La proximité en politique
| ,Troisième partie. Une action publique de proximité?
11. La proximité au risque de la banalisation
La politique territoriale du ministère de la Culture en question(s)
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FranceTexte intégral
- 2 La nomenclature regroupe, entre autres, les disquaires, les libraires et les marchands de journaux
- 3 « Je suis particulièrement attaché à ce que le ministère de la culture rééquilibre ses actions au (...)
- 4 Urfalino (P.), 2004, L’invention de la politique culturelle, Hachette Littératures, p. 39 sq. (1re(...)
1Pour illustrer son propos, le ministre de la Culture et de la Communication rappelle l’année passée en province à « évaluer la situation » : « […] Récemment, j’en faisais le compte. Au cours de l’année écoulée, j’aurai visité et travaillé dans dix-neuf régions et dans une cinquantaine de départements. » Particulièrement apparente en amont de l’action publique, la nécessité d’un contact avec le « terrain » se retrouve, de façon beaucoup plus concrète, au niveau de la politique définie par le nouveau ministère : lors de la même conférence, en effet, le ministre annonce le lancement d’un programme de « médiathèques de proximité » et de soutien, en partenariat avec le secrétariat d’État aux petites et moyennes entreprises, aux « commerces culturels de proximité2 ». À l’image d’autres domaines d’intervention publique (justice, police, etc.), l’impératif de proximité s’est progressivement imposé sur l’agenda des autorités culturelles centrales, comme en témoigne son invocation régulière par les ministres de la Culture depuis une dizaine d’années3. Ce constat, a priori banal, prend un relief singulier si l’on rappelle que la légitimité du ministère de la Culture est à l’origine fondée, pour reprendre les termes de Philippe Urfalino, sur la « philosophie de l’État esthétique4 », c’est-à-dire sur la représentation d’un État omnipotent, gardien de l’excellence culturelle. Comment est-on passé d’une telle position desurplomb à la reconnaissance d’une certaine « éthique du proche », appelée à orienter les politiques culturelles contemporaines ?
- 5 Nous détournons ici une expression de Claude Grignon et Jean Claude Passeron, in Grignon (C.), Pas (...)
- 6 Fumaroli (M.), 1992, L’État culturel. Essai sur une religion moderne, Paris, Éditions de Fallois.
- 7 Offre conçue dans une large acception puisqu’elle s’applique aussi, comme on l’a souligné, aux « c (...)
- 8 On peut mentionner la baisse des crédits inscrits au titre VI du budget ministériel (c’est-à-dire (...)
- 9 Lefebvre (R.), 2002, « La proximité à distance. Esquisse de typologie des interactions élus-citoye (...)
2L’irruption de la « proximité » sur l’agenda des politiques culturelles est indissociable des mutations affectant l’identité du département ministériel qui en a la charge. Bien loin de l’image déformée renvoyée par le « concept bulldozer5 » d’« État culturel6 », l’administration de la culture se trouve en effet au centre d’une configuration complexe et concurrentielle d’intervenants au sein de laquelle elle éprouve, sur le long terme, sa légitimité (ou sa « crédibilité », pour reprendre une expression fréquemment utilisée par les responsables de la rue de Valois). Dans ce cadre, la revendication ministérielle de proximité, qui se diffuse au tournant des années quatre-vingt-dix, peut faire l’objet d’une double interprétation. Il est possible de la considérer, d’une part, comme une source de légitimité nouvelle fournissant à l’institution les bases d’un programme de rééquilibrage de l’intervention culturelle, au profit de zones présentées comme « défavorisées » (quartiers, villages, etc.); la proximité, entendue ici comme garantie d’une égalité d’accès à l’offre culturelle7 sur l’ensemble du territoire, repose sur l’idée d’un droit des populations rurales et périurbaines à bénéficier des mêmes avantages que ceux mis à la disposition des citadins (et sur l’idée, implicite mais intimement liée, d’un même « besoin » de culture). Mais elle peut aussi s’interpréter, d’autre part, comme le reflet d’un différentiel de pouvoir moins élevé, le signe de l’avènement d’un registre d’intervention plus modeste, qu’un certain nombre d’indices (chiffres, discours, etc.8) tendent à confirmer pour la période évoquée ici. Les deux interprétations, en réalité indissociables, posent un certain nombre d’interrogations essentielles quant aux usages de la proximité comme norme d’intervention publique : de quelle marge de manœuvre réelle, par exemple, le ministère dispose-t-il lorsqu’il se déplace, pour ainsi dire, sur le « terrain » d’intervenants pour qui la « proximité » constitue un registre classique de légitimation, au premier rang desquels, les élus locaux9 ? Dans quelle mesure une notion aussi élastique peut-elle servir de guide pour l’intervention culturelle ?
- 10 Le programme des « équipements culturels de proximité » peut être considéré, à plus d’un titre, co (...)
3Les modalités de diffusion de l’impératif de « proximité culturelle » seront analysées, dans cette contribution, à partir de la politique d’équipement du ministère de la Culture ; depuis la réalisation des maisons de la culture, en effet, ce répertoire d’intervention publique naturalisé – mais relativement peu questionné – fournit un bon terrain d’observation de l’évolution des politiques culturelles. Un détour historique permettra, d’abord, de rappeler les représentations négatives de la proximité, contemporaines de la création du ministère de la Culture : la production des maisons de la culture révèle parfaitement la méfiance à l’égard du « local » qui imprègne le lancement de la politique culturelle et alimente une crainte (durable) de sa banalisation. Dans un second temps, on analysera le processus de re-légitimation du « proche » qui apparaît de façon assez nette au tournant des années quatre-vingt-dix, notamment avec le lancement, sous le ministère de Jacques Toubon, du programme des « équipements culturels de proximité » (1993). Si l’apparition du terme ne signifie pas une rupture totale avec les politiques d’équipement antérieures10, elle traduit néanmoins la volonté de systématiser une économie de production spécifique, caractérisée par la création de lieux de taille modeste dans des zones ciblées ; une brève étude de cas révélera les difficultés de la mise en pratique d’une notion floue qui appelle, de la part de l’administration, un arbitrage complexe entre des exigences contradictoires (professionnalisme/amateurisme, sectorialité/pluridisciplinarité, sélectivité des manifestations/participation du public à la programmation, etc.). Au-delà de ces difficultés pratiques, la revendication de proximité traduit plus profondément, comme on le verra dans un troisième temps, les aménagements du rôle du ministère de la Culture dans la configuration concurrentielle des acteurs participant à l’élaboration des politiques culturelles.
Aux « origines » de la politique culturelle : le local sous surveillance
- 11 Pommier (E.), 1986, « Naissance des musées de province », in Nora (P.) (dir.), Les lieux de mémoir (...)
- 12 Cité dans Pommier (E.), ibidem, p. 451.
- 13 Ory (P.), 1996, « L’État et la culture, de la Révolution à 1959 », in Perret (J.), Saez (G.) (dir. (...)
- 14 Pommier (E.), 1986, « Naissance des musées de province », art. cité, p. 487.
4Avant la mise en place d’une politique culturelle « en bonne et due forme », au début de la Ve République, les relations entre le centre et la périphérie demeurent marquées par une profonde ambivalence. Au risque de simplifier l’histoire extrêmement riche de la création des lieux de culture, on peut avancer l’idée que les ambitions culturelles de l’État ont souvent été contrariées par une mise en œuvre hésitante, laissant de fait aux communes une marge de manœuvre substantielle. Le cas des musées, pour ne citer que cet exemple, est particulièrement révélateur : s’il est établi que l’un des premiers musées de France est créé en 1696 à Besançon, où, « pour la première fois, une municipalité prend en charge l’entretien d’une collection de livres et de tableaux et garantit son libre accès selon un horaire fixe11 », l’histoire retient surtout l’impulsion révolutionnaire, et, plus précisément, dans le prolongement de la nationalisation des institutions royales (Bibliothèque et Archives), la création du Muséum national (décret du 17 juin 1793). Ce dernier, symboliquement installé dans le Palais du Louvre, devient le lieu de dépôt des biens culturels « nationaux », en partie redistribués en province, selon les dispositions du décret Chaptal (1er septembre 1801), « après qu’il aura été disposé aux frais de la commune une galerie convenable pour les recevoir12 ». Si l’exemple montre bien, comme le rappelle plus largement Pascal Ory, que « l’impulsion et corrélativement le contrôle sont assurés par la capitale, où siègent désormais […] la totalité des autorités légitimantes13 », il ne doit pas éluder le caractère très incertain de la mise en œuvre du programme des musées de province, fondé sur des règles peu explicites et rapidement révisé dans son ambition : partant sur les bases d’un musée par département, il se limite « dans la France de 1800, [à] une quinzaine d’institutions qui ressemblent à des “musées de fait”, dont le statut est mal défini, dont l’existence est juridiquement précaire14 ».
- 15 Vadelorge (L.), 1996, « Jalons pour une histoire des musées de province au XXe siècle : le rôle de (...)
- 16 Ibid., p. 63.
5Pour assurer la gestion de leurs institutions en l’absence de dispositions précises (constat qui dépasse le cas des musées), les municipalités ont puisé, tout au long du XIXe siècle, dans les « viviers » culturels locaux (artistes, érudits…). La reconquête du local par les agents de l’État, concomitante de leur professionnalisation progressive au tournant du XXe siècle (création de l’école du Louvre en 1882, mise en place d’une association des conservateurs des collections publiques en 1921) s’opère donc, comme le montrent un certain nombre de travaux, de façon extrêmement prudente. L’étude de Loïc Vadelorge sur la trajectoire de Fernand Guey, premier conservateur formé à l’école du Louvre à avoir été nommé, en 1922, dans un musée de province et, partant, véritable « éclaireur lancé en milieu local15 », révèle par exemple l’ambiguïté des relations centre/périphérie. Sa candidature au musée de Rouen (l’un des quinze musées « Chaptal »), naturellement soutenue par la direction des Beaux-Arts, est vivement contestée par la municipalité, propriétaire du musée, qui propose la nomination d’artistes locaux (un graveur et un peintre). Si l’État parvient à imposer Fernand Guey, celui-ci doit rapidement composer avec le milieu qui l’entoure et s’insérer – pour ne pas dire se fondre – dans la vie culturelle locale, en faisant montre d’une certaine reconnaissance à l’égard de ses principaux représentants ; son comportement rejoint celui de la plupart des conservateurs en province qui, à l’époque, « tissent patiemment la toile de leurs intérêts corporatistes en prenant bien soin de ne pas rompre la trame historique des intérêts locaux16 ». Le rôle de composition exigé par leur situation témoigne d’une certaine incertitude qui ne se réduira que partiellement avec la promulgation de l’ordonnance du 13 juillet 1945 fixant les modalités de soutien de l’État aux musées de province.
- 17 Dubois (V.), 1999, La politique culturelle. Genèse d’une catégorie d’intervention publique, Paris, (...)
- 18 Repris par François (B.), 1998, Le régime politique de la Ve République, Paris, La Découverte, p. (...)
6L’ambivalence des relations entre l’État et le local doit beaucoup, durant cette période, aux difficultés d’une politique culturelle hésitante, qui, comme l’a montré Vincent Dubois, reste souvent dans l’ombre de l’Instruction publique et dont le principe même n’est défendu qu’en situation critique, à l’aide d’arguments très hétéroclites (économiques, moraux, sociaux, esthétiques, etc.17). La création d’un ministère de la Culture au début de la Ve République, à une époque où l’État, selon la formule de Georges Burdeau, apparaît comme une « puissance assurée pour l’action18 », va autoriser une rupture profonde des relations centre-périphérie. Un discours (tardif) d’André Malraux exprime clairement la nature du nouveau rapport de force :
- 19 Discours d’André Malraux prononcé devant l’Assemblée Nationale le 7 novembre 1969. Journal Officie (...)
« En définitive, qu’est-ce que le gaullisme ? Essentiellement deux choses : d’une part, la confiance absolue dans la France ; d’autre part, l’idée que l’État devait être reconstitué pour être le moyen de cette confiance […]. Nous voulons l’État puisque nous pensons que sans État il n’y a pas de politique19. »
- 20 Urfalino (P.), 2004, L’invention de la politique culturelle, op. cit., p. 185-201.
- 21 Exposé de Pierre Moinot devant la sous-commission « Action culturelle » de la Commission de l’équi (...)
- 22 Biasini (E.), « Action culturelle, an I », octobre 1962, repris dans Girard (A.), Gentil (G.) (dir (...)
7La nouvelle représentation de l’État permet aux fonctionnaires du ministère naissant de fixer plus clairement les règles du jeu tout en délégitimant le « local ». À cet égard, la réalisation « exemplaire20 » des maisons de la culture, souvent présentée comme le prolongement de la décentralisation culturelle impulsée par Jeanne Laurent sous la IVe République, apparaît bien comme une « affaire d’État ». Au-delà des règles retenues, qui consacrent le principe de financement et de gestion paritaire des équipements entre l’État et les municipalités, les principes doctrinaux révèlent une véritable relégation de l’action locale, qu’elle soit de nature municipale ou associative : pour Pierre Moinot, par exemple, la maison de la culture n’est pas « un abri indifférent pour servir de siège social aux associations locales […] un lieu de répétition […] pour les groupes d’amateurs non plus qu’un terrain de bricolage […] une simple salle des fêtes21 »; la réalisation des maisons de la culture doit bien au contraire servir le processus d’autonomisation de la politique culturelle, en organisant « la rencontre de ceux qui aspirent à la culture sous ses formes les plus parfaites », et qui recherchent « le niveau culturel le plus élevé » et « la qualité la meilleure22 ».
- 23 FNCCC Informations, n° 2, janvier 1967, p. 13. Sur cette opposition, cf. Dubois (V.), 1995, « Pour (...)
- 24 Biasini (E.), « Action culturelle, an I », op. cit., p. 404.
8Si l’État défend une politique culturelle fondée sur la hauteur et l’excellence, c’est aussi pour contrer les tentatives concurrentes de définition des lieux culturels qui se développent au niveau local, notamment par l’intermédiaire de la Fédération nationale des Centres culturels communaux (FNCCC) fondée en mai 1960 à Saint-Étienne. À la différence de la Maison de la culture, le modèle du Centre culturel communal est entièrement coulé dans une logique de proximité : « le Centre culturel n’est pas un pouvoir culturel », peut-on lire dans la revue de la fédération en janvier 1967, « c’est un élément de démocratisation ; c’est une sorte d’injection des “compétences d’en bas” et des “compétences techniques” dans le pouvoir politique local23 ». Pour le ministère chargé des Affaires culturelles, cette régression vers le local présente le risque majeur d’une banalisation de l’action culturelle : dès 1962, le directeur du Théâtre et des Maisons de la Culture ne cache pas son scepticisme à l’égard de ce genre de lieux : « Le bal du samedi soir et le banquet corporatif offrant leur perpétuelle sollicitation, pense-t-on raisonnablement que de nombreux conseils municipaux pourraient y résister24 ?»
- 25 Ibid., p. 404.
- 26 FNCCC Informations, n° 7, septembre 1969, p. 12.
- 27 Un souvenir de Guy Brajot, successeur d’Emile Biasini, montre bien l’importance de la déterminatio (...)
9Le déclin progressif de la politique des maisons de la culture, qui retenait, comme les musées de province, la perspective optimiste d’un prototype par département, décomplexe à son tour les acteurs locaux : à Toulouse, par exemple, après l’échec de l’implantation d’une Maison de la culture, le professeur Krynen, adjoint au maire et membre de la FNCCC, vante les mérites d’équipements modestes, « à taille humaine25 », au détriment du « gigantisme de l’entreprise […] qui avait inspiré la mise en place de ces “Monoprix” de la Culture : l’extension de la politique des Beaux Arts à la masse, généreusement conviée à la consommation des produits culturels, apparaît maintenant comme relevant d’une politique rétrograde26 ». La politique du ministère de la Culture va alors progressivement s’assouplir, avec la création d’un « second cercle d’équipements » – les centres d’animation culturelle – dont les clés de financement sont plus favorables aux collectivités locales27.
- 28 En 1978, les communes investissent 11,5 milliards de francs dans la culture, soit 52,4 % des dépen (...)
- 29 La rotation rapide des ministres et l’incertitude des attributions du ministère constituent, avec (...)
- 30 Marrey (J.-C.), 1979, « À quoi servent les salles polyvalentes ? », ATAC Informations, n° 103, p. (...)
10Les deux décennies suivantes sont marquées par un rapport au local moins conflictuel mais toujours relativement ambivalent. Dans le courant des années soixante-dix, alors que les municipalités développent progressivement leurs interventions, au point de devenir les premiers financeurs de l’action culturelle28, le ministère de la Culture subit une crise profonde d’identité29. La période voit la mise en place de nombreuses procédures partenariales – chartes culturelles, volets culturels des contrats de villes moyennes – que le ministère a beaucoup de difficultés à honorer ; surtout, le succès des salles polyvalentes réactive les craintes d’une banalisation de la politique culturelle, comme l’illustrent les propos d’un chargé de mission du ministère s’inscrivant, bien que vingt ans plus tard, dans le droit fil de ceux d’Emile Biasini : « la salle unique qui accueille dans d’égales conditions un quatuor à cordes, du catch féminin et une soirée bavaroise n’existe pas30 ».
- 31 Inversement, certains maires – comme Dominique Baudis à Toulouse – refusent volontairement de s’in (...)
11Les années quatre-vingt sont marquées par le lancement paradoxal, en contexte de décentralisation, d’une politique de grands travaux. Sans nier les efforts du ministère de la Culture en direction de la province (en matière de musées, par exemple), la période apparaît surtout favorable à la capitale. La lenteur avec laquelle est retenu le principe d’une ligne budgétaire pour les « grandes opérations en région » (1985) et son importance relative (100 millions de francs) attestent la réalité de ce déséquilibre ; en outre, l’inscription sur la liste des projets en région dépend surtout de la capacité des maires (elle-même largement corrélée à la structure de leur capital politique) à exercer des pressions sur le ministre de la Culture (le cas de Georges Frèche pour le Corum de Montpellier en est un exemple significatif31). Au tournant des années quatre-vingt-dix, un certain nombre de fonctionnaires du ministère de la Culture soulèvent deux problèmes directement liés à ce déséquilibre : le sous-équipement de certaines zones en équipement culturel – banlieues, milieu rural – et le paradoxe du lancement du plus grand des grands travaux – la Bibliothèque nationale de France – à une époque où les villes tentent de moderniser leurs bibliothèques municipales sans pouvoir boucler leurs dossiers de financement. Les lancements des programmes des « cafés-musiques » (1990) et des « bibliothèques municipales à vocation régionale » (1992) constituent les premières réponses pour rééquilibrer l’offre culturelle sur le territoire.
- 32 Le Bart (C.), 2002, « La proximité politique comme légitimation d’en bas », communication présenté (...)
12Ce détour historique, nécessairement simplificateur, laisse apparaître un progressif relâchement des tensions entre le centre et la périphérie et préfigure le repositionnement du ministère face aux questions territoriales. C’est dans ce contexte que le ministre Jacques Toubon mobilise la proximité, attitude qui invite, pour suivre l’analyse de Christian Le Bart, à une réflexion sur « le basculement d’une symbolique de la grandeur fondée sur l’idée de distance, de hauteur, vers une symbolique qui réfère au contraire la grandeur à la proximité […]32 ».
La légitimation du « proche » : le lancement du programme des « équipements culturels de proximité » (1993)
- 33 « Vers une rénovation de la politique culturelle », Discours de Jacques Toubon prononcé devant le (...)
13Dès son arrivée, rue de Valois, Jacques Toubon lance un programme d’« Équipements culturels de proximité » (ECP) dont le principal enjeu est de donner « à un équipement de base, comme une salle de cinéma, une librairie, un musée, une bibliothèque, un monument historique ou un centre d’action culturelle, les moyens d’être pluridisciplinaire dans sa zone de rayonnement, ces équipements devant être mis en réseau33 ». L’étude de la réalisation, en Haute-Vienne, d’un équipement culturel de proximité appelé à devenir, selon la Direction régionale des affaires culturelles du Limousin, un « modèle générique » pour l’ensemble du territoire, permettra de cerner « d’un peu plus près » la nature de ce nouveau label ; elle révélera également les limites pratiques d’une telle ambition, en raison notamment de la faible maniabilité d’une notion particulièrement labile.
La réalisation d’un « prototype » : le centre Fabrègue de Saint-Yrieix-la-Perche (87)
- 34 Le maire, également conseiller régional, a occupé cette fonction de 1977 à 2001.
14La commune de Saint-Yrieix-la-Perche (7558 habitants) est située au sud du département de la Haute Vienne, à une trentaine de kilomètres de Limoges, à la lisière de la Dordogne et de la Corrèze. Au début des années quatre-vingt-dix, le maire de cette commune décide de réaliser un équipement qui préfigure de quelques mois le programme d’équipements culturels de proximité mis en place par le ministère de Jacques Toubon : il sera présenté, à l’occasion de son inauguration par le ministre en personne, comme un cas « exemplaire ». Comme de nombreuses opérations d’équipement en milieu rural, le projet du centre culturel Fabrègue de Saint-Yrieix, qui réunit une médiathèque, une salle de spectacles et une petite galerie d’exposition, s’appuie sur une convention de développement culturel signée entre la commune et le ministère de la Culture (DRAC Limousin), le 6 mai 1992. Pour le maire (RPR) de Saint-Yrieix34, le lancement d’une telle opération trouve sa justification dans le manque patent d’équipements culturels au regard du « potentiel d’attraction » de la commune qu’il administre.
- 35 Entretien avec le maire de Saint-Yrieix-la-Perche, le 15 novembre 2002.
« On avait un complexe de cinéma, pas de bibliothèque, pas de salle de théâtre […] Il y a 2500 enfants scolarisés donc une demande importante au niveau culturel. Le potentiel commercial, entre guillemets, de Saint Yrieix, c’est 20000 habitants : on attire un peu de la Dordogne et un peu de la Corrèze35. »
15En réalité, l’équipement s’appuie au départ sur la volonté du conseil municipal de créer une bibliothèque moderne ; comme le révèle une notice explicative jointe au projet, ce n’est que dans un second temps que la salle de spectacles est proposée par le conseiller sectoriel théâtre de la DRAC Limousin.
- 36 Notice explicative fournie avec le dossier de subvention (Archives municipales de Saint-Yrieix-la- (...)
« En liaison avec ce projet de bibliothèque, pour favoriser la tenue à Saint-Yrieix-la-Perche de spectacles de qualité, il est apparu nécessaire de construire une salle de théâtre qui sera attenante à la bibliothèque, afin de créer un espace culturel fort36. »
16Au-delà de ces deux volontés, le plan de financement retenu, extrêmement favorable, permet au maire de réaliser l’équipement en ne mobilisant que très modérément les finances locales.
- 38 Archives municipales de Saint-Yrieix-la-Perche, 1992, Bibliothèque – salle de spectacle, Notice de (...)
17L’originalité du projet du Centre Fabrègue repose sur la combinaison d’une médiathèque et d’une salle de spectacle, reliées par une petite galerie d’exposition : comme le précise le programme architectural, « les halles de la bibliothèque et de la salle de spectacles, communiquent par la Salle d’exposition centrale […]. Les expositions pourront donc aussi bien accompagner un spectacle en cours dans le bâtiment de droite, qu’offrir un complément indispensable aux activités de la Bibliothèque située à gauche en entrant38 ». Cette « mini-intégration » doit, en jouant sur le potentiel d’attraction de la médiathèque, produire des effets sur la fréquentation de la salle de spectacles ; la DRAC Limousin voit d’ailleurs dans l’interaction des deux équipements une spécificité reproductible à d’autres contextes, faisant du Centre Jean Pierre Fabrègue, comme l’indique le contenu de la charte de développement culturel signée en 1992, une sorte de prototype exportable.
- 39 Centre de documentation de la DRAC Limousin, 1992, Convention de développement culturel entre l’Ét (...)
« Ce nouveau type d’équipement culturel s’articule autour des médiathèques dont la capacité à prendre en compte et à accueillir les publics dans leur diversité d’âge et de catégories sociales est un élément fondamental en matière d’action culturelle […]. Partant de cette relation privilégiée avec les publics bénéficiant de la force d’attraction incontestable des médiathèques, on peut mettre en place un réseau de nouveaux types d’équipements uniques, dimensionnés et adaptés au tissu géographique, pouvant offrir une réponse culturelle complète en adéquation avec les moyens financiers de la commune39. »
18L’équipement produit à Saint-Yrieix est également présenté par la DRAC comme une réponse à la « demande » d’équipements culturels en milieu rural. Par sa pluridisciplinarité, il préfigure la future nomenclature des « équipements culturels de proximité ».
- 40 Ibid.
« Aux lieux spécialisés tels que les bibliothèques, théâtres, musées, centres culturels, salles de concert… que l’on trouve dans les “villes centre” telles que Limoges et qui constituent des pôles d’excellence pour la diffusion sociale de la culture, doivent répondre en milieu rural des équipements d’un nouveau type qui seront des centres de ressources de proximité répondant aux aspirations des publics ruraux d’accéder à la culture dans des conditions similaires à celles des citadins40. »
19Le 9 novembre 1994, invité par le maire pour l’inauguration de l’équipement, le ministre de la Culture confirme sa parfaite adéquation avec le programme qu’il a mis en place.
- 41 Le Populaire, 9 novembre 1994.
« Le Centre Jean Pierre Fabrègue est un des exemples des équipements de proximité que nous souhaitons développer41. »
- 42 « J’ai reçu beaucoup de collègues, de la région de Toulouse, de Rouillac… » (Entretien avec le mai (...)
- 43 Conseil Régional du Limousin – Préfecture de la Région Limousin, 3e Contrat de Plan État-Région Li (...)
- 44 DRAC Limousin, Schéma triennal d’action régionale, 1995-1997, p. 15 (Centre de documentation de la (...)
- 45 Bilan d’activités de la DRAC Limousin, 1996, p. 9. (Centre de documentation de la DRAC Limousin).
20Le maire de la commune, quant à lui, reçoit, quelques mois seulement après l’inauguration, un certain nombre d’élus très intéressés par l’opération42. Fort du succès recueilli, la DRAC va tenter de développer cette expérience, en mobilisant les partenaires locaux. Le troisième contrat de plan État-Région Limousin (1994-1998) reconnaît la nécessité d’une action culturelle de proximité et l’utilité de la réalisation, en milieu rural, d’« équipements d’un nouveau type […] à vocation pluridisciplinaire43 ». L’État et la Région débloquent respectivement 10 et 6,6 millions de francs pour mener à bien cette action, en espérant exporter dans les petites villes de la région le « prototype » réalisé à Saint-Yrieix-la-Perche. Dans son schéma triennal portant sur la période 1995-1997, la DRAC Limousin évoque de nouveau l’idée d’une « modélisation d’un équipement type pour les petites villes en milieu rural dont l’exemple est Saint-Yrieix-la-Perche44 ». S’appuyant sur les caractéristiques de la Région Limousin, où les 3/4 des communes ont une population inférieure à 700 habitants, elle estime, dans son bilan d’activités de 1996, qu’en matière d’action de proximité, « la réelle stratégie, ce sont les équipements culturels à essaimer sur le territoire45 ».
De la théorie à la pratique : une « proximité » problématique
- 46 Jobert (B.), 1992, « Représentations sociales, controverses et débats dans la conduite des politiq (...)
21La mise en œuvre de l’impératif de proximité fait apparaître une série de difficultés qui tiennent largement à la labilité d’une notion qualifiable, pour reprendre une formule de Bruno Jobert, d’« idéologie molle46 ». Deux d’entre elles peuvent être isolées, qui renvoient à la définition des missions et aux conditions de gestion des « nouveaux » équipements.
- 47 Le Populaire, 1er avril 1994.
- 48 Entretien avec la directrice du Centre Fabrègue, le 3 juillet 2000.
- 49 En 2002, le théâtre est le premier poste de dépenses ; avec un budget 2,28 millions d’euros, il re (...)
22L’objectif de pluridisciplinarité, en premier lieu, apparaît assez difficile à réaliser. Une analyse détaillée du projet (et, d’une façon plus générale, du programme régional) montre les limites de l’interaction escomptée entre les différents équipements. Comme on l’a souligné plus haut, les concepteurs du centre Fabrègue pensent que la médiathèque drainera le public vers le théâtre ; le directeur des affaires culturelles de Saint-Yrieix et premier responsable du centre entretient cette croyance en n’hésitant pas à le présenter comme un « équipement culturel du troisième type » : « Ces quinze dernières années, déclare-t-il dans la presse locale, on appuyait essentiellement l’action culturelle sur le théâtre […] on ne peut pas dire que ce système ait bien fonctionné […] L’idée nouvelle, c’est d’appuyer l’activité culturelle sur la médiathèque47. » À l’usage cependant, il apparaît que l’interaction entre la médiathèque et la salle de spectacles demeure extrêmement limitée, pour une raison très simple, que nous révèle au mois de juillet 2000, la directrice du centre : « les horaires de la médiathèque ne coïncident pas avec celles de la salle de théâtre […] l’intégration ne fonctionne qu’entre la bibliothèque et la salle d’expositions48 ». Cette faible synergie ainsi que l’échec, à un niveau plus général, de l’exportation du modèle de Saint-Yrieix vers d’autres communes (à Bellac, petite ville située au nord de la Haute-Vienne, le phasage de l’opération aboutit à la création d’une seule salle de spectacle), tend à démontrer la difficulté de la mise en œuvre de services culturels véritablement pluridisciplinaires. La réussite d’un tel programme dépend de nombreux facteurs, comme la nature de la demande initiale des maires mais aussi le travail d’ajustement effectué par les conseillers sectoriels selon leurs intérêts propres ; le privilège du théâtre, en Limousin, et la notoriété du conseiller en charge du secteur ont ainsi pu jouer en la faveur de ce genre d’activité49.
- 50 DRAC Limousin, Qu’est-ce qu’un équipement culturel de proximité ?, Notice descriptive, p. 1 (Centr (...)
23D’une façon plus générale, la définition des missions des « équipements culturels de proximité » s’apparente à une véritable gageure pour les fonctionnaires de la culture qui tentent d’établir un équilibre entre qualité et convivialité. L’enjeu principal de la réalisation d’équipements culturels de proximité est ainsi résumé dans une note transmise par la DRAC du Limousin à la Délégation au Développement et aux Formations : « Les choix devront à la fois viser la plus grande exigence possible et favoriser la fréquentation la plus large, notamment de la part des publics peu familiarisés avec la pratique culturelle […] l’objectif étant de concilier l’exigence qualitative et l’accessibilité50. » Dans la liste des différents critères retenus, la question de « l’accueil » du public rural occupe une position stratégique et nécessite la mise en place d’un certain nombre de mesures spécifiques.
- 51 Ibid., p. 1.
« La proximité s’entend en termes de rapport avec le public, l’équipement de proximité aura des qualités de convivialité qui rendront sa fréquentation facile à des publics peu accoutumés à pénétrer dans les salles de spectacles, les bibliothèques ou les musées. Le soin apporté à l’accueil doit prendre des formes précises dès la conception de l’équipement […] : adaptation des horaires au public, prix modérés, amabilité et disponibilité des personnels, participation du public au choix de programmation, ateliers de pratique artistique, organisations de rencontres et de débats sont autant d’éléments parmi d’autres qui concourent à faire de l’équipement de proximité un endroit familier, où on aime aller souvent et où l’on reste longtemps51. »
- 52 Ibid., p. 1.
- 53 Ibid., p. 2.
- 54 Moulinier (P.), 1995, Politiques culturelles et décentralisation, CNFPT, p. 79-80.
24L’objectif principal de ces mesures est d’empêcher toute mise à distance du public, en le familiarisant à l’équipement. La DRAC reste cependant assez vague sur les moyens de concilier, par exemple, la participation du public au choix de programmation et la recherche de l’excellence culturelle, qui semble relever des compétences des professionnels ; en outre, un certain flottement conceptuel est perceptible tant au niveau des objectifs retenus pour la programmation – « l’équipement s’appuiera sur des artistes professionnels, il pourra cependant accueillir également des artistes non-professionnels52 » – que de la nature du personnel chargé d’assurer le fonctionnement du lieu de proximité – « le recours au bénévolat sera encouragé à condition que celui-ci ne se substitue pas au personnel professionnel indispensable à la réussite de tout projet culturel53 ». La conciliation des impératifs de proximité et de qualité ne va donc pas de soi et renvoie notamment au problème, pour reprendre une formule de Pierre Moulinier, de la « non-spécialisation » des lieux, mais aussi des hommes, « généralement bénévoles, hommes à tout faire54 »; elle s’effectue au prix d’un grand écart doctrinal que l’on retrouve dans la mise en œuvre du programme des « ruches » (« médiathèques de proximité »), qui oscille entre la revendication d’une qualité architecturale et culturelle irréprochable et l’espoir d’une sociabilité rurale retrouvée.
- 55 Aillagon (J.J.) 2003, Conférence de presse sur « l’action territoriale », 26 mai, précité.
« Ces médiathèques viseront à mettre le savoir, la culture, les arts à la disposition des populations concernées, mais également à offrir des lieux de sociabilité, de convivialité qui ne soient pas seulement des guichets où l’on va emprunter un livre ou un disque […]. Il est évident que le dépérissement de la pratique religieuse a très largement privé les campagnes de vie sociale55. »
- 56 Entretien avec le premier directeur du Centre Fabrègue, 6 mai 2001. Professeur de lettres classiqu (...)
- 57 Idem.
- 58 Idem.
- 59 Lecat (R.),Chiffert (A.), Reliquet (P.), 1999, La rénovation des instruments juridiques des servic (...)
25Mais la difficulté majeure de la mise en œuvre du programme des équipements culturels de proximité renvoie au mode de gestion retenu par les collectivités locales. Géré en régie directe, le centre de Saint-Yrieix ne fournit qu’une marge de manœuvre très restreinte aux équipes chargées d’en assurer le fonctionnement, comme le souligne le premier directeur du centre. Censé avoir, en tant que directeur des affaires culturelles de la commune, « la haute main sur les activités culturelles de la ville56 », il ne parvient pas à faire admettre la nécessité d’un budget conséquent : « on ne pouvait pas faire de programmation annuelle, il fallait travailler opération par opération57 ». Ces limites financières nuisent à l’intervention culturelle en milieu rural qui, rappelle le responsable, présente un certain nombre de spécificités, parmi lesquelles la nécessité de faire connaître les artistes aux habitants, en développant par exemple la pratique des résidences : « il faut faire rester les troupes plus longtemps pour qu’elles apprivoisent le public58 ». Une étude récente de l’inspection générale chargé des affaires culturelles sur les instruments juridiques des services publics culturels locaux fait largement écho à ces propos : au cours de leur enquête, les auteurs ont en effet constaté que « les professionnels rencontrés présentent la lenteur et la complexité des règles de gestion liées à la régie directe comme de véritables freins à la mise en œuvre de projets culturels dynamiques et modernes, générateurs de perte d’énergie et d’argent, profondément démotivantes et déresponsabilisantes59 ». Le choix d’un tel mode de gestion suscite en outre la méfiance des autres collectivités locales – et singulièrement, dans le cas étudié supra, du Conseil régional – plus enclines à subventionner le fonctionnement des équipements gérés selon des statuts « ouverts ».
26Des dispositions législatives récentes (loi du 4 janvier 2002 relative à la création d’établissements publics de coopération culturelle) à la promotion de l’intercommunalité culturelle, toute une série d’initiatives doit permettre d’assouplir la gestion des équipements et de favoriser des partenariats durables ne se limitant pas au « tour de table » initial (montage des projets, élaboration du budget d’investissement). Mais l’assurance d’un « partenariat de fonctionnement » est également tributaire des conditions fixées par l’État en amont des programmes ou, de façon plus explicite, de son propre degré d’engagement ; dès lors que le label proposé par le ministère est voué à une disparition rapide (on est loin, avec le programme des équipements de proximité, des conditions de gestion des maisons de la culture rappelées plus haut), l’intérêt des acteurs à s’y engager est des plus variables. Si le maire d’une petite commune peut être attiré par le programme d’équipements culturels de proximité en raison de son caractère peu contraignant sur le long terme, les porteurs de projets (notamment associatifs) implantés dans les quartiers des grandes villes devront parvenir à intéresser les élus sans l’assurance d’une intervention étatique pérenne : dans les deux cas, l’autonomie des acteurs culturels reste dépendante des décisions des élus locaux. Pour comprendre, au-delà de ces difficultés d’application, les raisons du choix de la proximité comme norme d’intervention publique, il faut revenir sur l’évolution récente de la position du ministère de la Culture dans la configuration des producteurs de politiques culturelles.
Un « petit retournement » : usages de la « proximité » et mutations institutionnelles
27Les enseignements de l’introduction de la proximité dans l’élaboration des politiques culturelles sont moins de nature théorique (elle n’est pas le signe d’une profonde évolution doctrinale) que pratique : à l’usage, en effet, elle produit et révèle une série de mutations qui renvoient simultanément au fonctionnement et au positionnement de l’administration culturelle d’État. La proximité participe, au niveau administratif, à l’aménagement des relations entre les différents segments du ministère de la Culture, notamment entre les directions centrales et les échelons déconcentrés ; elle fournit, ensuite, en période de cohabitation, les bases d’un répertoire d’intervention politique (au double sens de politics et policies), opératoire, tant pour disqualifier l’économie de la grandeur imputée au précédent gouvernement (« grands travaux ») que pour légitimer un « nouveau » programme d’action fondé sur le principe de l’« aménagement culturel du territoire »; elle permet, encore, d’un point de vue financier cette fois, de dégager une marge de manœuvre non négligeable par la mobilisation de fonds transversaux qui deviendront rapidement déterminants pour la réalisation du programme ; elle traduit, enfin, et sans doute de façon plus profonde, un ajustement institutionnel du ministère de la Culture dans la configuration concurrentielle des acteurs des politiques culturelles.
- 60 Entretien avec le conseiller sectoriel théâtre de la DRAC Limousin, le 22 mars 2000.
- 61 Idem.
- 62 Bilan d’activités de la DRAC Poitou-Charentes, 1996, repris en annexe de la note « Services cultur (...)
28Les difficultés rencontrées par les échelons déconcentrés dans la définition de la notion de proximité ne doivent pas occulter le fait que ce sont eux, précisément, qui sont chargés de produire la substance des nouveaux lieux de culture, en fournissant à la direction centrale responsable du programme (délégation au développement et aux formations puis, à partir de 1999, délégation au développement et à l’action territoriale) les éléments lui permettant d’élaborer une circulaire : la production du label « équipement culturel de proximité » s’effectue, pour ainsi dire, par le bas. Dans ce contexte, la proximité apparaît bien comme une ressource pour le personnel des échelons déconcentrés, qui leur permet de revendiquer leur connaissance du milieu local : « aujourd’hui, c’est le terrain qui détermine l’action », nous confie, de façon significative, un conseiller sectoriel60. Les directions régionales sont ainsi les premières à pointer le risque d’un manque de précision dans le cahier des charges des ECP, susceptible de faire ressurgir le spectre de la banalisation : « il y a inévitablement des abus », poursuit le conseiller, « certaines communes essaient de labelliser leurs salles polyvalentes comme équipements culturels de proximité61 ». La définition de critères spécifiques sert ainsi l’impératif pratique de discrimination des projets mais aussi (et peut être surtout) la légitimité des directions régionales comme acteurs capables d’en imposer les modalités au niveau local, comme en témoigne un extrait du bilan d’activités 1994 de la DRAC Poitou-Charente dans lequel la direction revient sur son travail de « reformulation raisonnée […] des approches intuitives discutables des partenaires associés au projet62 ».
- 63 Wachter (S.), 2000, « L’agenda de l’aménagement du territoire entre prospective et rétrospective ( (...)
29Au niveau politique, la revendication de proximité s’inscrit dans le programme d’« aménagement culturel du territoire » défini par le ministère de Jacques Toubon au début des années quatre-vingt-dix. Dans une contribution synthétique retraçant l’histoire des politiques d’aménagement du territoire, Serge Wachter livrait l’un des éléments centraux de leur énergie motrice : « L’obsession ou la passion du rééquilibrage, qui forme un des credo les mieux enracinés de la rhétorique de l’aménagement du territoire, provient, à l’origine, de l’opposition entre Paris et le désert français63. » C’est précisément dans cette mystique du rééquilibrage que la politique du ministère de la Culture va se fondre à partir de 1993, comme en témoigne, de façon exemplaire, le discours prononcé par Jacques Toubon devant le Sénat le 6 novembre de la même année.
- 64 « Vers une rénovation de la politique culturelle », Discours de Jacques Toubon prononcé devant le (...)
« Globalement aujourd’hui, on peut dire que la politique culturelle est essentiellement une politique urbaine et qu’elle laisse de côté la France rurale et semi-urbaine. Il faut donc rééquilibrer non seulement Paris et la province mais les villes et le reste du territoire. C’est l’objectif que j’assigne à mon ministère dans le cadre de la nouvelle politique d’aménagement du territoire du Gouvernement64. »
- 65 Ces derniers font en effet l’objet d’un classement en trois catégories : les projets confirmés (ac (...)
- 66 Audition de Philippe Douste-Blazy dans l’avis n° 3031 présenté au nom de la Commission des affaire (...)
- 67 L’Écho, 9 novembre 1994.
30D’une part, la politique du rééquilibrage permet de revendiquer une rupture avec la période Lang et, plus précisément, avec le programme des Grands travaux de François Mitterrand : le lancement des « Grands projets en région » (GPR) rappelle ainsi que la grandeur est désormais réservée à la province. Pour marquer symboliquement cette « rupture » et, dans le même temps, la financer, le ministre de la Culture et de la Francophonie fait prévaloir un droit d’inventaire sur les Grands travaux en cours de réalisation65. Toutefois, cette stratégie distinctive est d’un usage beaucoup plus délicat lorsqu’il s’agit, pour le successeur de Jacques Toubon, de légitimer la réalisation du projet présidentiel du Musée des Arts et des Civilisations : le registre de la modestie initialement utilisé – « Le Président de la République ne souhaite pas, en période de rigueur financière, réaliser de grands travaux : il s’agira donc d’un projet dont le coût de 600 millions de francs recouvre pour l’essentiel le réaménagement de l’aile Passy du Palais de Chaillot66 » – masque mal l’évolution d’un projet qui s’inscrit rapidement dans une économie de production tout à fait conforme à celle des équipements culturels lourds centralisés (en termes notamment de coût, d’implantation, etc.) devenue, depuis la réalisation du centre Georges Pompidou, un attribut du rôle présidentiel. D’autre part, elle fournit au ministère de la Culture les bases d’une mission « nouvelle », objectivée par un certain nombre d’outils, comme l’Atlas des activités culturelles, publié en 1998, et par la production de nouveaux concepts, tel celui de « diagonale aride », délimitant une zone d’équipement prioritaire qui partage la France du Nord-Est au Sud-Ouest. L’illusio animant cette volonté d’harmonisation de l’offre culturelle sur le territoire peut, de façon quelque peu inattendue, générer des attentes assez ambitieuses : ainsi, dans son discours d’inauguration du centre Fabrègue de Saint-Yrieix, Jacques Toubon loue-t-il « le système interactif de demain qui fera que Saint-Yrieix ou une autre commune d’un autre département sera à égalité avec Paris67 ».
31On ne saurait négliger, en troisième lieu, les enjeux financiers de la promotion de l’impératif de proximité ou, plus largement, d’« aménagement culturel du territoire ». Le « tournant territorial » de la politique du ministère permet en effet de dégager, à l’occasion du CIADT de Troyes (1994), une enveloppe globale de 100 millions de francs au titre du Fonds interministériel d’aménagement du territoire (FIAT), dans un contexte budgétaire particulièrement défavorable au ministère de la Culture. Le programme des « équipements culturels de proximité » apparaît rapidement sous la dépendance de ces « crédits territoriaux », qui permettent en partie d’amortir les opérations de régulation budgétaire imposées en 1995. En 1994, 122 équipements culturels de proximité sont programmés pour un budget de 40 millions de francs mais 55 % (22 millions de francs) de ce budget provient de la DATAR ; l’apport du ministère pour l’année 1995 diminuera sensiblement, passant de 18 à 16 millions de francs.
- 68 Bourdieu (P.), 1997, Méditations pascaliennes, Paris, Seuil, « Liber », p. 223.
- 69 Passeron (J. -C.), 2003, « Consommation et réception de la culture. La démocratisation des publics (...)
- 70 Le programme des « ruches », qui prévoit le déploiement de moyens de fonctionnement, devra faire l (...)
32La problématique de la proximité culturelle renvoie enfin, d’une façon plus générale, au rôle du ministère de la Culture dans un contexte de dissolution des frontières de l’action culturelle, de renforcement des contraintes budgétaires et d’accroissement de la concurrence d’intervenants locaux mieux dotés en moyens financiers et humains. Dans ce contexte, depuis le début des années quatre-vingt-dix, le département ministériel éprouve, pour reprendre une formule de Pierre Bourdieu, « son pouvoir de distribution et de redistribution légitime des identités68 », au moyen d’une politique de labellisation qui lui permet, d’une part, de préciser les contours de son périmètre d’intervention (scènes « nationales », musées « de France », festivals d’« intérêt national », révision du classement des monuments « nationaux ») et, d’autre part, d’appuyer sa politique sur de nouveaux partenariats, en accordant une priorité aux projets développant des capacités d’autofinancement (« zéniths », « centres culturels de rencontre », etc.). Le programme des « équipements culturels de proximité » apparaît ici comme un entre-deux improbable, dans la mesure où il repose sur des moyens limités et où les capacités des intervenants demeurent assez faibles (l’ambition d’autofinancement des cafés-musiques a par exemple été très rapidement contredite par les premières expertises); surtout, l’action culturelle de proximité reste encore pour partie prisonnière de l’idée, rappelée récemment par Jean-Claude Passeron, d’un nécessaire financement du « voiturage de l’objet culturel ou artistique le plus près possible du consommateur, supposé homme d’un “besoin” culturel anonyme69 », sans que, pour autant, l’administration ne dispose de ressources suffisantes pour en contrôler la réalisation70, comme l’illustre ce point de vue global sur les processus de contractualisation émis par un conseiller référendaire de la Cour des Comptes à l’occasion de la présentation d’un rapport sur les services déconcentrés du ministère de la Culture.
- 71 Intervention de Christian Sabbe, conseiller référendaire à la Cour des Comptes, cité dans Gaillard(...)
« Les DRAC nous disent qu’en fin de compte le dossier reste très théorique, parce qu’en pratique, une fois qu’elles ont signé et que l’argent vient, on ne regarde plus vraiment dans le détail ce qui a été convenu par les collectivités. C’est tout le problème des rapports entre les collectivités territoriales et l’État dans ces domaines où, par définition, […] comme l’essentiel des crédits vient des collectivités, il n’est pas totalement illégitime qu’elles se désintéressent un peu de ce qu’elles ont signé, pour essayer d’être efficace71. »
33L’irruption de la « proximité » dans le domaine des politiques culturelles ne peut être saisie indépendamment de l’évolution de la configuration des acteurs qui participent à leur mise en œuvre. En recourant au registre du « proche », le ministère de la Culture opte pour une politique qu’il développe, pour reprendre le titre de cette contribution, « au risque de la banalisation »; encore faut-il immédiatement préciser que le terme de banalisation ne renvoie pas ici au mythe de l’avènement de pratiques culturelles « sans qualité », mais avant tout à la réduction de la marge de manœuvre du ministère de la Culture dans l’élaboration des politiques culturelles.
Notes
2 La nomenclature regroupe, entre autres, les disquaires, les libraires et les marchands de journaux.
3 « Je suis particulièrement attaché à ce que le ministère de la culture rééquilibre ses actions au profit du terrain local » déclarait Philippe Douste-Blazy à l’occasion de la traditionnelle cérémonie des vœux au personnel du ministère, le 6 janvier 1997 (nous soulignons). « J’ai l’ambition de construire, avec l’appui et le partenariat des collectivités locales, une véritable proximité des services publics de la culture » indiquait Catherine Trautmann dans son discours de clôture du colloque « La culture, priorité des villes moyennes », le 9 octobre 1997.
4 Urfalino (P.), 2004, L’invention de la politique culturelle, Hachette Littératures, p. 39 sq. (1re édition : 1995).
5 Nous détournons ici une expression de Claude Grignon et Jean Claude Passeron, in Grignon (C.), Passeron (J.-C.), 1989, Le savant et le populaire. Misérabilisme et populisme en sociologie et en littérature, Paris, Gallimard-Le Seuil, p. 41.
6 Fumaroli (M.), 1992, L’État culturel. Essai sur une religion moderne, Paris, Éditions de Fallois.
7 Offre conçue dans une large acception puisqu’elle s’applique aussi, comme on l’a souligné, aux « commerces culturels de proximité ».
8 On peut mentionner la baisse des crédits inscrits au titre VI du budget ministériel (c’est-à-dire ceux qui seront destinés au financement du programme d’équipements culturels de proximité évoqué plus bas) qui passent de 167 millions de francs en 1992 à 45 millions de francs en 1995 ou, bien que dans un sens un peu différent, le commentaire sans ambiguïté formulé par Jacques Toubon, dès l’été 1993 : « le temps de la facilité, de la subvention généralisée, du saupoudrage, se termine » cité dans Poirrier (P.), 2000, L’État et la culture en France au XXe siècle, Livre de poche, « Références », p. 207.
9 Lefebvre (R.), 2002, « La proximité à distance. Esquisse de typologie des interactions élus-citoyens », communication présentée à l’occasion du VIIe Congrès de l’Association française de science politique, Atelier : « La “proximité” dans le champ politique : usages, pratiques, rhétoriques ». Pour une illustration des luttes entre points de vue « politique » et « professionnel » provoquées par l’action culturelle de « proximité », avant même que le terme ne connaisse une telle fortune sociale, cf. Charpentier (I.), 1998, « L’art et les manières de lire aux champs… Les concurrences entre réseaux de lecture publique dans l’Aisne », in Dubois (V.) (dir.), Politiques locales et enjeux culturels. Les clochers d’une querelle XIXe-XXe siècles, CHMC – La Documentation française, p. 201-221.
10 Le programme des « équipements culturels de proximité » peut être considéré, à plus d’un titre, comme un prolongement de celui des « cafés-musiques », lancé en 1991 dans le cadre de la politique de la ville.
11 Pommier (E.), 1986, « Naissance des musées de province », in Nora (P.) (dir.), Les lieux de mémoire, tome II, La Nation **, Paris, Gallimard, p. 453.
12 Cité dans Pommier (E.), ibidem, p. 451.
13 Ory (P.), 1996, « L’État et la culture, de la Révolution à 1959 », in Perret (J.), Saez (G.) (dir.), Institutions et vie culturelles, Paris, La Documentation française – CNFPT, p. 8.
14 Pommier (E.), 1986, « Naissance des musées de province », art. cité, p. 487.
15 Vadelorge (L.), 1996, « Jalons pour une histoire des musées de province au XXe siècle : le rôle de Fernand Guey », Cahiers du GRHIS, n° 4, p. 49.
16 Ibid., p. 63.
17 Dubois (V.), 1999, La politique culturelle. Genèse d’une catégorie d’intervention publique, Paris, Belin, p. 72-74.
18 Repris par François (B.), 1998, Le régime politique de la Ve République, Paris, La Découverte, p. 9.
19 Discours d’André Malraux prononcé devant l’Assemblée Nationale le 7 novembre 1969. Journal Officiel, débats parlementaires, 1969, p. 4492.
20 Urfalino (P.), 2004, L’invention de la politique culturelle, op. cit., p. 185-201.
21 Exposé de Pierre Moinot devant la sous-commission « Action culturelle » de la Commission de l’équipement culturel et du patrimoine artistique, repris dans Girard (A.), Gentil (G.) (dir.), 1995, Les Affaires culturelles au temps d’André Malraux, Comité d’Histoire du ministère de la Culture – La Documentation française, p. 385.
22 Biasini (E.), « Action culturelle, an I », octobre 1962, repris dans Girard (A.), Gentil (G.) (dir.), 1995, Les Affaires culturelles au temps d’André Malraux, op. cit., p. 404.
23 FNCCC Informations, n° 2, janvier 1967, p. 13. Sur cette opposition, cf. Dubois (V.), 1995, « Pour la culture et contre l’État ? La Fédération nationale des centres culturels communaux au début des années 1960 », in Poirrier (P.), RAB (S.), Vadelorge (L.) (dir.), Jalons pour l’histoire des politiques culturelles communales, CHMC – La Documentation française.
24 Biasini (E.), « Action culturelle, an I », op. cit., p. 404.
25 Ibid., p. 404.
26 FNCCC Informations, n° 7, septembre 1969, p. 12.
27 Un souvenir de Guy Brajot, successeur d’Emile Biasini, montre bien l’importance de la détermination des clés de financement : Biasini m’a toujours dit : « vous rompez un principe essentiel et vous rompez ce qui pour moi est peut être le plus important dans l’équipement et la gestion du ministère de la Culture », in Abirached (R.) (dir.), 1993, La décentralisation théâtrale. 2. Les années Malraux, Actes Sud Papiers, p. 79.
28 En 1978, les communes investissent 11,5 milliards de francs dans la culture, soit 52,4 % des dépenses culturelles ; nombre d’entre elles étoffent à la même période leur administration en intégrant des services culturels. (Ces considérations générales ne doivent pas masquer la diversité des situations locales).
29 La rotation rapide des ministres et l’incertitude des attributions du ministère constituent, avec l’affaiblissement des crédits à la fin des années soixante-dix, les signes les plus apparents de cette crise.
30 Marrey (J.-C.), 1979, « À quoi servent les salles polyvalentes ? », ATAC Informations, n° 103, p. 17.
31 Inversement, certains maires – comme Dominique Baudis à Toulouse – refusent volontairement de s’inscrire dans un programme qu’ils considèrent déconnecté de leurs préoccupations majeures.
32 Le Bart (C.), 2002, « La proximité politique comme légitimation d’en bas », communication présentée à l’occasion du VIIe Congrès de l’Association française de science politique, atelier : « La “proximité” dans le champ politique : usages, pratiques, rhétoriques ».
33 « Vers une rénovation de la politique culturelle », Discours de Jacques Toubon prononcé devant le Sénat, le 6 décembre 1993.
34 Le maire, également conseiller régional, a occupé cette fonction de 1977 à 2001.
35 Entretien avec le maire de Saint-Yrieix-la-Perche, le 15 novembre 2002.
36 Notice explicative fournie avec le dossier de subvention (Archives municipales de Saint-Yrieix-la-Perche).
37 Entretien avec le maire de Saint-Yrieix la Perche, précité. Le détail du plan de financement montre en effet que la commune n’apporte qu’un peu plus de 30 % des crédits d’investissement (3 millions de francs sur un total de 9,8 millions de francs).
38 Archives municipales de Saint-Yrieix-la-Perche, 1992, Bibliothèque – salle de spectacle, Notice descriptive, 29 septembre.
39 Centre de documentation de la DRAC Limousin, 1992, Convention de développement culturel entre l’État, le ministère de la Culture et la commune de Saint-Yrieix-la-Perche, 6 mai.
40 Ibid.
41 Le Populaire, 9 novembre 1994.
42 « J’ai reçu beaucoup de collègues, de la région de Toulouse, de Rouillac… » (Entretien avec le maire de Saint-Yrieix-la-Perche). La commune de Rouillac (16) se dotera plus tard d’un équipement culturel de proximité comprenant une bibliothèque, une salle de spectacle, une école de musique et une salle polyvalente.
43 Conseil Régional du Limousin – Préfecture de la Région Limousin, 3e Contrat de Plan État-Région Limousin (1994-1998), 23 juin 1994, p. 49.
44 DRAC Limousin, Schéma triennal d’action régionale, 1995-1997, p. 15 (Centre de documentation de la DRAC Limousin).
45 Bilan d’activités de la DRAC Limousin, 1996, p. 9. (Centre de documentation de la DRAC Limousin).
46 Jobert (B.), 1992, « Représentations sociales, controverses et débats dans la conduite des politiques publiques », Revue française de science politique, 42 (2), p. 223.
47 Le Populaire, 1er avril 1994.
48 Entretien avec la directrice du Centre Fabrègue, le 3 juillet 2000.
49 En 2002, le théâtre est le premier poste de dépenses ; avec un budget 2,28 millions d’euros, il représente près de 30 % du budget global consacré à l’action culturelle. Source : Lettre d’Information de la Préfecture de la Région Limousin, n° 3, juin 2003.
50 DRAC Limousin, Qu’est-ce qu’un équipement culturel de proximité ?, Notice descriptive, p. 1 (Centre de documentation de la DRAC Limousin).
51 Ibid., p. 1.
52 Ibid., p. 1.
53 Ibid., p. 2.
54 Moulinier (P.), 1995, Politiques culturelles et décentralisation, CNFPT, p. 79-80.
55 Aillagon (J.J.) 2003, Conférence de presse sur « l’action territoriale », 26 mai, précité.
56 Entretien avec le premier directeur du Centre Fabrègue, 6 mai 2001. Professeur de lettres classiques, celuici a préalablement exercé des responsabilités dans différents centres culturels français basés à l’étranger, notamment en Turquie, en Irak et en Bulgarie.
57 Idem.
58 Idem.
59 Lecat (R.),Chiffert (A.), Reliquet (P.), 1999, La rénovation des instruments juridiques des services publics culturels locaux, Inspection générale de l’administration, ministère de la Culture et de la Communication, février, p. 27.
60 Entretien avec le conseiller sectoriel théâtre de la DRAC Limousin, le 22 mars 2000.
61 Idem.
62 Bilan d’activités de la DRAC Poitou-Charentes, 1996, repris en annexe de la note « Services culturels de proximité », DDF, février 1997, p. 4. (nous soulignons). Centre de documentation du Département des études et de la prospective, ministère de la Culture et de la Communication.
63 Wachter (S.), 2000, « L’agenda de l’aménagement du territoire entre prospective et rétrospective (1980, 1990, 2000) », in Wachter (S.) et al., Repenser le territoire, DATAR – Éditions de l’Aube, p. 85.
64 « Vers une rénovation de la politique culturelle », Discours de Jacques Toubon prononcé devant le Sénat, le 6 décembre 1993.
65 Ces derniers font en effet l’objet d’un classement en trois catégories : les projets confirmés (achèvement du Grand Louvre, Grande Galerie du Muséum national d’Histoire naturelle, aménagement du marais poitevin, etc.), les projets amendés (révision à la baisse des coûts de la Bibliothèque nationale de France et du Centre Tjibaou de Nouméa), les projets abandonnés, dont le cas « le plus exemplaire » est celui du Centre de conférences internationales, initialement prévu sur le site du Quai Branly. Les efforts effectués au niveau des deux dernières catégories doivent permettre de dégager une enveloppe spécifique pour financer une nouvelle série d’opérations et mettre fin, du même coup, au privilège de la capitale.
66 Audition de Philippe Douste-Blazy dans l’avis n° 3031 présenté au nom de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi de finances pour 1997, Assemblée nationale, p. 65.
67 L’Écho, 9 novembre 1994.
68 Bourdieu (P.), 1997, Méditations pascaliennes, Paris, Seuil, « Liber », p. 223.
69 Passeron (J. -C.), 2003, « Consommation et réception de la culture. La démocratisation des publics », in Donnat (O.), Tolila (P.) (dir.), Le(s) public(s) de la culture, Paris, Presses de Sciences Po, p. 388.
70 Le programme des « ruches », qui prévoit le déploiement de moyens de fonctionnement, devra faire l’objet d’une évaluation sur le long terme.
71 Intervention de Christian Sabbe, conseiller référendaire à la Cour des Comptes, cité dans Gaillard (Y.), 2003, Rapport d’information n° 393 sur le rapport de la Cour des Comptes relatif aux services déconcentrés du ministère de la Culture, Commission des Finances, du Contrôle budgétaire et des Comptes économiques de la Nation, Sénat, juillet, p. 12.
© Presses universitaires de Rennes, 2005