Introduction générale
p. 9-18
Texte intégral
1Longtemps, l’historiographie a été considérée en France comme un objet en marge de la recherche en histoire de l’art. Elle avait – paraît-il – mauvaise presse et était absente des programmes officiels d’enseignement. On la voyait comme l’apanage de traditions intellectuelles plus en phase avec l’érudition, la philologie et l’histoire des concepts, allemandes et italiennes notamment. On en faisait pourtant, sans se l’avouer, sous couvert de méthodologie, souvent dans un but polémique et avec une approche normative.
2Dans le courant des années 2000, l’histoire de l’histoire de l’art s’est affirmée comme un domaine à part entière. De nombreux travaux – souvent collectifs – ont reconstitué le parcours et l’œuvre de quelques « grands hommes » de la discipline : Louis Courajod, Henri Focillon, Émile Mâle ou André Chastel ont ainsi fait l’objet d’études approfondies, qui ont replacé la trajectoire de ces savants à la fois dans le contexte d’une histoire de l’art en train de se faire et dans le cadre bien plus large de l’histoire intellectuelle, sociale et politique de la France et de l’Europe (Waschek 1998 ; Briend, Thomine 2004 ; Ducci 2005 ; Wat 2007 ; Recht et al. 2008 ; Passini 2017). En même temps, d’autres entreprises collectives ont questionné la constitution de la discipline en privilégiant une approche sérielle et prosopographique : la publication, sur le site de l’Institut national d’histoire de l’art1, du Dictionnaire critique des historiens de l’art actifs en France de la Révolution à la Première Guerre mondiale témoigne d’une volonté de porter un regard global et idéalement exhaustif sur un champ disciplinaire en cours de structuration au xixe siècle ; dans une perspective quelque peu différente, qui s’inscrit dans les études sur les circulations intellectuelles franco-allemandes, Michel Espagne et Bénédicte Savoy ont édité un Dictionnaire des historiens d’art allemands (Espagne, Savoy 2010). Plusieurs autres ouvrages interrogent enfin des courants historiographiques et méthodologiques, voire des genres et des objets éditoriaux : c’est par exemple le cas de l’histoire de l’histoire sociale de l’art éditée par Neil McWilliam, Johanne Lamoureux et Constance Moréteau ou des actes du colloque consacré au catalogue par l’École du Louvre, pour ne citer que deux exemples récents (McWilliam, Lamoureux, Moréteau 2016 ; Hurley-Griener, Barbillon 2015). Pareille évolution de nos études et de nos sensibilités d’historiennes et historiens n’est pas sans trouver de parallèle en dehors de la France ou dans d’autres disciplines qui ont également traversé, ces dernières années, une phase de regain d’intérêt pour les démarches autoréflexives (Delacroix, Dosse, Garcia 2007 ; Delacroix, Dosse et al. 2010).
3La présence à l’Institut national d’histoire de l’art d’un axe consacré à l’histoire de l’histoire de l’art, créé dès sa fondation, en 2001, a été à la fois le symptôme et l’un des moteurs de ce renouveau de la recherche historiographique. C’est en son sein que le projet de cet ouvrage a pris forme. Dès 2008, Anne Lafont, alors responsable de cet axe de recherche, engageait par la mise en place d’une série de rencontres scientifiques une réflexion collective sur les enjeux idéologiques de l’écriture de l’histoire de l’art pendant la première moitié du xxe siècle. Le rapport que notre discipline entretient alors avec différentes formes de nationalisme politique mais aussi la diversité des méthodes étaient au cœur des travaux de cet axe, qui se prévalut de la collaboration d’Éric Michaud, de Neil McWilliam et de Michela Passini, en plus de celle de nombreux autres chercheurs français et étrangers qui ont participé aux colloques et journées d’études organisées par l’équipe alors en place.
4Si la nation est apparue comme l’un des prismes – et l’un des plus importants – au travers desquels l’histoire de l’art a pu être écrite au début du xxe siècle, les soubassements idéologiques de la discipline sont toutefois bien plus larges et diversifiés. Comme toute discipline universitaire, l’histoire de l’art est fondamentalement et nécessairement politique. Lors de son institutionnalisation, ses praticiens – universitaires ou conservateurs de musée – ont été parmi les principaux producteurs d’un discours sur l’identité nationale déterminé par les valeurs républicaines. Mais chez les autres savants aussi, en marge des institutions officielles, l’écriture de l’histoire de l’art est restée imprégnée d’une dimension politique certaine. Dès lors, il a fallu reconstituer l’élaboration d’histoires de l’art socialistes, anarchistes, conservatrices, vichystes et autres. Il a également semblé essentiel de questionner les débats historiographiques qui ont fait appel aux notions de « frontière », d’« expansion » ou de « diffusion » de l’art français, ainsi que la spécificité d’une histoire de l’art en langue française produite dans et pour les colonies.
5Au-delà de l’analyse de la dimension intrinsèquement politique de cette discipline qui classe, étudie, « raconte » et donc construit le patrimoine national, de nombreuses autres pistes de recherche ont émergé des communications présentées lors des rencontres organisées à l’Institut national d’histoire de l’art. Des interventions complémentaires, sur des sujets qui n’avaient pas été traités à ces occasions, mais qui s’imposaient comme essentiels en vue d’une histoire critique de la pratique de l’histoire de l’art au début du xxe siècle en France, ont été sollicitées auprès de spécialistes français et étrangers. Toutes incitaient à ne pas se limiter à une histoire exclusivement intellectuelle et pour ainsi dire idéelle de la discipline, mais à investir les lieux au sein desquels elle s’est développée, tout comme les procédures, les façons de faire et les outils qui ont été les siens. Le titre Faire l’histoire de l’art, au-delà du renvoi à cette référence classique de la démarche autoréflexive qu’est Faire de l’histoire de Jacques Le Goff et Pierre Nora (Le Goff, Nora 1974), met l’accent sur la composante matérielle de notre approche.
6C’est idéalement le champ disciplinaire dans son étendue que le présent volume vise à restituer. Dans cette perspective, nous avons préféré éviter les études monographiques sur les « grands » représentants de l’histoire de l’art, pour privilégier les analyses portant sur des courants historiographiques, des débats, des institutions ou des espaces de parole, des terrains et des objets de l’histoire de l’art en cours de professionnalisation. Sans bien sûr prétendre à l’exhaustivité, nous voulions travailler sur celles et ceux qui faisaient de l’histoire de l’art pendant la première moitié du xxe siècle, sans préjuger de leur position académique, de leur degré de notoriété ou de leur reconnaissance posthume. En voulant écarter toute perspective téléologique – l’écueil sans doute le plus dangereux auquel se confronte l’histoire des sciences humaines –, nous avons construit ce recueil de textes de manière à faire apparaître non seulement les solutions intellectuelles a posteriori gagnantes, mais un certain nombre de problèmes auxquels les historiens de l’art du début du xxe siècle se sont mesurés.
7L’histoire de l’art produite en France pendant la première partie du xxe siècle est rarement abordée dans les ouvrages classiques sur l’évolution de la discipline, écrits, eux, en Allemagne, en Angleterre ou aux États-Unis (Podro 1982 ; Kultermann 1990 ; Dilly 1999 ; Wood 2019). Au-delà de quelques noms de « pionniers », comme Mâle ou Focillon, qui ont ouvert des champs nouveaux à nos études, on prend rarement en considération une production historiographique censée avoir peu contribué aux grandes révolutions méthodologiques qui ont transformé la discipline. N’est-ce pas là précisément une forme de téléologie, qui consisterait à ne prendre en compte que les hommes et les mouvements qui nous ont faits tels que nous sommes, autrement dit, qui ont gagné le pari de la postérité scientifique ? Qu’en est-il dès lors des erreurs, des batailles perdues, des approches surannées, mais aussi, plus simplement, de pratiques et de méthodes qui, si elles n’ont plus cours aujourd’hui, ont néanmoins façonné l’écriture de l’histoire de l’art, donc la vision et l’interprétation des œuvres ?
8L’histoire de l’art écrite en France présente une série de spécificités qui la distinguent d’autres traditions historiographiques nationales. Sa réputation de pragmatisme et de frilosité théorique a elle-même une histoire. En France, la discipline entre tard à l’Université. Écrivant en 1901 dans la Revue internationale de l’enseignement, François Benoit, qui venait d’être nommé chargé de cours d’histoire de l’art ancien et moderne à l’université de Lille2, constate alors : « L’histoire et la critique d’art sont loin de tenir dans l’enseignement supérieur une place en rapport avec leur importance et leur utilité. En France, ce n’est guère que des universités de Paris et de Lille qu’elles obtiennent les moyens d’embrasser l’ensemble de leur matière et de donner la mesure de leurs services. » (Benoit 1901, p. 526) Presque cinquante ans plus tard, dans un bilan confié aux pages des Annales, Pierre Francastel dénonce la pénurie des ressources iconographiques disponibles pour les étudiants français. « Tout projet de recherche sur une question quelconque d’histoire de l’art est, à l’heure actuelle, arrêté par des difficultés quasi insurmontables de documentation », déclare-t-il. « C’est pourtant dans la mesure seulement où il sera possible de constituer des séries de références positives qu’il peut être question de préciser ou de renouveler les problèmes. » (Francastel 1950, p. 356)
9Le demi-siècle qui sépare ces deux constats critiques a pourtant vu une évolution importante de l’histoire de l’art en France, marquée par un foisonnement intellectuel qui a inspiré une large gamme de publications savantes, d’ouvrages de vulgarisation et d’expositions. Si la période n’a pas connu de transformations institutionnelles comparables à celles qui ont accompagné les premières décennies de la IIIe, puis de la Ve République3, elle ne représente pas moins une étape importante pour l’intégration de l’histoire de l’art dans la vie intellectuelle du pays et dans ses pratiques culturelles de masse. Des universités populaires autour de 1900, où Élie Faure a esquissé sa célèbre Histoire de l’art4, jusqu’à l’avènement du Front populaire, quand Georges Huisman, directeur général des Beaux-Arts, souligne la nécessité de « faire pénétrer la culture artistique et technique dans les foules populaires qui en furent trop longtemps privées » (Huisman 1937, p. 165), la discipline engage un public toujours plus large, précurseur des multitudes attirées par les musées-spectacles et les expositions blockbuster de nos jours5. Mais, si la France s’est dotée dès le début du xixe siècle d’un réseau national de musées, la promotion universitaire de l’histoire de l’art reste assez faible en comparaison d’autres pays, et notamment du monde germanique, à la fois modèle et repoussoir pour les historiens de l’art français du premier xxe siècle.
10Sous l’impact des saisies révolutionnaires et des confiscations artistiques qui accompagnaient les campagnes napoléoniennes, les grandes villes de province établissent des institutions pour mettre en valeur le patrimoine national et les œuvres étrangères envoyées par l’État. L’impulsion donnée à la création des musées sous le Premier Empire ne ralentit pas au cours du siècle qui suit et atteint son apogée sous la IIIe République6. Cependant, la décentralisation culturelle qu’occasionne cette politique muséale ne trouve qu’un faible écho dans le domaine universitaire, qui reste dominé par la capitale jusqu’à la réforme introduite par Raymond Poincaré en 1896. Avant cette date, l’enseignement de l’histoire de l’art est confiné à des institutions spécialisées : l’École des chartes établit une chaire d’archéologie médiévale lors de sa réorganisation instituée par Narcisse de Salvandy en 1846 ; la réforme de l’École des beaux-arts en 1863 entraîne la création d’une chaire d’esthétique et d’histoire de l’art à l’intention des jeunes artistes ; et la création de l’École du Louvre en 1882 (Durey 2021) introduit l’histoire de l’art dans une institution principalement consacrée à la formation du corps des conservateurs de musée7. En revanche, l’implantation de la discipline au sein de l’Université est à la fois modeste et tardive. Tandis que la première chaire d’histoire de l’art en Allemagne remonte aux années 1860, que des cours y sont donnés dès le xviiie siècle (Décultot 2000, p. 6-8), et qu’aux États-Unis, l’université de Princeton établit un département d’histoire de l’art en 1882 (DaCosta Kaufmann 2009), en France, la création d’une chaire à la Sorbonne doit attendre la nomination d’Henry Lemonnier en 1899. En province, le bilan est modeste : si des cours sur l’archéologie et les antiquités grecques et latines sont donnés dans plusieurs universités, avant 1914, l’histoire de l’art moderne n’est enseignée de façon régulière qu’à Lille, Lyon, Montpellier, Grenoble et Caen8.
11L’équilibre institutionnel de l’histoire de l’art en France au cours de la première moitié du xxe siècle détermine ses spécificités à la fois politiques, sociales et intellectuelles. C’est un conservateur de musée, André Michel, qui organise et dirige la monumentale Histoire de l’art depuis les temps chrétiens jusqu’à nos jours, publiée en dix-huit tomes par Armand Colin entre 1905 et 1929. Pour cette entreprise, Michel recrute largement parmi ses collègues du Louvre et dans les musées de province, et le nombre de conservateurs appelés à contribuer au projet est supérieur à celui des universitaires9. Avec l’École du Louvre, qui introduit en 1920 un cours consacré à l’« histoire générale de l’art », le monde des musées joue un rôle majeur dans la recherche, l’édition et la présentation des œuvres d’art (collections permanentes et expositions temporaires). Hors des musées, des archivistes, bibliothécaires et amateurs contribuent aussi à l’évolution de la discipline, et les critiques d’art – tout comme les artistes – brouillent les frontières entre l’histoire, les belles-lettres et la création. Les pages d’une revue comme la Gazette des beaux-arts témoignent de ce brassage, également évident dans des publications comme La Renaissance de l’art français, fondée en 1918 par le directeur du Petit Palais, Henry Lapauze, ou L’Amour de l’art, dirigé après 1930 par deux conservateurs du Louvre, René Huyghe et Germain Bazin.
12Cette hybridité est également déterminée par les innovations dans le monde de l’édition qui favorisent la publication de livres illustrés à bas prix. Des séries comme « Les grands artistes, leur vie, leur œuvre », une collection d’enseignement et de vulgarisation qui publie presque quatre-vingt-dix titres entre 1901 et 1932, ou « Les trésors de la peinture française » de la maison Skira, édités entre 1935 et 1951, engagent des conservateurs de musée, des critiques d’art, des auteurs littéraires et des historiens de l’art : Gustave Kahn (Boucher), Émile Verhaeren (Rembrandt), Georges Perrot (Praxitèle) et Paul Vitry (Jean Goujon), par exemple, contribuent aux « Grands artistes », tandis que Paul Jamot (Degas), Pierre du Colombier (Corot) et Paul Valéry (Daumier) signent des textes pour Skira. À certains égards, cette souplesse des frontières est un phénomène bien établi de la pratique de l’histoire de l’art en France – on n’a qu’à rappeler le grand nombre des fondateurs de la discipline au xixe siècle connus comme critiques d’art dans les journaux de l’époque – et est en elle-même l’indice d’une activité protéiforme en voie de professionnalisation. Si cet aspect de l’évolution de l’histoire de l’art n’est pas propre à la seule France – les exemples de Julius Meier-Graefe, de Harry Graf Kessler ou de Wilhelm Uhde en Allemagne, ou de Roger Fry et Clive Bell en Angleterre sont éloquents –, force est de constater que la diversité d’activités qui y sont poursuivies sous la bannière de l’histoire de l’art contribue à lui conférer une véritable spécificité intellectuelle.
13Une certaine méfiance à l’égard des « raisonnements, théories, théorèmes et ratiocinations éperdues », selon les termes de Michel (Michel 1919), semble singulariser l’histoire de l’art de la première moitié du xxe siècle en France. Un tel empirisme favorise une approche qui privilégie la collecte documentaire et l’analyse formelle, et reste plus circonspecte face aux questions plus abstraites d’esthétique ou aux systèmes de pensée enracinés dans des a priori méthodologiques. Par comparaison avec la tradition germanique, la discipline en France peut sembler réticente à envisager des perspectives qui ouvrent l’étude de la culture matérielle à ces questions plus larges. La réception française des historiens et théoriciens allemands, tels Alois Riegl, Heinrich Wölfflin ou Aby Warburg, témoigne de cette prise de distance envers des chercheurs qui proposent une grille théorique pour rapprocher l’histoire de l’art des autres courants des sciences humaines : à l’exception de quelques étudiants de Focillon, tels Jean Adhémar et André Chastel, l’apport des disciples de Warburg, regroupés autour de l’Institut qui porte son nom, reste marginal en France jusqu’aux années 2000 (Martin 2000).
14Par rapport aux « humanistes » allemands dans la lignée de Warburg ou d’Erwin Panofsky entre autres, qui ont pensé l’histoire de l’art comme la discipline clef des sciences humaines, leurs collègues français ont eu tendance à adopter une approche matérielle, qui érige l’objet en tant que tel comme point de mire d’une étude essentiellement autonome. Les deux exceptions les plus frappantes – Focillon et Francastel – sont remarquables par l’inspiration que ces auteurs tirent de disciplines voisines : l’histoire, la philosophie et la psychologie dans le cas du théoricien de Vie des formes (1934), la sociologie et l’histoire pour l’auteur de Peinture et société (1951). Les courants représentés par ces figures phares ressortent de deux champs qui ont largement contribué à définir la vie intellectuelle et universitaire en France après 1900 : le vitalisme d’Henri Bergson, caractérisé par une opposition antirationaliste aux systèmes de pensée déterministes, et la sociologie d’Émile Durkheim, avec ses recherches sur le rôle de la représentation symbolique au sein de la collectivité. Dans le cas de Focillon, ses aperçus méthodologiques ont eu un impact hors de France, surtout grâce à l’influence qu’il a exercée sur son élève à l’université Yale, George Kubler, traducteur de Vie des formes (version anglaise, 1942) et auteur de The Shape of Time. Remarks on the History of Things (1962 ; traduction française, 1973). L’approche esquissée dans Vie des formes, qui a longtemps eu une réception mitigée chez les historiens de l’art non francophones, retrouve de nos jours un nouveau public grâce à l’intérêt porté aux méthodes inspirées par la phénoménologie, dont les travaux de Focillon et de Kubler marquent des étapes importantes (Ducci 2012). Francastel, en revanche, reste plus marginal : malgré l’importance de ses rapports avec les historiens du groupe des Annales (et notamment avec Lucien Febvre, qui l’a invité en 1948 à devenir directeur d’études en sociologie des arts plastiques à la VIe section de l’École pratique des hautes études), son héritage en tant que sociologue de l’art a été éclipsé par des courants marxistes et bourdieusiens, dominants depuis les années 1970.
15C’est une gamme très large de sujets, de concepts et d’historiens qui est analysée dans ce recueil. L’histoire de l’art en France entre 1890 et 1950 en ressort comme une discipline en pleine mutation, pratiquée dans des lieux très divers (facultés, musées, archives ; monographies, revues, ouvrages de vulgarisation), visant des publics différents, explorant des approches nouvelles ou adaptant des méthodes éprouvées. La redécouverte de ces pratiques et des débats qu’elles ont parfois suscités ne relève pas du seul intérêt historique. L’interrogation méthodologique, essentielle à la vigueur intellectuelle de la discipline, demande une connaissance des voies prises par nos devanciers, les marches en avant autant que les impasses. Produit de son temps, l’histoire de l’art de la première moitié du xxe siècle surprend parfois par la virulence de ses préjugés (nationaux surtout), mais elle peut également nous instruire par la pertinence de ses recherches.
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10.1515/9780691194318 :Notes de bas de page
1 Sénéchal Philippe, Barbillon Claire (dir.), Dictionnaire critique des historiens de l’art actifs en France de la Révolution à la Première Guerre mondiale, Paris, INHA, 2008-, https://www.inha.fr/fr/ressources/publications/publications-numeriques/dictionnaire-critique-des-historiens-de-l-art.html.La publication numérique de ce dictionnaire, actuellement hébergée par le site web de l’INHA, migrera vers la plateforme OpenEdition Books en 2024.
2 Sur l’institut à Lille, voir Condette 1999, p. 147-148. Sur François Benoit, voir Mayer-Michallon 2015.
3 Pour un survol utile des initiatives prises sous la Ve République, voir Waresquiel 2001.
4 Sur le rôle de l’enseignement des arts dans les universités populaires, voir Mercier 1986, p. 167. Sur L’Art pour tous, voir Méneux 2014. Les rapports d’Élie Faure avec l’université populaire La Fraternelle à Paris sont évoqués par Dominique Dupuis-Labbé dans son introduction à Faure [1927] 2010, p. 4-6.
5 Avec des taux de fréquentation gigantesques (plus de 930 000 visiteurs à l’exposition « Claude Monet » au Grand Palais en 2010, plus de 790 000 visiteurs à l’exposition « Dalí » au Centre Pompidou en 2012), « l’histoire de l’art et l’univers du musée sont entrés de plain-pied dans le champ des industries culturelles et du tourisme de masse » (Colard, Moulène 2009). Les chiffres de fréquentation des musées et des expositions parisiens sont publiés chaque année par l’Office du tourisme et des congrès de Paris.
6 Voir l’inventaire des musées construits au xixe siècle établi par Catherine Chevillot dans Georgel 1994, p. 136-137. Pour une étude synthétique, voir aussi Sherman 1989 et, pour le Second Empire, Bertinet 2015.
7 Ces développements sont discutés en détail dans Therrien 1998, surtout p. 67-79 (École des chartes), p. 100-112 (École nationale supérieure des beaux-arts) et p. 171-216 (École du Louvre).
8 Voir les tableaux publiés en annexe dans Therrien 1998, p. 597-618. Therrien donne un aperçu de la position internationale de l’histoire de l’art dans l’enseignement supérieur en France et à l’étranger au début du xxe siècle, p. 378-386.
9 Sur les activités éditoriales d’André Michel, voir Bresc-Bautier 2010. Il est à noter que c’est un collègue de Michel au département des Sculptures, Paul Vitry, qui prit le relais du projet en 1925.

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