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    Journées archéologiques de Normandie

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    Bâtiments du néolithique moyen II à l’âge du bronze moyen à Saint-André-sur-Orne, « la Delle du Poirier » (Calvados)

    Buildings from the Middle Neolithic II period to the Middle Bronze Age in Saint-André-sur-Orne, “La Delle du Poirier” (Calvados)

    Emmanuel Ghesquière et David Giazzon

    p. 37-48

    Résumés

    Cet article a pour objet la présentation des principales caractéristiques des grands bâtiments du Néolithique moyen II, du Néolithique final, du campaniforme et de l’âge du bronze moyen découverts sur le site de Saint-André-sur-Orne, « La Delle du Poirier ».

    This article presents the main characteristics of large buildings from the Middle Neolithic II period, the end of the Neolithic period, the Beaker period, and the Middle Bronze Age, which were discovered on the Saint-André-sur-Orne “La Delle du Poirier” site.

    Entrées d’index

    Mots-clés : bâtiments, trous de poteau, fosses, Néolithique moyen II, Néolithique final, campaniforme, âge du bronze moyen

    Texte intégral Le bâtiment 6Les bâtiments 1 et 5Le bâtiment 1Le bâtiment 5Quelle signification pour ces bâtiments 1 et 5 ?Le bâtiment 3Le bâtiment 2L’alignementLes autres structuresConclusion Bibliographie Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    Texte intégral

    1L’INRAP a entrepris une fouille en octobre et novembre 2015 sur le site de Saint-André-sur-Orne, « La Delle du Poirier », en préalable à l’aménagement d’une ZAC par la SHEMA. La prescription de l’État porte sur une surface de près de 2 ha sur laquelle ont été mis en évidence plusieurs grands bâtiments néolithiques, édifiés vers 2600 ans avant notre ère. Sur l’emprise de la fouille, les grands bâtiments se multiplient et semblent se succéder sur une longue période (4400-1000 cal BC), durant laquelle l’architecture domestique est mal connue dans tout le nord de la France. En effet, contrairement aux ensembles funéraires, plus largement étudiés, seuls quelques grands bâtiments ont été découverts ces dernières années en Bretagne, à Pléchatel, « Le Bois », ou dans le Nord, à Glisy ou Aire-sur-la-Lys par exemple.

    2L’installation de ces architectures en bordure de la basse vallée de l’Orne, sur la première terrasse non inondable, est idéale par rapport aux autres terroirs disponibles. L’environnement immédiat offre ainsi des terrasses tout à fait adaptées à la culture des céréales. Dans la pente descendant vers l’Orne, les herbages, parfois inondables à la mauvaise saison, permettent la pâture du bétail. La basse vallée, partiellement marécageuse, offre en abondance du poisson, tandis que l’Orne elle-même, à moins de 500 m du site, constitue une voie navigable jusqu’à la mer.

    3Six grands bâtiments ont été identifiés sur la fouille (fig. 1). L’ensemble 4 ne peut toutefois pas être qualifié à proprement parler de bâtiment car on ignore la réalité des élévations. De plus, sa datation, réalisée sur un unique petit charbon, est contestable. Il a donc volontairement été laissé de côté dans le cadre de cet article. Dans un souci de compréhension, les architectures sont décrites dans l’ordre chronologique.

    Le bâtiment 6

    4Le bâtiment 6, de plan rectangulaire (fig. 2), est orienté est-ouest (8° sud). Il mesure 14,3 m de longueur pour 6 de largeur (85 m2 au sol). Il comprend une partie occidentale fortement ancrée dans le sol (étage ou grenier ?) et une partie orientale où les poteaux sont plus petits. Une datation radiocarbone sur du charbon issu d’un trou de poteau renvoie à la première moitié du Néolithique moyen II1.

    5La partie la plus robuste du bâtiment s’appuie sur cinq gros poteaux (quatre aux angles et un supplémentaire sur le côté occidental) et trois petits poteaux profonds sur le côté oriental, correspondant à un système d’entrée ou d’accès à l’étage. La partie plus faiblement ancrée est constituée de cinq poteaux de petits diamètres (0,25 m), mais profonds, qui suggèrent une extension du bâtiment sous forme d’avancée plus légère (sans étage ?).

    6De nombreuses structures datées du Néolithique moyen II sont présentes dans l’environnement du bâtiment et sur le reste de l’emprise (fosses circulaires et foyers ; fig. 3). Elles ont livré des lots mobiliers significatifs, voire importants (nos 40, 41 et 510 bis sur le plan, fig. 3). Leurs datations radiocarbone témoignent d’un maximum de probabilité autour de 4000 cal BC, à l’exception de deux dates anciennes sur des foyers (nos 51 et 284), qui témoignent soit de deux périodes distinctes, soit d’un effet de « vieux bois2 ».

    Fig. 1. Localisation géographique de l’opération et plan masse indiquant les principaux ensembles identifiés (DAO : E. Ghesquière).

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    Fig. 2. Plan et coupes du bâtiment 6 du Néolithique moyen II (DAO : E. Ghesquière et D. Giazzon).

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    7Le mobilier est assez abondant, aussi bien dans certains gros poteaux du bâtiment que dans les fosses qui lui sont probablement associées, avec un nombre minimum d’individus (NMI) d’une vingtaine de céramiques (gobelets à profil en S, bouteilles, micro-vases, coupes à socles cylindriques et cubiques ; fig. 4) et une trentaine d’outils en silex (grattoirs, tranchets, petits outils prismatiques, armatures tranchantes). La faune est bien présente et en bon état de conservation (bovidés, ovicapridés…).

    Fig. 3. Plan et coupes des fosses rattachées au bâtiment 6 (DAO : E. Ghesquière et D. Giazzon).

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    Fig. 4. Planche de synthèse du mobilier céramique lié au bâtiment 6 du Néolithique moyen II (DAO : L. Manceau).

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    Les bâtiments 1 et 5

    8Les deux plus grands édifices (bâtiments 1 et 5) se distinguent par des poteaux de paroi presque jointifs profondément creusés dans le sol calcaire. Leur surface au sol, de près de 150 m2, est d’autant plus importante que la taille des poteaux de soutènement des parois et de la charpente pourrait témoigner de la présence d’un étage ou tout au plus d’un vaste espace de combles utilisables. Le bâtiment 1 est entouré d’une vaste ellipse de 45 m sur 40 dessinée par 47 trous de poteaux (fig. 5). Ces poteaux pouvaient soutenir une clôture massive. La régularité de cette ellipse est assez spectaculaire car la réalisation de cette forme géométrique à cette échelle présente une réelle difficulté. La présence de quelques objets particuliers découverts lors de la fouille (fusaïole pour le filage, pointe de flèche) et les datations du14C contenu dans les ossements témoignent d’une occupation au Néolithique final, entre 2850 et 2500 avant J.-C.3

    Fig. 5. Plan du bâtiment 1 et de son enceinte elliptique (DAO : E. Ghesquière).

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    Le bâtiment 1

    9Le bâtiment 1, orienté est-ouest (10° sud), présente un plan rectangulaire se terminant dans sa partie orientale par une abside (fig. 5 et 6). Il mesure 16 m de long sur 9,8 m de large (150 m2 au sol). Son mode de construction est caractérisé par des parois latérales formées chacune de six gros trous de poteau. Les avant-trous, de 1 à 1,4 m de diamètre, sont presque jointifs. Les fantômes de poteaux sont bien lisibles. Il s’agit de bois refendus de 0,8 à 1 m de largeur. Deux poteaux faîtiers sont disposés au centre des extrémités des parois latérales (fig. 5 et 6, nos 10 et 21). Leurs avant-trous, de 1,9 m de longueur, renferment des négatifs de poteaux circulaires de 0,95 m de diamètre. L’abside occidentale est constituée de trous de poteaux plus modestes, de 0,9 à 1,2 m de diamètre, avec des fantômes de poteau en bois refendu de 0,5 m de longueur. Quatre poteaux circulaires puissants, de 0,6 m de diamètre, sans avant-trous, ferment le côté occidental. Quatre autres plus petits sont disposés sur le côté sud et pourraient correspondre à une annexe ou une pièce supplémentaire de 4,5 m2 (fig. 5, nos 22, 19, 18 et 16). Les gros trous de poteau faîtiers, ceux des parois latérales et ceux de l’abside occidentale présentent un profil identique : un bord sub-vertical côté intérieur du bâtiment et un bord évasé côté extérieur, vraisemblablement pour faciliter l’érection des poteaux. Ils s’enfoncent de 0,5 à 0,6 m sous le niveau de décapage pour les poteaux d’abside et de 0,8 à 1,35 m pour les poteaux latéraux et faîtiers (entre 1,25 et 1,8 m sous le sol actuel). Les quatre poteaux de la façade occidentale présentent des parois verticales qui s’enfoncent de 0,7 à 1 m sous le niveau de décapage. Les poteaux plus réduits de l’annexe sud sont conservés sur une profondeur de 0,2 à 0,5 m.

    Fig. 6. Coupes des structures du bâtiment 1 (DAO : E. Ghesquière et D. Giazzon).

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    10Sans être particulièrement fréquent, sauf dans le poteau faîtier 21, le mobilier est présent dans tous les fantômes de poteau. La majorité a subi l’action du feu, particulièrement visible sur les silex et les ossements de faune. La céramique ne permet de distinguer que des fragments de formes. Quelques éléments plus originaux ont été découverts dans ces poteaux : huîtres et moules, crayons d’ocre, haches polies, stèle en grès (fig. 7) et pointe de flèche à pédoncule et ailerons. Le seul mobilier provenant du bourrage de calage d’un avant-trou est un fragment d’andouiller en bois de cerf, vraisemblablement un outil de creusement, peut-être rejeté après avoir été brisé. Une datation radiocarbone sur os frais provenant d’un des poteaux de paroi présente un écart type assez important, caractéristique d’un effet plateau sur la première moitié du IIIe millénaire4.

    11L’enceinte concentrique est reliée au bâtiment 1 par une série de sept alignements radians (fig. 5). Les poteaux formant l’ellipse sont disposés de façon régulière, sauf dans l’alignement du bâtiment, où l’on note soit une interruption, soit un net rétrécissement de leur creusement.

    12Les trous de poteau ne présentent pas la même morphologie. Dans la partie occidentale de l’ellipse, les trous s’inscrivent dans l’argile orange et ne contiennent que les fantômes des poteaux. Sur le reste de l’ellipse, installée sur le substrat calcaire, de gros avant-trous sont creusés, de l’ordre de 0,6 à 1,1 m de diamètre suivant les secteurs. La profondeur varie : 0,05 m pour quelques poteaux du côté sud, 0,3 m en moyenne pour une majorité de poteaux et jusqu’à 0,5 m pour quelques poteaux à l’est et au nord.

    13Le mobilier reste anecdotique pour chaque structure, mais il est relativement conséquent pour l’ensemble. Il se compose de silex taillés, de tessons céramiques et de fragments d’os de faune tout à fait comparables à ceux découverts dans les trous de poteaux du bâtiment 1. Une analyse radiocarbone sur os frais présente une datation similaire avec le même écart-type assez important5.

    Le bâtiment 5

    14Le bâtiment 5 présente strictement le même plan que le bâtiment 1 (fig. 8). Il est orienté est-nord-est/ouest-sud-ouest (25° sud), mesure 15,2 m de long sur 10,2 m de large et couvre une superficie de 150 m2 au sol. Les parois latérales sont également formées chacune de six gros trous de poteaux mais les avant-trous et les trous de poteaux sont nettement moins profonds que ceux du bâtiment 1, quoique construits sur le même modèle (avant-trous beaucoup plus grands que les poteaux et inclinaison pour permettre l’érection des poteaux).

    15Les fantômes des poteaux (troncs refendus) sont bien lisibles par un remplissage limoneux, au contraire des bourrages de pierre des avant-trous, qui se distinguent mal au niveau du décapage du substrat environnant. Les poteaux des petits côtés présentent uniquement un remplissage limoneux.

    16Le mobilier céramique, lithique et osseux est peu fréquent dans les gros poteaux des parois latérales et absent dans les petits poteaux. Il provient exclusivement des fantômes de poteaux et jamais du bourrage. Il est comparable à celui du bâtiment 1. Les deux datations radiocarbone réalisées sur du mobilier charbonneux issu de deux trous de poteaux6 ainsi que deux autres effectuées sur deux os provenant de deux poteaux sont soit rigoureusement semblables, soit presque identiques à celles du bâtiment 17.

    Quelle signification pour ces bâtiments 1 et 5 ?

    17Le mobilier, anecdotique pour le bâtiment 5, est limité dans les structures du bâtiment 1. Il se réduit à des éléments de petite taille, qui ont migré depuis la surface du bâtiment probablement incendié pour remplir l’espace laissé par les poteaux qui ont progressivement pourri sur pied. L’absence de gros éléments, en particulier de mouture, empêche de déterminer si l’ensemble des pratiques domestiques a été réalisé dans le bâtiment. Toutefois, le nombre minimum d’individus céramiques, la fusaïole, la présence récurrente de silex taillés et de nombreux témoins de consommation (faune, coquillages) permettent d’envisager cette hypothèse. Ce mobilier, ainsi que l’absence totale d’ossement humain, permettent a priori d’écarter un usage funéraire du bâtiment. La fonction domestique pourrait en revanche avoir été partagée avec celle de lieu de culte ou de pouvoir. Cette dernière hypothèse de fonction rejoint celle d’Ivan Praud quand il tente de résoudre le délicat problème de la signification sociale de ces grands bâtiments (Praud, 2014). Il interprète, dans une discussion argumentée, le grand bâtiment d’Houplin-Ancoisne (Nord) et son enceinte comme un monument marquant la place centrale d’un territoire. Si l’on poursuit son raisonnement, le statut de « l’occupant principal » serait alors celui d’un chef de communauté, représentant éventuel d’une pré-aristocratie. La taille du bâtiment varierait alors en fonction de celle du territoire et du nombre d’habitants (propriétaire et sa famille, ouvriers et domestiques). L’absence de fortification réelle autour de ces bâtiments témoignerait d’une différence sociale ou d’un degré de pouvoir du chef inférieur à celui de l’occupant principal d’une grande enceinte fortifiée de la même période. En tout état de cause, étant donné la période considérée et le contexte local (absence de ressource lithique massive ponctuelle à proximité immédiate), la fonction économique de ces grands bâtiments relève vraisemblablement de l’exploitation agricole des terres environnantes. Les deux bâtiments 1 et 5 de Saint-André-sur-Orne correspondent peut-être à la division en deux d’infrastructures ordinairement rassemblées sur les autres sites (Aire-sur-la-Lys dans le Pas-de-Calais, Arleux et Houplin-Ancoisne, dans le Nord : Praud dir., 2014). Les raisons de cette division, que l’on observe également sur le site de Condé-sur-Marne dans la Marne (Peltier et Langry-François, 2011), peuvent résulter de plusieurs facteurs, comme le désir de mettre les récoltes à l’abri des incendies, toujours possibles dans la partie domestique, mais aussi refléter la volonté de construire un bâtiment d’habitation plus ostentatoire, probablement doté d’un étage et mis en valeur par une enceinte (fig. 9).

    Fig. 7. Stèle découverte fichée dans un des poteaux de la façade occidentale du bâtiment 1 (DAO : E. Ghesquière).

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    Fig. 8. Plan et coupes des poteaux du bâtiment 5 (DAO : E. Ghesquière et D. Giazzon).

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    Le bâtiment 3

    18Le bâtiment 3 présente un plan particulier, que l’on nomme « en ampoule » (fig. 10). Il comporte une tranchée de fondation continue affichant cette forme particulière, de 11,6 m de longueur pour 2 à 6 m de largeur. Sa surface interne est de l’ordre de 45 m2. L’interruption du fossé et la présence de trous de poteaux, à l’extrémité la plus large, témoigne de l’existence d’une porte (fig. 10, nos 462 et 475). Ces trous de poteaux mesurent 0,5 m de diamètre. Les parois sont faiblement évasées et s’enfoncent de 0,25 m sous le niveau de décapage (0,85 m sous le sol actuel). La tranchée de fondation suit un tracé continu et régulier. Les parois sont verticales ou faiblement évasées. La partie sud est creusée moins profondément que la partie nord, de 0,05 m au sud à 0,30 m à l’extrémité nord, où deux poteaux terminent le bâtiment. Dans cet espace où la grave constitue le substrat, le remplissage de la fondation est constitué presque essentiellement de grave fine mêlée à du limon gris.

    Fig. 9. Reconstitution du bâtiment 1 et de son enceinte concentrique au premier plan et du bâtiment 5 à l’arrière-plan (reconstitution : J. Beaumel).

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    Fig. 10. Plan et coupes du bâtiment 3 (DAO : E. Ghesquière et D. Giazzon).

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    19Un tesson centimétrique et une petite esquille de silex sont les seuls témoins mobiliers, ne permettant aucune attribution chronologique. Quelques charbons, découverts en particulier dans un des poteaux sud, ont permis de rattacher le bâtiment du Néolithique final ou Campaniforme8. Cette datation est compatible avec celle des bâtiments de ce type mis au jour en Bretagne depuis quelques années (Blanchet et al., 2012). Dans les tranchées de fondation des édifices bretons, on peut parfois observer la présence de négatifs de perches presque jointives. C’est l’hypothèse retenue pour Saint-André-sur-Orne : des grandes perches fichées sub-jointives permettaient de solidariser les parois et le toit en se rejoignant au faîtage. Ne restait plus alors qu’à recouvrir les perches d’une couche de chaume, de roseau ou d’autres végétaux pour assurer l’étanchéité et l’isolation.

    Fig. 11. Plan et coupes du bâtiment 2 (DAO : E. Ghesquière et D. Giazzon).

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    Le bâtiment 2

    20Le bâtiment 2 est élevé à partir de 19 poteaux qui déterminent un socle rectangulaire allongé auquel un poteau axial débordant au nord et quelques poteaux disposés en abside au sud donnent un caractère naviforme prononcé. Il mesure 13 m de longueur pour 4,5 de largeur (53 m2 ; fig. 11). Quelques poteaux surnuméraires aux alentours pourraient être destinés à appuyer des appentis, soutenir l’architecture principale ou n’avoir aucun lien avec le bâtiment. Les creusements mesurent entre 0,35 et 0,5 m de diamètre, possèdent des parois sub-verticales et présentent une profondeur de 0,1 à 0,2 m sous le niveau de décapage (0,7 à 0,8 sous le sol actuel). Le mobilier découvert dans les poteaux est anecdotique et faiblement représentatif. L’attribution chrono-culturelle du bâtiment ne repose que sur les quelques charbons découverts dans les poteaux et sur la morphologie de la construction. Celle-ci est tout à fait en adéquation avec la datation radiocarbone obtenue sur un charbon, avec toutes les réserves accordée à la méthode, soit l’âge du bronze moyen9.

    Fig. 12. Plan et coupes des poteaux de l’alignement (DAO : E. Ghesquière et D. Giazzon).

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    L’alignement

    21Un alignement de poteaux a été observé. Il comporte deux tronçons disjoints (fig. 12). Le premier, au nord, constitué de trois poteaux (nos 86, 87 et 88), est orienté à 112° vers le nord. Il semble se raccorder sur l’enceinte elliptique. Le second est orienté à 125° vers le nord. Il comprend 14 poteaux régulièrement espacés et se prolonge probablement hors de l’emprise. Un hiatus de 9 m existe entre les deux parties, ce qui a été vérifié par un nettoyage manuel puis un décapage mécanique. Toutefois, en raison de la faible profondeur des structures constituant l’alignement (entre 0,5 et 0,10 m sous le niveau de décapage), des poteaux moins profondément ancrés ont pu disparaître. Il demeure une variation de l’axe de l’ordre de 15° entre les deux parties mais une réelle continuité visuelle en plan.

    22Aucun élément n’a pu être découvert permettant une datation de l’ensemble. La seule certitude est le recoupement du bâtiment 5 du Néolithique final par l’alignement.

    Les autres structures

    23En dehors des bâtiments eux-mêmes, très peu de structures peuvent être rattachées à cette époque. Si quelques foyers aménagés pouvaient peut-être être réservés à des occasions particulières, les activités devaient être essentiellement regroupées à l’intérieur des maisons et n’ont pas laissé de traces (stockage de la paille et du grain en grenier ? foyers et fours hors du sol ?). Seul le bâtiment 6 pourrait être accompagné de petits bâtiments annexes et de « silos » extérieurs.

    Conclusion

    24La fouille du site de Saint-André-sur-Orne a permis de mettre en évidence cinq bâtiments datés du Néolithique moyen II, du Néolithique final, de l’âge du bronze ancien ou Campaniforme et de l’âge du bronze moyen. Cette étonnante concentration sur un espace réduit (un hectare environ) est remarquable, car les bâtiments de ces périodes sont encore rares dans la région.

    25En effet, seuls deux autres sites régionaux ont livré des bâtiments Néolithique moyen II de plan rectangulaire (Banville, « La Burette », et Cairon, « La Pierre Tourneresse », dans le Calvados). De plus, les deux grands bâtiments du Néolithique final sont pour l’instant les seuls de ce type découverts en Normandie. Le bâtiment en amande, quant à lui, ne possède pour l’instant qu’un seul modèle comparable, à Jardeheu, dans la Manche (celui d’Hérouvillette, dans le Calvados, est en effet d’un module beaucoup plus grand). Enfin, si quelques bâtiments de l’âge du bronze moyen sont observés sur le territoire régional (comme à Tatihou, dans la Manche), la forme du bâtiment 2, nettement naviforme, ne trouve de comparaison qu’en dehors de la Normandie. On peut donc dire que la fouille du site de Saint-André-sur-Orne, bien que de superficie limitée, renouvelle pour une large part la vision que l’on avait jusqu’ici de l’habitat néolithique et de l’âge du bronze dans la région. Les constructions mises au jour restent néanmoins pour chaque période en adéquation avec ce que l’on connaît dans l’interrégion et dans la moitié nord de la France.

    26La topographie particulière du lieu peut-elle alors contribuer à expliquer cette succession d’habitats dans un même endroit ? Il s’agit en effet d’un ressaut dans une pente placée entre la basse vallée, vraisemblablement réservée aux pâtures, comme c’est encore le cas aujourd’hui, et le haut de pente réservé à l’agriculture classique « céréalière ». Si c’est la raison de cette implantation, elle pourrait expliquer le déficit de sites comparables, car ce type d’emplacement est assez peu investi par la construction, dans la vallée de l’Orne et la couronne caennaise. Cette configuration n’est probablement pas unique au niveau régional, et la multiplication des opérations d’archéologie préventive en fournira certainement d’autres exemples.

    27La seule pierre d’achoppement du site reste la rareté des fosses à usage de dépotoir en relation avec ces édifices, à l’exception de celles associées au bâtiment 6 daté du Néolithique moyen II, et des structures associées. Il en ressort un déficit de mobilier datant pour l’ensemble des bâtiments qui nous a obligés à recourir systématiquement aux datations radiocarbone. ■

    Bibliographie

    Bibliographie

    Blanchet S., Nicolas T. et Toron S. (2012) – Des constructions inédites à la transition Néolithique final-bronze ancien en Bretagne : premier bilan. INTERNEO 9, journée d’information du 17 novembre 2012. Paris, SPF, p. 135-146.

    Peltier V. et Langry-Francois F. (2011) – Condé-sur-Marne « Le Brabant ». Un habitat du Néolithique final dans la vallée de la Marne, rapport final d’opération. Caen, INRAP, Service régional de l’archéologie, 184 p.

    Praud I. dir. (2014) – Le Néolithique final de la vallée de la Deûle. Le site d’Houplin-Ancoisne. Le marais de Santes. Paris, INRAP-CNRS, coll. Recherches archéologiques, 9, 344 p.

    Notes de bas de page

    1  No 96 : Beta424682, 5280 +/ – 30 BP, 4230-3995 cal BC, 95 % de probabilité.

    2  No 284 : Beta427211, 5540 +/ – 30 BP, 4450-4340 cal BC ; no 51 : Beta427209, 5400 +/ – 30 BP, 4335-4180 cal BP.

    3  Bâtiment 1 : trou de poteau no 154 (Beta422307, 4100 +/ – 30 BP, 2860-2505 cal BC) ; enceinte du bâtiment 1 : Beta422305, 4080 +/ – 30 BP, 2850-2495 cal BC ; bâtiment 5 : Beta427219, 4060 +/ – 30 BP, 2835-2490 cal BC et Beta427212, 4060 +/ – 30 BP, 2835-2490 cal BC.

    4  Beta422307, 4100 +/ – 30 BP, 2860-2505 cal BC.

    5  Beta422305, 4080 +/ – 30 BP, 2850-2495 cal BC.

    6  No 296 : Beta427212, 4060 +/ – 30 BP, 2835-2490 cal BC ; no 530 : Beta427219, 4060 +/ – 30 BP, 2835-2490 cal BC.

    7  No 37 : Beta422305, 4080 +/ – 30 BP, 2850-2495 cal BC ; no 154 : Beta422307, 4100 +/ – 30 BP, 2860-2505 cal BC.

    8  Beta424681, 3860 +/ – 30 BP, 2460-2205 cal BC.

    9  Beta427216, 3200 +/ – 30 BP, 1525-1420 cal BC.

    Auteurs

    • Emmanuel Ghesquière

      INRAP Grand-Ouest

    • David Giazzon

      INRAP Grand-Ouest

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    1  No 96 : Beta424682, 5280 +/ – 30 BP, 4230-3995 cal BC, 95 % de probabilité.

    2  No 284 : Beta427211, 5540 +/ – 30 BP, 4450-4340 cal BC ; no 51 : Beta427209, 5400 +/ – 30 BP, 4335-4180 cal BP.

    3  Bâtiment 1 : trou de poteau no 154 (Beta422307, 4100 +/ – 30 BP, 2860-2505 cal BC) ; enceinte du bâtiment 1 : Beta422305, 4080 +/ – 30 BP, 2850-2495 cal BC ; bâtiment 5 : Beta427219, 4060 +/ – 30 BP, 2835-2490 cal BC et Beta427212, 4060 +/ – 30 BP, 2835-2490 cal BC.

    4  Beta422307, 4100 +/ – 30 BP, 2860-2505 cal BC.

    5  Beta422305, 4080 +/ – 30 BP, 2850-2495 cal BC.

    6  No 296 : Beta427212, 4060 +/ – 30 BP, 2835-2490 cal BC ; no 530 : Beta427219, 4060 +/ – 30 BP, 2835-2490 cal BC.

    7  No 37 : Beta422305, 4080 +/ – 30 BP, 2850-2495 cal BC ; no 154 : Beta422307, 4100 +/ – 30 BP, 2860-2505 cal BC.

    8  Beta424681, 3860 +/ – 30 BP, 2460-2205 cal BC.

    9  Beta427216, 3200 +/ – 30 BP, 1525-1420 cal BC.

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    Ghesquière, E., & Giazzon, D. (2018). Bâtiments du néolithique moyen II à l’âge du bronze moyen à Saint-André-sur-Orne, « la Delle du Poirier » (Calvados). In J.-P. Ollivier (éd.), Journées archéologiques de Normandie. Mont-Saint-Aignan: Presses universitaires de Rouen et du Havre. https://doi.org/10.4000/books.purh.17285
    Ghesquière, Emmanuel, et David Giazzon. « Bâtiments du néolithique moyen II à l’âge du bronze moyen à Saint-André-sur-Orne, “la Delle du Poirier” (Calvados) ». In Journées archéologiques de Normandie, édité par Jean-Paul Ollivier. Mont-Saint-Aignan: Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2018. doi:10.4000/books.purh.17285.
    Ghesquière, Emmanuel, et David Giazzon. « Bâtiments du néolithique moyen II à l’âge du bronze moyen à Saint-André-sur-Orne, “la Delle du Poirier” (Calvados) ». Journées archéologiques de Normandie, édité par Jean-Paul Ollivier, Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2018, https://doi.org/10.4000/books.purh.17285.

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    Ollivier, J.-P. (éd.). (2018). Journées archéologiques de Normandie. Mont-Saint-Aignan: Presses universitaires de Rouen et du Havre. https://doi.org/10.4000/books.purh.17255
    Ollivier, Jean-Paul, éd. Journées archéologiques de Normandie. Mont-Saint-Aignan: Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2018. doi:10.4000/books.purh.17255.
    Ollivier, Jean-Paul, éditeur. Journées archéologiques de Normandie. Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2018, https://doi.org/10.4000/books.purh.17255.
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