisation et, d’autre part, à la gestion en qualité d’outils offrant un apport de sang neuf dans la culture du management public.
35Les termes du contrat de mariage passé entre les collectivités territoriales et le marketing reposent sur une démystification du pouvoir uniquement utilitaire de la démarche commerciale, sur le développement de forces centripètes au service de la satisfaction du client, sur une prise de décision dans un contexte systémique.
2.1. Démystifier le pouvoir marketing
36L’aspect marchand du marketing a longtemps été « diabolisé » par le secteur public et plus particulièrement dans le milieu sportif. Sa lente pénétration dans le domaine sportif est liée à sa logique de développement dont les maîtres mots sont « cohérence » des actions menées et « intégration » harmonieuse des politiques suivies.
2.1.1. Quand public s’oppose à privé
37Le sens étymologique des termes public et privé suffit à cerner leur opposition : l’un est relatif à la collectivité, l’autre est propre à l’individu ou à la personne morale ; l’un se réfère à l’intérêt général, l’autre à l’intérêt particulier. En raison de ces finalités divergentes, les moyens mis en œuvre pour atteindre les objectifs de l’organisation concernée se sont longtemps différenciés.
38De plus, le mouvement sportif, initiateur du sport moderne, a laissé des traces mémorielles en termes de valeurs fondamentales défendues comme la gratuité, le bénévolat, la performance, le dépassement de soi, le respect des règles etc. Ce socle doctrinal a fait longtemps barrière aux techniques du secteur privé dans la crainte d’entacher le mythe d’une société égalitaire. Dans l’imaginaire de bon nombre d’entre nous, l’aspect démocratique du sport est entretenu par l’idée selon laquelle la concurrence ne sélectionne que les meilleurs qui sont légitimés par des arbitres neutres, par des règles universelles. La pensée sportive est alors porteuse de l’image d’une société idéale.
39Cependant, les enjeux sociologiques, commerciaux et politiques du sport ont contribué à l’interpénétration de la logique sportive et de la logique économique : la production sportive « pure » cohabite aujourd’hui avec la production commerciale. Comprendre le sport contemporain revient à appréhender les relations qui existent entre l’espace des producteurs sportifs dont les intérêts divergent (fédérations, services publics, organisateurs d’événements etc.) et l’espace des consommateurs de produits et services sportifs que sont les pratiquants mais aussi les spectateurs d’événements sportifs. Les échanges sportifs semblent régis par la généralisation d’une économie néo-libérale. Dès 1993, Bourhis (p. 115) soulignait que « le sport est un produit “obéissant” aux règles du marché ».
40L’hostilité du secteur public à l’égard du marketing réside principalement dans son caractère mercantile. Aussi le concept de rentabilité heurte-t-il a priori la culture sportive défendue par les services publics, concept semblant déplacé lorsqu’il s’agit d’intérêt général.
41Mais, comme le mentionne Elias (1987, p. 239) « [...] la vieille habitude d’employer les notions “individu” et “société” comme s’il s’agissait de deux objets existants séparément induit en erreur ». Il est possible de satisfaire le « je » sans ignorer le « nous ».
2.1.2. Quand non marchand rime avec marchand
42Force est de constater que le sport en France reste en partie financé par l’Etat et les collectivités locales, et géré par les pouvoirs publics et le mouvement sportif notamment grâce à des conventions d’objectifs fixés entre l’Etat et les fédérations. Toutefois, à l’instar des associations, la collectivité territoriale doit viser à rationaliser son activité comme le souligne Lebland M. (1992) : « se tourner vers l’entreprise pour y puiser méthodes et techniques constitue une démarche logique. Confrontée aux aléas du marché et contrainte de réussir sous peine de disparaître, l’entreprise ne peut-elle pas fournir quelques méthodes pour ces dirigeants associatifs (in extenso dirigeants territoriaux) soucieux d’une plus grande rentabilité, d’une performance accrue dans l’organisation de ressources ».
43Il est alors possible d’observer un isomorphisme entre la sphère marchande et la sphère non marchande au travers de leurs structures, de leur stratégie et au-delà de leur finalité. Le marketing ne doit pas être constitué comme une direction à part ; il devrait être intégré par les personnes qui travaillent sur les projets. En outre, il s’agit plus d’un ensemble de processus – attirer, retenir le client – et non d’une compétence.
44En conséquence, la gestion des équipements et services sportifs publics relève bien d’une démarche marketing dont la mission fondamentale est de satisfaire les besoins de populations diverses, dans une optique d’intérêt général. Cette affirmation est renforcée par le fait 1) que la collectivité territoriale peut faire d’autres choix d’investissement que le domaine sportif, 2) que l’utilisateur est face à plusieurs offres de services, 3) que la concurrence du secteur est forte, 4) que l’utilisateur est un client, c’est-à-dire non assujetti à la collectivité territoriale.
45De plus, la mutation de l’usager en client ravive les interrogations relatives aux pratiques tarifaires des services publics. Le prix du service payé par le client/usager doit-il recouvrer qu’une partie des coûts de fonctionnement, sachant que les collectivités sont subventionnées par l’Etat ? L’organisation non marchande gère ses ressources dans un objectif d’équilibre de ses comptes ; une recherche de rentabilité induisant la réalisation de bénéfices est-elle incompatible avec la notion d’intérêt général ?
2.1.3. Les leçons marketing à retenir
46A l’école de l’efficacité territoriale, il est possible de mettre en place un modèle alternatif fondé sur des principes démocratiques intégrant l’expression continue des citoyens et sur un travail de coproduction du service. Le développement de l’organisation non marchande se situe alors entre la stratégie marketing sociale et la stratégie marketing concurrentielle (Gouttebel, 2001). Dans cette optique, le marketing développé au sein des collectivités territoriales renferme les caractéristiques suivantes, à l’image des organisations privées :
Le marketing est un état d’esprit | * Il se place du point de vue du client/usager afin de satisfaire au mieux ses attentes. |
Le marketing est une démarche | * La connaissance du marché permet à l’organisation non marchande de cerner les besoins des utilisateurs, d’identifier les menaces concurrentielles et contextuelles, de positionner son avantage compétitif dans son environnement. |
47En conclusion, les collectivités territoriales adhèrent au marketing dans la mesure où c’est une discipline d’action. Leur offre résulte de la mise en place de services dont la cohérence est vérifiée tout au long du cycle de vie de ces derniers. A ceci s’ajoute un souci d’intégration harmonieuse des décisions prises en réponse à l’environnement et au sein même des services publics. Ainsi la convergence des actions vise-t-elle à optimiser l’efficacité globale de la collectivité territoriale en satisfaisant au mieux les besoins des utilisateurs. Pour les organisations privées, de telles allégations en termes de stratégie semblent des vérités surannées en raison de leur expérience. Il n’en est pas de même pour les services sportifs publics dont la culture et l’histoire sont empreintes d’une lourdeur administrative et où l’information est plus descendante qu’ascendante. C’est pourquoi le point de vue du client/usager/citoyen/contribuable doit devenir la base de la planification marketing, qui doit se confondre avec la politique globale de la collectivité territoriale.
2.2. Développer des énergies centripètes
48Avant d’exposer les forces à déployer pour réagir à l’évolution du marché du sport, il convient de rappeler le contexte concurrentiel dans lequel évoluent les collectivités territoriales.
2.2.1. L’univers concurrentiel du secteur sportif
49Lors des Etats généraux du sport (2002), un des thèmes de réflexion a été « le sport et les territoires » ; il s’agissait de projeter le rôle des collectivités dans le futur, au-delà de la gestion du quotidien (difficultés de financement, problèmes d’encadrement etc.). Mais avant d’esquisser des solutions possibles pour l’avenir, trois constats peuvent être faits : 70 % des Français se déclarent sportifs ; la diversification des pratiques liée à un effet de « butinage » sportif et à la désaffection des pratiquants à l’égard des clubs et des structures fédérales ; le phénomène de « différenciation » du sport car « massification » ne doit pas être assimilée à « démocratisation ». Ces réalités du secteur sportif s’inscrivent dans un univers concurrentiel où évoluent les communautés d’agglomération. Comment doivent-elles définir leur avantage concurrentiel distinctif pour préserver leur place sur le marché sportif ?
50A l’instar de Bayeux et Carles (1999), l’avantage compétitif durable à détenir par les organisations institutionnelles peut être défini comme découlant d’une stratégie basée sur des choix, des compromis afin de devenir délibérément différent. Le modèle de Porter (1982) adapté à l’objet sportif, dénommé modèle de la notion de rivalité élargie, servira de cadre conceptuel.
51La figure ci-dessus met en évidence les cinq forces auxquelles est confrontée une collectivité territoriale dans la détermination de son avantage compétitif durable :
l’intensité de la concurrence entre les collectivités tend à s’organiser notamment avec la création des communautés d’agglomération ; néanmoins, elle s’accentue avec la prise de conscience du rôle du sport dans les actifs (qualifiés de ressources dynamiques) constituant l’attractivité d’une collectivité ;
le pouvoir de négociation des clients/usagers est renforcé, d’une part, par leur prise de parole politique et, d’autre part, par leur expertise dans la comparaison des services proposés ;
le pouvoir de négociation du secteur associatif perdure avec pour argumentation principale son but non lucratif, son rôle de formation et d’éducation ;
la pression exercée par les pratiques de substitution, issues fréquemment de tribus sportives auto-organisées, s’amplifie ;
l’apparition de nouveaux entrants correspond aux créations d’organisations sportives privées.
52A l’issue de ces observations, la définition de l’avantage compétitif durable d’une communauté d’agglomération se résume ainsi : le sport accessible à tous. Les conséquences opérationnelles de ce choix stratégique sont de deux ordres : d’une part, une gestion communautaire des équipements et services sportifs visant le plein emploi des sites et, d’autre part, l’insertion du sport dans l’ensemble des activités culturelles en favorisant la polyvalence et la convivialité des équipements et de l’encadrement. Le positionnement spécifique de la collectivité territoriale résulte de l’analyse des attentes des utilisateurs (pratiquants autonomes et licenciés des clubs) révélant des divergences et une certaine instabilité causée par un nomadisme sportif.
2.2.2. Une collecte d’information plurielle…
53Enquêtes de satisfaction, études de motivation, opérations de marketing direct etc. sont autant d’outils marketing permettant d’ériger la collectivité territoriale au rang des compétiteurs en lice sur le marché des services sportifs. La constitution de banques de données et d’indicateurs permanents participent de la connaissance instantanée et globale du patrimoine sportif, des fréquentations. Il s’agit d’exploiter les informations en amont de la décision mais aussi en aval de l’action pour être réactif à tout changement de l’environnement et limiter la marge d’erreur.
54Pourtant, si la collecte d’information est à la base de toute décision en matière de répartition des investissements et de choix d’actions, elle reste un outil à manier avec précaution comme le rappellent Knobé et Schorlé (2002). En effet, hormis l’enregistrement informatisé et incontestable des entrées dans les équipements structurants comme les piscines ou les patinoires, l’écoute des attentes des dirigeants d’association peut comporter des distorsions ; ces derniers expriment parfois des besoins non effectifs afin de préserver leurs acquis en termes d’accessibilité aux équipements. Danièle Hue, responsable du stade nautique à Caen, a été confrontée à cette situation : « les clubs veulent conserver des créneaux horaires et des lignes d’eau à des heures et jours précis. Or, la question de l’accessibilité et de l’ouverture de la piscine en continu est importante pour satisfaire les salariés par exemple. Un partage doit être envisagé car les nageurs licenciés n’occupent pas tout l’espace ». De plus, pour la pratique de sports dits « alternatifs » comme le skate par exemple, il convient de s’interroger. Des communes comme Honfleur ont créé des espaces pour accueillir ces sportifs mais le poids de l’investissement s’est révélé démesuré comparé à l’exploitation du site.
55Malgré ces limites, la détection des diverses attentes des utilisateurs en termes de niveau de qualité attendu pour les équipements et les services sportifs demeure le ciment de la mise en place d’une stratégie marketing différenciée. Pour Tribou et Augé (2003), il s’agit moins de renoncer à une éthique que de se donner les moyens de la mettre en œuvre.
2.2.3. Pour consolider une offre différenciée
56L’union singulière du marketing et des services sportifs publics présuppose le déploiement d’énergies centripètes pour l’élaboration d’une offre publique de qualité. Il s’agit d’élargir la palette de services proposés par la communauté d’agglomération tout en gardant comme fil directeur son positionnement spécifique, le sport accessible à tous.
57Si la démarche technique globale marketing s’impose à toute forme d’organisation, elle n’exclut pas une pratique locale, sachant que, comme l’écrit Gouttebel (2001, p. 91), « le local apparaît comme le refus d’un système unique et centralisé et comme une recherche de taille humaine et de proximité ».
58Les stages sportifs proposés aux jeunes de l’agglomération caennaise (ex. : Raid Aventure ; stages pour la pratique de sports « alternatifs » etc.) illustrent cette adaptation de l’offre sportive publique à la demande locale. De nombreux cours de diverses disciplines sont également élaborés et dispensés en fonction des caractéristiques des pratiquants ; la segmentation de la population sportive repose sur des critères tels que la nature de la pratique, l’âge, les contraintes professionnelles. En outre, l’accueil d’événements culturels, comme un concert, une pièce de théâtre, est envisageable dans les équipements sportifs de l’agglomération de Caen (ex. : patinoire de Caen).
59Œuvrer pour rendre plus performante l’intervention des structures intercommunales dans le domaine sportif implique certes une relation de proximité avec les clients/usagers mais également un échange continu avec les instances sportives. Par ailleurs, la cohérence de la politique sportive développée s’inscrit dans un cadre systémique.
2.3. Décider dans un contexte systémique
60Dans le cas de la communauté d’agglomération, l’intérêt général n’est pas la somme des intérêts particuliers et le droit public pose l’égalité de tous devant le service public comme principe fondamental (Le Duff et Papillon, 1988). Mais, l’application de ces deux postulats n’est pas chose aisée ; la mise en œuvre de la démarche marketing devrait, en conséquence, conduire à une plus grande satisfaction des différents acteurs. Il s’agit pour les gestionnaires de composer avec leurs divers interlocuteurs et de gérer au mieux les forces contraires qui animent les rouages du système.
2.3.1. La conjugaison du marketing territorial et du marketing électoral
61Si la légitimité du marketing au sein du service public des sports semble indéniable, elle s’insère dans une optique de choix politiques exploitant le sport comme un atout concurrentiel et attractif d’un territoire (Pichot, 1999 ; Mechin, 2001 ; Knobé et Schorlé, 2002). Le sport est alors utilisé comme un outil de promotion et de communication permettant aux collectivités territoriales d’améliorer leur image et/ou d’accroître leur notoriété. Malric (1999) n’hésite pas, à ce propos, à comparer le sport dans les collectivités territoriales à un produit d’appel, composante principale de leur potentiel d’attractivité.
62Mais, qui satisfait-on sur le spectre allant du citoyen/électeur au client ? Les décisions politiques relatives au sport, au sein des collectivités territoriales, semblent répondre à deux impératifs : satisfaire le client/usager des services publics locaux et pour les élus se rapprocher des citoyens entre deux consultations électorales. Il convient de souligner que le devoir de services des collectivités est une contrepartie d’un vote, d’une contribution au financement de leurs dépenses de fonctionnement via les impôts. La priorité retenue par les décideurs élus est irrémédiablement conditionnée par des intérêts politiques sous couvert de l’intérêt général. Chaque choix politique s’inscrit dans un plan stratégique qui conduit la collectivité territoriale (et ses représentants) à se positionner, sachant que le positionnement est contraint par les potentialités du territoire et l’état de la concurrence (Gottebel, 2001).
63Aussi peut-on considérer la présence d’interférences entre le marketing territorial, dont l’objectif premier est d’assurer le développement d’une zone géographique en satisfaisant au mieux les habitants et ses acteurs économiques, et le marketing électoral, dont la préoccupation majeure est de retenir un corps électoral en réalisant un programme donné.
64La gestion efficace des équipements et services sportifs renferme donc indéniablement une dimension politique qui contribue au dynamisme régional tant social, qu’économique (Mechin, 2001) et au maintien d’un électorat.
2.3.2. L’exercice de forces contraires dans la gestion communautaire des services sportifs publics
65Pour la communauté d’agglomération, il ne s’agit pas d’être une sorte de guichet de subventions aux communes, mais au contraire de jouer un véritable rôle dans la construction des équipements, dans l’élaboration de schémas directeurs sportifs ; il s’agit d’actions directes.
66Néanmoins, les structures actuelles (structure pyramidale) d’organisation tendent par leur nature à freiner la mobilisation et la responsabilisation des moyens humains (Noisette et Vallerugo, 1996). La dilution des responsabilités est sans aucun doute une des raisons de la perte d’efficacité des moyens mis en place. De plus, outre la réticence naturelle de toute direction à partager le pouvoir, la technicité des problèmes, la nécessaire professionnalisation des actions et le grand nombre d’usagers font obstacle au bon fonctionnement de la structure où s’opposent des forces contraires :
intérêt électoral des élus dont les promesses doivent se concrétiser par des résultats aux yeux des citoyens. L’élaboration des politiques (au sens premier du terme) et la mise en œuvre des stratégies pour atteindre les objectifs affichés lors des campagnes électorales sont des arguments pour obtenir l’adhésion du plus grand nombre et donc diriger. Il faut assurer la continuité entre le « dire » et le « faire » ;
obligation de rationalité pour les gestionnaires de la collectivité qui agissent dans un carcan de contraintes. L’action des agents des collectivités territoriales ne s’inscrit pas dans un contexte de persuasion et de séduction comme l’est celui du discours politique. Il s’agit pour eux d’assurer le fonctionnement d’une organisation compte tenu des pressions environnementales et des ressources internes. Leurs décisions peuvent donc être parfois en opposition avec les choix politiques car elles s’exercent dans un espace ouvert ou la marge de liberté d’action est réduite. Pourtant ces gestionnaires des collectivités doivent rendre des comptes aux élus qui cherchent à conforter leur légitimité institutionnelle ;
attentes d’une prestation maximale au moindre coût de la part des clients/usagers des équipements et services sportifs. Par ailleurs, les usagers/citoyens partagent l’idée selon laquelle le sport appartient à la culture collective et que c’est un droit pour tous. De plus, le client du service public sportif attend le même niveau de qualité que celui offert par les organisations privées mais à un prix compétitif. Toute la difficulté de gestion pour la collectivité territoriale réside dans l’élaboration d’une offre concurrentielle ignorant les inégalités sociales et traduisant le choix d’un positionnement spécifique.
2.3.3. Vers une gestion optimale des équipements et services sportifs
67La finalité d’une collectivité territoriale est de répondre à sa mission de service public, c’est-à-dire pour le plus grand nombre, sans pour autant oublier la gestion de son budget. De plus, une collectivité qui réduit ses déficits, tout en accroissant la qualité de ses prestations, agit également du côté des entreprises intéressées par la stabilité, voire la réduction de la pression fiscale et par la palette de services offerts. L’ensemble constitue un système et chaque action de l’un des acteurs entraîne des effets positifs ressentis par tous.
Conclusion
68L’intérêt des Bas-Normands pour le sport est bien présent. Il est reflété dans le discours des politiques de la région comme le Président du Conseil Régional, René Garrec : « la région doit se concentrer sur deux grands domaines de compétences nouvelles qui sont liés à l’amélioration de la croissance économique et au renforcement de son image [...]. L’image de la région, qui est l’élément capital pour son attractivité et son développement, doit se renforcer à travers le sport et la culture ».
69Aussi la création de la communauté d’agglomération offre-t-elle une opportunité intéressante de développement en matière sportive : optimisation des coûts, utilisation maximale des équipements structurants, lancement de projets d’envergure en réponse aux attentes du marché. L’adoption de la démarche marketing par la collectivité territoriale ne remet pas en cause le périmètre des services sportifs publics. En effet, le débat n’est pas idéologique mais porte essentiellement sur l’efficacité des services. En d’autres termes, le choix politique en matière sportive doit utiliser les instruments de l’organisation privée pour réaliser les objectifs au regard desquels ils possèdent l’efficacité relative maximale. Le retour à l’équilibre budgétaire résultant de la pleine satisfaction des clients/usagers devient la priorité des services publics. L’obligation de performance et donc de résultats s’impose aux collectivités territoriales. En conséquence, il faut arrêter d’opposer secteur public et secteur marchand, même si, en considération de leur finalité différente, le mariage des collectivités territoriales et du marketing reste d’exception. En ce qui concerne les services publics sportifs, leur gestion marketing se situe à des degrés divers sur un continuum ayant pour extrêmes l’empirisme marketing et le savoir-faire maîtrisé en passant par une phase d’apprentissage. Les faits et intérêts contradictoires gérés par un service public sportif ne défient pas la logique ; seule la pression de chacun d’eux est atténuée par une recherche de vision partagée de la qualité comme tente de le démontrer la nouvelle communauté d’agglomération Caen la mer.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Personnes interrogées : Luc Duncombe, président de la communauté d’agglomération ; Marc Bourhis, directeur général adjoint chargé des services à la population ; Jean-Michel Laudrin, directeur général adjoint chargé de l’aménagement et de l’environnement ; Nicolas Desréac, coordonnateur des services des sports à la communauté d’agglomération ; Danièle Hue, responsable du stade nautique.
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