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Table des matières

La pensée sociale de Colbert de Castlehill d’après ses travaux au Comité de mendicité

Jean-Baptiste Masméjan

p. 161-173

Texte intégral

1La Révolution s’accompagne d’un volontarisme politique résolument optimiste en ce qui concerne le traitement de la mendicité et la prise en charge des pauvres malades. L’ambition des Constituants est de mettre fin à la misère qui d’après eux est consubstantielle à la vie sociale de l’Ancien Régime et que l’on retrouve encore au début de la période révolutionnaire. En effet, le Comité de mendicité, sur la base de données rapportées par les départements, estime le pourcentage d’indigents au sein de la population à 11,6 %1. Les révolutionnaires entendent faire cesser cette misère endémique. Le pouvoir royal et le dysfonctionnement des institutions charitables sont pointés du doigt. L’indigent est avant tout perçu comme une victime des lois et des carences de l’État. Aussi, l’ambition régénératrice des députés s’accompagne d’une latitude sans pareille en la matière. Représentants de la nation souveraine, ils veulent opérer un ensemble de réformes qui visent à la fois à garantir des secours à tous les citoyens et à mettre un terme aux vicissitudes que connaît l’Ancien Régime concernant la résorption de la mendicité et le traitement sanitaire des plus pauvres. C’est à ces fins que le Comité de mendicité commence à prendre forme à la fin du mois de janvier 17902. Celui-ci est chargé de proposer l’établissement d’une nouvelle législation en matière de secours publics au profit des indigents. Ses dévolutions sont larges : il entend s’assurer tant des soins à donner aux pauvres malades des villes et des campagnes que de remédier à la mendicité.

2Élu député du clergé de la sénéchaussée de Rodez, Colbert de Castlehill s’inscrit pleinement dans cette ambition. Celui-ci a été l’instigateur d’œuvres charitables au sein de son diocèse3. De plus, le référencement de ses ouvrages de sa bibliothèque personnelle témoigne d’un attrait pour ces questions. Il est de ces prélats éclairés qui ont contribué à l’entrée en Révolution. L’évêque de Rodez fait partie des 148 députés du clergé qui rejoignent le tiers le 19 juin 17894. Sa participation à la révolution politique opérée par les députés du tiers lui donne ainsi une certaine popularité.

3Toutefois, ce rôle actif ne se retrouve pas au sein de l’Assemblée nationale, étant entendu que ses prises de paroles demeurent rares. Cela ne signifie pas pour autant qu’il se soit montré inactif. Il fait partie de trois Comités créés sous la Constituante : celui de recherche, de règlement et, celui qui nous intéresse, de mendicité qu’il intègre le 17 mars 1790 dont il est le vice-président5. Sans doute, sa longue expérience en tant que président de l’assemblée provinciale de Haute-Guyenne lui a conféré une certaine légitimité bien que nous ne connaissions pas le processus de désignation6. En effet, les procès-verbaux de la province de Haute-Guyenne témoignent qu’il a eu à connaître des questions relatives aux secours et au traitement de la mendicité7.

4Colbert de Castlehill ne fait pas partie des quatre premiers membres désignés par l’Assemblée nationale constituante à la fin du mois de janvier 17908. Il l’intègre plus tardivement en raison de l’ampleur du travail à effectuer au sein du Comité. Ainsi, le 17 mars 1790, l’Assemblée décide de procéder à l’élection de six nouveaux députés, parmi lesquels figure l’évêque de Rodez9.

5Avant l’adjonction de ces nouveaux membres, il est décidé le 26 février 1790 que les membres du Comité de mendicité travailleraient séparément à établir les bases et le plan de leur travail face à la multiplicité des tâches et seraient donc divisés en sections. Le 26 avril 1790, celles-ci sont organisées, Colbert de Castlehill fait partie de la 2e section relative aux pauvres malades, comprenant entre autres, le célèbre docteur Guillotin, Thouret10, et de Virieu11. Le procès-verbal de la séance du 9 juin 1790 nous révèle que la masse documentaire récoltée par le Comité afin d’établir une nouvelle législation sera dépouillée, s’agissant des documents sur les hôpitaux de province, par l’évêque de Rodez. Le 3 septembre 1790 est opéré un affinement entre les différentes sections, Colbert de Castlehill garde un rôle connexe à ce qui a été initié le 20 avril. Son travail concerne tant les secours aux pauvres dans les campagnes que les secours aux infirmes aux côtés des mêmes Guillotin, Thouret et de Virieu12.

6L’action du Comité de mendicité et son empreinte doctrinale sont indissociablement liées à son président, Larochefoucauld-Liancourt13, ce qui explique pourquoi on lui impute la paternité des différents rapports rendus. Élu député de la noblesse du bailliage de Clermont-en-Beauvaisis aux États généraux, il est également président du Comité des impositions et membre du Comité d’aliénation. Sa vie est jalonnée d’actions philanthropiques. Sous l’Ancien Régime, il est par exemple le fondateur de la ferme-école et de l’école professionnelle de Liancourt, associées à la Maison philanthropique de Paris14. Nous lui devons également les attributions particulièrement larges du Comité. En effet, Bailly, maire de Paris, sollicite le concours de l’Assemblée afin de contribuer à la souscription qu’il a ouverte au profit des indigents. Se refusant de soutenir particulièrement cette ville au détriment de toutes les autres, l’Assemblée nationale constituante décline cette sollicitation, mais décrète le 21 janvier 1790 : « qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur la lettre écrite à son Président par le maire de Paris; et cependant, voulant que tous les dons que tous ses membres sont disposés à faire en faveur des pauvres de cette capitale soient employés de la manière la plus avantageuse, a décrété qu’il sera nommé quatre commissaires pour les recevoir, et remettre les sommes qui en proviendront à la municipalité, chargée d’en régler l’emploi et la distribution ; et les mêmes commissaires seront chargés de présenter à l’Assemblée des vues sur les moyens de détruire la mendicité »15. La dernière partie du décret est directement imputable à Larochefoucauld-Liancourt, qui, au moment où il était question de désigner les commissaires chargés de récolter les dons des députés, s’oppose à une taxation des représentants de la nation. Il propose avec succès l’amendement précédemment évoqué afin que ces commissaires puissent rechercher les moyens de mettre un terme à la mendicité16.

7La plupart des rapports sont associés à son nom, ce qui tend à occulter le rôle joué par les autres membres du Comité17. De plus, la connaissance de la pensée sociale de Colbert de Castlehill paraît malaisée à déterminer dans la mesure où la majorité des archives du Comité a disparu18. Parmi la masse documentaire à notre disposition subsistent les procès-verbaux des séances, des correspondances et bien évidemment les différents rapports et projets de décret. Il ressort de leur lecture que l’action de Colbert de Castlehill est davantage concentrée sur des points techniques que doctrinaux et politiques. Selon nous, cela ne s’explique pas seulement par la place importante donnée au Président du Comité de mendicité. L’hypothèse la plus plausible résulte de dissensions autour de la politique d’assistance à adopter, bien que cela n’apparaisse pas clairement dans ses interventions au sein du Comité de mendicité. Étudier la pensée de l’évêque de Rodez, que l’on va tenter de saisir à travers un faisceau d’indices, permet de mettre en lumière les divergences politiques sur la question de l’assistance des plus pauvres.

8Aussi, en quoi l’engagement de Colbert de Castlehill témoigne-t-il des enjeux autour du traitement de l’indigence sous la Constituante ?

9Si le positionnement politique de l’évêque de Rodez à l’intérieur du Comité le cantonne à un rôle plutôt mineur (I), son action et son expertise démontrent sa volonté de transformer le traitement de l’indigence au sein du Royaume (II).

I. Un positionnement donnant un rôle politique marginal à l’évêque de Rodez

10La place prépondérante qu’occupe le président du Comité de mendicité, Larochefoucauld- Liancourt, ne résulte pas simplement d’après nous de sa personnalité. Celui-ci s’inscrit politiquement dans la continuité des orientations prises par la Constituante en ce qui concerne le traitement du clergé et de la mendicité. La divergence entre le président et le vice-président paraît explicite en la matière. Larochefoucauld-Liancourt est un fervent défenseur du rôle central que doit jouer l’État en matière de secours. Cette position transparaît dans les différents rapports et projets proposés par le Comité19. Celle-ci est perceptible à travers l’épineuse question de l’abolition des privilèges, incluant la dîme, et la mise à disposition des biens du clergé au profit de la nation. Or, le 10 août 1789, bien que nous ne disposions pas précisément du contenu de son discours, Colbert de Castlehill semble s’opposer expressément à la suppression de la dîme et à la future vente du patrimoine de l’Église. Selon lui, les revenus du clergé et son patrimoine sont nécessaires autant pour l’exercice du culte catholique que pour les plus pauvres20. Le journal de Paris est plus précis sur la teneur du propos de l’évêque de Rodez. Il est rapporté que : « M. L’évêque de Rodez a parlé longtemps ensuite sur les deux questions & du rachat des dîmes & de la propriété des biens du Clergé. Il parlait en homme persuadé que les biens du clergé sont nécessaires au maintien de la religion, à la décence du culte & au soulagement des Pauvres. ; mais quelques-unes de ces maximes n’ont pas paru assez nationales, & dès ce moment il a été difficile d’apprécier ce que ce Prélat a dit, parce qu’il a parlé toujours au milieu d’un tumulte qui étouffait absolument sa voix »21. Ainsi, dès l’été 1789, Colbert de Castlehill rejette l’abolition de la dîme et l’argumentaire des patriotes, positionnement qu’il maintient tout au long de la Constituante, à rebours de la doctrine forgée par le Comité de mendicité. Si celui-ci, à l’instar de ses pairs désignés par la sénéchaussée de Rodez, souhaite réformer la dîme22, l’évêque de Rodez a certainement dû craindre les conséquences sociales de sa suppression, bien que cet impôt, largement dévoyé, n’alloue qu’une maigre portion au profit des indigents23.

11Toutefois, le statut quo demeure sur ces deux points à propos des biens nationaux et des dîmes dédiées aux pauvres24. L’article 8 du décret du 20 avril 1790 précise que : « Sont et demeurent exceptés, quant à présent, des dispositions de l’article 1er du présent décret25, l’ordre de Malte, les fabriques, les hôpitaux, les maisons et établissements de charité et autres où sont reçus les malades; les collèges et maisons d’institution, étude et retraite, administrés par des ecclésiastiques ou par des corps séculiers, ainsi que les maisons de religieuses occupées à l’éducation publique et au soulagement des malades; lesquels continueront, comme par le passé, et jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné par le Corps-Législatif, d’administrer les biens, et de percevoir, durant la présente année seulement, les dîmes dont ils jouissent; sauf à pourvoir, s’il y a lieu, pour les années suivantes, à l’indemnité que pourrait prétendre l’ordre de Malte, et à subvenir aux besoins que les autres établissements éprouveraient par la privation des dîmes »26. Un décret du 23 octobre 1790 prolonge le sursis dont bénéficient les biens des hôpitaux27. Il en est de même pour un autre décret du 5 avril 1791, qui prévoit leur maintien jusqu’au 1er janvier 179228.

12Il est vrai que parmi l’immense diversité d’institutions charitables au sein du royaume, certaines sont tributaires de la dîme qui pourvoit à leur fonctionnement29. Le point soulevé ici ne va pourtant pas de soi dans les écrits de l’évêque de Rodez. Dans l’introduction de son Projet d’un traité de paix générale et perpétuelle entre les différentes puissances chrétiennes de l’Europe, Colbert de Castlehill évoque l’importance de l’Église sur le plan de l’instruction morale, mais ne se prononce pas explicitement sur son rôle temporel en matière d’assistance30. De plus, la question des secours publics n’échappe pas à la modernité de la pensée de Colbert de Castlehill. Outre les Moyens de détruire la mendicité, qui fait partie de sa bibliothèque personnelle ‒ ouvrage qui a suscité un grand écho au sein de l’opinion publique en faisant la part belle aux idées nouvelles31 ‒ l’évêque de Rodez est l’instigateur d’un atelier de charité, œuvre d’assistance par le travail, qui témoigne de l’avant-gardisme de sa pensée sociale32. Par les différentes offres de travail libre qu’il entend créer au profit des indigents, Colbert de Castlehill s’inscrit pleinement dans l’esprit de la fin du XVIIIe siècle, en privilégiant une conception libérale de l’assistance des valides par le travail plutôt que des mesures coercitives33.

13De plus, il semble que l’évêque de Rodez s’est attaché les services de Regnier34, ancien médecin militaire, qui est l’auteur de plusieurs brochures visant la réorganisation et le réaménagement de l’Hôtel-Dieu de Paris. Regnier dresse un tableau dur du traitement des malades au sein de cet établissement35. Celui-ci vilipende également les religieuses qui y délivrent des secours au motif qu’elles entravent l’amélioration du traitement des malades et la rationalisation du fonctionnement de l’établissement36.

14Malgré sa proximité avec les propagateurs des idées nouvelles, Colbert de Castlehill demeure partagé entre celles-ci et la défense des intérêts de l’Église à mesure que les conflictualités deviennent de plus en plus fortes. Il est signataire de l’Exposition sur les principes de la Constitution civile du clergé, mais aussi de la lettre écrite par les évêques députés à l’Assemblée nationale en réponse au Bref du Pape Quod Alicantum, à l’intérieur de laquelle la mise à disposition des biens du clergé au profit de la nation est déplorée37.

15Ce point de vue est explicité de manière plus personnelle dans son Mandement et ordonnance de l’évêque de Rodez au sujet de l’élection de M. de Bertier : « Nos oppresseurs, voulaient-ils avilir d’avance ceux qu’ils se préparaient à dépouiller, et après cette spoliation cherchent-ils à nous rendre odieux, afin que notre ruine soit plus agréable à la multitude ? Nos biens étaient le gage de la desserte de nos temples, de la splendeur du culte ; ils étaient aussi le patrimoine des pauvres et la ressource de l’état dans ses besoins urgents, car jamais ils ne furent refusés à la patrie lorsqu’elle en invoquait le secours : nous n’en étions que les dépositaires, les gardiens et les dispensateurs, nous n’avons ni donné ni livré ce dépôt sacré, mais la force majeure s’en est emparée et nous ne lui avons pas résisté ; nous en avons offert le sacrifice à l’auteur de tous les biens, et il ne nous en reste aujourd’hui d’autre regret que celui de ne pouvoir plus soutenir le faible, soulager l’indigent et alléger les désastres de l’homme infortuné »38. Ainsi, l’évêque de Rodez ne pouvait que se sentir partagé entre la défense de l’Église de France et l’orientation prise par le Comité de mendicité sur la question de l’assistance.

16Il ne peut qu’être réticent face aux velléités du président du Comité de mendicité qui cherche à assurer la mise sous tutelle des œuvres charitables. Toutefois, cela ne signifie pas pour autant que Colbert de Castlehill s’oppose à l’immixtion de l’État sur ces questions. Quoique nous n’en connaissions pas la teneur, il est l’auteur pour le Comité d’un rapport sur les secours à délivrer dans les départements, supposant la volonté d’un certain interventionnisme étatique39. Si celle-ci est avérée, il convient de modérer la possible divergence entre le président et le vice-président du Comité.

17Ainsi, l’ambition de l’évêque de Rodez en matière sociale est mesurée eu égard au rôle que celui-ci donne au clergé en matière d’assistance. Bien que son empreinte doctrinale semble faible en raison de désaccords politiques avec le président du Comité de mendicité40, il n’en demeure pas moins que son expérience reste très utile.

II. Une expertise au profit du Comité de mendicité : la recherche d’une rationalisation de l’assistance

18Malgré une influence probablement réduite au sein du Comité, l’évêque de Rodez s’est montré très actif. Colbert de Castlehill est l’auteur d’un certain nombre de missives en réponse à des demandes et autres travaux réceptionnés. Il n’est jamais le seul signataire41. Son appétence pour les questions financières a certainement été précieuse pour la compréhension des documents reçus par le Comité de mendicité. Colbert de Castlehill se charge d’étudier le projet de Duvillard d’établir une caisse de prévoyance ou encore celui de la tontine Lafarge, créée en 179142.

19C’est surtout sur les questions sanitaires que son action a été la plus conséquente. L’évêque de Rodez, connaisseur des difficultés inhérentes aux secours à délivrer dans les campagnes – ces dernières subissant d’une manière générale d’importantes insuffisances en la matière – procède à la lecture d’un rapport sur les secours aux malades dans les campagnes et d’un second relatif à l’assistance à porter aux malades43. Il a certainement ainsi contribué à établir le projet de décret explicité dans le quatrième rapport du Comité de mendicité par Larochefoucauld-Liancourt. Il est dit en propos liminaire que 4/5e des malades dans les campagnes n’ont pas accès à des secours dont ils auraient besoin en raison de carences institutionnelles et du manque de personnel44. Le projet prévoit également de placer des médecins payés par l’État, lesquels délivreront des secours gratuits chez les pauvres45.

20L’apport de l’évêque de Rodez ne se borne pas aux seuls malades des campagnes, mais aussi aux établissements de la plus grande ville du Royaume. Il est l’auteur d’un certain nombre de rapports sur les structures charitables parisiennes. Il présente ainsi un exposé sur l’Hôtel-Dieu, l’hôpital de Saint-Louis, l’hôpital de Sainte-Anne, la Charité, l’hôpital des Convalescents, la maison royale de santé, l’hospice de Saint-Sulpice46. Il procède par la suite à un second rapport sur l’administration des Incurables47. De ces travaux, le rapport au nom du Comité qui en découle est du seul Larochefoucauld-Liancourt. Toutefois, comme le précisent Camille Bloch et Alexandre Tuetey, si le président du Comité semble en être l’auteur réel, il paraît indéniable que l’évêque de Rodez a certainement livré de précieux renseignements concernant les établissements précités48. Les éléments donnés par Colbert de Castlehill ont contribué à l’évaluation de chacune de ces œuvres charitables. Sont d’abord présentées leurs origines, leurs dévolutions, la manière dont les traitements aux malades sont fournis et enfin les réformes à opérer afin d’améliorer leurs fonctionnements. Ce qui transparaît de façon systématique, c’est la critique de la surpopulation en leur sein et ses suites funestes : forte mortalité, diffusion de maladies contagieuses… Dans le sillage de Regnier, sont formulées des propositions tendant à réduire le nombre de malades hospitalisés, et apparaît une volonté de rationaliser la gestion des établissements hospitaliers. Surtout, les considérations hygiénistes prédominent : les conditions de vie et l’insalubrité sont dénoncées avec verve. La critique de l’Hôtel-Dieu cristallise le plus les mécontentements. En effet, dans la continuité de l’opinion éclairée sous l’Ancien Régime, l’institution est accusée de ne pas prendre en charge correctement les malades en raison de la surpopulation et de la mauvaiseté des traitements. Le Comité, vilipendant la dimension exorbitante de cette structure sanitaire, privilégie la dissémination de plus petits établissements et surtout les secours fournis à domicile49.

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21Ainsi, la participation de Colbert de Castlehill au sein du Comité de mendicité met en évidence les enjeux politiques autour de l’assistance des indigents. Si son positionnement semble lui donner un rôle plutôt marginal, il n’en demeure pas moins que l’opposition annoncée entre les défenseurs d’une conception centrée sur l’intervention de l’État et les promoteurs de l’Église, ne constitue pas une rupture si stricte qu’elle en a l’air. L’évêque de Rodez fait partie de ces prélats éclairés soucieux de rationaliser et d’organiser l’assistance de manière que tous puissent en bénéficier, y compris ceux des campagnes.

Notes de bas de page

1Christine Dousset, « Statistique et pauvreté sous la Révolution et l’Empire », AHRF, n° 280, 1990, p. 173.

2Infra. Le 23 janvier au matin, le président invite les députés à nommer parmi eux quatre membres afin de former un Comité chargé de récupérer les fonds en faveur des plus pauvres, et de trouver des moyens d’assurer leur subsistance. La création de ce Comité répond à une abondante campagne de presse et de demandes de la part de l’opinion publique pour que l’Assemblée nationale s’occupe de cette question centrale. Toutefois, comme le relèvent Alexandre Tuetey et Camille Bloch, la genèse du Comité résulte davantage d’un besoin conjoncturel que d'un projet politique mûri de longue date. Camille Bloch, Alexandre Tuetey, Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante, Paris, Imprimerie nationale, 1911, p. IX-X. Sur les origines du Comité de mendicité, se référer à notre publication : Jean-Baptiste MasmÉjan, « Le Comité de mendicité mandaté par la nation : vers une harmonisation de la politique d’assistance des valides (1790-1791) », Cahiers Jean Moulin, n° 2.

3Sur l’action sociale de Colbert de Castlehill en tant que vicaire général de de Brienne, voir Andrew Moore, Seignelay Colbert de Castlehill in the pre-revolutionary years, A Bishop of the Ancien Regime, Mémoire d’histoire, Université de Bristol, 1988, p. 95. Voir aussi infra.

4Edna Lemay et al., Dictionnaire des Constituants : 1789-1791, Oxford, Voltaire Foundation, 1991, t. I, p. 230.

5Pour une rapide rétrospective des différentes prises de parole et de son action sous la Constituante, se référer à la notice sur Colbert de Castlehill dans Ibid. p. 229-230.

6Le 14 avril, le résultat de l’élection des différents commissaires préposés à la question de l’extinction de la mendicité est annoncé par le président de l’Assemblée nationale : Cretot, 70 voix ; Guillotin, 70 ; David, curé, 67 ; l’abbé de Bonnefoy, 33 ; l’évêque d’Oléron, 29 ; l’évêque de Rodez, 23. Camille Bloch, Alexandre Tuetey, Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante, op. cit, p. XI. Par ailleurs, la formation du bureau est effectuée le 19 avril 1790, cependant, nous ignorons la façon dont la désignation a eu lieu. Ibid., p. XXIV-XXV.

7Voir par exemple le rapport du 5 décembre 1786 du Bureau du bien public. Procès-verbal des séances de l’assemblée provinciale de Haute-Guyenne tenue à Villefranche dans les mois de novembre et décembre 1786, Paris, Crapart, p. 220-233.

8Les quatre membres sont le duc de La Rochefoucauld-Liancourt, l’abbé d’Abbécourt (Simonnet de Coulmiers), Massieu, curé de Cergy, et Prieur, député du Tiers État de Châlons-sur-Marne. Ibid., p. X.

9Ainsi, dans le procès-verbal du 1er avril 1790, on trouve les six députés suivants : l’évêque d’Oléron, Guillotin, l’évêque de Rodez, Decretot, Bonnefoy, David, et deux suppléants : de Virieu et Barère de Vieuzac. Ibid., p. XI.

10Michel-Augustin Thouret est le frère du célèbre député de la Constituante. C’est un médecin qui a une grande connaissance du milieu hospitalier de son époque, ce qui explique son recrutement par le Comité de mendicité. Une bibliographie succincte est disponible dans Ibid., p. XVI.

11Ibid., séance du 26 avril 1790, p. 21-23. Virieu est député de la noblesse du Dauphiné. Il fait partie par ailleurs du Comité des subsistances le 19 juin 1789. Ibid., p. XVI.

12Ibid., p. XXVI-XXVII. Colbert de Castlehill se trouve préposé aux questions relatives aux « Secours aux pauvres dans les grandes villes », aux côtés de Guillotin, Périsse du Luc et Thouret ; des « Secours aux pauvres dans les campagnes », aux côtés de Guillotin, de Virieu et Thouret et enfin des « Secours aux infirmes » aux côtés de Guillotin et Thouret. Ibid., séance du 3 septembre 1790, p. 127.

13Pour une biographie de Larochefoucauld-Liancourt, se référer à Ferdinand Dreyfus, Un Philanthrope d’autrefois. La Rochefoucauld-Liancourt, 1747-1827, Paris, Plon Nourrit et Cie, 1903.

14Camille Bloch, Alexandre Tuetey, Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante, op. cit, p. XIII.

15Ibid., p. IX.

16Ibid., p. IX.

17Ibid., p. XLV.

18Outre les traces des procès-verbaux du Comité de mendicité retranscrits par Alexandre Tuetey et Camille Bloch, seule subsiste la cote F16936 aux archives nationales. Sur ce point, voir Guy Thuillier, Un observateur des misères sociales : Leclerc de Montlinot (1732-1801), Paris, Comité d’histoire de la sécurité sociale, 2001, p. 277.

19Il apparaît pour le Comité, en ce qui concerne le mode de répartition des fonds de secours, que la masse totale des fonds doit être gérée par la nation. Par conséquent, il n’est plus opportun que les hôpitaux et autres maisons de charité jouissent de revenus qui leur sont propres. Aussi celui-ci demande de procéder à l’aliénation de leurs biens. Sur cette question, voir notamment le troisième rapport du Comité de mendicité intitulé : « Bases constitutionnelles du système général de la législation et de l’administration des secours », par Larochefoucauld-Liancourt, lu au sein du Comité le 3 septembre 1790. Ce rapport est reproduit par Camille Bloch et Alexandre Tuetey dans les Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante, op. cit., p. 357 et suiv. La suppression des dîmes ne fait ainsi pas l’objet de critiques politiques, mais apparaît au contraire comme une opportunité pour que la nation assure la prise en charge de l’assistance, Ibid., p. 360. Le rapport est particulièrement explicite sur cette prétention : « Nous dirons que c’est à la Nation seule qu’il appartient d’expliquer ce mot, parce qu’il est de son devoir et de son intérêt de donner aux secours publics la direction et l’application la plus utile au vœu de l’humanité, à la prospérité de l’État, à l’amélioration des mœurs de ses habitants; et nous dirons enfin qu’en les distribuant ainsi, qu’en les affectant aux vrais nécessiteux, partout où ils se trouvent, la Nation conserve, défend les droits, la propriété des pauvres, les étend, loin de les violer. À tous ces motifs vraiment constitutionnels, et nécessairement conséquents de tous les principes qui vous ont dirigés jusqu’ici, nous en ajouterons d’autres qui, moins essentiels, sont encore cependant de quelque poids. Une grande partie des revenus des hôpitaux sont diminués par ceux de vos décrets qui ont détruit les péages, le droit de banalité et surtout les dîmes ». Ibid., p. 361. Aussi la fin du rapport présente un projet de décret. L’article 11 du projet de décret prévoit que : « Les dotations, souscriptions, qui se feront à l’avenir au profit des pauvres et qui ne contrarieront pas les lois du royaume, seront suivies dans toute leur intention, pendant l’espace de cinquante années et toujours durant la vie des donateurs ou souscripteurs. Le nom des souscripteurs ou donateurs sera gravé sur un des murs, dans le lieu le plus apparent du principal établissement ». L’article 22 est aussi explicite sur ce point : « En conséquence des dispositions précédentes, les biens dont les revenus sont aujourd’hui destinés à l’entretien des hôpitaux, maisons de charité, les biens régis par les ordres hospitaliers, les fonds affectés aux maladreries et autres établissements du même genre, sous quelque dénomination que ce puisse être, sont déclarés biens nationaux, et toutes les dispositions des lois relatives auxdits biens leur seront communes : la question sur les biens assignés à l’ordre de Malte demeurant ajournée ».

20Nous ne disposons pas d’une retranscription précise du propos de l’évêque de Rodez sur ce point. Les archives parlementaires rapportent simplement que : « M. Colbert de Seignelay, évêque de Rodez, parle des biens du clergé, comme étant essentiellement nécessaires au maintien de la religion et à la décence du culte, et comme une propriété des pauvres ». A. P., t. VIII, séance du 10 août 1789, p. 387.

21Journal de Paris du 12 août 1789, n° 224, p. 1009-1010.

22Andrew Moore précise que « la dîme cependant, était défendue, tant qu’elle serait exclusivement vouée au paiement de la portion congrue ». L’auteur estime à cet égard « qu’il est peu probable que Colbert se soit opposé à ces principes ». Andrew Moore, Seignelay Colbert de Castlehill in the pre-revolutionary years, A Bishop of the Ancien Régime, op. cit., p. 126.

23La part de la dîme consacrée à l’assistance des pauvres serait d’après Dupont de Nemours de 15 millions, sur un montant total estimé à plus d’une centaine de millions. C’est la raison pour laquelle l’orateur propose d’augmenter ce montant à la suite de la suppression de la dîme. A. P., t. IX, séance du 26 septembre 1789, p. 151-152. Sur cette question, voir Pierre-Henri Goutte, « Économie et transitions : l’œuvre de Dupont de Nemours au début de la Révolution française 1789-1792 », in Jean-Michel Servet (dir.), Idées économiques sous la Révolution (1789-1794), Lyon, PUL, 1989, p. 145-234.

24Mathieu Arnoux précise qu’à l’issue des débats du mois d’août 1789, « le rôle de la dîme dans l’entretien du clergé séculier, l’enseignement et l’assistance, sera reconnu in fine par l’Assemblée, qui chargea par la suite la Commission des dîmes de mettre en place une assistance aux pauvres en même temps que de procéder à la suppression du prélèvement ». Mathieu Arnoux, « Pour une économie historique de la dîme » in Roland Viader (dir.), La dîme dans l’Europe médiévale et moderne, Toulouse, PU du midi, 2010, p. 145-159.

25L’article 1 du décret dispose : « L’administration des biens déclarés, par le décret du 2 novembre dernier, être à la disposition de la nation, sera et demeurera, dès la présente année, confiée aux administrations de département et de district, ou à leurs directoires, sous les règles, les exceptions et les modifications qui seront expliquées ». Jean-Baptiste Duvergier, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements, avis du Conseil d’État, Paris, A. Guyot & scribe, 1834, t. I, p. 154-155.

26Ibid., p. 154-155.

27Adolphe de Watteville, Législation charitable, Paris, Alexandre Heois, 1843, p. 3.

28Ibid., p. 8.

29Sur cette question, voir Alan Forrest, La Révolution française et les pauvres, Paris, Perrin, 1981, p. 72-73. Voir aussi Louis Trénard, « L’idéologie révolutionnaire et ses incidences » in Jean Imbert (dir.), La protection sociale sous la Révolution française, Paris, Association pour l’étude de l’histoire de la sécurité sociale, 1990, p. 164.

30Son auteur explicite le rôle temporel de l’Église : « Le but de cette institution ou établissement d’une religion et d’une hiérarchie, en tant que politique et purement humain, est d’instruire les citoyens dès leur enfance, comme je viens de le dire, dans les vérités les plus essentielles, dans la sagesse, et dans la loi de la justice, ou dans l’innocence mutuelle ; de leur en apprendre l’application aux différentes occupations et situations de la vie ; de les persuader, les exhorter, et les exciter par ses sanctions naturelles à s’y confirmer en effet, et cela en vertu de la seule autorité naturelle et essentielle de leur ministère politique.

Le but de cette institution, en tant que Divine et Chrétienne, est d’instruire aussi les citoyens dans les dogmes essentiels de la foi, dans la loi de la miséricorde, de la bienfaisance, de la charité Chrétienne, et de les exhorter à se soumettre à cette foi et à cette loi par les actions qui y sont attachées, d’administrer les sacrements, et célébrer les mystères et le culte public avec la décence convenable, par l’assistance seule auquel les citoyens professent et se manifestent mutuellement leur soumission à ces deux lois, et contractent personnellement, et il faut supposer volontairement, l’obligation de s’y conformer ». Seignelay Colbert de Castlehill, Projet d’un traité de paix générale et perpétuelle entre les différentes puissances chrétiennes de l’Europe, précédé d’explications préliminaires, 1782, p. 43-44.

31L’ouvrage dont il a été possesseur était le Résumé des mémoires qui ont concouru pour le prix accordé en l’année 1777 par l’Académie des sciences, arts & belles lettres de Châlons-sur-Marne et dont le sujet était, les moyens de détruire la mendicité en France, en rendant les mendiants utiles à l’État sans les rendre malheureux, Châlons-Sur-Marne, Seneuze, 1779.

32Selon Andrew Moore, Colbert de Castlehill propose en 1789 « la fondation d’un “atelier de charité pour l’extinction de la mendicité”, qui fournirait du travail à ceux qui en étaient capables “en même temps qu’on assurait aux véritables nécessiteux des secours proportionnés à leurs besoins”. Cet établissement ne devait pas survivre à l’avènement de la Révolution, une fois dépourvue du soutien de l’Église ; le 13 novembre 1790, le secrétaire de l’association constate tristement : “le bureau a consommé le peu de fonds qu’il lui restait” ». Andrew Moore, Seignelay Colbert de Castlehill in the pre-revolutionary years, A Bishop of the Ancien Regime, op. cit., p. 111.

33Sur cette question, se référer à nos travaux de recherche : Jean-Baptiste MasmEjan, L’assistance par le travail à l’aune du traitement de l’indigence au XVIIIe siècle. Idées et institution- l’exemple lyonnais, thèse droit, Université Lyon III, 2021.

34Regnier est l’auteur d’un Projet d’un hôpital de malades ou Hôtel-Dieu, dans lequel les malades couchés chacun seul dans un lit recevraient les meilleurs secours avec le moins de frais possible, divisé en trois parties Londres et Paris, 1776. Il semble qu’il est un secrétaire de l’évêque de Rodez. En effet, un exemplaire de cet ouvrage à la bibliothèque nationale précise de manière manuscrite que l’auteur est « M. Regnier, secrétaire de M. l’évêque de Rodez Colbert de Castlehill, rue Saint-Benoît, 28 ». Maurice Tourneux, Bibliographie de l’histoire de Paris pendant la Révolution française, Paris, Imprimerie nouvelle, 1900, t. III, p. 342. Par ailleurs, une correspondance révèle qu’un certain Regnier est le secrétaire de Colbert dans une lettre du 5 juin 1786 relatif à l’achat de pompes à incendie.

35Regnier s’inscrit dans la continuité de ses contemporains sur cette question. Voir par exemple le tableau sombre qui est dépeint dans l’Encyclopédie dans le verbo « Hôtel-Dieu », qui en réalité ne concerne que celui de Paris. Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, article Hôtel-Dieu (Hist. mod.), vol. VIII, 1765, p. 319b–320a. La Dénonciation des principaux abus de l’Hôtel-Dieu de Paris à l’Assemblée générale des citoyens est présentée au Comité dans la séance du 30 avril 1790. Par ailleurs, Regnier remet lui- même son Projet d’un hôpital de malades ou Hôtel-Dieu, dans lequel les malades couchés chacun seul dans un lit recevraient les meilleurs secours avec le moins de frais possible. Camille Bloch, Alexandre Tuetey, Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante, op. cit, p. 25. Sur l’influence potentielle des travaux de Regnier, notamment sur les époux Necker, se référer à Camille Bloch, L’assistance et l’État en France à la veille de la Révolution, Paris, Alphonse Picard, 1908, p. 227.

36Regnier, Projet sur la nécessité de construire hors de la ville un Hôtel-Dieu commode et spacieux, op. cit., p. 9.

37« Nous avons réclamé contre leur aliénation, et nous osons dire ce que nous avons fait sentir combien il eut été plus utile à l’État de chercher des ressources dans les offres du clergé, que d’aliéner tous ses biens ; et si notre perte n’avait pas été jurée, les églises de France seraient encore le centre des charités dont s’alimentait la misère, et la ressource la plus assurée pour l’État. Et quand l’arrêt a été porté, qui nous dépouille de tous nos biens, notre silence a bien fait voir à quel point nous étions inaccessibles par nous-mêmes à tous les intérêts temporels, dont la jouissance avait attiré sur nous la haine et l’envie. Nous n’avons pas troublé d’un seul mot, d’une seule plainte, le cours des opérations fondées sur l’hypothèque des biens qu’on nous a ravis ». Exposition des principes sur la constitution civile du clergé, par les Évêques députés à l’Assemblée nationale, suivie de La lettre des mêmes évêques, en réponse au bref du Pape, en date du 10 mars 1791 et de la lettre de M. l’archevêque d’Aix, en réponse au bref de sa sainteté le pape Pie VII, en date du 15 août 1801, Paris, Le Clere, 1801, p. 139-140.

38Mandement et Ordonnance de M. l’évêque de Rodez (Seignelay-Colbert de Castlehill) au sujet de l’élection de M. de Bertier par les électeurs du département de l’Aveyron, en qualité d’Évêque du même département, 1791.

39Le procès-verbal de la séance du 12 mai 1790 précise que : « M. l’évêque de Rodez a proposé la question de savoir sur quelle base on proposerait à l’Assemblée nationale de faire la distribution première des secours donnés d’une manière permanente aux départements, et, par eux, aux districts, et des districts aux municipalités ». Camille Bloch, Alexandre Tuetey, Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante, op. cit, p. 38. En outre, le 19 novembre 1790, « M. de Rodez a fait de nouveau lecture de l’adresse à envoyer aux départements, à l’effet de les inviter à recevoir des ateliers de secours, formés des ouvriers de la capitale qui sont sans ouvrage, et a laissé une copie du mémoire adressé au directoire du département de Seine-et-Marne par les municipalités de Pringy et Saint-Fargeau-sur-Seine ». Ibid., p. 191.

40Il semble que, à l’instar de grands nobles qui renoncent à leurs privilèges, Larochefoucauld-Liancourt fasse preuve d’une certaine distance à l’égard du parti national. Toutefois, il apparaît que ses idées en matière d’assistance le rattachent à ce courant. Sur le positionnement politique de Larochefoucauld-Liancourt, voir François Furet, Denis Richet, La Révolution française, Paris, Fayard, 2010, p. 63. Concernant Colbert de Castlehill, celui-ci fait partie dès 1790 du club des Impartiaux et plus tard du club des monarchiques. Edna Lemay et al., Dictionnaire des Constituants : 1789-1791, op. cit., p. 229-230.

41Des retranscriptions sont faites par Camille Bloch, Alexandre Tuetey, Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante, op. cit, p. 141-143.

42Le 12 novembre 1790, Duvillard apporte au Comité les calculs qu’il vient d’effectuer en vue d’établir une caisse de prévoyance. Il est dit que « M. de Rodez s’est chargé de l’examen de ces calculs ». Ibid., p. 183. En outre, le 17 novembre 1790, il est rapporté que « MM. de Cretot et de Rodez ont été nommés commissaires pour l’examen du projet de M. Lafarge ». Ibid., p. 189. Selon Andrew Moore, « Il semble que sa spécialité était le domaine de la finance, en particulier celui de la taxation, un sujet par lequel il sera particulièrement concerné lorsqu’il sera nommé Président de l’Assemblée Provinciale de Haute Guyenne ». Andrew Moore, Seignelay Colbert de Castlehill in the pre- revolutionary years, A Bishop of the Ancien Regime, op. cit., p. 101. Sur la tontine Lafarge, se référer à l’ouvrage de Guy Thuillier, Une ténébreuse affaire : la Caisse Lafarge (1787-1892), Paris, Comité d’histoire de la sécurité sociale, 1999.

43L’évêque de Rodez procède à la lecture d’un rapport relatif aux secours aux malades. Camille Bloch, Alexandre  Tuetey, Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante, op. cit, p. 135. En outre, le 6 novembre 1790, il fait un rapport sur les secours à donner aux malades.

44« Le pauvre habitant la campagne, abandonné ainsi pour l’ordinaire à ses propres ressources, était, à la vérité, dans beaucoup de parties du royaume, assisté par les charités, par les aumônes particulières : mais les aumônes, les charités particulières sont toujours partielles, incomplètes, incertaines. La bienfaisance qui les dicte rend bien estimables, sans doute, les amis de l’humanité qui les répandent, mais elles tiennent, dans les lieux mêmes où elles sont plus abondantes et plus constantes, à la volonté libre de ces bienfaiteurs, et dans aucun elles ne dispensent la société de ses devoirs. Il s’en faut bien, d’ailleurs, qu’elles soient générales ; et l’on peut hardiment assurer que plus des quatre cinquièmes des habitants de la campagne, dénués de toute assistance dans leurs maladies, sont voués aux misères de toutes espèces qui en sont les suites. Aussi une proportion de mortalité plus forte qu’elle ne devrait l’être, des rechutes fréquentes pour ceux qui ne succombent pas, une vieillesse prématurée, des infirmités, des accidents multipliés ajoutent-ils à la chance trop certaine des malheurs et de la misère humaine dans les campagnes ». Ibid., quatrième rapport du Comité de mendicité, p.  392.

45Voir la retranscription du projet de décret sur les secours dans les campagnes. Ibid., p. 399-400. Sur l’établissement des médecins et des chirurgiens dans les campagnes, Ibid., p. 394-395.

46Ibid., séance du 15 octobre 1790, p. 145.

47Ibid., séance du 10 novembre 1790, p. 180-181

48Comme le relèvent Alexandre Tuetey et Camille Bloch, « Les trois parties du rapport des visites faites dans les hôpitaux de Paris sont imprimées sous le nom de La Rochefoucauld-Liancourt. Il est probablement l’auteur réel de ce rapport et de ses deux suites, puisque c’est déjà lui qui rendit compte au Comité de ces visites (pages indiquées si besoin). Mais nous voyons aussi dans le procès-verbal que c’est l’évêque de Rodez qui fit au Comité le rapport sur l’Hôtel-Dieu, les hôpitaux de Saint-Louis, de Sainte-Anne, de la Charité, des Convalescents, sur la maison royale de Santé, sur l’hospice de Saint-Sulpice, et sur les Incurables. Comme le premier rapport est consacré à l’Hôpital Général et que les visites dont Liancourt rendit compte concernent les diverses maisons qui le constituaient, il y a grandes chances pour qu’on ait raison de lui attribuer la paternité de ce rapport, comme celle des deux suites qui est consacrée aux Quinze-Vingts, aux Petites Maisons et à la Trinité. Mais il y a lieu de présumer que tout au moins la participation de l’évêque de Rodez à l’autre suite concernant l’Hôtel-Dieu, les maisons des frères de la Charité, les hospices de paroisses, etc., dut être grande ». Ibid., p. XLIII-XLIV.

49L’assistance à domicile est unanimement saluée par l’opinion éclairée. Sur cette question, voir Louis Trénard, « L’idéologie révolutionnaire et ses incidences », op. cit., p. 171-172.

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