La congrégation des Oblats de Marie Immaculée

1La congrégation des Oblats de Marie Immaculée1 fut instituée en 1816, à Aix-en-Provence, par le P. Charles de Mazenod qui devint évêque de Marseille en 1837. Les Oblats consacrèrent d'abord toute leur activité à donner des missions dans les paroisses du Midi de la France. En 1841, ils acceptèrent pour leur institut le principe des missions à l'étranger et, cette même année, quatre premiers missionnaires passèrent au Canada. Depuis ce temps, tout en réservant pour la France à peu près la moitié de leurs membres, ils ont pris rang parmi les grandes sociétés missionnaires françaises ; ils ont des missions en Amérique, en Afrique et en Asie.

2Les premiers oblats bretons furent recrutés par le P. Léonard. C'était un missionnaire du Canada qu'un grand talent oratoire avait fait rappeler en France, en 1846, pour y rechercher des vocations pour sa congrégation. En janvier 1848, il donna une conférence sur les missions du Canada au grand séminaire de Quimper où jusqu'alors l'existence même des Oblats était complètement inconnue. En février, trois séminaristes, Lebescon, Jolivet et Grenier, un diacre et deux sous-diacres, se mirent en route pour le noviciat des Oblats. Un Rennais, l'abbé Amisse, les rejoignit quelques mois plus tard. Les premières recrues du Morbihan arrivèrent en 1856, celles des Côtes-du-Nord en 1857, celles de Nantes se firent attendre jusqu'en 1879. Depuis 1848 la congrégation des Oblats a orienté vers les missions 223 de ses prêtres bretons. Le diocèse de Quimper venait en tête de tous les diocèses de France avec 103 missionnaires ; le diocèse de Vannes occupait le troisième rang avec 53, le diocèse de Rennes le sixième avec 33, le diocèse de Nantes le septième avec 23.

3La moitié des oblats français étaient retenus en France, mais presque tous les Bretons qui entraient dans leur société n'y rentraient que dans l'espoir d'être envoyés dans les missions lointaines. Pour ne pas nuire au recrutement de leur noviciat, les supérieurs ont dû tenir compte de ce fait dans la distribution des obédiences. Des 20 premiers oblats venus de Quimper, 18 furent envoyés dans les pays de mission. Le mouvement de vocations vers le noviciat de la congrégation se développait normalement, mais le maintien en France de plusieurs jeunes prêtres ordonnés entre 1866 et 1870 lui fit subir un arrêt presque complet. En 1939, les Bretons ne représentaient pas tout à fait 30 % des prêtres oblats français ; ils représentaient plus de 36 % de ceux qui étaient missionnaires.

4Plusieurs circonstances favorisèrent le recrutement des oblats dans le diocèse de Quimper. En 1856, M^gr Sergent, évêque de Quimper, leur confia la direction de son grand séminaire. Les PP. Lagier et Belon acceptèrent de prendre en mains la direction de cet établissement tout en conservant provisoirement, comme collaborateurs, la plus grande partie des professeurs séculiers. Si leur tentative échoua, ils se retirèrent en emportant cependant l'estime de tous, même celle de leurs adversaires. Le P. Lagier, en particulier, avait exercé sur les séminaristes une influence profonde qui fut à l'origine de plusieurs entrées au noviciat des Oblats.

5François-Marie Camper, un des premiers séminaristes quimpérois qui s'étaient présentés à ce noviciat, mourut en 1856, en grande réputation de sainteté. Sa biographie, publiée trois ans plus tard, fut lue au petit séminaire de Saint-Pol-de-Léon où elle détermina l'orientation de plusieurs vocations2. En 1875, l'abbé Berthelon, prêtre d'une grande vertu, sous- directeur de ce petit séminaire, entra lui-même chez les Oblats. Ces circonstances favorisaient la tâche d'évêques propagandistes comme M^gr Clut, M^gr Grandin, M^gr Grouard, etc., dont les conférences sur leur apostolat dans les glaces polaires connurent toujours un grand succès.

6Dans le diocèse de Vannes le grand recruteur fut longtemps le P. Lecorre, missionnaire de l'Athabaska-Mackenzie, que nous avons déjà rencontré et que nous rencontrerons encore. Il était connu dans tout le diocèse. En 1874, la Semaine religieuse avait publié le récit sensationnel du voyage en Alaska qu'il avait entrepris deux ans plus tôt. Il avait été le premier prêtre catholique à pénétrer dans ce pays, il y avait séjourné une année entière et s'était lancé, sans guide, vers le détroit de Béring d'où il était revenu par San-Francisco. De 1876 à 1880, presque chaque numéro de la Semaine religieuse contint quelques pages de son « Journal hebdomadaire d'un missionnaire », description de la vie des missionnaires à la recherche des rares tribus d'Esquimaux dans les immenses contrées enneigées de l'Extrême-Nord canadien.

7Les séjours en Bretagne du P. Lecorre furent avant tout des campagnes de recrutement, recrutement dans les séminaires, recrutement dans les paroisses aussi, car les missions de l'Athabaska avaient grand besoin de frères coadjuteurs. La Semaine religieuse du 20 février 1875, transmettait aux curés et recteurs du Morbihan son désir de trouver pour le Mackenzie « de jeunes laïcs pieux et courageux [...] C'est surtout dans les campagnes, disait-il, qu'il est donné de rencontrer de ces dévouements, des jeunes gens simples et droits, déjà habitués à la fatigue et à une nourriture frugale ». Les séminaristes, les jeunes gens qu'il avait décidés à embrasser la vie apostolique, il ne les dirigeait pas vers le noviciat français des Oblats, il les emmenait aussitôt avec lui.

Les vicariats d'Athabaska-Mackenzie, a écrit le P. Duchaussois, doivent au P. Lecorre, quêteur éloquent et recruteur entraînant, outre les ressources d'aumônes considérables, une phalange d'ouvriers dont il sera difficile de trouver les pareils lorsqu'ils seront tombés. Le tiers des Pères de l'Extrême- Nord et la moitié des Frères sont de ses conquêtes. Ainsi les Frères Le Creff, Louis et Jean-Marie Beaudet, Josso, Coffrât, Barbier, Carour, Hémon, Lorfeuvre, Leborgne, Rio, pour ne nommer que des Frères. Arrivés de leurs villages, ils sont devenus des patriarches à barbe grise et les piliers de base de nos missions.
C'est en Bretagne, de préférence, que le P. Lecorre tendait ses appâts. Et les petits Bretons de mordre à belles dents de foi et d'enthousiasme. Sitôt pris, sitôt emmenés par le maître-pêcheur et jetés aux fleuves et aux lacs polaires.
Caravanes sur caravanes sautaient les rapides de l'Athabaska, traversaient les grands lacs et descendaient le Mackenzie en chantant des airs bretons. La terre de leur mission en vue, ils lançaient à leurs amis qui, en agitant leurs mouchoirs, attendaient sur la grève :
Nous venons encore
du pays d'Arvor3

8Un autre religieux, le P. Sachot, originaire de Caden, en pays gallo, contribua à multiplier le nombre des oblats morbihannais en se faisant le pourvoyeur de l'école apostolique ouverte à Pontmain (Mayenne) en 1879. Le pays de Léon, dans le Finistère, le pays gallo dans le Morbihan, ont été en Bretagne les deux principaux domaines du recrutement des oblats.

9La courbe des départs des oblats bretons missionnaires aurait progressé normalement de 1848 à la fin du xix^e siècle, sans la diminution déjà signalée de l'apport du Finistère après 1870. La brusque augmentation des départs entre 1901 et 1910 s'explique par les lois contre les associations congréganistes : un grand nombre d'oblats durent quitter la France. La diminution générale des vocations sacerdotales, la fermeture en 1903 de l'École apostolique de Pontmain et de toutes les autres maisons de formation situées sur le territoire français, la guerre de 1914-1918, rendent compte de l'effondrement de la courbe entre 1901 et 1930. La remontée très nette du nombre des départs entre 1931 et 1940 est due, pour une large part, à la réouverture, vers 1920, de l'École apostolique de Pontmain.

10Trois oblats bretons ont été élevés à l'épiscopat : M^gr Charles Jolivet, de Pont-l'Abbé, vicaire apostolique du Natal de 1874 à 1903, M^gr Émile Legall, de Saint-Jean-de-Boiseau, archevêque de Edmonton (Alberta, Canada) de 1897 à 1920 et M^gr Alfred Guyomard, né à Erquy (Côtes-du- Nord) évêque de Jaffna (Ceylan) de 1924 à 1956.

11Plusieurs sont morts tragiquement. Le P. Félix Marchand, de Château- giron, missionnaire au Canada, fut tué en 1885 au lac de la Grenouille (Alberta) par les métis de la Rivière-Rouge. Ceux-ci, au cours d'une révolte, avaient fait prisonniers les PP. Marchand et Fafard. Les insurgés tirèrent d'abord sur ce dernier qui s'écroula. Les circonstances auraient permis au P. Marchand de prendre la fuite ; il préféra se porter au secours de son confrère et ce fut au moment même où il se penchait sur celui-ci qu'il eut la tête traversée d'une balle4.

12Le P. Guillaume Le Roux, de Plomodiern (Finistère) qui avec le P. Rouvière, avait suivi une tribu d'Esquimaux jusqu'à l'embouchure de la Coppermine River, y fut massacré entre le 28 octobre et le 2 novembre 19135. En 1921, le P. Frapsauce disparut avec ses chiens et son traîneau sous la glace du Grand Lac de l'Ours (Nord-Ouest Canadien)6.

13Le P. Laurent Le Goff, de Quimper, est l'auteur de nombreux ouvrages en montagnais. Le P. Jean-Marie Le Jeune (1855-1930) de Pleyber-Christ (Finistère), missionnaire en Colombie britannique, adapta la sténographie Duployé à la transcription du Chinook, dialecte compris par la majorité des Indiens de Colombie. Les jeunes, premiers attirés par la nouveauté de ce système, se firent les professeurs des plus âgés, et notre missionnaire publia nombre de livres et même une revue en Chinook7. Le P. Louis Le Jeune, frère du précédent, a pris rang parmi les principaux historiens du Canada.

14Une quarantaine de frères coadjuteurs bretons ont été envoyés dans les missions de l'Extrême-Nord Canadien. C'est d'eux surtout qu'il est question dans le livre du P. Duchaussois : Apôtres inconnus. En 1939, des 40 frères français employés dans les missions, 21 étaient des Bretons. De 1940 à 1970, 74 oblats bretons, dont 38 Finistériens ont été envoyés hors d'Europe.

La Société de Marie ou Maristes

15La Société de Marie fut fondée, en 1824, par le Vénérable Jean-Claude Colin, jeune prêtre du diocèse de Belley. Ses constitutions prévoient trois sortes de mission pour les Pères Maristes : la prédication de missions dans les pays chrétiens, l'éducation des enfants dans les collèges et l'apostolat dans les pays infidèles. Elles précisent que pour être envoyés dans les missions lointaines, ils doivent en faire la demande expresse.

16En 1836, quand ses premiers missionnaires partirent pour l'Océanie, la Société de Marie ne comptait qu'une vingtaine de membres, tous originaires des diocèses de Belley ou de Lyon. C'est un sulpicien qui fut le trait d'union entre la Bretagne et la jeune congrégation. En 1839, M. Boiteux, ancien supérieur du grand séminaire de Nantes, fut transféré à Lyon où il connut le P. Colin. Quand, en 1840, il fut consulté sur le choix d'une congrégation par l'abbé Reigner, vicaire à Saint-Herblain, un de ses anciens élèves qui, sur le conseil de son évêque venait de renoncer en faveur des missions à son attrait pour la Trappe, il l'orienta chez les Maristes8.

17Par cette décision l'abbé Reigner orienta lui-même vers ces religieux plusieurs jeunes prêtres qui avaient été ses condisciples au grand séminaire. Quand il s'embarqua pour la Nouvelle-Zélande, en novembre 1841, il était déjà remplacé au noviciat par l'abbé Bernard qui, vingt-cinq ans plus tard, trouverait la mort dans un naufrage au large de l'île de Pam. L'abbé Padel et l'abbé Mériais, directeur de la maîtrise de la cathédrale, entrèrent à leur tour chez les Maristes. Ils s'embarquèrent pour les Wallis, en 1845, sur L'Arche d'Alliance du capitaine Marceau, ce navire qui, lors de sa bénédiction solennelle par M^gr de Hercé dans le port de Nantes, avait été l'occasion d'une grande publicité en faveur des missions d'Océanie.

18De sa mission de Nouvelle-Zélande, le P. Reigner entretint avec les directeurs du séminaire de Nantes une correspondance intime qui ne pouvait que favoriser, d'une manière indirecte, le recrutement de sa congrégation. Si ce recrutement ne fut pas très abondant jusqu'en 1880, c'est que le diocèse de Nantes manquait lui-même de prêtres mais, de 1880 à 1910, aucune opposition ne venant plus enrayer les vocations missionnaires, les départs de séminaristes ou de prêtres nantais pour le noviciat des Pères Maristes allèrent en se multipliant rapidement.

19La Société de Marie n'avait encore reçu qu'un seul missionnaire du diocèse de Saint-Brieuc quand, en 1861, la direction du grand séminaire lui fut confiée. Cette position privilégiée, renforcée par la bienveillance de M^gr David qui était originaire de Lyon, lui valut un grand nombre de recrues. En 1940, le diocèse de Nantes avait donné 63 Maristes missionnaires et celui de Saint-Brieuc 44. Seul le diocèse de Lyon, berceau et centre de la Société de Marie, qui englobe les deux départements du Rhône et de la Loire, en avait donné davantage, 81. L'apport des cinq diocèses bretons représentait 23 % du total des missionnaires Maristes français (129 sur 562).

Missionnaires maristes bretons

20Le tableau de la répartition par décennie des départs des Maristes bretons pour l'Océanie ou l'Amérique accuse quatre périodes dans leur recrutement :

21De 1841 à 1870, la Société de Marie se fait connaître à Nantes, à Saint- Brieuc et à Rennes. Au cours de ces trente années, elle put envoyer 15 Bretons dans ses missions. De 1871 à 1910, elle bénéficia largement de l'abondance des vocations sacerdotales. De cinq qu'elle était pendant la période précédente, la moyenne décennale des départs s'éleva à 23,5. De 1911 à 1940, cette moyenne tombe à 6. Les Maristes avaient dû quitter, en 1887, la direction du grand séminaire de Saint-Brieuc. Ils pensaient maintenir et même augmenter leur recrutement breton par l'établissement, vers 1900, d'un noviciat dans la commune de Rieux (Morbihan). Mais en 1903, ils furent expulsés de toutes leurs communautés de France. Comme ils disposaient aux États-Unis de maisons florissantes, ils transportèrent leurs œuvres de formation dans ce pays, se coupant ainsi de leurs bases de recrutement. C'est l'explication du petit nombre des aspirants qu'ils ont reçu de Bretagne au cours de cette troisième période. Depuis 1940, une dizaine seulement de Maristes bretons ont reçu leur obédience pour un pays de mission.

22M^gr Victor Douceré, né le 3 avril 1857 à Évran (Côtes-du-Nord) comptait cinq années de ministère paroissial quand il fut reçu dans la Société de Marie en 1886. Il fut nommé vicaire apostolique des Nouvelles-Hébrides, mission qu'il gouvernait depuis quatre ans déjà, en qualité de préfet apostolique. Il est mort en 1939. Au cours de cinquante-trois ans d'un apostolat très actif, il s'était distingué comme botaniste, linguiste, ethnologue et historien. C'est lui qui acclimata aux Nouvelles-Hébrides les bananes et les mangues9.

23Deux autres missionnaires, le P. J.-B. Suas (originaire d'Yvignac, Côtes- du-Nord) et le P. Élie Tattevin (de Pornic) sont à signaler pour leurs études ethnographiques sur les indigènes des Nouvelles-Hébrides10.

La congrégation des Sacrés-Cœurs (Picpuciens)

24La congrégation des Sacrés-Cœurs (dits de Picpus) fut fondée à Poitiers, en 1801, par l'abbé Pierre Coudrin (1768-1837). Les fins principales qu'elle poursuit sont la propagation de la dévotion aux Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie, les œuvres d'éducation, l'apostolat à l'étranger.

25Entre 1834 et 1840, elle connut dans le clergé rennais une certaine vogue grâce au P. Caret, originaire de Bécherel, l'un des deux premiers Picpuciens envoyés aux îles Gambier. Son exemple, ses récits publiés par les Annales de la Propagation de la Foi attirèrent vers sa congrégation plusieurs de ses anciens condisciples de séminaire, tous engagés déjà dans le ministère paroissial.

26En 1848, les Pères de Picpus pénétrèrent en Bretagne ; ils établirent une maison d'études pour leurs théologiens à Sarzeau (Morbihan) dans l'ancien monastère des Pères de la Merci. Ils furent des premiers à profiter de la loi Falloux ; dès 1850, ils transformèrent le monastère de Sarzeau en un collège secondaire. Cet établissement n'eut jamais une clientèle considérable. Vers 1878, il fut remplacé par une école apostolique. Avant l'ouverture de celle-ci, une vingtaine seulement de Picpuciens bretons furent missionnaires, 89 le furent de 1890 à 1940 et 70 l'ont été depuis. Dans leur très grande majorité, ces religieux provenaient du diocèse de Vannes et de Quimper. Dans le classement des diocèses de France, d'après le nombre de religieux donnés par chacun d'eux à la congrégation des Sacrés-Cœurs, le diocèse de Quimper occupe le troisième rang (104 religieux), celui de Vannes le quatrième (93 religieux). L'ensemble du recrutement breton représente 23,3 % du recrutement français.

27Le P. Alexandre Nogue, un Nantais, et les PP. Corentin Bernard et Évremond Morvan, du diocèse de Quimper ont été massacrés dans l'île chinoise d'Haï-Nan, le premier par des soldats chinois en 1926, les deux autres par des soldats japonais en 1941.

La congrégation de Jésus et de Marie (Eudistes)

28La congrégation de Jésus et Marie, fondée à Caen par saint Jean-Eudes en 1643, fut établie à Rennes, en 1670, par le fondateur lui-même. À la fin du xvii^e siècle, les Eudistes dirigeaient en Bretagne le grand et le petit séminaire de Rennes et le grand séminaire de Dol. La Révolution les expulsa de ces trois établissements ainsi que de tous ceux qu'ils possédaient en France.

29Sous la Restauration, quand les anciennes congrégations purent reparaître, celle des Eudistes, réduite à un nombre infime de survivants, ne dut sa résurrection qu'à la ténacité de M. Blanchard, l'ancien supérieur du petit séminaire de Rennes11. Ce n'est qu'en 1826, alors qu'il était à la fois vicaire général de M^gr de Lesquen et recteur de l'Académie de Rennes, que ce saint prêtre réussit enfin, après de multiples tentatives, à reconstituer la Société du P. Eudes.

30Cette reconstitution dans la capitale de la Bretagne d'une congrégation normande par ses origines eut pour conséquence de faire succéder au recrutement normand, prépondérant sous l'Ancien Régime, un nouveau recrutement presqu'entièrement breton. Depuis 1830, tous les supérieurs généraux ont été des Bretons. Retracer l'activité apostolique des eudistes bretons, c'est esquisser du même coup l'histoire des missions de leur société.

31Cette histoire commence par une série d'essais pénibles et sans lendemain. Le premier missionnaire de la société fut le P. René Bertin. Il ne s'était fait eudiste, en 1830, qu'après avoir reçu de M. Blanchard, l'assurance de pouvoir réaliser les désirs d'apostolat en pays lointains qu'il nourrissait depuis son adolescence. Après trois ans de ministère à la Martinique (1831- 1834), il résolut de passer dans les missions des États-Unis d'Amérique qui avaient été à l'origine de sa vocation apostolique. En cours de route, les supplications de M^gr Mac Donnell, évêque de Port d'Espagne, le retinrent à la Trinidad.

32Le diocèse de Port-d'Espagne était alors déchiré par un schisme fomenté par deux prêtres irlandais. Excellent orateur et ardent apôtre, le P. Bertin réussit à ramener à l'obéissance un grand nombre d'égarés. Ses goûts le portant vers la jeunesse, il ouvrit un petit collège qu'il plaça sous le patronage de saint Georges. En 1836, M^gr Mac Donnell, accompagné du P. Bertin, vint à Rennes plaider la cause de son diocèse près de M. Louïs, successeur de M. Blanchard. Sur sa demande, un nombre assez considérable de jeunes Irlandais furent reçus dans la communauté de Saint-Martin pour étudier le français et suivre les cours de théologie au grand séminaire de Rennes. De son côté, le P. Bertin recrutait une douzaine d'ecclésiastiques qui s'embarquèrent avec lui pour la Trinidad le 20 août 1837. Deux ans plus tard, il reçut, pour l'aider dans la direction du collège Saint-Georges, le concours de quelques prêtres du diocèse de Rennes au nombre desquels se trouvait le P. Poirier, un eudiste de grande valeur. La division continuait malheureusement à régner dans l'Église de Port d'Espagne ; elle compromit la santé du P. Bertin, qui rentra en France en 1845. Le P. Poirier continua à lutter de toutes ses forces pour la cause catholique jusqu'à sa promotion à l'évêché de Roseau, dans l'île de la Dominique en 185812.

33Le siège épiscopal de Roseau avait été établi en 1850. M^gr Poirier y succédait à M^gr Monaghen (1851-1855), un de ces Irlandais reçus à Rennes par les Eudistes. Sa famille spirituelle était dans l'impossibilité de lui fournir les nombreux auxiliaires dont il avait besoin. Elle ne lui adressa que M^gr Ardois, son vicaire général (originaire de Paimbœuf), quelques prêtres et deux frères coadjuteurs, tous Bretons. Force lui fut de faire appel au dévouement de ses compatriotes du clergé séculier. Dans l'une des lettres qu'il adressa à M^gr Bécel, il écrivait : « Je me réjouirais si quelques bons prêtres de votre diocèse veulent bien me venir en aide. Mon ambition serait de faire de mon diocèse une petite Bretagne13 ». L'abbé André Poirier, son frère, l'abbé Rigaud, son neveu, deux autres prêtres d'Ille-et-Vilaine, et quatre du Morbihan, le suivirent à la Dominique. M^gr Poirier mourut en 1879. Il avait gouverné pendant vingt et un ans le diocèse de Roseau qui fut, dès lors, abandonné par sa congrégation14

34À peine le P. Bertin avait-il ouvert le collège Saint-Georges à Port- d'Espagne que ses confrères acceptaient la direction d'un autre collège aux États-Unis. Lorsqu'en 1834, M^gr Bruté de Rémur vint en France chercher des prêtres pour son diocèse de Vincennes, il se prévalut de son titre d'ancien élève de M. Blanchard pour obtenir de M. Louis quelques professeurs pour une école secondaire qu'il se proposait de fonder dans sa ville épiscopale15. Malgré le peu de sujets dont il disposait, M. Louis se laissa arracher trois de ses religieux. En 1839, M^gr de la Hailandière, successeur de M^gr Bruté, lui ayant réclamé des renforts, il lui accorda quatre nouveaux eudistes dont M. Bellier qui fut nommé supérieur. Un nouveau groupe composé de trois séminaristes, d'un frère coadjuteur et de deux domestiques passa l'Atlantique en 1843. À une exception près, tous ces missionnaires étaient des Bretons.

35Le collège de Vincennes, installé les premiers temps dans la maison de M^gr Bruté, ne fut jamais florissant. Il comptait cependant une cinquantaine de pensionnaires en 1843. Cette année-là, M. Bellier songea sérieusement à l'ouverture d'un noviciat qui aurait assuré à sa congrégation un recrutement américain. Mais, au lieu de s'accroître, le nombre des élèves ne fit que diminuer. Malgré des sommes importantes accordées par M. Louis et par la Propagation de la Foi, la petite communauté se trouva bientôt grevée de dettes tandis que ses relations avec M^gr de la Hailandière étaient des plus tendues. En 1847, M. Louis dépêcha en Amérique le P. Bertin muni des pleins pouvoirs. Décidés à quitter Vincennes, les eudistes cédèrent leur collège au diocèse qui prit leurs dettes en charge.

36L'établissement de Vincennes n'était pas encore fermé que déjà le P. Bertin en préparait un autre en Louisiane. Il s'était mis en relation avec M^gr Chanches, évêque de Natchez et avec M^gr Blanc, archevêque de la Nouvelle-Orléans. Le premier lui offrit la fondation d'un collège dans sa ville épiscopale et le second, la mission de Ouachita, qui comprenait neuf comtés de la Haute-Louisiane. Il crut pouvoir accepter ces deux propositions, sous réserve toutefois de l'approbation de M. Louïs16. Celui-ci étant mort en 1849, le chapitre général réuni pour l'élection de son successeur prit seulement l'engagement de donner quelques professeurs pour le collège de Natchez. Plus encore que celui de Vincennes, cet établissement ne fit que végéter. Aussi, dès qu'il apprit la mort de M^gr Chanches en 1851, le P. Gaudaire, nouveau supérieur général de la congrégation, s'empressa de donner à ses six confrères d'Amérique l'ordre de rentrer en France. Quatre y restèrent comme prêtres séculiers.

37Il ne faut pas chercher la raison de ces échecs successifs dans la qualité des religieux envoyés à Vincennes ou à Natchez. Il y avait parmi eux des hommes de valeur, comme M. Grignon qui devint vicaire général de l'évêque de Natchez, comme M. Ardois, vicaire général de M^gr Poirier, comme M. Leray futur archevêque de la Nouvelle-Orléans. Leur tort était d'être jeunes et de manquer d'expérience. À Vincennes, ils eurent à souffrir des exigences excessives de M^gr de la Hailandière, mais aussi de l'indépendance et de la témérité de M. Bellier nommé supérieur à vingt-six ans.

38Les décrets du 29 mars 1880 leur faisant craindre une expulsion prochaine, les Eudistes tentèrent, une troisième fois, de prendre pied aux États- Unis. Ils se chargèrent de la paroisse Saint-Jean-Baptiste de Troy, dans le diocèse d'Albany (État de New York), dont la population était en majeure partie d'origine canadienne. Cette nouvelle tentative se termina dès 1883 par un nouvel échec17.

39Les Eudistes devaient être beaucoup plus heureux en Colombie où ils se rendirent, cette même année 1883, pour obéir à un désir exprimé par Léon XIII au P. Le Doré leur supérieur général. Dans ce pays catholique, le clergé mal recruté, mal formé, d'une grande ignorance et de mœurs parfois relâchées, était d'une insuffisance numérique alarmante. L'archidiocèse de Carthagène, par exemple, ne comptait qu'une trentaine de prêtres pour 320 000 catholiques répartis sur un territoire deux fois grand comme la Bretagne. Il s'agissait, pour les fils de saint Jean-Eudes, d'entreprendre la réforme de ce clergé colombien par la fondation de petits et grands séminaires, tout comme leur père, au xvii^e siècle avec les Olier, Vincent de Paul et Bérulle, avait entrepris celle du clergé français. C'était donc là pour eux une occasion inattendue de rentrer dans la ligne de leur vocation première18. Malgré ses cinquante-sept ans, l'ignorance de la langue espagnole et le climat équatorial qui est celui de la Colombie, le P. Théodore Hamon, premier assistant du P. Le Doré, se proposa lui-même pour présider aux premiers commencements de cette tâche de longue haleine. Quand il mourut en 1901, il avait fondé les trois grands séminaires de Carthagène, d'Antioquia et de Pamplona19

40La profonde rénovation du clergé colombien opérée par les Eudistes leur valut de nombreuses propositions de la part d'évêques du Vénézuela, du Pérou, de la Bolivie, du Chili, du Panama, du Mexique et des Antilles de langue espagnole. Faute d'un personnel suffisant, quelques-unes seulement de ces propositions furent retenues. En 1907, quelques religieux quittèrent la Colombie pour Saint-Domingue, capitale de la République Dominicaine. En 1910, d'autres se rendirent au Mexique où ils organisèrent trois séminaires. Dès 1914, ces fondations mexicaines, pleines d'espérances furent ruinées par la persécution. Plusieurs eudistes furent emprisonnés et condamnés à mort. Leur qualité d'étranger leur sauva la vie, mais par une cynique comédie, ils n'en furent pas moins soumis à un simulacre d'exécution20. De son côté, la mobilisation de 1914, en rappelant en France un grand nombre de missionnaires, amena la fermeture du séminaire de Saint- Domingue21.

41Depuis 1925, les Eudistes sont au Vénézuela où ils dirigent les séminaires de Caracas, de Mérida et de San-Cristobal. En Colombie même, leur sphère d'influence tend à prendre une extension toujours plus grande. En 1940, ils assuraient la formation des petits et des grands séminaristes de six diocèses colombiens.

42Après l'échec de sa tentative de fondation aux États-Unis, le P. Le Doré n'avait pas abandonné son projet de préparer à l'étranger un refuge pour ses religieux menacés d'expulsion. Il le réalisa au Canada, à partir de 1890, dans des conditions exceptionnellement avantageuses. Les Acadiens des Provinces maritimes ne disposaient d'aucun établissement d'enseignement secondaire de langue française. Refusant de laisser leurs enfants fréquenter les écoles de langue anglaise, ils les écartaient, par le fait même du sacerdoce et de toutes les autres professions libérales, ce qui avait des conséquences désastreuses. Au point de vue religieux par exemple, leurs paroisses étaient négligées par le clergé d'origine irlandais.

43Au cours d'une de ses dernières croisières, l'amiral de Cuverville, ancien élève des Eudistes au collège de Redon, fit escale à Halifax, capitale de la Nouvelle-Écosse. Au cours d'une conversation qu'il eut avec l'archevêque, M^gr O'Brien, il fut question du bienfait que retireraient les populations acadiennes, restées françaises de langue et de cœur, d'un enseignement donné en français par des Français. Le prélat songeait depuis longtemps à fonder un collège français mais ne savait à qui en confier la direction. L'amiral lui recommanda chaudement les Eudistes et se proposa pour faire les premières démarches près du P. Le Doré, son ami. Au cours de l'été 1890, celui-ci reçut, par l'intermédiaire de M. Roussel, son ancien surveillant au collège de Redon devenu professeur au grand séminaire de Montréal, la demande officielle de M^gr O'Brien. Dès le mois de septembre de cette même année, les premiers eudistes débarquaient au Canada. Le P. Blanche, ancien préfet de discipline au collège Saint-Martin de Rennes, fonda le collège de Church-Point en faveur des Acadiens de la Nouvelle-Écosse22. Le P. Lebastard prit la direction d'un autre collège ouvert à Caraquet pour les Acadiens du Nouveau Brunswick, tandis que le P. Cochet établissait un séminaire à Halifax23.

44Malgré les attaques de la presse de langue anglaise, l'apostolat des Eudistes se poursuivit avec un succès toujours grandissant. Les Acadiens des Provinces maritimes qui sont aujourd'hui plus de 300 000 furent enfin sortis de leur isolement. Ils eurent leurs représentants au Parlement de chaque Province, leurs avocats, leurs médecins. Non seulement les prêtres d'origine acadienne étaient en nombre suffisant, mais en 1940, deux diocèses étaient gouvernés par des évêques acadiens. Les expulsions de la période combiste permirent aux Eudistes de développer leur établissement du Canada et de s'étendre dans la province de Québec. Ils administrent depuis 1903 le vicariat apostolique de la Côte-Nord du Golfe Saint-Laurent qui compte environ 12 000 âmes dont 3 000 Indiens montagnais tous catholiques. Pendant plusieurs mois de l'année, le ministère des Eudistes de ce vicariat rappelait celui des Oblats du Grand-Nord canadien. Le premier vicaire apostolique du Golfe Saint-Laurent fut M^gr Blanche, de Josselin (1848-1916). Son premier successeur fut M^gr Chiasson, un des ses élèves acadiens de Church-Point et le second M^gr Leventoux, du diocèse de Saint-Brieuc.

45Depuis 1830, 187 eudistes bretons sont partis pour différents pays de l'Amérique. De 1830 à 1850 (20 départs), c'est la période des essais malheureux aux Antilles et aux États-Unis et des premières fondations de séminaires colombiens. De 1881 à 1910 (122 départs dont une trentaine en 1903), c'est un exode massif occasionné surtout par la politique anticongréganiste du gouvernement français. De 1910 à 1940 (33 départs) le recrutement étant à peine suffisant pour maintenir à son effectif normal le personnel des communautés de France, les départs ont diminué progressivement. Au cours du dernier demi-siècle il y a eu 8 départs pour l'Amérique et 4 pour la Côte-d'Ivoire.

46Les diocèses de Rennes et de Vannes ont fourni 80 % des eudistes bretons missionnaires. Dans celui de Rennes, les eudistes se recrutaient parmi les élèves de leurs collèges : Saint-Sauveur de Redon et Saint-Martin de Rennes. Au xix^e siècle, par fidélité à leurs anciens maîtres, des élèves de Saint-Martin, devenus recteurs ou vicaires dans les paroisses du diocèse de Rennes, dirigeaient vers cette institution les enfants chez lesquels ils avaient discerné des signes de vocation sacerdotale. Grâce à de nombreuses bourses, ces élèves, de familles souvent peu fortunées, pouvaient y faire gratuitement leurs études secondaires. Le transfert de cette maison d'éducation aux mains du clergé diocésain en 1903 et la suppression des bourses eurent pour conséquence la disparition presque totale de l'élément rural dans la clientèle scolaire. Au retour des Eudistes, en 1920, il leur fut impossible de ressusciter une tradition qui avait grandement facilité le recrutement de leur noviciat.

47Le collège Saint-Sauveur de Redon, par sa situation au point de jonction entre l'Ille-et-Vilaine, la Loire-Atlantique et le Morbihan, a toujours attiré des élèves originaires de ces trois départements. En Ille-et-Vilaine, son influence était pratiquement limitée au seul canton de Redon. Sa qualité de collège de plein exercice, obtenue de Guizot plusieurs années avant la loi Falloux, lui valut pendant longtemps une forte clientèle morbihannaise.

48Cette influence des eudistes dans le Morbihan fut renforcée par l'élection, en 1870, du P. Ange Le Doré comme supérieur général de la congrégation de Jésus et de Marie. Né à Auray en 1834, le P. Le Doré avait fait ses études secondaires à Redon. C'était une forte personnalité, qui joua un rôle important dans la résistance aux mesures prises par le gouvernement français contre les associations religieuses. Les nombreuses retraites qu'il prêcha aux séminaristes et aux prêtres du diocèse de Vannes valurent plusieurs vocations à sa congrégation dont il établit le noviciat à Kerlois, près d’Hennebont, en 1876. Un juvénat fondé à Plancoët, dans l'arrondissement de Dinan, ne fournit que quelques eudistes originaires des Côtes-du- Nord. La congrégation de Jésus et Marie perdit en 1903 toutes les maisons qu'elle possédait en Bretagne.

49Depuis 1920, elle a reçu presque tout son recrutement breton du Morbihan, grâce à un juvénat annexé au collège de Redon qui a fonctionné jusqu'en 1964. Ce recrutement s'est tari, mais les fondations d'Amérique ne sont pas en péril. Celles de Colombie et du Vénézuéla d'une part, celle du Canada d'autre part, constituent deux provinces spéciales possédant leurs propres maisons de formation. Au début de 1994, on comptait 131 eudistes français et 128 Canadiens. Aujourd'hui, avec 192 religieux et plus de 130 jeunes en formation l'Amérique latine autorise de grands espoirs pour les fils de saint Jean-Eudes.

La Compagnie de Marie (Montfortains)

50La Compagnie de Marie fut fondée en 1715 par saint Louis-Marie Gri- gnon de Montfort, originaire de la petite ville de Montfort-sur-Meu qui faisait alors partie du diocèse de Saint-Malo. Les Montfortains s'adonnèrent surtout à la prédication de missions populaires spécialement dans les paroisses du Bas-Poitou qui forment aujourd'hui la Vendée. Leur maison- mère fut fixée de bonne heure à Saint-Laurent-sur-Sèvres, près du tombeau de leur fondateur. Au cours du xviii^e siècle, ils ne furent jamais plus de 18.

51Au début du xix^e siècle, la Compagnie de Marie n'eut pas à être restaurée. Dès les premières années du règne de Louis xviii, les Montfortains recommencèrent leurs missions. N'étant plus que 7, presque tous très âgés, ils sentirent la nécessité de mettre à leur tête un homme jeune et actif. C'est pourquoi, en 1820, ils demandèrent à l'abbé Deshayes, curé d'Auray, d'accepter le généralat de leur société. Prêtre à la fois très surnaturel et très entreprenant, le P. Deshayes multiplia le nombre des missionnaires et donna à la Compagnie de Marie un élan qu'elle n'avait encore jamais connu. Grâce à l'ouverture sur son territoire d'une résidence de missionnaires à Auray (1845), d'une école apostolique à Pontchâteau (1876), d'une résidence à Josselin (1905), d'une autre à Guipavas et d'un séminaire à Montfort-sur- Meu (1922), la Bretagne devint la principale source du recrutement mont-fortain. En 1940, des 231 prêtres de la Compagnie de Marie, 144, (plus de 62 %) étaient des Bretons.

52En 1871, les Montfortains avaient accepté la direction du séminaire Saint-François-Xavier de Pontchâteau et mis quelques prêtres à la disposition de M^gr Guilloux, archevêque de Port-au-Prince. Ce prélat leur confia la presqu'île de Port-de-Paix, qu'il appelait : la « Chine » de son diocèse à cause de l'abandon religieux dans lequel elle se trouvait. Depuis, les fondations se sont multipliées. Les montfortains français sont passés au Canada en 1883, au Nyassaland (actuel Malawi), en Colombie en 1903, à Madagascar en 1933.

53Les diocèses de Nantes et de Vannes ont été les principaux centres de recrutement des montfortains bretons, celui de Quimper qui en 1930 n'avait encore donné que 5 missionnaires en a donné 10 de 1931 à 1940.

54Les expulsions de 1903, qui ne nuisirent pas beaucoup au recrutement de la Compagnie de Marie, accentuèrent son orientation missionnaire. Grâce à l'arrivée d'un plus grand nombre de religieux français, la province montfortaine du Canada et celle de Colombie purent ouvrir des maisons de formation et prendre ainsi un rapide essor. En 1940, nombre des 150 montfortains canadiens travaillaient déjà dans des pays de mission. Quant à la province de Hollande, qui devait son existence à la persécution de Combes, son développement avait été plus rapide encore ; grâce à elle, les fils de Grignon de Montfort étaient présents au Danemark, au Congo belge, au Mozambique et en Insulinde.

55Des 160 montfortains bretons missionnaires en pays lointains, (55 originaires du Morbihan, 45 de Loire-Atlantique, 34 du Finistère, 14 des Côtes-du-Nord et 14 d'Ille-et-Vilaine), 80 % ont quitté la France entre 1901 et 1960. Cinq d'entre eux ont été élevés à l'épiscopat et ont administré des diocèses ou des vicariats apostoliques en des pays aussi différents que la Colombie, Haïti, Madagascar et le Malawi.

Les Assomptionnistes

56Fondés à Nîmes par le P. d'Alzon en 1847, la congrégation des Assomptionnistes n'a été connue que tardivement en Bretagne. Après 1920 et surtout après 1940, elle recruta abondamment dans le diocèse de Vannes et plus encore dans celui de Quimper. En 1950, 70 Assomptionnistes étaient originaires du Finistère. Une partie des Bretons entrés dans cette congrégation, 12 avant 1940 et 37 depuis cette date, ont été envoyés dans les Balkans, le Proche-Orient et surtout en Amérique du Sud.