1 GW 4, p. 414 (trad. Méry, p. 298).

2 Id., p. 413 (trad. Méry, p. 298).

3 Id., p. 448 (trad. Bourgeois, p. 53).

4 De la même manière, dans les cours de Logique et Métaphysique de la même époque, seule la métaphysique mérite d’être appelée « philosophie proprement dite », c’est-à-dire spéculation (cf. K. ROSENKRANZ, G. W. F. Hegels Leben, pp. 190 sqq.). Si donc, comme nous l’avons vu précédemment (cf. ci-dessus note 90 de la précédente section), la face négative de la philosophie doit être rapprochée de la logique et, principalement, de la troisième partie de celle-ci, sa face positive est, elle, en relation directe avec ce qui s’inaugure au sein de la métaphysique.

5 GW 4, p. 27 (trad. Méry, p. 101).

6 Cf. id., pp. 27 sq. (trad. Méry, pp. 101 sq.). — A noter que, pour Hegel, « intuition transcendantale » et « intuition intellectuelle » forment des expressions synonymes : cf. par exemple GW 4, pp. 34 sqq., 76 sq. (trad. Méry, pp. 109 sqq., 153 sq.). Il reste toutefois à se demander pourquoi Hegel, dans la Differenzschrift, se sert préférentiellement, contre l’usage de ses prédécesseurs (Kant, Fichte et même Schelling), de cette première tournure. Cf. sur ce point l’hypothèse développée par W. C. ZIMMERLI, Die Frage nach der Philosophie, pp. 186 sq., note 68 et pp. 194 sqq., qui présente l’intérêt de rapprocher l’usage que fait ici Hegel du concept de « transcendantal » du sens premier qu’il a reçu chez Kant : est transcendantal ce qui est de l’ordre de la condition de possibilité de.... Remarquons néanmoins que la caractérisation de la face positive de la philosophie en termes d’intuition transcendantale tend à disparaître dans les Ecrits critiques postérieurs à la Differenzschrift ; ainsi, dans l’article sur le Droit naturel, Hegel parle-t-il simplement de l’« unité positive de l’intuition » : cf. GW 4, pp. 439 sqq. (trad. Bourgeois, pp. 40 sqq.).

7 GW 4, p. 28 (trad. Méry, p. 102).

8 Cf. id., p. 28 (trad. Méry, p. 102).

9 Id., p. 28 (trad. Méry, p. 102). — Le « on » dont se réclame ici Hegel semble renvoyer tout à la fois à Fichte et à Schelling (cf. HEGEL, Gesammelte Werke 4, Anhang, p. 563, note de 28, 17 ; cf. également W. C. ZIMMERLI, Die Frage nach der Philosophie, p. 199, note 102).

10 Hegel remarque, dans ce contexte, que là où on cherche à philosopher sans intuition transcendantale, « le passage de l’être au concept ou du concept à l’être est un saut injustifié » : GW 4, p. 28 (trad. Méry, p. 102).

11 GW 4, p. 183. — Cf. sur ce point l’intéressant paragraphe que W. BONSIEPEN consacre aux comptes rendus rédigés à propos des articles du Journal critique de Schelling et Hegel à l’époque où ceux-ci parurent ; les premières lignes de ce paragraphe situent bien la tonalité d’ensemble de ces recensions : « SCHELLINGS und Hegels Philosophie am Anfang der Jenaer Zeit wurde von Rezensenten der Differenzschrift und des Kritischen Journals durchaus auch als Nihilismus verstanden » (W. BONSIEPEN, Der Begriff der Negativität in den Jenaer Schriften Hegels, p. 52).

12 Cf. GW 4, pp. 183 sq.

13 Id., pp. 15 sq. (trad. Méry, p. 89).

14 Dans l’article sur le Droit naturel, le néant absolu est appelé « unité simple », « originaire » : cf. GW 4, pp. 424 sq. (trad. Bourgeois, pp. 20 sqq.).

15 Cf. GW 4, pp. 31 et 75 (trad. Méry, pp. 105 et 152).

16 Cf. id., p. 92 (trad. Méry, p. 171). Le verbe verschlingen, utilisé ici par Hegel, signifie tout à la fois engloutir, dévorer et entrelacer, nouer.

17 GW 4, p. 16 (trad. Méry, p. 90).

18 Cf. pp. 85 sqq. de ce travail.

19 GW 4, p. 66 (trad. Méry, p. 142).

20 Id., p. 75 (trad. Méry, p. 152).

21 Encore une fois, la suppression de l’opposition dans et par la face négative de la philosophie ne concerne pas toute opposition, mais uniquement l’opposition isolée, fixée et absolutisée par l’entendement vide. Cf. sur ce point R. KRONER, Von Kant bis Hegel, Bd 2, pp. 154-155 sqq.

22 GW 4, p. 28 (trad. Méry, p. 102).

23 Cf. par exemple, dans le registre éthique, GW 4, pp. 479 sq. (trad. Bourgeois, pp. 94 sqq.).

24 Cf. pp. 33 sq. de ce travail.

25 Cf. GW 4, p. 72 (trad. Méry, p. 149).

26 Id., p. 72 (trad. Méry, pp. 148 sq.).

27 Cf. id., pp. 432 sq. (trad. Bourgeois, pp. 32 sq.).

28 Cf. la description de ce processus in GW 4, pp. 483 sq. (trad. Bourgeois, p. 101).

29 Cf. GW 4, p. 31 (trad. Méry, p. 105).

30 Id., p. 480 (trad. Bourgeois, p. 96).

31 Id., p. 72 (trad. Méry, p. 149).

32 Au terme de l’article sur le Droit naturel, Hegel fait cette remarque essentielle, sur laquelle nous aurons encore à revenir : « l’être-borné de ce qui appartient à la nécessité, bien qu’il soit recueilli absolument dans l’indifférence, est seulement une partie de la nécessité, non la nécessité totale absolue elle-même, donc toujours une non-concordance de l’esprit absolu et de sa figure » : GW 4, p. 484 (trad. Bourgeois, p. 102).

33 Cf. GW 4, p. 75 (trad. Méry, p. 152). — La spéculation caractérise la connaissance infinie de la raison en tant que savoir (de l’)absolu. Cf. sur ce point K. DÜSING, Spekulation und Reflexion, in Hegel-Studien, Bd 5 (1969), pp. 95 sqq. ; cf. également la brève historique du concept de « spéculation » par W. C. ZIMMERLI, Die Frage nach der Philosophie, pp. 99 sq. note 20, qui, en particulier, met bien en relief le sens d’« anschauendes Begreifen » propre à la connaissance spéculative.

34 Dans les Ecrits critiques, la construction constitue, pour ainsi dire, la méthode du savoir spéculatif en tant que « développement de la raison elle-même » ; Hegel, dans la Differenzschrift, en explicite brièvement la physionomie générale : cf. GW 4, p. 31 (trad. Méry, p. 105). Schelling, dans un article de 1802 paru dans le Journal critique, s’appesantit davantage sur le problème de la construction dans la philosophie : cf. SCHELLING, Ueber die Construction in der Philosophie, in HEGEL, Gesammelte Werke 4, pp. 277-293. K. DÜSING attire toutefois l’attention sur ce qui, en dépit de leur convergence évidente, distingue, à son avis, les concepts hégélien et schellingien de la construction philosophique : cf. K. DÜSING, Das Problem der Subjektivität in Hegels Logik, pp. 145 sqq.

35 Cf. GW 4, pp. 30, 63 (trad. Méry, pp. 104, 140) et p. 119 (trad. Fauquet, p. 87).

36 Id., p. 12 (trad. Méry, p. 86).

37 Id., p. 30 (trad. Méry, p. 104).

38 Id., p. 11 (trad. Méry, p. 85).

39 Id., p. 10 (trad. Méry, p. 84).

40 Id., p. 16 (trad. Méry, p. 90).

41 Id., p. 12 (trad. Méry, p. 86).

42 Id., p. 10 (trad. Méry, pp. 84 sq.). — W. C. ZIMMERLI tente, à travers une reconstruction souvent laborieuse, d’expliciter la coappartenance essentielle de la forme et de l’essence de la philosophie. Il croit, en particulier, pouvoir montrer à partir de là — contre la thèse défendue par H. KIMMERLE (cf. Das Problem der Abgeschlossenheit des Denkens, pp. 301 sqq.) — que pour Hegel il y a, dès la Differenzschrift, une temporalité et une historicité essentielles de la philosophie et de l’absolu : cf. W. C. ZIMMERLI, Die Frage nach der Philosophie, pp. 41-65. Nous aurons à revenir sur cette question.

43 Cf. GW 4, p. 82 (trad. Méry, p. 160). — Sur le rapport de la philosophie et de ses parties, cf. id., pp. 417 sqq. et 471 (trad. Bourgeois, pp. 11 sqq. et 84 sq.).

44 Cf. pp. 91 sqq. de ce travail.

45 GW 4, pp. 30 sq. (trad. Méry, p. 104).

46 Cf. id., pp. 21 sq. (trad. Méry, pp. 95 sq.).

47 Id., p. 12 (trad. Méry, p. 86). — le rapprochement auquel se livre ici Hegel entre philosophie et art témoigne de l’importance qu’à la suite de Schelling il accorde au modèle esthétique : du point de vue de leur achèvement et de leur autonomie, l’œuvre d’art et le système philosophique atteignent la même perfection. Cf. sur ce point J. SCHWARZ, Hegels philosophische Entwicklung, p. 125. R. HAYM avait, pour sa part, déjà souligné l’importance du facteur esthétique dans les conceptions hégélienne et schellingienne de la totalité à l’époque de la collaboration des deux philosophes ; il y voyait — de manière exagérée, sans doute — le point de convergence fondamental de leurs démarches philosophiques (cf. R. HAYM, Hegel und seine Zeit, p. 144).

48 Différence entre les systèmes philosophiques de Fichte et de Schelling par rapport aux Contributions de Reinhold à une vue d’ensemble plus aisée sur l’état de la philosophie au commencement du dix-neuvième siècle, premier cahier : GW 4, p. 3 (trad. Méry, p. 77).

49 Cf. GW 4, p. 8 (trad. Méry, p. 82). — La Differenzschrift parut vers le début de l’automne 1801 : cf. HEGEL, Gesammelte Werke 4, Anhang, pp. 524 sq.

50 L’Exposé parut en mai 1801 dans la Zeitschrift fïir speculative Physik de Schelling ; cf. J. F. MARQUET, Liberté et existence. Etude sur la formation de la philosophie de Schelling, p. 208.

51 Ce point a été souligné par nombre de commentateurs : pour Schelling, l’essai de Hegel (en continuité probable avec les conversations qu’il eut avec celui-ci durant l’hiver 1801) fut l’élément déterminant dans sa rupture d’avec Fichte (cf. par exemple R. HAYM, Hegel und seine Zeit, pp. 145 sq. ; G. LUKACS, Der junge Hegel, pp. 308 et 320 sq. ; H. BRAUN, Differenzen, in Hegel-Studien, Bd 4 (1967), pp. 291 sq.). — Remarquons, à ce propos, que même dans l’Exposé, paru quelque deux mois avant que ne soit achevée la Differenzschrift, Schelling cherche encore, en dépit de son abrupte revendication d’indépendance, à ménager la possibilité d’un accord avec Fichte : cf. SCHELLING, W 3, pp. 6 sq.

52 GW 4, p. 179.

53 Id., p. 63 (trad. Méry, p. 139).

54 Les deux thèses extrêmes reviennent à prétendre :
1) d’une part, que Hegel, tout en critiquant Fichte et en paraissant s’aligner sur les positions de Schelling, se situe dans la Differenzschrift en vérité déjà au-dessus des deux adversaires dont il réalise la synthèse dialectique (cf. par exemple R. KRONER, Von Kant bis Hegel, Bd 2, pp. 161 sqq. ; Th. HAERING, Hegel. Sein Wollen und sein Werk, Bd 1, pp. 607 sq., 610 sq., 6S9).
2) d’autre part, que non seulement Hegel ne fait, dans la Differenzschrift, que reprendre et développer certains aspects de la philosophie de l’identité élaborée par Schelling, mais que l’ensemble de la philosophie hégélienne n’est rien d’autre que la continuation et l’accomplissement (plutôt que le dépassement) de la tentative schellingienne amorcée en 1801 (sur ce dernier point, cf. par exemple J. F. MARQUET, Liberté et existence. Essai sur la formation de la philosophie de Schelling, p. 367 ; l’auteur y renvoie en note à son article : Système et sujet chez Hegel et Schelling, in Revue de métaphysique et de morale (mai 1968), pp. 167 sqq.).

55 Question qui n’a toujours pas été entièrement élucidée, remarque W. MARX au Stuttgarter Hegel-Kongress de 1975 : cf. W. MARX, Aufgabe und Methode der Philosophie in Schellings System des transzendentalen Idealismus und in Hegels Phänomenologie des Geistes, in Hegel-Studien, Beiheft 17 (1977), p. 78.

56 Cf. sur ce point et pour ce qui suit : H. BUCHNER, Hegel und das kritische Journal der Philosophie, in Hegel-Studien, Bd 3 (1965), pp. 95 sqq. ; cet article a été, dans une large mesure, repris dans l’appendice (Anhang) de HEGEL, Gesammelte Werke 4, pp. 529-549.

57 Cf. GW 4, pp. 62 sqq. (trad. Méry, pp. 139 sqq.).

58 Cf. p. 60 de ce travail.

59 Ayant au § 1 de son Exposé défini la raison comme absolue, c’est-à-dire comme « indifférence totale du subjectif et de l’objectif », et se demandant ensuite comment on parvient à cette indifférence, Schelling répond : « On y parvient par la réflexion sur ce qui, dans la philosophie, se présente entre subjectif et objectif et qui, manifestement, doit être quelque chose qui se comporte indifféremment à l’égard de l’un et de l’autre. La pensée de la raison doit avoir de l’attrait pour chacun ; pour la penser comme absolue, pour parvenir donc au point de vue que j’exige, il doit être fait abstraction de celui qui pense. Pour celui qui procède à cette abstraction, la raison cesse immédiatement d’être quelque chose de subjectif, telle qu’elle est représentée par la plupart, oui, elle ne peut même plus être pensée comme quelque chose d’objectif, puisque ce qui est objectif ou pensé ne devient possible qu’en opposition à un pensant, duquel il est ici complètement fait abstraction ; elle devient donc, de par cette abstraction, le véritable en - soi qui tombe précisément dans le point d’indifférence du subjectif et de l’objectif » : SCHELL1NG, W 3, pp. 10 sq.

60 GW 4, p. 63 (trad. Méry, p. 140).

61 Id., p. 64 (trad. Méry, p. 140). — Est-ce toutefois bien la pensée de Schelling que Hegel exprime par ces mots ? Nombre de commentateurs, comme par exemple R. KRONER, ont fait valoir qu’en concevant l’absolu comme « identité de l’identité et de la non-identité », Hegel affirme en fait déjà son originalité par rapport à Schelling pour qui l’identité ne serait jamais, du moins dans l’Exposé de 1801, que comme « identité de l’identité » et qui, par conséquent, négligerait les différences (cf. R. KRONER, Von Kant bis Hegel, Bd 2, p. 166). Et effectivement, nous pouvons lire au § 16, Zusatz 2 de l’Exposé que « l’identité absolue est seulement sous la forme d’une identité de l’identité », à savoir sous la forme de l’énoncé A = A (SCHELLING, W 3, p. 17). Schelling en reste-t-il toutefois là ? Nous ne le pensons pas ; car il remarque fort bien que dans A = A la forme de l’être de l’identité absolue n’est pas encore posée réellement ou « actu » : pareille position requiert en effet une différence qui, dans A = A, où un seul et même A est affirmé comme sujet et prédicat, n’apparaît pas (cf. id., pp. 20 sq.). Ce n’est donc que moyennant l’admission d’une telle différence qui, écrit Schelling, ne peut être que « quantitative » (cf. id., pp. 19 sq.) que l’identité absolue pourra, à son tour, être et se manifester. On trouvera, de la plume de Schelling, un lumineux résumé en cinq points de ce développement dans la note 1 du § 30 (cf. id., pp. 22 sq.), laquelle établit, en outre, que, finalement, l’identité absolue n’existe que dans la totalité indifférenciée des différences quantitatives, c’est-à-dire comme « identité du fini et de l’infini ».

62 Cf. pp. 85 sqq. de ce travail.

63 GW 4, p. 71 (trad. Méry, p. 147).

64 Cf. SCHELLING, W 3, pp. 16 sq., 19 sqq. et 22 note 1. — De même Hegel remarque-t-il dans la Differenzschrift que « chose et concept ne sont, chacun pour soi, que forme de l’absolu » : GW 4, p. 28 (trad. Méry, p. 102).

65 Cf. GW 4, pp. 63 sq. (trad. Méry, p. 140).

66 Cf. pp. 42 sq. de ce travail.

67 GW 4, p. 65 (trad. Méry, p. 141).

68 « jedes der entgegengesetzten ein sich selbst entgegengesetztes » : GW 4, p. 65 (trad. Méry, p. 141).

69 GW 4, p. 65 (trad. Méry, pp. 141 sq.). — A noter que Hegel emploie ici « idéal>‘et « idéel » l’un pour l’autre : ils qualifient l’un et l’autre de purs produits de la réflexion.

70 GW 4, p. 65 (trad. Méry, p. 141).

71 Cf. id., p. 64 (trad. Méry, p. 141).

72 Le rapport de substantialité est nommé par Hegel « le vrai rapport de la spéculation » : GW 4, p. 33 (trad. Méry, p. 107).

73 Cf. sur ce point la manière dont Hegel oppose l’un à l’autre rapport de substantialité et rapport de causalité dans sa critique de la relation « moi-nature » telle qu’elle est envisagée par Fichte dans le System der Sittenlehre : GW 4, pp. 49 sq. (trad. Méry, pp. 124 sq.).

74 GW 4, p. 65 (trad. Méry, p. 141).

75 Cf. id., p. 66 (trad. Méry, pp. 142 sq.).

76 Cf. à ce propos le titre de la troisième des petites études dans la première partie de la Differenzschrift : « La réflexion comme instrument de l’activité philosophique » : GW 4, p. 16 (trad. Méry, p. 90) ; nous soulignons.

77 GW 4, p. 66 (trad. Méry, p. 143).

78 Id., p. 67 (trad. Méry, p. 144).

79 Id., p. 66 (trad. Méry, p. 143) ; nous soulignons.

80 SCHELLING, W 3, p. 19 (les parenthèses sont de Schelling).

81 Cf. id., p. 19.

82 Cf. id., pp. 19 sq.

83 On peut également nommer la différence quantitative « differentia formalis », remarque Schelling : id., p. 23.

84 Rappelons-nous, dans ce contexte, la distinction introduite par Hegel entre ce qui constitue l’essence interne d’un système (le rationnel) et sa forme particulière : « Ce qui est particulier à une philosophie ne peut, précisément du fait qu’il est particulier, appartenir qu’à la forme du système, non à l’essence de la philosophie » : cf. pp. 109 sq. de ce travail. Soulignant, d’autre part, dans sa critique de Fichte, l’identité foncière, essentielle de la nature et de la liberté, Hegel précise : « leur différence est uniquement dans la manifestation » : GW 4, p. 49 (trad. Méry, p. 124).

85 Pour ce qui suit, cf. GW 4, pp. 67 sq. (trad. Méry, pp. 143 sq.).

86 On mettra ceci en parallèle avec cet autre passage de la Differenzschrift : « Dans le savoir philosophique, ce qui est intuitionné est une activité de l’intelligence et de la nature, de la conscience et de l’inconscient à la fois ; il appartient simultanément aux deux mondes, l’idéel et le réel (...). Si on se place au point de vue de la réflexion ou de la liberté, alors l’idéel est ce qui est premier et l’essence, tandis que l’être n’est que l’intelligence schématisée ; si on se place au point de vue de la nécessité ou de l’être, alors la pensée n’est qu’un schéma de l’être absolu » : GW 4, p. 28 (trad. Méry, p. 102).

87 GW 4. p. 71 (trad. Méry, p. 147).

88 Cf. SCHELLING, W 3, p. 9.

89 GW 4, p. 71 (trad. Méry, pp. 147 sq.) ; les parenthèses sont de Hegel. — A noter que le principe de ce parallélisme avait été énoncé par Schelling dès 1797 dans l’introduction des Idées pour une philosophie de la nature : « La nature doit être l’esprit visible, l’esprit la nature invisible » (SCHELLING, W 1, p. 706).

90 Pour ce qui suit, cf. GW 4, pp. 72-74 (trad. Méry, pp. 148-150).

91 Cf. pp. 106 sq. de ce travail.

92 GW 4, p. 65 (trad. Méry, p. 141).

93 Cf. id., p. 71 (trad. Méry, p. 148).

94 Pour ce qui suit, cf. id., pp. 74-75 (trad. Méry, pp. 150-152).

95 Id., p. 68 (trad. Méry, p. 144). — Dans ce « point de vue supérieur », HAERING veut voir, à tort selon nous, le dépassement du rapport de substantialité entre le sujet et l’objet en vue de leur « unification effective », « vivante » (Th. HAERING, Hegel. Sein Wollen und sein Werk, Bd 1, p. 664). Ce faisant, il perd toutefois de vue ce que nous avons déjà signalé ci-dessus, à savoir que pour Hegel, à l’époque où il rédige la Differenzschrift, le rapport de substantialité constitue précisément le véritable rapport spéculatif (cf. ci-dessus, note 72 de la présente section).

96 GW 4, p. 74 (trad. Méry, p. 151).

97 Id., p. 75 (trad. Méry, pp. 151 sq.).

98 Cf. id., pp. 74 sq. (trad. Méry, pp. 151 sq.). — En ce qui concerne le déploiement de l’identité absolue dans la nature en tant que processus d’« intériorisation de la lumière », cf. aussi id., pp. 73 sq. (trad. Méry, pp. 149 sq.).

99 Point de vue qui n’est donc, en particulier, ni celui de la philosophie de la nature, ni celui de la philosophie de l’intelligence, mais bien celui — supérieur à ces deux sciences encore partielles — de leur unité accomplie au sein de la totalité absolue, laquelle formerait ainsi le thème d’une ultime et suprême partie du système de la science. Cette hypothèse d’une « philosophie de l’absolu » venant coiffer système de la nature et système de l’intelligence a été défendue par H. KIMMERLE à partir des pages de la Differenzschrift que nous venons d’analyser. Selon cet auteur, Hegel y a en effet projeté un système de la philosophie quadripartite, développant tour à tour une logique et métaphysique comme partie fondatrice de la science, une philosophie de la nature, une philosophie de l’intelligence et, enfin, une philosophie du point d’indifférence absolu : cf. H. KIMMERILE, Das Problem der Abgeschlossenheit des Denkens, pp. 24 sqq., 33 sq., 268 sq. et 273 sqq. (On notera à ce propos qu’un fragment récemment découvert d’un cours de Hegel : Introductio in philosophiam, annoncé au programme du semestre d’hiver 1801/02, développe de même une esquisse du système en quatre parties, corroborant ainsi l’hypothèse de KIMMERLE : cf. M. BAUM/K. MEIST, Durch Philosophie leben lernen, in Hegel-Studien, Bd 12 (1977), pp. 46 sqq.). Plus discutable nous paraît être, par contre, le prolongement que KIMMERLE donne à son hypothèse : d’après lui, ce modèle systématique à quatre parties aurait prévalu chez Hegel et aurait déterminé ses travaux durant toute la période allant de 1801 à 1803. En fait, cette dernière affirmation ne repose, comme le reconnaît KIMMERLE lui-même (cf. Das Problem..., pp. 268 sq.), que sur de faibles indices textuels : un plan de système rapporté par ROSENKRANZ, que KIMMERLE situe dans le courant de la première moitié de 1803 (cf. H. KIMMERLE, Zur Entwicklung des Hegelschen Denkens in Jena, in Hegel-Studien, Beiheft 4 (1969), p. 40). Aussi a-t-elle donné lieu à un débat critique dont nous citons ici les actes principaux : R. P. HORSTMANN, Probleme der Wandlung in Hegels Jenaer Systemkonzeption, in Philosophische Rundschau 19 (1972), pp. 87-118, et, en réponse à cette critique, H. KIMMERLE, Ideologiekritik der systematischen Philosophie. Zur Diskussion über Hegels System in Jena, in Hegel-Jahrbuch 1973, pp. 85-101.

100 SCHELLING, W 3, pp. 3 sq.

101 GW 4, pp. 75 sq. (trad. Méry, p. 152) ; nous soulignons.

102 Id., p. 14 (trad. Méry, p. 88). — Sur le lien de l’art et de la religion, cf. pp. 24 sq. de ce travail et, surtout, ci-dessus, note 7 de la première partie, section 1.

103 Id., pp. 75 sq. (trad. Méry, p. 152) ; nous soulignons. — Ces pages de la Differenzschrift, dans lesquelles l’art et la religion, d’une part, la spéculation, de l’autre, sont décrits comme les modes suprêmes de la manifestation de l’absolu, ont suscité nombre de commentaires. Certains, comme HAERING, ont voulu y voir une première formulation de la hiérarchie art-religion-philosophie qui couronne la Philosophie de l’esprit de l’Encyclopédie (cf. Th. HAERING, Hegel. Sein Wollen und sein Werk, Bd 1, p. 640). Pareille thèse repose toutefois sur une méconnaissance de l’évolution de la pensée hégélienne à Iéna ; ce n’est en effet que dans la Philosophie de l’esprit de 1805/06 que ce schéma s’impose pour la première fois en toute clarté (cf. GW 8, pp. 277 sqq.). Plus nuancée est la thèse de J. TAMINIAUX, pour qui le texte de la Differenzschrift pose bien une supériorité de la spéculation sur le complexe art-religion dans la mesure où celui-ci, expression ponctuelle et inconsciente de l’intuition de l’absolu, s’avère « accablant pour la conscience » et « ne reconnaît pas encore la pleine manifestation de l’absolu » (J. TAMINIAUX, La nostalgie de la Grèce à l’aube de l’idéalisme allemand, pp. 238 sq.). On peut toutefois se poser ici la question suivante : est-ce bien le point de vue de la conscience et de la subjectivité qui constitue pour Hegel, dans la Differenzschrift, l’élément déterminant ou n’est-ce pas plutôt celui du point d’indifférence absolu, auquel la conscience tout comme l’inconscient ne fournissent jamais que les formes de son existence ? Certes, l’adoption de cette dernière interprétation n’interdit nullement de parler d’une supériorité de la spéculation sur l’art ; elle en modifie cependant les attendus : si, en effet, la spéculation peut être dite, d’après la Differenzschrift, supérieure à l’art, c’est parce que, comme l’indique expressément Hegel, « elle sait (...) se retirer elle-même la prépondérance que la conscience a en elle » : GW 4 ; p. 76 (trad. Méry, p. 152). Autrement dit, elle est en mesure de se reconnaître comme une seule face du point d’indifférence absolu et de procéder ainsi elle-même à la suppression de son unilatéralité. Cet aspect de la spéculation que, non sans pertinence, H. KIMMERLE caractérise comme son aspect religieux (cf. H. KIMMERLE, Das Problem der Abgeschlossenheit des Denkens, pp. 27 sq.), constitue ce que, pour notre part, nous appellerions plutôt sa dimension critique (nous développons ce point de vue dans les lignes qui suivent : cf. pp. 131 sqq. de ce travail).

104 Cf. GW 4, p. 76 (trad. Méry, p. 152).

105 Id., p. 76 (trad. Méry, pp. 152 sq.).

106 Cf. p. 111 de ce travail.

107 Cf. ci-dessus, première partie, section 2, $° 3.

108 L’article sur le Droit naturel parut en deux parties dans les deuxième et troisième fascicules du deuxième tome du Journal critique de philosophie, soit, respectivement, fin 1802 et en mai 1803 (cf. H. BUCHNER, Hegel und das kritische Journal der Philosophie, in Hegel-Studien, Bd 3 (1965), pp. 127 sq.). Selon KIMMERLE, sa rédaction doit être située avant novembre 1802 (cf. H. KIMMERLE, Zur Chronologie von Hegels Jenaer Schriften, in Hegel-Studien, Bd 4 (1967), p. 141).

109 Cf. H. KIMMERLE, Das Problem der Abgeschlossenheit des Denkens, pp. 211 sqq.

110 R. P. HORSTMANN, Probleme der Wandlung in Hegels Jenaer Systemkonzeption, in Philosophische Rundschau 19 (1972), p. 112. — La conséquence qui en résulte aussitôt est qu’il ne semble plus pouvoir être ici question, comme c’était le cas dans la Differenzschrift, d’« un point de vue supérieur » à celui de l’intelligence et, donc, d’une philosophie du point d’indifférence absolu (cf. ci-dessus, note 99 de la présente section) en tant que partie distincte et autonome du système, venant couronner philosophie de la nature et philosophie de l’intelligence. Selon l’article sur le Droit naturel, le point de vue supérieur estai effet atteint dans l’intelligence — c’est-à-dire dans la vie éthique — elle-même (cf. R. P. HORSTMANN, Probleme..., p. 96).

111 Pour ce qui suit, cf. GW 4, pp. 432 sq. (trad. Bourgeois, pp. 32 sq.).

112 Ainsi Hegel remarque-t-il à propos de la raison éthique : « La raison éthique a été, tout à l’heure, déterminée comme l’absolu dans la forme de l’unité et, par là, en tant qu’elle est elle-même posée comme une déterminité, elle paraît (scheint) immédiatement, en cette détermination, être posée tout aussi essentiellement avec une opposition (que la raison pratique chez Kant et Fichte). La différence est cependant que ce qui est la réalité véritable et l’absolu de la raison éthique est entièrement libre de cette opposition à l’égard de la nature et qu’elle est identité absolue de l’idéel et du réel » : GW 4, p. 432 (trad. Bourgeois, p. 32) ; nous soulignons.

113 A noter qu’aussi bien la sphère pratique de l’intelligence que le domaine théorique de la nature physique sont ici abordés en termes de « nature ». Ce point a été relevé par R. P. HORSTMANN qui montre, à partir des pages de l’article sur le Droit naturel que nous sommes en train d’analyser, que la nature constitue à ce moment pour Hegel (et ce jusqu’en 1803) la catégorie clé de son système : non pas simplement en tant que nature « naturelle » face au monde de l’esprit, mais bien en tant qu’expression de l’absolu lui-même, déterminant l’essence et la structure de la totalité des manifestations dans lesquelles il s’explicite (cf. R. P. HORSTMANN, Probleme der Wandlung in Hegels Jenaer Systemkonzeption, in Philosophische Rundschau 19 (1972), pp. 109 sq.). Dans le même ordre d’idées, cf. l’article de M. RIEDEL, Hegels Kritik des Naturrechts, in Hegel-Studien, Bd 4 (1967), pp. 177 sqq., qui interroge le sens que revêt pour Hegel le concept de nature dans l’expression « droit naturel » et montre que, dans l’article de 1802, toute la sphère de la vie éthique est conçue à partir de lui et dans sa mouvance : loin d’être pensé comme rompant avec la nature ou comme la dépassant, l’état de droit y est, au contraire, présenté comme ce dans quoi elle se réalise. De la sorte, remarque RIEDEL, Hegel se sépare radicalement de la tradition moderne du droit naturel pour renouer avec les théories politiques de l’antiquité (Platon, Aristote), cette « reprise » s’opérant à son tour sous les auspices du « deus sive natura » de Spinoza. (Cf. également sur ce dernier point K.-H. ILTING, Hegels Auseinandersetzung mit der aristotelischen Politik, in Philosophisches Jahrbuch 71 (1963/64), pp. 38-58).

114 Pour R. P. HORSTMANN, le plan de système de l’article sur le Droit naturel que nous venons de décrire est « incompatible » avec celui que développe la Differenzschrift ; il propose en effet, selon lui, « une autre conception de la présentation de l’absolu » (cf. R. P. HORSTMANN, Probleme der Wandlung in Hegels Jenaer Systemkonzeption, in Philosophische Rundschau 19 (1972), pp. 95-96 sqq.). Nous pensons, pour notre part, que cette thèse surestime largement la différence entre les deux esquisses. Certes — et nous l’avons souligné nous-même en entamant ce paragraphe — il est indéniable que la philosophie de l’intelligence se voit conférer en tant que philosophie de la vie éthique une portée et une signification nouvelles dans l’esquisse de l’article de 1802 (quoique — nous le verrons — l’esquisse de la Differenzschrift préparait ou, du moins, rendait prévisible cette modification). Peut-on cependant également soutenir « dass die Skizze aus dem Naturrechtsaufsatz den Prozess der Erkenntnis des Absoluten ganz anders beschreibt als es in dem betrachteten Kapitel der Differenzschrift der Fall ist » ? La justification qu’apporte HORSTMANN à sa thèse nous paraît peu convaincante ; elle revient à dire ceci : dans la Differenzschrift, les opposés, sujet et objet (ou identité et opposition), ne sont envisagés que dans leur rapport commun à l’absolu, rapport dans lequel ils n’apparaissent l’un et l’autre que comme des identités relatives, non dans ce qui les spécifie l’un par rapport à l’autre. Dès lors, la présentation de l’unité absolue y demeure-t-elle forcément abstraite. Par contre, l’article sur le Droit naturel, de par sa définition de l’absolu comme unité de l’indifférence et du rapport, précise ce qui, dans la Differenzschrift, demeurait indéterminé : le caractère propre de chacun des opposés. Autrement dit, la différence des opposés y est posée et déterminée dans et par le concept de l’absolu lui-même qui rassemble ainsi en soi les conditions de sa réalisation. Ceci nous paraît appeler deux remarques :
1) d’une part, il est, à notre avis, inexact de soutenir que l’esquisse de la Differenzschrift ne fait apparaître aucune différence structurelle entre les identités relatives opposées, comme le montrent, par exemple, GW 4, pp. 67 sq. et surtout pp. 72 et 75 (trad. Méry, pp. 143 sq. et pp. 148 et 152) où cette différence est soulignée à l’aide des catégories d’expansion et de contraction ;
2) d’autre part — et ceci constitue à nos yeux le point essentiel —, cette différence demeure, dans l’esquisse de l’article sur le Droit naturel tout comme dans celle de la Differenzschrift, une différence formelle, affectant uniquement les différents modes de la manifestation de l’absolu, non une différence elle-même absolue.

115 Pour ce qui suit, cf. GW 4, pp. 462-464 (trad. Bourgeois, pp. 75-78).

116 « Quantitatif » doit être ici entendu au sens d’abstrait, d’indéterminé, ou encore de formel ; « qualitatif », au contraire, renvoie à ce qui est déterminé, différencié et, donc, particulier et empirique.

117 GW 4, p. 327 (trad. Méry, pp. 207 sq.).

118 Cf. id., pp. 463 sq. (trad. Bourgeois, pp. 76 sqq.). Sauf indication contraire, c’est à ces pages que nous nous référons dans ce qui suit.

119 GW 4, p. 432 (trad. Bourgeois, p. 32).

120 Id., p. 432 (trad. Bourgeois, p. 32).

121 Cf. pp. 119 sq. de ce travail.

122 On rapprochera ceci de ce que dit Hegel dans Glauben und Wissen à propos du jugement (Urtheil) envisagé comme le moment où l’identité absolue se scinde en sujet et objet : ce moment de l’opposition est identiquement celui de l’émergence de la conscience : cf. GW 4, pp. 327 sqq. (trad. Méry, pp. 207 sqq.). K. DUSING souligne l’influence de Hölderlin dans cette interprétation du jugement comme Ur-Teilung (cf. K. DÜSING, Das Problem der Subjektivität in Hegels Logik, p. 113).

123 Cf. GW 4, p. 120 (trad. Fauquet, p. 88).

124 Id., p. 72 (trad. Méry, p. 148).

125 Id., p. 72 (trad. Méry, p. 148).

126 Id., p. 464 (trad. Bourgeois, p. 78).

127 Est-ce que ceci ne constitue pas, quoi qu’en dise Hegel, une différence essentielle entre esprit et nature ? Telle est la thèse défendue par R. P. HORSTMANN pour qui Hegel, dans l’article sur le Droit naturel, introduit bien une différence qualitative entre esprit et nature sans toutefois disposer des moyens systématiques qui lui permettraient de la thématiser (cf. R. P. HORSTMANN, Probleme der Wandlung in Hegels Jenaer Systemkonzeption, in Philosophische Rundschau 19 (1972), p. 113).

128 GW 4, p. 449 (trad. Bourgeois, p. 54).

129 Id., p. 449 (trad. Bourgeois, p. 55).

130 Sur la fonction — essentielle — de la guerre dans la vie d’un peuple selon l’article sur le Droit naturel, cf. A. GLUCKSMANN, Le discours de la guerre, pp. 111-118. Pour GLUCKSMANN, Hegel voit dans la guerre « la véritable raison d’Etat » : « La guerre est l’affirmation sui-référentielle d’un peuple, le présent où il se retrouve et l’alliance en laquelle il se constitue ».

131 GW 4, p. 450 (trad. Bourgeois, p. 56).

132 Id., p. 451 (trad. Bourgeois, p. 57).

133 Sur la description du « système de la possession », de ses prolongements juridiques et sociaux ainsi que sur le mode de son insertion dans la vie d’un peuple dans l’article sur le Droit naturel, cf. la présentation en trois points de R. P. HORSTMANN, Über die Rolle der bürgerlichen Gesellschaft in Hegels politischer Philosophie, in Hegel-Studien, Bd 9 (1974), pp. 215 sqq.

134 De cette menace et des calamités qui lui font escorte, l’Allemagne de son temps présente aux yeux de Hegel la tragique concrétisation. On sait, en effet, que dans la Verfassungsschrift, dont l’essentiel fut rédigé durant les deux premières années du séjour à Iéna, Hegel impute l’inexistence politique de son pays au maintien inconditionnel de l’ancienne liberté allemande : le primat obstiné qu’elle accorde à l’individu et sur lequel repose le droit politique allemand tout entier a empêché l’Allemagne de constituer, à l’image des autres peuples européens, un Etat (*) véritable dans lequel les singuliers se soumettent à une autorité centrale : cf. W 1, pp. 465 sq. (trad. Jacob, p. 30). Cette « pulsion de liberté », apparue sous la féodalité, n’a toutefois donné ses pleins effets qu’avec les temps modernes. Durant le moyen-âge, en dépit de la faiblesse juridique des Etats, un lien intérieur profond soudait les uns aux autres les membres d’un peuple pour en faire un tout unique et unifié : la religion. Ce qui vient rompre ce lien, c’est, à titre principal, la montée de la bourgeoisie, c’est-à-dire de la richesse commerciale et industrielle (que Hegel lie expressément au schisme protestant), et son attachement exclusif à la sphère individuelle : cf. W 1, pp. 516 sqq. (trad. Jacob, pp. 91 sqq.). Or, le pouvoir des lois a été incapable, en Allemagne, de prendre le relais de la défunte cohésion religieuse. D’où la misère politique allemande à laquelle il ne peut être remédié que par la constitution d’un pouvoir véritable qui exerce, sans les épargner, un réel contrôle sur l’activité subordonnée et contingente des individus : cf. W 1, p. 479 et surtout pp. 582 sq. (trad. Jacob, pp. 46 sq. et p. 172).

135 GW 4, p. 450 (trad. Bourgeois, pp. 56 sq.).

136 W 1, p. 462 (trad. Jacob, p. 26).

137 Depuis Francfort où il a, principalement par la lecture de Steuart, abordé l’étude de l’économie politique (cf. sur ce point P. CHAMLEY, Les origines de la pensée économique de Hegel, in Hegel-Studien, Bd 3 (1965), pp. 225 sqq.), Hegel sait que la propriété constitue une dimension incontournable des sociétés modernes : cf. par exemple Nohl, p. 273 (trad. J. Martin, p. 41). Nous allons toutefois voir que cela ne signifie nullement, comme on a parfois voulu le laisser entendre, un abandon pur et simple du modèle politique qui avait été à la base de ses méditations de jeunesse en la matière, celui de la polis antique. Une lecture attentive de l’article sur le Droit naturel le montre en effet : c’est en se référant massivement aux théories politiques de Platon et d’Aristote que Hegel développe sa propre conception de la vie éthique (cf. par exemple M. RIEDEL, Hegels Kritik des Naturrechts, in Hegel-Studien, Bd 4 (1967), pp. 180-181 sqq., pp. 185, 186). La différence avec les textes de jeunesse réside dès lors plutôt en ceci que Hegel tente désormais de reformuler le modèle antique de manière à y inclure la réalité socio-politique des temps modernes (cf. sur ce point R. P. HORSTMANN, Über die Rolle der bürgerlichen Gesellschaft in Hegels politischer Philosophie, in Hegel-Studien, Bd 9 (1974), pp. 213 sq.).

138 Cf. GW 4, p. 451 (trad. Bourgeois, pp. 57 sq.).

139 Id., pp. 454 sq. (trad. Bourgeois, pp. 62 sq.).

140 Id., p. 455 (trad. Bourgeois, p. 63).

141 Id., pp. 455 sq. (trad. Bourgeois, pp. 64 sq.).

142 Id., p. 458 (trad. Bourgeois, pp. 68 sq.).

143 Id., p. 450 (trad. Bourgeois, p. 55).

144 Id., p. 454 (trad. Bourgeois, p. 62).

145 Cf. pp. 96 sq. de ce travail.

146 Sur le sens que donne ici Hegel au concept de « vertu » (Tugend), cf. GW 4, p. 469 (trad. Bourgeois, p. 81) ; à titre d’exemples d’individus vertueux il cite : Epaminondas, Hannibal, César.

147 GW 4, p. 449 (trad. Bourgeois, p. 55). — Cf. sur ce point les remarques de M. RIEDEL, Hegels Kritik des Naturrechts, in Hegel-Studien, Bd 4 (1967), pp. 189 sq.

148 GW 4, p. 455 (trad. Bourgeois, p. 63).

149 Id., p. 456 (trad. Bourgeois, p. 65). — Dans la Verfassungsschrift, Hegel évoque en ces mots la priorité politique de la noblesse : le noble « est dès la jeunesse, dégagé, par la prospérité, de la souillure d’un métier et des efforts que rend nécessaires le dénuement ; de ce fait, de même que par sa (disposition) congénitalement exempte de souci et ne s’occupant pas des affaires, il conserve un cœur libre (ein freies Gemüt) ; aussi (est-)il davantage capable de bravoure guerrière, qui (sacrifie) toute possession, tout attachement à la propriété ainsi que les habitudes de la limitation et l’accoutumance à l’ensemble de tout (ce qui) existe, de même (qu’il est davantage capable) d’un traitement plus libéral des affaires de l’Etat et d’une certaine liberté dans ce domaine, (liberté) qui est plus indépendante des règles et est en mesure, selon les circonstances, la situation et le besoin, de se fier davantage à soi-même et d’animer le caractère mécanique de l’administration en quelque chose de plus libre » : W 1, pp. 535 sq. (trad. Jacob, p. 113). Remarquons toutefois que ce texte, contrairement à l’article sur le Droit naturel, accorde à l’état bourgeois une certaine compétence dans la gestion des affaires publiques : l’organisation des Etats modernes, y écrit en substance Hegel, impose un travail énorme et absorbant, lequel rend à son tour nécessaires « le zèle tenace », « les connaissances » et le « savoir-faire » de la bourgeoisie : cf. id., p. 536 (trad. Jacob, pp. 113 sq.).

150 GW 4, p. 455 (trad. Bourgeois, p. 63). — Comment Hegel entend-il ce lien de la philosophie à la politique qui, sans aucun doute, constitue un des axes fondamentaux de sa conception de la philosophie durant les premières années d’Iéna ? On peut, sur ce point, faire les quelques observations suivantes :
1) pour Hegel, à Iéna, la philosophie trouve son accomplissement en tant que philosophie politique (philosophie de la vie éthique) ; même dans la Philosophie de l’esprit de 1805/06, où apparaît pour la première fois la séquence art-religion-science, celle-ci est développée dans le cadre du chapitre intitulé « constitution » (cf. GW 8, pp. 277 sqq.) ;
2) mais il y a plus : la liaison de la philosophie à la politique ne s’épuise pas dans l’élaboration d’une théorie politique ; il semble, en effet, que pour Hegel, à cette époque, la philosophie ait également un lien plus immédiat à l’action politique elle-même. Ainsi, dans une introduction à ses cours de philosophie spéculative, que KIMMERLE situe au début des années d’Iéna (cf. H. KIMMERLE, Das Problem der Abgeschlossenheit des Denkens, p. 39) et dont ROSENKRANZ nous fournit le résumé ainsi qu’un extrait dans son G. W. F. Hegels Leben, pp. 189 sq., Hegel définit d’emblée la philosophie par rapport à l’œuvre du « grand homme » qui, insérant son action individuelle dans le cours du destin, éveille et suscite une nouvelle figure de l’esprit du monde. En effet, une telle action présuppose que son auteur se soit purifié de toute attache à la particularité du monde existant, qu’il se soit hissé à hauteur du tout et en ait pris connaissance. Or, une telle formation, seule « l’école de la philosophie » peut la lui donner : « ainsi, écrit Hegel, c’est de l’école d’Aristote qu’Alexandre le macédonien est passé à la conquête du monde » ;
3) enfin, dans une première version de ses cours sur le droit naturel (1802-1805), Hegel tentait, d’après ROSENKRANZ, de prouver la nécessité de la philosophie dans un peuple « als ideale Ergänzung des Krieges ». ROSENKRANZ résume comme suit la pensée de Hegel : « Die absolute Arbeit sei allein der Tod, weil er die bestimmte Einzelheit aufhebe, weshalb die Tapferkeit im Staat das absolute Opfer bringe. Da nun aber für die, welche kämpfend nicht sterben, die Erniedrigung bleibt, nicht gestorben zu sein, und den Selbstgenuss ihrer Einzelheit zu haben, so bleibt nur die Speculation als das absolute Erkennen der Wahrheit die Form, in welcher das einfache Bewusstsein des Unendlichen ohne die Bestimmtheit des individuellen selbstständigen Lebens möglich » (K. ROSENKANZ, G. W. F. Hegels Leben, pp. 132 sq.).

151 GW 4, p. 454 (trad. Bourgeois, p. 61).

152 Id., p. 453 (trad. Bourgeois, p. 61).

153 Id., p. 454 (trad. Bourgeois, p. 61).

154 Id., pp. 453 sq. (trad. Bourgeois, p. 61).

155 Id., p. 450 (trad. Bourgeois, p. 55).

156 Cf. id., pp. 456 sq. (trad. Bourgeois, pp. 65 sq.).

157 Id., p. 458 (trad. Bourgeois, p. 69). — Ce thème, selon lequel le pouvoir politique doit laisser à l’activité des simples citoyens une certaine latitude (une liberté surveillée), aussi longtemps du moins qu’elle n’empiète pas sur ses propres intérêts, est développé et même élargi dans la Verfassungsschrift. Ainsi, dans la première partie de ce texte, intitulée « Concept de l’Etat », Hegel passe en revue les éléments indispensables à l’existence d’une entité politique ; il les résume en une seule phrase : « Une masse d’êtres humains ne peut recevoir le nom d’Etat que si elle est unie en vue de la défense collective de l’ensemble de sa propriété » : W 1, p. 472 (trad. Jacob, p. 39). C’est donc essentiellement l’existence d’une force guerrière unifiée (une armée) et de tout ce que le bon fonctionnement de celle-ci requiert qui constitue l’élément indispensable à la formation d’un Etat. Le reste est, du point de vue politique, strictement indifférent et peut être abandonné à l’initiative des citoyens. Mieux, un Etat est d’autant plus accompli qu’il est en mesure de distinguer et séparer ce qui lui est nécessaire de ce qui ne l’est pas : « Cette distinction a un aspect très important pour la tranquillité des Etats, la sécurité des gouvernements et la liberté des peuples » : id., p. 474 (trad. Jacob, p. 40). Dans la mesure, en effet, où un Etat se limite à ne requérir impérativement de la population qu’il gouverne que ce qui lui est strictement indispensable, il s’attribue un double avantage :
1) ne pas provoquer le mécontentement de la population, lequel risquerait, en effet, de se retourner contre lui et contre ce qui lui est nécessaire : cf. id., p. 474 (trad. Jacob, p. 41) ;
2) en reconnaissant à la population, dans ce qui ne le concerne pas lui-même directement et qui ne risque pas de l’entraver, un droit et une liberté propres, éveiller en elle un sentiment de gratitude et d’attachement à son égard concourant à l’excellence du fonctionnement de l’ensemble et pouvant même susciter, chez le citoyen, un désir spontané de collaborer à l’œuvre commune : cf. id., pp. 482 sqq. (trad. Jacob, pp. 49-50 sqq.).
D’où l’importance de cette séparation du politiquement nécessaire et du politiquement contingent, telle que la réalisèrent, selon Hegel, les anciens Etats européens : cf. id., p. 479 (trad. Jacob, p. 47). La République française et l’Etat prussien, par contre, en affichant une manie vétilleuse de contrôler les citoyens jusque dans leurs activités les plus insignifiantes, ressemblent à des « machines dotées d’un seul ressort qui communique le mouvement à tous les autres rouages en nombre infini » : id., p. 481 (trad. Jacob, p. 48). Ce qui entraîne un double inconvénient :
1) ne témoignant nulle confiance à leurs populations, ces Etats-machines ne peuvent rien en espérer en retour : cf. id., pp. 483 sq. (trad. Jacob, p. 51) ;
2) voulant régler d’en haut, autoritairement, toute action, quelles qu’en soient l’importance et la portée, ils engendrent une vie uniforme, « ennuyeuse » et « dépourvue d’esprit » : id., p. 484 (trad. Jacob, p. 52).

158 GW 4, p. 459 (trad. Bourgeois, p. 70).

159 Id., p. 459 (trad. Bourgeois, p. 70).

160 Cf. id., p. 462 (trad. Bourgeois, p. 74).

161 Cf. id., p. 462 (trad. Bourgeois, pp. 74 sq.).

162 Id., p. 58 (trad. Méry, p. 133).

163 Id., p. 454 (trad. Bourgeois, p. 62). — Cf. sur ce point les remarques d’A. KAAN pour qui Hegel attribue ici « une structure dualiste » au corps social : G. W. F. HEGEL, Le Droit naturel, traduit de l’allemand, préfacé et annoté par A. KAAN, p. 35.

164 GW 4, p. 458 (trad. Bourgeois, p. 69).

165 Id., p. 450 (trad. Bourgeois, pp. 55 sq.).

166 Cf. id., pp. 458 sq. (trad. Bourgeois, pp. 69 sq.).

167 Id., p. 484 (trad. Bourgeois, p. 102).

168 Cf. id., p. 484 (trad. Bourgeois, p. 102). — En ce qui concerne la critique du protestantisme, cf. pp. 23 sqq. et 44 sqq. de ce travail. Pour ce qui est de la révolution française, d’autre part, il est à notre sens indiscutable que, durant les premières années d’Iéna, Hegel prend à son égard une attitude qui tranche singulièrement sur l’enthousiasme des années de jeunesse comme sur l’appréciation globalement positive dont elle fera l’objet dans les grandes œuvres de la maturité. Dans un texte comme la Verfassungsschrift, par exemple, il est clair que non seulement la révolution française est condamnée pour avoir donné lieu à un Etat-machine, centralisé à l’extrême et tyrannique — cf. W 1, pp. 479 sqq. (trad. Jacob, pp. 46 sqq.) —, mais que, ce qui est plus grave, elle est considérée comme n’ayant apporté aucun progrès substantiel par rapport aux anciens Etats européens et au système politique (monarque et représentation dans les états généraux) qui s’y trouvait mis en œuvre, que du contraire : « Le malheur de la France, écrit Hegel, doit être cherché uniquement dans la complète dégénérescence de la constitution féodale et dans la perte de son caractère authentique » : id., p. 535 (trad. Jacob, pp. 112 sq.). De ce point de vue, la thèse de J. RITTER, pour qui « Hegel a toujours approuvé la Révolution française » — J. RITTER, Hegel et la révolution française, p. 24 — nous paraît difficilement défendable. Cf. par contre les pages éclairantes de J. TAMINIAUX dans G. W. F. HEGEL, Système de la vie éthique, traduit et présenté par J. TAMINIAUX, pp. 45 sq.

169 GW 4, pp. 484 sq. (trad. Bourgeois, p. 102).

170 Id., p. 484 (trad. Bourgeois, p. 102).

171 Id., pp. 458 sq. (trad. Bourgeois, p. 69).

172 C’est ici que la caractérisation de la philosophie hégélienne comme pantragisme trouve son expression la plus déterminée, comme l’a souligné avec force H. GLOCKNER, Hegel, Bd 2, p. 333. Que cette conception tragique de la manifestation de l’absolu ne soit pas sans rapport avec les perspectives développées peu auparavant par Hölderlin sur la tragédie, c’est ce que signale brièvement H. KIMMERLE (cf. Das Problem der Abgeschlossenheit des Denkens, p. 67). Hegel et Hölderlin avaient été, en effet, fort proches l’un de l’autre lors du séjour de Hegel à Francfort (cf. sur ce point D. HENRICH, Hegel und Hölderlin, in Hegel im Kontext, pp. 9 sqq.).

173 GW 4, p. 459 (trad. Bourgeois, p. 69). — Pour ce qui suit, cf. id., p. 459 (trad. Bourgeois, pp. 69 sq.).

174 Après avoir examiné la conception de la tragédie développée dans l’article sur le Droit naturel, O. PÖGGELER en vient à se poser la question du rapport qu’entretient la tragédie ainsi définie avec le destin de Jésus tel que l’évoquaient les textes de Francfort et, surtout, avec le thème, développé en conclusion à Glauben und Wissen, du Vendredi saint spéculatif : cf. O. PÖGGELER, Hegel und die griechische Tragödie, in Hegel-Studien, Beiheft 1 (1964), p. 293. W. BONSIEPEN tente de répondre à cette question en remarquant, d’une part, que c’est la tragédie grecque qui a conduit Hegel à Francfort à une vision renouvelée de Jésus et de son message, mais que, d’autre part, c’est la tragédie du Christ qui lui ouvre finalement le sens de tout tragique (cf. W. BONSIEPEN, Der Begriff der Negativität in den Jenaer Schriften Hegels, pp. 25 sq.). Pour H. KIMMERLE, de manière analogue, c’est dans le thème chrétien de la mort de Dieu, interprété et développé dans Glauben und Wissen, que Hegel découvre la structure logique qui fonde sa conception de la tragédie dans l’article sur le Droit naturel (cf. H. KIMMERLE, Das Problem der Abgeschlossenheit des Denkens, p. 67).

175 D’où l’audace et la bravoure du philosophe : cf. pp. 95 sqq. de ce travail.

1 Nous écrivons « Etat » lorsqu’il s’agit de l’allemand « Staat » et « état » pour rendre l’allemand « Stand ».