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    Plan détaillé Texte intégral Le parcours antérieur Genèse d’une discipline Nouvelles approches, nouveaux objets Politiques Notes de bas de page

    Arpenter l'histoire des sciences

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Chapitre 6. Denis Woronoff

    « Techniques et industrialisation »

    p. 133-151

    Texte intégral Le parcours antérieur Genèse d’une discipline Nouvelles approches, nouveaux objets Politiques Notes de bas de page

    Texte intégral

    1Denis Woronoff est né en France en 1939. Historien des techniques, il est spécialiste de l’histoire économique de la France. D’abord chercheur au CNRS, il poursuit ensuite sa carrière comme professeur à l’Université Paris I, où il est aujourd’hui professeur émérite. De 1983 à 1987, il dirige l’Institut d’histoire moderne et contemporaine, dont les tutelles sont le CNRS, l’École normale supérieure et l’Université Paris I. Il participe à la fondation du Comité d’information et de liaison pour l’archéologie, l’étude et la mise en valeur du patrimoine industriel (CILAC) en 1978 et à la création du Centre de recherche en histoire des sciences et des techniques (CRHST) de la Cité des sciences et de l’industrie de la Villette et du CNRS, en 1986. Avec l’économiste Robert Salais et l’historien de l'économie Michel Margairaz, il crée en 1997 l’unité mixte de recherche « Institutions et dynamiques historiques de l’économie », dont les tutelles sont le CNRS, l’École normale supérieure de Cachan, et les Universités Paris I, Paris VIII et Paris X-Nanterre. Il a été président de l’Association pour le patrimoine d’Île-de-France et membre du Comité de vigilance face aux usages publics de l’histoire (association d’historiens fondée en 2006). Auteur d’une dizaine de livres, il a notamment édité le troisième tome de la Nouvelle histoire de la France contemporaine, intitulé La République bourgeoise : de Thermidor à Brumaire, 1794-1799 (Éditions du Seuil, 1972). Il a également écrit L’Industrie sidérurgique en France pendant la Révolution et l’Empire, publié en 1984 aux Éditions de l’EHESS, Forges et forêts. Recherches sur la consommation proto-industrielle de bois (Éditions de l’EHESS, 1990), ou encore Histoire de l'industrie en France, du xvie siècle à nos jours, publié aux Éditions du Seuil en 1994.

    Le parcours antérieur

    2Comment devient-on historien des techniques ? C’est largement affaire de circonstances. Mon apprentissage s’est déroulé dans les années 1960. À cette époque, le paysage historique était dominé par Ernest Labrousse, spécialiste incontestable de l’économie française du xviiie siècle. Il avait su associer sa démarche d’économiste et sa réflexion d’intellectuel marxiste sur la Révolution française1. Si je reconstitue mon trajet d’apprenti-chercheur, j’y vois cette première influence, avec une inflexion vers le « moment Directoire » qui, sous une apparente grisaille, traçait une voie possible de la modernité. Tout historien est comptable d’une chronologie. La mienne oscillait entre le court terme de la Révolution et une plus longue durée ; disons des années 1780 aux années 1840. En tout cas, l’économie était bien mon choix. Sans méconnaître la dimension politique et sociale de la période révolutionnaire, qui était, dans ces années 1960, l’enjeu passionné de joutes idéologiques, je ne me sentais pas tenu de me prononcer sur le combat des sans-culottes ou de contribuer à l’analyse du groupe des Girondins. Au fond, ces querelles, à la fois brillantes et décevantes, ne m’inspiraient pas. Je n’avais pas le souci de départager Albert Soboul2 et François Furet3. En revanche, l’histoire matérielle, autrement dit l’histoire économique, correspondait à mon attente.

    3L’économie était donc la cible, mais quel domaine retenir ? Le monde rural avait fait l’objet d’un investissement considérable – et qui ne cessait pas – de la part du monde de la recherche, en particulier par le biais de travaux sur les biens nationaux. Le prestige intellectuel et politique de la « Grande Révolution » était tel que les bras n’ont jamais manqué, dans les années 1960, pour des travaux dont on doit reconnaître le caractère souvent répétitif. Peu attiré, au départ, par l’histoire financière de la période, je pensais en revanche que l’artisanat et l’industrie, peu visibles, seraient de bonne prise. Dans une économie de guerre – mon espace de recherche s’étendant désormais jusqu’à l’Empire – l’industrie sidérurgique paraissait en effet de bonne prise, avec des archives publiques riches de l’intérêt que les autorités portaient à cette production en partie militaire, et des papiers d’entreprise – finalement nombreux – qui autorisaient sans doute une plongée au cœur des fabrications. À l’intérieur de ce vaste chantier, bien des pistes étaient à découvrir. Il fallait déjà déterminer l’effectif des usines et ses variations à travers la période, s’interroger sur le patronat des « maîtres de forges » et éclairer autant qu’il est possible le monde des ouvriers. Mais l’enjeu principal était d’étudier les façons de produire le fer, autrement dit les techniques opératoires. Sur cet axe, d’autres savoirs d’industrie venaient se greffer, ainsi les façons de faire du charbon de bois ou l’évolution des équipements, tel le moteur hydraulique. C’était, dans ces deux cas au moins, l’occasion de sortir de la stricte étude de la sidérurgie. Ainsi me suis-je affranchi de ces premières limites en travaillant sur l’industrie houillère et, dans une moindre mesure, sur la circulation des marchandises, par le biais de la « voiture » routière ou fluviale. Mais chaque fois, j’ai eu le souci d’associer dans l’étude, techniques, travail et acteurs, de combiner l’analyse des sites et une géographie de la production à plusieurs échelles. Au-delà d’une grille de questions nécessaires mais forcément convenues, de nouvelles sources et de nouvelles pratiques ont émergé. L’analyse des lieux d’exercice pour le versant matériel (patrimoine industriel) et des représentations de l’industrie (textes et images) pour le côté culturel, est à mettre au crédit de celles et ceux qui ont tenu ce chantier à partir des années 1980.

    Genèse d’une discipline

    4L’histoire des techniques a longtemps manifesté une identité fragile et même contestée. C’est d’abord une histoire confuse où le rapport aux sciences ne cesse d’être en question. Jusqu’à une date toute récente, l’expression « histoire des techniques » s’est ainsi constamment conjuguée avec celle, plus valorisante sans doute, d’histoire des sciences. Qu’il s’agisse d’un problème d’enseignement, ou d’une équipe de recherche, l’un ne va presque jamais sans l’autre. Pire, il arrive parfois que les organisateurs d’une opération de recherche fassent une économie de termes, sinon de papier et que l’histoire des techniques soit présente sans avoir besoin d’être nommée. Il demeure donc nécessaire, non de couper les ponts entre les deux disciplines, mais de restreindre l’alliance aux moments et aux lieux où sciences et techniques ont effectivement quelque chose à échanger ou à produire ensemble. Il ne faut pas cependant exagérer la distance. Avant même la rencontre organique des sciences et des techniques, à la fin du xixe siècle, des points de contact existaient depuis longtemps entre les deux pôles. C’est le cas, par exemple, du thème des instruments scientifiques4, si fécond en termes de recherche historique comme de muséographie.

    5Dans un numéro des Annales consacré, en 1935, à l’histoire des techniques, Lucien Febvre avait proposé une feuille de route en trois volets : la description minutieuse des procédés et des outils, qu’il appelle « histoire technique de la technique », les techniques et le progrès des sciences, enfin, techniques et histoire générale5. Disons-le simplement, cette entreprise a été un échec, si l’on en juge par le très faible écho, au moins à l’École pratique des hautes études (VIe section), que reçut le message de Lucien Febvre6. Il a fallu attendre plus de soixante ans pour que « l’École des Annales » prenne en compte cette thématique majeure7. Il est vrai que d’autres institutions scientifiques, l’École pratique des hautes études (EPHE) – IVe section – avec Bertrand Gille, et le Musée des arts et métiers, dirigé par Maurice Daumas, assuraient en partie la relève. Les techniques, même les moins sophistiquées, recèlent souvent des difficultés d’analyse. Les historiens universitaires ne sont pas, de ce point de vue, les chercheurs les mieux formés à ce type d’histoire. Dans l’autre sens, pour les « littéraires », le déficit de culture est moins délicat à combler. Ainsi, une sorte de division du travail s’est fait jour. L’histoire technique des techniques a été largement prise en charge par les ingénieurs et autres professionnels, tandis que les spécialistes des sciences sociales accaparaient le reste. Les champs de recherche proposés par Lucien Febvre, au lieu d’être articulés, risquaient de devenir monolithiques, chacun se suffisant à lui-même. Le pari d’histoire globale semblait perdu. On pourrait dire, en caricaturant, que certains transformaient l’histoire des techniques en un gigantesque mode d’emploi alors que d’autres procédaient essentiellement à une marche autour de la « boîte noire » sans jamais y entrer. « Histoire internaliste » contre « histoire externaliste » ? On l’a parfois suggéré. En fait, la porosité des institutions scientifiques et le nombre réduit de chercheurs concernés ont finalement protégé le milieu de cette dérive et dégagé la voie pour une histoire contextualisée.

    6Une tentation demeure cependant, celle d’une histoire des inventeurs pour lesquels nous disposerions, moyennant recherche, d’un socle suffisant d’information. Ces vies des hommes illustres ne sont pas inutiles mais demeurent fortement biaisées. D’abord, elles font l’impasse sur la richesse des données que l’on pourrait mobiliser – en termes d’économie, de société et de culture. Cela reste donc une démarche tronquée où les réseaux – pourtant bien explicatifs – n’apparaissent guère. Surtout, ce genre d’exercice à la fois accompagne et produit une chronologie des inventions toute linéaire, d’où sont bannis les éventuels reculs et erreurs, où tout paraît nécessaire, parce que chaque pas est justifié par le suivant8. Il faut sans doute en passer, quand c’est possible, par la biographie collective, ou par une approche prosopographique, qui taille large mais qui éclaire bien les ressources sociales et intellectuelles dont le groupe, et son héros, ont pu profiter.

    7La démarche d’historiens universitaires, mais aussi d’ingénieurs, de techniciens ou d’architectes impliqués dans ce champ, illustre une volonté commune : penser la technique pour éviter d’être pensé par elle. Les chercheurs français s’y sont-ils mis plus tardivement que d’autres, comme on le dit ? La difficulté à se faire lire et reconnaître a dû jouer souvent. Ainsi Bertrand Gille a publié en 1972, dans sa Revue d’histoire des mines et de la métallurgie, un article majeur intitulé « Prolégomènes à une histoire des techniques »9. Il y déployait une argumentation dense et convaincante, en commentant plusieurs niveaux d’analyse : l’ensemble technique, autour de l’exemple du haut-fourneau – structures et techniques constructives, énergie, approvisionnement, produit ; la filière technique envisagée comme succession ordonnée d’appareillage et de fabrications qui découlent du niveau précédent. La réflexion la plus élaborée concernait les systèmes techniques, assemblages complexes de moyens, d’actions et de savoirs. L’industrie textile s’est construite sur de tels modèles. On y trouve en effet toutes les étapes de la préparation de la fibre puis de son traitement par filature et tissage. Une science appliquée, la chimie, est présente dans le processus. Le système technique minier offre un autre cas de figure. Les conditions naturelles – qualité et accessibilité du minerai, menaces d’ennoiement – jouent un rôle décisif. Pourtant, c’est le mode de production qui commande : au fond, abattage, extraction, transport, circulation de l’air, exhaure de l’eau, au jour, tri, lavage et éventuellement cuisson. Chacun des sous-ensembles est solidaire des autres. L’interdépendance est la règle ; le tout est donc cohérent et en équilibre. Pourtant, des changements dans les facteurs de production peuvent affecter le bon fonctionnement de celui-ci. C’est là où l’innovation technique, autochtone ou importée, a chance de faire avancer le système global qui trouve, après reconstruction, un nouvel équilibre. Thomas Hughes, de son côté, a élaboré un type de système technique à « composants matériels » et de système sociotechnique – où les hommes ont leur place – en s’appuyant sur le cas de l’éclairage électrique10. Le mot-clé est celui d’interaction. Autrement dit, la technique n’est jamais seule, sauf par provision. Dès lors, il faut non seulement démonter le « noyau technique » et ses composants pour les comprendre, mais encore maintenir le système dans la dynamique de l’histoire. L’inventeur ou les « inventeurs collectifs » sont présentés comme des « créateurs-bâtisseurs » de systèmes. François Caron, qui fut un historien de l’innovation technique, a, de son côté, employé le concept de système technique pour définir l’organisation des chemins de fer en France dans sa première période11. Il est vrai que les compagnies de chemin de fer en phase d’installation fournissaient une étude de cas particulièrement riche. Les rapports dialectiques entre infrastructures, matériel, signalisation, sécurité, vitesse, parmi d’autres indicateurs, montrent tout le parti que l’on peut tirer de cette mise en relation généralisée. En outre, une fois que les compagnies se sont inscrites dans la durée, la comparaison des différentes cultures techniques et cultures d’entreprises a fait apparaître des distinctions que la création de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) en 1937 mettra en plein jour. Ce sera d’ailleurs une constatation un peu identique qui sera faite en 1946, lors de la création de « Charbonnages de France ». La direction devra faire rédiger des fascicules, afin que, sur les points litigieux, comme par exemple le boisage des galeries, émerge une sorte de culture technique nationale.

    8On s’accorde généralement pour penser que l’histoire des techniques est scandée par des innovations, qui sont manifestes, si elles expriment une rupture, et discrètes, quand elles correspondent à des avancées « incrémentales ». En fait, dans la conception la plus réductrice et la plus répandue de cette dynamique, il n’est d’innovation qui vaille que dans la rupture. Ce que l’observation propose est à l’inverse. Le quotidien des techniques est fondé sur la pratique de la répétition12. Dans l’idéal de son fonctionnement et dans le détail du travail, elle permet de stabiliser voire d’améliorer le procès de fabrication. De l’apprentissage à la fin d’une vie d’emploi, l’ouvrier s’ajuste ainsi aux équipements, aux normes et aux valeurs partagées. Du point de vue des élites industrielles et sociales, la répétition, sans doute indispensable pour le gouvernement des ouvriers, peut devenir un obstacle à toute évolution. Le lieu commun de la routine n’est jamais loin. L’ingénieur des mines Frédéric Le Play s’est élevé vigoureusement en 1848 contre ce parti-pris13. Il indique d’abord que beaucoup de ses contemporains ignorent et, du coup, méprisent les opérations techniques et les opérateurs. « Il n’est pas étonnant que les échecs des techniques soient attribués à l’inhabilité, à la mauvaise volonté et, suivant l’expression consacrée, à la routine des ouvriers. On est donc habitué [poursuit-il] à voir un obstacle dans ce qui constitue la principale force de l’industrie, l’intervention intelligente de l’homme ». L’ingénieur des mines stigmatise « l’ignorance des faits » des « philosophes » et des « écrivains », qui n’ont pas vu « la connaissance si ferme, si complète des lois du monde physique » répandue chez les ouvriers « qui président aux principales opérations de la métallurgie ». La routine n’est pas la seule attitude que les maîtres reprochent, à mauvais titre, aux ouvriers. Frédéric Le Play évoque la querelle latente ou ouverte, entre entrepreneurs et main-d’œuvre sur la question des « secrets ». Le reproche est récurrent. Des ingénieurs des mines en inspection ou d’autres ingénieurs dans l’exercice de leur métier ont dénoncé la façon dont ils étaient tenus à l’écart, autant qu’il se pouvait. Les principaux ouvriers résistaient à la mise en commun des savoirs acquis. Qu’il s’agisse de la pratique des équipements réunis, du bon geste, des indicateurs utiles pendant l’opération, ils ne voulaient pas être expropriés de leur capital professionnel. Cette inquiétude a duré longtemps. Elle ne concerne d’ailleurs pas seulement le rapport employeur/employé mais aussi la tension entre ouvriers quand de nouveaux venus, hors du cercle familial, tentent de se faire une place dans l’entreprise. Encore au début du xxe siècle, en Belgique, les apprentis devaient « voler l’information avec leurs yeux ».

    9Dans les années 1980, le paysage intellectuel change notablement. Certes l’opinion publique demeure réservée ou indifférente, s’agissant des techniques et de leur histoire, mais des signes d’intérêt apparaissent dans les milieux savants et dans des institutions pionnières qui commencent à prendre le domaine en charge. Le CNRS, qui est par construction un lieu multidisciplinaire, s’est investi dès ce moment dans la création d’une équipe de recherche mixte sur l’histoire des sciences et des techniques à la Cité des sciences et l’industrie14. Ce groupe a rapidement trouvé sa place, en particulier sur une thématique plus attentive qu’auparavant aux démarches intellectuelles des écoles étrangères. Reproduisant en quelque sorte le rapport de subordination qui liait jusqu’ici sciences et techniques, l’histoire des techniques s’inscrit désormais comme un des piliers de l’histoire de l’industrie. Chacune de ces branches progresse solidairement. L’Action Thématique Programmée (ATP) du CNRS « Histoire de la France industrielle » a été reçue dans cet esprit par la communauté des historiens. La recherche ne peut pas se passer longtemps d’un support d’enseignement, d’initiation pour les débutants, d’approfondissement pour les plus avancés. Pour répondre à ces besoins, le Diplôme d’Études Approfondies (DEA) « histoire des techniques » a été créé en 1987 entre le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et l’Université Paris IV-Sorbonne. Chaque année, une petite cohorte de jeunes espoirs quitte ces lieux d’apprentissage, et entre pour la plupart dans des emplois du secteur culturel. L’histoire des techniques deviendrait- elle une institution ? Elle est à la fois mieux considérée et toujours fragile. Pourtant l’information progresse. Il y a, dans le courant des années 1980-1990, une demande manifeste en ce sens15.

    10Histoire et techniques ont partie liée. Pour donner un sens dynamique à cette alliance, il est nécessaire d’envisager les différents aspects de l’association. L’enregistrement des ruptures traditionnelles, autrement dit la datation, n’est pas à dédaigner. Ainsi, Alexandre Graham Bell a bien inventé le téléphone – sous réserve des querelles en paternité – en 1876. Cependant, une telle désignation donne une rigueur parfois excessive à l’opération. Lorsque le métier à tisser le coton Northrop est présenté à l’exposition de 1900, les professionnels s’extasient. En fait, il était déjà apparu en 1897 mais avait dû subir ensuite des aménagements. De même, le procédé Bessemer aura mis quatre ans à s’affirmer, à se faire reconnaître par les sidérurgistes. La chronologie des techniques se construit avant tout sur des tournants larges. Les observateurs qui vivent ces transitions ont évidemment du mal à les mettre en perspective. Dire, comme le fait un membre français du jury de l’Exposition de 1878 que « l’industrie des machines est sortie de la période embryonnaire » est évidemment très subjectif. Autre type de temporalité : la coexistence, dans les dernières années du xixe siècle, de plusieurs types d’énergie disponibles pour faire fonctionner un véhicule automobile montre la souplesse du système technique. En principe, la vapeur serait une des solutions possibles. En fait, c’est une voie sans issue ; cela ne fonctionne pas. L’électricité, disent les rapporteurs du jury de l’Exposition de 1900, serait la meilleure formule. « La voiture de l’avenir » écrit l’un d’entre eux « sera évidemment à moteur électrique, si l’on trouve dans les moindres localités, à bon compte, des accumulateurs légers, de rechange ». La vapeur a été abandonnée, le moteur électrique tarde à advenir. Le moteur à essence est en train de gagner par défaut.

    11Sous l’influence des tendances de l’histoire économique, l’histoire des techniques s’est ouverte au quantitatif, à partir des années 198016. Cette approche peut paraître inattendue si l’on reste dans l’esprit d’une histoire totalement événementielle, où les découvertes remplacent les batailles. Mais insérée dans le tissu économique et social, cette histoire se prête bien à un exercice statistique. La masse des brevets fournit aux historiens un matériau riche d’informations et d’un traitement relativement aisé. La difficulté vient plutôt des limites d’usage du document, en particulier des politiques de dépôt et d’acquisition et du caractère forcément hétérogène du corpus. Néanmoins, les premiers travaux tirés de cette source indiquent qu’il doit être possible, avec toutes les réserves nécessaires, de bâtir « une conjoncture inventive », qu’il s’agisse d’une entreprise ou d’un secteur d’industrie17. On conçoit que cette entreprise puisse s’appliquer à d’autres bases documentaires comme la littérature technique18. Une étude des formes successives de l’industrialisation de Morez (Jura) a mis en évidence à la fois la diversité des produits dans une même filière – clous, horloge, lunettes – et les éléments de continuité19. Les équipements employés renvoient en effet à un outillage de précision qui peut être adapté à de nouvelles pratiques. D’autre part, les savoir-faire, eux aussi parfaitement ajustés, développent un ensemble de gestes, de postures et une division sans pareille du travail. On comprend mieux que ces savoirs accumulés évoquent à beaucoup la sphère de la micro-informatique.

    12Comment les techniques sont-elles transmises ? En longue durée, on répondra : par la famille et par les proches ; ce que l’on pourrait appeler l’endotechnie. Jusqu’au début du xxe siècle, les ouvriers les plus qualifiés se considéraient souvent comme détenteurs de l’emploi qu’ils occupaient. Cela vaut pour tous les corps de métier, pour un charpentier comme pour un mineur. Au-delà du premier cercle, l’information circule par d’autres voies. Toutes sortes d’intermédiaires se font porteurs de techniques, selon l’occasion. L’environnement professionnel si prégnant dans les grandes villes, joue ici un rôle d’initiateur et crée une sociabilité en réseaux. D’autres formes de rencontre permettent les échanges. C’est le cas des chantiers du bâtiment et plus encore des travaux publics. Ainsi le percement du canal de Suez a-t-il été l’occasion, pour les ingénieurs et les techniciens de tous statuts venus d’Europe, d’enrichir leur expérience préalable20. Ce ne fut pas un chantier pionnier, du point de vue des matériels et des procédés, mais un lieu privilégié d’organisation du travail, en vraie grandeur. On notera que, près d’un demi-siècle plus tard, le creusement du métro parisien sera justiciable d’une appréciation voisine21. Sur ce chantier, il n’y a pas eu, à proprement parler, d’innovation technique. Parfois même, il est paru plus expédient de renoncer aux équipements modernes pour revenir un moment à la pelle et à la pioche. En revanche, les ingénieurs firent preuve d’une maîtrise remarquable du temps et de l’espace. Leur réussite s’est manifestée par une organisation du travail inventive et efficace. Transférer des techniques implique, d’une façon ou d’une autre, une démonstration. La gestuelle, les postures sont décisives parce qu’elles sont au cœur des métiers visés. La langue et le vocabulaire, curieusement, importent moins ; ils s’apprennent à mesure. La meilleure formule est dans le voyage, tel qu’il se déploie au xviiie siècle. Les « missions de productivité » aux États-Unis, qui accompagnent le lancement du plan Marshall en sont finalement le dernier avatar. On part apprendre mais aussi surprendre et recruter. On revient plein d’informations, sinon de « secrets », en allant voir ou en faisant venir ceux dont on tirera le meilleur profit. Autant que des hommes, on cherche les machines et les experts qui sauront les faire fonctionner et réparer. Cela s’apparente, peut-être, dans certains cas, à de l’espionnage, tel que les autorités des pays concernés en jugent, selon le moment22. L’enseignement est évidemment la pièce maîtresse de tout dispositif de transmission. Ce thème est bien balisé. De l’étude de l’historien canadien Charles Day23 à celle de l’historienne française Anne-Françoise Garçon24, les travaux ne manquent pas. Il est clair que l’essor en France de l’histoire de l’éducation et particulièrement celle des Grands Établissements a contribué à donner une actualité durable à cette question. La diffusion des techniques relève aussi de l’intervention de l’État et de la sociabilité du monde savant. Le meilleur exemple en serait le lancement par Jean-Antoine Chaptal, ministre de l’Intérieur de Napoléon Bonaparte, de la Société pour l’encouragement de l’industrie nationale (SEIN), en 180225. La SEIN fut, au moins jusqu’à la Première Guerre Mondiale, un des lieux majeurs d’information sur le développement des techniques en France et à l’étranger, en même temps qu’un de leurs soutiens financiers. La diffusion s’entend aussi au bénéfice d’autres destinataires que les professionnels du domaine.

    Nouvelles approches, nouveaux objets

    13Entre la Restauration et le Second Empire, la création de musées techniques, souvent nommés « musées d’art et d’industrie » semble être devenue la règle des villes manufacturières26. La plupart de ces établissements sont consacrés aux industries textiles, qui correspondent aux activités fabricantes de la région, et qui se prêtent à la mise en place de collections. Le souci des industriels, qui sont à l’origine de ce type de musée, est d’en faire une vitrine de l’excellence régionale, une source renouvelée de fierté des acteurs. Il convient en effet, dit-on, dans ces « places industrielles », de nourrir « le goût de l’industrieuse et intelligente population ».

    14L’histoire de ces musées et de leurs collections mérite certainement l’attention des chercheurs. Mais la plupart ont disparu. En revanche, le Musée des arts et métiers, repensé de fond en comble à l’occasion de son bicentenaire (1994) a bénéficié d’une véritable renaissance. Pour beaucoup d’industries, dans le cadre d’un long xixe siècle, il est l’endroit où les objets techniques trouvent une seconde vie, où les savoirs opératoires qui ont configuré ces matériels s’exposent à nos questions27. Le « musée de site » est la formule la plus proche de l’état antérieur, celui où l’activité productive dominait l’espace bâti. Dans le meilleur des cas, une partie au moins des équipements figure encore sur place. Cela autorise la remise en marche de l’installation de façon ponctuelle et un peu biaisée, mais toujours attrayante. La corderie Vallois, établie en 1821 aux environs de Rouen, fut d’abord une filature de coton (1821), avant d’être transformée en fabrique de cordelettes, également de coton, à partir de 1880 et jusqu’en 197828. Des modifications ont certes été apportées, mais discrètement. Voilà une usine-musée exceptionnelle, dont le système technique est facilement compris. Dans la branche sidérurgique, la préservation des sites et de leurs bâtiments n’est pas rare. Les forges de Buffon, près de Montbard, ont gardé l’essentiel des lieux de production et de logement29. Les équipements – roues, marteaux, ont été reconstitués au mieux. Des opérations de fouilles ont dégagé et aidé à comprendre des espaces de travail : halle de coulée, marteaux, aires de préparation du minerai. Parmi les bâtiments industriels de Lorraine protégés au titre des monuments historiques, le haut-fourneau U4 à Uckange, près de Thionville, a été le plus controversé. Fallait-il maintenir – c’est-à-dire entretenir – ce fameux U4, « machine froide », disait-on, ou le livrer aux démolisseurs ? Ce survivant d’une lignée de six hauts-fourneaux avait deux avantages : regrouper autour du haut-fourneau l’ensemble des installations auxiliaires ; montrer, avec une précision inégalable, à hauteur de 1930 (dernier aménagement de U4), les techniques constructives, les modes de production et l’organisation du travail. On voit le profit intellectuel et touristique à venir. Finalement, l’agglomération du Val de Fensch a acheté le site en 2005. Alors a commencé la valorisation patrimoniale. La chocolaterie Menier à Noisiel (Seine-et-Marne) est sans doute l’icône du patrimoine industriel en France30. Le groupe Nestlé, propriétaire de l’usine depuis 1990, cherchait à s’en débarrasser. Une heureuse politique de protection a rendu l’opération moins intéressante que prévu. L’idée a été alors de valoriser ce lieu magnifique et d’y installer le siège social de Nestlé France. Il y a eu des destructions, sans doute inévitables, de nouvelles constructions aussi. Surtout, les bâtiments les plus remarquables, qui faisaient honneur aux architectes, ont bénéficié d’une restauration soigneuse qui leur rend l’éclat. La restauration sélective est peut-être le dernier mot d’un compromis nécessaire lorsqu’un site d’industrie change de destination.

    15À partir des années 1980 s’est constitué en France – avec un net retard sur la Grande-Bretagne – un nouveau champ de recherches, le patrimoine industriel, autrement dit l’ensemble des traces de l’activité fabricante sur un site. Les éléments constitutifs de ce domaine scientifique enrichissent, à l’évidence, l’histoire classique des techniques. La démarche d’archéologie industrielle vise, comme toute archéologie, à progresser du présent des traces au passé du site. Cette notion de site correspond à une unité de production, une entreprise. Ses limites fluctuent selon la dynamique du lieu, c'est-à-dire son histoire. En tout cas, l’industrie vue sous l’angle du patrimoine s’exprime dans une inscription territoriale. La relation qui en découle crée des contraintes sur l’organisation de l’espace usinier et, à l’inverse, produit un nouveau paysage. On le voit, l’histoire des techniques acquiert une autre dimension au contact du patrimoine. Elle cesse d’être « hors-sol ». Dès lors, la nature du terrain, sa pente, l’hydrographie, les vents dominants, etc. sont autant de thèmes qui doivent être abordés par le chercheur. Celui qui travaille sur des aires proprement urbaines doit évidemment se soucier d’autres critères. Dans le cas favorable où plusieurs bâtiments ont survécu, cela vaut la peine de reconstituer la « chaîne patrimoniale » (Claudine Cartier) du site, sans oublier les bâtiments détruits. Ce faisant, on avance dans la compréhension du travail industriel. La dialectique du bâti et du non bâti explique pour partie la circulation des hommes, des matières et des énergies. S’agissant des espaces de production restreints, l’analyse du patrimoine industriel renseigne sur les « postes de travail », même s’ils sont loin d’être ainsi formulés. Les emplacements et les déplacements, l’encombrement, sont autant de marqueurs de l’espace. Sauf pour les usines contemporaines, ou presque, il entre une part de supposition dans ce travail sur une industrie défunte. Il doit pourtant être tenté. Le plus délicat de cette opération est d’envisager la disposition des équipements, machines et outillage à partir des traces faibles qui en sont restées.

    16Bien des pistes de l’histoire des techniques en France sont demeurées inexplorées depuis trop longtemps. Les historiens de l’agriculture, par exemple, n’ont guère profité de la grande vague historiographique, pour s’interroger sur les techniques agricoles. L’essentiel du travail sur ce point a été accompli par un petit groupe d’historiens et d’ethnologues31. La technique de la jachère, le rôle du feu dans la gestion des cultures, les réserves de grains, la lenteur des changements dans l’outillage pour la récolte ont été revisités, ces dernières années, avec succès32. À l’évidence, cela ne suffit pas. Un autre chantier prometteur regrouperait les techniques du corps. La question, dans sa globalité, concerne une grande série de sujets, de l’hygiène au sport. Retenons ici ce qui relève du travail. Il s’agit dans un premier temps d’analyser les postures qui caractérisent tel ou tel métier, puis, à partir de ces mises en mouvement ou en scène, d’en reconstituer l’apprentissage. Deux facteurs de différenciation se dégagent : le genre ; les techniques individuelles ou collectives. Il y a des mots pour nommer ces mouvements, il y a parfois des bruits, des cris, comme autant de signaux à l’usage des partenaires33. Enfin, le geste n’est pas directement opératoire ; il faut que la main soit « outillée »34. En dehors de cette série de techniques productives, des techniques sociales – marquant l’action de l’homme sur d’autres hommes – constituent un front de recherche novateur35. La demande croissante d’assistance sociale, dans tous les sens du terme, conduit en effet à mobiliser des techniques multiples. En outre, il n’est pas nécessaire de réinventer constamment la grammaire des gestes puisqu’ils sont inscrits dans la mémoire corporelle. La difficulté est de se défaire de ce savoir et d’en adopter un autre lorsque changent la façon de produire et les équipements nécessaires. Les techniques sociales, au fond, se construisent à la rencontre d’une cause et d’une carrière. Parmi d’autres cibles, le bureau, comme espace de travail, et son personnel nous introduisent à des formes de plus en plus sophistiquées de techniques du tertiaire36. Des savoir-faire s’élaborent, adaptés au progrès de l’équipement. Ainsi un savoir-écrire, la sténographie, est apparu à la fin du xviiie siècle. Les Conventionnels chargés de mettre en place l’École Normale, à l’automne 1794, ont voulu que les cours et les débats soient saisis par ce moyen et publiés quatre jours, au plus tard, après avoir été prononcés. Certes, l’essai n’a pas été concluant, vu la précipitation imposée. Retenons quand même ce moment où une nouvelle technique a suscité une nouvelle pédagogie. La disposition des lieux, le mobilier fonctionnel incitent à tenter une sorte d’archéologie du bureau. Les révolutions successives du matériel entre 1800 et 1940 – fichiers, machines à écrire, machines à calculer –, scandent le progrès d’une activité qui a pris de plus en plus d’extension. La modernité technologique n’a pas commencé avec les premiers ordinateurs, même si ceux-ci ont bouleversé radicalement la donne.

    Politiques

    17L’histoire des techniques peut-elle faire l’économie de la politique ? Retenons ici le volet patrimonial de cette histoire. En règle générale, la démarche des chercheurs engagés dans le patrimoine industriel n’exprime aucun rapport conflictuel au pouvoir, ni aucune forme d’affiliation. Leurs inventaires et leurs enquêtes prennent bien garde de ne pas politiser le débat. Cependant, par l’exercice même de son activité, cette histoire est nécessairement « impliquée ». Pour sauver des vestiges qui importent, il faut convaincre, entraîner, créer le moyen de gagner les esprits et les cœurs. Cela ne signifie pas qu’il y ait place pour des clivages partisans. La ligne de faille sépare ordinairement deux camps : ceux qui militent pour un projet de sauvegarde valorisée du monument industriel, et ceux qui jugent qu’il vaut mieux en passer par la table rase et construire un nouvel ensemble immobilier. Ainsi en a-t-il été, parmi bien d’autres exemples, en 2004, pour l’usine Pathé Marconi à Chatou37. C’est l’expression d’un véritable déni d’histoire, dont doit se nourrir la réflexion des historiens. L’histoire des techniques, dans sa version patrimoniale, rencontre forcément la politique, mais ne se résume pas à cela. Au fond, plus que de politique, l’histoire des techniques nous parle d’idéologie. Ce terrain n’ayant pas été balisé et encore moins creusé, il est périlleux de s’y aventurer. Disons au moins que des traces d’une « misotechnie » naissante se repèrent dans les années 1820, à Paris. L’occasion en est fournie par le rétablissement des « Expositions des produits de l’industrie nationale » interrompues après celle de 180638. L’exposition organisée en 1819 ne semble pas – sous réserve – avoir suscité la critique de son principe même. Ce fut l’idée de Decazes qui souleva le tollé. Il proposait en effet de joindre à l’exposition nationale un appendice consacré aux meilleurs produits et machines du Royaume-Uni, pour en retenir les exemples à suivre. Critiqué violemment par les journaux légitimistes – qui parlent de « foire anglaise », de projet antinational –, mal soutenu par le mouvement libéral, ce projet prophétique fut abandonné par la France. Cela n’a pas arrêté la querelle, qui a rebondi lors de l’exposition parisienne de 1823. « À Paris [comme] dans les grandes villes manufacturières », écrivait Regnier, « chacun s’indignait de ce parti-pris d’hostilité, de ces manœuvres déloyales qui entretenaient dans les populations ouvrières des sentiments de défiance et de mauvais vouloir contre les améliorations et les perfectionnements proposés par notre outillage ». Il se demande aussi dans quelle mesure ce combat de la presse légitimiste avait vraiment comme finalité de « défendre les capacités de la main-d’œuvre ouvrière contre l’abrutissement machinique ». Si on ajoute la critique récurrente des machines qui tuent l’emploi, voilà un débat qui aura longue carrière, et dont on saisit ici les commencements. À l’opposé, un courant que l’on dira orléano-pompidolien, défend sans relâche l’efficacité et même la bienveillance des techniques. Les arguments en provenance de ce camp font toujours état des progrès économiques et sociaux qu’entraînerait la croissance accélérée de l’industrie. Sur le thème de « chacun est gagnant », cette idéologie assure que les ouvriers et employés, loin d’être les victimes du Nouveau Monde, en seront, à terme, les principaux bénéficiaires. Une fois encore, l’historien peut faire son miel de ces affirmations tranchantes. Pour demeurer dans le champ politique, avec d’autres interlocuteurs, il pourrait être intéressant d’examiner le point de vue syndical. L’aventure patrimoniale du dernier haut-fourneau d’Uckange a longtemps opposé autorités publiques et propriétaires. Mais un second conflit, entre la Confédération générale du travail (CGT) et la Confédération française démocratique du travail (CFDT) locales, sur la façon de mener le combat et de prévoir la suite, a sérieusement compliqué la pratique des acteurs. En somme, une histoire des techniques qui ne laisserait pas une place suffisante aux aléas et à l’imprévisible, qui ne combinerait pas savoirs scientifiques et savoirs pratiques, manquerait son but, et ne pourrait pas se revendiquer comme l’expression d’une « intelligence productive ».

    Notes de bas de page

    1 Labrousse Ernest, Esquisse du mouvement des prix et des revenus en France au xviiie siècle, Paris, Dalloz, 1933 ; Idem, La crise de l’économie à la fin de l’Ancien Régime et au début de la Révolution, Paris, Presses universitaires de France, 1944.

    2 NdE : Albert Soboul a notamment écrit une Histoire de la Révolution française, 2 t., Paris, Éditions sociales, 1962.

    3 NdE : François Furet a notamment écrit, avec Denis Richet (1927-1989), La Révolution, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1965.

    4 Daumas Maurice, Les instruments scientifiques au xviie siècle et aux xviiie siècles Paris, Presses universitaires de France, 1953, 421 p.

    5 Febvre Lucien, « Réflexions sur l’histoire des techniques », Annales d’histoire économique et sociale, vol. 7, 1935.

    6 Le numéro comprenait entre autres un article de Marc Bloch sur le moulin à eau.

    7 Guesnerie Robert, Hartog François (dir.), Des sciences et des techniques : un débat, Paris, Éditions de l’EHESS, « Cahiers des annales », 1998 ; Cohen Yves, Pestre Dominique (dir.), Histoire des techniques, Annales. Histoire. Sciences sociales, 1998. L’article de Philippe Braunstein intitulé « Pour une histoire économique et sociale des techniques » souligne les effets de l’affrontement sciences/techniques : « C’est par la confrontation avec l’histoire des sciences que l’immense domaine de la connaissance technique a souffert d’une désaffection totale ».

    8 Voir Bourdieu Pierre, « L’illusion biographique », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 62-63, juin 1986, p. 69-72.

    9 Gille Bertrand, R.H.M.M., t. IV, nos 1/2, 1972, p. 3-65.

    10 Hughes Thomas, Networks of Power. Electrification in Western Society, 1880-1930, Baltimore, John Hopkins University Press, 1983, 474 p. Il a donné dans le numéro des Annales de juillet-octobre 1998 un article intitulé « L’histoire comme systèmes en évolution », p. 839-857.

    11 Caron François, « La naissance d’un système technique à grande échelle. Le chemin de fer en France (1832-1870) », Histoire des techniques, Annales, op. cit., p. 859-885.

    12 Woronoff Denis, « Le quotidien des techniques, de la répétition au changement », Merger Michel, Barjot Dominique (dir.), Les entreprises et leurs réseaux : hommes, capitaux, techniques et pouvoirs xixe-xxe siècles, Mélanges en l’honneur de François Caron, Paris, Presses de l’université de Paris-Sorbonne, 1998, 838 p., p. 785-791. Voir aussi Edgerton David, « De l’innovation aux usages, dix thèses éclectiques sur l’histoire des techniques », dans Guesnerie Robert, Hartog François (dir.), Des sciences et des techniques : un débat, op. cit.

    13 Le Play Frédéric, Description des procédés métallurgiques employés dans le Pays de Galles pour la fabrication du cuivre, Paris, Carilian-Goeury et Dalmont, 1848.

    14 Woronoff Denis, « Pour un centre d’histoire des sciences et des techniques à La Villette », Rapport du groupe de travail « Histoire des sciences et des techniques », janvier 1983.

    15 Emptoz Gérard, Woronoff Denis, « L’histoire des techniques en France, bilan et perspectives », Rapport présenté à la Direction des bibliothèques, des musées et de l’information scientifique et technique, et à la Direction générale des enseignements supérieurs, ministère de l’Éducation nationale, avril 1986. Autre exemple : en 1990, l’INRA a organisé un séminaire sur « Histoire des techniques et compréhension de l’innovation », Économie et sociologie rurales. Actes et communications, vol. 6, 1991.

    16 Caron François (dir.), Les brevets. Leur utilisation en histoire des techniques et de l’économie, table-ronde, Paris, CNRS Éditions (IHMC), 1984.

    17 Veyrassat Béatrice, « Aux sources de l’invention dans l’Arc jurassien ; une approche par les brevets », dans Belot Robert, Cotte Michel, Lamard Pierre (dir.), La technologie au risque de l’histoire, université de technologie de Belfort-Montbéliard, Berg international éditeurs, 2000, 454 p., p. 69-76.

    18 Mille Martine, « L’apport des périodiques techniques à l’histoire des inventions aux xviiie-xixe siècles », dans Bret Patrice, Chatais Konstantinos, Perez Liliane (dir.), La presse et les périodiques techniques en Europe, 1750-1950, Paris, L’Harmattan, 2008.

    19 Olivier Jean-Marc, « Trois cycles technologiques à Morez, Haut Jura », dans Belot Roger, Cotte Michel, Lamard Pierre (dir.), La technologie au risque de l’histoire, op. cit., p. 25-42.

    20 Montel Nathalie, Le chantier du canal de Suez, 1859-1869, une histoire des pratiques techniques, Paris, Presses de l’École nationale des Ponts et Chaussées, 1999, 379 p.

    21 Desabres Pascal, Le creusement du métro parisien, mémoire de DEA « Histoire des techniques », Paris, EHESS, 2000.

    22 Harris Robert, Industrial Espionage, and Technical Transfer: Britain and France in the Eighteenth century, Aldershot, Ashgate, 1998, 655 p.

    23 Day Charles R., Les écoles d’Arts et métiers, l’enseignement technique en France, xixe-xxe siècle, Paris, Belin, 1991, 429 p.

    24 Garçon Anne-Françoise, Entre l’État et l’usine, L’École des Mines de Saint-Etienne au xixe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004, 370 p.

    25 Benoit Serge, Emptoz Gérard, Woronoff Denis (dir.), Encourager l’innovation en France et en Europe. Autour du bicentenaire de la Société d’encouragement pour l’industrie nationale, Paris, CTHS, 2006, 382 p.

    26 Cartier Claudine, « Du musée d’art et d’industrie aux musées de site industriel », dans Belhoste Jean-François, Benoit Serge, Chassagne Serge, Mioche Philippe (dir.), Autour de l’industrie. Histoire et Patrimoine. Mélanges offerts à Denis Woronoff, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2004, p. 247-264.

    27 Mercier Alain, Un conservatoire pour les arts et métiers, Paris, Gallimard, 1994. De 1792 à 2010, le Musée des arts et métiers a publié La Revue, qui faisait une large place aux collections et aux expositions du musée.

    28 Réal Emmanuelle, Perrin-Lalouette Xavière, La Corderie Vallois, Rouen, Connaissance du patrimoine de Haute-Normandie, 1996.

    29 La Grande Forge de Buffon, monument historique, Buffon, Association pour la sauvegarde et l’animation des Forges de Buffon, 1990, 111 p. L’ensemble de la Grande Forge a été achevé en 1772.

    30 Valentin Marc, Cartier Claudine, Jantzen Hélène, Noisiel : la chocolaterie Menier. Seine-et-Marne, Paris, Images du patrimoine, 1994, 74 p.

    31 Jean-Marc Moriceau, fondateur de la revue Histoire et société rurale, François Sigaut, Gilles Postel-Vinay, entre autres.

    32 Sigaut François, L’agriculture et le feu. Rôle et place du feu dans les techniques de préparation des champs dans l’ancienne agriculture européenne, Paris, Éditions de l’EHESS, 1975, 320 p. ; Les réserves de grains à long terme, techniques de conservation et fonction sociale dans l’histoire, Paris, Éditions de la MSH, 1978, 202 p.

    33 Bouillon Didier, Guillerme André, Mille Martine, Piernas Gersende (dir.), Gestes techniques, techniques du geste, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2017, 576 p.

    34 Sigaut François, Comment Homo devint Faber, comment l’outil fit l’homme, Paris, CNRS Éditions, 2013, 236 p.

    35 Cohen Yves, Le siècle des chefs. Une histoire du commandement et de l’autorité (1890-1940), Paris, Éditions Amsterdam, 2013, 872 p.

    36 Gardey Delphine, Écrire, calculer, classer. Comment une révolution de papier a transformé les sociétés contemporaines, 1800-1940, Paris, La Découverte, 2008, 319 p.

    37 Rigaud Jean-Luc, Pathé Marconi à Chatou. De la musique à l’effacement des traces, Paris, Classiques Garnier, 2011, 342 p.

    38 Regnier Noël, L’industrie en France au xixe siècle, Paris, L. Sault, 1878, 483 p.

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    Table des matières

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    1 Labrousse Ernest, Esquisse du mouvement des prix et des revenus en France au xviiie siècle, Paris, Dalloz, 1933 ; Idem, La crise de l’économie à la fin de l’Ancien Régime et au début de la Révolution, Paris, Presses universitaires de France, 1944.

    2 NdE : Albert Soboul a notamment écrit une Histoire de la Révolution française, 2 t., Paris, Éditions sociales, 1962.

    3 NdE : François Furet a notamment écrit, avec Denis Richet (1927-1989), La Révolution, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1965.

    4 Daumas Maurice, Les instruments scientifiques au xviie siècle et aux xviiie siècles Paris, Presses universitaires de France, 1953, 421 p.

    5 Febvre Lucien, « Réflexions sur l’histoire des techniques », Annales d’histoire économique et sociale, vol. 7, 1935.

    6 Le numéro comprenait entre autres un article de Marc Bloch sur le moulin à eau.

    7 Guesnerie Robert, Hartog François (dir.), Des sciences et des techniques : un débat, Paris, Éditions de l’EHESS, « Cahiers des annales », 1998 ; Cohen Yves, Pestre Dominique (dir.), Histoire des techniques, Annales. Histoire. Sciences sociales, 1998. L’article de Philippe Braunstein intitulé « Pour une histoire économique et sociale des techniques » souligne les effets de l’affrontement sciences/techniques : « C’est par la confrontation avec l’histoire des sciences que l’immense domaine de la connaissance technique a souffert d’une désaffection totale ».

    8 Voir Bourdieu Pierre, « L’illusion biographique », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 62-63, juin 1986, p. 69-72.

    9 Gille Bertrand, R.H.M.M., t. IV, nos 1/2, 1972, p. 3-65.

    10 Hughes Thomas, Networks of Power. Electrification in Western Society, 1880-1930, Baltimore, John Hopkins University Press, 1983, 474 p. Il a donné dans le numéro des Annales de juillet-octobre 1998 un article intitulé « L’histoire comme systèmes en évolution », p. 839-857.

    11 Caron François, « La naissance d’un système technique à grande échelle. Le chemin de fer en France (1832-1870) », Histoire des techniques, Annales, op. cit., p. 859-885.

    12 Woronoff Denis, « Le quotidien des techniques, de la répétition au changement », Merger Michel, Barjot Dominique (dir.), Les entreprises et leurs réseaux : hommes, capitaux, techniques et pouvoirs xixe-xxe siècles, Mélanges en l’honneur de François Caron, Paris, Presses de l’université de Paris-Sorbonne, 1998, 838 p., p. 785-791. Voir aussi Edgerton David, « De l’innovation aux usages, dix thèses éclectiques sur l’histoire des techniques », dans Guesnerie Robert, Hartog François (dir.), Des sciences et des techniques : un débat, op. cit.

    13 Le Play Frédéric, Description des procédés métallurgiques employés dans le Pays de Galles pour la fabrication du cuivre, Paris, Carilian-Goeury et Dalmont, 1848.

    14 Woronoff Denis, « Pour un centre d’histoire des sciences et des techniques à La Villette », Rapport du groupe de travail « Histoire des sciences et des techniques », janvier 1983.

    15 Emptoz Gérard, Woronoff Denis, « L’histoire des techniques en France, bilan et perspectives », Rapport présenté à la Direction des bibliothèques, des musées et de l’information scientifique et technique, et à la Direction générale des enseignements supérieurs, ministère de l’Éducation nationale, avril 1986. Autre exemple : en 1990, l’INRA a organisé un séminaire sur « Histoire des techniques et compréhension de l’innovation », Économie et sociologie rurales. Actes et communications, vol. 6, 1991.

    16 Caron François (dir.), Les brevets. Leur utilisation en histoire des techniques et de l’économie, table-ronde, Paris, CNRS Éditions (IHMC), 1984.

    17 Veyrassat Béatrice, « Aux sources de l’invention dans l’Arc jurassien ; une approche par les brevets », dans Belot Robert, Cotte Michel, Lamard Pierre (dir.), La technologie au risque de l’histoire, université de technologie de Belfort-Montbéliard, Berg international éditeurs, 2000, 454 p., p. 69-76.

    18 Mille Martine, « L’apport des périodiques techniques à l’histoire des inventions aux xviiie-xixe siècles », dans Bret Patrice, Chatais Konstantinos, Perez Liliane (dir.), La presse et les périodiques techniques en Europe, 1750-1950, Paris, L’Harmattan, 2008.

    19 Olivier Jean-Marc, « Trois cycles technologiques à Morez, Haut Jura », dans Belot Roger, Cotte Michel, Lamard Pierre (dir.), La technologie au risque de l’histoire, op. cit., p. 25-42.

    20 Montel Nathalie, Le chantier du canal de Suez, 1859-1869, une histoire des pratiques techniques, Paris, Presses de l’École nationale des Ponts et Chaussées, 1999, 379 p.

    21 Desabres Pascal, Le creusement du métro parisien, mémoire de DEA « Histoire des techniques », Paris, EHESS, 2000.

    22 Harris Robert, Industrial Espionage, and Technical Transfer: Britain and France in the Eighteenth century, Aldershot, Ashgate, 1998, 655 p.

    23 Day Charles R., Les écoles d’Arts et métiers, l’enseignement technique en France, xixe-xxe siècle, Paris, Belin, 1991, 429 p.

    24 Garçon Anne-Françoise, Entre l’État et l’usine, L’École des Mines de Saint-Etienne au xixe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004, 370 p.

    25 Benoit Serge, Emptoz Gérard, Woronoff Denis (dir.), Encourager l’innovation en France et en Europe. Autour du bicentenaire de la Société d’encouragement pour l’industrie nationale, Paris, CTHS, 2006, 382 p.

    26 Cartier Claudine, « Du musée d’art et d’industrie aux musées de site industriel », dans Belhoste Jean-François, Benoit Serge, Chassagne Serge, Mioche Philippe (dir.), Autour de l’industrie. Histoire et Patrimoine. Mélanges offerts à Denis Woronoff, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2004, p. 247-264.

    27 Mercier Alain, Un conservatoire pour les arts et métiers, Paris, Gallimard, 1994. De 1792 à 2010, le Musée des arts et métiers a publié La Revue, qui faisait une large place aux collections et aux expositions du musée.

    28 Réal Emmanuelle, Perrin-Lalouette Xavière, La Corderie Vallois, Rouen, Connaissance du patrimoine de Haute-Normandie, 1996.

    29 La Grande Forge de Buffon, monument historique, Buffon, Association pour la sauvegarde et l’animation des Forges de Buffon, 1990, 111 p. L’ensemble de la Grande Forge a été achevé en 1772.

    30 Valentin Marc, Cartier Claudine, Jantzen Hélène, Noisiel : la chocolaterie Menier. Seine-et-Marne, Paris, Images du patrimoine, 1994, 74 p.

    31 Jean-Marc Moriceau, fondateur de la revue Histoire et société rurale, François Sigaut, Gilles Postel-Vinay, entre autres.

    32 Sigaut François, L’agriculture et le feu. Rôle et place du feu dans les techniques de préparation des champs dans l’ancienne agriculture européenne, Paris, Éditions de l’EHESS, 1975, 320 p. ; Les réserves de grains à long terme, techniques de conservation et fonction sociale dans l’histoire, Paris, Éditions de la MSH, 1978, 202 p.

    33 Bouillon Didier, Guillerme André, Mille Martine, Piernas Gersende (dir.), Gestes techniques, techniques du geste, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2017, 576 p.

    34 Sigaut François, Comment Homo devint Faber, comment l’outil fit l’homme, Paris, CNRS Éditions, 2013, 236 p.

    35 Cohen Yves, Le siècle des chefs. Une histoire du commandement et de l’autorité (1890-1940), Paris, Éditions Amsterdam, 2013, 872 p.

    36 Gardey Delphine, Écrire, calculer, classer. Comment une révolution de papier a transformé les sociétés contemporaines, 1800-1940, Paris, La Découverte, 2008, 319 p.

    37 Rigaud Jean-Luc, Pathé Marconi à Chatou. De la musique à l’effacement des traces, Paris, Classiques Garnier, 2011, 342 p.

    38 Regnier Noël, L’industrie en France au xixe siècle, Paris, L. Sault, 1878, 483 p.

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    Bertrand, E., & Feuerhahn, W. (éds.). (2023). Chapitre 6. Denis Woronoff. In Arpenter l’histoire des sciences (1‑). Presses universitaires de Strasbourg. https://doi.org/10.4000/books.pus.37556
    Bertrand, Emanuel, et Wolf Feuerhahn, éd. « Chapitre 6. Denis Woronoff ». In Arpenter l’histoire des sciences. Strasbourg: Presses universitaires de Strasbourg, 2023. https://doi.org/10.4000/books.pus.37556.
    Bertrand, Emanuel, et Wolf Feuerhahn, éditeurs. « Chapitre 6. Denis Woronoff ». Arpenter l’histoire des sciences, Presses universitaires de Strasbourg, 2023, https://doi.org/10.4000/books.pus.37556.

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