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    Plan détaillé Texte intégral Les destins du territoire et de la population civique aux époques classique et hellénistique Étendue et importance de la cité à l’époque impériale Estimation de la population Conclusion Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    L'Asie mineure dans l'Antiquité : échanges, populations et territoires

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Territoire civique et population d’Éphèse (Ve siècle av. J.-C.-IIIe siècle apr. J.-C.)

    François Kirbihler

    p. 301-333

    Texte intégral Bibliographie Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Il peut paraître présomptueux de traiter dans le cadre d’un article l’évolution de la population et du territoire éphésiens durant sept siècles, de 454/3 av. J.-C. au séisme de 262 apr. J.-C.1. Si la première date correspond à la plus ancienne liste des tributs attiques conservée, le milieu du IIIe siècle de notre ère voit disparaître l’épigraphie civique : la dernière attestation de secrétaire du peuple date de Philippe l’Arabe (244-249), et les dernières grandes généalogies épigraphiques de familles sénatoriales d’origine locale sont des années 250. L’année 262 vit de surcroît le raid des Goths sur l’Artémision. Les fouilles, commencées par l’Anglais J.T. Wood durant les années 1863-1874, sont poursuivies à Éphèse depuis 1895-1898 par une équipe de fouilleurs autrichiens, avec des interruptions parfois longues dues aux deux conflits mondiaux et à leurs conséquences. Les recherches de l’Institut archéologique autrichien (ÖAI), fondé en 1898, longtemps dominées par les architectes et les historiens de l’art, ne s’intéressent que depuis peu à la problématique du territoire éphésien2. Aussi existe-t-il peu de réponses assurées sur ces questions : l’auteur aimerait avant tout proposer selon une perspective diachronique un état des questions relatif à l’évaluation du territoire civique et de sa population3. Les propositions de frontières civiques qui vont suivre ne se veulent évidemment pas définitives : elles devront au contraire être vérifiées sur le terrain selon la même méthode que celle suivie par les fouilleurs belges de Sagalassos4.

    2On sait les difficultés de toutes sortes qui se posent au chercheur en matière de démographie antique. Les estimations de population s’avèrent évidemment fort hasardeuses en l’absence de statistiques, même partielles. Depuis l’étude pionnière de K.J. Beloch, les progrès de cette discipline ont été lents5, mais la dernière décennie s’est soldée par des travaux novateurs et des avancées significatives6. Connaître au moins approximativement l’importance d’une population s’avère fondamental, si l’on entend pleinement évaluer le potentiel économique d’un territoire de cité antique et estimer de façon raisonnable les parts respectives de l’agriculture et du commerce dans le tissu économique : le commerce représentera immanquablement un élément économique important de l’économie d’une cité, lorsque la densité de population dépassera le maximum compatible avec les ressources d’une agriculture d’auto-subsistance, soit une quarantaine d’habitants au km2 environ7. Des importations de produits alimentaires s’imposent alors, ce qui nécessite la vente et le transport d’autres productions agricoles ou artisanales8 à diverses communautés ; ces faits impliquent en principe l’existence de services financiers permettant de pratiquer le crédit.

    3Éphèse était évidemment une cité populeuse à l’époque impériale, comme la superficie de la ville et la taille des vestiges archéologiques, ainsi que ses titres de métropole et de première cité de l’Asie l’attestent : elle l’emportait même sur ses rivales, Pergame et Smyrne9. Ni la population de la ville, ni celle de la chôra ne se laissent aisément calculer, aucun total chiffré n’étant conservé. Quant aux évaluations des antiquisants, elles révèlent des divergences du simple au double. Il convient d’ailleurs de distinguer dans ces estimations ce qui revient au territoire civique entier, ensemble de l’espace dans lequel vivaient les citoyens et d’autres groupes de population, de la ville stricto sensu, surface qui inclut cependant aussi bien l’espace ceint par les murailles que les faubourgs.

    4La première partie de ce travail tente d’estimer les principales évolutions du territoire et de la population aux époques classique et hellénistique, assez mal connues à Éphèse ; suit une discussion des limites du territoire éphésien à l’époque où il est le mieux connu, le Haut-Empire, avec une proposition de carte provisoire, malgré les modifications du rivage antique et l’absence de survey publié ; on discutera enfin les évaluations de population publiées par le passé et on proposera un ordre de grandeur possible de la population civique et de la population totale.

    Les destins du territoire et de la population civique aux époques classique et hellénistique

    5Il s’agit de périodes peu connues : la ville d’époque romaine a comme effacé la ville hellénistique ; on sait aussi que le centre urbain d’époque classique se situe sous l’actuelle ville de Selçuk, ce qui en rend évidemment la connaissance malaisée. Les discussions et propositions reposent donc largement sur des impressions pour les périodes les plus anciennes : elles demanderont à être révisées au fur et à mesure des progrès des connaissances, en raison des sondages désormais plus nombreux à Éphèse depuis une ou deux décennies.

    Les incertitudes du Ve siècle

    6La ville d’époque classique n’ayant pas été fouillée, il faut avoir recours à d’autres documents que ceux fournis par l’archéologie locale. Les listes attiques de tribut permettent une appréciation de l’importance passée d’Éphèse et de la richesse de la cité10. Ces documents du Ve siècle av. J.-C. prévoient une contribution qui dépend des capacités démographiques et financières des cités membres de l’Alliance11. Ajoutons que si l’on admet que les chiffres du tribut reflètent, même indirectement, pour une majorité de cités le chiffre de la population, point qu’un certain nombre de chercheurs rejette, ils tiennent compte au moins autant de l’étendue du territoire, donc de ses ressources agricoles12, et de l’importance du montant d’autres taxes, par exemple sur la vente : ce dernier critère est le produit du surcroît de richesse engendré par le commerce, ce qui a pour conséquence des capacités financières accrues pour ce type de cité13. Le calcul de la population des ports s’avère de toute façon le plus difficile, en raison d’une proportion inconnue de taxes portuaires ou de taxes sur la vente dans le total des ressources14.

    7Éphèse acquitte un impôt sensiblement équivalant à celui de Milet, respectivement 6 à 7,5 talents contre 5 à 10 talents15. Par rapport aux autres tributs connus, il s’agit d’un montant assez élevé, puisque 71 % des cités versent des montants inférieurs à un talent16 : Éphèse fait incontestablement partie du quart de cités versant de grosses sommes. E. Ruschenbusch a pensé que le tribut était dans la grande majorité des cas un reflet de la population, au moins au niveau de l’ordre de grandeur. Ses calculs peuvent certes être contestés dans le détail17, mais ses résultats paraissent en gros acceptables pour la Grèce d’avant 43118.

    8Il découle cependant de ces données qu’au Ve siècle, la population d’Éphèse se laisse malaisément chiffrer. K. J. Beloch a estimé à 4 000 le nombre de citoyens à Milet à l’époque de la guerre du Péloponnèse19 : il reste possible que le chiffre éphésien, en raison de l’ordre de grandeur comparable du tribut, ait été voisin de ce total, et il s’agit sans doute d’un nombre plancher. Les évaluations d’E. Ruschenbusch, qui pense qu’un talent correspond dans la plupart des cas à environ 800 citoyens, conforteraient cette hypothèse : il estime cependant que la cité fait partie des quelques cas où le chiffre de population se laisse malaisément calculer, en raison de l’importance supposée des revenus non agricoles20. Il propose néanmoins pour l’Éphèse d’époque classique l’ordre de grandeur d’environ 4 000 citoyens déjà formulé par K.J. Beloch, soit un total de population citadine de vingt à trente mille habitants, en raison de la proportion inconnue d’esclaves : avec un paiement moyen de 6 talents la cité pourrait théoriquement compter un chiffre de citoyens encore supérieur, mais on a vu que le tribut dépend en partie d’autres revenus. Cependant Éphèse administre sans doute dès cette époque par le biais de l’Artémision des populations de la chôra qui originellement ne relevaient pas de son autorité, mais il faut bien avouer que la documentation manque21. De toute façon, comme P(h)ygela et Marathesion paient le tribut et sont par conséquent des communautés indépendantes22, la cité au Ve siècle est encore loin de sa taille future : limité au Sud, on ignore jusqu’où son territoire s’étendait vers l’Est. Il serait dangereux d’affirmer que le territoire sacré connu à partir d’Auguste est un héritage d’époque classique. Ce que l’on peut affirmer est que le territoire excluait au Ve siècle une part indéterminée de la partie orientale du territoire civique de l’époque impériale : le territoire civique était ainsi réduit, avant les agrandissements à venir de l’époque hellénistique.

    9Pour les cités ioniennes le Ve siècle n’est assurément pas une époque d’apogée. Tiraillées entre l’autorité vacillante du Grand Roi et l’influence grandissante d’Athènes étendant sa Ligue, certaines cités connaissent par ailleurs des affrontements entre démocrates et oligarques : ces troubles, alliés à de possibles interventions et répressions athéniennes, n’ont certainement pas été favorables à un essor économique et démographique. Ce déclin au moins relatif, même si l’on n’accepte pas toutes les conclusions de J.-M. Balcer23, paraît confirmé par la comparaison des chiffres du tribut de Milet et Éphèse avec ceux des ports des Détroits et de la mer de Marmara bénéficiaires du commerce avec le Pont-Euxin, apparemment beaucoup plus actifs, avec 15 talents de tribut pour Byzance, 12 pour Lampsaque, 10 pour Périnthe, 9 pour Cyzique24.

    10Cette relative modestie de la cité d’Éphèse parmi les grands tributaires, au moins par rapport à d’autres ports et ce que l’on connaît de l’évolution future de la ville, est confirmée par une remarque de Plutarque, qui note même un déclin à la fin du Ve siècle, époque de guerre et de difficultés : Éphèse se « barbarisait » en raison de son environnement géographique et de la présence de généraux du Grand Roi. Il peut certes s’agir d’un topos littéraire sur le supposé danger de la corruption des mœurs perses. Mais la ville connaissait certainement aussi une crise économique, en raison de la baisse d’activité du port, au moins depuis la révolte ionienne de 412 : Plutarque assure que c’est Lysandre qui est à l’origine de la reprise de l’activité maritime. Même si la source sur laquelle s’appuie le texte demeure inconnue, il n’y a pas de raison de récuser radicalement ce témoignage : la cité n’était guère florissante vers 40725.

    11Au total, le Ve siècle, de la révolte ionienne à la dernière phase de la Guerre du Péloponnèse, apparaît comme une période de stagnation, voire de régression, au moins relative, par rapport à l’essor des cités en rapport avec le Pont-Euxin. Le contraste avec le IVe siècle n’en apparaît que plus saisissant.

    Le IVe siècle : un premier essor

    12Éphèse se développa beaucoup par la suite, non sans crises cependant. L’action de Lysandre, la création d’un arsenal et la reprise des activités artisanale et commerciale enclenchent un processus de croissance qui aurait été un phénomène continu de la fin de la guerre du Péloponnèse jusqu’au temps de Plutarque. Le IVe siècle av. J.-C. a par conséquent correspondu à un premier moment d’essor important26.

    13Il semble bien que cette époque ait vu un sensible accroissement de la masse monétaire. G. Le Rider paraît convaincu de l’essor des frappes sous l’autorité nominale du Grand Roi, adepte d’une véritable politique monétaire : Éphèse dispose même de l’autonomie monétaire et ses frappes d’argent sont importantes27. Ce fait a certainement stimulé l’économie locale et favorisé les échanges d’Éphèse. La Paix du Roi en 386 inaugure au fond une période propice au commerce : malgré la révolte des satrapes, Éphèse ne paraît pas avoir durablement souffert de la guerre ni des entreprises de Mausole. Cette cité en expansion démographique et économique, qui reconstruit le temple d’Artémis après 356 et édifie un somptueux autel28, a certainement tenté de prendre le contrôle de Phygela au cours du IVe siècle, mais la petite cité a conservé ou recouvré son indépendance durant la seconde moitié du IVe siècle, puisqu’elle émet des décrets et contracte un traité d’isopolitie avec Milet29.

    14On ignore avec précision les conséquences démographiques, et éventuellement territoriales, du rétablissement de la démocratie en 336 lors du raid de Parménion, puis, après le retrait de ce dernier, à nouveau en 334 par Alexandre, et les suites d’éventuels règlements de comptes entre citoyens oligarques et démocrates, dus aux changements politiques sous Alexandre et ses successeurs. On est en droit de supposer avec P. Debord que la fin du IVe et le début du IIIe siècle voient un accroissement significatif de la population civique. L’époque agitée des Diadoques montre une cité politiquement louvoyante, à l’approvisionnement souvent menacé, subissant partiellement les conséquences des multiples conflits du temps30. Les relations d’Éphèse étaient cependant cosmopolites, ce que reflète la diversité des origines des Grecs auxquels la citoyenneté éphésienne est octroyée vers 325-280/275 av. J.-C.31. La cité a pu bénéficier de l’installation de certains de ces néo-citoyens, mais les effectifs concernés sont sans doute restés modestes : les décrets d’octroi de citoyenneté concernent une dizaine ou quinzaine de bénéficiaires au maximum32, et une partie des néo-citoyens, en fait citoyens d’honneur, ne s’est probablement jamais durablement installée dans la cité33. Ce phénomène a pu aider à la croissance de la cité, mais de façon marginale. C’est la fondation de Lysimaque qui a contribué de manière décisive à donner une nouvelle impulsion à la cité.

    La fondation de Lysimaque et l’époque hellénistique

    15Un événement de grande importance a été la nouvelle fondation d’Éphèse-Arsinoeia, opérée vers 294 par Lysimaque34. Le diadoque a voulu créer une cité de grande dimensions, au moins si on en juge d’après la taille du rempart35. La population s’est accrue par divers moyens, mais le diadoque a employé la contrainte à plusieurs reprises. La cité est frappée au IIIe siècle avant notre ère, à une date proche de 294, par une catastrophe : Stéphane de Byzance indique 10 000 morts lors d’une inondation provoquée par le désir de Lysimaque de forcer la population à quitter la zone inondable autour de l’Artémision et à venir s’installer dans la nouvelle ville créée par ses soins. Le fait paraît attester une population assez importante, d’au moins quelques dizaines de milliers d’habitants, résultant d’un siècle d’essor ; le nombre de victimes paraissait vraisemblable à la source d’Étienne de Byzance36.

    16Le synoecisme voulu par Lysimaque a forcément stimulé la croissance urbaine. Différentes petites cités ont été absorbées par Éphèse : les habitants de Lébédos durent aller habiter Éphèse après la destruction de la ville ; une partie au moins des Colophoniens connut le même sort37, alors que la cité de Phygela a probablement été rattachée à ce moment au territoire éphésien. Phygela avait une petite communauté civique supérieure aux 350 citoyens en âge de participer à un vote à l’Assemblée à la fin du IVe siècle38, soit, en tenant compte d’un nombre inconnu de citoyens ne participant pas au vote, un total situé entre deux et trois mille habitants libres : cette population dorénavant s’ajoutait au corps civique éphésien39.

    17Des agrandissements territoriaux par synoecisme ou annexion ont encore eu lieu par la suite, vers l’intérieur, à l’exemple de Milet40. Les années 270-140/120 av. J.-C. n’ont pas laissé de documentation abondante, puisque l’agora occidentale, à proximité du port, où ont probablement été affichés les décrets des IIIe-IIe siècles, n’a pas été fouillée. On est en droit de supposer que la cité compte désormais un corps civique nettement plus étendu que les plus de 4678 citoyens de la Magnésie du Méandre du IIe siècle av. J.-C.41 : même si dans le cas des Colophoniens et des Lébédiens l’apport durable de néo-citoyens a certainement été plus faible que prévu, il paraît raisonnable de supposer nettement plus de cinq mille, sans doute au moins une dizaine de milliers de citoyens à partir de la première moitié du IIIe siècle, sinon au-delà de 15 000, si l’on suit P. Debord42. Pourtant la majorité de la population rurale du territoire éphésien n’est à cette époque pas encore intégrée dans le corps civique.

    18Une partie de la vallée du Caÿstre appartenait aux domaines d’Artémis : si Auguste redéfinit l’extension du sanctuaire, il n’a sans doute souvent fait que confirmer l’étendue du domaine ancestral de la déesse, empiété un temps par des particuliers. On peut donc penser qu’Éphèse s’étendait dans la vallée du Caÿstre sur plus de vingt kilomètres, jusqu’à hauteur de Larisa et de Thyareinôn komè exclues, qui restaient vers 300 de petites cités indépendantes43. Un problème reste la date d’intégration de ces deux cités ou bourgs au sein du territoire éphésien. Malgré les doutes au sujet des dates des dernières monnaies émises par Larisa, le territoire civique éphésien pourrait avoir été agrandi en 129 vers l’Est, en récompense de la contribution éphésienne à la victoire contre Aristonicos, grâce à la bataille de Ladè, et avoir acquis peu ou prou ses limites d’époque impériale, mais en l’état actuel des connaissances, cette proposition n’est qu’une hypothèse de travail44. La période entre 130 et 90 correspond certainement à une croissance de la cité dans un contexte de prospérité au moins jusque vers 100, sinon au-delà45.

    19En 86 av. J.-C., en pleine guerre mithridatique, intervient un changement important pour l’étendue du corps civique : la décision de donner la citoyenneté aux hommes libres habitant le territoire de la cité et qui s’engageraient à défendre celle-ci, métèques, paroikoi, hieroi, exeleutheroi, isotèles, xenoi, et la concession de la liberté aux esclaves publics, ce qui de facto pouvait aboutir à accorder à plus ou moins long terme la citoyenneté à la majorité de la population libre du territoire46. À notre connaissance, les décisions civiques à ce sujet n’ont pas été remises en cause par Sylla, qui a seulement puni des meneurs, fait rattraper les esclaves fugitifs et levé des contributions extraordinaires47.

    20Éphèse devient, à partir de Sylla probablement, la capitale de la province d’Asie, et connaît à la fois l’implantation réussie de Romains, d’Italiens et de leurs affranchis qui quittent massivement Délos après les événements de 88 et 69 av. J.-C.48, mais les immigrants viennent aussi d’Italie. La prospérité serait éclatante vers le changement d’ère : Strabon dit que de son temps « la cité grandit chaque jour ».

    Étendue et importance de la cité à l’époque impériale

    L’importance de la ville

    21À l’époque impériale toute une série d’écrivains vantent l’importance d’une cité en passe d’être une véritable « mégapole » selon l’échelle d’évaluation antique. Strabon affirme qu’Éphèse « est le premier marché de ce côté du Taurus ». Pline l’Ancien l’appelle l’autre gloire de l’Asie, « (les maisons) sont portées par le mont Pion », et Sénèque en parle comme d’une ville digne d’être comparée à la capitale de l’Égypte : « Éphèse ou Alexandrie ou tout autre lieu encore plus peuplé et encore mieux bâti49. »

    22Philostrate affirme qu’il s’agit d’une cité plus grande en étendue que toutes les autres cités d’Ionie et de Lydie ; Dion Chrysostome propose Éphèse comme modèle de cité à ses concitoyens ; Pausanias évoque l’acmè de la cité des Éphésiens ; Aelius Aristide mentionne l’étendue de son territoire, aussi bien vers l’intérieur que le long de la côte50. Les témoignages concordent et tous les écrivains voient dans la cité d’Artémis une cité de premier ordre, la plus importante d’Asie.

    23Les titres que portent certaines cités d’Asie reflètent en partie le point de vue des contemporains ; il existait certes des effets de concurrence, mais les honneurs attachés à ces épithètes devaient comporter une certaine vraisemblance. Éphèse a le titre au milieu du IIe siècle de « métropole, première cité de l’Asie51 ». Cela prouve son importance, reconnue au sein de la province.

    24L’étendue de la ville est un autre élément de la réflexion. Une superficie importante ne peut à elle seule constituer un élément d’évaluation du chiffre de population, tant les densités peuvent varier en fonction de l’importance occupée par les bâtiments publics. La surface bâtie à l’époque hellénistique était d’environ cent hectares selon F. Hueber, plus d’après la superficie admise par P. Scherrer, mais il vaudrait mieux conclure pour le moment qu’elle demeure inconnue, trop peu de sondages portant sur l’époque hellénistique ayant eu lieu.

    25À l’époque romaine Éphèse était bien plus grande et a pu atteindre 400 à 500 hectares, ce qui supposerait une partie de la superficie hors les murs52. Ces derniers délimitent en effet une surface de 340 hectares environ53, mais les parties supérieures des versants du mont Pion et de la Lepre Akte ne sont pas constructibles ; par ailleurs, les bâtiments publics, sanctuaires et gymnases, occupent des surfaces assez élevées. Néanmoins une partie des collines était urbanisée, les maisons montant « à l’assaut » des pentes. Les Hanghaüser, et surtout le versant qui leur fait face, avec des restes architecturaux visibles beaucoup plus élevés en altitude, plusieurs dizaines de mètres au-dessus de l’embolos, le prouvent, malgré l’absence de fouilles étendues54.

    26L’existence d’une « banlieue » paraît certaine par comparaison avec d’autres grandes villes et d’après de récentes découvertes archéologiques : le quartier de Coressos, au Nord de la ville, longeait le port sous le théâtre et se poursuivait vraisemblablement au-delà des remparts au Nord du stade. Il correspondait sans doute en partie à un quartier jouxtant le port antique55. Devant la porte de Magnésie, au-delà des remparts, à l’Est, se trouvaient des quartiers artisanaux56 : des travaux modernes de canalisation ont révélé des accumulations de déchets de poteries et des éléments de fours, ainsi que des amphores. Il est permis de supposer que non loin se situaient des quartiers d’artisans, tout au moins le quartier des potiers-céramistes. D’abondants débris céramiques laissent également supposer au Sud-Ouest de la ville la présence d’activités artisanales, en particulier la présence d’amphores57. Ce sont au moins trois quartiers ou aires artisanales qui se situaient hors les murs : les dimensions maximales de la ville ne sont donc pas clairement délimitées, et il importe de retrouver les grandes nécropoles, à proximité, afin de préciser quelque peu les limites des faubourgs.

    L’étendue du territoire éphésien

    27Elle constitue un autre élément d’importance pour l’évaluation, non seulement de la population de la ville, mais aussi des éléments ruraux de la cité. Certes, la superficie cultivable est, plus que la surface totale de la cité, le critère déterminant, mais la surface non utilisée pour les cultures peut apporter d’autres ressources, comme des herbages ou du bois sur les versants des zones montagneuses. Or, force est de reconnaître que l’historien ne dispose pas d’une grande quantité de documents irréfutables pour l’ensemble des limites territoriales de la cité. Éphèse n’a pas livré pour le moment d’acte de délimitation avec un descriptif de la frontière, comme il en existe pour différentes époques à Magnésie du Méandre, Priène, ou Delphes58.

    28D. Knibbe a discuté les limites du territoire éphésien, mais c’était avant la découverte de certaines bornes des domaines d’Artémis. L. Robert s’est exprimé dans le Bulletin épigraphique, à l’occasion de l’examen critique du volume épigraphique du repertorium concernant la chôra59, en s’élevant avec virulence contre « l’annexionnisme » des archéologues et épigraphistes germaniques60. Cette prise de position, mise au point salutaire mais nécessairement limitée, confrontée aux sources antiques et aux trouvailles épigraphiques, doit constituer le point de départ de toute réflexion. Enfin, la publication de quelques nouvelles bornes conduit à étendre quelque peu le territoire contrôlé par la cité. Il faut rappeler qu’aucun survey du territoire éphésien n’ayant été publié, il existe de toute façon des incertitudes au sujet de l’étendue totale du territoire, en particulier au niveau de l’existence de frontières précises en zone montagneuse.

    29Il a été signalé plus haut que le territoire éphésien d’époque classique était plus petit. Strabon précise qu’après le Cap Mycale, on longe la côte des Éphésiens, dont une partie dépend cependant de Samos. Le territoire au Sud a été étendu à au moins deux reprises, au moment de la fondation lysimachéenne, avec la fin de l’indépendance de Phygela, et à une date inconnue durant l’époque hellénistique, qui ne va pas sans poser le problème de la limite entre le territoire éphésien et la pérée de Samos : la limite de cette dernière se situait au Sud du Kenchrios61. Marathésion appartenait encore semble-t-il à haute époque hellénistique à la pérée de Samos : c’est Strabon qui nous apprend que ce lieu a été obtenu par Éphèse des Samiens en échange de Neapolis. L’appartenance du Panionion ne pose pas de difficulté : c’est Priène qui à l’époque hellénistique avait la charge de son administration, car Priène possédait une petite portion de côte qui coupait en deux parties la pérée samienne62. La frontière avec Magnésie reste quelque peu imprécise ; il serait étonnant que l’on ne retrouve pas un jour des bornes de délimitation sur ou au pied du Pactyès, terminaison de la Mésogée. Le Pactyès dépend d’après Strabon d’Éphèse. En tout cas, si l’appartenance au territoire d’Éphèse de l’actuel Çamlik-Azizie est possible, la zone du Thorax fait problème, et le site de Naipli au Nord-Est ne faisait sans doute plus partie du territoire civique63.

    30La limite Nord-Nord-Ouest de la cité doit être étendue depuis la publication en 1999 d’une borne d’Artémis datant de Domitien trouvée in situ à Yeniköy, à très peu de distance de la ville de Metropolis64. La montagne du Gallésion servait sans doute à l’origine de zone des confins entre Éphèse, Metropolis et Colophon-Claros, mais il semble qu’elle constituait désormais une limite précise, le marais au pied de la montagne (stagnum Pegaseum) appartenant sans doute au sanctuaire éphésien. Il n’est donc pas impossible que la montagne ait relevé d’Éphèse à l’époque impériale en raison de la situation excentrée de la borne d’Artémis65.

    31Il est probable qu’Éphèse a pu s’agrandir dans la vallée du Caÿstre jusqu’à la fin du IIe siècle av. J.-C., si la refondation lysimachéenne ne s’étendait pas dès l’origine au-delà de Larisa : le décret de 86 qui accorde la citoyenneté éphésienne aux paroikoi66 ne vise peut-être pas les paysans de la partie de la vallée du Caÿstre à l’Est de Métropolis, assez proches de la côte, qui depuis des siècles appartenaient au territoire civique, mais des communautés rattachées plus récemment, plus à l’Est, correspondant aux territoires de Larisa et de l’actuelle Tire. En tout cas « une grande partie de la vallée faisait partie du territoire même d’Éphèse, au delà de Larisa67 et de Tire68, jusqu’aux frontières d’Hypaipa et de Dios Hieron69 » ; Dideiphita appartint sans doute à Hypaipa avant d’être autonome.

    32Néanmoins, à défaut de l’existence de survey publié, des inscriptions renseignent sur l’appartenance d’une bonne dizaine de villages et de bourgs au territoire éphésien. Par ailleurs, les communautés villageoises des Bonitai et des Akènoi cotisent lors de la grande souscription des années 20, sous Tibère, ce qui laisse supposer une certaine intégration dans les structures de la cité, mais probablement incomplète, puisqu’ils cotisent aux côtés des Grecs et des Italiens70. Voici la liste des villages éphésiens71 :

    Nom

    Source

    κατοικία des Ἀ κηνοί

    V, 1687

    Βονειτῶν κατοικία

    VII, 1, 3221

    Ἀπατεφηνῶν κατοικία

    VII, 1, 3249

    Ἀλμουρηνῶν κατοικία

    VII, 1, 3250

    Μαγνολῶν κατοικία

    VII, 1, 3253

    κατοικία τῶν’ Αλινδηνῶν

    VII, 1, 3262

    Βουκολιανῶν κώμη

    VII, 1, 3276

    Σικλιανῶν κατοικία

    VII, 1, 3287 A

    Λαρεισηνῶν κατοικία

    VII, 1, 3272

    Θυαιρηνῶν κώμη

    VII, 1, 3292

    Διαγυρηνῶν (κατοικία) ?

    VII, 1, 3218

    Λατορηνῶν κώμηa

    ΕA, 37, 2004, p. 185

    a. H. Beden et H. Malay, « The Latorènoi in the Cayster Valley », Epigraphica Anatolica, 37, 2004, p. 185-186.

    33Le problème essentiel pour la superficie du territoire éphésien est de savoir s’il convient d’inclure les versants du Tmolos et de la Mésogée dans le calcul : apparemment J. Kobes ne l’a pas fait, car il estime la superficie du territoire éphésien à 541 km2, sans doute dans le cadre d’une réflexion sur le territoire agricole utilisable72. Certes, la montagne est par excellence la zone des confins, des eschatiai : on sait bien que ces zones marginales servaient à l’élevage et à la production de bois de construction ou de charbon de bois73, et C. Chandezon a montré aussi pour des territoires voisins en Ionie l’utilisation de zones accidentées comme pâturages74. J’ajoute qu’un village comme la Siklianôn katoikia se situant en hauteur (au moins 500 m ?) sur un versant qui paraît avoir été économiquement utilisé75, me conforte dans l’idée de prendre les lignes de crête comme frontières ; je serais par ailleurs fort étonné que l’Ionie densément peuplée de l’époque impériale laisse subsister des terres au statut imprécis. J’estime par conséquent qu’il est raisonnable, au moins au titre d’hypothèse de travail, d’ajouter les versants dans le calcul du territoire76. Ainsi le territoire éphésien avait une superficie double de ce qu’admet J. Kobes, de l’ordre de 1 200-1 300 km277.

    34Aussi peut-on proposer à titre provisoire, en attendant des vérifications de terrain, les limites suivantes : au Sud, la limite sur le Cenchrios, au Sud de Marathesion et de Phygela, puis une relative incertitude par rapport à Magnésie, la frontière étant inconnue dans la zone du Thorax ; au Nord-Ouest, le temple et/ou la cité possèdent le mare Stagnum, sinon la montagne du Gallesion ; le territoire civique s’enfonce dans la vallée du Caÿstre, entre Tmolos et Mésogée, en comprenant les versants, au moins ceux surplombant la vallée du Caÿstre ; Larisa est une katoikia éphésienne, alors qu’à quelques kilomètres se situent deux cités indépendantes, Dideiphyta et Dios Hiéron, ou le territoire des Kilbianoi78. En incluant les versants, on obtient un territoire civique formant un rectangle-losange très allongé vers l’Est : le territoire s’orienterait selon un quadrilatère oblong Sud-Ouest/Nord-Est, d’environ 15-30 km selon un axe N-S et de 40 à 50 km selon un axe O-E.

    Estimation de la population

    35Les données précédentes, les attestations littéraires de l’importance d’Éphèse, l’étendue de son territoire, l’importance par ailleurs de cultures spéculatives, d’un artisanat varié et d’un commerce développé, permettent théoriquement d’envisager un chiffre assez élevé de population, bien au-delà de la densité 40-50 h/km2, qui est à la fois la norme maximale, jusqu’à l’époque moderne incluse, de densité compatible avec les ressources agricoles locales, et celle à partir de laquelle les problèmes dus aux mauvaises récoltes s’aggravent considérablement. Éphèse ressemblerait ainsi à Athènes : et comme pour Athènes, les estimations de chiffres de population restent incertaines et sujettes à des oscillations parfois considérables.

    L’évolution historiographique

    36Les propositions des savants ont en effet varié. K. J. Beloch évoque 225 000 personnes pour l’époque impériale : ce chiffre ne concerne que la population intra muros79. T.R.S. Broughton croit à une population de 400 000 habitants, addition de la ville et du territoire80. Les remarques de F. Jacques, pour qui il est prouvé qu’Éphèse a une population de 40 000 citoyens mâles adultes d’après une inscription de la ville81, ne sont plus de mise, car le texte invoqué a sans doute été mal lu : R.S. Bagnall a proposé de lire 1 040 personnes au lieu de 40 00082. Cependant H.W. Pleket et C.R. Whittaker ont pu débattre, mais pour finalement en récuser l’idée, d’une population éphésienne de près de 400 000 habitants, ce qui en réalité correspondait au nombre proposé jadis par Broughton83 ! J. Kobes reprend tel quel le chiffre de K.J. Beloch, tout en faisant aussi remarquer les doutes qui pèsent depuis l’article de R.S. Bagnall et P.D. Worden sur le chiffre des citoyens éphésiens84.

    37Quant à C. Nicolet, s’il a fourni un chiffre différent, de l’ordre de « ca 100 00085 », c’est que cette dernière estimation s’applique d’après le contexte à la ville elle-même, « hors chôra », et constitue à ma connaissance la seule tentative récente pour chiffrer la population urbaine de la cité d’Artémis86. Elle aboutit, certes de manière très hypothétique, à un chiffre moitié inférieur à celui retenu par le pionnier des études démographiques antiques.

    38Les remarques des historiens divergent parfois sensiblement et distinguent mal données concernant la cité dans son ensemble de celles de la seule ville87. Surtout, si les documents explicites font défaut, n’y a t-il pas moyen d’avoir recours à une autre méthode d’estimation, afin de mieux asseoir un nouveau mode de calcul ? Il m’a semblé que la question méritait d’être reprise et que l’association de deux démarches pouvait s’avérer fructueuse : il paraît en effet possible de combiner des critères impressionnistes déjà évoqués, déduits de la confrontation de textes antiques avec l’espace archéologiquement fouillé et des notions disponibles quant à l’étendue du territoire civique, avec un calcul qui combine les données relatives aux citoyens aux connaissances démographiques actuelles, contrôlé par les chiffres figurant dans un projet de distribution destiné aux éphèbes.

    Le nombre des chiliastyes et les conséquences pour la population

    39On sait qu’entre la refondation lysimachéenne et Caracalla le nombre de tribus éphésiennes est passé de cinq à huit, mais le phénomène pourrait s’expliquer par la volonté de rendre hommage à un empereur, puisque les trois tribus supplémentaires sont dites Sébastè, Hadrianè et Antoninianè. Les démonstrations doivent s’appuyer sur la notion de chiliastye, subdivision de la tribu. En l’occurrence, Éphèse paraît favorisée, puisque l’épigraphie fait connaître une abondante documentation relative aux chiliastyes : l’historien dispose pour l’époque hellénistique des décrets de citoyenneté des années 325-280 av. J.-C., pour l’époque impériale des nombreuses listes de naopes. Les deux catégories de documents indiquent la tribu et la chiliastye des néo-citoyens et naopes. La documentation s’est d’ailleurs beaucoup étoffée depuis les remarques de K.J. Beloch : alors que le savant allemand faisait état d’une trentaine de chiliastyes, M. Piérart en cite 44, et H. Engelmann 45, voire cinquante88.

    40La définition d’une chiliastye paraît simple au premier abord : un groupe civique de 1 000 citoyens. Néanmoins, un certain nombre de faits peuvent conduire à émettre des doutes : la possible existence dès l’époque classique d’un système rigide de 5 tribus à raison de 6 chiliastyes par tribu selon J. Keil entraînerait l’invalidation de toute explication du mot par un sens numérique, le nombre de citoyens à cette haute époque étant bien inférieur à 30 000 ; quant à M. Piérart, tout à l’analyse des subdivisions civiques ioniennes, il ne propose aucune évaluation chiffrée du corps civique et ne discute donc pas le sens numérique du terme. P. Debord croit cependant à la réalité de cette définition, au moins à partir du début de l’époque hellénistique, selon lui époque de sensible accroissement de la population civique89. J’ajoute que la démonstration de J. Keil n’est pas prouvée, et que, sans penser obligatoirement à des subdivisions comptant forcément un chiffre extrêmement proche de 1 000 personnes (le système de répartition par tirage au sort à l’époque hellénistique laisse à penser qu’il y avait de la place dans une chiliastye pour un néocitoyen), il est permis de supposer un nombre de citoyens par chiliastye certes inférieur dans la pratique à 1000, mais qui ne peut en être radicalement éloigné, sous peine de dénaturer le concept même de chiliastye90.

    41La population de la cité se compterait en dizaines de milliers de citoyens : les fourchettes qui suivent ne visent qu’une certaine vraisemblance. Les 45 à 50 chiliastyes existantes ou restituables donneraient 45 000-50 000 citoyens théoriques, et nous ne connaissons certainement pas toutes les chiliastyes, même en en rajoutant à la tribu Sebastè. Tel quel, l’état actuel des connaissances impliquerait 30 000 à 45 000 citoyens mâles adultes au moins, en admettant l’inscription vers 18 ans du jeune citoyen dans sa chiliastye, et en tenant compte de chiliastyes à effectifs réels quelque peu inférieurs à 1 000 individus. L’ajout des femmes et des enfants aux hommes adultes, ces derniers comptant pour environ deux septièmes de l’ensemble des citoyens, donnerait un corps civique de 100/110 000 à 150/160 000 citoyens et citoyennes de tous âges et sexes. À ce total, il convient d’ajouter les étrangers dont le nombre nous est inconnu, mais qu’il faudrait au moins compter pour 20 000 ou 30 000 ( ?) : si l’immigration-installation en provenance de l’Asie Mineure est bien attestée pour des notables de cités plus petites de l’intérieur, on peut la soupçonner aussi pour des couches de population plus modestes d’après la documentation hellénistique et ce que l’on sait du rôle de tout port91. Enfin, si les esclaves devaient former un tiers de la population comme à Pergame92, il faudrait rajouter encore 60 000 à 90/100 000 personnes de statut servile, ce qui ferait environ 180/200 000 à 250/290 000 personnes. Comme il y avait certainement plus d’une chiliastye dans les tribus VII (Hadrianè) et VIII (Antoninianè), le nombre d’habitants maximal aurait pu peut-être atteindre 300 000 individus. Les 400 000 proposés par T.R.S. Broughton ne sont possibles que si la part des étrangers devait s’avérer grossièrement sous-estimée, ou si malgré tout une partie de la population rurale n’avait pu accéder à la citoyenneté. Je crois cependant ce chiffre de 400 000 exagéré.

    42Les évaluations hautes ne doivent pas être rejetées d’emblée : la fondation de Vibius Salutaris prévoit une distribution pour les éphèbes, pour lesquels s’applique un tirage au sort prévoyant 9 as pour 250 éphèbes, si la restitution est exacte. Comme le chiffre ne représente qu’une proportion des éphèbes, ceux qui ont été tirés au sort, et que l’éphébie durait 1 ou 2 ans sans doute, l’effectif des éphèbes par classe d’âge se situait entre 250 et 1 000 personnes environ, sans inclure probablement une proportion inconnue de pauvres. Ce chiffre invite également à situer le chiffre des citoyens mâles en dizaines de milliers. H.W. Pleket propose 120 000 citoyens, en incluant les familles93. Le chiffre pourrait être trop bas pour le milieu du IIe siècle.

    43Évidemment, ces calculs ne se veulent que des estimations grossières. Les données concernant les étrangers et les esclaves en particulier demandent une part d’arbitraire plus grande que les données civiques. Néanmoins, l’épigraphie locale honorifique ou funéraire laisse soupçonner un grand nombre d’esclaves : beaucoup de textes funéraires évoquent des affranchis, par ailleurs auteurs de bien des dédicaces ; on sait aussi que la cité était un lieu de vente d’esclaves94.

    44Il est donc vraisemblable que la cité dans son ensemble comptait vers 160-165 un nombre total d’habitants situé entre 200 000 et 250 000 personnes.

    45Un esprit critique peut de prime abord se montrer étonné de l’ampleur de ces estimations, lorsque l’on regarde ensuite l’étendue probable du territoire civique, en particulier les terres arables. Mais il est certain qu’il y avait possibilité d’importer de la nourriture. Il est notoire que bien des cités d’Asie devaient structurellement importer une bonne partie de leurs céréales, en raison de la surface occupée par les hauteurs, des choix de cultures en faveur d’oliviers, de légumes, de vin, de produits textiles (artisanat du lin)95, de l’élevage en montagne de moutons pour la laine, du niveau assez élevé de population, capable par ailleurs de consommer des surplus de cultures spéculatives, ce qui ne laissait au total que peu de place pour les céréales96. Éphèse importe du blé dès l’époque hellénistique et à plusieurs reprises la présence de céréales égyptiennes est encore avérée à l’époque impériale : les quelques occurrences conservées ne représentent probablement que la partie émergée de l’iceberg97.

    Les dynamiques de population

    La croissance entre le Ier siècle av. J.-C. et 165-166

    46Les mouvements de population demeurent hypothétiques aux IIIe-IIe siècles avant notre ère. Le Ier siècle avant notre ère après la première guerre mithridatique a été une époque de croissance : le retour des publicains, l’installation d’une bonne partie des survivants de la colonie délienne, composée d’Italiens, de leurs affranchis et de leurs descendants, ainsi que l’essor constaté au tournant de l’ère par Strabon, tout concourt pour affirmer qu’Éphèse était en train de devenir la première cité d’Asie Mineure.

    47On peut tabler sur un minimum de quelques dizaines de milliers d’habitants de la ville (astu) au moins depuis le Ier siècle avant notre ère98, et peut-être deux fois plus de ruraux ; cette estimation semble un ordre de grandeur acceptable. Il paraît certain que, grâce à la paix retrouvée, à d’autres indices aussi, les nouvelles constructions et la comparaison de Sénèque entre Éphèse et Alexandrie99, les grands programmes de construction, l’extension de la surface bâtie, y compris sur les versants, le gain de terres aux dépens de terres marécageuses, le nombre croissant de constructions en élévation à partir du IIe siècle100, témoignent d’un processus de croissance. Cette tendance est confortée par le passage de cinq à huit tribus entre l’époque tardo-hellénistique et le IIIe siècle, par l’effectif des éphèbes en 103/4, par l’absence d’épidémies universelles jusqu’en 165/6101, pour autant que nous sachions. La population a dû sensiblement augmenter entre le Triumvirat et les premières années du règne de Marc-Aurèle.

    48Il convient d’ajouter un autre phénomène, souvent occulté ailleurs dans l’Empire en raison de l’absence de sources : les migrations intérieures. Les installations d’Italiens, de leurs esclaves et affranchis au Ier siècle av. J.-C. ont été rappelées ci-dessus. J’avais moi-même pu constater durant mon doctorat un autre phénomène, le fréquent renouvellement des familles de notables. Il passait certes par la mobilité sociale, et les promotions de médecins, d’athlètes, de grammatikoi, de descendants d’affranchis ne sont pas rares102. Mais il existait également une mobilité géographique, qui passait par l’intégration de nouveaux arrivants, familles immigrées de notables plus ou moins importants, membres d’un des deux ordres (il y a un sénateur, Iulius Celsus Polemaeanus), grands-prêtres, notables municipaux en voie d’ascension sociale, intellectuels, venus d’autres cités d’Asie Mineure. L’immigration de gens d’humble origine est probable elle aussi, mais les documents précis manquent. Le phénomène d’attraction d’Éphèse à l’égard de cités plus petites paraît sensible, et s’exerce sur des villes comme Magnésie du Méandre et Hypaipa : Éphèse dominait un hinterland qui reste en partie à définir. Les phénomènes migratoires ont aussi intéressé L.M. White, qui a opportunément rappelé l’existence d’un passage de Philostrate pouvant souligner l’importance de l’immigration à Éphèse. Très pessimiste quant à l’accroissement naturel dans les grandes villes, il explique la croissance de la capitale de l’Asie grâce à une importante immigration venue des cités immédiatement voisines et plus largement de Lydie, Phrygie, Carie… Il a dans le même article recensé les étrangers connus par l’épigraphie103. Éphèse a toujours eu une population assez mêlée, qui a fait souvent montre de dynamisme démographique.

    49Cette impression de cité fort peuplée, qui connaît un sensible accroissement de sa population, me paraît confirmée par les données archéologiques provenant d’autres cités d’Asie Mineure : la présence de cités en altitude comme Termessos, Oinoanda et Sagalassos, bien que déjà attestées à l’époque hellénistique, leur croissance et leur prospérité laissent à penser que vers 160, peut-être à nouveau en bien des endroits vers 220, l’Asie Mineure connaissait une surpopulation relative, eu égard aux ressources agricoles locales et aux choix de récoltes, et que l’on avait affaire à un monde plein eu égard aux possibilités économiques de l’époque.

    L’impact de l’épidémie : crise sous Marc Aurèle ; les incertitudes sévériennes

    50L’épidémie qui frappe l’Empire à partir de 165 jusque dans les années 170 a fait l’objet d’une foule de travaux récents à la suite de l’article de R. P. Duncan-Jones104. Il est difficile de proposer un chiffre des pertes en Asie Mineure, mais elles ont dû être assez élevées, car l’inquiétude avait saisi la population : le nombre d’oracles de Claros retrouvé semble attester un climat d’angoisse ; par ailleurs, divers indices laissent postuler l’existence d’importantes crises de subsistance durant la seconde moitié des années 160105.

    51Un autre indice, éphésien celui-ci, qui ne concerne que l’étroite frange de l’élite, ces notables qui fournissaient ou étaient susceptibles de fournir magistrats et bouleutes, à savoir deux ou trois pour cent de la population au maximum, est la place des femmes exerçant certaines magistratures ou liturgies : leur nombre augmente à la fin des années 160 ou au début des années 170. En effet, les prytanes du dernier tiers du IIe siècle sont pour environ un tiers des femmes106. L’épidémie n’a pas été sans conséquences dans la ville, qui a certainement perdu en quelques années une proportion inconnue, mais non-négligeable, de sa population. Peut-être les modifications constatées pour les prytanes s’expliquent-elles par les contraintes démographiques de certaines familles : il ne restait probablement qu’un ou deux enfants survivants, des filles107. Même en supposant qu’il s’agisse d’un hasard documentaire, et que de nouveaux documents modifient un jour les reconstitutions des familles, il paraît incontestable que les années 165-180 représentent une césure à l’intérieur du Haut-Empire. D’autres changements apparaissent, cette fois dans l’épigraphie : on note le développement des concours ainsi qu’une certaine augmentation des distributions d’huile, de nourriture et d’argent108, comme s’il s’agissait de pourvoir aux distractions et aux besoins d’une population en partie appauvrie, au sein de laquelle les clivages sociaux se seraient accentués.

    52Le caractère de la période sévérienne pose problème : y eut-il récupération démographique, en d’autres mots assista-t-on à une reprise à partir des années 180 ou 190, ou la ville et son territoire vécurent-elles sur des bases réduites par rapport aux deux premiers tiers du IIe siècle ? L’arrêt des grands programmes de construction n’est pas en lui-même une preuve : en effet, Éphèse étant largement pourvue avec plusieurs gymnases-thermes, un stade, un théâtre, un odéon, la cité pouvait se contenter d’entretenir le parc immobilier existant109. Par ailleurs, l’épigraphie reste très active au moins jusqu’aux années 220 et les cadres civiques fonctionnent, même si on peut s’interroger quant à la spontanéité de l’esprit de compétition des grandes familles à cette époque. L’époque sévérienne offre des indices contradictoires qu’il s’agira de mieux interpréter lorsque les documents seront plus nombreux et peut-être moins ambigus.

    53Les auteurs sont assez prudents quant à l’interprétation de la fin du IIe et du début du IIIe siècle. Il convient de prendre en compte et de discuter les deux articles de L.M. White et de P. Scherrer110. La croissance s’est encore poursuivie semble-t-il durant le premier tiers du IIIe siècle pour F. Hueber111 : si la plus grande phase de croissance urbanistique se situe sous les Antonins, avec une densification de l’habitat et l’existence hypothétique de véritables immeubles de rapport, peut-être à proximité du port, les derniers aménagements et extensions d’importance se situent tout de même à l’époque des Sévères. J’ajoute que le port fonctionne et est restauré ou curé à cette époque, ce qui paraît témoigner d’une activité maintenue112.

    54Les impressions demeurent cependant contradictoires. En effet, l’entretien d’un énorme parc immobilier peut avoir parfois dépassé la capacité de la cité, ce qui pose le problème d’un appauvrissement éventuel à l’époque sévérienne : les archéologues ont parfois constaté la présence de matériaux de remploi, dès l’époque de Sévère Alexandre dans le portique rénové par le bienfaiteur et magistrat Fulvius Publicianus Nicephorus113. Il est vrai qu’on ne peut totalement exclure un choix plus économique ou plus pratique, la réutilisation des pierres d’un bâtiment vétuste à proximité : il n’y a pas (pas encore ?) forcément, comme on l’a longtemps cru, une preuve d’un appauvrissement de la communauté. Il ne peut donc être exclu qu’Éphèse vers 200-240 était encore proche de l’ampleur de la ville du début des années 160, mais les derniers indices discutés ne nous renseignent guère quant à l’effectif total de la population du territoire civique, et nous butons sur un problème d’interprétation de sources assez peu nombreuses, de surcroît disparates et ambiguës.

    Conclusion

    55La cité a connu une grande transformation territoriale et démographique durant une évolution entre le Ve siècle av. J.-C. et la fin de l’époque hellénistique. Éphèse, cité d’importance encore relative dans les listes de tribut, connaît au IVe siècle, grâce à un certain essor régional micrasiatique et à d’abondantes frappes monétaires, un réel processus de croissance, qui entraîne une essor démographique significatif se poursuivant certainement encore sous les Diadoques.

    56Mais c’est la refondation lysimachéenne qui implique de profonds changements ; changements territoriaux, par des agrandissements, temporaires dans le cas de Lébédos et de Colophon, encore que tous leurs habitants n’ont probablement pas pris le chemin du retour lorsque leurs cités ont à nouveau recouvré leur existence propre, ou changements définitifs, dans le cas des annexions opérées vers le Sud, qui englobaient Phygela et Marathesion dans le territoire civique ; l’extension atteint parfois des limites incertaines aux yeux des modernes pour ce qui concerne le petit « Drang nach Osten » d’Éphèse. La cité englobait peut-être déjà Larisa vers 294, encore que 129 constitue une date également possible pour son annexion avec le bourg peu éloigné de Tire. L’incertitude des dates s’explique en raison de documents numismatiques trop peu nombreux à mon sens pour pouvoir affirmer que les frappes autonomes de Larisa ont cessé dès 300-290. Les conséquences démographiques sont sensibles, puisque le corps civique connaît un accroissement considérable et dépasse sans doute déjà nettement 10 000 personnes. Si les IIIe-IIe siècles restent globalement obscurs pour l’évolution de la cité, le dernier siècle hellénistique ne voit pas seulement les horreurs de la guerre mithridatique, mais aussi l’installation durable d’immigrants italiens et de leurs gens, pendant que la population rurale accède dans une proportion inconnue au corps civique.

    57Les limites du territoire définitif de la cité ne sont pas aussi bien connues qu’on le souhaiterait, mais les documents littéraires et épigraphiques font entrevoir une superficie importante d’environ 1200-1300 km2. Ce territoire, certes en majorité montagneux, cependant intensément peuplé et parsemé de nombreux villages, s’étend de la mer à Larisa, d’Ouest en Est, et du Tmolos à Marathesion compris et Anaia exclue, du Nord au Sud. Il comprend certainement les versants du Tmolos et de la Mésogée orientés vers la plaine du Caÿstre, mais on ne sait pas très bien si le versant Sud du Tmolos a pu en totalité ou partie relever d’Éphèse. La frontière avec Magnésie reste mal connue, de même que le statut du Gallesion, zone de confins ou propriété éphésienne : la cité d’Artémis s’étendait en tout cas presque jusqu’aux portes de Metropolis.

    58Malgré les estimations parfois contradictoires des modernes, Éphèse connaît une expansion démographique certaine durant le Haut-Empire, soulignée par plusieurs auteurs anciens. Malgré les incertitudes au niveau de la chiliastye, une utilisation prudente de la connaissance des subdivisions civiques, contrôlée par ce que l’on peut savoir du nombre des éphèbes, permet d’aboutir à une estimation relativement haute de la population, comprise entre 200 000 et 250 000 personnes au IIe siècle. Cet essor implique une croissance sensible entre le Ier siècle av. J.-C. et le règne de Marc Aurèle, dans laquelle l’immigration en provenance du reste de l’Asie Mineure a joué un rôle sans doute important : l’impact de la « pestilence » antonine, la situation alimentaire parfois précaire et divers autres indices invitent à ne pas rejeter une estimation élevée de population avant les premières difficultés, malgré une densité urbaine qui n’apparaît pas toujours très forte. Le règne de Marc Aurèle correspond incontestablement à une crise démographique, mais on ne sait trop si l’époque des Sévères renoue avec une réelle prospérité et constitue une phase de récupération démographique, ou si l’amélioration, relative, ne se situe que par rapport aux difficultés rencontrées par l’empereur philosophe, sans retrouver les niveaux d’avant 160-165.

    59La crise sévit en tout cas incontestablement à partir des années 240-250 au plus tard. Aucun agoranome n’est plus cité sur pierre après 220-230, et la série des inscriptions municipales en l’honneur des magistrats municipaux s’interrompt sous Philippe l’Arabe : le dernier secrétaire du peuple connu date de 244-249. Surtout, la pression fiscale qui s’accentue en raison du danger barbare, la récession économique, probable à l’échelle de l’Empire, les difficultés accrues de navigation en raison de la renaissance de la piraterie, une nouvelle épidémie à partir des années 250, enfin le grave séisme de 262, ont dû entraîner un déclin démographique. Les signes d’un déclin ne manquent pas à Éphèse même : l’îlot Hanghaus II est presque totalement abandonné ; la bibliothèque de Celsus, qui a brûlé en 262, est plus tard transformée en nymphée, l’agora n’est pas entièrement relevée avant le dernier quart du IVe siècle. Mais on ne sait si le territoire rural a été ravagé par les Goths. On peut cependant supposer une baisse sévère de la population durant le troisième quart du IIIe siècle.

    60Toutes ces données sont le résultat d’investigations historiques et épigraphiques, parfois complétées par des éléments d’archéologie urbaine. Il manque toujours les résultats d’un travail d’équipe, synthèse d’une prospection sur le terrain. Un survey devrait avoir pour objectif de vérifier que la chôra avait bien une densité d’occupation élevée, de nature à confirmer les estimations numériques un peu théoriques tirées des données du corps civique, et d’identifier les ruines subsistantes des villages antiques. Ce n’est qu’à ce prix que l’on pourra mieux connaître l’emprise territoriale et les densité et dynamisme démographiques d’Éphèse durant l’Antiquité.

    Image

    Le territoire de la cité d’Éphèse.

    Bibliographie

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    Notes de bas de page

    1 Je tiens par ailleurs à remercier C. Pebarthe, O. Casabonne, C. Barat pour diverses remarques et relectures concernant le présent article ; les résultats doivent beaucoup à des discussions avec P. Scherrer, qui m’a fourni des précisions concernant les fouilles de l’agora ; il va de soi que les erreurs éventuelles sont miennes.

    2 À signaler cependant la courte discussion des limites territoriales de la cité dans D. Knibbe, s.v. Ephesos III. 1, RE Suppl. XII, 1970, col. 270-271 ; brèves remarques concernant l’époque classique dans M.H. Hansen et T.H. Nielsen, An Inventory of Archaic and Classical Poleis, Oxford, 2004, p. 1070-1073, s.v. Ephesos.

    3 Le professeur turc R. Meriç est cependant l’auteur d’un travail pionnier sur la chôra éphésienne, qui recense les ruines visibles, en particulier l’architecture militaire hellénistique. Il utilise des chiffres de production datant de l’époque où l’agriculture turque pratiquait des méthodes de culture traditionnelles, afin de fournir quelques données de nature à nourrir la réflexion historique relative aux ressources du territoire durant l’Antiquité. Ce travail inédit devrait paraître prochainement à Vienne. Il est aussi question à l’ÖAI de lancer une recherche de plusieurs années sur la chôra éphésienne, dont les résultats pourraient alors être comparés aux travaux de même type déjà accomplis sur le territoire milésien : pour ce survey, cf. H. Lohmann, « Survey in der chôra von Milet. Vorbericht über die Kampagnen der Jahre 1990, 1992, und 1993 », AA (1995, 2), p. 293-333 ; id., « Survey in der chôra von Milet. Vorbericht über die Kampagnen der Jahre 1994 und 1995 », AA (1997, 2), p. 285-311 ; id., « Survey in der chôra von Milet. Vorbericht über die Kampagnen der Jahre 1996 und 1997 », AA (1999, 3), p. 439-473. Pour comparaison, bilan de réflexions méthodologiques et de résultats de prospections par J.-N. Corvisier, « Le bilan des land surveys pour la Grèce : apports et limites », dans C. Chandezon et C. Hamdoune (éd.), Les hommes et la terre dans la Méditerranée gréco-romaine, Pallas, 64 (2004), p. 15-33 ; J.-P. Vallat, « Prospections, fouilles et perspectives d’histoire économique et sociale : l’exemple de l’Italie antique », ibid., p. 35-62 ; voir pour un bilan des campagnes de l’Asie Mineure, C. Schuler, Ländliche Siedlungen und Gemeinden im hellenistischen und römischen Kleinasien, Munich, 1998.

    4 Cf. l’article dans ce même volume d’H. Vanhaverbeke et M. Waelkens, « La genèse d’un territoire. Le cas de Sagalassos en Pisidie ».

    5 Le point sur les travaux antérieurs pour l’époque romaine dans P. Salmon, Population et dépopulation dans l’empire romain, Bruxelles, 1974. Travail novateur à l’époque de sa parution de J.-M. Lassère, Ubique Populus. Peuplement et mouvements de population dans l’Afrique romaine de la chute de Carthage à la fin de la dynastie des Sévères (146 av. J.-C.-235 apr. J.-C.), Paris, 1977 ; surtout, les articles de B. Frier, « Roman Life Expectancy : Ulpian’s Evidence », Harvard Studies in Classical Philology, 86 (1982), p. 213-251 ; id., « Roman Life Expectancy : The Pannonian Evidence », Phoenix, 37 (1983), p. 328-344.

    6 B.W. Frier et R.S. Bagnall, The Demography of Roman Egypt, Cambridge, 1994. Surtout, les travaux de W. Scheidel, Measuring Sex, Age and Death in the Roman Empire, Ann Arbor, 1996 ; id., (éd.), Death on the Nile. Disease and the Demography of Roman Egypt, Leyde-Boston-Cologne, 2001, en attendant sa grande synthèse annoncée sur la démographie antique. Mise au point sur les connaissances et les problèmes de démographie : J.-N. Corvisier et W. Suder, La population de l’Antiquité classique, Paris (collection Que sais-je ?), 2000, et sur la bibliographie de la question en histoire grecque, id., Polyanthropia-Oliganthropia, Wroclaw, 1996. Articles contestés de P. Brulé, « Enquête démographique sur la famille grecque antique. Étude de listes de politographie d’Asie Mineure d’époque hellénistique » (Milet et Ilion), REA, 92 (1990), p. 233-258 ; id., « Infanticide et abandon d’enfants. Pratiques grecques et comparaisons anthropologiques », Dialogues d’Histoire Ancienne, 18 (1992), p. 53-90, très pessimiste, qui suppose un énorme taux d’exposition des filles (50 %) et d’infanticide, ce qui paraît invraisemblable. J. Cels Saint-Hilaire, « Citoyens romains, esclaves et affranchis : problèmes de démographie », REA, 103, 3-4 (2001), p. 443-479.

    7 A. Jardé, Les céréales dans l’Antiquité grecque, Paris, 1925, proposait une densité de 36 h/km2 environ en Grèce. On sait que la population française s’est heurtée à plusieurs reprises entre le début du XIVe siècle et la fin du règne de Louis XIV à cette densité de 40 h/km2, qu’elle ne réussit à dépasser durablement ni vers 1300-1320, ni durant le troisième quart du XVIe siècle, ni vers 1630-1640, ni durant les années 1680. Ce sont les nouvelles conditions économiques permises par les révolutions agricole et industrielle, apparues progressivement à partir du milieu du XVIIIe siècle, qui permirent enfin une rupture par rapport aux contraintes anciennes.

    8 Le versement de taxes portuaires est par ailleurs attesté dans bien des cités : Thucydide, VII, 28, 4 (les Athéniens veulent instituer une taxe du vingtième sur le trafic portuaire des cités alliées) ; tarif douanier de Caunos, exemplaire d’une cité grecque, mais d’époque impériale (ier siècle apr. J.-C.) : SEG 14, 1957, 639 ; étude par G. Purpura, « Il Regolamento doganale di Cauno e la lex Rhodia in D. 14, 2, 9 », AGSP, 38 (1985), p. 273-331 ; plus largement, pour l’époque romaine, mais aussi pour la partie grecque de l’Empire, J. France, « Les portoria municipaux dans le monde romain (République et Haut-Empire) », dans Il capitolo delle entrate nelle finanze municipali in Occidente e in Oriente, Actes de la Xe rencontre franco-italienne d’épigraphie, École Française de Rome, 1996, Rome, 1999, p. 95-113.

    9 Thèse d’A. Heller, Les bêtises des Grecs. Conflits et rivalités entre cités d’Asie et de Bithynie à l’époque romaine (129 av. J.-C.-235 apr. J.-C.), Ausonius, Bordeaux, 2006, qui conclut à la primauté indiscutable d’Éphèse en matière de titres.

    10 En réalité le 1/60 du tribut versé à Athéna. On sait qu’il faut multiplier par 60 le chiffre sur les stèles pour obtenir le chiffre total du tribut versé.

    11 Plutarque, Vie d’Aristide, 24, 1. On sait qu’E. Ruschenbusch, « Tribut und Bürgerzahl im ersten athenischen Seebund », ZPE, 53 (1983), p. 125-143, a défendu l’idée d’un rapport entre le tribut versé par la majorité des cités et leur population civique ; discussion de l’évaluation dans L. Nixon et S. Price, « La dimension et les ressources des cités grecques », dans O. Murray et S. Price (éd.), La cité grecque d’Homère à Alexandre, Paris, 1992, p. 163-200, II (p. 172-180), qui arrivent à la conclusion que, plus que la population, les ressources s’avèrent primordiales dans le calcul ; même avis de B. Tenger, « Phoroshöhe und Bevölkerungszahl. Die Athener Tributlisten als Indikator für die Grösse der Einwohnerschaft einer Polis ? », dans Studien zum antiken Kleinasien III, Bonn, 1995 (= Asia Minor Studien 16), p. 139-160, qui récuse l’élément démographique en citant surtout des ports des détroits menant au Pont-Euxin, dont le tribut était élevé à cause de ressources importantes dues au commerce, ou des cités disposant aussi de ressources minières ; contra, du moins en partie, P. Brun, Les archipels égéens dans l’Antiquité grecque, Paris, 1996, p. 184-192 et 201-204, qui fait un ample usage des chiffres du tribut à des fins démographiques, même s’il estime p. 186 que le tribut donne une image déformée du potentiel total du territoire, puisqu’il mesure avant tout les revenus des îles, donc les sources de la richesse.

    12 La mesure du territoire est essentielle pour la fixation du tribut par les Perses : cf. Hérodote, VI, 42, Artapharnès mesure en 493 le territoire de chaque cité après la répression de la révolte des Ioniens, en vue du rétablissement du tribut.

    13 Si l’évaluation démographique n’envisageait sans doute que la population citoyenne masculine, les ressources en rapport avec les taxes reflètent cependant la présence et l’activité de métèques commerçants.

    14 Pour C. Pébarthe, « Thasos, l’empire d’Athènes et les emporia de Thrace », ZPE, 126 (2000), p. 131-154, et id., « Fiscalité, Empire athénien et écriture : retour sur les causes de la Guerre du Péloponnèse », ZPE, 129, (2000), p. 47-76, on a sous-estimé les revenus hors-tribut perçus par les Athéniens, donc les sources de revenus de certaines cités tributaires, en particulier la taxe portuaire.

    15 Ou, pour prendre d’autres exemples égéens comparables, Andros, qui acquitte également 12 (une seule fois), puis 6 talents avant 431, Cos (5 talents), Naxos (6 talents 4 000 drachmes) ; cette dernière île passait pour être très peuplée à l’époque classique, avec 8 000 hoplites en 500 av. J.-C. : P. Brun, op. cit. (n. 11), p. 185 (Naxos, île peuplée, p. 110-111, en particulier la n. 224). La cité des Éphésiens apparaît dans les listes de tribut suivantes : IG I3, 259, I, 22 (454/3 av. J.-C.) ; 260, VI, 13 (453/2) ; 261, V, 13 (452/1) ; [263, V, 29] (450/449, texte en grande partie restitué) ; 265, I, 111, et II, 74 (447/6) ; 267, V, 17 (445/4) ; 268, I, 25 (444/3) ; 269, I, 31 (443/2) ; 270, I, 32 (442/1) ; 271, I, 16 (441/0) ; 272, II, 14 (440/439) ; [273, I, 27] (439/8) ; 279, I, 65 (433/2) ; 280, I, 61 (432/1) ; 289, 43 (416/5, somme non conservée) ; 290, I, 26 (415/4, idem). Le montant du 1/60 du tribut des listes varie en effet de 600 à 750 drachmes. Milet verse de 500 (par ex. IG I3, 269, I, 33) à 1 000 drachmes (par ex. IG I3, 263, V, 18).

    16 L. Nixon et S. Price, loc. cit. (n. 11 ; Éphèse : p. 197) ; cf. P. Brulé, « Introduction. Le pays et les hommes », dans P. Briant et P. Lévêque (éd.), Le monde grec aux temps classiques. I : Le Ve siècle, Paris, 1995, p. 9-10.

    17 Il paraît évident que l’auteur croit parfois trop, encore qu’il s’en défende, en une simple transcription démographique des données chiffrées du tribut, alors que les ressources du territoire constituent la base d’estimation fondamentale : L. Nixon et S. Price, loc. cit., p. 178. Les ressources élevées d’un territoire riche impliquent cependant un chiffre de population probablement lui aussi élevé, grâce aux possibilités de production et d’importation de nourriture, à la venue également de métèques et d’esclaves, attirés par le commerce ou eux-mêmes objets d’échange : ces faits paraissent conserver une certaine valeur, au moins à titre d’approximation, aux calculs de Ruschenbusch.

    18 M.H. Hansen postule même au IVe siècle un nombre de citoyens (30 000) supérieur à celui d’E. Ruschenbusch : E. Ruschenbusch, « Demography and Democracy. Doch noch einmal die Bürgerzahl Athens im 4. Jh v. Chr. », ZPE, 72 (1988), p. 139-140 ; M.H. Hansen, Demography and Democracy. The Number of Athenian Citizens in the Fourth Century B.C., Copenhague-Herning, 1985 ; id., « Demography and Democracy Once Again », ZPE, 75 (1988), p. 189-193 ; id., La démocratie athénienne à l’époque de Démosthène, Paris, 20032, p. 115-123 (trad. fr. de The Athenian Democracy in the Time of Demosthenes: Structure, Principles and Ideology, Londres, 1991) ; L. Nixon-S. Price, loc. cit., p. 191 (cf. n. 11), ne croient guère aux méthodes de calcul d’E. Ruschenbusch.

    19 K.J. Beloch, Die Bevölkerung der griechisch-römischen Welt, Leipzig, 1886, p. 229. Ce chiffre a dû se maintenir à l’époque hellénistique : P. Gauthier, « Quorum et participation civique dans les démocraties grecques », dans C. Nicolet (éd.), Du pouvoir dans l’Antiquité : mots et réalités, CCG, 1 (1990), p. 73-99, a recensé des chiffres de participants à une assemblée dans diverses cités grecques : p. 90, Magnésie du Méandre compte 4678 participants lors d’une assemblée du IIIe siècle av. J.-C. (I. Magnesia 92 a), ce qui suppose un chiffre de citoyens supérieur : on croira difficilement que Milet et Éphèse comptent à cette époque une population civique inférieure à celle de Magnésie.

    20 E. Ruschenbusch, « Tribut und Bürgerzahl im ersten athenischen Seebund », ZPE, 53 (1983), p. 125-143 (Éphèse p. 143). Autres calculs et bilans : id., « Die Zahl der griechischen Staaten und Arealgrösse und Bürgerzahl der “Normalpolis” », ZPE, 59 (1985), p. 253-263.

    21 Les Kilbianoi n’ont cependant jamais fait partie du territoire d’Éphèse. Les Helléniques d’Oxyrhynque, dans l’épisode de l’attaque des Athéniens contre Éphèse daté de 409, en indiquant un événement concernant la plaine des Kilbianoi, n’indiquent pas qu’il s’agit d’un territoire éphésien et ne sauraient servir de preuve de large étendue territoriale éphésienne. D’ailleurs le papyrus est fragmentaire et il ne s’agit que d’une restitution tentante : Hellenika Oxyrhynchia. Cairo Fragments, Col. I, l. 16 [Κιλ ?]βι[α]νωι ? πεδίωι. Il semble qu’il n’y ait pas place pour quatre lettres entre les deux caractères lisibles et le mot plaine. Les Kilbianoi font partie du territoire du conventus d’Éphèse à l’époque d’Auguste et au Ier siècle, mais pas du territoire de la cité : Pline l’Ancien, V, 31, 120.

    22 P(h)ygela : par exemple IG I3, 269, I, 29 (443/2) ; le versement de 100 drachmes (soit un tribut d’un talent) est conservé en IG I3, 272, II, 13 (440/39), et il passe à 150 (donc un talent et demi) en 432/1 (IG I3, 280, I, 47) ; Marathesion : par ex. IG I3, 270, I, 6 (442/1), versement de 50 drachmes (soit un demi-talent) ; mais en IG I3, 279, I, 16 (433/2) par ex., versement de 33 drachmes 2 oboles, soit 2000 drachmes seulement. Sur les deux cités, cf. M.H. Hansen et T.H. Nielsen, An Inventory of Archaic and Classical Poleis, Oxford, 2004, p. 1082, s. v. Marathesion, et p. 1094, s.v. Pygela.

    23 J.M. Balcer, « Fifth Century Ionia : a Frontier revisited », REA, 87 (1985), p. 31-42 (surtout p. 40), à lire avec les remarques critiques de M. Piérart à la suite de l’article (p. 42) ; les vestiges archéologiques, globalement peu nombreux, ne permettent guère par eux-mêmes de conclure à un déclin : R. Osborne, « Archaeology and the Athenian Empire », Transactions and Proceedings of the American Philological Association, 129 (1999), p. 319-332.

    24 Liste commode de tributs de cités ioniennes dans I. Kymè, p. 180 ; pour des listes plus complètes, cf. R. Meiggs, The Athenian Empire, Oxford, 1972, p. 540-542.

    25 Plutarque, Lysandre, 3.

    26 Déjà en ce sens K.J. Beloch, op. cit. (n. 19), p. 230.

    27 G. Le Rider, dans Annuaire du Collège de France 1994-1995. Résumé des cours, 95 (1995), p. 767-779 (= Écrits d’histoire monétaire et financière du monde grec. Écrits 1958-1998, Athènes, 1999, III, p. 1043-1055, surtout p. 1052); S. Hurter, « The “Pixodaros Hoard”: a Summary », dans R. Ashton et S. Hurter (éd.), Studies in Greek Numismatics in Memory of Martin Jessop Price, Londres, 1998, p. 147-153 (p. 148-149).

    28 P. Debord, L’Asie Mineure au IVe siècle (412-323 a. C.), Bordeaux, 1999, p. 398-399 (frappes monétaires) ; id., « Chiliastys », REA, 86 (1984), p. 201-211. Pour l’autel : U. Muss et A. Bammer, Der Altar des Artemisions von Ephesos, 2 vol., Vienne (FiE XII, 2), 2001.

    29 L. Robert, « Sur des inscriptions d’Éphèse », RPh, 41 (1967), p. 37-40 (= OMS, V, p. 377-380), qui s’appuie sur P. Charneux (cf. infra, n. 38) ; G. Ragone, « Pygela/Phygela. Fra Paretimologia e storia », Athenaeum, 84,1 (1996), p. 183-241 ; 84,2 (1996), p. 341-379, a fait le point sur ce qu’on savait de cette petite cité. Le traité de P(h)ygela avec Milet est l’inscription I. Milet, I, 3, 142 (= I. Ephesos, VII, 1, 3110).

    30 P. Debord, op. cit. (n. 28), p. 210-211. Ravitaillement mené à bien : I. Ephesos, IV, 1455, est un acte de concession de la citoyenneté de la fin du IVe siècle, récompensant Agathocle fils d’Agémôn, Rhodien, qui a livré du blé à la cité ; aussi I. Ephesos, V, 1452 ; SEG, 39, 1989, 1159 (un marchand de blé). On connaît également à cette époque des préposés au blé (ἡιρεμενοις ἐπὶ τῶι σίτωι : I. Ephesos, V, 1461).

    31 Cf. I. Ephesos IV, 1408-1445; V, 1447-1476; VI, 2001-2016; SEG, 33, 1983, 932; 34, 1984, 1080-1081; 39, 1989, 1152-1171… Les cités d’origine sont variées : Acarnanie (1449) ; Athènes (1420-1421 ; 1443) ; Thèbes (IV, 1442 ; V, 1457 ; 1470 + SEG, 42, 1030) ; Larisa de Thessalie (SEG, 39, 1160) ; Olynthe (1454 ; SEG, 39, 1156) ; Rhodes (1453 ; 1455 ; SEG, 39, 1151) ; Elaia (1458) ; Clazomènes (1452 ; SEG, 39, 1157) ; Sardes (2010) ; Teos (1465) ; Magnésie du Méandre (1450 ; 1468 ; SEG, 39, 1153) ; Priène (2001) ; Milet (1409 ; 1411 ; SEG, 33, 932) ; Naucratis (1424-1425). Cette liste n’est qu’un choix.

    32 I. Ephesos VI, 2001 (chiffre en partie restitué).

    33 M. Sartre, L’Anatolie hellénistique de l’Égée au Caucase (334-31 av. J.-C.), Paris, 2003, p. 132-133.

    34 Récit de la fondation dans Strabon, XIV, 1, 21, et surtout Pausanias, I, 9, 7. D. Knibbe, s.v. Ephesos, RE Suppl. XII, Stuttgart, 1970, col. 256 (date) ; contra S. Karwiese, Gross ist die Artemis von Ephesos, Vienne, 1995, p. 64-67 : cet auteur estime que la nouvelle fondation a périclité et que ce n’est qu’avec la fondation de la province d’Asie qu’une nouvelle ville, en bonne partie romaine, naît et se développe au sein de l’enceinte lysimachéenne. Ce point de vue, excessif, s’appuie sur un fait troublant : l’absence presque totale de vestiges épigraphiques entre le milieu du IIIe siècle et le milieu du IIe siècle av. J.-C. ; de plus, Polyen, VIII, 57, paraît attester la destruction (provisoire ?) d’une partie des remparts après la chute de Lysimaque. Néanmoins, l’inscription attalide (Eumène II) mentionnant des pédonomes (I. Ephesos IV, 1101), ou le décret en l’honneur de Diodore (I. Ephesos I, 6), ainsi que les fouilles des vestiges de l’agora commerciale Tetragonos opérées à partir des années 80, avec la découverte de vestiges du IIIe siècle, que la céramique invite à dater de la première moitié du IIIe siècle av. J.-C., contredisent ce point de vue (cf. P. Scherrer [éd.], Ephesus. The New Guide, p. 140-146 ; voir aussi désormais P. Scherrer et E. Trinkl, Die Tetragonos Agora in Ephesos. Grabungsergebnisse von archaischer bis in byzantinische Zeit – ein Überblick. Befunde und Funde klassischer Zeit, Vienne [FiE XIII/2], 2006) et impliquent une cité fonctionnelle à son emplacement post-lysimachéen durant les IIIe et IIe siècles av. J.-C. Il n’y a donc pas de problème de localisation de la ville et le débat peut être considéré comme tranché. Il n’est néanmoins pas exclu que deux centres aient pu cohabiter un certain temps au moins, les environs de l’Artémision restant habités, mais la présence de la ville de Selçuk interdit des recherches plus approfondies.

    35 Bilan des connaissances encore partielles concernant le rempart dans P. Scherrer (et alii), Ephesos. Der neue Führer, Vienne, 1995, p. 68-71 [11] (= The New Guide, p. 66-69), avec renvois bibliographiques. Voir également P. Scherrer, « The Historical Topography of Ephesos », dans D. Parrish (éd.), Urbanism in Western Asia Minor, Portsmouth, 2001, p. 57-93 (p. 62-63) ; la question de la longueur du rempart lysimachéen et de la superficie de la ville à cette époque reste cependant ouverte pour certains chercheurs.

    36 Stéphane de Byzance, s.v. Ἔφεσος ; P. Debord, op. cit. (n. 28), p. 211, n. 66, prenant acte de l’existence d’au moins deux douzaines de chiliastyes vers cette époque, se demande s’il ne convient pas d’envisager déjà 20 000 ou 25 000 citoyens ; ce chiffre est sans doute excessif, dans la mesure où les chiliastyes ne sont pas forcément « remplies » à hauteur de 1 000 personnes exactement, mais il suffit qu’elles le soient aux deux tiers ou aux trois quarts environ pour se trouver face à une population civique dépassant nettement les dix mille citoyens.

    37 Absorption de Lébédos : Pausanias, I, 9, 7 ; VII, 3, 5. Sur la tendance à la diminution du nombre de cités en Asie hellénistique, cf. L. Robert, Monnaies grecques, Genève, 1967, p. 16-19 ; id., OMS VII, p. 318. Phygela partie d’Éphèse à partir de Lysimaque, afflux forcé de Colophoniens et de gens de Lébédos : L. et J. Robert, Claros I. Décrets hellénistiques, Paris, 1989, p. 80-85. On sait que les deux cités existèrent à nouveau par la suite.

    38 P. Charneux, « Liste ancienne de théarodoques », BCH, 90 (1966), p. 156-229 (p. 198-206) ; L. Robert, (n. 29) p. 36-40 (p. 40), pour l’époque de l’absorption par Éphèse.

    39 Décret mentionnant les 350 citoyens : ÖJh, 23, 1926, Beibl. col. 75 (= I. Ephesos, VII, 1, 3111).

    40 Le territoire de Milet s’est agrandi à plusieurs reprises par synoecisme : M. Piérart, « Athènes et Milet II : L’organisation du territoire », Museum Helveticum, 42, 1985, p. 293-295 (annexions de Myonte et Pidasa).

    41 En supposant à la fois un chiffre supérieur au total vraisemblable des citoyens de l’époque classique et en tenant compte de l’ordre de grandeur suggéré par Étienne de Byzance ; I. Magnesia, 92 a (4678 citoyens présents).

    42 Un autre indice d’une population fort nombreuse pourrait être les importations de blé attestées à plusieurs reprises dans les motifs de concession de citoyenneté (cf. n. 30 et 31).

    43 Larisa a émis un monnayage à la fin du IVe (jusqu’au IIIe siècle ?), cf. F. Imhoof-Blümer, Lydische Städtemünzen, p. 54, n. 2 ; id., Kleinasiatische Münzen, I, 72 (pl. II, 36) ; BMC Ionia, p. 153, n ° 1-2 (pl. XVII, 6) ; D. Knibbe (n. 2, col. 270), estime que Larisa appartient dès le IIIe siècle à Éphèse, aucune monnaie de la cité n’étant indiscutablement de cette époque.

    44 Un autre moment pourrait être à la rigueur 31-29, époque où Auguste séjourne à deux reprises à Éphèse, mais il paraît douteux de supposer qu’Auguste récompense une cité qui a servi de quartier général à Antoine. On n’osera pas penser que P. Vedius Pollio, dont la mission entre 29 et 27 av. J.-C. (plutôt que 27-25) a surtout concerné la réorganisation des finances des sanctuaires et peut-être du culte impérial, a eu un pouvoir suffisant pour dissoudre de petites communautés et les attribuer à Éphèse.

    45 Sur la prospérité et l’importance des frappes monétaires athéniennes de l’époque dans un contexte égéen, cf. A. Bresson, « The Athenian Mint in the Second Century BC and the Amphictionic Decree », Annali, 52 (2006), p. 45-85.

    46 Sur ces catégories, cf. P. Herz, « Das Bürgerrechtsdekret von Ephesos : Inschriften von Ephesos 8 : Gedanken zur Gesellschaft im spätrepublikanischen Kleinasien », dans H. Bellen et H. Heinen (éd.), Fünfzig Jahre Forschungen zur antiken Sklaverei an der Mainzer Akademie : 1950-2000 : Miscellaneazum Jubiläum, Stuttgart, 2001, p. 185-207 (p. 187-197) : néanmoins, il fait observer que les promotions civiques ne concernaient ni les épouses, ni les enfants des néo-citoyens, ce qui risquait d’annuler à terme les effets de ces concessions. Il faut croire que l’inscription a soit été vite caduque, soit que des changements se sont produits par la suite. Cf. infra, II, A.

    47 Appien, Mithridate, 61, 252 ; Granius Licinianus, 35, 82 Criniti. L’imperator romain a annulé la décision du roi du Pont conférant la liberté aux esclaves : Appien, Guerre de Mithridate, 61, 251.

    48 Il y a là un apport non négligeable, car Éphèse est la première cité d’Asie Mineure pour le nombre de gentilices non-impériaux connus, près de 225 : cf. F. Kirbihler, Notables, II, p. 417-433.

    49 Strabon, XIV, 1, 24 ; Pline, N.H., V, 31, 120 : « Ephesum alterum lumen Asiae » ; id., 115 : « attolitur monte Pion » ; Sénèque, Lettres à Lucilius, 102, 21 (trad. P. Veyne) : « Ephesum aut Alexandriam aut si quod est etiam nunc frequentius accolis laetiusve tectis solum. » Voir aussi G. Aujac, « Les très grandes villes chez les géographes grecs », MEFRA, 106, 2 (1994), p. 859-899, et J. Desanges, « Les très grandes villes chez les géographes latins », MEFRA, 106, 2 (1994), p. 901-919.

    50 Philostrate, Vie d’Apollonios de Tyane, VIII, 7, 8 : « Éphèse… qui a prospéré au-dessus de toutes les villes, aussi bien d’Ionie que de Lydie, qui a débordé jusque sur la mer, parce que son étendue dépasse celle du territoire sur lequel elle est bâtie… cette cité doit sa puissance… à sa population innombrable… ». L’affirmation vaut pour la fin du Ier siècle, époque d’action de son héros et de grande activité de construction, et sans doute encore pour l’époque de la rédaction, la seconde décennie du IIIe siècle ; Dion Chrysostome, 40, 11 (allusion à l’activité de construction aux alentours de 100-105) ; Pausanias, IV, 31, 8 ; Aelius Aristide, 23, 24.

    51 Cf. A. Heller, op. cit. (n. 9).

    52 D’après F. Hueber, « Zur Städtebaulichen Entwicklung des hellenistisch-römischen Ephesos », Istanbuler Mitteilungen 47 (1997), p. 251-269; cf. id., Ephesos. Gebaute Geschichte, Mayence, 1997, p. 42. Pour comparaison, cf. la discussion des dimensions d’Antioche en Syrie dans J.-P. Callu, « Antioche la Grande. La cohérence des chiffres », MEFRA, 109, 1 (1997), p. 127-169.

    53 Néanmoins, P. Scherrer estime qu’une section de mur coupant la ville à hauteur du théâtre correspond à la limite Nord du mur lysimachéen : la superficie intra-muros serait plus réduite, en raison du caractère tardo-antique de la portion de mur la plus septentrionale, mais le fait ne change rien quant à l’étendue de l’habitat lui-même, toute la partie Nord de la ville ayant déjà été bâtie durant les Ier-IIe siècles.

    54 Bien que les fouilles n’aient pas été exhaustives et que la preuve absolue manque, la vision de ruines antiques en altitude, visibles de la partie haute de la maison pentue II, s’impose à l’observateur.

    55 Cf. l’article d’H. Engelmann, « Der Koressos, ein ephesischer Stadtviertel », ZPE, 115 (1997), p. 131-135 (P. Scherrer estime cependant que le quartier apparaissait déjà au Sud du stade). Pour l’importance des faubourgs des grandes villes antiques, cf. Libanios qui mentionne des faubourgs d’Antioche aussi peuplés que la ville : discussion des sources dans Er. Will, « Antioche sur l’Oronte, métropole de l’Asie », Syria, 74 (1997), p. 99-113 (p. 110-111) ; on s’intéresse beaucoup depuis quelques années au suburbium de Rome : F. Kolb, Rom. Die Geschichte der Stadt in der Antike, Munich, 1995, p. 309-329 ; X. Lafon, « Le Suburbium », Pallas, 55 (2000), p. 199-214 ; LTUR. Suburbium, I, A-B, Rome, 2001 ; R. Witcher, « The Extended Metropolis: Urbs, Suburbium and Population », JRA, 18, 1 (2005), p. 120-138.

    56 Premiers résultats d’un Survey d’U. Outschar, « Produkte aus Ephesos in aller Welt ? », dans Berichte und Materialien des österreichischen archäologischen Instituts, 5, Vienne, 1993, p. 46-52 (ici p. 46 ; 49-50 ; 52).

    57 Ibid., p. 46 ; 51-52. Pour des raisons évidentes, on n’a pas retrouvé trace du travail du cuir, que l’abondante présence d’eau grâce à un aqueduc rend plausible.

    58 I. Magnesia 105 ; I. Priène 500, arbitrage de Lysimaque (v. 283/2 av. J.-C.) ; I. Priène 37, arbitrage de juges rhodiens entre Priène et Samos (début du IIe siècle av. J.-C.), confirmé après 133 av. J.-C. par des juges d’une cité inconnue (I. Priène 42) ; D. Rousset recense dans son article de 1994 (n. 76), p. 99, plus de 160 documents en rapport avec les frontières, dont 75 actes de délimitation de frontières civiques (d’après l’article de 1999 sur les territoires de Phocide [cf. infra, n. 76] p. 51, n. 77).

    59 I. Ephesos, VII, 1 + 2.

    60 J. et L. Robert, BE 1982, 306-311, p. 373-377 ; BE, 1982, 308 : « annexionnisme virulent ». On trouvait pourtant depuis longtemps un certain nombre de renseignements dans la discussion de la localisation de certains villages dans J. Keil et A. von Premerstein, Bericht über eine dritte Reise in Lydien und den angrenzenden Gebieten Ioniens, Vienne, 1914, p. 82-86 ; cette critique virulente concerne surtout I. Ephesos VII, 1 + 2.

    61 Côte des Ephésiens : Strabon, XIV, 1, 20 ; voir aussi P. Funke, « PERAIA : Einige Überlegungen zum Festlandbesitz griechischer Inselstaaten », dans V. Gabrielsen et alii (éd.), Hellenistic Rhodes : Politics, Culture, and Society, Aarhus, 1999, p. 55-75 (p. 62-63).

    62 Ibid., p. 62-63.

    63 Pour P (h)ygela, cf. supra, n. 29. Pactyès : Strabon, XIV, 1, 13. Échange de Marathésion contre Neapolis : Strabon, XIV, 1, 20. Iles à Pérée : ibidem ; voir aussi P. Debord, op. cit., p. 268-270 et 438, et id., « Les Pérées des îles voisines de l’Asie Mineure », REA, 103 (2001), p. 205-219 ; surtout désormais C. Carusi, Isole e Peree in Asia Minore. Contributi allo studio dei rapporti tra poleis insulari e territori continentali dipendenti, Pise, 2003. Sur les doutes concernant Azizie, et la non-appartenance de Naipli à Éphèse, cf. L. Robert, BE, 1982, 306 (voir la carte en I. Ephesos VII, 1, p. 100).

    64 H. Engelmann, « Inschriften aus Metropolis », ZPE, 125 (1999), p. 137-146 (p. 143-146). J’avoue ne pas comprendre comment D. Knibbe, loc. cit. (n. 2, col. 270), peut affirmer que Metropolis appartient à Éphèse, alors qu’il s’agit d’une cité auteur de décrets.

    65 Description du Gallésion : L. Robert, dans Études déliennes (BCH Suppl. 1), p. 474-476, qui insiste sur le caractère de frontière que constitue la montagne entre Éphèse et Colophon-Claros ; instructif passage de L. et J. Robert, Claros I. Décrets hellénistiques, Paris, 1989, p. 85.

    66 I. Ephesos, Ia, 8.

    67 Cf. Strabon, XIII, 3, 2.

    68 Qu’il s’agisse de l’antique Ἀπατειρηνῶν κατοικία ou de Θυαίρα : R. Meriç, R. Merkelbach et S. Şahin, « Der antike Name des heutigen Tire », ZPE, 33 (1979), p. 191-192.

    69 L. Robert, Noms indigènes dans l’Asie Mineure gréco-romaine, Paris, 1963, p. 145.

    70 Contributions de 250 deniers : I. Ephesos V, 1687, fr. 1, Col I (= col. II par raccord avec SEG 39, 1176) ; les Italiens appartiennent indiscutablement à une chiliastye à partir de Claude (cf. I. Ephesos IV, 1005).

    71 On ne discutera pas ici la localisation, parfois précisée pour certains villages dès J. Keil et A. von Premerstein, op. cit. (n. 60), p. 82-86.

    72 J. Kobes, « Fremdes Getreide. Beobachtungen zum Problem der Getreideversorgung in der kaiserzeitlichen Provinz Asia », Laverna, 10 (1999), p. 81-98.

    73 L. Robert, Hellenica VII, 1949, p. 153-160. Lorsqu’il s’agit de plaines, on trouve trace d’activités agricoles : I. Priène, 37 ; 363.

    74 Sur l’importance du pastoralisme et l’utilisation de la montagne comme terrain de pâture, cf. pour l’époque classique et hellénistique C. Chandezon, L’élevage en Grèce : l’apport de l’épigraphie (Ve-Ier siècle av. J.-C.), Bordeaux (collection Ausonius), 2003, (les p. 205-248 évoquent l’élevage en Ionie, en incluant le beau dossier de Mylasa en Carie, de basse époque hellénistique), qui pense p. 402 qu’au Sud de l’Ionie la place de l’élevage ne pouvait qu’être réduite. Il existe cependant au moins un témoignage d’élevage de chevaux dans les domaines d’Artémis (SEG, 45, 1995, 1583). Région voisine : id., « Paysage et économie rurale en Asie Mineure à l’époque hellénistique, à partir de quelques baux de Mylasa (IIe-Ier siècle av. J.-C.) », Histoire et sociétés rurales 9 (1998), p. 33-56. Résolution des conflits frontaliers : G.P. Burton, « The Resolution of Territorial Disputes in the Provinces of the Roman Empire », Chiron, 30 (2000), p. 195-215 (Éphèse, Héraclée de la Salbakè, Philomélion, Antioche de Pisidie).

    75 D’après R.A. Talbert (éd.), Barrington Atlas of the Greek and Roman World, Princeton, 2000, carte 56.

    76 Sur les questions de territoire et de frontière, bibliographie indicative : L. Robert, Hellenica VII, 1949, p. 154-157 ; id., Hellenica X, 1955, p. 283-291 ; id., OMS II, p. 820-821 ; J. et L. Robert, Fouilles d’Amyzon en Carie, Paris, 1983, p. 101-109 ; J. Tréheux, « La frontière en Grèce », dans Frontières et contacts de civilisation, Colloque universitaire franco-suisse, Besançon-Neuchâtel, octobre 1977, Neuchâtel, 1979, p. 31-39 ; M. Sartre, « Aspects économiques et aspects religieux de la frontière dans les cités grecques », Ktèma, 4 (1979), p. 213-224 ; G. Daverio-Rocchi, Frontiera e confini nella Grecia antica, Rome, 1988 ; id., « La hiera chora di Apollo, la piana di Cirra e i confini di Delphi », dans M.-M. Mactoux et E. Geny (éd.), Mélanges P. Lévêque, I, Religion, Paris, 1989, p. 117-125 ; D. Rousset, « Les frontières des cités grecques. Premières réflexions à partir du recueil des documents épigraphiques », CCG, 5 (1994), p. 97-126. On trouve p. 118-119 : « La part des traits orographiques… montre que les confins des cités grecques étaient souvent montagneux et confirme la représentation que nous avons des frontières grecques, courant sur les reliefs qui entourent un petit bassin cultivable et l’agglomération urbaine. Ce n’est pas céder au déterminisme géographique que de voir sur les hauteurs les frontières, dont la ligne pouvait être tracée jusqu’en altitude, dans des régions inhabitées » ; id., « Centre urbain, frontière et espace rural dans les cités de Grèce centrale », dans M. Brunet (éd.), Territoire des cités grecques, Actes de la table ronde internationale organisée par l’École Française d’Athènes (31 octobre-3 novembre 1991), Athènes-Paris, (BCH Suppl. 34), 1999, p. 35-77 ; id., Le territoire de Delphes et la terre d’Apollon, Athènes-Paris, 2002 (avec la bibliographie, en particulier p. 304-305) ; id., « La cité et son territoire dans la province d’Achaïe et la notion de Grèce romaine », AnnalesHSS, 59 (2004), p. 363-383 (surtout une discussion de la densité des sites sur le territoire de la Grèce péninsulaire) ; J.-M. Bertrand, « Frontières externes, frontières internes des cités grecques » dans C. Moatti (éd.), La mobilité des personnes en Méditerranée de l’Antiquité à l’époque moderne. Procédures de contrôle et documents d’identification, Paris-Rome, 2004, p. 71-98. Sur le concept et les limites de frontière, y compris celles des provinces romaines, une somme considérable : E. Olshausen et H. Sonnabend (éd.), Grenze und Grenzland. 4. Stuttgarter Kolloquium zur historischen Geographie des Altertums 1990, Amsterdam, 1994. Pour une méthodologie exemplaire quant à la recherche des frontières d’une cité antique : J. Dalaison, « Les limites de la cité d’Amaseia au Haut-Empire », Anat. Ant., 10 (2002), p. 261-276.

    77 Cf. la carte reproduite, qui constitue une version modifiée et améliorée de la carte du territoire figurant dans la thèse soutenue en 2003.

    78 Pour tout ce passage, cf. la carte : j’ai marqué les limites en pointillé, puisqu’elles marquent en l’état actuel des connaissances, des frontières approximatives.

    79 K.J. Beloch, op. cit. (n. 19), p. 230-231.

    80 T.RS. Broughton, « Roman Asia Minor », dans T. Frank (éd.), An Economic Survey of Ancient Rome, IV, Baltimore-New-York, 1938, IV, p. 815.

    81 F. Jacques et J. Scheid, Rome et l’intégration de l’Empire (44 av. J.-C.-260 apr. J.-C.), I. Les structures de l’empire romain, Paris, 1990, p. 299 ; le texte était aussi invoqué par T.R.S. Broughton, op. cit., p. 813.

    82 R.S. Bagnall et P.D. Worden, « The Forty Thousands Citizens of Ephesus », Classical Philology, 83 (1988), p. 220-223.

    83 H.W. Pleket, « The Roman state and the economy: the case of Ephesos », dans Entretiens d’archéologie et d’histoire. Les échanges dans l’Antiquité : le rôle de l’État, Saint-Bertrand-de-Comminges, 1994, p. 115-126. Le chiffre est cité par C.R. Whittaker, p. 231, qui le rejette. H.W. Pleket n’a pas voulu indiquer un total aussi élevé : p. 119 il évoque 120 000 citoyens et les membres de leurs familles (inclus, cf. SEG, 44, 1570), ainsi que ca 60 000 esclaves et étrangers, ce qui ferait un peu moins de 200 000 habitants.

    84 J. Kobes, loc. cit. (n. 72), p. 81-98.

    85 C. Nicolet, « Subsistances et mégalopoles méditerranéennes », dans C. Nicolet, R. Ilbert et J.-C. Depaule (éd.), Mégalopoles méditerranéennes. Géographie urbaine rétrospective. Actes du colloque organisé par l’EFR et la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme (Rome, 8-11 mai 1996), Paris-Rome (CEFR 261), 2000, p. 732-750 (p. 745).

    86 Remarque orale d’H. Thür lors de nos entretiens à Éphèse, au mois de juillet 2001 : la population de la ville a pu atteindre 150 000 habitants ; la taille du théâtre par rapport à la superficie totale urbaine et le fait que les couches inférieures de la population aient souvent vécu entassées rendent ce chiffre vraisemblable.

    87 Autre tentative méthodologique en matière d’estimation de population : E. Ruschenbusch, « Phokis, Lebensraum und Bevölkerungszahl. Möglichkeiten und Grenzen bei der Feststellung von Einwohnerzahlen im griechischen Mutterland », dans E. Olshausen et H. Sonnabend (éd.), 3. Stuttgarter Kolloquium zur historischen Geographie des Altertums 1987, Stuttgart, 1991, p. 299-312 (scepticisme de D. Rousset, Le territoire de Delphes et la terre d’Apollon, Athènes-Paris, 2002, p. 289, n. 1053).

    88 Mention des cinq tribus éphésiennes originelles : Étienne de Byzance, s. v. Bevnna. K. J. Beloch, op. cit. (n. 19), p. 230-231. Articles de réflexion fondamentaux sur la répartition du corps civique à Milet et dans les cités ioniennes (y compris la question des chiliastyes) : M. Piérart, « Athènes et Milet I. Tribus et dèmes milésiens », Museum Helveticum, 40 (1983), p. 1-18 ; id., « Athènes et Milet II. L’organisation du territoire », Museum Helveticum, 42 (1985), p. 276-299 ; id., « Modèles de répartition des citoyens dans les cités ioniennes », REA, 87 (1985), p. 169-190 (les chiliastyes d’Éphèse p. 175-176) ; H. Engelmann, « Phylen und Chiliastyen von Ephesos », ZPE, 113 (1996), p. 94-100 : à partir du début du IIIe siècle huit tribus (d’après les tableaux et listes p. 96-99, qui décomptent 35 chiliastyes dans les tribus, 10 chiliastyes attestées, mais non-attribuables à une tribu précise, et 5 chiliastyes non-attestées, mais possibles pour la phylè VI). Autre exemple : C. Marek, « Die Phylen von Claudioupolis, die Geschichte der Stadt und die Topographie Ostbithyniens », Museum Helveticum, 59, 1 (2002), p. 31-50.

    89 J. Keil, « Die ephesischen Chiliastyen », ÖJh, 16 (1913), p. 245-248 ; M. Piérart, loc. cit. (n. 88), p. 175-176 ; 184-188 ; P. Debord, op. cit. (n. 28), p. 209-210.

    90 500 ? 600 ? 800 ? Le total a pu varier au sein de chaque chiliastye.

    91 Elle est attestée pour des familles de notables provenant de cités plus petites, en particulier la voisine Hypaipa.

    92 Cette proportion est fournie par Galien, V, 49 (Kuehn).

    93 Dans SEG, 44, 1570.

    94 Parmi des dizaines de textes, et en n’évoquant pas les affranchis de grands notables, mais de simples inscriptions funéraires mentionnant les affranchis autorisés à être inhumés dans la tombe : I. Ephesos, VI, 2217 D ; 2218 C ; 2261 ; 2291 ; 2543. On connaît des marchands d’esclaves, qui in statario negotiantur : I. Ephesos, VII, 1, 3025 (Tibère) ; III, 646 (Trajan).

    95 Cf. F. Kirbihler, Les notables d’Éphèse. Essai d’histoire sociale (133 av. J.-C.-262 apr. J.-C.), thèse soutenue à Tours, 2003, 4 vol., III, p. 933-989 (p. 967-970).

    96 La documentation éphésienne recoupe les données fournies par le roman antique d’Achille Tatius, Les aventures de Leucippé et Clitophon : cf. ma discussion dans F. Kirbihler, op. cit., III, p. 967-970 (à paraître).

    97 Ce thème suscite des recherches croissantes : cf. la mise au point et la bibliographie dans mon article sur des crises de subsistance : F. Kirbihler, « Les émissions de monnaies d’homonoia et des crises alimentaires en Asie Mineure sous Marc Aurèle », REA, 108, 2 (2006), p. 613-640. Attestation d’importations de blé d’Égypte : I. Ephesos II, 211 ; 274 (autorisation de s’approvisionner en Égypte par Hadrien, avant 128/9 ; également I. Ephesos VII, 1, 3016 (acheminement de blé depuis l’Égypte au début du IIIe siècle) ; association des peseurs de grain (I. Ephesos, VII, 1, 3216) ; fréquence des crises de subsistance en Asie Mineure : J. Kobes, loc. cit. (n. 72).

    98 Au moins 50 000 citadins durant la seconde moitié du Ier siècle, plus de 100 000 au second ?

    99 Sénèque, Lettres à Lucilius, 102, 21.

    100 F. Hueber, Ephesos. Gebaute Geschichte, Mainz, 1997, p. 48 ; les différentes phases et agrandissements sont aussi discutés dans id., loc. cit., p. 257 : néanmoins, la construction de bâtisses de trois à peut-être cinq étages (La Hanghaus I aurait compté cinq niveaux d’après Anzeiger, 1964, p. 43) à partir du Ier siècle ne peut plus être invoquée à partir de l’exemple de la maison pentue I : cf. C. Lang-Auinger, Hanghaus 1 in Ephesos. Der Baubefund, Vienne, 1996 ; id. (et alii), Hanghaus 1 in Ephesos. Funde und Ausstattung, Vienne, 2003. En revanche, la Hanghaus II comporte au moins partiellement trois étages, en comptant le rez-de-chaussée.

    101 Sauf peut-être à l’époque flavienne : Apollonios de Tyane sauve les Éphésiens d’une pestilence qui les accable : Philostrate, Vie d’Apollonios de Tyane, 8, 7, 8. Mais l’épisode est-il historique ?

    102 F. Kirbihler, op. cit. (n. 95), I, p. 330-384.

    103 Philostrate, Vies des sophistes, I, 23; L.M. White, « Urban Development and Social Changes in Imperial Ephesos », dans H. Koester (éd.), Ephesos, Metropolis of Asia. An Interdisciplinary Approach to its Archaeology, Religion and Culture (= Harv. Theol. Stud. 41), Valley-Forge, 1995, p. 27-79 (Philostrate cité p. 45 ; pessimisme quant au solde démographique naturel [à mon avis exagéré, en particulier dans ce cas précis], p. 44-50 ; importance de l’immigration, p. 57-63, liste de régions p. 61 ; listes de personnes nées ailleurs, p. 66-79).

    104 R. P. Duncan-Jones, « The Impact of the Antonine Plague », JRA, 9 (1996), p. 108-136. K. Strobel, « Zu Lesung und Deutung einer Grabinschrift aus Stobi und zu den Auswirkungen der Seuche von 166 n. Chr. », ZPE, 75 (1988), p. 232-234; J. Greenberg, « Plagued by Doubt : Reconsidering the Impact of a Mortality Crisis in the 2nd c. A.D. », JRA, 16 (2003), p. 413-425 ; C. Bruun, « The Antonine Plague in Rome and Ostia », JRA, 16 (2003), p. 426-434. Situation en Égypte : R.S. Bagnall, « P. Oxy. 4527 and the Antonine plague in Egypt : death or flight? », JRA, 13, 1 (2000), p. 288-292 ; W. Scheidel, « A model of demographic and economic change in Roman Egypt after the Antonine plague », JRA, 15, 1 (2002), p. 97-113; contra, R.S. Bagnall, « The effects of plague : model and evidence », JRA, 15, 1 (2002), p. 114-120; C.P. Jones, « Ten Dedications “to the Gods and Godesses” and the Antonine Plague », JRA, 18, 1 (2005), p. 293-301.

    105 Tous les oracles de Claros ne sont cependant pas de la même époque ; crises de subsistances, cf. F. Kirbihler, loc. cit. (n. 97), un bilan des crises alimentaires entre 165 et 171.

    106 On connaît 14, peut-être 17 femmes prytanes entre 160 et 200 environ : Furia Paulle (TAM V, 2, 969) ; Vedia Phaedrina (I. Ephesos Ia, 47 ; III, 733) ; Vedia Papiane (Ia, 47) ; Claudia Antonia (Ia, 47) ; Cornelia Paulla (Ia, 47) ; Terentia Flavianè (Ia, 47 ; III, 720 A ; IV, 1135 A) ; Terentia Aelianè (Ia, 47 ; III, 720 A) ; Iulia Damianè Paulla (Ia, 47 ; III, 980) ; Claudia Crateia Verianè (III, 980) ; Vedia Iusta (I, 47 ; VII, 1, 3072) ; Vedia Pallas (IV, 1135 A) ; Iulia Modesta (IV, 1135 A) ; Caninia Severa (IV, 1135 A) ; Cerinia Cimberis (IV, 1135 A) ; Antonia Phrygille (VII, 1, 3072) ; peut-être aussi Flavia Chrysanthe (SEG, 34, 1104) ; Lollia (IV, 1074) et Claudia Severa (III, 956), qui peuvent aussi avoir été actives un peu après 200.

    107 Les Terentiae constituent sans doute un exemple probant : Terentia Aelianè et Terentia Flavianè (cf. n. 106) sont deux sœurs, on ne leur connaît pas de frère, comme pour la plupart des autres prytanes féminins.

    108 Liste de ces distributions dans F. Kirbihler, op. cit., (n. 95), III, p. 899-900 (concours) ; 903-911 (argent, huile, blé) ; évidemment, tout le problème est de savoir si les inscriptions enregistrent là des nouveautés ou se contentent de reproduire des faits réguliers conservés auparavant uniquement sur support périssable.

    109 Absence de constructions significatives après 165 : l’initiative privée disparaît presque entièrement : cf. infra.

    110 L.M. White, loc. cit. (n. 103), en particulier p. 40-64, optimiste quant au phénomène global de croissance jusqu’aux années 210 au moins ; P. Scherrer, « The Historical Topography of Ephesos », dans D. Parrish (éd.), Urbanism in Western Asia Minor, Portsmouth, 2001, p. 78-79, très prudent et même elliptique quant à l’interprétation de l’époque sévérienne.

    111 F. Hueber, « Zur Städtebaulichen Entwicklung des hellenistisch-römischen Ephesos », Istanbuler Mitteilungen, 47 (1997), p. 251-269; id., Ephesos. Gebaute Geschichte, Mayence, 1997, p. 49-52.

    112 M. Aurelius […] a donné durant le premier tiers du IIIe siècle, sans doute après 212, 20 000 deniers à l’occasion de la grande-prêtrise pour la rénovation du port, probablement son nettoyage et son dragage (I. Ephesos, VII, 1, 3071) ; Valerius Festus a fait agrandir et sans doute restaurer le port encore vers le milieu du IIIe siècle (SEG, 34, 1984, 1094).

    113 D. Knibbe, « Der Asiarch M. Fulvius Publicianus Nikephoros, die ephesischen Handwerkszünfte und die Stoa des Servilius », ÖJh, 56 (1985), p. 71-77.

    Auteur

    • François Kirbihler
      EA 1132 HISCANT. Université de Nancy 2
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    1 Je tiens par ailleurs à remercier C. Pebarthe, O. Casabonne, C. Barat pour diverses remarques et relectures concernant le présent article ; les résultats doivent beaucoup à des discussions avec P. Scherrer, qui m’a fourni des précisions concernant les fouilles de l’agora ; il va de soi que les erreurs éventuelles sont miennes.

    2 À signaler cependant la courte discussion des limites territoriales de la cité dans D. Knibbe, s.v. Ephesos III. 1, RE Suppl. XII, 1970, col. 270-271 ; brèves remarques concernant l’époque classique dans M.H. Hansen et T.H. Nielsen, An Inventory of Archaic and Classical Poleis, Oxford, 2004, p. 1070-1073, s.v. Ephesos.

    3 Le professeur turc R. Meriç est cependant l’auteur d’un travail pionnier sur la chôra éphésienne, qui recense les ruines visibles, en particulier l’architecture militaire hellénistique. Il utilise des chiffres de production datant de l’époque où l’agriculture turque pratiquait des méthodes de culture traditionnelles, afin de fournir quelques données de nature à nourrir la réflexion historique relative aux ressources du territoire durant l’Antiquité. Ce travail inédit devrait paraître prochainement à Vienne. Il est aussi question à l’ÖAI de lancer une recherche de plusieurs années sur la chôra éphésienne, dont les résultats pourraient alors être comparés aux travaux de même type déjà accomplis sur le territoire milésien : pour ce survey, cf. H. Lohmann, « Survey in der chôra von Milet. Vorbericht über die Kampagnen der Jahre 1990, 1992, und 1993 », AA (1995, 2), p. 293-333 ; id., « Survey in der chôra von Milet. Vorbericht über die Kampagnen der Jahre 1994 und 1995 », AA (1997, 2), p. 285-311 ; id., « Survey in der chôra von Milet. Vorbericht über die Kampagnen der Jahre 1996 und 1997 », AA (1999, 3), p. 439-473. Pour comparaison, bilan de réflexions méthodologiques et de résultats de prospections par J.-N. Corvisier, « Le bilan des land surveys pour la Grèce : apports et limites », dans C. Chandezon et C. Hamdoune (éd.), Les hommes et la terre dans la Méditerranée gréco-romaine, Pallas, 64 (2004), p. 15-33 ; J.-P. Vallat, « Prospections, fouilles et perspectives d’histoire économique et sociale : l’exemple de l’Italie antique », ibid., p. 35-62 ; voir pour un bilan des campagnes de l’Asie Mineure, C. Schuler, Ländliche Siedlungen und Gemeinden im hellenistischen und römischen Kleinasien, Munich, 1998.

    4 Cf. l’article dans ce même volume d’H. Vanhaverbeke et M. Waelkens, « La genèse d’un territoire. Le cas de Sagalassos en Pisidie ».

    5 Le point sur les travaux antérieurs pour l’époque romaine dans P. Salmon, Population et dépopulation dans l’empire romain, Bruxelles, 1974. Travail novateur à l’époque de sa parution de J.-M. Lassère, Ubique Populus. Peuplement et mouvements de population dans l’Afrique romaine de la chute de Carthage à la fin de la dynastie des Sévères (146 av. J.-C.-235 apr. J.-C.), Paris, 1977 ; surtout, les articles de B. Frier, « Roman Life Expectancy : Ulpian’s Evidence », Harvard Studies in Classical Philology, 86 (1982), p. 213-251 ; id., « Roman Life Expectancy : The Pannonian Evidence », Phoenix, 37 (1983), p. 328-344.

    6 B.W. Frier et R.S. Bagnall, The Demography of Roman Egypt, Cambridge, 1994. Surtout, les travaux de W. Scheidel, Measuring Sex, Age and Death in the Roman Empire, Ann Arbor, 1996 ; id., (éd.), Death on the Nile. Disease and the Demography of Roman Egypt, Leyde-Boston-Cologne, 2001, en attendant sa grande synthèse annoncée sur la démographie antique. Mise au point sur les connaissances et les problèmes de démographie : J.-N. Corvisier et W. Suder, La population de l’Antiquité classique, Paris (collection Que sais-je ?), 2000, et sur la bibliographie de la question en histoire grecque, id., Polyanthropia-Oliganthropia, Wroclaw, 1996. Articles contestés de P. Brulé, « Enquête démographique sur la famille grecque antique. Étude de listes de politographie d’Asie Mineure d’époque hellénistique » (Milet et Ilion), REA, 92 (1990), p. 233-258 ; id., « Infanticide et abandon d’enfants. Pratiques grecques et comparaisons anthropologiques », Dialogues d’Histoire Ancienne, 18 (1992), p. 53-90, très pessimiste, qui suppose un énorme taux d’exposition des filles (50 %) et d’infanticide, ce qui paraît invraisemblable. J. Cels Saint-Hilaire, « Citoyens romains, esclaves et affranchis : problèmes de démographie », REA, 103, 3-4 (2001), p. 443-479.

    7 A. Jardé, Les céréales dans l’Antiquité grecque, Paris, 1925, proposait une densité de 36 h/km2 environ en Grèce. On sait que la population française s’est heurtée à plusieurs reprises entre le début du XIVe siècle et la fin du règne de Louis XIV à cette densité de 40 h/km2, qu’elle ne réussit à dépasser durablement ni vers 1300-1320, ni durant le troisième quart du XVIe siècle, ni vers 1630-1640, ni durant les années 1680. Ce sont les nouvelles conditions économiques permises par les révolutions agricole et industrielle, apparues progressivement à partir du milieu du XVIIIe siècle, qui permirent enfin une rupture par rapport aux contraintes anciennes.

    8 Le versement de taxes portuaires est par ailleurs attesté dans bien des cités : Thucydide, VII, 28, 4 (les Athéniens veulent instituer une taxe du vingtième sur le trafic portuaire des cités alliées) ; tarif douanier de Caunos, exemplaire d’une cité grecque, mais d’époque impériale (ier siècle apr. J.-C.) : SEG 14, 1957, 639 ; étude par G. Purpura, « Il Regolamento doganale di Cauno e la lex Rhodia in D. 14, 2, 9 », AGSP, 38 (1985), p. 273-331 ; plus largement, pour l’époque romaine, mais aussi pour la partie grecque de l’Empire, J. France, « Les portoria municipaux dans le monde romain (République et Haut-Empire) », dans Il capitolo delle entrate nelle finanze municipali in Occidente e in Oriente, Actes de la Xe rencontre franco-italienne d’épigraphie, École Française de Rome, 1996, Rome, 1999, p. 95-113.

    9 Thèse d’A. Heller, Les bêtises des Grecs. Conflits et rivalités entre cités d’Asie et de Bithynie à l’époque romaine (129 av. J.-C.-235 apr. J.-C.), Ausonius, Bordeaux, 2006, qui conclut à la primauté indiscutable d’Éphèse en matière de titres.

    10 En réalité le 1/60 du tribut versé à Athéna. On sait qu’il faut multiplier par 60 le chiffre sur les stèles pour obtenir le chiffre total du tribut versé.

    11 Plutarque, Vie d’Aristide, 24, 1. On sait qu’E. Ruschenbusch, « Tribut und Bürgerzahl im ersten athenischen Seebund », ZPE, 53 (1983), p. 125-143, a défendu l’idée d’un rapport entre le tribut versé par la majorité des cités et leur population civique ; discussion de l’évaluation dans L. Nixon et S. Price, « La dimension et les ressources des cités grecques », dans O. Murray et S. Price (éd.), La cité grecque d’Homère à Alexandre, Paris, 1992, p. 163-200, II (p. 172-180), qui arrivent à la conclusion que, plus que la population, les ressources s’avèrent primordiales dans le calcul ; même avis de B. Tenger, « Phoroshöhe und Bevölkerungszahl. Die Athener Tributlisten als Indikator für die Grösse der Einwohnerschaft einer Polis ? », dans Studien zum antiken Kleinasien III, Bonn, 1995 (= Asia Minor Studien 16), p. 139-160, qui récuse l’élément démographique en citant surtout des ports des détroits menant au Pont-Euxin, dont le tribut était élevé à cause de ressources importantes dues au commerce, ou des cités disposant aussi de ressources minières ; contra, du moins en partie, P. Brun, Les archipels égéens dans l’Antiquité grecque, Paris, 1996, p. 184-192 et 201-204, qui fait un ample usage des chiffres du tribut à des fins démographiques, même s’il estime p. 186 que le tribut donne une image déformée du potentiel total du territoire, puisqu’il mesure avant tout les revenus des îles, donc les sources de la richesse.

    12 La mesure du territoire est essentielle pour la fixation du tribut par les Perses : cf. Hérodote, VI, 42, Artapharnès mesure en 493 le territoire de chaque cité après la répression de la révolte des Ioniens, en vue du rétablissement du tribut.

    13 Si l’évaluation démographique n’envisageait sans doute que la population citoyenne masculine, les ressources en rapport avec les taxes reflètent cependant la présence et l’activité de métèques commerçants.

    14 Pour C. Pébarthe, « Thasos, l’empire d’Athènes et les emporia de Thrace », ZPE, 126 (2000), p. 131-154, et id., « Fiscalité, Empire athénien et écriture : retour sur les causes de la Guerre du Péloponnèse », ZPE, 129, (2000), p. 47-76, on a sous-estimé les revenus hors-tribut perçus par les Athéniens, donc les sources de revenus de certaines cités tributaires, en particulier la taxe portuaire.

    15 Ou, pour prendre d’autres exemples égéens comparables, Andros, qui acquitte également 12 (une seule fois), puis 6 talents avant 431, Cos (5 talents), Naxos (6 talents 4 000 drachmes) ; cette dernière île passait pour être très peuplée à l’époque classique, avec 8 000 hoplites en 500 av. J.-C. : P. Brun, op. cit. (n. 11), p. 185 (Naxos, île peuplée, p. 110-111, en particulier la n. 224). La cité des Éphésiens apparaît dans les listes de tribut suivantes : IG I3, 259, I, 22 (454/3 av. J.-C.) ; 260, VI, 13 (453/2) ; 261, V, 13 (452/1) ; [263, V, 29] (450/449, texte en grande partie restitué) ; 265, I, 111, et II, 74 (447/6) ; 267, V, 17 (445/4) ; 268, I, 25 (444/3) ; 269, I, 31 (443/2) ; 270, I, 32 (442/1) ; 271, I, 16 (441/0) ; 272, II, 14 (440/439) ; [273, I, 27] (439/8) ; 279, I, 65 (433/2) ; 280, I, 61 (432/1) ; 289, 43 (416/5, somme non conservée) ; 290, I, 26 (415/4, idem). Le montant du 1/60 du tribut des listes varie en effet de 600 à 750 drachmes. Milet verse de 500 (par ex. IG I3, 269, I, 33) à 1 000 drachmes (par ex. IG I3, 263, V, 18).

    16 L. Nixon et S. Price, loc. cit. (n. 11 ; Éphèse : p. 197) ; cf. P. Brulé, « Introduction. Le pays et les hommes », dans P. Briant et P. Lévêque (éd.), Le monde grec aux temps classiques. I : Le Ve siècle, Paris, 1995, p. 9-10.

    17 Il paraît évident que l’auteur croit parfois trop, encore qu’il s’en défende, en une simple transcription démographique des données chiffrées du tribut, alors que les ressources du territoire constituent la base d’estimation fondamentale : L. Nixon et S. Price, loc. cit., p. 178. Les ressources élevées d’un territoire riche impliquent cependant un chiffre de population probablement lui aussi élevé, grâce aux possibilités de production et d’importation de nourriture, à la venue également de métèques et d’esclaves, attirés par le commerce ou eux-mêmes objets d’échange : ces faits paraissent conserver une certaine valeur, au moins à titre d’approximation, aux calculs de Ruschenbusch.

    18 M.H. Hansen postule même au IVe siècle un nombre de citoyens (30 000) supérieur à celui d’E. Ruschenbusch : E. Ruschenbusch, « Demography and Democracy. Doch noch einmal die Bürgerzahl Athens im 4. Jh v. Chr. », ZPE, 72 (1988), p. 139-140 ; M.H. Hansen, Demography and Democracy. The Number of Athenian Citizens in the Fourth Century B.C., Copenhague-Herning, 1985 ; id., « Demography and Democracy Once Again », ZPE, 75 (1988), p. 189-193 ; id., La démocratie athénienne à l’époque de Démosthène, Paris, 20032, p. 115-123 (trad. fr. de The Athenian Democracy in the Time of Demosthenes: Structure, Principles and Ideology, Londres, 1991) ; L. Nixon-S. Price, loc. cit., p. 191 (cf. n. 11), ne croient guère aux méthodes de calcul d’E. Ruschenbusch.

    19 K.J. Beloch, Die Bevölkerung der griechisch-römischen Welt, Leipzig, 1886, p. 229. Ce chiffre a dû se maintenir à l’époque hellénistique : P. Gauthier, « Quorum et participation civique dans les démocraties grecques », dans C. Nicolet (éd.), Du pouvoir dans l’Antiquité : mots et réalités, CCG, 1 (1990), p. 73-99, a recensé des chiffres de participants à une assemblée dans diverses cités grecques : p. 90, Magnésie du Méandre compte 4678 participants lors d’une assemblée du IIIe siècle av. J.-C. (I. Magnesia 92 a), ce qui suppose un chiffre de citoyens supérieur : on croira difficilement que Milet et Éphèse comptent à cette époque une population civique inférieure à celle de Magnésie.

    20 E. Ruschenbusch, « Tribut und Bürgerzahl im ersten athenischen Seebund », ZPE, 53 (1983), p. 125-143 (Éphèse p. 143). Autres calculs et bilans : id., « Die Zahl der griechischen Staaten und Arealgrösse und Bürgerzahl der “Normalpolis” », ZPE, 59 (1985), p. 253-263.

    21 Les Kilbianoi n’ont cependant jamais fait partie du territoire d’Éphèse. Les Helléniques d’Oxyrhynque, dans l’épisode de l’attaque des Athéniens contre Éphèse daté de 409, en indiquant un événement concernant la plaine des Kilbianoi, n’indiquent pas qu’il s’agit d’un territoire éphésien et ne sauraient servir de preuve de large étendue territoriale éphésienne. D’ailleurs le papyrus est fragmentaire et il ne s’agit que d’une restitution tentante : Hellenika Oxyrhynchia. Cairo Fragments, Col. I, l. 16 [Κιλ ?]βι[α]νωι ? πεδίωι. Il semble qu’il n’y ait pas place pour quatre lettres entre les deux caractères lisibles et le mot plaine. Les Kilbianoi font partie du territoire du conventus d’Éphèse à l’époque d’Auguste et au Ier siècle, mais pas du territoire de la cité : Pline l’Ancien, V, 31, 120.

    22 P(h)ygela : par exemple IG I3, 269, I, 29 (443/2) ; le versement de 100 drachmes (soit un tribut d’un talent) est conservé en IG I3, 272, II, 13 (440/39), et il passe à 150 (donc un talent et demi) en 432/1 (IG I3, 280, I, 47) ; Marathesion : par ex. IG I3, 270, I, 6 (442/1), versement de 50 drachmes (soit un demi-talent) ; mais en IG I3, 279, I, 16 (433/2) par ex., versement de 33 drachmes 2 oboles, soit 2000 drachmes seulement. Sur les deux cités, cf. M.H. Hansen et T.H. Nielsen, An Inventory of Archaic and Classical Poleis, Oxford, 2004, p. 1082, s. v. Marathesion, et p. 1094, s.v. Pygela.

    23 J.M. Balcer, « Fifth Century Ionia : a Frontier revisited », REA, 87 (1985), p. 31-42 (surtout p. 40), à lire avec les remarques critiques de M. Piérart à la suite de l’article (p. 42) ; les vestiges archéologiques, globalement peu nombreux, ne permettent guère par eux-mêmes de conclure à un déclin : R. Osborne, « Archaeology and the Athenian Empire », Transactions and Proceedings of the American Philological Association, 129 (1999), p. 319-332.

    24 Liste commode de tributs de cités ioniennes dans I. Kymè, p. 180 ; pour des listes plus complètes, cf. R. Meiggs, The Athenian Empire, Oxford, 1972, p. 540-542.

    25 Plutarque, Lysandre, 3.

    26 Déjà en ce sens K.J. Beloch, op. cit. (n. 19), p. 230.

    27 G. Le Rider, dans Annuaire du Collège de France 1994-1995. Résumé des cours, 95 (1995), p. 767-779 (= Écrits d’histoire monétaire et financière du monde grec. Écrits 1958-1998, Athènes, 1999, III, p. 1043-1055, surtout p. 1052); S. Hurter, « The “Pixodaros Hoard”: a Summary », dans R. Ashton et S. Hurter (éd.), Studies in Greek Numismatics in Memory of Martin Jessop Price, Londres, 1998, p. 147-153 (p. 148-149).

    28 P. Debord, L’Asie Mineure au IVe siècle (412-323 a. C.), Bordeaux, 1999, p. 398-399 (frappes monétaires) ; id., « Chiliastys », REA, 86 (1984), p. 201-211. Pour l’autel : U. Muss et A. Bammer, Der Altar des Artemisions von Ephesos, 2 vol., Vienne (FiE XII, 2), 2001.

    29 L. Robert, « Sur des inscriptions d’Éphèse », RPh, 41 (1967), p. 37-40 (= OMS, V, p. 377-380), qui s’appuie sur P. Charneux (cf. infra, n. 38) ; G. Ragone, « Pygela/Phygela. Fra Paretimologia e storia », Athenaeum, 84,1 (1996), p. 183-241 ; 84,2 (1996), p. 341-379, a fait le point sur ce qu’on savait de cette petite cité. Le traité de P(h)ygela avec Milet est l’inscription I. Milet, I, 3, 142 (= I. Ephesos, VII, 1, 3110).

    30 P. Debord, op. cit. (n. 28), p. 210-211. Ravitaillement mené à bien : I. Ephesos, IV, 1455, est un acte de concession de la citoyenneté de la fin du IVe siècle, récompensant Agathocle fils d’Agémôn, Rhodien, qui a livré du blé à la cité ; aussi I. Ephesos, V, 1452 ; SEG, 39, 1989, 1159 (un marchand de blé). On connaît également à cette époque des préposés au blé (ἡιρεμενοις ἐπὶ τῶι σίτωι : I. Ephesos, V, 1461).

    31 Cf. I. Ephesos IV, 1408-1445; V, 1447-1476; VI, 2001-2016; SEG, 33, 1983, 932; 34, 1984, 1080-1081; 39, 1989, 1152-1171… Les cités d’origine sont variées : Acarnanie (1449) ; Athènes (1420-1421 ; 1443) ; Thèbes (IV, 1442 ; V, 1457 ; 1470 + SEG, 42, 1030) ; Larisa de Thessalie (SEG, 39, 1160) ; Olynthe (1454 ; SEG, 39, 1156) ; Rhodes (1453 ; 1455 ; SEG, 39, 1151) ; Elaia (1458) ; Clazomènes (1452 ; SEG, 39, 1157) ; Sardes (2010) ; Teos (1465) ; Magnésie du Méandre (1450 ; 1468 ; SEG, 39, 1153) ; Priène (2001) ; Milet (1409 ; 1411 ; SEG, 33, 932) ; Naucratis (1424-1425). Cette liste n’est qu’un choix.

    32 I. Ephesos VI, 2001 (chiffre en partie restitué).

    33 M. Sartre, L’Anatolie hellénistique de l’Égée au Caucase (334-31 av. J.-C.), Paris, 2003, p. 132-133.

    34 Récit de la fondation dans Strabon, XIV, 1, 21, et surtout Pausanias, I, 9, 7. D. Knibbe, s.v. Ephesos, RE Suppl. XII, Stuttgart, 1970, col. 256 (date) ; contra S. Karwiese, Gross ist die Artemis von Ephesos, Vienne, 1995, p. 64-67 : cet auteur estime que la nouvelle fondation a périclité et que ce n’est qu’avec la fondation de la province d’Asie qu’une nouvelle ville, en bonne partie romaine, naît et se développe au sein de l’enceinte lysimachéenne. Ce point de vue, excessif, s’appuie sur un fait troublant : l’absence presque totale de vestiges épigraphiques entre le milieu du IIIe siècle et le milieu du IIe siècle av. J.-C. ; de plus, Polyen, VIII, 57, paraît attester la destruction (provisoire ?) d’une partie des remparts après la chute de Lysimaque. Néanmoins, l’inscription attalide (Eumène II) mentionnant des pédonomes (I. Ephesos IV, 1101), ou le décret en l’honneur de Diodore (I. Ephesos I, 6), ainsi que les fouilles des vestiges de l’agora commerciale Tetragonos opérées à partir des années 80, avec la découverte de vestiges du IIIe siècle, que la céramique invite à dater de la première moitié du IIIe siècle av. J.-C., contredisent ce point de vue (cf. P. Scherrer [éd.], Ephesus. The New Guide, p. 140-146 ; voir aussi désormais P. Scherrer et E. Trinkl, Die Tetragonos Agora in Ephesos. Grabungsergebnisse von archaischer bis in byzantinische Zeit – ein Überblick. Befunde und Funde klassischer Zeit, Vienne [FiE XIII/2], 2006) et impliquent une cité fonctionnelle à son emplacement post-lysimachéen durant les IIIe et IIe siècles av. J.-C. Il n’y a donc pas de problème de localisation de la ville et le débat peut être considéré comme tranché. Il n’est néanmoins pas exclu que deux centres aient pu cohabiter un certain temps au moins, les environs de l’Artémision restant habités, mais la présence de la ville de Selçuk interdit des recherches plus approfondies.

    35 Bilan des connaissances encore partielles concernant le rempart dans P. Scherrer (et alii), Ephesos. Der neue Führer, Vienne, 1995, p. 68-71 [11] (= The New Guide, p. 66-69), avec renvois bibliographiques. Voir également P. Scherrer, « The Historical Topography of Ephesos », dans D. Parrish (éd.), Urbanism in Western Asia Minor, Portsmouth, 2001, p. 57-93 (p. 62-63) ; la question de la longueur du rempart lysimachéen et de la superficie de la ville à cette époque reste cependant ouverte pour certains chercheurs.

    36 Stéphane de Byzance, s.v. Ἔφεσος ; P. Debord, op. cit. (n. 28), p. 211, n. 66, prenant acte de l’existence d’au moins deux douzaines de chiliastyes vers cette époque, se demande s’il ne convient pas d’envisager déjà 20 000 ou 25 000 citoyens ; ce chiffre est sans doute excessif, dans la mesure où les chiliastyes ne sont pas forcément « remplies » à hauteur de 1 000 personnes exactement, mais il suffit qu’elles le soient aux deux tiers ou aux trois quarts environ pour se trouver face à une population civique dépassant nettement les dix mille citoyens.

    37 Absorption de Lébédos : Pausanias, I, 9, 7 ; VII, 3, 5. Sur la tendance à la diminution du nombre de cités en Asie hellénistique, cf. L. Robert, Monnaies grecques, Genève, 1967, p. 16-19 ; id., OMS VII, p. 318. Phygela partie d’Éphèse à partir de Lysimaque, afflux forcé de Colophoniens et de gens de Lébédos : L. et J. Robert, Claros I. Décrets hellénistiques, Paris, 1989, p. 80-85. On sait que les deux cités existèrent à nouveau par la suite.

    38 P. Charneux, « Liste ancienne de théarodoques », BCH, 90 (1966), p. 156-229 (p. 198-206) ; L. Robert, (n. 29) p. 36-40 (p. 40), pour l’époque de l’absorption par Éphèse.

    39 Décret mentionnant les 350 citoyens : ÖJh, 23, 1926, Beibl. col. 75 (= I. Ephesos, VII, 1, 3111).

    40 Le territoire de Milet s’est agrandi à plusieurs reprises par synoecisme : M. Piérart, « Athènes et Milet II : L’organisation du territoire », Museum Helveticum, 42, 1985, p. 293-295 (annexions de Myonte et Pidasa).

    41 En supposant à la fois un chiffre supérieur au total vraisemblable des citoyens de l’époque classique et en tenant compte de l’ordre de grandeur suggéré par Étienne de Byzance ; I. Magnesia, 92 a (4678 citoyens présents).

    42 Un autre indice d’une population fort nombreuse pourrait être les importations de blé attestées à plusieurs reprises dans les motifs de concession de citoyenneté (cf. n. 30 et 31).

    43 Larisa a émis un monnayage à la fin du IVe (jusqu’au IIIe siècle ?), cf. F. Imhoof-Blümer, Lydische Städtemünzen, p. 54, n. 2 ; id., Kleinasiatische Münzen, I, 72 (pl. II, 36) ; BMC Ionia, p. 153, n ° 1-2 (pl. XVII, 6) ; D. Knibbe (n. 2, col. 270), estime que Larisa appartient dès le IIIe siècle à Éphèse, aucune monnaie de la cité n’étant indiscutablement de cette époque.

    44 Un autre moment pourrait être à la rigueur 31-29, époque où Auguste séjourne à deux reprises à Éphèse, mais il paraît douteux de supposer qu’Auguste récompense une cité qui a servi de quartier général à Antoine. On n’osera pas penser que P. Vedius Pollio, dont la mission entre 29 et 27 av. J.-C. (plutôt que 27-25) a surtout concerné la réorganisation des finances des sanctuaires et peut-être du culte impérial, a eu un pouvoir suffisant pour dissoudre de petites communautés et les attribuer à Éphèse.

    45 Sur la prospérité et l’importance des frappes monétaires athéniennes de l’époque dans un contexte égéen, cf. A. Bresson, « The Athenian Mint in the Second Century BC and the Amphictionic Decree », Annali, 52 (2006), p. 45-85.

    46 Sur ces catégories, cf. P. Herz, « Das Bürgerrechtsdekret von Ephesos : Inschriften von Ephesos 8 : Gedanken zur Gesellschaft im spätrepublikanischen Kleinasien », dans H. Bellen et H. Heinen (éd.), Fünfzig Jahre Forschungen zur antiken Sklaverei an der Mainzer Akademie : 1950-2000 : Miscellaneazum Jubiläum, Stuttgart, 2001, p. 185-207 (p. 187-197) : néanmoins, il fait observer que les promotions civiques ne concernaient ni les épouses, ni les enfants des néo-citoyens, ce qui risquait d’annuler à terme les effets de ces concessions. Il faut croire que l’inscription a soit été vite caduque, soit que des changements se sont produits par la suite. Cf. infra, II, A.

    47 Appien, Mithridate, 61, 252 ; Granius Licinianus, 35, 82 Criniti. L’imperator romain a annulé la décision du roi du Pont conférant la liberté aux esclaves : Appien, Guerre de Mithridate, 61, 251.

    48 Il y a là un apport non négligeable, car Éphèse est la première cité d’Asie Mineure pour le nombre de gentilices non-impériaux connus, près de 225 : cf. F. Kirbihler, Notables, II, p. 417-433.

    49 Strabon, XIV, 1, 24 ; Pline, N.H., V, 31, 120 : « Ephesum alterum lumen Asiae » ; id., 115 : « attolitur monte Pion » ; Sénèque, Lettres à Lucilius, 102, 21 (trad. P. Veyne) : « Ephesum aut Alexandriam aut si quod est etiam nunc frequentius accolis laetiusve tectis solum. » Voir aussi G. Aujac, « Les très grandes villes chez les géographes grecs », MEFRA, 106, 2 (1994), p. 859-899, et J. Desanges, « Les très grandes villes chez les géographes latins », MEFRA, 106, 2 (1994), p. 901-919.

    50 Philostrate, Vie d’Apollonios de Tyane, VIII, 7, 8 : « Éphèse… qui a prospéré au-dessus de toutes les villes, aussi bien d’Ionie que de Lydie, qui a débordé jusque sur la mer, parce que son étendue dépasse celle du territoire sur lequel elle est bâtie… cette cité doit sa puissance… à sa population innombrable… ». L’affirmation vaut pour la fin du Ier siècle, époque d’action de son héros et de grande activité de construction, et sans doute encore pour l’époque de la rédaction, la seconde décennie du IIIe siècle ; Dion Chrysostome, 40, 11 (allusion à l’activité de construction aux alentours de 100-105) ; Pausanias, IV, 31, 8 ; Aelius Aristide, 23, 24.

    51 Cf. A. Heller, op. cit. (n. 9).

    52 D’après F. Hueber, « Zur Städtebaulichen Entwicklung des hellenistisch-römischen Ephesos », Istanbuler Mitteilungen 47 (1997), p. 251-269; cf. id., Ephesos. Gebaute Geschichte, Mayence, 1997, p. 42. Pour comparaison, cf. la discussion des dimensions d’Antioche en Syrie dans J.-P. Callu, « Antioche la Grande. La cohérence des chiffres », MEFRA, 109, 1 (1997), p. 127-169.

    53 Néanmoins, P. Scherrer estime qu’une section de mur coupant la ville à hauteur du théâtre correspond à la limite Nord du mur lysimachéen : la superficie intra-muros serait plus réduite, en raison du caractère tardo-antique de la portion de mur la plus septentrionale, mais le fait ne change rien quant à l’étendue de l’habitat lui-même, toute la partie Nord de la ville ayant déjà été bâtie durant les Ier-IIe siècles.

    54 Bien que les fouilles n’aient pas été exhaustives et que la preuve absolue manque, la vision de ruines antiques en altitude, visibles de la partie haute de la maison pentue II, s’impose à l’observateur.

    55 Cf. l’article d’H. Engelmann, « Der Koressos, ein ephesischer Stadtviertel », ZPE, 115 (1997), p. 131-135 (P. Scherrer estime cependant que le quartier apparaissait déjà au Sud du stade). Pour l’importance des faubourgs des grandes villes antiques, cf. Libanios qui mentionne des faubourgs d’Antioche aussi peuplés que la ville : discussion des sources dans Er. Will, « Antioche sur l’Oronte, métropole de l’Asie », Syria, 74 (1997), p. 99-113 (p. 110-111) ; on s’intéresse beaucoup depuis quelques années au suburbium de Rome : F. Kolb, Rom. Die Geschichte der Stadt in der Antike, Munich, 1995, p. 309-329 ; X. Lafon, « Le Suburbium », Pallas, 55 (2000), p. 199-214 ; LTUR. Suburbium, I, A-B, Rome, 2001 ; R. Witcher, « The Extended Metropolis: Urbs, Suburbium and Population », JRA, 18, 1 (2005), p. 120-138.

    56 Premiers résultats d’un Survey d’U. Outschar, « Produkte aus Ephesos in aller Welt ? », dans Berichte und Materialien des österreichischen archäologischen Instituts, 5, Vienne, 1993, p. 46-52 (ici p. 46 ; 49-50 ; 52).

    57 Ibid., p. 46 ; 51-52. Pour des raisons évidentes, on n’a pas retrouvé trace du travail du cuir, que l’abondante présence d’eau grâce à un aqueduc rend plausible.

    58 I. Magnesia 105 ; I. Priène 500, arbitrage de Lysimaque (v. 283/2 av. J.-C.) ; I. Priène 37, arbitrage de juges rhodiens entre Priène et Samos (début du IIe siècle av. J.-C.), confirmé après 133 av. J.-C. par des juges d’une cité inconnue (I. Priène 42) ; D. Rousset recense dans son article de 1994 (n. 76), p. 99, plus de 160 documents en rapport avec les frontières, dont 75 actes de délimitation de frontières civiques (d’après l’article de 1999 sur les territoires de Phocide [cf. infra, n. 76] p. 51, n. 77).

    59 I. Ephesos, VII, 1 + 2.

    60 J. et L. Robert, BE 1982, 306-311, p. 373-377 ; BE, 1982, 308 : « annexionnisme virulent ». On trouvait pourtant depuis longtemps un certain nombre de renseignements dans la discussion de la localisation de certains villages dans J. Keil et A. von Premerstein, Bericht über eine dritte Reise in Lydien und den angrenzenden Gebieten Ioniens, Vienne, 1914, p. 82-86 ; cette critique virulente concerne surtout I. Ephesos VII, 1 + 2.

    61 Côte des Ephésiens : Strabon, XIV, 1, 20 ; voir aussi P. Funke, « PERAIA : Einige Überlegungen zum Festlandbesitz griechischer Inselstaaten », dans V. Gabrielsen et alii (éd.), Hellenistic Rhodes : Politics, Culture, and Society, Aarhus, 1999, p. 55-75 (p. 62-63).

    62 Ibid., p. 62-63.

    63 Pour P (h)ygela, cf. supra, n. 29. Pactyès : Strabon, XIV, 1, 13. Échange de Marathésion contre Neapolis : Strabon, XIV, 1, 20. Iles à Pérée : ibidem ; voir aussi P. Debord, op. cit., p. 268-270 et 438, et id., « Les Pérées des îles voisines de l’Asie Mineure », REA, 103 (2001), p. 205-219 ; surtout désormais C. Carusi, Isole e Peree in Asia Minore. Contributi allo studio dei rapporti tra poleis insulari e territori continentali dipendenti, Pise, 2003. Sur les doutes concernant Azizie, et la non-appartenance de Naipli à Éphèse, cf. L. Robert, BE, 1982, 306 (voir la carte en I. Ephesos VII, 1, p. 100).

    64 H. Engelmann, « Inschriften aus Metropolis », ZPE, 125 (1999), p. 137-146 (p. 143-146). J’avoue ne pas comprendre comment D. Knibbe, loc. cit. (n. 2, col. 270), peut affirmer que Metropolis appartient à Éphèse, alors qu’il s’agit d’une cité auteur de décrets.

    65 Description du Gallésion : L. Robert, dans Études déliennes (BCH Suppl. 1), p. 474-476, qui insiste sur le caractère de frontière que constitue la montagne entre Éphèse et Colophon-Claros ; instructif passage de L. et J. Robert, Claros I. Décrets hellénistiques, Paris, 1989, p. 85.

    66 I. Ephesos, Ia, 8.

    67 Cf. Strabon, XIII, 3, 2.

    68 Qu’il s’agisse de l’antique Ἀπατειρηνῶν κατοικία ou de Θυαίρα : R. Meriç, R. Merkelbach et S. Şahin, « Der antike Name des heutigen Tire », ZPE, 33 (1979), p. 191-192.

    69 L. Robert, Noms indigènes dans l’Asie Mineure gréco-romaine, Paris, 1963, p. 145.

    70 Contributions de 250 deniers : I. Ephesos V, 1687, fr. 1, Col I (= col. II par raccord avec SEG 39, 1176) ; les Italiens appartiennent indiscutablement à une chiliastye à partir de Claude (cf. I. Ephesos IV, 1005).

    71 On ne discutera pas ici la localisation, parfois précisée pour certains villages dès J. Keil et A. von Premerstein, op. cit. (n. 60), p. 82-86.

    72 J. Kobes, « Fremdes Getreide. Beobachtungen zum Problem der Getreideversorgung in der kaiserzeitlichen Provinz Asia », Laverna, 10 (1999), p. 81-98.

    73 L. Robert, Hellenica VII, 1949, p. 153-160. Lorsqu’il s’agit de plaines, on trouve trace d’activités agricoles : I. Priène, 37 ; 363.

    74 Sur l’importance du pastoralisme et l’utilisation de la montagne comme terrain de pâture, cf. pour l’époque classique et hellénistique C. Chandezon, L’élevage en Grèce : l’apport de l’épigraphie (Ve-Ier siècle av. J.-C.), Bordeaux (collection Ausonius), 2003, (les p. 205-248 évoquent l’élevage en Ionie, en incluant le beau dossier de Mylasa en Carie, de basse époque hellénistique), qui pense p. 402 qu’au Sud de l’Ionie la place de l’élevage ne pouvait qu’être réduite. Il existe cependant au moins un témoignage d’élevage de chevaux dans les domaines d’Artémis (SEG, 45, 1995, 1583). Région voisine : id., « Paysage et économie rurale en Asie Mineure à l’époque hellénistique, à partir de quelques baux de Mylasa (IIe-Ier siècle av. J.-C.) », Histoire et sociétés rurales 9 (1998), p. 33-56. Résolution des conflits frontaliers : G.P. Burton, « The Resolution of Territorial Disputes in the Provinces of the Roman Empire », Chiron, 30 (2000), p. 195-215 (Éphèse, Héraclée de la Salbakè, Philomélion, Antioche de Pisidie).

    75 D’après R.A. Talbert (éd.), Barrington Atlas of the Greek and Roman World, Princeton, 2000, carte 56.

    76 Sur les questions de territoire et de frontière, bibliographie indicative : L. Robert, Hellenica VII, 1949, p. 154-157 ; id., Hellenica X, 1955, p. 283-291 ; id., OMS II, p. 820-821 ; J. et L. Robert, Fouilles d’Amyzon en Carie, Paris, 1983, p. 101-109 ; J. Tréheux, « La frontière en Grèce », dans Frontières et contacts de civilisation, Colloque universitaire franco-suisse, Besançon-Neuchâtel, octobre 1977, Neuchâtel, 1979, p. 31-39 ; M. Sartre, « Aspects économiques et aspects religieux de la frontière dans les cités grecques », Ktèma, 4 (1979), p. 213-224 ; G. Daverio-Rocchi, Frontiera e confini nella Grecia antica, Rome, 1988 ; id., « La hiera chora di Apollo, la piana di Cirra e i confini di Delphi », dans M.-M. Mactoux et E. Geny (éd.), Mélanges P. Lévêque, I, Religion, Paris, 1989, p. 117-125 ; D. Rousset, « Les frontières des cités grecques. Premières réflexions à partir du recueil des documents épigraphiques », CCG, 5 (1994), p. 97-126. On trouve p. 118-119 : « La part des traits orographiques… montre que les confins des cités grecques étaient souvent montagneux et confirme la représentation que nous avons des frontières grecques, courant sur les reliefs qui entourent un petit bassin cultivable et l’agglomération urbaine. Ce n’est pas céder au déterminisme géographique que de voir sur les hauteurs les frontières, dont la ligne pouvait être tracée jusqu’en altitude, dans des régions inhabitées » ; id., « Centre urbain, frontière et espace rural dans les cités de Grèce centrale », dans M. Brunet (éd.), Territoire des cités grecques, Actes de la table ronde internationale organisée par l’École Française d’Athènes (31 octobre-3 novembre 1991), Athènes-Paris, (BCH Suppl. 34), 1999, p. 35-77 ; id., Le territoire de Delphes et la terre d’Apollon, Athènes-Paris, 2002 (avec la bibliographie, en particulier p. 304-305) ; id., « La cité et son territoire dans la province d’Achaïe et la notion de Grèce romaine », AnnalesHSS, 59 (2004), p. 363-383 (surtout une discussion de la densité des sites sur le territoire de la Grèce péninsulaire) ; J.-M. Bertrand, « Frontières externes, frontières internes des cités grecques » dans C. Moatti (éd.), La mobilité des personnes en Méditerranée de l’Antiquité à l’époque moderne. Procédures de contrôle et documents d’identification, Paris-Rome, 2004, p. 71-98. Sur le concept et les limites de frontière, y compris celles des provinces romaines, une somme considérable : E. Olshausen et H. Sonnabend (éd.), Grenze und Grenzland. 4. Stuttgarter Kolloquium zur historischen Geographie des Altertums 1990, Amsterdam, 1994. Pour une méthodologie exemplaire quant à la recherche des frontières d’une cité antique : J. Dalaison, « Les limites de la cité d’Amaseia au Haut-Empire », Anat. Ant., 10 (2002), p. 261-276.

    77 Cf. la carte reproduite, qui constitue une version modifiée et améliorée de la carte du territoire figurant dans la thèse soutenue en 2003.

    78 Pour tout ce passage, cf. la carte : j’ai marqué les limites en pointillé, puisqu’elles marquent en l’état actuel des connaissances, des frontières approximatives.

    79 K.J. Beloch, op. cit. (n. 19), p. 230-231.

    80 T.RS. Broughton, « Roman Asia Minor », dans T. Frank (éd.), An Economic Survey of Ancient Rome, IV, Baltimore-New-York, 1938, IV, p. 815.

    81 F. Jacques et J. Scheid, Rome et l’intégration de l’Empire (44 av. J.-C.-260 apr. J.-C.), I. Les structures de l’empire romain, Paris, 1990, p. 299 ; le texte était aussi invoqué par T.R.S. Broughton, op. cit., p. 813.

    82 R.S. Bagnall et P.D. Worden, « The Forty Thousands Citizens of Ephesus », Classical Philology, 83 (1988), p. 220-223.

    83 H.W. Pleket, « The Roman state and the economy: the case of Ephesos », dans Entretiens d’archéologie et d’histoire. Les échanges dans l’Antiquité : le rôle de l’État, Saint-Bertrand-de-Comminges, 1994, p. 115-126. Le chiffre est cité par C.R. Whittaker, p. 231, qui le rejette. H.W. Pleket n’a pas voulu indiquer un total aussi élevé : p. 119 il évoque 120 000 citoyens et les membres de leurs familles (inclus, cf. SEG, 44, 1570), ainsi que ca 60 000 esclaves et étrangers, ce qui ferait un peu moins de 200 000 habitants.

    84 J. Kobes, loc. cit. (n. 72), p. 81-98.

    85 C. Nicolet, « Subsistances et mégalopoles méditerranéennes », dans C. Nicolet, R. Ilbert et J.-C. Depaule (éd.), Mégalopoles méditerranéennes. Géographie urbaine rétrospective. Actes du colloque organisé par l’EFR et la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme (Rome, 8-11 mai 1996), Paris-Rome (CEFR 261), 2000, p. 732-750 (p. 745).

    86 Remarque orale d’H. Thür lors de nos entretiens à Éphèse, au mois de juillet 2001 : la population de la ville a pu atteindre 150 000 habitants ; la taille du théâtre par rapport à la superficie totale urbaine et le fait que les couches inférieures de la population aient souvent vécu entassées rendent ce chiffre vraisemblable.

    87 Autre tentative méthodologique en matière d’estimation de population : E. Ruschenbusch, « Phokis, Lebensraum und Bevölkerungszahl. Möglichkeiten und Grenzen bei der Feststellung von Einwohnerzahlen im griechischen Mutterland », dans E. Olshausen et H. Sonnabend (éd.), 3. Stuttgarter Kolloquium zur historischen Geographie des Altertums 1987, Stuttgart, 1991, p. 299-312 (scepticisme de D. Rousset, Le territoire de Delphes et la terre d’Apollon, Athènes-Paris, 2002, p. 289, n. 1053).

    88 Mention des cinq tribus éphésiennes originelles : Étienne de Byzance, s. v. Bevnna. K. J. Beloch, op. cit. (n. 19), p. 230-231. Articles de réflexion fondamentaux sur la répartition du corps civique à Milet et dans les cités ioniennes (y compris la question des chiliastyes) : M. Piérart, « Athènes et Milet I. Tribus et dèmes milésiens », Museum Helveticum, 40 (1983), p. 1-18 ; id., « Athènes et Milet II. L’organisation du territoire », Museum Helveticum, 42 (1985), p. 276-299 ; id., « Modèles de répartition des citoyens dans les cités ioniennes », REA, 87 (1985), p. 169-190 (les chiliastyes d’Éphèse p. 175-176) ; H. Engelmann, « Phylen und Chiliastyen von Ephesos », ZPE, 113 (1996), p. 94-100 : à partir du début du IIIe siècle huit tribus (d’après les tableaux et listes p. 96-99, qui décomptent 35 chiliastyes dans les tribus, 10 chiliastyes attestées, mais non-attribuables à une tribu précise, et 5 chiliastyes non-attestées, mais possibles pour la phylè VI). Autre exemple : C. Marek, « Die Phylen von Claudioupolis, die Geschichte der Stadt und die Topographie Ostbithyniens », Museum Helveticum, 59, 1 (2002), p. 31-50.

    89 J. Keil, « Die ephesischen Chiliastyen », ÖJh, 16 (1913), p. 245-248 ; M. Piérart, loc. cit. (n. 88), p. 175-176 ; 184-188 ; P. Debord, op. cit. (n. 28), p. 209-210.

    90 500 ? 600 ? 800 ? Le total a pu varier au sein de chaque chiliastye.

    91 Elle est attestée pour des familles de notables provenant de cités plus petites, en particulier la voisine Hypaipa.

    92 Cette proportion est fournie par Galien, V, 49 (Kuehn).

    93 Dans SEG, 44, 1570.

    94 Parmi des dizaines de textes, et en n’évoquant pas les affranchis de grands notables, mais de simples inscriptions funéraires mentionnant les affranchis autorisés à être inhumés dans la tombe : I. Ephesos, VI, 2217 D ; 2218 C ; 2261 ; 2291 ; 2543. On connaît des marchands d’esclaves, qui in statario negotiantur : I. Ephesos, VII, 1, 3025 (Tibère) ; III, 646 (Trajan).

    95 Cf. F. Kirbihler, Les notables d’Éphèse. Essai d’histoire sociale (133 av. J.-C.-262 apr. J.-C.), thèse soutenue à Tours, 2003, 4 vol., III, p. 933-989 (p. 967-970).

    96 La documentation éphésienne recoupe les données fournies par le roman antique d’Achille Tatius, Les aventures de Leucippé et Clitophon : cf. ma discussion dans F. Kirbihler, op. cit., III, p. 967-970 (à paraître).

    97 Ce thème suscite des recherches croissantes : cf. la mise au point et la bibliographie dans mon article sur des crises de subsistance : F. Kirbihler, « Les émissions de monnaies d’homonoia et des crises alimentaires en Asie Mineure sous Marc Aurèle », REA, 108, 2 (2006), p. 613-640. Attestation d’importations de blé d’Égypte : I. Ephesos II, 211 ; 274 (autorisation de s’approvisionner en Égypte par Hadrien, avant 128/9 ; également I. Ephesos VII, 1, 3016 (acheminement de blé depuis l’Égypte au début du IIIe siècle) ; association des peseurs de grain (I. Ephesos, VII, 1, 3216) ; fréquence des crises de subsistance en Asie Mineure : J. Kobes, loc. cit. (n. 72).

    98 Au moins 50 000 citadins durant la seconde moitié du Ier siècle, plus de 100 000 au second ?

    99 Sénèque, Lettres à Lucilius, 102, 21.

    100 F. Hueber, Ephesos. Gebaute Geschichte, Mainz, 1997, p. 48 ; les différentes phases et agrandissements sont aussi discutés dans id., loc. cit., p. 257 : néanmoins, la construction de bâtisses de trois à peut-être cinq étages (La Hanghaus I aurait compté cinq niveaux d’après Anzeiger, 1964, p. 43) à partir du Ier siècle ne peut plus être invoquée à partir de l’exemple de la maison pentue I : cf. C. Lang-Auinger, Hanghaus 1 in Ephesos. Der Baubefund, Vienne, 1996 ; id. (et alii), Hanghaus 1 in Ephesos. Funde und Ausstattung, Vienne, 2003. En revanche, la Hanghaus II comporte au moins partiellement trois étages, en comptant le rez-de-chaussée.

    101 Sauf peut-être à l’époque flavienne : Apollonios de Tyane sauve les Éphésiens d’une pestilence qui les accable : Philostrate, Vie d’Apollonios de Tyane, 8, 7, 8. Mais l’épisode est-il historique ?

    102 F. Kirbihler, op. cit. (n. 95), I, p. 330-384.

    103 Philostrate, Vies des sophistes, I, 23; L.M. White, « Urban Development and Social Changes in Imperial Ephesos », dans H. Koester (éd.), Ephesos, Metropolis of Asia. An Interdisciplinary Approach to its Archaeology, Religion and Culture (= Harv. Theol. Stud. 41), Valley-Forge, 1995, p. 27-79 (Philostrate cité p. 45 ; pessimisme quant au solde démographique naturel [à mon avis exagéré, en particulier dans ce cas précis], p. 44-50 ; importance de l’immigration, p. 57-63, liste de régions p. 61 ; listes de personnes nées ailleurs, p. 66-79).

    104 R. P. Duncan-Jones, « The Impact of the Antonine Plague », JRA, 9 (1996), p. 108-136. K. Strobel, « Zu Lesung und Deutung einer Grabinschrift aus Stobi und zu den Auswirkungen der Seuche von 166 n. Chr. », ZPE, 75 (1988), p. 232-234; J. Greenberg, « Plagued by Doubt : Reconsidering the Impact of a Mortality Crisis in the 2nd c. A.D. », JRA, 16 (2003), p. 413-425 ; C. Bruun, « The Antonine Plague in Rome and Ostia », JRA, 16 (2003), p. 426-434. Situation en Égypte : R.S. Bagnall, « P. Oxy. 4527 and the Antonine plague in Egypt : death or flight? », JRA, 13, 1 (2000), p. 288-292 ; W. Scheidel, « A model of demographic and economic change in Roman Egypt after the Antonine plague », JRA, 15, 1 (2002), p. 97-113; contra, R.S. Bagnall, « The effects of plague : model and evidence », JRA, 15, 1 (2002), p. 114-120; C.P. Jones, « Ten Dedications “to the Gods and Godesses” and the Antonine Plague », JRA, 18, 1 (2005), p. 293-301.

    105 Tous les oracles de Claros ne sont cependant pas de la même époque ; crises de subsistances, cf. F. Kirbihler, loc. cit. (n. 97), un bilan des crises alimentaires entre 165 et 171.

    106 On connaît 14, peut-être 17 femmes prytanes entre 160 et 200 environ : Furia Paulle (TAM V, 2, 969) ; Vedia Phaedrina (I. Ephesos Ia, 47 ; III, 733) ; Vedia Papiane (Ia, 47) ; Claudia Antonia (Ia, 47) ; Cornelia Paulla (Ia, 47) ; Terentia Flavianè (Ia, 47 ; III, 720 A ; IV, 1135 A) ; Terentia Aelianè (Ia, 47 ; III, 720 A) ; Iulia Damianè Paulla (Ia, 47 ; III, 980) ; Claudia Crateia Verianè (III, 980) ; Vedia Iusta (I, 47 ; VII, 1, 3072) ; Vedia Pallas (IV, 1135 A) ; Iulia Modesta (IV, 1135 A) ; Caninia Severa (IV, 1135 A) ; Cerinia Cimberis (IV, 1135 A) ; Antonia Phrygille (VII, 1, 3072) ; peut-être aussi Flavia Chrysanthe (SEG, 34, 1104) ; Lollia (IV, 1074) et Claudia Severa (III, 956), qui peuvent aussi avoir été actives un peu après 200.

    107 Les Terentiae constituent sans doute un exemple probant : Terentia Aelianè et Terentia Flavianè (cf. n. 106) sont deux sœurs, on ne leur connaît pas de frère, comme pour la plupart des autres prytanes féminins.

    108 Liste de ces distributions dans F. Kirbihler, op. cit., (n. 95), III, p. 899-900 (concours) ; 903-911 (argent, huile, blé) ; évidemment, tout le problème est de savoir si les inscriptions enregistrent là des nouveautés ou se contentent de reproduire des faits réguliers conservés auparavant uniquement sur support périssable.

    109 Absence de constructions significatives après 165 : l’initiative privée disparaît presque entièrement : cf. infra.

    110 L.M. White, loc. cit. (n. 103), en particulier p. 40-64, optimiste quant au phénomène global de croissance jusqu’aux années 210 au moins ; P. Scherrer, « The Historical Topography of Ephesos », dans D. Parrish (éd.), Urbanism in Western Asia Minor, Portsmouth, 2001, p. 78-79, très prudent et même elliptique quant à l’interprétation de l’époque sévérienne.

    111 F. Hueber, « Zur Städtebaulichen Entwicklung des hellenistisch-römischen Ephesos », Istanbuler Mitteilungen, 47 (1997), p. 251-269; id., Ephesos. Gebaute Geschichte, Mayence, 1997, p. 49-52.

    112 M. Aurelius […] a donné durant le premier tiers du IIIe siècle, sans doute après 212, 20 000 deniers à l’occasion de la grande-prêtrise pour la rénovation du port, probablement son nettoyage et son dragage (I. Ephesos, VII, 1, 3071) ; Valerius Festus a fait agrandir et sans doute restaurer le port encore vers le milieu du IIIe siècle (SEG, 34, 1984, 1094).

    113 D. Knibbe, « Der Asiarch M. Fulvius Publicianus Nikephoros, die ephesischen Handwerkszünfte und die Stoa des Servilius », ÖJh, 56 (1985), p. 71-77.

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    Ce livre est cité par

    • Chiai, Gian Franco. (2020) Le culte de Zeus Brontôn : l’espace et la morphologie du dieu de l’orage dans la Phrygie d’époque romaine. Archiv für Religionsgeschichte, 21-22. DOI: 10.1515/arege-2020-0013

    Ce chapitre est cité par

    • Tadajczyk, Konrad. (2022) ‘PRIVILEGIA CONCESSA DIANAE EPHESIAE AB IMPERATORE HADRIANO’. PRZYWILEJE NADANE ARTEMIDZIE EFESKIEJ PRZEZ CESARZA HADRIANA. TEKST ‒ TŁUMACZENIE ‒ KOMENTARZ. Zeszyty Prawnicze, 22. DOI: 10.21697/zp.2022.22.3.12

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    Kirbihler, F. (2009). Territoire civique et population d’Éphèse (Ve siècle av. J.-C.-IIIe siècle apr. J.-C.). In H. Bru, F. Kirbihler, & S. Lebreton (éds.), L’Asie mineure dans l’Antiquité : échanges, populations et territoires (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.98454
    Kirbihler, François. « Territoire civique et population d’Éphèse (Ve siècle av. J.-C.-IIIe siècle apr. J.-C.) ». In L’Asie mineure dans l’Antiquité : échanges, populations et territoires, édité par Hadrien Bru, François Kirbihler, et Stéphane Lebreton. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2009. https://doi.org/10.4000/books.pur.98454.
    Kirbihler, François. « Territoire civique et population d’Éphèse (Ve siècle av. J.-C.-IIIe siècle apr. J.-C.) ». L’Asie mineure dans l’Antiquité : échanges, populations et territoires, édité par Hadrien Bru et al., Presses universitaires de Rennes, 2009, https://doi.org/10.4000/books.pur.98454.

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    Bru, H., Kirbihler, F., & Lebreton, S. (éds.). (2009). L’Asie mineure dans l’Antiquité : échanges, populations et territoires (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.98343
    Bru, Hadrien, François Kirbihler, et Stéphane Lebreton, éd. L’Asie mineure dans l’Antiquité : échanges, populations et territoires. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2009. https://doi.org/10.4000/books.pur.98343.
    Bru, Hadrien, et al., éditeurs. L’Asie mineure dans l’Antiquité : échanges, populations et territoires. Presses universitaires de Rennes, 2009, https://doi.org/10.4000/books.pur.98343.
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