L’« Urbi et orbi salus » des médecins d’Ancien Régime : de l’affirmation des territoires professionnels à l’invention d’un espace de santé publique

1L’organisation corporative des professions de santé a très tôt contribué à définir des territoires professionnels : des ressorts à l’intérieur desquels les différentes communautés de médecins, de chirurgiens ou d’apothicaires se réservaient le droit exclusif de pratiquer l’art de guérir1. À la définition géographique des lieux dans lesquels s’exerçait le monopole des professions de santé s’est bien vite superposée une délimitation matérielle des actes que chaque communauté professionnelle était en droit de pratiquer. Luttant âprement pour conserver une place première dans l’ordonnancement complexe des professions de santé, les médecins ont cantonné chirurgiens et apothicaires dans l’exercice d’un nombre d’actes de soins restreint, tandis qu’ils se réservaient le monopole d’une notion dépassant largement la médecine : la santé. La revendication d’un monopole en matière de santé leur a permis non seulement de s’arroger le droit exclusif de pratiquer les actes relevant de la méde