Mythes et traditions de Maré
|Chapitre X. Node ri Kurub(u). L’arrivee du Kaze si Xacace ; si Hnathege ; Acakaze
Texte intégral
1Maré a subi une invasion, venant de Lifou, qui aboutit à une véritable colonisation. Elle a étendu son influence principalement sur l’Ouest de Maré. Mais ce mouvement de population fut précédé et accompagné d’un autre mouvement de population venu de la Grande Terre de Nouvelle-Calédonie. Emiliano Kaine serei Xega dit que les Eletok faisant le tour de Maré, de l’Est vers l’Ouest jusqu’à Wo rencontrèrent des nouveaux venus qui les vainquirent.
2Kuanene chef des serei Wo précise que ces nouveaux venus s’établirent dans l’intérieur, en maré kurub(u). Puis ils revinrent vers le bord de mer déposséder les anciens maîtres. Ce titre de “gens de l’intérieur” Node ri Kurub(u) est devenu un nom de tribu qui s’installa aux environs de Rawa. Je compte parmi eux les si Hnacu(e) qui, partant de Rawa, s’installèrent plus tard à Tuo, donnant à leur nouveau village le om du pays d’où ils venaient. Les Node ri Kurub(u) proprement dit s’installèrent près de la lisière orientale de la forêt de Rawa dans le Kurub(u) Thuahmijoc. Ce mouvement de population précéda, accompagna et suivit l’arrivée de la grande magie révolutionnaire, le kaze, brassant et déplaçant les clans, jusqu’à préparer les chefferies actuelles de l’île.
I - LES NODE RI KURUB(U)
3(a) Les si Thuahmijoc. (Sinewami) : On parle pour la première fois des Node ri Kurub(u) lorsqu’ils venaient d’arriver à Maré. Tout le monde les poursuivait pour les tuer (cela rejoint le témoignage du frère François de l’Ile des Pins parlant de l’arrivée des si Hnacu(e) qui se cachèrent dans l’intérieur, fuyant la sauvagerie des autochtones, habitants du littoral, avant d’aller à Tuo). Les si Tahnaden, sur l’origine desquels J. Sinewami ne dit rien, dissimulèrent les fugitifs dans la dépression nommée plus tard Thebe i Wae, près du village moderne “Lalimite”. Nouveaux venus et si Tahnaden se rendirent ensemble à Kurub(u) Thuahmijoc, ainsi nommé pour éloigner les importuns. Thua hmijoc = “éloignez-vous parce que c’est tabou” (St. Waikedr). Cet endroit est situé dans la forêt ou la grande brousse à l’Ouest de Rawa, et en est suffisamment près “pour pouvoir entendre les coqs de Rawa” (A. Manane). Il y avait là un trou d’eau douce où l’on pouvait puiser et se laver. Il était nommé Titez ou en maré Pa-kua (= “la grande boisson”).
4Les si Thuahmijoc eurent un chef Kaua ou Kauwa suffisamment illustre pour que son nom serve encore maintenant d’exclamation d’admiration. C’est un nom porté par des chefs des Nénéma de Poum, au Nord de la Nouvelle-Calédonie (Kauwa-ne est passé chez les serei Wakuarori, les si Pula, les si Ruemec). On trouve également chez les sujets si Thuahmijoc le nom de Pime qui est celui du grand clan Pime répandu sur la côte Est de Nouvelle-Calédonie (cf. Guiart (86), p. 30, 51, 55, 62, 75, 131, 132).
5Le nom dynastique de leurs chefs est devenu Yeiwene, de iei - wene = “feu - cyclone”, pour montrer leur puissance. Cela n’est pas sans rappeler la tradition des Xetiwān Dromau de Tingting, aînés des Xetiwān de Wetr, maîtres du soleil et de la pluie, venant symboliquement du bois nommé potr (Fagraea Schlechteri, en maré pujapuja), qui brûle avec la flamme la plus brillante (On le nomme dans le parler local “bois de pétrole”). On les dit venir de Mè :k (en maré Māk(o), la Grande Terre) (Guiart (86), p. 367).
6(Cl. Waia si Terol si Tahnaden, St. Wakete si Thuahmijoc serei Taeru) : Les si Thuahmijoc avaient un grand tacaere à deux portes. Les si Thuahmijoc sont sortis d’un côté et les si Tahnaden de l’autre et sont partis chacun de leur côté. On fait venir le mot Tahnaden de daden = “l’autre côté”. Tahnaden se trouve entre Tuo et Ponewamir, à l’Ouest de Thuahmijoc. Nous retrouvons ces si Tahnaden à Rawa avec les si Terol.
7Sont issues de Thuahmijoc plusieurs chefferies qui dominèrent l’ouest maréen : les serei Wakuarori, les serei Wo, les serei Gowi, dont les noms dynastiques de leurs chefs sont pour tous les trois Yeiwene Kicine, puis Yeiwene qui reçut la chefferie des serei Guam, et Cocokat si Tadeng. (St. Waikedr) : tous ces départs eurent lieu avant la chefferie de Yeiwene Gubane si Thuahmijoc qui commence la généalogie de la chefferie Node ri Kurub(u) de Tadin(u) dans le cahier du chef César Waikedr. Il habitait encore Thuahmijoc. Son fils Yoyeine s’installa à Hnala, d’où le nom de serei Hnala donné aux aînés de ses descendants. Il avait des si Tapep(a) comme aca-nia. Il s’empara du territoire des si Pula et se soumit les Eletok du plateau, si Waercoc, si Urawa, si Re, si Hnezi, si Xeru(e), si Muse, si Kaxexe, si Thedra. Son fils Matrun fut tué et mangé par ses sujets à Latawoc. Lui succèda non pas les enfants de la première femme cuada, les serei Hnala, mais un fils de femme de second rang cuadir, Waikedr, souche des serei Waikuri. Il vengea la mort de son père Matrūn, tua ses sujets révoltés, à Gurehmu, ne gardant qu’un seul individu de chacun de leurs clans pour en perpétuer le nom (il s’agit du massacre des Eletok).C’est à ce moment qu’il faut placer la fuite des si Urawa à Wakone et celle des si Pula dont certains allèrent jusqu’à Penelo. Les si Thuahmijoc et leurs nouveaux aca-nia si Turepaw(a) (chef Lakoreden) se donnèrent comme maître du sol = aca-rawa.
8Mala, fils de Waikedr, mourut assez jeune et ne fut pas doku hmaiai. Yeiwene, fils de Mala serei Waikuri, fut élevé par un oncle, Guacar(i) serei Hnala. Il habita quelque temps à Rawa puis à Rueman. Vers l’époque de l’évangélisation, autour de 1863, il fit revenir une partie des si Pula chez eux. Il eut pour fils Waikedr César, l’auteur du cahier, père de Yeiwene Waikedr et de Stéphane Waikedr encore vivant en 1969.
9On ne sait pas grand chose des clans eletok cités dans le cahier du chef César. Ils habitaient tous dans la région de Gurehm(u). A Lifou (cf. Guiart (86), p. 447-448), Ulawa est le nom d’un homme venu d’Ounya (Sud-Est de la Grande Terre) et de son habitat. Lui et ses enfants sont des gens grands, beaux et blonds. Il est à l’origine de la chefferie Haudra de Luecila, classée malgré son adoption comme Anga Haetra (Guiart (86), p. 369). Ulawa est un nom de lieu dans les Iles Salomon.
10Waeroc désigne un jeu d’enfant. Le lieu dit Waeroc est dans la forêt à 500 m de la lisière du côté du Hnahnerec, sur le côté méridional de la route actuelle, au Nord de Turepaw(a). On trouve chez les si Waeroc le nom de Piijo, nom originaire de la région de Pouébo, dans le Nord-Est de la Nouvelle Calédonie. Les si Waeroc étaient des spécialistes de la pêche aux “maquereaux” wa-kakaw, à Loi. Drohnune Waekosone, moeteshet des si Waeroc, leur fait signe de venir, ci areone lo. Ils approchent. Drohnune plante une branche de neco (Elattostachys apetala, Sapindacées) afin de garder le plus longtemps possible les maquereaux à ce rivage. Si Waeroc et si Urawa étaient “apparentés” = guhnameneng.
11Les si Thuahmijoc comprennent maintenant les sous-clans suivants : les serei Waikuri sous-clan du chef (Stéphane Waikedr), les serei Hnala (famille de Waitreruane), les serei Wadid(i), les serei Taeru (famille Pime à La Roche) et les si Tahnaden (dispersés un peu partout, à Menaku, Hnaenedr, et La Roche). Ils ont pour sujets : les si Waeroc (famille de Hmaengone), les si Hnezi, les si Xeru(e) (famille de Mania), les si Re (famille d’Onae), les si Wahmu (famille de Wawesi), les si Muse, les si Turepaw(a) (aca-nia doku, famille de Thakala fils de Lakoreden), les si Tapep(a) (aca-nia kogo), les Kaxexe, les si Thedra (famille de Guyet(i) Thedra), les si Hnabung(u) (famille de Waloka), les si Aulac et les si Urawa.
12(b) Les serei Wakuarori ont formé le village de ce nom (cf. Géographie…, p. 335-336). Selon St. Waikedr, leur chef Yeiwene Kicine fut tué et mangé par les si Hnathege à Hna-ca-dok(u) (= “là où on a fait cuire le chef”) (Géographie…, p.315) sur le plateau avant de descendre sur Nece (les serei Wo y eurent un tacaere). Ils mirent à leur place les serei Wo qui leur étaient apparenté par des mariages.
13Les chefs actuels des serei Wakuarori, les serei Gowi, seraient eux aussi issus de Thuahmijoc (St. Waikedr, A. Manane). Selon A. Manane, Yeiwene Kicine serei Gowi aurait aidé Comekumo Acakaze si Tadrere dans la guerre contre les si Hnathege (massacre desEletok). Après la guerre, les Acakaze offrirent le présent puec à son fils et successeur Niabot. La nouvelle chefferie des si Guama dont les serei Gowi étaient les sujets, mais non encore les Acakaze, prit cette offrande pour un geste de rébellion à son égard. (Guiart (86), p. 311-312).
14Les serei Wakuarori ont laissé le souvenir d’une grande chefferie anéantie par les si Hnathege.
15(c) Les serei Wo portent le nom du rivage de Wo correspondant à Menaku. Pendant leur séjour dans le Nord, ils ont dû entrer en contact avec les si Hnathege. C’est une des raisons pour lesquelles certains en font un sous-clan des si Hnathege (A. Alan) ; Trele en faisait de vrais si Hnathege toujours en contact avec eux. Mais pour St. Waikedr, ils sont issus de Thuahmijoc, furent vaincus par les si Hnathege et devinrent leurs sujets, puis se sont intermariés. Après le meurtre de Yeiwene Kicine serei Wakuarori, les si Hnathege placèrent ceux-ci à sa place. (A. Manane) : Le lieu-dit Wo se trouve dans la région de la léproserie de Betcéda à l’Ouest de l’ancienne léproserie.
16(J. Sinewami, Kaeawi, Awanedr, B. Wanono) : Les serei Wo voulurent “se grandir” en prenant un aca-nia chez les si Ruemec. On leur fournit Waraw(i) serei Cū qui devint si Pure. Ils massacrèrent les Eletok de l’Ouest, en particulier les si Waek(o) qui de Waek(o) (région de Betcéda) s’enfuirent à La Roche même. Le chant Kacahm(i) ne Sipane envoyant une pique aux si Guama, nomme : Sipa ne Lakom o reyete doku, Yeiwene Kicine o re yete doku = “Sipa et Lakom les chefs de toujours, Yeiwene Kicine chef de toujours”. Il s’agit des serei Wo. Ce chant les présente comme le refuge des si Waek(o) qu’ils massacrèrent et expulsèrent en prenant leur territoire. Mais quand les serei Wo entrèrent en compétition avec les si Ruemec pour la domination sur l’ensemble de Maré, l’aca-nia Waraw(i) les trahit. Yeiwene Kicine fut tué par les si Ruemec à Taguadec, et Waraw(i) proclama Yeiwene doku.
17Depuis les serei Wo vivent dans l’orbite des si Guama gardant la nostalgie de leur ancienne chefferie. On les console en leur laissant la régence de la grande chefferie de Guama le cas échéant, et la petite chefferie du village de Nece (cf. Guiart (86), p. 310, 313-314, 316-317) (Géographie…, p. 315-317).
18Leur étonnement fut grand lors des jeux du Pacifique Sud, en entendant le nom du champion fdjien Tuno. C’est celui de la fille de Kuanene Kicine, l’actuel petit-chef de Nece.
19(d) (O. Reilly (151), Guiart (86), p. 321) : Yeiwene et Cocokat (voir à serei Guam). Dans le récit que le chef Henri Naisseline donne de sa famille, Yeiw vient de Thuahmijoc saluer le chef Wahnara serei Guam à Guam(a). Wahnara est d’accord avec Waraw(i) chef des serviteurs pour lui donner la chefferie parce qu’il est beau garçon et propre, car il se lavait au trou de Titez. Yeiw vient donc s’installer à Degen, auprès des si Non serei Degen et serei Cawe. Sans eau, Yeiw tombe malade. Ils partent tous s’installer au bord de mer, Yeiw et les si Non à Nece, Waraw(i) à Lo. Ils organisent la nouvelle chefferie. A la suite du départ de Yeiw, tout le monde quitte Thuahmijoc.
1 Hnate te re kaz = Hna cede re kaz
2 Nengone
3 Purem
4 Wabao
5 Niri
6 Cacag(o)
7 La Roche Puan et Tagi
8 Waba-xeru(e)
9 Ceni
10 Wakuarori
11 Hnacadoku
12 Cara
13 Ruecil
14 Pakad(a)
15 Pawaroi
16 Padewia
17 Gurewoe
18 Padaw(a) de Guama
19 Padaw(a) de Medu
20 Adong(o)
20Bien des choses clochent dans ce récit. Yeiw n’était pas le chef des si Thuahmijoc, mais membre d’une branche cadette. Il avait la peau claire par sa mère (St. Waikedr). Les serei Wakuarori et les serei Wo avaient déjà quitté Thuahmijoc à ce moment. Mais surtout (Awanedr, B. Wanono) Waraw(i) n’était pas l’aca-nia de Wahnara, mais puja i Guam c’est-à-dire de mère zine i Guam, ce que dit A. Manane.
21A. Alan donne un récit concernant l’origine des si Tae et des si Tadeng. Voici ce qu’il dit pour ces derniers : Yeiwene et Cocokat allèrent de Thuahmijoc se baigner à Asicen(i). En cours de route Yeiwene marchait le premier, suivi de Cocokat. Celui-ci marcha sur une “merde”. Yeiwene lui dit : “Bo hna weze o re hna ko bot = tu as marché sur ce qui est sorti”. C’était un langage symbolique. Ils se baignèrent, puis Cocokat honteux ne rentra pas à Thuahmijoc, mais s’installa à Wakuarori, d’où les si Hnathege le chassèrent. Il alla avec les si Tadeng à Peu qui n’était plus occupé par les si Terol. Ceux-ci étaient à Rawa avec les si Tahnaden auprès des si Rawa. Puis ils s’établirent à Tacebeu, près de Peyec.
22A Manane comptait environ 12 générations entre la cession de la chefferie de Wahnara à Yeiwene jusqu’à maintenant. Lues en 1866 comptait d’une manière analogue. Paul Yake, neveu de Hnaisilin Nidoish(i) sans le dire positivement, donne plusieurs longues généalogies, et les lieux de sépulture des derniers chefs. Cette discussion sera reprise dans la thèse sur les chefferies de Maré.
23Le noyau de la chefferie de Yeiwene doku fut constitué par les si Guahma, ses descendants qu’on appela Abuni Yeiw, les serei Guam, et leurs sujets serei Wacebeu, serei Tadeng, les si Pure (aca-nia) et leurs sujets les si Hnacu(e), les serei Wakuarori, et les serei Wo et leurs sujets. Vers 1843 les si Waek(o) à Ro commencent à être conquis. En 1861 les Acakaze si Lehmi si Roi, puis plus tard les si Tadrere se donnent à la chefferie de Guama. Vers 1863, au moment de la christianisation, Node ri Kurub(u), si Pula, si Hmed deviennent sujets de Nidoish(i). En 1913, l’Administration française enlève à la chefferie de Nece les districts de Wabao (si Hmed) et de Tadin(u) (Node ri kurub(u) et si Pula).
2 - LES MYTHES CONCERNANT LE KAZE, LES SI XACACE ET LES SI HNATHEGE
DOCUMENT 85. SI XACACE I
24Récit donné par Drawine si Lehmi, fils de Watu, diacre de Menaku. Texte d’Henri Siwoine.
251/ Si Xacace buic Eletok koda, ci hne i Rawa. Buic ci aca-rawa ne nidi aca-ac. Ka osoten ci ikuja ne buic, wen o re aca-ac ne aca-rawa.
262/ Ka si Xacace ci nana ti o re cenge-ni ni buic. Ka buic ci ie ko : “Eje ha co hu(e)”. Ka buic ci ice lu i Ku-re-Thoon, ka ci kuru but i Heo.
273/ Buic ci hne omelei acala ko re ran. Ka buic ci yewe yawe jew o re hna-meneng ni buic.
284/ Ka o re maicahman ci etha hu(e) co cengo nod. Ka buic hna pina i Driphu. G ule o re nod, ka buic hna dakori o re re-kani buic si Xacace, jew o Gaica.
295/ Ka buic hna hu(e) wenei Gaica ca pina i Kumo. Ka buic ci ule ko deko ma nod ni buic.
306/ Ka buic ci hne i Hnareuedr (ka pene driphu : Ahmelewedr), acenon o Mu. Ka buic ci hne omelei, ha iwe ko re ezien.
317/ Ka buic hue yawe ; ka buic ci etanon o re nod. Ka buic ci hue yawe jew o Nengone.
328/ Ka buic ci thalo i Enew, acenon o Cara ; ka buic ci ice lo ri nod, yelen Nengone, yelen o re tit(i). Ka o re si Xacace ci hu(e) ca pina i Puan.
339/ O re gulanod ileoden wenei Cara ca pina i Tagi hna ato-yelene ko : Aca-kaze, tane ti o re ta kaze ni buic si Xacace.
3410/ Ka buic ci hu(e) ca pina i Niri. Ka buic ci itrani o kaze.
3511/ Weliehme si Taxeru(e) si Hnashud(u) bone ci meneng i Rawa, aca-nia ni si Guama. Bone ci hu(ej co ule buic i Niri, ka buic hna thue bon o kaze.
3612/ Se ineko Waumebon si Cohmu, aca-nia ni si Thatha. Bone ci hu(e) co ule buic i Niri, ka buic hna thue bon o kaze.
3713/ Ka o re si Xacace ci yewe yawe jew o Puan. Ka si Xacace ci ekon ne Siazengo si Hnathege. Ri ezien omelei deko hna ceini kei Tit(i). Athua.
381/ Les si Xacace eux sont des Eletok autrefois, ils restent à Rawa. Ils sont propriétaires de terrains, et propriétaires des choses (c.-à-d. ils sont riches en terre et en monnaies)
392/ Et les si Xacace sont honteux de leurs richesses. Et ils disent : “Nous allons partir”. Et ils descendent à Kurethoon, et ils sortent à Heo.
403/ Ils restent là de nombreux jours. Et ils retournent encore vers leur demeure.
414/ Et les jeunes gens allèrent isolément pour chercher du pays (= allèrent en exploration), et ils arrivèrent à Lifou. Ils regardent le pays et ont cherché leurs compagnons si Xacace, (pour aller) vers Gaica.
425/ Et ils sont partis de Gaica jusqu’à Kumo. Et ils voient que ce n’est pas leur pays.
436/ Et ils demeurent à Hnareuedr (et en lifou : Ahmelewedr), à côté de Mu. Et ils restent là-bas, c’est un temps long.
447/ Et eux partent de nouveau ; ils visitent du pays. Et ils retournent à Maré.
458/ Et ils débarquent à Enew, à côté de Cara ; et ils montent dans le pays, nommé Nengone, c’est le nom de la roche. Et les si Xacace vont jusqu’à Puan.
469/ Toute la région depuis Cara jusqu’à Tagi a été appelée : Aca-kaze (= propriétaires de dieux kaze) à cause des kaze des si Xacace.
4710/ Et ils vont jusqu’à Niri. Et ils lient (= fabriquent) des kaze.
4811/ Weliehme si Taxeru(e) si Hnashud(u) il habite Rawa, est aca-nia des si Guama. Il va les voir à Niri, et ils lui donne un kaze.
4912/ Il en est de même pour Waumebon si Cohmu, aca-nia des si Thatha. Il va les voir à Niri, et ils lui donnent un kaze.
5013/ Et le si Xacace revint à Puan (dans le récit de Drawine il n’y a plus qu’un seul individu). Et le si Xacace s’est marié avec Siazengo si Hnathege. En ce temps là La Roche n’avait pas (encore) été construite. Fini.
Commentaire
51Les migrations des si Xacace constituent un chapitre important de l’histoire de Maré. Leur retour à Maré correspondant avec la venue des si Hnathege, fut une véritable révolution religieuse avec l’introduction du Kaze, conjointe à une révolution sociale, à une véritable colonisation de Maré par Lifou, principalement dans l’Ouest.
52La tradition des voyages des si Xacace va nous faire entrer dans le détail des mouvements de population qui n’avaient été qu’effleurés dans le mythe de Waica i Dranin, du petit Garçon de Dranin. Cette étude avait déjà été abordée à propos de la fuite des si Gi jusqu’à Wetr, puis le Lösi à Lifou.
53Les si Xacace se savent originaires de Xacace, terrain dans la forêt de Rawa, situé au sud de ce village et au nord-est de Kunic. Le nom dynastique de leur chef était Ohne = “l’ancre de bateau”, ce qui est une assez curieuse épithète pour des gens devenus exclusivement terriens. On montre sur le sentier de Kunic, au milieu des rochers, un trou d’eau = tini, nommé Gu-se ni Ohn(e), l’endroit où Ohne se baignait.
54Ces si Xacace de la région de Rawa, qui selon la tradition n’émigrèrent pas, devinrent les sujets des si Taxeru(e) serei Yeta qui vinrent de Lifou à l’époque de l’arrivée du kaze, semble-t-il. J’insiste sur cette antériorité du groupe de Rawa, car on pourrait croire que le mythe de Drawine signifierait simplement l’arrivée des si Xacace à Maré. Il existait jusqu’à ces dernières années des si Xacace, habitants Rawa, sujets des chefs si Taxeru(e), dont les ascendants restèrent sur place. Ils ont laissé le souvenir à Rawa d’avoir été un clan puissant (cf. D 25). Le récit de Drawine laisse entendre qu’une partie importante de la population de Lifou et d’Ouvéa est originaire de Maré. Ce mouvement s’est étendu jusqu’au Nord de la Grande Terre (cf. D 13, D 22). Une partie de ces si Xacace restèrent sur place ; les autres, nous dit Drawine, descendirent dans le trou de Ku-re-Thoon confondu avec le Malu ni si Gai(e). Ceci pourrait laisser entendre que la mort des seconds ne serait pas étrangère à la fuite des premiers. Nous retrouvons brusquement nos hommes à Heo, l’Ile Beautemps-Beaupré. Puis ils reviennent sur leurs pas, et aboutissent d’abord dans la région de Gaica, Lifou.
55Il est intéressant de comparer la tradition maréenne à celles recueillies par J. Guiart à Ouvéa et Lifou.
56Cf. (86), p. 562. J. Guiart nous cite quels sont les premiers habitants d’Ouvéa. Les premiers sont les Tauti. venus de Gaica ; puis Wanakamwe, venu aussi de Gaica ; son nom correspond à celui de Wanakami qui selon le chef Jean Sinewami serait un nom si Xacace. Ce nom est passé chez les si Ruemec originaires des si Xacace de Tagi selon Awanedr. Puis vint Draume, lui aussi venu de Gaica ; il fut pris comme chef par ses prédécesseurs, et devint le propriétaire d’Heo. P. 583, il nous est dit que Wanakamwe partageait Hway avec Walèp. Sa chefferie était à Nanemeü. Ce clan s’identifie au clan Hnyeuko api Zeula du district de Gaica. A Lifou on dit que Hnyeuko api Zeula est bien parti à Ouvéa, mais en accompagnant Wanakam(i) api Canyē, qui lui-même s’identifie “au Wanakami de La Roche à Maré”.
57Par contre à Gaica, à Drueulu, Wacako est dit originaire d’Ouvéa, du clan Draume, ou du moins que des Draume auraient été reçus à Drueulu par Wacako (cf. p. 466).
58Draume (p. 562) à Gei est le troisième venu à Ouvéa. Il reçut la chefferie de Wanakamwe et devint le propriétaire d’Heo.
59Les mythes régionaux confirment bien le mouvement de va et vient : Gaica, Yay, Heo, Yay, Gaica.
60(86), p. 459-460 : Une branche des Api Canyē, Wanakam(i), venant de Drueulu s’est établie à Wedrumel (Gaica) et de là s’est expatriée sur Ouvéa, où ils sont Wanakamwe à Nanemeü (Fayawe). L’ogre Canyē vécut à We. Sa chefferie était autonome à l’arrivée d’Alaxuten à la chefferie de Drueulu. “Ces Wanakam(i) s’identifieraient au Wanakam(i) du district de La Roche, dans le centre-nord de Maré.”
61De quel Wanakam(i) s’agit-il à Maré ? Si le nom de Wanakam(i) était un nom si Xacace, il n’est plus porté chez les descendants de ce clan restés à La Roche. Mais les serei Cū, une branche de si Xacace devenue aca-nia des si Ruemec, le possédait. Il est porté chez leurs chefs si Ruemec, d’origine si Xacace également. Les serei Cu sont éteints. Mais les si Pure en proviennent. Le nom de Wanakam(i) continue à être porté chez eux à Nece.
62(86), p. 397. Le trou de Cèzi, Hotesi, dans le district de Nathalo, à une dizaine de kilomètres à l’Ouest de Kumo, est mis en relation également avec Heo. On dit que l’eau douce d’Heo provient de la grotte de Cèzi. Les gens de Cèzi troublaient l’eau de la grotte de Hotesi, et les deux filles du coin, les lue dhadheny, s’enfuirent avec leur eau à Heo. “Il y a peut-être une correspondance entre Cèzi, Heo, Fayawe et Gaica.”
63P. 611 : Draume à Ouvéa donne Heo en dot à sa fille pour qu’elle se marie à Jeula, d’origine wallisienne. P. 621 : à Lifou et Ouvéa l’entrée du séjour des morts se trouve à Heo. Mais à Maré, on sait que ce pays s’est enfoncé dans la mer. L’île était autrefois bien plus importante. P. 622, le trou d’eau douce d’Heo, Wabalaü, proviendrait de l’eau volée à la cascade de Tao par deux frères. Enfin p. 623, il nous est dit que le récif de Bunaca en langue wallisienne et Ixolokong en hwen Yai faillit être brûlé par une déesse pétrifiée. Il a été caché autrefois aux yeux des hommes par les dieux.
64Les mo-yaac si Xacace étaient devenus très habiles parce qu’ils avaient beaucoup voyagé. On doit admettre que le nom de si Xacace doit recouvrir des éléments d’origine très diverses : des gens venus du Nord de la Grande Terre, des gens de Kiam(u) = Anatom, des noirs et des moins noirs. Alors qu’au départ le nom dynastique de leurs chefs était Ohne, à leur retour ce n’est plus qu’un simple nom individuel, mais désormais le nom dynastique de leurs chefs est Kuma, pour la branche aînée de Puan. Il se retrouve chez les si Lehmi, les si Ruemec, les si Tahnaden. Il est paraphrasé en : doku hma = “grand chef”.
65(86), p. 498-499 : Le clan Xuma ate Hlua, de Thuahaik, dans le Lösi, s’identifie aux Catehmi de Wedrumel (Gaica) et de Siloam (Wetr). Il est originaire de Kein, le bord de mer de Nathalo, lieu d’origine de la Grande chefferie Ukenesö.
66Le nom de Kumo doit être pris au sens large. Il représente le chef-lieu de la chefferie antérieure à l’actuelle de Wenedhia. Le retour des voyageurs chez eux ne doit pas être considéré comme un seul voyage de quelques migrants, mais comme un mouvement d’ensemble qui est rappelé par plusieurs mythes.
67Il y a la venue des si Hnathege et de leurs aca-nia si Xacace. Cela est associé avec la venue du Kaze. Il y a la venue des si Xacace qui le transportait, celle de la chefferie des si Tadrere, des si Lehmi. Ces deux clans forment les Aca-kaze. Il y a aussi la venue de la chefferie des si Taxeru(e) de la région de Rawa, probablement aussi celle des si Cohmu dans le Sud-Est, etc.
68Le mythe de Drawine nous fait part d’un départ de la région de Kumo passant par le sud du Lösi, puis arrivant à Maré, dans le Nord-Ouest. Les traditions lifoues sont plus précises : (86), p. 379. Le clan Wahminya à Mucaweng et Hnamuhaetra, dans le Nord-Est du district de Wetr, est considéré comme angatesi = aca-nia, chargé de la liaison entre Lifou et Maré. “Les Wahminya de Hnamuhaetra disent que leur haze est Ithidra Luop. La fonction de ce dieu, sous la forme d’un martin-pêcheur, est de tuer les sorciers de la région, au lieu-dit Hua, où il y a un cercle de rochers. Un jour, des enfants lui manquent de respect et veulent le tuer, au lieu dit Luop, d’où son nom. Il se querelle avec eux et part à Xēla, sur un rocher, où il attend que Wahminya et les siens viennent le chercher. Comme personne ne vient, il part à Hwatèthi, sur la partie de la côte de Lösi qui fait face à Maré. De là il s’en va à Maré, utilisant des gourdes comme flotteurs. Il est reçu là-bas par deux vieilles femmes si Xacace. “Il y a une relation bien établie entre les si Xacace de Maré et les Wahminya”.
69(86), p. 435, note 2. Le même auteur nous rappelle qu’Ithidra Luop est le haze parti à Maré sous la forme d’une noix de coco flottant sur la mer, et qu’il serait à l’origine d’une partie du clan acania des si Xacace.
70La tradition maréenne sait qu’il reste un certain nombre de si Xacace à Lifou, en particulier à Mu où ils sont les acania du chef Bula. En effet, (86), p. 539, nous trouvons les Kacece, gardes du corps du grand chef, dont au surplus ils assurent la protection magique par leur haze, Ciciate, le martin-pêcheur, qui est également l’oiseau des si Xacace à Maré. En note 1, il nous est précisé qu’il est en relation avec le mythe d’origine des si Xacace serei Puan, dont l’ancêtre serait Ithidra Luop. Je me demande jusqu’à quel point les clans d’Atesi de Bula : Caeè, Hnanemè et Piya ne sont pas des si Xacace camouflés. Hnanemè vient de Kumo, et Caeè de Hnanemuhaetra (86), p. 495, 501, 527, 534, 539, 540, 543.
71Le récit de Drawine nous rapporte ensuite l’arrivée des si Xacace à Maré au sud de Cara. L’allusion aux kaze de la région des Aca-kaze est pour nous signifier que l’arrivée des chefferies si Tadrere et des si Comekumo Acakaze est allée de pair avec celle des si Xacace. Les mythes de ces deux clans font allusion au kaze (D7). Mais ils ne sont pas les seuls. (cf. Géographie mythique et traditionnelle de Maré, p. 328-330). La tradition recueillie dans l’Ouest de Maré, voit dans l’arrivée du kaze l’origine des si Xacace, si Taxeru(e), si Hnathege, si Non, si Pula, si Hnacu(e), si Hnaeroc, si Tahned. Nous ne pouvons discuter de cela ici en détail. Il s’agit au moins de la chefferie d’un certain nombre de ces clans.
72Nous voyons en effet les si Xacace installés à Niri, à côté de Wabao. Niri est une véritable usine à kaze. On nous cite deux grands aca-nia de Maré. D’abord Weliehme si Taxeru(e) si Hnashud(u). Il faut songer que le don d’un kaze s’accompagne de celui de son gardien. Le nom Weliehme correspond au lifou Wedhiemè = “la comète”. (86), p. 437 Wedhiemè est désigné comme étant un des haze de We ; p. 509 et 511 il est un des ten adro = propriétaires fonciers de We. Il est désigné par sa qualité moderne, car à l’époque de l’arrivée des si Xacace, la chefferie des si Guama n’existait pas encore. Il en est de même de Waumebon si Cohmu. A cette époque les si Cohmu existaient certainement ; les si Nekub(u) devaient être à Uni, entre la mer et la chefferie du village actuel de Medu, mais Warekaicane si Thatha n’avait pas encore installé sa chefferie sur la moitié orientale du marais de Wabao.
73C’est ainsi que les si Xacace serei Taxet, sujets des si Hmed serei O, s’installent sur un terrain qui sera considéré plus tard comme étant celui des si Thatha, de Warekaicane.
74Le mariage du si Xacace et de Siazengo si Hnathege représente l’installation des deux grandes chef-feries parallèles qui dominèrent l’Ouest et le centre de Maré, les si Xacace fournissant les aca-nia.
75Ces événements se passaient avant que La Roche ne fut installée à côté de Puan ; elle était encore à Gaica, puis fut installée à Ceni de Rekabeco. Ceci nous indique les installations de la chefferie des si Xacace si Puan.
76J. Guiart (86), p. 576-582 nous explique l’origine et la disparition du culte Kong Hulup à Ouvéa. La puissance de Kong Hulup s’en est allée, pour être remplacée par une magie de nécromancie. A l’envoi de nourriture ou de chair humaine à Kong Hulup, s’est substituée une technique basée sur le recours au petit panier (en Maré guakareba) “qui donne à Maré la puissance des si Xacace”.
77Suivant une tradition recueillie à Muli, ce doki proviendrait d’un panier au contenu similaire, chauffé au-dessus d’un feu jusqu’à ce que l’être y habitant s’agite et parle ; ce panier contiendrait les dents, la langue et l’index d’un cadavre du village de Hmelèk à Lifou.
78A Maré, on connait l’utilisation des restes de cadavre, mais le paquet magique tire sa puissance de l’appui d’une petite pierre qui est le Kaze.
DOCUMENT 86. HNA-WHAN O RE TITI PUAN
79Récit donné en 1944 par Drawine Acakaze si Lehmi. Texte maré d’Henri Siwoine.
801/ Dukewi ne Wadusa, bushengon ace-celuaien. Bushengon rue yaace hmenew ni si Xacace.
812/ Bushengon hna hue leu si Xacace ri ci-hu(e) ca pina i Puan. Ka melei deko hna-bo bane iru(e).
823/ Ka o re Tit be ile ko i Gaica. Ka o re si Puan ci ie ko : “Eje ha co ilon sa ko re hna-bo, hna-kudo-tit, ko re yelen”.
834/ Ka buic ci teno jeu o re nodei yaac, thu co ilon ekow ne buic.
845/ Ka co whan o re ruac ri beore. Ka ri ezien omelei ci iru(e) ko buic serei Driphu. Ka buic si Driphu deko hna ule.
856/ Ka si Puan hna enon o re Tit ri ridr(i), ka ci sice ti ca pina i Ceni, acenon o Rekabeco.
867/ Ka o re si Xacace ci ule ko o re si Rusi thuni co ule buic. Ka buic ci pareu ko o re si Gaica co thedi lo yawe o Tit(i).
878/ Ka buic hna hue ti yawe ca pina i Puan. Buic ci pina ri ore, buic ci ser omelei ne ci ice lo ri pon, ne ci ura ko buic ha ase da. Ka tha thuni ko co ule o Tit(i) wenei Driphu. Athua.
881/ Dukewi et Wadusa, elles deux sont sœurs. Elles deux sont deux yaac femmes des si Xacace.
892/ Elles deux ont suivi les si Xacace dans leur marche jusqu’à Puan. Et là il n’y avait pas de refuge pour la guerre.
903/ Et La Roche était encore à Gaica. Et les si Puan disent : “Nous allons faire un refuge, appelé Entassement de roches.”
914/ Et ils invitent les yaac pour faire comme eux.
925/ Et c’est pour commencer le matin. Et à ce moment là font la guerre les Lifous. Et eux les Lifous n’ont pas vu.
936/ Et les si Puan ont volé La Roche pendant la nuit, et se sont sauvés jusqu’à Ceni, à côté de Rekabeco.
947/ Et les si Xacace voient que les Lifous peuvent les voir. Et ils ont peur que les gens de Gaica ne s’emparent de nouveau de La Roche.
958/ Et ils (l’) ont amenée jusqu’à Puan. Ils arrivent au matin, ils s’arrêtent là et montent dessus, et ils crient que eux ont fini les premiers. Et on ne peut pas voir La Roche de Lifou. Fini.
Commentaire
96Ce toa-tit est du même auteur que D 85. Il nous laisse entendre également que les si Xacace viennent d’une manière lointaine de Gaica. Puis il joue sur le nom de si Puan, en attribuant aux si Xacace de Puan la construction de La Roche. Mais cette fois elle est simplement volée de Gaica ; puis il y a une station à Ceni. Ceci correspond à D 85 où il est dit que le pays a été appelé Acakaze à cause des kaze transportés par les si Xacace. Pour venir s’installer à La Roche, les si Xacace sont passés par le Nord-Ouest.
97Du-kewi pourrait signifier “os de trahison” = wa-kewi. La trahison porte le nom du crabe terrestre ye-kewi qui peut vous pincer à l’improviste. Wa-du-sa pourrait s’interpréter “un petit os”, par allusion aux sorcelleries de nécromancie des si Xacace. Ce sont deux rochers au pied de La Roche entre Gonegon et la montée de La-Ketu. Drawine commentait son toatit en disant : Le yaac si Gi ne si Puan (les rochers pointus au sommet de la hauteur dominant Thoon) donna La Roche aux deux sœurs. Les si Puan montèrent sur La Roche pour y habiter ; et les si Gi partirent à Edhengen où ils sont encore. Et il concluait en disant : Les mo-yaac si Xacace étaient plus dégourdis que les autres parce qu’ils avaient beaucoup voyagé. Dans cette version, les si Xacace se servent d’euphémismes pour signifier que les si Xacace ont pris la place des si Puan.
98Drawine tenait le récit du vol de La Roche à Gaica et de son installation à Puan, d’une vieille Druai, Acakaze serei Mane.
DOCUMENT 87. SI XACACE III
99Récit donné par Cyriaque Trélé si Xacace. Texte maré d’Henri Siwoine.
1001/ O re si Xacace, buic serei Cara. Ka numu rewe ko re hmenew yaac, Siazengo ne Zine i Xacace. Bone acania ni Siazengo.
1012/ Ka bushengon ci taedrengi ci nara ko re waete. Ka o re waete omelei kaze.
1023/ Zine i Xacace ha tobon, ka o re re-tei bon ha gurule lo o Nengone. Ka buic ci ethawan o re beti Nengone i Niri.
1034/ Ka o re tok, Kuma, ci hu(e) i Puan, ka o re cel Awanedr ci hu(ej i Tagi, ka omesa me cel ci hu(ej i Purem, ka omesa me cel ci hu(e) i Wabao. Athua.
1041/ Les si Xacace, eux viennent de Cara. Et il y a deux femmes yaac, Siazengo et “Propriété de Xacace”. Elle est l’aca-nia de Siazengo.
1052/ Et elles deux entendent tomber une pierre. Et cette pierre là est un dieu kaze.
1063/ “Propriété de Xacace” est enceinte et ses enfants font le tour de Maré. Et ils se partagent l’île de Maré à Niri.
1074/ Et l’aîné (= chef), Kuma, va à Puan, et son cadet (= sujet) va à Tagi, et un autre cadet va à Purem, et un autre cadet va à Wabao. Fini.
Commentaire
108Ce toatit avait cours dans la famille de Trele si Xacace. De bonne foi, mon informateur croyait d’après lui que seule la magie de son clan, la petite pierre kaze était étrangère. Les si Xacace, clan eletok, ne pouvaient s’avouer eux-mêmes étrangers. Le mythe nous donne très approximativement le lieu d’atterrissage. Il nous indique également le stage à Niri, et les quatre grandes branches des si Xacace : Kuma à Puan, Awa-nedr à Tagi, puis les si Xacace serei Purem, et enfin les divers groupes de si Xacace de Wabao, sujets des si Hmed serei O.
109Il n’est pas question du groupe de Rawa, devenu sujet des si Taxeru(e). Siaze ou Siazengo est une femme yaac des si Hnathege. Le nom de Sihaze se retrouve comme nom d’homme chez les descendants de la chefferie de Wenedhia, à Lifou.
110Les serei Purem sont maintenant à Hnawayèc. Leur premier habitat était à côté d’un banian qui fut renversé par le cyclone de mars 1939.
111Le groupe des si Xacace de Wabao est plus complexe. On trouve les si Xacace serei Taxet, si Xacace serei Wadeng qui étaient les aca-nia de l’ancienne chefferie si Hmed des serei O, et les si Xacace Ma-aca-caac serei Boe qui sont les aca-nia doku de la nouvelle chefferie si Hmed, des serei Tayeku(e), originaire de Lifou, imposée à la place de la précédente par les chefs de Guama après 1880. Boe est un clan wäy de Muli (86), p. 625. Je n’ai pas de détail sur les serei Taxet.
DOCUMENT 88. SI XACACE IV
112Récit d’Agnès Whame Maacaran, veuve de Paul Yeng(o), chef des si Hnathege ; texte maré d’Henri Siwoine.
1131/ Sa ko re waceng, me waete, ci thalo i Hna-cede-ni kaze. Bone ci pina wenei Mak(o), Eal(i) ne Driphu.
1142/ Ka munu ri guhnen omelei rewe ko re hmenew yaac, Siazengo komesa si Hnathege, ne Zine i Xacace komesa.
1153/ Bushengon ci se ; ka Zine i Xacace ci ule thuayai sa ko re cahman acenon o Siazengo.
1164/ Ka bone deko ma ule. Ka Zine i Xacace ci ie du bone ko : “Numu ngom melei sei bua !”
1175/ Ka kei Siazengo ko : “Kei ! inu deko ma ule !”
1186/ Ka Siazengo ci hue kaduo du Zine i Xacace ; ka bushengon deko ma ule. Ka bushengon ci se.
1197/ Ka o re haicahman ha ile di sei Zine i Xacace. Ka kei Siazengo ko : “Seseko ! melei !”
1208/ Ka bon ci acenon o Zine i Xacace, ka bone deko ma ule. Ka bon ci cengon ri hnei bon hna ule, ka bon ci uni sa ko re waete.
1219/ Ka Siazengo ci ie ko : “Kei ! melei ko re waete !” Kei waete ko : “Deko co rue nu. Bua tokego, ka Zine i Xacace ko re co yothi nu.”
12210/ Ka hmenew si Xacace ci yothi bone lo, ka bushengon ci hu(e) ri hna-meneng ni bushengon.
12311/ Ka Siazengo deko yawe co ule waete. Ka kei Zine i Xacace ci eto bone ko : “Ilo ? Ethew thuni co hue jo ri se ran ?”
12412/ Ka Zine i Xacace ci padrengide lu o re waete ri kareba ne ci hu(e).
12513/ Ka bushengon ci hue gurule lo o Nengone. Ka buic ci hue gurule lo o re node ni Acakaze, ne Gurewo(e), ne Wakone, ne Wanuman, ne Cerethi, thu co hue lu yawe jew o Cacag(o) sei si Cohmu.
12614/ Ka o re waete ci ie ko : “Atangoni lu sa ko re coco, thu co ule ko inu engetac”.
12715/ Ka ri len, bushengon ci atangoni hmaiai ko re ngom hnen o re du-re-coco inom o re kaze.
12816/ Ma hadri Cacag(o), melei Zine i Xacace hna eked ne il sa ko re haicahman yelen Waumebone si Cohmu.
12917/ Ka bone ci eto bushengone ko : “Hmengo ci hue il ?” Ka o re waete ri hnoren o re kareba ci ie du Zine i Xacace ko : “Kaio bone bot”.
13018/ Ka buic ci hu(e) ca pina i Niri, ka hna ane o re waete ri pon o re ete.
13119/ Ka o re waete, haicahman, ci kuru but wene ri kareba ne ci ie ko : “Siazengo co hmenueg(o)”.
13220/ Ka buic hna ane o re waete ri pon o re ete i Niri, ka ore waete hna kan o re kuru i Niri.
13321/ Ka buic hna cori bon ka ci ethawan o re ta aca-nia si Nengone thu co sisi buic si Taxeru(e), si Cohmu, si Tapep(a), si Tae.
13422/ Ka Zine i Xacace hna kanon o re waete du Weliehme, bone ha thu co cumon so Tahmuhm(u) si Hnathege. Ka Weliehme ha aca-nia ni Tahmum(u). Ha athua.
1351/ Une magie, qui est une petite pierre, aborde à Là-où-a-été-débarqué-du-kaze. Elle vient de la Grande Terre, Ouvéa, et Lifou.
1362/ Et il y a dans cet endroit là deux femmes yaac, l’une Siazengo, l’autre la femme de Xacace
1373/ Elles deux se baignent ; et la femme de Xacace voit au loin un homme à côté de Siazengo.
1384/ Et elle ne voit pas. Et la femme de Xacace lui dit : “Il y a quelqu’un là avec vous !”
1395/ Et Siazengo : “Tiens ! je ne (1’) ai pas vu !”
1406/ Et Siazengo va là-bas vers la Femme de Xacace ; et elles ne (le) voient plus. Et elles deux se baignent.
1417/ Et le jeune homme est là vraiment avec la Femme de Xacace. Et Siazengo : “C’est vrai ! (il est) là !”
1428/ Et elle approche de la Femme de Xacace, et elle ne (la) voit plus. Et elle cherche là où elle a vu, et elle trouve une petite pierre.
1439/ Et Siazengo dit : “Tiens ! là une petite pierre !” Et la petite pierre (dit) : “Il ne faut pas me toucher. Vous êtes mon chef, et la Femme de Xacace est celle qui me prendra.”
14410/ Et la femme si Xacace la prend, et elles deux s’en vont dans leur demeure.
14511/ Et Siazengo ne doit plus voir la petite pierre. Et la Femme de Xacace demande : “Eh bien ? nous deux pouvons-nous nous promener un jour ? ”
14612/ Et la femme de Xacace enfonce la petite pierre dans un petit panier plat et part.
14713/ Et elles deux (les deux femmes) vont tout autour de Maré. Et elles font le tour du pays des Acakaze, et Gurewo(e), et Wakone et Wanuman, et Cerethi, pour arriver encore à Cacag(o) chez les si Cohmu.
14814/ Et la petite pierre dit : “Tuez un coq pour qu’on voit que je suis forte.”
14915/ Et en chemin, elles deux tuent beaucoup de gens par l’os de coq comme kaze.
15016/ Là à Cacag(o), là la Femme de Xacace s’est rencontrée avec un jeune homme Waumebone si Cohmu.
15117/ Et il leur demande à elles deux : “Vous deux où allez-vous ?” Et la petite pierre à l’intérieur du panier plat dit à la femme de Xacace : “Appelle-le !”
15218/ Et ils vont jusqu’à Niri, et on a posé la petite pierre sur le rocher.
15319/ Et la petite pierre, le jeune homme, sort du panier plat et dit : “Siazengo sera ma femme !”
15420/ Et ils ont posé la petite pierre sur le rocher de Niri, et la petite pierre a mangé le trou de Niri (c.-à-d. elle a percé le rocher en formant le trou de Niri).
15521/ Et ils l’ont prise et se partagent les aca-nia de Maré pour les visiter si Taxeru(e), si Cohmu, si Tapep(a), si Tae.
15622/ Et la femme de Xacace a donné la petite pierre à Weliehme, lui pour qu’il (la) garde pour Tahmuhm(u) si Hnathege. Et Weliehme est Yaca-nia de Tahmuhm(u).
Commentaire
157Agnès Whame, en me racontant ce toa-tit, m’a dit le tenir de son mari Paul Yeng(o) Tahmuhm(u) serei Sego, chef des si Hnathege. Il s’agit donc à proprement parler d’une tradition si Hnathege. Elle rejoint celle de Drawine (D 85). Les si Hnathege pas plus que les si Xacace ne Vont montrer qu’ils sont étrangers. C’est pourquoi on ne parle que de l’arrivée de la petite pierre kaze, qui apparait parfois sous la forme d’un jeune homme, et on donne l’endroit précis de son abordage : Hna-thede-ni-kaz ou mieux Hna-thede-re-kaz. Il est fait allusion à la technique du panier plat, kareba. Mais à Maré, on se sert en plus d’os de mort, d’os de coq.
158Les si Hnathege savent que leur magie vient de loin, on parle non seulement d’Ouvéa, mais même du Nord de la Grande Terre. Je crois qu’il doit s’agir du remplacement du culte Kong Hulup, venu de la Grande Terre, par celle de la petite pierre. Sa puissance pour fortifier les magies amies, et neutraliser celles des ennemis était telle qu’on l’appela le Kaze par antonomase et que les autres kaze, objets-dieux, étaient sans efficacité en comparaison de celui-ci.
159On nous donne ensuite le parcours du kaze à travers Maré, sans trop de précisions du reste. Mais il aboutit à Cacag(o) chez Waumebon si Cohmu. Les si Cohmu connaissent eux aussi cette tradition.
160D’après des renseignements recueillis en 1946 à Medu : Pijone chef des si Cohmu fabriquait des kaze kHna-itrani-kaze = “là où on lie les kaze”. Itra est le pâté cuit au four et ficelé, en lifou, comme ael en maré. Itrani signifie lier en forme de surliure. On lie la puissance, nen, du mort dont on a pris les restes. On peut voir encore la place près de Cacag(o) où s’asseyaient les aca-nia de Maré, chacun ayant sa pierre lui servant de siège : si Waek(o), Acakaze, si Xacace, si Tapep(a), si Cowel, si Taxeru(e). Autrefois les aca-nia avaient des waceng, des paquets magiques, disent les si Cohmu, pour bénir une espèce d’arme, casse-tête, sagaie, suivant les cas. Pijone fut le premier à faire une magie, un kaze, où on frappait l’ennemi par un esprit. Il en distribua dans tout Maré. Pijone était puissant ; de tout Maré on courait à lui avec des richesses.
161La tradition de Medu dit que le premier chef des si Cohmu fut Waumebon. Il est identifié à Waumebon fabricant de kaze à Niri. Waumebon eut deux fils, Pijone l’aîné et Coo le cadet. Ce dernier mourut à l’Ile des Pins.
162Leur nom de chef, Pijone, vient de Piijo qu’on trouve chez les si Waeroc, devenus sujets des Node ri Kurub(u), et sur la Grande Terre dans la région de Pouébo.
163Le nom de Co-hmu donné au terrain qu’ils occupaient est interprété : l’homme des casse-tête.
164Le mythe nous fait arriver à Niri, où se trouvent rassemblés si Hnathege, si Xacace et si Cohmu. Le kaze, petite pierre, travaille posé sur un rocher que personne n’a pu ou voulu me montrer, tant il inspire de crainte. Ce serait une pierre brune, waetubene, ayant des veines rayonnantes, correspondant autrefois à un clan d’aca-nia.
165La pierre kaze tombe enfin en la possession de Weliehme si Taxeru(e) si Hnashud(u) qui la garde pour la chefferie des si Hnathege. Les si Taxeru(e) ont eux aussi des traditions concernant le kaze. Leur nom Ta-xeru(e) vient du lieu-dit Waba-xeru(e) = le trou des magnanias, Pueraria lobata (Wild.), (15), p. 195-196. Voici comment leur chef Stanislas Wainebeng(o) m’a rapporté leur tradition en 1946 : à Taxeru(e), sortit de terre un pied de magnania, chef de magnania, toa-xeru(e), qui se divisa en trois branches : xeru(e), uianet et drete. (Ce sont pour les indigènes trois espèces de xeru(e)).
166Xeru(e) est la branche des serei Yeta, le clan du chef.
167Uianet (m. à m. = esprit de mort) est la branche de si Hnashud(u), aca-nia des serei Yeta. Drete est la branche des si Xacace.
168Un kaze venu de Mu, Lifou, débarqua à Niri. Les si Xacace et les si Hnashud(u) le gardèrent. Waumebon si Cohmu fabriqua le premier kaze, (c. à d. qu’il fut le premier à se servir de la pierre-kaze de Lifou pour fabriquer d’autres kaze). Puis il remit le kaze de Lifou à Weliehme et à Jiriane si Hnashud(u).
DOCUMENT 89. SI XACACE V
169Récit de Jean Sinewami donné en 1939. Texte maré d’Henri Siwoine.
1701/ Numu si Xacace (pene Driphu atre Hazez(e)) serei Driphu. Buic ci meneng i Mu.
1712/ Buic ci tice bot wene ri nod ni buic co hu(e) i Nengone.
1723/ Ka buic ci thalo acenon o Cara, hada i Nengone, ka hna kuri o re koe ni buic. Ka buic ci meneng i Purem, acenon o Wakuarori.
1734/ Ka buic ci hue guru jo i Wakuarori, ne Ro, ne Tenan, ne Padaw(a).
1745/ Ri sa ko re cekol, buic ci ie : “Eje ha co hue gurul o Nengone.”
1756/ Ka buic ci pina i Wabao. Ka buic omelei si Wabao ci noken. Ka o re token i buic cenew, yelen Kanej(o). Bone si Hmed.
1767/ Sa ko re haicahman si Driphu ci oe nubon ka ci cedon o re waete du Kanej(o). Ka bon ci cini lo, ka ci ule ko nidi karished, ka nubon ci lawalawan o re waete ri hna-iko ni bon.
1778/ Ka buic ci era ne ci pia. Ka ma lakid(i), Kanej(o) ci hu(e) co thaet ri ’ma ni bon.
1789/ Ka bon ci taedrengi ko re ci inidi bon. Ka bon ci ule sa ko re haicahman melei ci mengen.
17910/ Ka ke bone ko : “La ke bua ?” – “Inu ono re waete hnei bua hna yose onad ri ran. Hage enid, thaeti lu yawe, inu ha co hu(e).
18011/ Roi di bua ha tubunieg(o). Ka bua ma hnapo ko re morow, inu co hue bot yawe co ule bo.”
18112/ Ka cenew ha hmaien o re waicahman. Ka si Rusi ci hue yewe yawe, ca pina i Lawadeng.
18213/ Ka buic ci ule omelei, numu waeteshet ci yei(e). Melei oni Shotin.
18314/ Ha ten buic ci tha-kaze tubunid, ka deko tharan. Ka o re waeteshet ci ilo buic : “Kabi ko re u ni ziehme.
18415/ Ka zi hue te”. Ka buic ci dede lo ri ’ma ni bon. Ka waeteshete ko : “Melei ko re inu co rue jew o re kaze ni buhnij. Inu ciputi serei(e) thu co engetace hma.”
18516/ Ka bon hna kano buic o re sereie, o re hmu. “Ka onom dai tubunide lo ke buhnij.”
18617/ Ka buic ci hue yawe kaduo ca pina i Wakuarori acenon o tacaere. Koda numu yedeng me hma, hna a-cara-ni hnei wene.
18718/ Ka buic ci uni sa ko re coco. Ka ci ridi tubunid o kaze ni buic du coco. O re coco ci shota ne ci tango.
18819/ “Roi komelei ; eje ha co hne om i Nengone son omelei”. Ka buic ci yewe yawe kadrio i Wabao, thu co ule o re tharan o re ruac ni waete.
18920/ Ka buic ci uni Kanej(o) ne il o re morow hna hnapo.
19021/ Ka Kanej(o) ci ie du buic : “O re re-kago ha as hna enengoco thu co kano waica sa ko re gurawa.”
19122/ Ka ri thuben omelei, buic ci yewe yawe jew o Wakuarori, thu co awaneni re-kani buic si Purem.
19223/ Ka o re si Rusi ci enewe bot. Ka osoten ci meneng sei waica, ka osoten buic, ci hne i Purem sei si Wakuarori.
19324/ Ka buic ci sane lo yawe co sisi Shotin. Ka buic hna ekonejeu ko deko ia sese o titew ne Shotin. Ka Shotine di deko co kaka sese aewaud.
19425/ Ka Shotin ci ie du si Rusi : “Inu ha ule buhnij. Eje sa ko re guhnameneng. Inu hna kuru but serei gutheb i Lawadeng.
19526/ Ka yaac ni buhnij ci kuru but serei Wanyalo, i Driphu. Ka o re rue kuru omelei, numu ko re yaac guhnameneng me sa.”
19627/ Wenomelei o re si Xacace serei Wabao, ne Rabuni Neng(o) si Tae, buic ace-re-soten. Athua.
1971/ Il y a des si Xacace (en lifou atre Hazez(e)) des Lifous. Ils habitent à Mu.
1982/ Ils ont émigré de leur pays pour aller à Maré.
1993/ Et ils ont débarqué à côté de Cara là-bas à Nengone, et ils ont tiré leur bateau (à terre). Et ils habitent Purem à côté de Wakuarori.
2004/ Et ils font le tour de Wakuarori, de Ro, de Tenan et de Padaw(a).
2015/ Au bout d’un mois, ils disent : “Nous allons faire le tour de Maré.”
2026/ Et ils arrivent à Wabao. Et eux là les gens de Wabao font une fête. Et leur chef est une jeune fille, nommée Kanej(o). Elle est si Hmed.
2037/ Un jeune homme lifou se dissimule et lance la petite pierre vers Kanej(o) ; et elle la ramasse, et voit qu’(elle) est très jolie, et met dans sa ceinture la petite pierre.
2048/ Et ils chantent et ils dansent. Et le soir, Kanej(o) va se coucher dans sa maison.
2059/ Et elle entend quelqu’un qui l’éveille (c.-à-d. qu’elle sent qu’on la touche pour l’éveiller). Et elle voit un jeune homme là assis
20610/ Et elle lui dit : “Qui êtes-vous ?” – “Je suis la petite pierre par vous a été prise tout à l’heure au jour. Ne bougez pas, couchez-vous encore, je m’en vais.
20711/ Mais vous êtes enceinte de moi. Et quand vous accoucherez du bébé, je reviendrai te voir.”
20812/ Et la jeune fille est la mère d’un petit garçon. Et les Lifous s’en retournent de nouveau jusqu’à arriver à Lawadeng.
20913/ Et ils regardent là, il y a une petite vieille qui sarcle. Là c’est Shotin.
21014/ C’est trois (c. à d. par trois fois) (ils) frappent-du-keze-essaient, et pas de résultat. Et la petite vieille les grondent : “Emoussé l’outil-pénis de vous.
21115/ Et venez”. Et ils entrent dans sa maison. Et la petite vieille : “Voici ce que je vais faire à votre kaze. Je vais cracher un remède pour qu’il soit fort beaucoup.”
21216/ Et elle leur a donné le remède, le casse-tête. “Et maintenant essayez un petit peu les vous”.
21317/ Et ils vont encore vers l’Ouest jusqu’à Wakuarori, à côté du tacaere (= case commune des jeunes gens). Autrefois il y avait un banian, renversé par un cyclone.
21418/ Et ils trouvent un coq. Et ils frappent-essaient du kaze d’eux vers le coq. Le coq bondit et meurt.
21519/ “Bon cela ; nous allons rester ici à Maré pour cela”. Et ils retournent là-bas à Wabao, pour voir le résultat du travail de la petite pierre.
21620/ Et ils trouvent Kanej(o) avec son bébé qui est né.
21721/ Et Kanej(o) leur dit : “Mes compagnons (= ma parenté) ont fini de parler pour donner au petit garçon un terrain.”
21822/ Et après cela, ils retournent encore vers Wakuarori, pour prévenir leurs compagnons si Purem.
21923/ Et les Lifous se séparent. Les uns demeurent avec le petit garçon, et les autres eux restent à Purem chez les si Wakuarori.
22024/ Et ils se réunissent de nouveau pour visiter Shotin. Et eux ont fait une convention de ne pas manger ensemble de la poule avec Shotin. Shotin par contre de ne pas manger ensemble des pâtés de taros.
22125/ Et Shotin dit aux Lifous : “Moi c’est vu vous (= je vous connais). Nous sommes une seule famille. Je suis sortie de la petite dépression de Lawadeng.
22226/ Et votre yaac sort de Wanyalo, à Lifou. Et les deux trous là, il y a les (deux) yaac sont une seule famille.”
22327/ De cela les si Xacace de Wabao et les “Petits-fils de la Mouche” si Tae, sont “proches parents”. Fini.
Commentaire
224Le chef Jean Sinewami ne donne ici que l’histoire de la branche des si Xacace aca-nia, de ceux qui détenaient effectivement le kaze. Il s’occupe de ceux qui sont en relation avec son clan, celui des si Tae. (Il ne parle pas des relations avec les si Cohmu et les si Taxerue). Il les fait venir de Mu. Le premier lieu de leur installation à Maré est appelé Nengone, qui est la transformation du nom de Maré en lifou : Mengöni, nom qui sera donné à l’île entière. Ils s’installent ensuite à Purem auprès des serei Wakuarori qui sont originaires de Thuahmijoc. Le pouvoir de leurs kaze provient de la petite pierre qu’ils ont amenée avec eux de Lifou. Ils se promènent d’abord dans le Nord-Ouest, essayant leurs kaze, tuant beaucoup d’hommes. Puis ils font tout le tour de Maré. Sans doute est-ce à ce moment qu’ils passent par Cohmu. Ils arrivent à Wabao, chez les si Hmed, au cours d’une fête. La chefferie de ces derniers était mal en point. Leur chef était une jeune fille. Cela signifiait qu’il n’y avait plus de descendant mâle. Le rôle essentiel du chef consistait à recevoir les présents puec. C’était donc cette jeune fille qui les recevait ; mais c’était ses proches parents mâles, par exemple ses oncles maternels, qui exerçaient l’autorité effective. Le nom de cette jeune fille montre qu’on avait reporté sur elle l’espoir de l’avenir de cette chefferie : kane-jo = “il y a encore de la suite, de la continuation”. Kan signifie “suite”, et vient de la conjonction ka suivie de la possession n ; jo, qui vient de co = “aller”, indique un mouvement qui se prolonge. Ce nom de Kanej(o) passera à l’Ile des Pins. C’était le nom de la reine Hortense, la fille de Vendegou qui accueillit les missionnaires maristes. Le kaze des si Xacace va assurer une descendance mâle aux si Hmed serei O. C’est pourquoi les si Xacace se grouperont autour d’elle.
225Les Lifous continuent leur route. C’est sans doute à ce moment qu’ils sont en relation avec les si Taxeru(e), les si Hnashud(u) en particulier. Remontant vers le Nord, ils passent par Lawadeng, où habitaient déjà les si Tae comme sujets des si Tadeng. Ces derniers sont également issus de Thuahmijoc. Dans le mythe, les si Tae sont représentés par leur yaac, une petite vieille, Shotin. Ils la menacent de leur kaze, sans résultat. Shotin les gronde en leur parlant avec la dernière grossièreté comme à des petits galopins incapables. Mais elle a le droit de leur parler ainsi. Elle le leur explique. C’est qu’ils sont “proches” = ace-re-soten. Elle est sortie du trou de Tae, à côté de Lawadeng, et le yaac Zeze = le martin-pêcheur, des si Xacace, est sorti à Lifou du trou de Wanyalo. Ainsi leurs kaze sont sans effet sur leurs proches.
226Les aca-re-soten représentent la forme maréenne de la parenté à plaisanterie. Ils avaient le droit de s’insulter grossièrement par plaisanterie. Théoriquement, c’est entre eux que devaient se faire l’échange de femmes. Dans la réalité, on se mariait suivant les désirs des familles. Mais alors, il fallait faire des échanges de richesses onéreux, tandis qu’entre “proches” les choses se passaient plus simplement.
227On les appelle aussi hna-ka-sese = “ceux qui ont mangé ensemble”, les commensaux. Ils devaient observer entre eux certains interdits alimentaires. Nous voyons si Tae et si Xacace faire leurs conventions Parmi les si Tae ce sont les Rabuni Neng(o) (= les petits-fils de Nengo) et parmi les si Xacace de Wabao les serei Wadeng qui sont Hnakasese. Les Rabuni Neng(o) le sont également avec les serei Purem et même avec les si Xacace de Mu.
228Les “proches” ne devaient pas se faire la guerre. Ils se prévenaient mutuellement des mauvais coups, et si c’était impossible, lors d’une réunion provocatrice, c’étaient eux qui invectivaient le plus leurs correspondants. C’était un avertissement déguisé. On appelait également ces “proches” guahnama. C’était la relation de parenté qui permettait de se battre par manière de plaisanterie ; mais on se faisait mal, le plus fort battant le plus faible, le plus vieux battant le plus jeune. Mais une femme pouvait battre un homme, qui alors se laissait faire. Il recevait les coups en riant.
229Enfin ces si Xacace se séparent. Les uns restent à Purem. Leur tacaere était à côté du banian renversé le 25 mars 1939 par un cyclone. Il était de très belle taille, avait un tronc de racines serrées de 5 à 7 mètres de diamètre. Ces serei Purem sont maintenant à Hnawayèc, cf. (86), p. 337-338. Les autres deviendront les aca-nia des si Hmed serei O.
230Le remède apporté par Shotin au kaze des si Xacace est le hmu, le casse-tête magique qui fit la fortune des si Tae, appelé aussi “le petit casse-tête de Maré” = wa-hmu i Nengone.
231Le chef Jean Sinewami m’a dit que c’était une pierre blanche, arrondie, oblongue, d’une longueur de 30 cm environ, très lourde, ne paraissant pas être d’origine maréenne. On l’aurait retrouvée vers 1907.
232Le chant Nyineuatro guli Simako y fait allusion. A l’époque du chef Simako II, dans le milieu du xixe siècle, le gardien de cette magie était Nengo, du sous-clan des Rabuni Un, moeteshet des si Tae. Lorsqu’un chef voulait faire une guerre, il fallait frapper du kaze ses ennemis, et prendre également des précautions pour se mettre à l’abri de la guerre magique. Les paquets magiques, waceng, des assaillants devaient être fortifiés par le hmu des si Tae. Pour cela, le chef en question venait lui-même trouver les moeteshet si Tae, en l’occurence Nengo, avec des présents, et lui annoncer ses projets. Cela se disait co ru du moeteshet. Le mo-eteshet gardien du hmu disait des paroles de bénédiction assurant de la victoire. Si le chef en question était un ennemi des si Tae, et même s’il voulait faire la guerre aux si Tae, il envoyait de nuit un homme de confiance trouver Nengo pour lui dire : “Nous allons attaquer telle tribu” ; et Nengo bénissait les armes du demandeur. Cela se faisait à La Roche, à Gonegon, comme auparavant au trou de Tae près de Lawadeng. Cette visite secrète se disait co rothi pe hmu = “aller en cachette sur hmu”. Le moeteshet de service était au courant des menées des autres tribus même contre la sienne propre. Il n’était pas censé la trahir. Sa fonction était de bénir, et il amenait des richesses aux si Tae. Mais il était tenu au secret. Sans doute cherchait-on à le faire parler, mais Nengo changeait de sujet de conversation : hna lani hnei Nengo, dit le chant Nyineuatro.
DOCUMENT 91. WAPON
233Toa-tit(i) donné en 1944 par Adélaïs Wapica si Tadeng ; texte maré d’Henri Siwoine.
2341/ Wapon bone si-re-yaac, ci hne i Titi Wapon, acenon o Peyec. Ri se ran bone ci cenge-nia. Deko hna ie o re tan.
2352/ Bone ci yose o re cei, ne rone lu rue wasisi, ka ci thingi o re peicen, ka ha ci ridr(i).
2363/ Ka o re nod ci alan co ruac. Ka ci ha ridri ko. Bane eroio ne Wapon, buic ci lae ia, buic hna yose o re eoc.
2374/ Ka buic ci lae ia ri ridr(i), ka hna nue du mohma. Ke roi di ci iara ridri ko.
2385/ Ka ci lae ia ko, roi di o re so wai(e) ci bi, wen o re mohma ci keon. Bone ci cenge-nia ko.
2396/ O re waica hna tubunid co eroio ne Wapon ; hna eked ne mo-yehnakunu. Buic ci yewe yawe serei cele, thu co nue wai(e) du mohma yawe.
2407/ Ka o re waica ci hue jo ko co lae ia. Ka bon ci cori o ra ta wapelil(i). Ka bone ci ice ti lo co kano mohma.
2418/ Ka bon ci ekede yawe ne mo-yehna-kunu, ci hue bot yawe sere hna kanon o so wai(e) du Wapon, ka bon ci ke ko.
2429/ Ka buic ci ie du waica : “Ngei bo ma ci hue ti o re so wapelil du mohma, bone deko co opodon bone deko ma alan, ke cile.”
24310/ Kei waica ko : “Thu nge ? inu hna cengon ithuaiai, ha ushiwa. Inu co hue ti ko du bon.”
24411/ Ka moyehnakunu ci ridi bon. Ka bon ci hue ti ko du Wapon o re so wapelili bon.
24512/ Ka Wapon ci ie du bon : “Hue ti bot o re so waie bo, inu co ian”.
24613/ Ka o re mohma Wapon ci ian, ka bon ci yose o re cei hnei bon hna ane o re rue wasisi, ka bon tohe lo, ka ci po ko re rue wasisi, ile me rane bot.
24714/ Ka o re ye-hna-kunu ri cele ci carajewe ne ci ie ko : “Mohma ha hna kedi o re so wai(e) ni waica.” Athua.
24815/ O re yelen ko Wapon, wen o re bon ile ri pon.
2491/ Wapon, il est un compagnon des yaac, il demeure à la roche de Wapon, près de Peyec. Un jour il est en colère. On n’a pas dit le motif.
2502/ Il prend une gourde, et enfonce (dedans) deux oiseaux wasisi, et il ferme l’ouverture, et il fait nuit.
2513/ Et les gens veulent travailler. Et c’est vraiment nuit. Pour être bien avec (= se réconcilier avec) Wapon ils (= on) acquièrent de la viande (= font la pêche), ils ont pris le filet.
2524/ Et ils font la pêche dans la nuit, et ont laissé (= donné la viande c.-à-d. le poisson) au vieux. Mais vraiment il fait toujours nuit.
2535/ Et (ils) font la pêche, mais le tas de poisson empeste (= pourrit), parce que le vieux le refuse. Il est toujours fâché.
2546/ Un petit garçon a essayé d’être bien avec Wapon ; (il) a rencontré les jeunes gens. Ils reviennent encore de la mer, pour donner du poisson au vieux encore.
2557/ Et le petit garçon va aussi faire la pêche. Et il prend des wapelil. Et il grimpe en venant avec pour (les) donner au vieux.
2568/ Et il se rencontre de nouveau avec les jeunes gens (qui) viennent d’avoir donné le tas de poissons à Wapon, et il refuse tout à fait.
2579/ Et ils disent au petit garçon : “Si tu apportes le tas de wapelil(i) au vieux, il ne sera pas content ; il n’(en) veut pas du tout, mais (le) rejette.”
25810/ Le petit garçon : “Pourquoi ? j’ai cherché loin, c’est difficile. J’amènerai quand même à lui.”
25911/ Et les jeunes gens le frappent. Et il apporte quand même à Wapon le tas de wapelil de lui.
26012/ Et Wapon lui dit : “Apporte ton tas de poissons, je (le) mangerai”.
26113/ Et le vieux Wapon mange, et il prend la gourde par lui a placé les deux wasisi, et il ouvre, et crient les deux wasisi, alors il fait jour.
26214/ Et les jeunes gens dans la mer comprennent et disent : “Le vieux a accepté le tas de poissons du petit garçon.” Fini.
26315/ Le nom de Wapon vient de ce qu’il est au-dessus.
Commentaire
264Le nom de Wa-pon vient de Wa = “le vieux”, pon = “dessus”. C’est celui qui domine. Les indigènes commentent son nom en disant : “Il réussit tout ce qu’il veut”, et essaient de traduire son nom dans leur vocabulaire approximatif par “le chanceux”. Mais son succès vient de son activité personnelle ; je verrais plutôt la nuance de “puissant”, “tout-puissant”.
265Wapon est la falaise verticale au Nord de Lawadeng. La grotte qui s’y trouve à mi-flanc porte aussi ce nom. En temps ordinaire, on dit que c’est un yaac. La vieille Wapica en faisait un si-re-yaac, un compagnon des yaac, qui les fréquente et prend leurs manières de faire. La variante est secondaire pour le sens du mythe.
266Wapon est revendiqué maintenant par les si Tapep(a) et les si Thuba. Les si Tapep(a) parce qu’ils ont habité dans cette région au moment où les si Tadeng avaient leur chefferie à Tacebeu, au sud de Peyec. Les si Thuba parce qu’ils occupent la région. Mais selon le chef Jean Sinewami, Wapon fut le yaac des Eletok du coin, que les si Tadeng massacrèrent : si Waba-mirur, si Tenekot, etc.
267Wapon est porté comme nom d’homme actuellement chez les si Tapep(a), les Maacaran, les si Thuahmijoc.
268Le vieux prend un cei, Lagenaria vulgaris, la gourde, appelée aussi wawen ; il y place deux petits oiseaux wasisi. Wasisi est le “méliphage à oreillons gris”, Lichmera incana incana. C’est un nom d’homme si Pula. Wasisi-hna-dra = “Wasisi ensanglanté” est le nom d’un yaac femme si Tahned, et un nom de femme si Xacace.
269Un sens historique de ce mythe ne parait pas maintenant évident. Il doit s’agir d’un des nombreux mythes fondant la religion des anciens Maréens. Si Wapon a été le yaac des anciennes populations de la région, son mythe doit se rattacher au cycle des gens de Ma, dont viennent les si Wabamirur et les si Tapoboc. Du moins en a-t-il l’esprit.
270Wapon se présente comme un être puissant, maître du jour et de la nuit ; il rejette les offrandes des grands orgueilleux, et accepte l’offrande d’un petit garçon, qui avec ses petits poissons (ridicules pour un grand personnage) lui donne aussi sa peine. C’est cela que Wapon a agréé.
DOCUMENT 92. TAPEP(A) NE XACACE
271D’après Waag(a) si Tapep(a) de Cengeite. Texte maré d’Henri Siwoine.
2721/ Rue cahman ci hne i Wapon, si Tapep(a) komesa ka si Xacace komesa.
2732/ Bushengon ci yose sa ko re ete, bubudra. Ka bushengon hna koran o re ete omelei hnen o re ta gububudra.
2743/ Ka bushengon hna tize sa ko re ge, ka bushengon ci ane-tican o re thotho no re ete ne il o re ge, ne il o re dra no re ge.
2754/ Ka bushengon hna yose o re serei(e) bane son. Ka bushengon hna puti serei(e) ne hna thurul, ne hna itra-nion.
2765/ Ka bushengon ci tubunid o re kaze bushengon. Ka numu nen.
2776/ Ka bushengon ci ethawan o re kaze. Tapep(a) ci ie du Xacace : “Bo co cumon o re kaze, ka inu o re hmu.”
2787/ Ka hna ane o re ge ri hmu. Ka hado i Wapon, numu ete ni si Tapep(a), Pehmu, bane ane o re hmu, ne bane ruac ne bon.
2798/ Ka Tapep(a) ci ie du ete ri malu : “Ngei se ngom ci ser i Menaku, bua co ridi bone lu.
2809/ Ka ngei sere ngom i Med(u), bua co ridi bone lu jo ko.”
28110/ Ka o re ngom hna ridi hnei hmu, ci tango.
28211/ Ka Xacace ci ane o re kaze bon ri malu i Wapon. Ka bon ci nengoc ri malu omelei. Ka o re enengoco ni bon ekowe sese ne hmu.
28312/ Ka o re kaze ni Tapep(a) ne Xacace, bushengon tha thuni ko co enia-jeu. Buic si Tapep(a) ne si Xacace ace-re-soten.
28413/ Xacace ne Tapep(a) ci hue i Niri. Xacace o re doku no re ta kaze i Niri.
28514/ Bone hna ilon ne hna nue du nodei aca-nia. Ka o re nodei waceng me deko ma tace ci nue du mohmenew. Melei ta paace so.
28615/ Co itrani kaze, co yose sa ko re ge ni si Xacace. Ka o re kaze omelei nidi nene ko.
28716/ Ka o re ta ge ni buic kosoten, deko tharan. Athua.
2881/ Deux hommes restent à Wapon, l’un si Tapep(a), l’autre si Xacace.
2892/ Eux deux prennent une pierre, aragonite. Et eux deux ont gratté cette pierre là avec des morceaux d’aragonite.
2903/ Et eux deux ont arraché une dent, et eux deux ont mélangé la poussière de la pierre avec la dent, et le sang de la dent.
2914/ Et eux deux ont pris des plantes remèdes pour cela. Et eux deux ont craché les remèdes (dessus), et ont (les) ont attachés et ont ficelé en surliure.
2925/ Et eux deux essaient le paquet magique. Et il y a de la puissance.
2936/ Et eux deux partagent les paquets magiques. Tapep(a) dit à Xacace : “Tu garderas le kaze, moi le casse-tête.”
2947/ Et (on) a placé les dents dans le casse-tête. Et là-haut à Wapon, il y a une pierre des si Tapep(a). “Sur-le-casse-tête”, pour placer le casse-tête, et pour travailler avec lui.
2958/ Et Tapep(a) dit à la pierre dans la grotte : “Si quelqu’un se lève à Menaku, vous le frapperez.
2969/ Et si se tient quelqu’un à Medu, vous le frapperez également.”
29710/ Et la personne frappée par le casse-tête, meurt.
29811/ Et Xacace pose son paquet magique dans la grotte de Wapon. Et il parle dans cette grotte. Et la parole de lui est à égalité ensemble avec le casse-tête.
29912/ Et les sorcelleries de Tapep(a) et de Xacace, elles deux ne peuvent pas se nuirent mutuellement. Eux les si Tapep(a) et les si Xacace sont “proches”.
30013/ Xacace et Tapep(a) vont à Niri. Xacace est le chef des kaze de Niri.
30114/ Il en a fait et les a laissés aux aca-nia. Et les paquets magiques qui ne sont pas forts, (il les) laisse aux femmes. Ce sont des paac seulement.
30215/ Pour ficeler (= faire) un kaze, il faut prendre une dent des si Xacace. Et ce kaze-là est très puissant
30316/ Et les dents des autres, pas de résultat. Fini.
Commentaire
304Tout le monde veut concourir à la révolution qu’a représenté l’introduction du kaze, à Maré. Après le tour des si Tae, c’est celui des si Tapep(a) qui se trouvait à Wapon. Il s’agit de la grande falaise et de la grotte qui s’y trouve à mi-flanc, ainsi que du terrain en contre-bas, situés à environ 500 mètres au Nord de Lawadeng.
305A cette époque, si Tapep(a) et si Tae étaient sujets des si Tadeng, situés eux-mêmes à Tacebeu, au Nord-Ouest de Lawadeng et au Sud-Ouest de Wapon.
306La grande magie des si Tapep(a) était le wahmu-re-Nengone, “le petit casse-tête de Maré”. Ils se moquent des si Tae qui prétendent l’avoir sous le nom de wahmu i Nengone.
307Les si Tapep(a) étaient les aca-nia des si Tadeng. Le précédent récit nous montre une collaboration entre si Tapep(a) et si Xacace à Wapon, avant de partir à Niri. Un récit des si Tae (D 89) admet la venue des si Xacace dans la région.
308Le rocher magique des si Tapep(a) renforcé par l’aide des magies des si Xacace se montre aussi efficace que le kaze de ces derniers. Les localisations des gens qui “se lèvent” sont modernes. C’est une manière de montrer la puissance de ces sorcelleries qui agissaient à distance dans tout Maré.
309Les si Tapep(a) étaient donc les détenteurs du hmu = casse-tête. Le fait en est conservé par le nom d’homme si Tapep(a) : Si-o-re-hm(u) = “promettre le hmu”. Quelqu’un avait-il besoin de la magie des si Tapep(a), il allait trouver leur chef de clan. Celui-ci le congédiait, après avoir reçu des présents de “richesses” et des ignames wakunic qui donnaient de la puissance, nen. Puis il allait prier sur la pierre où se trouvait le waceng (= paquet magique), le hmu. Le vieux avait promis l’aide de sa sorcellerie et l’ennemi périssait. La pierre-support du waceng d’après Alexandre Alan si Tapep(a) s’appelait Banac = “crâne décharné”. Selon Alexandre Alan, le hmu était si puissant, que leurs sorciers pouvaient se rendre invisibles, et frapper l’adversaire avec n’importe quoi, même à mains nues, et il mourait !
310L’aide du wahmu-re-Nengone fut demandée pour le massacre des Eletok, des si Xacace en particulier, bien que des si Tapep(a) fussent parmi les aca-nia de ces derniers, cf. D 8. Il servit à faire la puissance des si Ruemec qui avaient demandé son secours ; et il fit le tour de l’île, de Mebuet à Pewaet. On a caché ce hmu dans une grotte difficile d’accès de la région de Murudeng, dans le Sud-Est de Cerethi. Le nata (pasteur indigène) Wakeziene savait encore en 1946 où se trouvait cette cachette.
311Les si Tapep(a) et les si Xacace se reconnaissent ace-re-soten parce que leurs kaze ne peuvent pas nuire aux membres de l’autre clan. C’est cette caractéristique qui aux yeux des Maréens définit cette relation de parenté. Nous avions constaté déjà cela entre si Xacace de Wabao et si Tae Rabuni Neng(o) (cf. D 89).
312Enfin le mythe nous montre les si Tapep(a) collaborant avec les si Xacace à Niri. En général, on montre les si Tapep(a) moins actifs à cet endroit. On se contente de dire qu’ils ont reçu des kaze à Niri, comme les autres aca-nia.
313Selon Waag(a) si Tapep(a), la sorcellerie nommée paac est un kaze manqué, qui a un nene déficient. Le kaze est fait pour tuer. Le paac, au pire, rend malade les petits enfants et fait peur au monde. C’est une sorcellerie qui permet de se transformer en boule de feu, en forme vaporeuse, en animal. Alexandre Alan m’a confirmé que le paac était un kaze manqué.
DOCUMENT 93. SI HNATHEGE
314Récit d’Alexandre Alan si Tapep(a). Il le tenait d’un Lifou d’origine si Hnathege n’ayant pas émigré, nommé Saikaene, et plus connu sous le nom de ceceni Mala = “père de Mala”. Il la raconta en 1939. Alexandre la rapporta en 1945. Texte maré d’Henri Siwoine.
3151/ Si Hnathege, buic koda ci hne i Driphu i Ruegunin. Buic mo-aca-nia, ka numu waceng re iru(e).
3162/ Ka o re yaac ni buic i Driphu Wamiare, o re wagi. Buic ci alan co ile ri pon ri gu-la-Mu, sei retok Bula, i Dhodh ne Hnakez.
3173/ Ka si Xacace aca-kaze, aca-nia ni Bula. Buic numu jo ko o re waceng. Ka o re si Hnathege hna pina jo ko i Dhodh ne Mu.
3184/ Ka o re re-celuani Bula ci icue i Mu, wen o re buic ci taedrengi ko buic ci alan co doku. Ka Bula ci ie du re-celuani bone ko : “Co ridi si Hnathege”.
3195/ Ka buic ci kaio si Xacace co ridi hnen o re kaze buic. Ka si Xacace ci ridi o kaze.
3206/ Ka o re si Hnathege ha sic. Buic hna te ri rue koe me hma.
3217/ Buic hna hue i Phuo. Buic ci ule ko o re nod ha nidi waam(i). Ka buic ci hue yawe.
3228/ Pina acenon o Dudun, hna nidi kokor ko re cele. O re rue koe ha etha hu(e).
3239/ O re koe ni retok Tahmuhm(u) hna thalo i Cara. Ka o re koe komesa hna kuri ca pina i Uzeri.
32410/ Buic ma thalo i Cara, o re si Hnathege ci ule ri cadracele sa ko re cenew, yaac ; ka buic ci eto bon o re yelen o re nod.
32511/ Ka ke bone ko : “Nengone !” (wen o re buic hna hnengon), yelen o re pedid, hado ri kurub(u), yelen Nengone.
32612/ Ke buic : “Numu ngom ?” – “E ! buhnij ci alan co ule, ice lo co ule Wakuarori.”
32713/ Ka buic ci pina i Wakuarori, ci meneng ne il o re serei Wakuarori acala ko re ran. Ka buic hna hne i Seg(u) ne Bone.
32814/ Buic hna atangoni o re guhnamenenge ni retok serei Wakuarori.
32915/ Ka o re yelen o re guhnen omelei Hnacadoku.
33016/ Ka si Hnathege ci ie du serei Wo : “Hne i buhnijom ; ne il o re waceng ni ehnij, ehnij ha co atangoni o re theren.”
33117/ Buic ci hu(ej ca pina i Du-re-hmu ni Tahmuhm(u). Buic hna la-Bon, ca pina i Hna-du-ri-ridr(i).
33218/ O re nodomelei o re rawa ni si Gurewo(e). Ka buic hna menengonomelei ne il o re si Gurewo(e) me doku.
33319/ Ka buic ci ule ko buic hmaiai ko re ngom bane iru(e), ka buic si Hnathege ci ridi o re toa-eat ni si Gurewo(e) hnei kaze.
33420/ Ka Waishitine ne re-celuani bon hna hu(e) i Pakad(a) co se ne si Hnathege. Ma pina ri nidin o re len, buic ci iseser(o).
33521/ Ka si Hnathege ci uane ko buic me engetac co ridi si Gurewoe, ma ha deko ko re toa-eat, ci ie ko : Orne guhne ni ehnij, ne il o re nod jo ko.”
33622/ Ka si Gurewo(e) ko : “Ko nge ? hnehnij hna ie ko : zi hne lu om ! ka buhnij ci ie ko : Rawa ni buhnij !”
33723/ Ka o re si Hnathege ci can o re ore rue yeteta i Guowel. Buic ci irue ko la ko re engetac.
33824/ Melei buic co cumone so o re gurawa. Ka o re si Gurewo(e) ha hu(e) i Pakad(a), Waishitine me hna-da.
33925/ Ka ma pina lu i cele, bone ci hnide lo, bone ci ule o re re-celu-ani bon, ma ha xaranum(u) ko re tako, hna ridi hnei si Hnathege.
34026/ Ka kei Waishitine ko : “Deko pengen inu co doku wen o re inu deko re-celuaien.”
34127/ Ka si Hnathege hna ridi si Gurewoe, ca pina tadan kaduo o Pakad(a) i Wegur. Onom melei ko re tapua ni Guelin si Tawai(e).
34228/ Ka osoten o re si Gurewo(e) ci te ri kenu ne ci hu(e) jew o Lothi, acenon o Pakad(a). Ka si Hnathege ci leu o buic.
34329/ Ka buic o re theren ci roi ko hna te ri peda, yelen Toa ni si Gurewo(e).
34430/ Ka o re si Hnathege hna yose di o re gurawa ni si Gurewo(e). Ka numu di osoten si Hnathege, hadri i Driphu : melei sei buic Mala ne Ceceni bon. Athua.
3451/ Les si Hnathege, eux autrefois, habitaient aux “Deux Sables” (=Luengöni). Ils étaient aca-nia, et ils avaient un paquet magique pour la guerre.
3462/ Et leur yaac à Lifou est Wamiare, un tas de pierre. Ils veulent être au-dessus (= dominer) dans la région de Mu, chez le chef Bula, à Dhodh et à Hnakez (?).
3473/ Et les si Xacace sont maîtres des kaze, aca-nia de Bula. Ils ont également un paquet magique. Et les si Hnathege sont arrivés également à Dhodh et à Mu.
3484/ Et les sujets de Bula (les) arrêtent à Mu, parce qu’ils entendent qu’ils (les si Hnathege) veulent être grands chefs. Et Bula dit à ses sujets : “Il faut frapper les si Hnathege”
3495/ Et ils (les sujets de Bula) appellent les si Xacace pour frapper par le kaze. Et les si Xacace frappent du kaze.
3506/ Et les si Hnathege se sont enfuis. Ils sont montés sur deux grandes pirogues.
3517/ Ils vont à Phuo. Ils voient que le pays est trop petit. Et ils s’en vont encore.
3528/ Arrivés près de Dudun, il y avait beaucoup de courant (dans) la mer. Les deux bateaux sont partis séparément.
3539/ Et la pirogue du chef Tahmuhm(u) a abordé à Cara. Et l’autre pirogue a été entraînée jusqu’à l’Ile des Pins.
35410/ Quand ils abordent à Cara, les si Hnathege voient sur le rivage une fille yaac ; et ils lui demandent le nom du pays.
35511/ Et elle : “Nengone !” (parce qu’ils ont interrogé = hnengon), le nom du haut de la falaise, là-haut dans l’intérieur, le nom Nengone (s’appelle…).
35612/ Et eux : “Il y a-t-il du monde ?” – “Oui ! vous voulez (le) voir ? montez voir Wakuarori.”
35713/ Et ils arrivent à Wakuarori, ils habitent avec les serei Wakuarori de nombreux jours. Et ils sont restés à Segu et Bone.
35814/ Ils font mourir la famille du chef des serei Wakuarori.
35915/ Et le nom de cet endroit-là est : “Là-où-on-a-fait-cuire-le-chef”.
36016/ Et les si Hnathege disent aux serei Wo : “Demeurez vous ici ; avec nos paquets magiques, nous allons faire mourir le reste.”
36117/ Ils vont jusqu’à “L’os-de-gaïac-de- Tahmu-hm(u)” (c.-à-d. un bois de tabou planté par Tahmuhm(u)). Ils suivent le sentier de Bone jusqu’à Hnaduriridr(i).
36218/ Ce pays-là est la terre des si Gurewo(e). Et ils ont habité là avec les si Gurewo(e) qui sont chefs.
36319/ Et ils voient que eux sont nombreux les gens pour la guerre, et eux les si Hnathege frappent les chefs de guerre des si Gurewoe du kaze.
36420/ Et Waishitine (si Gurewoe) et ses sujets sont allés à Pakad(a) pour se baigner avec les si Hnathege. Quand (ils furent) arrivés au milieu du sentier, ils se sont disputés.
36521/ Les si Hnathege pensent qu’ils sont forts pour frapper les si Gurewo(e), quand il n’y a plus de chef de guerre, disent : “Ici est notre place et le pays également” (= le pays est également à nous).
36622/ Et les si Gurewo(e) : “Qu’est-ce que c’est ? par nous a été dit : restez ici ! et vous dites que c’est votre terrain !”
36723/ Et les si Hnathege plantent deux “arbres aveuglants” à Guowel. Ils font la guerre (pour savoir) qui est (le plus) fort.
36824/ Là ils (les plus forts) garderont ainsi le terrain. Et les si Gurewo(e) sont allés à Pakad(a). Waishitine qui est le premier (= devant).
36925/ Et quand il arrive à la mer, il tourne la tête, il voit ses sujets alors nombreux les absents, ont été tapés par les si Hnathege.
37026/ Et Waishitine : “Cela n’a pas d’intérêt moi pour être chef parce que moi est sans sujets.”
37127/ Et les si Hnathege ont frappé les si Gurewo(e), jusque devant là-bas Pakad(a) à Wegur. Maintenant là est la sépulture de Guelin si Tawai(e).
37228/ Et d’autres si Gurewo(e) montent sur leurs pirogues et vont vers Lothi, près de Pakad(a). Et les si Hnathege les poursuivent.
37329/ Et eux les restants vivant encore sont montés sur le récif appelé : Siège-des-si-Gurewo(e).
37430/ Et les si Hnathege ont pris le terrain des si Gurewo(e). Et il y a d’autres si Hnathege là-bas à Lifou : là (= tels sont) Mala et son père. Fini.
Commentaire de D 93
375D 93 met en jonction la guerre des Xetiwa.n contre les Angete Lösi (cf. Guiart (86), p. 520) et l’arrivée de Ketiware à l’Ile des Pins. Ce dernier est certainement un Xetiwa.n d’Inangodh, cf. (86), p. 519-520.
376Le récit de Ceceni Mala nous fait venir les si Hnathege à Maré, de Luengöni (Lifou), Ruegunin en maré. Ils avaient une magie de guerre dont on ne nous précise pas la nature et un yaac identifié à un tas de pierres, nommé Wamiare ou Wamiari. Dans les mythes c’est un esprit femelle. Son nom est encore porté comme nom de femme chez les si Hnathege de Maré. Ces si Hnathege voulaient ravir la chefferie à Bula de Mu. Celui-ci semble bien avoir un certain apparentement avec les Xetiwa.n (cf. D 38, A et B). Les si Hnathege s’introduisent à Dhodh (qu’Alan prononçait Dhon) et à Hnakez (?).
377Bula les fait arrêter en particulier par les kaze des si Xacace. Nous voyons Bula placer un peu partout des atesi (les correspondants à Lifou des aca-nia à Maré) Caeè pour surveiller ou remplacer des sujets récalcitrants ou révoltés. Il est fait allusion généralement à la guerre entre les Angete Lösi et les Anga Haetra (86) p. 494, qui eut lieu vers 1848. Voir (86), p. 494, 501, 527, 528, 539, 540, 543.
378Ces luttes ne s’expliquent que par une mentalité ancienne à laquelle le récit D 93 fait allusion. Les anciens maîtres du pays se rebiffent contre une chefferie étrangère, celle de Bula, celle-ci semble-t-il étant une branche camouflée de Xetiwa :n. Cf. (86), p. 524-525.
379La tradition rapporte que les aca-nia des si Hnathege étaient aussi des si Xacace. Ils s’enfuirent avec leurs chefs. (86), p. 229 fait état de trois pirogues, dont l’une se perdit sur la Grande Terre et l’autre aborda à Maré, sur la côte de Guama.
380D 93 confirme pratiquement cette tradition bien qu’elle ne connaisse que deux pirogues, celle qui a abordé dans la région de Cara, et celle qui a amené la nouvelle chefferie de l’Ile des Pins.
381Les si Hnathege, avec leurs aca-nia si Xacace, ne sont au plus que quelques dizaines à leur débarquement. Ils trouvent en place une population nombreuse, comme l’attestent les nombreuses traces de culture des Eletok. D’ailleurs, le mythe le dit explicitement. Après un séjour à Nengone, les si Hnathege s’installent comme sujets des serei Wakuarori, d’origine si Thuahmijoc, qui eux sont puissants. Les si Hnathege ne peuvent pas les attaquer de front. Ils le font par leurs kaze manipulés par les si Xacace, sans doute ceux de Purem (cf. D 88 et surtout D 89). Il a fallu un certain temps, procéder par paliers, jusqu’à la scène finale où selon le chef Stéphane Waikedr, le chef Yeiwene serei Wakuarori est passé au four et mangé à Hnacadok(u), sur le plateau dominant Nece de Guama.
382Pour occuper la place vide, les si Hnathege placent les serei Wo, également d’origine si Thuahmijoc, avec lesquels ils étaient alliés par des mariages. C’est l’origine de la chefferie des serei Wo de la région de Betcéda, chefferie qu’ils garderont jusqu’après le massacre des Eletok.
383De leur côté les si Hnathege occupaient la région de Bone de Guama d’où proviennent plusieurs de leurs noms de sous-clan : sere ri Bon, leur ancienne chefferie qui sera déchue au profit des serei Seg(o) lors de leur séjour à Ceni de Rekabeco. Leurs aca-nia kogo étaient les si Anum(i). On comptera encore comme sujets les si Owi et les serei Yaw. Owi est au Nord-Ouest de Kaewatin et Yaw du côté de la presqu’île de Rekabeco.
384Il s’écoulera alors un temps assez important pour que le souvenir de leur arrivée s’estompe dans le temps, et qu’on les considère comme les vrais maîtres du pays, comme Eletok.
385Cela dura jusque vers la fin du xviiie siècle. Les Acakaze les vainquirent et les forcèrent à se réfugier chez eux, à Ceni près de Rekabeco. Selon la tradition, les Acakaze firent dégringoler de la falaise de Ceni les jeunes gens si Hnathege qui remontaient un grand filet aderua. Les survivants s’enfuirent pour la plupart à Gurewo(e). Ils rencontrèrent à Hnadu-ri-ridr(i) Wapurune si Ruemec et Cocokat si Tadeng qui venaient de massacrer les si Xacace de La Roche.On recherchait les survivants dispersés et dissimulés dans la brousse. Ces deux chefs accueillirent les fugitifs et les placèrent chez Waishitine si Gurewo(e). Comme cet épisode n’est pas glorieux, le récit de Ceceni Mala l’escamote. Il se contente de l’euphémisme : Les si Hnathege passèrent par le sentier de Bone jusqu’à Hnaduriridr(i).
386Les si Hnathege étaient assez nombreux et restèrent suffisamment de temps dans cette nouvelle région pour remplir d’ossements l’ossuaire de Medith(i) où Sarrazin prit ses échantillons d’os maréens.
387Puis le récit nous raconte l’épisode de Lataijaij(a) sur le sentier de Hnaenedr à Pakad(a) : les jeunes gens des deux tribus si Gurewo(e) et des si Hnathege devaient courir sans faire bouger les pierres entassées de cette portion du sentier. Les si Hnathege avaient mis une pincée de sable sur les pierres branlantes. Ils n’en firent bouger aucune. Ils avaient également pris la précaution de dissimuler leurs armes. Les si Gurewo(e), forts de leur bon droit, contestèrent le résultat. Cette scène avait lieu après la plantation symbolique par les si Hnathege et l’arrachage des deux ye-teta. C’est alors que les si Hnathege commencèrent à massacrer les si Gurewo(e). Les sujets s’enfuirent à Toka et leur chef, Waishitine, alla du côté de La Roche, sur les flancs de laquelle il est enseveli. Vient de Waishitine, Marie Nitro, mère d’Hippolyte Wathodrawa, mon informateur. L’histoire de Ceceni Mala s’arrête là.
388L’étymologie tirée de hnengon = interroger n’est qu’un jeu de mot sans valeur philologique. Ce mot possède le même radical que nengo-c = parler. Il correspond aux formes ngo à San Cristoval, manga à Vaturanga, Florida.
389Le centre du territoire des si Hnathege est à Du-re-hmu ni Tahmuhm(u), ainsi nommé en souvenir d’un bois de gaïac planté par un certain chef si Hnathege, Tahmuhm(u), identifié maintenant avec celui qui débarqua de Lifou. Il montrait ainsi la place de son territoire. Mais il faisait surtout cela pour la gloire du nom : bane mece yelen.
390Le mythe D 93 apparente les si Hnathege aux Xetiwa.n de Lifou. Leur origine lifoue est confirmée par quelques noms : Ngayohni, Mala, Siaze ou Siazengo qui est le nom d’une de leurs femmes yaac. Mais cela n’est pas très probant, car beaucoup de noms lifous sont portés à Maré. Il faut excepter celui de Siaze car c’est celui d’un yaac.
391Ils portent aussi des noms polynésiens : Aliki = “grand chef”, Kainga. Kainga désigne le lien de consanguinité à Tonga, Lau, Futuna, Tokelau, cf. (44), p. 137. Kainga à Tonga, ’ainga à Samoa est toute la parenté oùl’on peut trouver à manger, quelle que soit sa dispersion dans l’archipel, cf. (183), p. 118 ; à Uvéa, kainga renvoie à une lignée patrilinéaire.
392Shongi-ne = nom de femme. Chongi = nom maori cité par Dumont d’Urville.
393Suivant la coutume des Xetiwa :n de Lifou, les si Hnathege ont supplanté les anciens occupants par le massacre, puis ont essayé de se camoufler en se donnant un état-civil maréen. Mais ils auront à subir les contre-coups de cette politique sanguinaire. Après avoir massacré, ils se feront massacrer et expulser.
DOCUMENT 95. SI TADRERE I
394Récit d’Abraham Manane donné en 1966.
3951/ Ma ci hue bot serei Driphu ko re ta kaze, bone ci kuru lo Hna-ca-uc. Bone ci hue bot serei Comekumo.
3962/ Ka o re kaze inom o re rue waicahman. Ka o re rue waica, hna kuru lo wenei malu i Hnacauc.
3973/ Ka tha thuni ko co cori bushengon. Ka ri ezien omelei, o re si Hnathege ci hne i Cadralo thu co cori o re rue waica.
3984/ Ka si Hnathege hna ie jew o re si Tadrere ko numu serei(e) bane son, o re hnizi.
3995/ Ka o re si Tadrere ci ane o re hnizi ri kuru no re malu i Hnacauc, ma be tako kei rue waica.
4006/ Ka bushengon ma pina, ci alan co ru lu ri kuru, ka ha thingi. Ka o re si Tadrere hna cori bushengon. Ha athua.
4011/ Quand est venu de Lifou le kaze, il est sorti à Hna-ca-uc (= là où on a fait cuire le poulpe). Il vient de Comekumo.
4022/ Et le kaze est comme deux petits garçons. Et les deux petits garçons sont sortis du trou de Hnacauc.
4033/ Et c’est impossible de s’emparer d’eux deux. Et en ce temps là, les si Hnathege demeurent à Cadralo pour se saisir des deux petits garçons.
4044/ Et les si Hnathege ont dit aux si Tadrere qu’il y a une plante-remède pour cela, le hnizi.
4055/ Et les si Tadrere ont placé le hnizi dans le trou de la grotte de Hnacauc quand sont encore absents les deux petits.
4066/ Et eux deux quand (ils) arrivent, veulent s’enfoncer dans le trou. Et les si Tadrere se sont emparés d’eux deux. C’est fini.
DOCUMENT 96. SI TADRERE II
407Récit d’Abraham Manane.
4081/ Hadu i Kumo, melei Xepenehe, numu ngom ; bone ci co there nod, ha le bon ru lu ri rawa, ha le me kuru i Mu sei Cō.
4092/ Seromelei i Mu sei Co, ha le bon me ru lu ri cele, ca kuru hadri Thogon. Bone me kuru i Thogon, ha le me uianet, xara rewe ko re haicahman.
4103/ Ha le bushengon me ci ie : “Ome ko re nod me aceni”. Bushengon ci hu(e) co there nod.
4114/ Ha le bushengon ci ule o se ace bushengon ci pareuon.
4125/ Bushengon ci sice yawe jew o re malu ni bushengon hna kuru bot.
4136/ Numu ta serei Thogon ha ule bushengon : “We ! numu rue haicahman !”
4147/ Ka hnei buic hna lewe bushengon hna sice yawe ri malu. O re ta ngom hna ule bushengon si Tadrere.
4158/ Ha le me si Tadrere ci lae natane ko : “We ! numu rue haicahman, ka tha thuni ko co cori”.
4169/ Ri ezien omelei si Hnathege ci meneng sei buic si Tadrere, i Kaewatin ca pina i Thogon.
41710/ Ha lei si Hnathege me ie du si Tadrere ko : “Ngei buhnij ci alan co cori rue haicahman, hue co yose o re serei(e) sei serei Wadrere.
41811/ Ilei serei Tadrere me yo o se serei(e). Ka ma rue haicahman co hue ha mezoi, ha le buic me puse o re serei(e) ri peicen o re malu.
41912/ Ma co sic o re rue haicahman ri malu, ke di ma ha thingin, me deko len.
42013/ Ha le buic si Tadrere ci cori bushengone lu, me ci ure bushengon bane doku ni buic.
42114/ Tei retok Gocene, yeleni bon Comekumone ; ko wen omelei, o re serei Tadrere ha ci kaione di Acakaze.
4221/ En bas à Kumo (c.-à-d. à l’Ouest), là à Chepénéhé, il y a quelqu’un ; il va chercher du pays, alors il s’enfonce dans la terre, alors il sort à Mu chez Co.
4232/ De là à Mu chez Co, alors il s’enfonce dans la mer, puis sort là-bas à Thogon. Lui qui sort à Thogon, alors il est un esprit (m. à m. esprit de mort), deux garçons.
4243/ Alors eux deux disent : “Voici un pays étranger”. Eux deux vont voir le pays.
4254/ Alors eux deux voient une chose, eux deux ont peur d’elle.
4265/ Eux deux s’enfuient encore vers la grotte d’eux deux sont sortis.
4276/ Il y a des gens de Thogon c’est vu eux deux : “Hé ! il y a deux garçons !”
4287/ Et par eux ont été suivis eux deux se sont enfuis encore dans la grotte. Les gens qui ont vu les deux (sont) des si Tadrere.
4298/ Alors les si Tadrere annoncent que : “Hé ! il y a deux garçons, et c’est impossible de s’en emparer.”
4309/ En ce temps-là les si Hnathege demeuraient avec eux les si Tadrere, (de) Kaewatin jusqu’à Thogon.
43110/ Alors les si Hnathege disent aux si Tadrere : “Si vous voulez vous emparer des deux garçons, allez prendre une plante-remède chez les serei Wadrere” (actuellement sujets des serei Wo).
43211/ Alors les serei Tadrere prennent un remède. Et quand les deux garçons vont là-bas, ils crachent le remède dans l’ouverture de la grotte.
43312/ Quand pour se sauver les deux garçons dans le trou, mais alors est fermé, qui est sans chemin.
43413/ Alors eux les si Tadrere prennent les deux, qui choisissent eux deux pour être leurs chefs.
43514/ Le fils du chef Gocene, son nom est Co-me-Kumo-ne ; que de là (= à partir de ce moment) les serei Tadrere sont appelés vraiment Acakaze.
Commentaire de D 95 et D 96
436Ce double récit reprend mot pour mot le texte de D 7. Il est probable qu’Abraham Manane a été un des principaux informateurs qui ont inspiré l’article des Etudes Mélanésiennes.
437La tradition est l’application locale aux si Tadrere de l’arrivée du kaze à Maré (cf. Géographie mythique et traditionnelle de Maré, p. 328-330, et D 85). Le mythe nous présente les si Hnathege n’ayant pas encore de territoire propre et séjournant chez les si Tadrere au Nord et Nord-Ouest de Wakuarori, dans la région de Cadralo à Thogon.
438Ces mythes font remonter à l’origine de la migration qui donnera la chefferie des si Tadrere, à Kumo. Ceci nous ramène à l’arrivée des si Xacace, cf. D 85. Ils passent par le pays des Acakaze, cf. D 85, 87, 88, 89, y laissant des kaze, d’où le nom d’Aca-kaze = “propriétaires de kaze”. Mythiquement le kaze vient de Kumo, passe par chez Co, c.-à-d. chez le chef Bula de Mu. Il sort à Maré, après un voyage sous marin au trou de Hna-ca-uc, près de Thogon, territoire des si Tadrere.
439Le mythe des petits garçons dont on ne peut se saisir qu’à l’instigation des si Hnathege signifie que ces derniers sont à l’origine de la chefferie des si Tadrere. Eux-mêmes se sont adjoints aux si Lehmi pour former les Aca-kaze, sans chefferie dominante du reste. Le groupe des Aca-kaze restera toujours un peu anarchique, aucun chef ne voulant se soumettre à un pair. Ces chefs se donneront l’épithète de kae-waejekol = “une nichée d’étoiles”, tous voulant briller également. Au moment du massacre des Eletok, le chef si Lehmi retok se verra contesté. Ses sujets lui diront : “Wegogo ne ya ko re doku ni nubo” = “regarde donc c.-à-d. occupe-toi donc de ta chefferie”, contente-toi de recevoir les présents et laisse nous faire la guerre que tu n’as pas le courage de faire. (Chant Kacahmi ne Sipane).
440Les serei Wadrere fournissent comme remède le Ihizi ou nhizi pour s’emparer des deux petits garçons. Cette plante est une Labiées, probablement Plectranthus parvifolius et d’autres espèces comme ocimum sanctum. C’est un remède contre le rhume des bébés, également un abortif. Hnizi xexe = “le hnizi qui rampe” est un remède de neticehnon = guérisseur qui retire les objets introduits dans la viande de son prochain par le paac. Elle entre dans la magie pour faire la paix, d’après le chef H. Hnaisilin.
441Je n’ai pas de détail sur l’origine des serei Wadrere. Ceux-ci dans le courant du xixe siècle donnaient le présent puec aux serei Wo, et sont comptés maintenant comme tels bien qu’ayant une origine différente d’eux. Cf. (86), p. 306.
442La prise de pouvoir de la nouvelle chefferie ne s’est pas toujours passée pacifiquement. Le sentier de Cadralo à Ekur s’appelle : La-wadra-ni-rue-waica = “le sentier de la goutte de sang des deux petits garçons”, (cf. Géographie mythique et traditionnelle de Maré, p. 353-354). Sur le sentier de Ceni, il nous est dit qu’un rocher, Waica me cel = “le petit garçon cadet” voyant venir l’ennemi qui voulait frapper son aîné Waica me tok, a enlevé son propre plumet, yemen, passant ainsi inaperçu, a laissé passer l’adversaire, l’a frappé dans le dos, sauvant ainsi son aîné.
443Un peu plus loin, un petit rocher est la case des guerriers, tacaere, par où sont entrés les guerriers. L’ennemi venait, comme dans le premier cas du sud. Waica me cel a fait un autre petit trou, est sorti par là pour frapper l’ennemi dans le dos.
444Les si Tadrere représentaient un groupe ethnique tranchant sur leur entourage. Ils étaient de grande taille, comme l’atteste également leur mesure des nombrils, Hna-tuo-wadid, sur le sentier de Ceni. Ils avaient la peau très foncée (Abraham Manane).
445Selon (86), p. 363, note 2 reportée en p. 364, le clan Anga Haetra : Wawalahae s’identifierait aux Acakaze si Tadrere de Kaewatin.
446Les Acakaze si Lehmi dont nous parle D 7, possèdent un mythe semblable à celui des si Tadrere, avec une localisation différente. Ils proviennent de deux petits garçons, Watu et Drawine. Ceux-ci sont sortis d’un trou, Malu ni Watu ne Drawine, situé près du sentier de Menaku à Cadralo, dans la forêt. Ces deux lutins, maica, sont des yaac de Pakazenir(i) qui est donné comme le premier chef des Acakaze si Lehmi retok.
447Les si Lehmi si Roi occupent le terrain des si Lehmi retok à Menaku après le massacre fait en 1861 par Hnaisilin Nidoish(i).
448L’ensemble des traditions de la région me fait supposer que l’origine des si Lehmi est contemporaine de celle des si Tadrere. La division entre si Lehmi retok qui se réclament de Watu et Drawine, et des si Lehmi si Roi, dont le lieu d’origine est Roi à l’Ouest de Lion, a dû venir plus tard. Ces derniers ont pour chef Cuewapuru = “accompagner Wapuru-ne” chef si Ruemec, fugitif de Dranin, probablement à la suite des luttes entre si Ruemec et si Gurewoc. Il s’agit d’une guerre que je date des environs de 1820. A la suite de leur victoire, les Acakaze portèrent les noms de Cue-wapuru et de Kuma-Kal. Ce dernier n’est pas un yaac mais un homme.
449Voir (86), p. 306, la tradition concernant l’origine des si Tadrere. A Mu de Lifou leur nom serait si Wawa. Ce dernier nom pourrait être l’abréviation de Wawalahae leur clan d’origine à Kumo (p. 393).
DOCUMENT 97. KAZE RI WOC
450Paroles de danse pehua : Be ko be, dansée en avril 1944 par les si Medu du chef Alfred Kaiwhatr. Paroles données le 17 avril 1944 par Ferdinand Wathodrawa.
451Refrain :
4521/ Be ko be ae.
4531/ Frappez donc, frappez ! aé
4542/ be ko ba.
4552/ frappez donc, frappez.
4561er couplet :
4573/ Be i kaze ri woc
4583/ Frappez du kaze de la brousse
4594/ itranine lu ko,
4604/ liez le bien (le kaze),
4615/ yengu ri hnawawa,
4625/ le vent est sur le champ de bataille
4636/ wawane Ruecil
4646/ on va à Ruecil
4657/ wawane lu Pakad(a)
4667/ on descend à Pakad(a),
4678/ theitheicoon
4688/ on arrache encore = et puis encore.
4699/ ci hai Pawaroi
4709/ on contemple Pawaroi,
47110/ theitheicoon
47210/ on arrache encore,
47311/ ci hai Padewia.
47411/ on contemple Padewia.
47512/ be ko be ae
47612/
47713/ be ko ba.
47813/
4792e couplet :
48014/ Watyaluma
48114/ Watyaluma
48215/ raba, raba, raba,
48315/ guette, guette, guette,
48416/ raba Makalua.
48516/ guette Makalua.
48617/ trotro nineko ?
48717/ “où dois-je aller ?”
48818/ hwako nineko,
48918/ “je suis monté là-haut.”
49019/ Gurewoe parac(a)
49119/ Gurewo(e)
49220/ nue lu Parapeu
49320/ laissez Parapeu,
49421/ tha te lui loi y a
49521/ …………
49622/ be ko be ae,
49722/ ...............
49823/ be ko ba.
49923/ ...............
5003e couplet :
50124/ Kukuama celan
50224/ …………
50325/ noda yeco
50425/ au pays des yeco
50526/ ukesinane lu
50626/ faites la torche (?)
50727/ ne sineunamaea
50827/ et incendiez la maison (?)
50928/ uke lu ri mayo
51028/ détachez là-bas,
51129/ lo na ithithir
51229/ qui a hérité (?)
51330/ doku ni Ketiwan
51430/ la chefferie de Ketiwan
51531/ ha iru iru kom
51631/ a combattu combattu ici,
51732/ sia i wayaw
51832/ envoyé à wayaw
51933/ ha i-sia ko Dreudreu
52033/ a envoyé Dreudreu (?)
52134/ me lue Padaw(a)
52234/ et les deux Padaw(a)
52335/ ke cie hna wedreng
52435/ ...............
52536/ ru lu i Adong(o)
52636/ s’enfonce à Adong(o)
52737/ be ko be ae,
52837/ …………..
52938/ be ko ba.
5304e couplet :
53139/ Wewe lu anga yo,
53239/ Ils descendent là-bas.
53340/ eraba eonin
53440/ épient ensemble
53541/ there lo ninem
53641/ cherchent
53742/ hnei sa i wayaw
53842/ par un de wayaw
53943/ there lo ninem
54043/ cherchent
54144/ hnei sa i wayaw
54244/ par un de wayaw
54345/ rue Malanyim
54445/ les deux Malanyim (?)
54546/ i kaze ri woc
54646/ le kaze de la brousse
54747/ i wawa ri eng(o)
54847/ va (ou) combat sur le vent
54948/ there la anuma
55048/ cherche le sentier
55149/ tha numa numa ko
55249/ cherche va va,
55350/ ea Wahmirat
55450/ Wahmirat
55551/ be ko be ae,
55651/ .............
55752/ be ko ba.
55852/ ............
5595e couplet :
56053/ Wewe lu Lolong(o)
56153/ Va à Lolong(o),
56254/ thede lu yewe
56354/ revient en glissant (= planant)
56455/ ale ale ri woc,
56555/ nage, nage dans la forêt
56656/ gurepedibaroi
56756/ morceau de petite anguille
56857/ kome ca Tronem(u)
56957/ Ici est Tronem(u).
57058/ hna uni Weliehme,
57158/ On a trouvé Weliehme,
57259/ Di re hne dra era
57359/ Présent à l’aca-nia, et drera,
57460/ tice naca-xeje
57560/ la grande frégate s’en va
57661/ be ko be ae
57761/ .............
57862/ be ko ba.
57962/ ………..
580Pour les finales :
58163/ he a e ie ie o
58263/ he ae, il dit celui qui
58364/ be i kaze ri woc
58464/ frappe du kaze de la brousse
58565/ hanga ? i ngai !
58665/ ………….
Commentaire et explication
587J’ai noté ce chant en 1944 après une danse des gens de Medu. Le principal informateur a été Ferdinand Wathodrawa si Thuahmijoc de La Roche. Son texte m’a été légèrement corrigé pour compléter quelques omissions, et on a essayé de m’en donner une traduction, sans grand succès du reste. Ce chant est composé en Maré, Lifou avec des mots inconnus. On dit que c’est : era ni mo-yaac wene ri malu = un chant des génies venant des grottes. Le lifou est lui-même très corrompu, et le maré comporte un certain nombre de licences poétiques, ce qui ne facilite pas la tâche du traducteur.
588Cette danse appartient à la catégorie dite : pehua = fehoa en qene dehu. Le pehua est une danse de guerre qui raconte l’histoire. C’est un chant assez long avec plusieurs couplets. Dans le cas présent, il s’agit de Kaze ri woc = dieu dans la brousse ou la forêt. Kaze ri woc est une yaac femelle du marais de Wabao. Cf. (86), p. 283. De par son nom, elle appartient à l’apport des si Xacace. C’est pourquoi les si Hmed disent qu’elle leur appartient. Mais comme les si Thatha étaient devenus les maîtres d’une partie de ce marais, et que les si Medu serei Hna-Ule s’en sont faits les héritiers après les avoir massacrés, ces mêmes si Medu la réclament maintenant pour eux et dansent ce pehua qui, semble-t-il, raconte les premiers exploits du kaze à Maré.
589Le refrain répète qu’on doit frapper du kaze : be = “frapper”. Ba est une licence poétique pour be.
590v. 3/ L’i après be peut être le possessif en dehu, correspondant au ni maré ; ou un ancien pronom singulier 3e personne que l’on retrouve dans la composition i-re-, équivalent de o re, et comme article dans le style archaïsant des toa-tit(i). On invite à frapper du kaze de la brousse. Il s’agit donc bien du kaze dont le centre de rayonnement fut longtemps à Niri, juste à côté de Wabao.
591v. 4/ itranine lu ko : Les Maréens ont forgé un mot technique itrani-n pour la fabrication du kaze, à partir du lifou itra = ael (en maré), qui est le pâté enveloppé dans des feuilles de bananier et ficelé avec des lianes pour être cuit au four des pierres chauffées. De même, le paquet magique du kaze est enveloppé avec du “tapa” = kaica, et lié. On maintient ainsi la consistance du paquet, et symboliquement on retient la puissance, nen, de celui dont on a pris les restes. Ni = “faire, fabriquer” en maré. Lu est un impératif euphonique. Ko appuie sur l’idée.
592v. 5/ yengu rihnawawa : yengu pour yengo = “vent”. Le vent est sur le champ de bataille = hna-wawa, comme nous dirions en français : le vent est à la guerre. Hna-wawa ne se dit que pour un terrain uni et découvert où peut s’étendre la troupe des guerriers en bataille rangée ; cela ne se dit pas pour un terrain accidenté ou couvert. Ce mot forme le nom d’individu Hna-wawa-ne, chez les si Medu serei Waguhmu si Hnawawa.
593v. 6/ Wawane Ruecil : Les gens de La Roche m’ont traduit en 1944 le mot wawan par “aller, descendre”, mais je pense que le sens complet est : aller en combattant. Wawa-n signifie “livrer bataille” pour des guerriers sur un terrain ad hoc. On va donc en combattant à Rue-cil, lieu près de Hnaenedr, au départ du sentier de Pakad(a). Il appartenait aux si Gurewoe lors de l’arrivée du kaze. En maré, rue-cil pourrait signifier faire-rejeter ; mais ce mot doit venir du lifou : lue-cil = “les deux se tiennent droit, debout, ou deuxième Cil”. Il peut être la transformation maréenne du nom de village lifou Luecila, dans le sud du district de Wetr, au nord de We. Cf. Guiart (86), p. 448, note 2 : Luecila appartient à la chefferie atesi d’Haudra (p. 381) ; elle aurait une relation peut-être d’origine avec les Angete Thup, sujets de Xetiwa.n à Inangodh, et avec Hnaweo de Ahmelewedr à Lôsi.
594v. 7/ Wawane lu Pakad(a) signifierait à mon sens : on descend en combattant à Pakad(a) le rivage des si Gurewo(e).
595v. 7/ Theitheicoon vient de theicoon = “effeuiller d’un coup sec”. Ce mot signifie : arracher beaucoup de fois, sans cesse. Il devient une ritournelle de chant avec le sens de : “et puis encore…”.
596v. 8/ ci hai Pawaroi : Hai intervient comme préfixe d’enfant qui grandit : hai-cahan, hai-cahman = jeune homme ; hae-row, hai-sia = jeune fille. Il entre comme préfixe dans certains noms propres de personnes : Hai-conge-ne, Hae-drera-ne. Il correspond au verbe haio-, haion qui a le sens de contempler avec complaisance quelqu’un avec l’espoir de le voir grandir, se développer. Haione lo ! = “réjouissez-vous !” (de la manière qu’on vient de dire). Ci haio Pawaroi ! = On voit avec plaisir le rivage de Pawaroi aux si Lawacele, le rivage du serpent-yaac Thashongone. Il faut se rappeler que les si Lawacele se réclament du Wageleda. (Cf. D 38 A et B).
597v. 11/ ci hai Padewia : on admire Padewia. Ce rivage, situé au Nord de Patho, devint dans le milieu du xixe siècle le heu de la chefferie de la branche aînée des si Gurewoc, celle des serei Yaw. Au moment de l’arrivée du kaze, les serei Yaw, qui proviennent des si Xacace de la branche d’Awanedr, n’existaient pas encore. Le pays était sous la haute allégeance des si Pecuaen, dont le rivage était Dranin. Padewi(a) devait appartenir à des Eletok de Cerethi sans que je puisse les déterminer avec exactitude. La guerre a été portée de ce côté.
598v. 14/ Watyaluma m’a été donné comme étant un nom d’homme.
599v. 15/ raba, raba, raba : raba signifie épier, guetter. (O re) raba est la cachette pour guetter. Comme terme de guerre, raba signifie se tenir en embuscade, à l’affût, pour surprendre l’ennemi.
600v. 16/ raba Makalua : il épie Makalua.
601v. 17/ trotro ni neko ? Trotro m’a été traduit du lifou par “marcher”. Tro = /ṭo/ correspond au maré co = “aller”. Tro entre en composition en signifiant “marcher”. Exemple : aehnatro “aller très lentement”, tro lica = “marcher sans bruit”, trolu = “marcher deux ensemble”. Ni = “moi” en dehu (pr. objet). Eka ? = “où ? ”. Trotro ni neko ? = “où dois-je aller ? ”.
602v. 18/ hwako nineko : m’a été traduit : “je suis monté là-haut”. Tryon (191) et (192) traduit “wp there” par e koho. Le sens serait plutôt : “dois-je monter là-haut ? ”
603v. 19/ Gurewoe parac : parac mot non-compris.
604v. 20/ nue lu Parapeu : laissez, abandonnez Parapeu (?).
605v. 21/ tha te lui loi ya : m’a été traduit : “frappez un ennemi”, sans doute de tha (en maré) = heurter, lancer sur quelque chose de dur pour briser, et (en dehu) = heurter, donner un coup à - ; te = avec, ensemble ; lui = particule d’orientation vers le bas, le large, l’Ouest : loi (dehu) = roi (maré) = “bien, de la manière qui convient”. Ya abréviation de yawe = “encore une fois, de nouveau”, ritournelle dans les chants.
606v. 24/ kukuama celan : non compris.
607v. 25/ nodayeco : noda pour nod = “le pays”, avec la finale a, Ye-co = l’arbre co, le Cerbera manghas. Mais on n’est pas plus renseigné sur ce pays des arbres co.
608v. 26/ ukesinane lu doit être du lifou corrompu : ukejina = /uke∂ina/ = “torche”, avec la désinence impérative maréenne. Ce verset me semble signifier : “mettez la torche”, incendiez. “La torche” = thena en Maré.
609v. 27/ ne sine unama ea : le mot sine est certainement le même mot que le sinan du verset précédent. En dehu, jinath - /∂inaθ/ = “allumer” ; uma = maison (?).
610v. 28/ uke lu ri mayo : En maré comme en dehu, uk = ébranlé ; uke lu = ébranlez ; ri = préposition de lieu en maré ; mayo particule locative, indique la direction transverse, parallèle au rivage, ou Nord-Sud, éloignée.
611v. 29/ lo na ithithir : en dehu, lo indique l’article défini en relation avec le passé ; hna particule verbale indiquant le passé. Ithithir se dit de celui hérite de la chefferie : doku ithithir = celui qui hérite de la chefferie. Cela me semble signifier : il hérite de la chefferie.
612v. 30/ doku ni Ketiwan : “de la chefferie de Ketiwan”. Mes informateurs ne connaissaient que Ketiwan si Waek(o). Mais Ketiwan n’a été donné comme nom chez les si Waek(o) que dans le cours du xixe siècle, m’a-t-on dit à Ro, à cause de la protection des Lifous. Le chant Be ko be est plus ancien. Il doit s’agir de la vraie chefferie des Xetiwa.n.
613Malgré son obscurité le chant Be ko be met l’action du kaze en relation avec les Xetiwa :n.
614v. 31/ ha iru iru kom : iru de i-ru(e) = m. à m. “travailler ensemble”, c.-à-d. combattre. “On a combattu et combattu ici”.
615v. 32/ sia i Wayaw.
616v. 33/ ha isia ko Dreudreu : non compris. Il est possible qu’il y ait un jeu de mot entre sia = envoyer, et haisia = petite fille, d’autant que haisia est suivi de ko Dreudreu qui est considéré comme étant un nom de personne. Celui-ci serait Dreu-ko euphémisme employé au lieu du nom exact Dre (= re) -u-me-uedr = “le pénis malade” nom si Cohmu, donné cependant à des femmes et passé chez les si Tae et les si Tapep(a). Comme ce qu’il rappelait n’avait rien de glorieux (cela doit signifier que le clan n’est pas en force), on le remplaçait par Dreuko = “le pénis est comme il est”. Les deux versets pourraient signifier : “On a envoyé à (wayaw ritournelle) la fille Dreuko”. Ceci fait allusion à une relation entre le kaze ri woc et les si Cohmu. Cf. D 88. Conformément au mythe D 88, le chant be ko be nous montre le kaze visitant les régions de Gurewo(e) (cf. Ruecil, Pakada), de Wakone (cf. Adongo, v. 36), de Cerethi (Pawaroi, Padewia). Et maintenant, il arrive chez les si Cohmu, dont le chef est Wa-u-me-bo-ne = Wa, le vieux ; u-me-bo = “pénis qui sent” ; ne, désinence respectueuse.
617v. 34/ me lue Padaw(a) : Ferdinand Wathodrawa avait écrit Pakad(a), mais on m’a fait corriger en Padaw(a). La phrase est en dehu : “et les deux Padaw(a)”. Il doit s’agir de celui du Sud de Maré, à quelques centaines de mètres à l’Est de Niri et de Wabao ; et de celui du district de Guama à 2 kms au Sud de Hna-cede-re-kaz. Ce dernier pouvait à la rigueur servir de rivage aux gens de Wakuarori et de Purem.
618v. 35/ ke cie hna wedreng : incompris.
619v. 36/ ru lu i Adong(o) : s’enfonce à Adong(o). Mes informateurs m’ont dit qu’Adong(o) est un terrain situé dans la région de Pénélo. Jusqu’à présent je ne connais qu’un seul Adong(o), rivage situé au nord de Hnadidi appartenant aux si Asu, mais qui a dû faire partie du premier territoire des si Hnadid.
620v. 39/ wewe lu anga yo : wewe m’a été donné comme étant le redoublement de hufe) = aller. Anga en dehu est un préfixe de respect qui se met maintenant devant les noms de personne, mais je crois que yo est une particule d’orientation. Le sens pourrait être : ils descendent là-bas.
621v. 40/ e-raba eonin : e- = préfixe de pluralité de sujets du verbe : ils épient ensemble. Eonin pourrait être le dehu : eohnin = anxieusement.
622v. 41/ there lo ninem : there = regarder avec intensité, chercher quelqu’un ou quelque chose. Ninem : non compris.
623v. 42 et 44/ hnei sa i wayaw : il est cherché par quelqu’un (de wayaw, ritournelle).
624v. 45/ rue Malanyim : les deux Malanyim. Malanyim m’a été donné comme étant un nom propre de personne ; à moins que ce ne soit : rue Mala nyima (en mélangeant le nengone et le dehu ce qui est très fréquent dans ce genre de texte) = “les deux Mala chantent”.
625v. 46/ i kaze ri woc.
626v. 47/ i wawarieng(o) = le kaze de la forêt va (peut-être : en combattant) sur le vent. Ri eng(o) pour : ri yeng(o). Le kaze se déplace en volant comme le font encore ses homonymes et les paac.
627v. 48/ there la a numa : cherche le chemin pour aller. La- préfixe de chemin ; numa = aller.
628v. 49/ tha numa numa ko : verset ambigu. Tha peut signifier fracasser, et à la rigueur ici il peut être la contraction de there = chercher. Numa peut avoir les deux sens : rire ou aller.
629v. 50/ Ea Wahmirat : ea ritournelle. Le kaze va jusqu’à chez Wahmirat représentant les si Thunu de Dradrac.
630v. 53/ Wewe lu i Lolong(o) : (le kaze) va à Lolong(o). Ferdinand Wathodrawa avait écrit : wewe lui Lolo. Lolong(o) serait du côté de Penelo. Il me semble que la phrase est du dehu corrompu : wewe lu i lolo = (le kaze) avance en glissant en rampant comme une petite anguille gu-re-pedibaroi (v. 56), il est magnifique (lolo).
631v. 54/ thede lu yewe : revient (yewe) comme en glissant sur la vague (thede).
632v. 55/ ale ale ri woc : nage, nage dans la forêt. Le kaze se déplace en volant comme un champion glisse sur la vague qui le porte, comme une anguille nage en glissant.
633v. 57/ kome ca Tronem(u) = “ici est Tronem(u)”, peut-être le Lifou qui est allé trouver Weliehme si Taxeru(e) si Hnashudf(u).
634v. 58/ celui qui a été appelé à travailler avec le kaze. cf. D 85, D 88.
635v. 59/ Di re hne dra era : di-re-hne = présent de remerciement fait à Yaca-nia, m. à m. “poils de prière” parce qu’on devait sans doute donner principalement des tresses de poils de roussette = drera, dont dra-era est une licence poétique, correspondant à l’IN /da yah/ = sang, au nengone dra = sang. Drera a le sens premier de “rouge”. Cf. Codrington (43) n° 7, blood ; A. Capell (33), p. 24.
636Weliehme s’attire des présents pour son travail.
637v. 60/ tice naca-xeje : tice doit correspondre à tize = arracher. En composition il a le sens d’enlever. Naca- indique quelque chose qui est en avant, qui est à la tête de-, à l’extrémité qui dépasse de-, qui a l’autorité sur-, une chose importante qui domine dans sa catégorie. Naca- correspond à l’IN mata = oeil, face. Xeje est la petite frégate, Fregata ariel ariel. La frégate intervient souvent comme symbole de yaac. Le sens exact du symbolisme est perdu dans le cas présent.
638L’influence lifoue due aux migrations fait que dans la même phrase d’un chant on utilise des mots lifous et Marés. De plus ces mots lifous sont déformés, la langue est archaïque, on ne procède que par allusion à des événements oubliés. Le texte n’en devient pas plus clair.
3 - RECONSTRUCTION HISTORIQUE ET SOCIALE CONCERNANT L’INTRODUCTION DU KAZE
639(a) Si-Xacace. Xacace est pour Xa-caac (= “blessure de sagaie”) selon les remèdes que possédait ce clan, pour soigner les blessures de sagaie en particulier dinimen(i) (= “plume de chouette” = Pisonia aculeata, Nyctaginacées L. une liane épineuse) et dremu (= Breynia disticha). Pour Wakoca si Tadeng et A.Alan, les si Xacace sont des Maréens partis de chez eux et revenus. D’ailleurs cela semble logique d’après tout ce que nous avons dit, puisque nous voyons les si Xacace prendre la place à La Roche des si Puan. Les mythes D 85 à D 89 nous montrent les itinéraires de relations d’échanges de richesses et de femmes, passant par Lifou, Ouvéa, même Heo pour atteindre le Nord de la Grande Terre dans la région de Tao. A mon avis, ce mouvement de va et vient s’établit historiquement comme ayant son départ de Maré à une époque éloignée, et son retour à une époque beaucoup plus récente. Il y a eu le groupe des si Xacace sédentaires, primitivement autonomes et puissants, devenus sujets des si Taxeru(e), dans les environs de Rawa. En vient Joseph Sako qui se perpétue par l’adoption du fils de sa femme, Emiliano Katrei, famille Koce de Hnaenedr. Les si Xacace qui arrivent de Lifou sont très transformés tant au point de vue ethnique, qu’aux points de vue politique et religieux. Le chef Hnaisilin les fait venir de Kiam(u) = Anatom. Ils auraient ainsi reçu des apports des Nouvelles-Hébrides. Le nom de Kuma ferait penser aux Iles Salomons et à la Nouvelle-Guinée. Ils ont subi des influences polynésiennes au moins par suite du voisinage des Xetiwān de Lifou. (Le chef Kaeawi avait un type tongien marqué). Les étapes à Lifou de Gaica, Kumo, Ahmelewedr (près de Mu) doivent être comprises à la manière indigène, celles du déplacement de l’individualité politique correspondant à ce nom de clan. Les si Ahnerewedr (= Ahmelewedr) s’identifient à Wawalahae de Kumo qui est les Acakaze si Tadrere. Ses origines sont en relation avec l’arrivée du kaze et donc aussi avec les si Xacace.
640Il y eut donc arrivée d’individus qui s’imposèrent soit par la force, soit par le prestige de leurs magies, formant de nouveaux clans dans l’Ouest, si Cara, Acakaze si Tadrere, Acakaze si Lehmi. Passant par Ceni près de Rekabeco, les éléments dominants s’installèrent à La Roche où ils établirent une grande chefferie.
641Awanedr a conservé le souvenir de son prestige. Il lui donnait tout l’Ouest maréen, en partant du milieu de la plage de Dranin. En effet beaucoup de clans reçurent leur chefferie de ces gens venus de Lifou. Pour montrer l’unité de l’Ouest, Awanedr raconte : Wacamane si Cara donna l’ordre à ses sujets de ne pas couper les baac (= Asplenium nidus avis) de façon à avoir en quantité des enveloppes de poisson fumé. Par sympathie pour cet ordre, Kuma si Xacace donna l’ordre de tenir enroulé les feuilles de bananier pour qu’elles ne se lacèrent pas au vent, et avoir ainsi d’autres enveloppes pour le poisson.
642A. Drowia dont le clan, celui des si Tawakan, hérita des terres des si Xacace, leur concède un moins grand territoire à l’époque de leur anéantissement. Il s’étendait d’Atha inclus, à Watheb (près de Ketu) jusqu’à Shoeshoe, près de Wakone, à Riri près d’Enene qui leur appartenait, jusqu’à Tawapeng(o), au Sud-Est de la forêt de Rawa. Ils étaient limitrophes à l’Ouest avec les si Gurewo(e) et les si Tawai(e), au Sud-Est avec les si Pecuaen, au Sud-Ouest avec les si Rawa et les si Terol.
643Leur oiseau symbolique était zeze le martin-pêcheur (= Halcyon chloris canacorum).
644On offrait le présent puec, à Hna-puec, une dépression à l’Est de La Roche où on ne pouvait pas la voir, au Sud de Hna-Ohn. Le chef Kuma, qui habitait Puan, y recevait le présent de son cadet Awanedr, qui habitait Tagi. Kuma remerciait pour ce présent d’un coup de sagaie. Si le présentateur était tué, sa viande servait de “condiment” = bezin aux ignames offertes. Une fois, Kuma blessa Awanedr. Celui-ci répondit en blessant Kuma selon Awanedr, ou le tua selon Trele (le texte du P. Beaulieu est ambigu). Ce fut la cause de guerres incessantes, même pour certains le commencement des guerres de Maré. Therenet (= “le survivant”) s’enfuit chez les si Hmed à Wabao. Il est le fondateur des serei Wadeng. Selon Awanedr, mon informateur, Awanedr s’enfuit à Pedede, un terrain aux si Pecuaen situé au Nord de Tawainedr. Selon cet informateur qui donne un second motif de cette fuite, Kuma aurait volé la femme d’Awanedr. Puis il donne une longue généalogie des descendants de cet Awanedr de Pedede pour arriver au neuvième nom à Ilei qui secoua le joug des si Pecuaen, se lia aux si Rueezi, fut enseveli dans une grotte de la falaise de Dranin et fut le fondateur des si Ruemec. Maintenant on a tendance à le confondre avec Ilei, chef de guerre, cité dans le chant Kacahm(i) ne Sipane, celui qui fut frappé à la tête par les si Pecuaen avec les queues des poissons wakul. Mais le nom du chef de ce dernier était Wapurune. Le fils ou petit-fils du premier Ilei, qui s’appelait Kuma, donna la chefferie à part égale à ses deux fils, les deux Etoroi. L’aîné était Cuki, fut la souche des si Gurewoc ; le cadet Wapurune continua à porter le nom de si Ruemec. Ce furent Wapurune et son neveu Waya, fils de Cuki, qui massacrèrent d’abord les si Pecuaen, puis l’appétit venant en mangeant, les si Xacace, et chacun pour leur part les Eletok de l’Est. Les survivants donnèrent le présent à Wapurune parce qu’il était l’aîné tok (aîné et chef). Puis si Gurewoe et si Ruemec se firent la guerre, guerre qui dura jusqu’en 1866, c’est-à-dire au début de la christianisation.
645L’arrivée du kaze est racontée en termes discordants. Il semble qu’elle ait été postérieure à l’installation des nouveaux venus. Mais dans la mentalité indigène cela forme un tout, bien qu’il y ait certainement eu nombre d’allées et venues. On en rend responsables les si Xacace de Purem. On dit par ailleurs que ce fut Madraru père d’Ikuc (= “morsure”) qui amena le kaze à Niri, l’usine à kaze pour les grands aca-nia de Maré. Madraru et Ikuc sont également des serei Wadeng de Wabao.
646Ce kaze a suivi un itinéraire qui est rapporté dans le chant Be ko be, D 97.
647(Sinewami) : Pour vaincre les si Xacace, il y eut une coalition menée par les si Ruemec, chef Wapurune, chef de guerre Ilei, avec les si Tawakan (chef Poléo), les Acakaze si Lehmi doku, les Acakaze si Tadrere si Comekumo, et les Node ri Kurub(u). Les si Xacace étaient réfugiés sur la forteresse de La Roche, d’où il était difficile de les déloger par un assaut. On eut recours à la ruse. Kacahm(i) si Waek(o) et Sipane Acakaze (les deux héros du chant) s’entendirent avec deux femmes mariées chez les si Xacace. L’une était zine i Thuba (les si Thuba ont une magie waceng pour provoquer la discorde i-thuba) ; l’autre zine i Hnacu(e) (les si Hnacu(e) ont une magie pour faire déguerpir les gens co cue). La femme zine i Thuba provoqua une dispute sur La Roche, et la femme zine i Hnacu(e) en plein jour alluma une torche en wateg(o) (= spathe du cocotier) et descendit de La Roche. Tout le monde piqué de curiosité, sous l’effet de la magie, la suivit. Les coalisés attendaient les si Xacace à Wabubu-re-Waitru. Ce fut la chasse à l’homme. Ce fut après cela que Wapurune si Ruemec et Cocokat si Tadeng placèrent les si Hnathege fugitifs chez les si Gurewo(e). Ensuite le récit de Sinewami est un peu confus. Kuma voyant sa cause perdue, se réfugia chez Lakoreden si Turepaw(a), aca-nia des Node ri Kurub(u), à Rueman. On fait tuer Kuma par Awanedr. Lakoreden s’empara d’Awanedr si Xacace et l’enferma dans le tacaere de Gurehm(u) auquel il mit le feu. Avant de mourir, Awanedr maudit Lakoreden : “Bo orore taeto = “tu mourras demain” ou “Inu onom, ka bo te orore = moi maintenant, mais toi aussi demain”. Ce Lakoreden tua en outre Wathukene chef des siHnadid(i) à la bataille de Gurehm(u). Il aida les si Waek(o) contre Yeiwene serei Wo. Finalement les enfants de Matrun, re-tei-Matrun, le brûlèrent à son tour dans sa case, sous l’effet de la malédiction d’Awanedr (d’après St. Waikedr). Sa veuve cuada prit en main la direction de sa famille pour rendre courage aux re-tei-Lakoreden et tenir tête contre leurs ennemis (Cécile Waya).
648Après la guerre quelques si Xacace épargnés revinrent à La Roche alors déserte, tinrent un conciliabule à Puan, prirent le trésor de leur chefferie, cenge-ni (= richesses), waceng (= magies), et les cachèrent au bord de mer à marée basse. Ils firent le serment de ne pas révéler l’endroit. A leur retour (ils n’avaient fait qu’aller et revenir), ceux qui les virent remarquèrent qu’ils n’étaient mouillés qu’à mi-jambe. Les si Gureshaba cherchèrent en vain cette cachette. Désormais les si Xacace cessaient d’exister en tant que pa-doku, tribu ou chefferie indépendante. François Waya si Gurewoe, né vers 1845-1850, père de Cécile Waya, se rappelait avoir vu étant enfant quelques-uns de ces si Xacace qui avaient fait le serment de ne rien révéler, et qui moururent sans le faire.
649Mais d’après Louise Watel si Xacace, les richesses et les kaze des si Xacace furent cachés dans la grotte de Denge, qui servit de cimetière. Il y a un trou d’eau en son milieu.
650Les coalisés épargnèrent cinq jeunes gens si Xacace :
- Ilei demanda à Poleo d’épargner un jeune homme. La mère à’Ilei était zine i Tawakan. Il dit à Poleo : “Nous sommes de la même famille ; prends soin de ce petit et garde son terrain” Les si Tawakan héritèrent ainsi des terrains des si Xacace. De ce jeune homme viennent Louise Watel et Cyriaque Trele. Leur famille est comptée maintenant comme étant si Tawakan.
- Les serei Hna-Nuya (= mot à mot les habitants de Nouméa) sujets des si Ruemec épargnèrent et gardèrent un certain Wathebo qui s’établit à Yewai(e) du côté de Wabamen, d’où le nom de serei Yewai(e) donné à sa descendance. Il n’y a plus de serei Hna-nuya. De Wathebo est venu Cyprien Guhmeu marié à Marie-Thérèse Wathenasa, qui se remaria en secondes noces à Hygino Puni si Obu père de Cyriaque Ketekaw dit Pulisiman (encore vivant à Tagi en 1969).
- Les si Lehmi doku gardèrent un autre jeune homme dont viennent Magoi et son fils Awanedr, habitant à Shuan entre “La Limite” et Menaku.
- Les si Comekumo gardèrent l’ancêtre de Wayuo et de ses enfants à Thogon.
- Les Node ri Kurub(u) gardèrent l’ancêtre de Ceush(e) et de ses enfants à Tadin(u), et ses frères Madoku, Awanedr et ses soeurs.
651Les si Xacace étaient ace-re-soten avec les si Tapep(a) de Wapon, cf. D 92, et avec les serei Koe qui leur gardaient le wageleda.
652(b) si Cohmu (Géographie…, p. 250-251, 256-257) : Les si Cohmu furent un clan d’aca-nia, dont le territoire est maintenant enclavé dans le territoire des si Medu, autrefois entre celui des si Nekub(u), puis des si Thatha d’un côté, et celui des si Weba de l’autre.
653Au xixe siècle, ils comprenaient les si Cohmu re-tei-Waumebon (sous-clan du chef), les si Ruetin et les si Tanin.
654Le chef Wa-u-me-bo-ne = (“pénis qui a de l’odeur” pour montrer la force virile de l’individu, et de son clan) apparait avec l’arrivée du kaze. Il a été le premier à fabriquer des kaze, magie à base de nécromancie, à Hna-itrani-kaze à Cohmu. Mais le fait que les si Cohmu avaient des lutins maica à ‘Ma ni maicahman (= “la maison des petits garçons”) montre qu’ils existaient antérieurement à l’arrivée du kaze. Leurs descendants ont le type mélanésien très prononcé, nez platyrhinien, cheveux frisés en vadrouille, arcades sourci-lières fortes. Ils devinrent les aca-nia des si Thatha, puis des si Medu serei Hna-ule. Ils possédaient les terrains de Cacag(o) (où étaient leur village principal), et Cohmu leur lieu principal de culture, au milieu de la forêt très rocailleuse qui fut cependant cultivée, comme le prouvent les nombreux et gros tas de cailloux de nettoyage hadid(i). Ils avaient en outre les rivages de Ue aux ye-teta (Excœcaria agallocha, Euphorbiacées) tabous pour ceux qui ne sont pas si Cohmu, et Washoc où se trouve un puissant trou souffleur. Autrefois c’était de grandes colonnes d’eau qui sortaient de ce trou avec un bruit tellement fort qu’il empêchait de dormir le chef Waozane si Hnadid. Ce chef se rendit à Cacag(o) demander au chef Pijone l’autorisation de visiter ce trou. Celui-ci répondit : “Vous m’avez vu, c’est la même chose”. Waozane n’était pas content. Ses sujets si Hnadid insistèrent tant que Pijone donna l’autorisation à contre-cœur, “à vos risques et périls” dirait-on. Waozane s’attendait à voir un gouffre énorme. Il ne trouva qu’une petite fente facile à enjamber. “C’est cela qui m’empêche de dormir !” et par dérision il l’enjamba. A ce moment, la colonne d’eau fut jetée en l’air, projetant Waozane. Le malheureux fut aspiré dans le trou et disparut. On ne le revit plus. Atterrés, ses sujets bouchèrent le trou avec de gros blocs, et depuis il n’en sort que de la poussière d’eau. Son bruit est moins fort, mais on l’entend parfois dans le centre de l’île, vers Taora (d’après P. Katrei).
655(Awanedr) : Les re-tei-Waumebon sont allés chez les re-tei-Caea si Hnadid si Petho, en venant de Niri Quand les re-tei-Waumebone voulaient taper du kaze, ils avertissaient les re-tei-Caea, parce qu’ils étaient “frères” ace-re-celuaien.
656Les si Cohmu étaient encore 44 en 1875. La branche des chefs s’est éteinte à Medu en 1944 avec Ferdinand Wadrokal. Les si Cohmu avaient suivi les si Medu serei Hna-ule dans leur fuite à La Roche en 1862, après la bataille pene Awi. Ils revinrent à Medu vers 1868. Ils s’y perpétuent par la famille Yaac. Quelques-uns se sont fait adopter si Gurewoc à Penelo (famille Bowen descendante de Jérôme Eken, cité dans les interrogatoires de M. de Dollon en 1879). Mais la plupart des si Cohmu sont morts sans enfants dans la seconde moitié du xixe siècle. C’est ce qui est arrivé aux si Ruetin (sous-clan de Wabuaka auteur du chant de la danse populaire Be be nod, cf. Géographie p. 234-244) et aux si Tanin, chez qui on trouve le nom Wailaila, porté également à Wogeo, et chez les si Tapep(a).
657(c) Si Cowel (Géographie…, p. 250, 260-261 ; Guiart (86), p. 280) : on ne peut parler des si Cohmu sans parler des si Cowel qui furent leurs aca-nia, avant de le devenir pour le compte des si Medu serei Hneod (chefferie actuelle d’Enï). Ce sont des Eletok qui doivent faire partie de l’ancien fonds de population. Ils ont le type mélanoïde très prononcé, la taille petite mais trapue. On les fait “famille” guhnameneng avec les deux autres clans Eletok des serei Tawadeng et des serei Wagum(u).
658On ne sait rien de précis sur l’origine de ces deux clans eletok. Les si Ta-wa-deng (= “sous le petit banian”) étaient de petits hommes trapus que leur spécialité de pêcheurs fit épargner au moment du massacre des Eletok pour offrir le poisson aux chefs si Medu serei Hna-ule. Ils habitaient sur le bord supérieur de la falaise à Kacajui d’où ils surveillaient leur lieu de pêche aux poissons wa-juyu. Au xixe siècle, ils étaient propriétaires de la terre de Ngoda (région d’Ure, à l’Ouest de la route moderne) et du rivage à l’Ouest d’Uni. Leurs lutins maica habitaient à Waetubene, une pierre rouge du peketete (la roche déchiquetée par les embruns sur le rivage), les si Tawedeng sont la famille Kamane à Medu dont il ne reste qu’un homme Wacial(o) (nom si Tapep(a)), sa fille et une autre femme. Ils ne se perpétueront que par les femmes.
659Les serei Wagum(u) Eletok étaient déjà avec les si Medu serei Hna-ule avant le massacre des si Thatha. Ils suivirent le chef Jewine à Hna-ule. En 1879, ils possédaient les terrains d’Otel et de Tubebuhnae, région d’Ure, à l’Ouest de la route moderne. Il n’en reste que Louis Cele, sa fille Adélaïde Guacihma et sa petite-fille Alphonsine Kanej(o). Ils étaient cependant une vingtaine vers la fin du xixe siècle.
660En 1875, les si Cowel étaient 21 à Eni. Ils se divisent en si Cowel serei Yaw(e) (Yaw = “stérile pour les ignames” est sur le plateau à 1 km 1/2 à l’Est d’Eni. Il y a des lutins maica), et serei Ye-ti (du nom de l’arbre ri = Serienthes calycina Benth.). Les serei Yaw ont des remèdes pour guérir blessure et fracture. Un si Cowel trouva un serpent sur son chemin. Il le coupa en deux. A son retour, il vit le tronçon de la tête du serpent mâcher des plantes et les mettre sur sa blessure. Le serpent rejoignit les deux bouts coupés qui se ressoudèrent. L’homme remarqua les plantes choisies et trouva ainsi les remèdes pour ressouder les chairs coupées et les os cassés. Les serei Yaw sont donnés comme aca-nia également des si Lawacele et des si Weba serei Wacebeu.
661Les serei Yeti sont thu tice hnon. Ils retirent de la chair des autres les “cadeaux” = hnon qu’y ont pu mettre kaze et paac.
662Le nom de Cowel est interprété de wel = “l’enveloppe clissée des cocos, et des gourdes”, parce qu’étant aca-nia, ils sont autour du chef comme le clissage est autour de la gourde.
663Les si Cowel sont redoutés jusqu’à maintenant comme aca-nia. On raconte des histoires fantastiques sur leur compte.
664On trouve chez les si Cowel le nom de Wanakam(i) (un Wanakam(i) est né vers 1775-1780).
665(d) Si Hmed (cf. Géographiep. 262-272 ; Guiart (86), p. 282-284) : La tribu des si Hmed est d’origine très complexe, dont les Eletok maîtres de la terre aca-rawa étaient les si Wie (famille d’Ariman). Les chefs serei O eurent une chefferie suffisamment puissante pour pouvoir soutenir les fêtes de prestige waea, équivalentes aux wanimoc de Gurewo(e).
666Au moment de l’arrivée du kaze, ils étaient en train de disparaître puisque leur chefferie était occupée par une jeune fille Kanejo (= “il y a encore de la suite”). Une nouvelle organisation se fit autour de son fils, les si Wie restant aca-rawa (avec la possession des ignames et des gros bananiers cawe), et les aca-nia étant les si Xacace comprenant les serei Wadeng (clan de Therenet, de Madraru et de Madoku), les si Xacace serei Taxet ; les Ma-aca-caac étaient également des si Xacace, mais on les trouve aussi chez les si Pula (d’abord à Yejele, puis maintenant à Cengeite, famille au xixe siècle de Wabaroi et d’Abraham Ngayohnï).
667Leur yaac femme fut désormais Kaze ri woc = “déesse de la forêt”, symbole de la fabrication du kaze à Niri, alors certainement territoire des si Hmed. Elle est chantée dans Be ko be, D 97).
668Les si Hmed sont les gens du marais hmede, mais ils durent céder une partie à de nouveaux venus, les si Thatha, car nous voyons ceux-ci occuper des terrains portant le nom de leurs sujets, tels que Taxet (territoire d’origine des si Xacace serei Taxet. Voir dans Géographie… le détail de leurs limites, p. 267-269).
669On comprend que les si Hmed qui n’étaient pas suffisamment nombreux se soient associés aux si Medu serei Hna-Ule (chef Wabutrune, fils de Jewine Borene) pour reprendre leurs anciennes terres. C’est une histoire très embrouillée rapportée en 1870 par le P. Guitta d’après les témoignages de deux vieux, Adolphe Wabole (né vers 1800-1805) et Jules Wadu si Wairu (né vers 1810). Ce témoignage contrôlé par ailleurs semble exact. Vers 1805, les si Medu serei Hna-ule, chef Wabutrune, alliés aux si Hmed, chef Dokune, massacrèrent tous les si Thatha proprement dits, chef Warekaicane, mais épargnèrent des si Wairu, chef Yeat et quelques autres sujets si Thatha. Yeat fut dès lors regardé comme l’héritier de la chefferie de Warekaicane. Il se réfugia avec les siens auprès des si Medu. Un peu plus tard Wabutrune lui rendit ses terres en paiement de la mort de Warekaicane, c’est-à-dire de Wabao jusqu’à Yewe sur le bord de mer, et jusqu’à Ure, Kocegor(e) et Otel dans l’intérieur. Dokune si Hmed jaloux de ne pas avoir été consulté, fit assassiner de nuit Wabutrune dans le tacaere des si Thatha à Ure, puis se sauva avec les siens chez les si Pula à Gurehm(u). Jewine succéda à son père Wabutrune (vers 1810). Vers 1816-1818, Traabe chef de guerre si Gurewoc est venu frapper les si Medu et les si Thatha, qui se réfugièrent chez leurs vainqueurs à Cerethi. Deux ans plus tard, Traabe les rétablit Jewine à Hna-Ule et Yeat à Kumoc, rivage du village moderne de Wabao. Entre-temps les si Hmed s’étaient établis à Yejele. Ils retournèrent à Gurehm(u). Les si Thatha de leur côté quittèrent Kumoc pour s’établir à Ure.
670Vers 1820-1825, Yeiwene si Guama père de Hnaisilin Nidoish(i) offrit des présents à Jewine pour permettre le retour des si Hmed à Wabao. Les si Thatha trop peu nombreux s’étaient donnés aux si Medu. Dans la convention qui fut faite, Jewine laissait à Yeiwene le territoire des si Hmed, tandis qu’il gardait le terrain des si Thatha. Mais les si Hmed préférèrent rester à Gurehm(u). Ils y restèrent jusqu’à la mort de Dokune, vers 1830. Son fils et successeur Thawa, cédant aux sollicitations de Jewine, revint à Wabao. La discorde se mit dans la chefferie des si Hmed. Thawa se réfugia chez Jewine, et Yeiwene père de Maunga retourna à Gurehm(u). Vers 1840 naquit Weinane, fils de Thawa. Celui-ci mourut peu après. Quelques années plus tard, un sujet de Weinane, nommé Aenasane, tua Waekosone neveu de Jewine. Weinane et les siens se sauvèrent près de Rawa à Kunic, sous la protection de Buama si Tae, arrière-grand-oncle paternel de J. Sinewami. En 1862, les si Medu serei Hna-Ule et leurs sujets se sauvèrent pour la plupart à Gurewo(e) sous la protection des si Gureshaba. Weinane revint chez lui à Wabao, et les si Hmed commencèrent à se donner à Hnaisilin Nidoish(i) en se faisant protestants. Weinane fit construire une case chapelle sur la limite avec les si Thatha. Sinewami si Tae la brûla en juin 1867. Sinewami fut approuvé par le résident de Lifou. Le temple fut reconstruit, la case du pasteur dépassa la limite, puis d’autres. En 1869, il y avait un vrai village. La Limite Cave en 1876 reconnut l’état de fait. En 1880, Weinane et les si Hmed prirent une part active dans la guerre contre les si Medu et le meurtre de leurs garçons. Weinane fut condamné au bagne de Poulo Condor. Devenu vieux, revenu du bagne au bout de quelques années, sans héritier mâle, il se rapprochait des si Medu, ses parents maternels. Mais il n’était même plus un petit-chef du district de Guama. De son vivant, sa chefferie fut remplacée par celle des serei Tayeku(e) originaire de Lifou, et dévouée à la chefferie de Nece. En 1898, le résident Lasserre déplaçait la limite des si Hmed à Paziniwanem(u) à l’Est de Niri. Puis en 1914, le district de Wabao fut déclaré indépendant de la chefferie de Nece en même temps que celui de Tadin(u). Telle est en résumé l’histoire des luttes des si Hmed pour leur territoire auxquelles administrateurs et missionnaires n’ont jamais vu bien clair et se sont fait mener par les indigènes. En 1876, les gens de Wabao, si Hmed, étaient 125 personnes. Le chef Stéphane Waikedr donne l’organisation suivante aux si Hmed : Ancienne chefferie : Serei O (Weinane) Sujets : serei Poniwagomed (Jules et Mepo)
671si Xacace serei Taxet
672serei Wakayai
673si Xacace serei Wadeng
674Eletok si Wie (aca-rawa).
675Nouvelle chefferie placée par les si Guama : chefs serei Tayeku(e)
676Sujets : serei Pebuyu
677si Xacace Ma-aca-caac serei Boe (aca-nia doku).
678(e) si Taxeru(e) (cf. Guiart (86), p. 302, 337-338). L’existence des si Xacace de la forêt de Rawa (où se trouvent les noms de lieux les concernant) est attestée comme ancienne. On les considère comme ayant été une grande chefferie autonome. Mais lors de l’arrivée du kaze, ils sont les sujets aca-rawa des si Taxeru(e) dont le point de départ est Waba-xeru(e) clairière dans le sud de Rawa. Les chefs sont les serei Yeta, et les aca-nia les si Hna-shud(u). Ces deux sous-clans apparaissent comme beaucoup plus récents, en relation avec le kaze amené par les si Xacace venus de Lifou. Ceux-ci après l’avoir amené à Niri, le donnèrent à Sinaw serei Yeta qui le remit à Weliehme si Hnashud(u).
679Les si Taxeru(e) s’unirent aux Node ri Kurub(u), dont ils étaient les voisins du côté de Rawa, lorsque ceux-ci descendirent au bord de mer de Tadin(u) pour s’emparer du territoire des si Pula, au temps de Yoyeine. Les si Taxeru(e) désiraient un rivage à eux. Ils devinrent les aca-nia des si Thuahmijoc et s’installèrent à Hneic = “fermer les yeux”, parcelle ainsi nommée parce que les aca-nia frappaient sans acception de personne avec leurs kaze quiconque passait par là pour se rendre à la chefferie. Hneic est entouré d’une murette basse située à côté du moderne monument aux morts des guerres 14-18 et 39-45. S’il tombe, on ne peut le réparer sans se faire frapper par les kaze qui ont été enterrés à sa base. Seuls les si Tahned, ace-re-soten des si Taxeru(e), sont vaccinés contre ces kaze. Un cyclone en 1944 renversa ces pierres par les vagues, le gendarme résident de l’époque eut toutes les peines pour trouver un travailleur qui consentit à faire la réparation. César Waikedr dans son cahier les appelle Xeru(e). Seuls les si Xacace restèrent du côté de Rawa, devenant ainsi plus tard les sujets des si Gureshaba.
680Lorsque se fonda la nouvelle chefferie de Yeiwene si Guama, Yeiwene fut choisi parce qu’il se baignait à Asicen(i). Les sujets serei Guam s’opposèrent à l’installation de Yeiwene. Celui-ci s’enfuit à Dodon. Yongom Sinaw serei Yeta le fit revenir, le rétablit comme chef de Guama et lui donna Jiriane si Hnashud(u) comme aca-nia. Tel est le récit de François Yongom serei Yeta. Les si Taxeru(e) sont ainsi aca-nia co re ‘ma (= “dos de maison”) de la chefferie de Nece. En 1948, François Yongom allait faire la sentinelle nocturne du chef Henri Hnaisilin.
681Jiriane était un aca-nia puissant. Il était amoureux de Maniene, une jeune fille si Tawai(e) qui ne répondait pas à sa flamme. Elle aimait un garçon de Rawa. Jiriane envoya un requin pendant le bain de Maniene qui lui coupa la tête et l’apporta au rivage de Jiriane. Celui-ci la déposa dans une grotte (cf. Géographie p. 77).
682A l’arrivée des Hmi Samoa, des teachers samoans, Yeiwene mit Jiriane en demeure de les frapper de son kaze. S’il les tuait, on mangerait les deux teachers ; sinon on rejetterait Jiriane. Cette historiette est racontée dans un chant composé pour le centenaire de l’arrivée des deux teachers (cf. R. Leenhardt (122), p. 20-21) ; (5), p. 30-31).
683Au xixe siècle, après l’installation de la chefferie des si Tae, et le retour des Maacaran et des si Obu, des serei Yeta et si Hnashud(u) revinrent à Rawa pour des motifs divers. Ils étaient bien accueillis par les si Tae dont ils augmentaient le nombre de leurs sujets.
684D’après J. Sinewami : Sietane serei Yeta, toka-guhnameneng, a été chassé par Hnaisilin Nidoish(i) parce qu’il vivait en concubinage. Il est venu d’abord à La Roche au temps du paganisme. Puis il est allé à Rawa, chez les frères de sa femme, si Obu. Son fils Stanislas Wainebeng(o) (1877-1945) quitta Rawa pour des disputes de terrain avec Jules Pahne si Obu, et s’installa à “Miramas” = Icojeu, et où vécut le fils de Stanislas, François Yongom (1907-1961). Mais celui-ci habitait également à Rawa. Le Fils de François, Marie-Joseph Sinaw (né en 1932) n’a qu’une fille Madeleine Guacengeceng née en 1962. Wene si Hnashud(u) quitta Nece où il était drikon, parce qu’il avait été grondé. Le dernier si Hnashud(u) de Rawa, Alexis Wamej(o), né en 1887 est mort en 1943 sans enfant.
685On a gardé à Rawa le souvenir de Cauri(a) si Hnashud(u). C’était un géant d’une force colossale. Sietane l’a connu. On raconte sur son compte des histoires fantastiques. Pendant les guerres contre les si Gurewoc, alors qu’il fallait aller la nuit aux vivres dans les champs, il renversait la case, y mettait les ignames, et chargeait la case sur son dos comme un panier. Il reçut une sagaie en pleine poitrine. Il put cependant rentrer à Rawa. Pour retirer la pointe qui y était restée, l’opérateur dut lui ouvrir le dos, et y enfoncer le bras. Il ne mourut pas de cela. Comme il était puissant, il avait plusieurs femmes. Quelque temps après sa blessure, il s’aperçut qu’une de ses femmes lui était infidèle. Il en conçut un tel chagrin qu’il se pendit. Il fut enterré à Codong près de Rawa. Ses tibias seraient gros comme des poteaux de cases. Mais les gens de Rawa ont refusé de me montrer sa sépulture. Il devait vivre du temps de Sinewami.
686Des si Taxeru(e) de Rawa qui étaient environ 25 à la fin du xixe siècle, il ne reste plus que Sinaw. Les autres sont à Tadin(u) et Nece.
687(f) si Waek(o) (Géographie…, p.302, 337-340 ; Guiart (86), p.309-311) ; l’arrivée du kaze (Géographie…. p. 328-330 ; Guiart (86), p. 307) : Dans l’Ouest de Maré, on rapporte l’histoire de la vieille de Lifou dont le petit-fils avait tué l’oiseau, zeze, le martin pêcheur. Elle se sauva sur une noix de coco à Maré. Elle aborda à Hna te re kaz(e) = “là où on a abordé le kaze” et devint enceinte de deux garçons qui la découvrirent, dont l’aîné était Wacamane i Ajej. Dans le récit de Guiart (86). p. 307, de l’aîné elle a engendré les si Xacace, les si Non, les si Hnacu(e), les si Hnabung(u), les si Pula, les si Waek(o). Du cadet, les si Welo, les si Eoc, les si Dodon, les si Cara, les si Hnathege, les serei Hna-mece-re-tit(i), les serei Yatheb(o). Selon la version de Lifou, la vieille est Ithidra Luop de Hnanemuhaetra. Elle aborde au rivage des Acaze, déformation d’Acakaze. Autrement dit, de l’aîné elle engendre les populations du Sud de Guama et du cadet celles du Nord.
688Le texte d’A. Manane (Géographie p. 328-330) cite les noms des si Xacace, si Taxeru(e), si Hnathege, si Non, si Pula, si Hnacu(e), si Tahned. L’influence de l’arrivée du kaze sur les si Tahned peut consister dans l’organisation nouvelle des aca-nia, voire leur union aux si Hnaeroc. Il est difficile de dire maintenant quelque chose sur l’origine des si Pula qui ne connaissent pas d’autres traditions que celles de leur disparition et des désagréments causés par leurs yaac.
689Les si Waek(o) sont originaires du lieu-dit Waek(o), dans la région de Betcéda (Géographie…, p. 314-316), et se baignaient à Eth (= “faire des actes erotiques”) où des rochers à formes réalistes représentent la famille Gu-kaica, la bande de balassor, qui est leur symbole, et dont le nom leur sert de cri de guerre. Les noms de lieux de plusieurs des sous-clans se trouvent dans les environs : Xede, Wahneregfo), Wo. Le sous-clan du chef était celui des serei Xed.
690Le docteur Fagot (69), p. 92, fait remonter à 150 ans, c’est-à-dire vers 1800, juste au moment où commence le massacre des Eletok, l’arrivée des si Waek, branche cadette de la chefferie de Mu, Lifou. Or vers 1800, la chefferie des si Waek(o) était bien installée et organisée dans la région de Betcéda. Le docteur Fagot manque de perspective historique.
691Pour A. Manane, les si Waek(o) sont des Maréens, qui ont quitté Maré depuis longtemps, sont allés à Lifou et revenus à Maré, s’installant dans le centre Ouest. Cela rejoint ce que dit J. Guiart (86), p. 309 : Selon la tradition du Lösi, les fils des deux déesses lue dhadhiny, auraient été dans l’ordre Waheo (chefferie de Hnaeu), Wahile (chefferie de Dhozip), Wahemunemè (grande chefferie de Mu), et Waeko (chefferie de Ro à Maré). Cela ne veut pas dire comme le pense le docteur Fagot que les si Waek(o) sont venus directement de Mu à Ro, mais que la chefferie de Ro, celle des si Waek(o) est en relation d’origine avec Kumo, parallèle à celle des si Xacace, des si Hnathege et des Acakaze. Les si Waek(o) se sont installés à Maré avec le mouvement de population correspondant à l’arrivée du kaze.
692Cako serei Xed recevait le présent puec de ses cadets. Il faisait le petit présent de remerciement du don, shudul, par un coup de sagaie. Si le présentateur était tué, sa viande servait de condiment bezin aux ignames présentées. Aussi ne mettait-on comme présentateur qu’un guerrier exercé. Une année, Cako blessa un serei Wo. Une bagarre éclata ; Cako fut tué, et des si Waek(o) s’en allèrent. De fait, lors du début du massacre des Eletok, on voit que des si Waek(o) vivaient déjà avec les si Hnathege et les suivirent dans leurs pérégrinations. Les si Waek(o) de “la Limite” sont des serei Wahnereg(o). Vers 1900, vivait encore à Peyec un certain Jakiwo, de la lignée des re-tei-Cako. Lorsque les si Tadeng étaient près de Peyec, on fonda le sous-clan des si Thuba-wae, formé par la jonction de si Thuba et de si Waek(o). Le nom de la doline Thebe i Wae, près de “la Limite” = Kaewaura, est un jeu de mots avec Thuba-Wae. Une certaine dispersion des si Waek(o) parait nettement antérieure au massacre des Eletok.
693Les serei Wo furent placés comme chefs à la place des serei Wakuarori. Le massacre des Eletok commença dans l’Ouest par celui des si Hnathege perpétré par les Acakaze. Les serei Wo suivirent le mouvement (cf. chant Kacahm(i) ne Sipane). On parle d’une fuite des si Waek(o) auprès des si Xene à Ruet et de l’aide que leur a apporté Pa-Lakoreden si Turepaw(a). Ils s’en allèrent à Gurewo(e) auprès des si Hnathege qui venaient de s’y installer. Plusieurs lieux-dits et rochers commémorent ce fait. Une grande bande blanche à mi-flanc de la falaise de Tïti Ketu du côté d’Atha, est Gu-kaica le yaac symbole des si Waek(o). Le plus haut rocher de La Roche, côté Puan, est Gu-titi ni si Xed (= “la petite roche des si Xed”). Deux rochers du sentier de Thoon sont Rue Waithorone deux femmes yaac aux si Waek(o) (Waithorone = nom de femme à Ro). Les si Tae, les deux fils de Tahmuhm(u) = rue tei Tahmuhm(u) (Weneitrane), d’après le chant Kacahm(i) ne Sipane, leur donnèrent un territoire, non pas celui de Waek(o) confisqué par les serei Wo, mais celui abandonné par les si Hnathege à Ro, chez les si Welo.
694Dès son avènement à la grande chefferie, Yeiwene si Guama essaya d’étendre son influence sur les si Waek(o), où il dut avoir certainement des partisans, comme le manifestèrent les si Waek(o) serei Tacaere. Yeiwene voulait l’offrande du poisson de la baie de Ro.
695C’est dans cette ambiance que débarquèrent en 1841, les deux teachers samoans, rue hmi Samoa, Tataio et Taniela. Le chef Yeiwene les prit sous sa protection. Comme ils habitaient Ro, ils furent protégés par deux si Waek(o), Eatene et Thengeco, ensevelis dans une pirogue de la falaise de Ro (Sarrasin (177), p. 244-245).
696La tension qui précède les conflits existait déjà. Les si Guama avaient fait à Nece un tacaere avec de gros poteaux en bois d’angai(e) (= Manilkara Pancheri) pour montrer leur force. Les si Waek(o) répondirent en se servant de stalactites, duge, comme poteaux de leur tacaere. Le chef si Guama se nommait iei-wene = “feu-cyclone” ; les si Waek(o) prirent le nom de Saiwene = il n’y a que le cyclone, qu’ils craignent. Ils sont des marins et des pêcheurs. Au nom de Dokucaas = “chef unique”, les si Waek(o) répliquèrent par Lue-dhoxu = “deux chefs”, c’est-à-dire chacun chez soi.
697D’après les renseignements fournis par Paul Yake, petit-fils du chef Yeiwene, au P. Beaulieu, Hnaisilin Alakuten fils de Yeiwene s’opposa à une guerre contre les Node ri Kurub(u) parce que sa mère était de ce clan. On reproche à Hnaisilin Nidoish(i) d’avoir accepté la guerre contre les si Waek(o) de Ro, sa parenté maternelle.
698La guerre eut lieu sous la chefferie d’Angadoku-Menedoku Bula, qui mourut brûlé vif par un baril de poudre lors du pillage du Sisters à Nece en 1844. L’attaque du Brigand de Paddon en 1843 fut le fait des si Guama et non des si Waek(o), ce qui laisse penser qu’ils étaient déjà en fuite. L’attaque des si Waek(o) de Ro aurait donc eu lieu en 1843. Les détails contradictoires de la lutte sont donnés dans la lettre de Ketiwan à M. Cané, et ceux donnés par la chefferie de Nece. Les si Waek(o) serei Tacaere prirent le parti des si Guama. Les autres, serei Wanereg(o), serei Xede, serei Wo et serei Eoce serei Waorawa, après avoir transporté à Toka les survivants de Ro, se réfugièrent à Wanacagana chez les si Tae. Wadehnane chef des si Waek(o) fait prisonnier dut se soumettre pour garder la vie sauve. Finalement Nidoish(i) vint à Wanacagana supplier de faire la paix. Les si Waek(o) furent les dupes. Lorsque l’Administration française étendit son autorité aux îles Loyauté, les si Waek(o) chargèrent Nidoish(i) devenu doku de les représenter.
699Les pasteurs écossais Jones et Creagh débarquèrent à Ro en 1853. Après un court séjour à Eoce, à l’Ouest de Ro, les deux pasteurs se séparèrent. Jones s’installa à Ro, où il fonda un établissement important. Des baleiniers s’établirent à Ro (famille Imber). Parmi eux, il y eut le fameux Diapea dissimulé sous le nom de John Jackson. Il y eut souvent du tiraillement encore entre si Guama et si Waek(o). Déjà un groupe était réfugié à Mu auprès de Bula, pour avoir donné raison à ce dernier dans sa revendication de Dudun (cf. Guiart (86), p. 541). On précise que ce fut avant l’installation de l’Administration française aux Iles Loyalty, donc avant 1864.
700Vers 1900, la plupart des si Waek(o) sont partis à Port-Vila, Nouvelles-Hébrides, dont ils formèrent une bonne partie de la population des îlots avant de s’établir à Port-Vila même. Ro est devenu depuis pratiquement un désert, et les belles installations du pasteur Jones, devenues sans grand emploi, tombent en ruines.
701Les si Waek(o) de Ro se divisent en : serei Xed dont le titre de toka-guhnameneng est maintenant pris par les serei Wo de Ro, serei Peorawa ou Waorawa, serei Menesekan, serei Tacaere (éteints), aca-nia serei Hnameceretit(i).
702Ils étaient spécialistes de la pêche aux wakakaw (maquereaux) et aux wajaea (licornes).
703Wajaea et Numanum(a) sont des yaac aux si Waek(o). Numanum(a) est “onduler à la surface de l’eau” à la manière des marsouins coiwed.
704Les serei Eoce sont des si Xacace (Guiart (86), p. 310). C’est le clan de Luès Saiwene, de son fils Ketiwan et de mon informateur le drikona Jon. Ils habitent maintenant à Ro.
705(g) Si Non (Géographie…, p. 317-319 ; Guiart (86), p. 332-333) : Les si Non sont Eletok, mais certainement postérieurs aux si Tahned et aux serei Guam. Le chef Hnaisilin en fait un sous-clan des si Waek(o) dont ils étaient les voisins. Ceci est vraisemblable. Ils se divisent en serei Cawe et en serei Degen.
706La yaac des serei Cawe est une vieille femme, Gu-tinic (= “morceau de liane tinic” Piper austro-caledonicum, Piperacées). Elle habite à Cawe. Les grottes sont sa maison. On lui offre du bois sec quand on revient de la mer. Gutinic se baigne au Nord-Ouest de Nece, à Wadiric où se trouve un pierre nommée Gutinic.
707Dans le mythe raconté par L. Watel (texte dans Géographie…), Gutinic habite Cawe. Wahmirat s’est sauvé d’elle pour retourner vers ses sujets (allusion à D 83 et D 84). Elle l’attend en pleurant, mais il ne revient pas. Elle s’enfuit alors à La Roche et s’installe à Ketu, plus exactement entre Ketu et Atha : Près de La-Cō, allant d’Atha à la pointe de Cō, près de la grande bande blanche Gu-kaic(a) sur la falaise TitiKetu, yaac symbole des si Waek(o), il y a un rocher nommé Gutinic. C’est une allusion au séjour des si Non et des si Waek(o), lorsqu’ils s’étaient sauvés des serei Wo au moment du massacre des Eletok. Les si Tae, “les deux fils de Tahmuhm(u)” = rue tei Tahmuhm(u) installèrent les si Waek(o) dans la région de Ro. Mais les si Non retournèrent chez eux, devenant les sujets des serei Wo puis des si Guama. Leur rivage est resté à Wadiric, où ils sont aca-ue, spécialistes de la pêche aux grandes loches ue, et aca-cele = “maîtres de la mer”, pêcheurs.
708Les serei Degen : Dans le mythe de la chefferie de Guama, Yeiw séjourne à Degen avec les si Non, puis s’installe à Nece même au rivage des serei Degen. Il n’y a plus de place pour le massacre des Eletok.
709La yaac des serei Degen est Thedenet = “siège de mort”, rocher qui pleure la nuit pour annoncer une mort ou un malheur chez eux.
710Les serei Degen sont les “maîtres de la passe” = aca-pathe de la baie de Nece. Tout étranger arrivant par cette passe leur offre “le présent pour avoir la vie sauve” = i-shudu-waruma. Ils habitent maintenant à côté de la chefferie de Hnaisilin. En 1849, lors du passage d’Erskine, le village de Nece était à ses débuts. C’était un “petit village”, mais il y avait déjà un tacaere.
711(h) Les si Hnathege (cf. Géographie… table des noms de clans ; Guiart (86), p. 300) : La reconstruction historique et sociologique de ce clan est plus délicate, car elle a servi dans des sens contraires d’argument au chef Hnaisilin Nidoish(i) et Sinewami si Tae pour réclamer les terrains des Acakaze, vainqueurs des si Hnathege, devant la commission Charbonnet en 1870. Cette commission donna tort au chef Sinewami et donna au chef Hnaisilin les terrains qu’il demandait, de Thogon à Menaku. Maintenant les passions étant en grande partie tombées, il est plus aisé de faire cette reconstruction, en cherchant toujours les implantations locales des mythes et des traditions.
712Les si Hnathege sont des Xetiwān camouflés, venus de Rue-gunin = Lue-ngöni à Lifou. Ils voulaient dominer à Mu. Avec des si Xacace comme aca-nia, qui avaient une puissante magie = waceng pour la guerre, ils s’approchèrent, à Zon = Dhodh, puis à Hnakez (?). Vaincus par les sujets de Bula, ils s’embarquèrent, passèrent par Phuo (l’îlot Uo) et Dodon, et débarquèrent du côté de Cara. Les si Cara leur offrirent le présent.
713C. Trele : Le nom Hnathege viendrait de hna thede = “qui a glissé sur les vagues” par allusion à leur migration maritime. Kaeawi, Awanedr, J. Sinewami, etc. savent qu’ils viennent de Lifou. Pour J. Sinewami, les si Hnathege vinrent de Lifou avec des si Xacace et les si Waek(o). Ils vainquirent les serei Wakuarori, chassèrent les si Tahned de leurs territoires de Guama et placèrent les serei Wo, qu’ils regardaient comme étant leurs sujets. Ils étaient unis aux serei Wo par des mariages (Trele).
714A. Alan : Les si Hnathege montent sur le plateau par Nengone vers Wakuarori. Ils habitent à côté des si Tadrere, de Kaewatin(i) jusqu’à Thogon (Abraham Manane) et les aident dans l’établissement de leur chefferie. Ils vont habiter jusqu’à Sego et Bone (près de Wakuarori) (A. Alan). Leurs noms de clans sont des noms de lieux de cette région : Sere ri Bon(e) (sous-clan du chef), si Owi, serei Yaw(e), serei Sego, si Anumi (aca-nia kogo).
715A. Alan, St. Waikedr : Les si Hnathege commençant modestement, tuent par le kaze les membres de la famille du chef des serei Wakuarori et finalement le tue lui-même à Hnacadok(u) où il est mangé. Il s’agit de Yeiwene Kicine serei Wakuarori, qui est remplacé par un autre Yeiwene Kicine serei Wo. Les si Hnathege sont alors des chefs puissants dont le domaine va de Menaku jusqu’à Cara (Chef Samuel Tahmuhm(u) si Hnathege au P. Beaulieu en 1867, Agnès Whāme). Leur chef Tahmuhm(u) aimait la célébrité et planta un pieu en faux gaïac, un du-re-hmu, au lieu-dit Du-re-hmu ni Tahmuhm(u). Il le fit bane mece yelen = pour glorifier le nom.
716Les si Hnathege convoitent le terrain des Acakaze. Ceux-ci les chassent de Thogon (A. Waicane), de la région de Ro (A. Manane), de la région de Wakuarori (J. Sinewami). Ils sont alors vaincus et ont perdu la chefferie sur leurs anciens territoires. C’est le début du massacre des Eletok ; ils se réfugient chez les Acakaze si Tadrere à Ceni près de Rekabeco.
717D’après Valentine Waburecane sere ri Bon et d’autres informateurs, le chef des si Hnathege à Ceni était Hnatrilene sere ri Bon. Après une pêche, il mangeait un gucakoe = “un rouget de nuit”, le poisson réservé à l’aca-nia. Pour ne pas se faire voir de lui, il lui tournait le dos. Cakoe signifie “se cacher la figure”. “Qu’est-ce qu’il mange ? demanda Yaca-nia. Ah ! il mange le gucakoe. Co cakoeo bon ! = qu’on le cache !”. Dès ce moment, les sere ri Bon furent déchus de la chefferie et remplacés jusqu’à maintenant par les serei Sego.
718Selon Agnès Whāme, il y aurait près de Rekabeco deux rochers yaac aux si Hnathege, Wamiar(i) (qui est un nom de femme si Hnathege) et Waiwarecal. Un toa-tit(i) que je n’ai pas cité fait allusion à Wamiar(i) venant de Ceni à Gurewo(e) ; un autre nomme de même Siaze, autre nom de femme yaac si Hnathege.
719Selon le P. Guitta, les Aca-kaze vainqueurs des si Hnathege, leur laissèrent néanmoins les rivages de Wo (correspondant à Menaku) et d’Ekur (correspondant à Wakuarori et Cadralo).
720Lorsque les si Hnathege étaient encore à Ceni, les Acakaze eurent peur de les voir encore trop puissants. Ils placèrent chez eux un “espion” i-re-kaica. Les jeunes gens revenaient de la pêche au grand filet avec une poche centrale, aderua. La falaise de Ceni est verticale, avec de bonnes aspérités, mais sans végétation qui eut pu déchirer le filet. Les jeunes gens remontaient la falaise en portant le filet qui faisait un tour en sautoir autour d’une épaule et la poitrine. L’“espion” se plaça le dernier, et donna un coup sec. Ce fut une dégringolade générale. Les blessés furent achevés sur place. Les si Hnathege, épouvantés de voir périr d’un coup tous leurs jeunes guerriers, s’enfuirent.
721(D’après Wahaga si Tapep(a) de Cengeite) : Un si Hnathege et sa femme nommée Sarine s’enfuirent jusqu’à l’endroit nommé depuis Hnaekeno près de Wagi-Taguadec, mais qui n’avait pas encore de nom. Ils y trouvèrent un vieux, Wa-ye-neren, et sa femme en train de travailler dans leur champ. Sarine jeta une petite pierre sur Wayeneren pour attirer leur attention : “Je vous appelle tous deux” dit-elle – “Que faites-vous ?” – “Nous sommes fugitifs de Ceni. On a tué les jeunes gens par le filet”. Le vieux avertit le chef Magoi (c’est un nom si Xacace). Celui-ci dit : “Laissez-les comme sujets”. Les deux fugitifs devinrent les sujets des si Hmed. Le lieu où ils s’établirent fut appelé Hnaekeno, en souvenir du coup du filet fait à leurs frères. Il y a un deuxième Hnaekeno au rivage à l’Ouest du village de Wabao, chez Gero.
722En 1879, Hnaekeno était découpé en plusieurs parcelles, Pesate, Kaedango, Punuso, Hnaekeno, Panicol tenues par les si Xacace de Wabao. Les si Hnaekeno étaient déjà partis du côté d’Eni où ils étaient adoptés par les si Cowel. En 1879, Wabeko si Hnaekeno était propriétaire de Pujele. Sa mère était la soeur de Yaca-nia Wayo si Cowel. A cause de cela, Wabeko travaillait la parcelle de Nengodae et en offrait le présent, wahnare, à Wayo. En 1967, les si Hnaekeno sont propriétaires de Yaon au Nord-Est de Cebureaw.
723Les autres si Hnathege suivis de quelques si Waek(o) se sauvèrent au rivage de Wo, où ils n’eurent pas le temps de s’établir. Les Acakaze aidés des serei Wo les vainquirent encore. Les si Hnathege repartirent. (Les serei Wo voulaient dominer toute la région de Guama). Les si Hnathege trouvèrent à Hna-du-ri-ridr(i) (appelée maintenant pompeusement “la montagne coupée”, butte artificielle de terre à l’Ouest de Hnaenedr) les chefs Wapurune si Ruemec et Cocokat si Tadeng qui venaient de vaincre les si Xacace à La Roche. On cherchait les survivants pour les débusquer de leurs cachettes. Selon Cocokat, Wapurune les épargna et les donna à Cocokat pour qu’ils soient ses sujets. Ils furent placés chez les si Gurewo(e).
724Installés à Gurewoe, les si Hnathege essayèrent de prendre Rawa aux si Rawa. Ceux-ci débouchant par le vieux sentier La-Rawa surprirent les si Hnathege et leur tuèrent Watom si Owi, de la famille de Francis Caea. L’endroit fut appelé Hna ridi Watom (= “là où on a frappé Watom”). On y a édifié un tas de pierres (sur le côté Est du sentier, près de Miramas). La région fut appelée I-co-jeu (= “dos à dos”) parce que les relations n’étaient pas cordiales entre si Rawa et si Hnathege.
725Plus tard, vers 1920, lorsque Stanislas Wainebengo serei Yeta voulut s’établir dans la région, il dut demander l’autorisation de Michel Tahmuhm(u) chef des si Hnathege.
726Un jeune homme, Drawine si Hnathege, planta deux bâtons deye-teta (Exccecaria agallocha) sur La-Pakad(a) au lieu-dit Guowel. Les si Gurewo(e) les arrachèrent pour les planter ailleurs, disant que le pays était à eux. Les si Hnathege les remirent en place. Ces yeteta après avoir végété rabougris loin de la mer, sont morts, l’un avant 1939, l’autre vers 1955.
727Les si Hnathege et les si Gurewo(e) se disputèrent, les uns et les autres, se prétendant les maîtres du sol. Ils convinrent d’une épreuve. Chaque clan ferait courir leurs jeunes gens à La-taijaij(a). Le clan de ceux qui ne feraient bouger aucune pierre resterait le maître. Les si Gurewo(e) naïfs firent bouger toutes les pierres. Mais les si Hnathege avaient déposé une pincée de sable sur chaque pierre branlante. Avec leurs jeunes gens, aucune pierre ne cogna. Les si Hnathege avaient caché leurs armes. Ils poursuivirent les si Gurewo(e) jusqu’à Pakad(a) et Wegur(e). D’autres montèrent sur leurs pirogues et allèrent à Lothi. Les si Hnathege les poursuivirent par terre. Décontenancés, les survivants restèrent quelques jours sur leurs pirogues au récif nommé depuis Xeti toa ni si Gurewo(e) (“enveloppe perchoir des si Gurewo(e)”), puis se retirèrent à Toka, où leurs descendants sont toujours (cf. Géographie…, p. 47). Leur chef Waishitine se retira à La Roche.
728Puis les si Tae s’emparèrent de Rawa. Il y a une période de confusion consécutive à la guerre des Eletok. Pour Auguste Waicane, les si Ruemec en plaçant les si Hnathege à Gurewo(e) les prirent comme aca-nia. Ils étaient spécialistes de la mise à mort des tortues.
729Les si Hnathege essayèrent de s’imposer comme grands chefs. Ils occupaient les rivages de Lothi et de Pakad(a) (le chef Michel Tahmuhm(u) m’a nommé Lothi Alofi, ce qui rappelle Futuna). Ils cultivaient Ceni, Hnaduriridr(i), Icojeu jusqu’à Medith(i). Ils étaient assez nombreux pour remplir son ossuaire d’ossements, où Sarrasin y prit plusieurs caisses. Les si Tae installés à La Roche devinrent les aca-nia des si Hnathege.
730J. Sinewami : Les si Hnathege se lièrent d’amitié avec les si Tadeng et les si Tawakan. Le chef Tahmuhm(u) si Hnathege demanda à Tojerine chef des si Tadeng et à Poleo chef des si Tawakan de massacrer les si Tae. On amena le buru dans une danse à Tojerine qui l’accepta. Le buru est un toupet de fibres de racines aériennes de pandanus. Il peut servir de message figuré au cours des danses pour demander une alliance guerrière. Les si Tae eurent vent de la chose, et prévinrent les si Tadeng et les si Tawakan, que c’était leur tour à eux les si Tae maintenant, mais que leur tour viendrait demain. Le chef si Tadeng en conféra avec son conseil, et les trois clans firent une coalition pour résister aux si Hnathege.
731Agnès Whāme : Le chef des si Hnathege était à Hna-ludo pour faire une pêche avec les jeunes gens. Les si Tae profitèrent de leur absence, firent irruption dans leur village, éventrèrent les femmes enceintes, cassèrent les reins des petits enfants, les pilèrent dans les waba-nu (trous creusés dans les troncs de cocotier pour recueillir l’eau de pluie). Ce massacre eut lieu à Lothi. Cibon un vieux si Waek(o), qui avait suivi les si Hnathege dans leurs pérégrinations, avait assisté de loin au massacre. Il courut au sommet de la falaise et fit tomber une pierre pour avertir Tahmuhm(u), occupé à boire de l’eau de mer. Celui-ci alluma un grand feu à Hnakanan (= “là où on partage le poisson”) pour rallier son monde. En rentrant on trouva un spectacle horrible : femmes égorgées, enfants écrasés dans les trous. Tous les si Hnathege se retirèrent à Dridrilo (= “noircissez-vous” sans doute pour la guerre) du côté de Medith(i). Tahmuhm(u) dit à ses sujets : “Nous ne pouvons aller à Puan, parce que les si Tae sont nos aca-nia. Nous les attendrons ici. “es jeunes gens jouaient au gu-cica (bois droit lancé en le faisant culbuter) et au cerceau wa-cu(e) à Hna-tha-wacu(e) (= “là où on lance le cerceau”). Yeiwene chef des si Guama proposa aux si Hnathege de se réfugier chez lui. Tahmuhm(uj refusa : “J’attends les si Tae ; je ne suis ni vaincu, ni fugitif. Tahmuhm(u) avait invité les si Tadeng et les si Tawakan à se joindre à lui. Ils ne tinrent pas leurs promesses. Des éclaireurs vinrent rendre compte que les si Tae allaient attaquer de face, pendant que les si Tadeng et les si Tawakan allaient les prendre à revers. Alors les si Hnathege mirent le feu à la plaine et se réfugièrent chez les si Gurewoe. En chemin, ils tuèrent un si Tadeng et sa femme, parce que son clan avait trahi leur parti.
732Les si Hnathege s’établirent d’abord à Pewaet, puis à Kare (l’emplacement de la chefferie actuelle des si Gurewoe) et au lieu-dit Penelo, où se trouvaient déjà des si Pula. Cette fuite eut lieu peu de temps avant l’arrivée des teachers samoans (1841). Leur rivage était à Guakow. Quelques si Waek(o) et si Tahnaden les avaient accompagnés. C’est au cours de leur séjour à Cerethi que se serait passé l’épisode d’Ael si Hnathege enlevé par les deux filles yaac.
733Les si Hnathege restèrent chez les si Gurewoe jusqu’à l’arrivée du P. Beaulieu en 1866. Il y eut une paix solennelle faite à Hna kon hnei si Kong, dans le Hnahnerec, près d’Enene, entre si Tae et si Gurewoe, où fut décidé le retour des si Hnathege à Gurewo(e). Celui-ci eut lieu l’année suivante. Les si Hnathege pensaient retrouver la puissance de jadis. Mais l’Histoire avait continué sans eux. La grande chefferie des si Tae s’était affermie et ceux-ci n’étaient pas décidés à l’abandonner. Depuis, les restes des si Hnathege sont à Ceni, où ils sont presque disparus. La branche aînée de la chefferie des serei Sego n’a plus de représentants masculins. Elle se continue par une famille d’une branche cadette. Les si Anumi n’ont qu’un représentant, lépreux, sans enfant. Le dernier membre des si Owi, Francis Caea n’a que des filles. Il n’y a plus qu’une femme venant des sere ri Bon(e). La splendeur passée est bien morte.
734Le symbole des si Hnathege est Kadaciere (= “le sable fin kada, qui trouble ere” le ressac) allusion à leur migration maritime. De là le nom de femme si Hnathege : Ererined (= ere le trouble, ri à, hnede la marée basse).
735(i) Les Acakaze (cf. Géographie… Voir à la table des noms de clans : Acakaze, si Lehmi retok, Si Lehmi si Roi, si Tadrere) ; Guiart (86), p. 305-309). Il semble qu’il y ait eu des si Tadrere dans le Nord de Maré avant l’arrivée du kaze. Il faudrait leur attribuer la construction du Hna kudo tit(i) qui porte leur nom (Géographie p. 354-355). Une datation grâce aux coquillages mangés par les constructeurs placés à l’intérieur du mur permettrait, peut être, par comparaison avec les dates de la construction des murs de Hnaenedr, de connaître le motif de leur entreprise. Ces si Tadrere étaient des noirs de bonne taille. On nous dit que les si Tadrere prirent le nom d’Acakaze lorsqu’ils capturèrent les deux maica avec l’aide des si Hnathege qui vivaient alors avec eux, et celle des si Wadrere. Ce détail mythique nous indique qu’ils reçurent une nouvelle chefferie à ce moment. On ne peut guère parler de cette population antérieure. Les implantations mythiques concernent, à peu près toutes, l’installation de la nouvelle chefferie.
736Celle-ci apparut à Hna-ca-uc, près de Thogon. Les anciens villages furent Kaewatin et Cadralo (où un ancien four, thuba-hna-ano, permettrait une datation au C 14). Cette chefferie est à mettre en relation avec les Wawalaha(e) de Kumo et de Mu. Les Wawalaha(e) de Hnacaöm sont eux-mêmes en relation avec la grande Chefferie Zeula de Gaica (Guiart (86), p. 363, note 2). Un des noms porté dans cette chefferie, Co-me-Kumo-ne (Co, nom mythique de Bula à Mu, et Kumo enqenedehu), rappelle cette origine.
737Celle des Acakaze si Lehmi est analogue. Elle est mise en relation également avec l’arrivée du kaze, dont ils tirent leur nom. Leur mythe originel est calqué sur celui des si Tadrere. Leur chefferie provient de la région de Malu ni Watu ne Drawine. Leurs implantations mythiques sont voisines de celles des si Tadrere. Les Acakaze étaient les gens du Nord, Dua i Rekabeco, le grand cap qui leur donnait leur cri de guerre : Aca-dua jo ! = “les maîtres du cap sont encore là !”
738Leur histoire est effacée jusqu’à leur révolte contre les si Hnathege (guerre contre les Eletok). Elle est racontée dans le chant Wahieku ni Rabadridr(i), appelé encore Kacahm(i) ne Sipane. Elle est postérieure au massacre des si Pecuaen par les si Ruemec. Elle a dû précéder le massacre des si Xacace. La guerre contre les si Hnathege a dû se poursuivre en même temps que lui. Les si Tadrere furent aidés par les si Lehmi, les serei Wakuarori serei Gowi, et les si Guama serei Wo. Si Tadrere et si Lehmi adoptèrent chacun un jeune homme qui sont les ascendants des si Xacace si Puan de Menaku et de Thogon. Après cette guerre, les Acakaze s’emparèrent des terres des si Hnathege enfuis à Gurewo(e).
739C’est à ce moment je pense que se séparèrent les si Lehmi en si Lehmi retok et en si Lehmi si Roi, car le lieu-dit Roi, entre “Lion” et Bone devait auparavant appartenir aux si Hnathege. Les si Lehmi retok (chefferie de Pakazenir et de son descendant Pujapujane) habitèrent à Menaku avec le rivage de Wo. Pakazenir relève du mythe des deux maica, Watu et Drawine. Les si Lehmi si Roi (chefferie de Kuma-Kal et de son fils Cue-Wapur(uj) s’installèrent à Roi avec le rivage d’Ekur.
740Les noms de Kuma-Kal et de Cue-Wapur(u) permettent de préciser la date du commencement de cette lignée. Wapurune si Ruemec avait fui de Dranin à cause des si Gurewoe. Il se réfugia auprès de Kal. Celui-ci le rétablit chez lui après une victoire à Dranin des si Ruemec aidés des Acakaze contre les si Gurewoe.
741Kal remontait l’a pic de la falaise quand un messager vint lui annoncer la naissance d’un fils. Pour marquer l’événement, Kal brûla son plumet ye-men(i) dans une poche de la roche. Cet endroit est appelé depuis Hna-re-yemeni Kal = “là où a été brûlé le plumet de Kal”. Il s’appela Kuma-Kal et nomma son fils Cue-Wapur(u) = “conduire Wapuru” (A. Manane).
742Sinewami si Tae essaya de fortifier leur position en envoyant à Menaku des si Thubawae et des si Tahnaden. Quelques-uns sont revenus à Menaku après l’affaire de Papa. Il y eut ainsi échanges d’escarmouches réciproques, qui deviennent sous la plume des missionnaires de la LMS des partis de “païens”. Mais les Acakaze craignaient davantage les si Guama que ceux-ci ne les craignaient, car en 1861, ils dormaient sur la falaise de Papa (à côté du temple de Menaku). Hnaisilin frappa un grand coup en tuant 40 païens le 28 juin 1861 (R. Leenhardt (122), p. 26). D’après le grand nombre des victimes, il ne peut s’agir que du massacre des Acakaze à Papa, par les si Guama et les si Waek(o).
743Le P. Beaulieu raconte en détail cette affaire. Gocene fut autorisé par Hnaisilin à rentrer sur ses terres, mais il n’était plus doku. Peu de temps après la bataille de Papa, la femme du frère de Gocene accoucha d’un garçon. Il fut nommé Wia-ko (= “la canne à sucre-pénis vit encore”). Ainsi se perpétua la chefferie des si Tadrere. Gocene ne fut jamais un sujet vraiment soumis. Hnaisilin Dokucaas, fils du précédent, en 1890, le fit exiler à l’Ile des Pins où il mourut.
744Les si Tadrere ont pour sujets les Acakaze serei Man(e), les Acakaze si Wadra ni rue waica, les Acakaze si Taco, et les si Xacace de Thogon (descendants d’un rescapé des si Xacace de La Roche).
745Les si Lehmi retok restèrent à Hnaenedr, mais continuèrent à cultiver sur leurs terres à Menaku, et à pêcher à Wo, où Sinewami fut surpris par Nidoish(i) le 29 août 1869, et des Acakaze furent liés. La Commission Charbonnet donna tort aux si Lehmi retok et en 1876, la commission Cave dépossédait ceux-ci de leurs terres qui furent dès lors occupées par les si Lehmi si Roi.
746Ces changements fréquents de propriétaires explique l’absence d’implantation mythique sur le sentier de Menaku à Wo.
747Avec les si Lehmi si Roi, vivent maintenant à Menaku les si Bomen(u), les si Tahnaden, la famille de Magoi si Xacace de Puan issue d’un si Xacace rescapé.
748Les Acakaze se vantent de leur nom symbolique Kae-wajekol = “nichée d’étoiles”, aucun chef de clan ne voulant se soumettre à un de ses pairs. Cette mésentente a été la cause de leur chute.
749A Hnaenedr, la famille du petit chef Bernard Gudo, Waicane, a été adoptée pour tenir la place des derniers si Tawai(e). Le père de B. Gudo, Michael Waicane, a été nommé petit-chef parce qu’il était interprète de l’Administration. C’est une branche cadette venant du chef Pujapujane.
Table des illustrations
Légende | 1 Hnate te re kaz = Hna cede re kaz2 Nengone3 Purem4 Wabao5 Niri6 Cacag(o)7 La Roche Puan et Tagi8 Waba-xeru(e)9 Ceni10 Wakuarori11 Hnacadoku12 Cara13 Ruecil14 Pakad(a)15 Pawaroi16 Padewia17 Gurewoe18 Padaw(a) de Guama19 Padaw(a) de Medu20 Adong(o) |
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