Préface
p. 9
Texte intégral
1Cette étude arrive à son heure. Triste constat, les églises de France ont souvent porte close et la collectivité s’interroge sur leur devenir : reconvertir ou démolir ? Telle est la question en ce début de XXIe siècle ! La région Nord/Pas-de-Calais peut faire figure d’exception dans le paysage national avec la récente rénovation du chœur de l’église Saint-Jean-Baptiste de Bourbourg commandée à Anthony Caro. Mais cette opération est l’arbre qui cache la forêt.
2La mise en valeur du patrimoine religieux passe aussi par la reconquête d’une histoire, la connaissance de ses acteurs. C’est le sens du travail de Catherine Guillot consacré au peintre Bruno Chérier (1817-1880), un des artistes septentrionaux les plus emblématiques du renouveau de l’art religieux dans la région. Entre 1850 et 1880, c’est lui qui reçoit le plus grand nombre de commandes de peintures religieuses monumentales dans l’actuelle métropole lilloise, œuvres aujourd’hui peu accessibles car marouflées dans des églises souvent fermées au public.
3Certes la notoriété de Bruno Chérier, élève de l’École des beaux-arts de Valenciennes puis de l’École des beaux-arts de Paris et candidat malheureux au Prix de Rome, a surtout jusqu’ici tenu à son amitié avec le sculpteur valenciennois Jean-Baptiste Carpeaux dont il fut le correspondant le plus fidèle et le modèle occasionnel. Sa carrière, plus modeste, se déroule entre Lille et Tourcoing où il est nommé professeur de dessin en 1852. Sa production est révélatrice du goût des commanditaires catholiques lillois pour une peinture extrêmement lisible, scrupuleuse, axée sur la ligne et la monumentalité décorative, s’intégrant parfaitement à l’architecture. L’étude de ses décors permet de mettre en lumière tout un milieu artistique méconnu, composé d’architectes, de peintres verriers, d’ébénistes, et d’enrichir ainsi la connaissance de l’art septentrional au XIXe siècle entreprise dans le cadre du centre de recherches IRHiS à l’université de Lille 3.
4Dès 1981, Bruno Foucart, président depuis 2006 du Comité du patrimoine cultuel, constatait que la peinture religieuse du XIXe siècle avait subi une vague de purification par disparition. L’œuvre de Chérier n’a pas échappé à ce désamour : peintures presque entièrement murées à Saint-Christophe de Tourcoing, introuvables à Saint-Martin d’Esquermes, endommagées à Notre-Dame-des-Anges de Tourcoing. L’ensemble le mieux conservé se trouve dans l’église Notre-Dame-de-Grâce à Loos.
5Là se situe le grand mérite de Catherine Guillot qui, dans le cadre d’un master à l’université de Lille 3 et de ses fonctions à l’Inventaire au sein de la DRAC puis de la Région Nord/Pas-de-Calais, a mené à bien cette étude. Elle suscite un nouveau regard sur ces œuvres oubliées et joue un rôle dans la prise de conscience de leur valeur, aboutissant à leur prochaine restauration par les municipalités de Tourcoing à Notre-Dame-des-Anges et de Lille à Notre-Dame de Fives. Cette dernière nous a d’ailleurs apporté son soutien pour la publication de ce volume.
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