Le spectre de la machine
Rodney Graham (Rheinmetall, projection vidéo)
p. 31-36
Extrait
Spectre : « Apparition effrayante d’un mort. » Petit Robert
1Avec l’invention de la photographie et, plus encore, du cinéma, « la momie du changement » (André Bazin), on pouvait penser que l’aventure prométhéenne de l’homme était à son comble. L’homme « prothétique », comme l’appelait Freud, n’y devenait-il pas pour de bon, via les nouveaux appareils optiques d’enregistrement, le démiurge de ses apparences ? C’était au fond la traduction, in concreto, de l’idée mère de l’anthropologie marxiste de l’homme producteur de lui-même. Avec ce tour en plus qu’il ne serait plus seulement ce qu’il avait toujours été, à savoir le produit indirect des conditions de sa vie matérielle et de son action, mais qu’il devenait directement son propre reflet dans la production-multiplication des images produites par ses machines : lui-même comme son image. Si toutes les techniques portaient bien jusque-là la marque de leur inventeur, le sillon, la trace de la charrue et de l’homme qui l’avait conçu
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