1 Sur les conditions matérielles de production et de distribution, voir Schilling M., Bildpublizistik der Frühen Neuzeit. Aufgaben und Leistungen des illustrierten Flugblatts in Deutschland bis um 1700, Tübingen, Max Niemeyer Verlag, 1990. Des collections importantes de sources ont été éditées et étudiées. Pour le XVII^e siècle et la période de la guerre de Trente Ans, voir Alexander D., Strauss W. L. (éd.), The German Single-Leaf Woodcut, 1600-1700. A pictorial Catalogue, New York, Abaris Books, 1977, 2 vol. ; Harms W., Kemp C. (éd.), Deutsche illustrierte Flugblätter des 16. und 17. Jahrhunderts. Die Sammlungen der Hessischen Landes-und Hochschulbibliothek in Darmstadt : kommentierte Ausgabe, Tübingen, Max Niemeyer Verlag, 1987 (par la suite mentionné comme Harms I) ; Harms W. (éd.), Deutsche illustrierte Flugblätter des 16. und 17. Jahrhunderts. Die Sammlung der Herzog-August Bibliothek in Wolfenbüttel, Tübingen, Max Niemeyer Verlag, 1989, 3 vol. (par la suite mentionné comme Harms II-IV) ; Coupe W. (éd.), The German illustrated Broadscheet, 1600-1700, Baden-Baden, 1966, 2 vol. ; Paas R. J. (éd.), The German Political Broadsheet 1600-1700, Wiesbaden, 1985-1994, 4 vol. Les collections de Flugblätter qui ont fait l’objet d’un inventaire, d’une étude et d’une publication sont souvent localisées dans des institutions protestantes, bibliothèques ou universités. Il est donc possible que la prééminence protestante dans la production de feuilles volantes soit un peu surévaluée. Néanmoins, l’étude de collection de feuilles volantes conservées dans des bibliothèques de régions ou de villes catholiques ne remettrait sans doute pas profondément en cause cette répartition confessionnelle de la production. Certaines institutions comme la bibliothèque princière de Wolfenbüttel ont ainsi une politique d’acquisition à l’échelle européenne qui dépasse les frontières confessionnelles. Enfin, le choix des feuilles volantes publiées dans les catalogues, quand il ne s’agit pas d’une collection existante et matériellement rassemblée en un lieu, suppose nécessairement un biais dans le repérage des groupements thématiques repérables. D. Alexander et W. L. Strauss recensent par exemple des feuilles volantes dont les graveurs sont bien identifiés : la présence d’une signature suppose que la production gravée, identifiable et localisable, ne pouvait faire l’objet d’une attaque directe, notamment de la part des autorités civiles ou religieuses. C’est la raison pour laquelle les thèmes polémiques n’apparaissent guère dans leur catalogue.

2 Pour une étude des motifs iconographiques mis en œuvre dans le cadre des conflits religieux et de la confessionnalisation au XVI^e siècle, voir notamment Scribner R. W., For the Sake of Simple Folk. Popular Propaganda for the German Reformation, Oxford, Oxford University Press, 1994; Christensen C. C., Princes and Propaganda. Electoral Saxon Art of the Reformation, Kirksville, Sixteenth Century Journal Publishers, 1992 ; Oelke H., Die Konfessionsbildung des 16. Jahrhunderts im Spiegel illustrierter Flugblätter, Berlin, Boston, De Gruyter, 1992 ; Christin O., Confesser sa foi. Conflits confessionnels et identités religieuses dans l’époque moderne (XVI^e -XVII^e siècles), Paris, Champ Vallon, 2009.

3 Schilling M., Bildpublizistik..., op. cit., p. 12-25.

4 Pour une tentative de classification et de quantification par thème, voir Alexander D., Strauss W. L., (éd.), op. cit., vol. 1, introduction, p. 20. Parmi les autres thèmes fréquents, on trouve en particulier les pronostics astrologiques, les monstres, les événements miraculeux et les évocations de désastres naturels.

5 Burkhardt J., « Reichskriege in der frühneuzeitlichen Bildpublizistik », en ligne sur historicum. net [https://www.historicum.net/themen/medien-und-kommunikation/grundlagentext]/ ; Pfeffer M., Flugschriften zum Dreissigjährigen Krieg. Aus der Häberlin-Sammlung der Thurn- und Taxisschen Bibliothek, Francfort-sur-le-Main, Peter Lang, 1993. M. Schilling repère deux pics de production, en 1619-1621 et 1632-1633 : sur un corpus de 3069 feuilles volantes produites entre 1600 et 1650, 424 (13,8 %) ont été imprimées dans la première période, 382 (12,5 %) dans la seconde. Voir Schilling M., Bildpublizistik, op. cit., p. 177-178.

6 Gotthard A., Der Augsburger Religionsfrieden, Aschendorff, Münster, 2004 ; Schilling H., Smolinsky H. (dir.) Der Augsburger Religionsfrieden 1555, Aschendorff, Münster 2007 ; Christin O., La paix de religion : l’autonomisation de la raison politique au XVI^e siècle, Paris, Seuil, 1997.

7 Sur le processus général de la « seconde Reformation », voir notamment Schilling H. (dir.), Die reformierte Konfessionalisierung in Deutschland. Das Problem der « Zweiten Reformation », Wissenschaftliches Symposion des Vereins für Reformationsgeschichte, Gütersloh, Schriften des Vereins für Reformationsgeschichte, 195, 1986.

8 Alexander D., Strauss W. L., op. cit., p. 20. Les auteurs ne présentent pas les critères qui leur permettent d’établir cette typologie, et ne donnent pas la liste des documents qui correspondent à chaque catégorie. Il est probable qu’un certain nombre de feuilles gravées classées dans le thème « religion » soient liés à un événement de la guerre.

9 Theibault J., « The Rhetoric of Death and Destruction in the Thirty Years War », Journal of Social History, 27-2, 1993, p. 271-290.

10 Les hypothèses formulées par M. Schilling sont celles qui expliquent traditionnellement le développement des grands centres d’imprimerie : il s’agit de villes placées au cœur de régions caractérisées par une forte densité de population, l’existence de réseaux marchands et de nœuds de communication importants à l’échelle régionale et européenne. Ces centres d’impression, villes d’Empire pour la plupart, jouissent également d’une relative libéralité de la censure politique, en comparaison de celle qui est mise en œuvre dans les territoires catholiques, en particulier la Bavière et l’Autriche. Voir Schilling M., Bildpublizistik, op. cit., p. 170.

11 Harms W., Illustrierte Flugblätter aus den Jahrhunderten der Reformation und der Glaubenskämpfe, Kunstsammlungen der Veste Coburg, catalogue d’exposition tenue du 24 juillet au 31 octobre 1983, 1983, introduction.

12 Sur cette question voir les analyses sur les séries de gravures de Tortorel et Perrissin : Benedict P., Le regard saisit l’histoire. Les Guerres, massacres et troubles de Tortorel et Perissin, trad. française d’Anna Alvarez, Genève, Droz, 2012.

13 À ce titre, l’argumentation utilisée dans la Bildpublizistik diffère des logiques politiques et juridiques mises en œuvres dans les traités de paix, notamment lors de la paix d’Augsbourg.

14 Sur la guerre de Trente Ans, son déroulement et ses délimitations chronologiques, voir notamment Schmidt G., Der dreissigjährige Krieg, Munich, Beck, 1995 ; Parker G., The Thirty Years’War, Londres, Routledge, 1984 ; Burkhardt J., Der Dreissigjährige Krieg, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1992 ; Wilson P. H., Europe’s Tragedy. A History of the Thirty Years War, Londres, Allen Lane, 2009.

15 Le format des images (entre 20 et 50 cm le plus souvent) légitimait l’affichage, tandis que la théâtralisation des textes ou la versification incitaient à la déclamation publique. M. Schilling a mené une étude générale des conditions d’acquisition intellectuelle et de réception matérielle des Flugblätter dans l’espace germanique pour l’époque moderne : Schilling M., Bildpublizistik, op. cit., p. 40-53. Il donne notamment (p. 51) une liste des collectionneurs connus de feuilles volantes dans l’espace germanique. Il s’agit de nobles, de patriciens et de savants.

16 Les analyses sur ce sujet plutôt sur la période postérieure aux traités de Westphalie. Pour une synthèse, voir Wrede M., « Entre Empereur, Empire et nation : l’essor de “l’esprit politique” en Allemagne moderne, XVII^e -XVIII^e siècles », Revue historique, 643, 2007-3, p. 623-652, en particulier p. 627-628.

17 Cette méthode est en partie celle qui est mise en œuvre par Christian Jouhaud dans son étude sur les mazarinades ; corpus différent, il est vrai, plus largement textuel, limité à une période plus courte, mais qui présente également une grande diversité formelle et thématique. La connaissance de certains auteurs, la création d’un répertoire thématique très précis et la mise en série des textes dans une chronologie fine permettent cependant, dans ce cas, d’identifier précisément milieux et enjeux de rédaction. Voir Jouhaud C., Mazarinades : la Fronde des mots, Paris, Aubier, 1985 ; sur la méthode mise en œuvre : Jouhaud C., « Les libelles en France au XVII^e siècle : action et publication », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 90-91, 2003, p. 33-45.

18 Le paradigme historiographique de la confessionnalisation auquel je fais ici référence et qui prévaut en général dans les travaux sur l’espace germanique, soumis depuis 1555 au principe « cujus regio, ejus religio », est dû à Wolfgang Reinhard et Heinz Schilling. Il suppose notamment que la concurrence confessionnelle a favorisé la construction d’États modernes par l’intermédiaire de nouvelles formes de contrôle social. Voir notamment Reinhard W., « Gegenreformation als Modernisierung ? Prolegomena einer Theorie des konfessionellen Zeitalters », Archiv für Reformationsgeschichte, 68, 1977, p. 226-251 ; Schilling H., « Die Konfessionsbildung im Reich. Religiöser und gesellschaftlicher Wandel im Deutschland zwischen 1555 und 1620 », Historische Zeitschrift, 246, 1988, p. 1-45 ; Schilling H. (dir.), Konfessionskonflikt und Staatsbildung, Güttersloh, Mohn, 1981.

19 Pour une étude générale des positions et thèmes anti-jésuites, voir Fabre P.-A., Maire C. (dir.), Les antijésuites. Discours, figures et lieux de l’antijésuitisme à l’époque moderne, Rennes, PUR, 2010.

20 Les jésuites sont ainsi fréquemment assimilés à une horde barbare, voire à un essaim d’abeilles : voir Harms IV, 211 : Jesuiter Bienenschwarm ; Harms IV, 212 : Der Jesuiten Länderfang.

21 Il y a peu d’études sur le patriotisme d’Empire dans la première modernité. Voir notamment Wandruszka A., Reichspatriotismus und Reichspolitik zur Zeit des Prager Friedens von 1635. Eine Studie zur Gechichte des deutschen Nationalbewusstseins, Cologne, Böhlau, 1955. Pour l’expression de ce patriotisme dans les milieux de l’humanisme tardif (et chez un calviniste), voir Caspary G., Späthumanismus und Reichspatriotismus. Melchior Goldast und seine Éditionen zur Reichsverfas-sungsgeschichte, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2006.

22 Pour un aperçu général sur la présence des jésuites dans l’enseignement allemand à l’époque moderne, voir notamment Hengst K., Jesuiten an Universitäten und Jesuitenuniversitäten. Zur Geschichte der Universitäten in der Oberdeutschen und Rheinischen Provinz der Gesellschaft Jesu im Zeitalter der konfessionellen Auseinandersetzung, Quellen und Forschungen aus dem Gebiet der Geschichte, Paderborn, Ferdinand Schöningh, 1981.

23 Sur Klesl, voir les notices biographiques suivantes : Allgemeine Deutsche Biographie, 16, 1882, p. 167-178, article en ligne [http://www.deutsche-biographie.de/sfz42755.html] ; Neue Deutsche Biographie, 12, 1979, p. 51, article en ligne [http://www.deutsche-biographie.de/sfz42755.html] ; Altman H., « Klesl (Cleselius, Khlesel, Klesel), Melchior, Kardinal », Biographisch-Bibliographisch Kirchenlexikon, t. IV, Traugott Bautz, Nordhausen, 1992, col. 42-45.

24 Harms, II, 147. Gravure sur bois et caractères typographiques, 322 x 247 mm.

25 Harms II, 140. Gravure sur cuivre et caractères typographiques, 541 x 320 mm ; 278 x 320 mm.

26 Ce motif iconographique, en usage en Occident depuis le Moyen Âge, combine plusieurs références bibliques : celle à Isaïe, 11, 1 (« Puis un rameau sortira du tronc d’Isaïe, et un rejeton naîtra de ses racines ») et celles aux généalogies du Christ dans les Évangiles de Matthieu et de Luc.

27 Benedict P., op. cit., p. 89-91.

28 Praher S., Höllischer Landtag/oder Jubel Jar : Darinnen sich Lucifer berathschlagt Was ursach jetzt wenig Jaren hero/nit sovil Seelen in die Höllen fahren/wie zuvor/Allen Melancolischen und Podagraischen zu lieb zusamen bracht, Passau, Nenninger et Frosch, 1617.

29 Voir par exemple Harms II, IH 117 : Insignia Jesuitarum.

30 Harms II, 168. Gravure sur cuivre, 231 x 256 mm.

31 Le motif de la chope de bière luthérienne a déjà été utilisé dans les feuilles volantes catholiques, notamment dans celles qui sont produites en réponse aux célébrations du premier centenaire de la Réforme. Une célèbre gravure schématise ainsi les principes du catéchisme luthérien sous la figure d’une chope. Voir Harms II, 118: D. M. Luthers Grosser Catechismus.

32 Roper L., « Martin Luther’s Body: The “Stout Doctor” and His Biographers », The American Historical Review, 115-2, 2010, p. 351-384.

33 Deschamp M., « Luther et ses conjoints : de quelques portraits peints du couple luthérien », Europa moderna, 1, 2010, article en ligne [http://europamoderna.com/index.php/articles-publies/40-nd12010/52-luther-et-ses-conjoints-de-quelques-portraits-peints-du-couple-lutherien].

34 Sur les images imprimées produites à l’occasion de la paix de Westphalie, voir notamment Burkhardt J., « Auf dem Wege zu einer Bildkultur des Staatssystems. Der Westfälische Frieden und die Druckmedien », Historische Zeitschrift. Beihäfte, vol. 26, der Westfälische Friede. Diplomatie – politische Zäsur – kulturelles Umfeld – Rezeptionsgeschichte, 1998, p. 81-114 ; Gantet C., La paix de Westphalie (1648). Une histoire sociale, XVII^e -XVIII^e siècles, Paris, Belin, 2001.

35 Harms, II, 148. Gravure sur cuivre et caractères typographiques, 355 x 233 mm ; 162 x 215 mm.

36 Voir l’interprétation donnée par Wolfgang Harms : Harms II, 148, p. 262.

37 Ce spiritualisme mystique hérite notamment des idées de Kaspar Schenckfeld (1490-1561). Le piétisme allemand qui se développe dans la seconde moitié du XVII^e siècle y trouve aussi une partie de ses racines.

38 Voir par exemple Harms IV, 173. Le Leipziger Konvent réunit les princes, villes, chevaliers d’Empire protestants qui s’opposaient à l’Édit de restitution de Ferdinand II (1629). Celui-ci rendait illégitime toute sécularisation des biens ecclésiastiques (catholiques) postérieure à 1552.

39 Harms II, IH 101. Gravure sur cuivre et caractères typographiques, 335 x 243 mm ; 135 x 224 mm.

40 Pour l’analyse de ce thème iconographique, voir Christin O., La paix de religion, op. cit., p. 169-174.