Chapitre 4. Anomie éphémère et continuité de l'État
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Texte intégral
1Les historiens italiens évoquent la « viscosité » de l'État pour caractériser la transition lente et discontinue de l'État fasciste (1943) à la république libérale (1948), marquée par une épuration manquée, le maintien des élites techniciennes, des cultures professionnelles et des structures administratives1. Dans une certaine mesure, mais tout en restant nuancé et prudent, la notion de viscosité de l'État pourrait être appliquée à la France libérée et permettre ainsi de traiter une réalité complexe. La République française, située aux deux extrémités du conflit, a mis en place (puis a hérité) un appareil d'État plus coercitif, conçu pour répondre aux réalités de la guerre, qui facilita les transitions entre l'État français et les deux républiques démocratiques. C'est ainsi que la censure cinématographique demeure sous l'autorité militaire jusqu'au 3 juillet 1945, prolongeant la censure pour défaitisme décrétée en 1939 ; c'est ainsi que le contrôle technique chargé d'intercepter, et éventuellement de censurer, le courrier et les conversations téléphoniques des particuliers resta actif jusqu'au printemps 1945 en Bretagne, en raison de la présence des poches de Lorient et de Saint-Nazaire ; c'est ainsi qu'il fallut attendre mai 1946 pour voir les derniers gitans sortir des camps de sédentarisation forcée (décembre 1944 à Rennes)2. Ces mesures antidémocratiques de censure, d'internement, de surveillance, de répression, avaient été prises par le gouvernement Daladier pendant la drôle de guerre. À la différence de l'Italie, lorsqu'on aborde la Libération en termes de réalité vécue, la transition de l'État français au GPRF est radicale.
2L'immédiateté du changement d'autorité, la disparition des structures antirépublicaines ordonnées par Vichy, l'existence d'une épuration professionnelle même limitée conduisent à concevoir la transition française en terme de rupture plutôt qu'en terme de continuité. La continuité qui est analysée dans ce chapitre concerne la continuité organique de l'appareil d'État. À la Libération, la très grande majorité des employés de l'État conservent leurs fonctions, ils assurent ainsi la continuité de l'État. Par contre, ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de changement d'individus que les individus ne changent pas. Traiter de la continuité organique de l'appareil d'État ne conduit pas à nier la rupture qui a pu se réaliser dans les têtes des fonctionnaires.
Au sommet, une prise du pouvoir instantanée
3Le 20 août 1944, au moment où Pétain quittait Vichy pour l'Allemagne, le général de Gaulle entrait à Rennes, deux semaines après que la capitale de la Bretagne eut été libérée ; à quelques dizaines de kilomètres plus au Nord, les canons tonnaient à Saint-Malo. De Gaulle débute ainsi, avant Paris3, ses voyages à travers la France, afin de se montrer et d'assurer la restauration de l'État. Avant de prononcer, sous une pluie battante, un discours, place de l'Hôtel de ville, il rencontre les responsables locaux et régionaux civils et militaires. « On voyait la vie administrative reprendre invinciblement. La tradition faisait de même. J'allai à l'Hôtel de ville, où le maire Yves Milon, entouré de son conseil, des compagnons de la Résistance et des notabilités, me pria de rouvrir le livre d'or de la capitale bretonne qui renouait la chaîne des temps. »4 La transition des pouvoirs entre le gouvernement de Vichy et le GPRF n'avait pas lieu d'être. Au moment du baisser de rideau sur l'hôtel du Parc, Pétain et Laval essayèrent de négocier leur retraite, comme s'ils avaient été en mesure de passer le témoin ; Pétain avec de Gaulle, le 11 août, par l'intermédiaire de l'amiral Auphan qui avait quitté le gouvernement en novembre 1942 ; Laval avec Roosevelt, encore, le 18 août, depuis Nancy, par le biais d'Herriot, assigné à résidence dans la cité lorraine ; Herriot refusa. Le régime de Vichy à l'agonie ne trouva aucun interlocuteur. L'État français avait perdu toute légitimité, toute autorité ; il ne représentait plus la France atomisée de l'été 1944 ; il ne commandait plus une administration atone, attentiste, dissidente. Pétain, Laval et les autres ministres de la collaboration, emmenés en Allemagne bon gré mal gré à partir de la mi-août, prolongèrent encore quelques mois le spectacle d'un conseil des lémures, à Sigmaringen.
4La transition n'eut pas lieu d'être, car le CFLN, puis le GPRF, s'inscrivait dans la continuité de la République. « La forme du gouvernement de la France est et demeure la République. En droit celle-ci n'a pas cessé d'exister »5. La Libération est ainsi conçue en termes de rétablissement de la légalité républicaine en métropole6. Pendant quatre ans, la France métropolitaine occupée, la République chassée de l'espace public n'a pas cessé d'exister, à travers la France combattante. À la Libération, l'État maintenu est simplement et officiellement nettoyé des lois et des institutions promulguées et instituées par Vichy qui étaient « inconciliables avec les principes » républicains7, et des fonctionnaires qui avaient trahi ou avaient démérité. La réorganisation de l'État républicain et de la vie démocratique en province fut en grande partie de la responsabilité des commissaires de la République dont le corps, provisoire, créé à cette occasion8, avait été doté de pouvoirs exceptionnels le temps d'une situation exceptionnelle. Jusqu'en 1943, l'organisation de l'après-Libération n'avait pas été une des priorités de la France libre. Le premier projet de commissariat général de la République avec des commissaires régionaux, est daté du 26 juin 1942. Dans ce texte, les commissaires sont dépourvus d'autonomie, tout particulièrement dans le domaine réglementaire. À partir de 1943, divers projets élaborés par le CFLN, en accord avec le CNR, orientèrent le corps des commissaires de la République dans le sens d'un proconsulat doté des pouvoirs exceptionnels en matières réglementaire, législative et militaire. La conception de cette fonction originale tenait à des préoccupations concrètes : il fallait donner aux représentants du GPRF en province les moyens légaux de pouvoir agir dans un pays morcelé par la guerre et de représenter la France en face des armées étrangères alliées, en vue de limiter l'AMGOT. Elle tenait aussi d'une conception de la reconstruction de la France à partir du pouvoir exécutif. L'ordonnance du 10 janvier prit ces « dispositions exorbitantes de la légalité traditionnelle et qui seront seules susceptibles de répondre aux nécessités du moment ». Les commissaires de la République, dans le ressort des préfectures de région, furent chargés de rétablir la légalité républicaine, d'achever la libération, de mettre en œuvre l'épuration et d'assurer la sécurité des armées et la vie des populations. Délégués du gouvernement, ils reçurent les pleins pouvoirs dans un premier temps.
5Après avoir voté contre l'attribution des pouvoirs constitutionnels au maréchal Pétain le 10 juillet 1940, « par un mouvement instinctif »9, le sénateur maire de Brest Victor Le Gorgeu a été contraint progressivement à la clandestinité10, avant d'être contacté par l'OCM à Paris en mai 1943 par l'intermédiaire d'un de ses collègues du Sénat. Proposé par l'OCM et Libération-Nord au CNR, il fut nommé par le CFLN commissaire de la République par un décret secret, signé le 3 octobre 1943 par les généraux Giraud et de Gaulle et contresigné par André Philip alors commissaire de l'Intérieur11. Dès lors, Le Gorgeu, aidé par Tanguy-Prigent délégué de Libération-Nord pour l'Ouest de la France, se chargea de l'organisation des services civils en vue de la Libération dans les quatre départements dont lui incombait la responsabilité. Tout en vivant réfugié dans une propriété de sa belle-famille à Crosnières, un petit village près de la Flèche, il réalisait une tournée de 6 à 7 jours, tous les mois, en Bretagne, afin de préparer, en relation avec les différents mouvements de résistance, la Libération et l'après- Libération politiques et militaires. Il participa ainsi à la constitution et à la coordination des quatre comités départementaux de libération (CDL) qui allaient se substituer provisoirement aux conseils généraux. Les CDL, de leur côté, étaient chargés de préparer les délégations spéciales devant remplacer les conseils municipaux dont les membres s'étaient compromis pendant l'Occupation, en attendant la restauration des consultations démocratiques. Par ailleurs, il proposa le recrutement des préfets de la libération du Finistère12 et des Côtes-du-Nord13 à Michel Debré, alias Jacquier, secrétaire de la commission d'attribution des postes ; il agréa la désignation des préfets d'Ille-et-Vilaine14 et du Morbihan15, tandis qu'il désignait les secrétaires généraux et les sous-préfets pour les quatre préfectures, tout en étant en contact avec les chefs militaires de la Résistance.
6Début 1944, une fuite, suivie d'une dénonciation, entraîna le démantèlement des quatre CDL et l'arrestation des principaux chefs militaires de la Résistance dans la région : V. Abeille, délégué militaire régional de la France libre, et le général Audibert, chef de l'AS à la tête des régions M2 (Bretagne) et M3 (Loire Inférieure, Vendée, Maine-et-Loire, Indre-et- Loire). Le Gorgeu lui-même, repéré par les RG de Quimper, dut s'enfuir et s'immerger dans la clandestinité à Paris. De février à mai, Le Gorgeu et Tanguy-Prigent ne se sont plus déplacés en Bretagne, tout en gardant le contact avec la Résistance bretonne. En trois mois, les CDL et les mouvements se reconstituèrent mais sortirent amoindris de l'épreuve. Dans son mémoire, Le Gorgeu insiste sur la « pénurie d'hommes compétents » ; il observe que « les CDL constitués en janvier 1944 auraient pu avoir une activité plus notable si n'avaient eu lieu les nombreuses arrestations ». Néanmoins, dans les semaines qui précédèrent le débarquement, tous les futurs responsables étaient nommés et attendaient pour prendre possession de leur charge. Le 15 mai 1944, les commissaires et les préfets reçurent l'ordre de se tenir à proximité de leur poste. À cette date, à l'échelle nationale, plus de la moitié des préfets étaient désignés ainsi que onze commissaires de la République16. Dès le 19 mai, Le Gorgeu rentra en Bretagne et trouva asile à la lisière de Rennes. Peu après, Jacques Onfroy arrivait à Vannes, tandis que Bernard Cornut Gentille rejoignait Le Gorgeu à Rennes en juillet. Jusqu'à la Libération, les quatre CDL se tinrent prêts, ainsi que les futurs préfets, les chefs de service régionaux à venir, Fréville (information), Janton (radio), et les futurs maires de la Libération des grandes villes étaient désignés : l'universitaire Yves Milon pour Rennes, l'industriel Charles Royer à Saint-Brieuc, l'avocat Maurice Marchais, maire de Vannes, révoqué par le gouvernement de Vichy et l'entrepreneur Hervé Marchand à Quimper. Tous n'étaient pas opérationnels : Maurice Marchais était incarcéré depuis février 1944 ; début juin, Yves Milon fut arrêté avec les autres otages rennais. Marchais ne fut libéré qu'à la libération de Vannes, tout comme Hervé Marchand, début août. Les nouveaux sous-préfets, pour la plupart, n'étaient pas encore désignés à la Libération. Néanmoins, tout était prêt pour la prise des principaux leviers de commande administratifs et politiques à l'échelle régionale et départementale, sous le commandement de Victor Le Gorgeu.
7L'installation des responsables régionaux, départementaux et des grosses localités se réalisa sans complication majeure : dans les heures qui ont séparé l'évacuation des troupes d'occupation de l'arrivée des forces alliées, les responsables de l'administration vichyssoise, acceptant la situation, ont cédé leurs postes à leurs collègues nommés par le GPRF et le CNR, assurant par là même la continuité de l'État. Le scénario diffère suivant les localités, c'est bien évident. Mais en règle générale, il consiste dans un changement relativement paisible et sans résistance des hommes, mettant la population devant le fait accompli, tout en insérant symboliquement cette mutation des cadres dans la théâtralisation de la libération locale.
8À Rennes, le 3 août en fin d'après-midi et dans la soirée, dès lors que les Allemands donnèrent le sentiment qu'ils avaient quitté la ville, des résistants en armes dont des policiers, procédèrent aux arrestations du préfet de région et de l'intendant de police, tandis qu'ils démirent le maire et le préfet de leurs fonctions. Prenant possession des lieux de pouvoir : l'Hôtel de ville, la préfecture, le commissariat central, ils permirent l'installation le 4 août au matin des nouveaux responsables escortés de FFI : commissaire de la République, préfet, CDL, maire puis délégation spéciale. L'après- midi, ils s'adressèrent à la population réunie place de la mairie, et conjointement par voie d'affiche, pour se faire connaître, avec désormais la présence des Alliés. Une situation semblable se produisit le 5 août à Saint-Brieuc, les Américains n'entrant dans la ville que le 6. À Vannes les 4 et 5 août et à Quimper entre les 4 et 9 août, les troupes d'occupation furent plus hésitantes à partir, on vit dans les rues de la préfecture du Finistère des camions allemands croiser des voitures FFI, mais la prise de fonction des responsables préfectoraux et municipaux s'opéra suivant des procédures identiques. Les cadres locaux nommés par le gouvernement de Vichy avaient anticipé cette situation. La plupart occupaient leurs postes dans la région depuis peu de temps, seulement quelques mois ; par opportunisme, par habileté, mais surtout parce qu'eux aussi avaient évolué dans le sens de l'opinion moyenne, ils étaient peu ou pas compromis dans la collaboration et dans la répression de la Résistance. Mis à part le préfet de région Martin arrêté avec l'intendant du maintien de l'ordre17, tous deux très impliqués dans l'organisation de la répression de la Résistance et la collaboration avec le SD, et le sous-préfet de Fougères Dop qui avait pris la fuite, les autres cadres de la préfectorale en poste à la Libération sont simplement suspendus, ou immédiatement mutés sur un autre poste18, voire maintenus à la demande de la Résistance locale19.
9Les cadres issus de l'Occupation essaient toujours de mettre en scène ou de participer à une sorte de relais des pouvoirs, soit en essayant de s'impliquer directement en passant le témoin, soit pour le moins en manifestant ostensiblement leurs sentiments patriotiques ou plus rarement en affirmant des convictions républicaines. Le 4 août, jour de sa destitution, Roger Constant encore préfet du Morbihan pour quelques heures, fait publier un appel à la population20 annonçant la libération de son département, prenant de vitesse Jacques Onfroy qu'il sait devoir lui succéder.
« Appel à la Population
C'est la première fois que je m'adresse à vous par la voie de la presse, et c'est aussi la première fois que je peux traduire mes sentiments et parler librement. Le département du Morbihan est libéré. Vannes son chef-lieu est pavoisé aux trois couleurs. J'ai été avec vous dans la peine. Je suis avec vous aujourd'hui dans la joie, animé par les mêmes sentiments patriotiques, par le même désir de voir la France renaître. Réjouissons-nous donc en chœur, dans une même ferveur. Dans peu de jours sans doute, les absents, tous ceux qui ont souffert pendant de longues années reprendront la route de France. Les foyers longtemps séparés seront reconstitués. Je forme avec vous les mêmes vœux : que la France qui reconquiert en cet instant les libertés qui lui sont chères se relève dans l'ordre et l'autorité, dans le culte de l'honneur, du travail et de la patrie. Vannes, le 4 août 1944
Le Préfet Roger Constant »
10Vraisemblablement, Roger Constant est sincère ; il ne faut pas lire dans ces propos ni opportunisme ni hypocrisie ; bien que chassé sèchement avec son épouse par le préfet de la Libération Onfroy, il aurait emporté « l'estime de tous »21. Il ne faut pas y voir non plus de la naïveté. Lors d'une entrevue qu'il avait eue avec l'évêque de Vannes, Monseigneur Le Bellec, fin juillet, il lui avait signalé qu'il comprenait parfaitement la nécessité de changer de préfet au moment de la Libération22. Par contre, c'est bien un système élémentaire mixte de valeurs, dans lequel fusionnent la trilogie de la révolution nationale réduite au « travail » et à la « patrie » avec la devise de la France Libre « honneur et patrie », qui transparaît ici. Cet écho dissonant qui associe « l'honneur » et le « travail », qui marie les « libertés » à « l'ordre » et à « l'autorité », ces mots venus d'ailleurs qui se bousculent dans la tête de Roger Constant illustrent comment les individus glissèrent d'une époque à une autre, en adaptant très vite, inconsciemment, de bonne foi, leur imaginaire social à la réalité nouvelle.
11Certains tiennent à respecter les formes. Patay, le dernier maire de Rennes de l'Occupation, réclame au groupe de résistants venu le destituer des attestations sur leurs attributions, il leur fait signer un certificat et lui-même rédige une déclaration solennelle concluant : « je n'ai qu'un regret en quittant mes fonctions, c'est de n'avoir pu moi-même faire flotter sur l'Hôtel de ville de Rennes, les Trois Couleurs pour lesquelles à trois reprises différentes, j'ai versé mon sang »23. À Vannes, le maire de l'Occupation Edmond Gemain va lui-même chercher Maurice Marchais dans sa chambre d'hôpital, afin qu'il puisse hisser le drapeau tricolore sous les yeux de la foule amassée devant l'Hôtel de ville. Il est vrai que sa nomination avait reçu l'approbation morale de Maurice Marchais ; au demeurant, l'architecte Gemain lui aurait promis au moment de sa destitution en 1941 que, le jour venu, nul autre que lui ne remettrait les trois couleurs à leur place24. Avec plus de maladresse, mais finalement dans un état d'esprit qui n'était pas très différent, au moment de son arrestation, l'intendant de police Tosello Bancal s'apprêtait à revêtir son uniforme de commissaire républicain. Ainsi, les quatre préfectures, villes indispensables à la réorganisation des pouvoirs locaux et à la main mise sur l'administration, furent, en quatre à cinq jours et sans contre temps, placées sous la direction des hauts fonctionnaires du GPRF et dans certains cas des forces du CNR, avant l'arrivée des troupes américaines. Aussi, les Alliés découvrirent aussitôt dans les lieux de pouvoir des interlocuteurs à même de représenter un État légitime et ami, en mesure de diriger une administration en état de marche.
12L'appareil d'État n'a pas cessé de fonctionner. Les rapports des directions des différentes administrations remontèrent très vite au commissariat de la République ; Victor Le Gorgeu fut lui-même en mesure d'adresser sa première synthèse, le 13 août, au commissaire de l'intérieur. À cette date, soit moins de dix jours après sa prise du pouvoir, il maîtrise totalement l'institution préfectorale sur les trois départements de Bretagne orientale. Tous les postes de secrétaires généraux, de chefs de cabinet étaient occupés par un titulaire, il en était de même pour les sous-préfectures ; quand ce n'était pas le cas, les secrétaires en chef des sous-préfectures expédiaient les affaires courantes. De ce point de vue, l' Ille-et-Vilaine et le Morbihan furent les départements les mieux organisés, car tous les postes de direction étaient pourvus au jour J de la Libération. Quant au Finistère, si le préfet de la Libération Le Comte contrôle son administration, Le Gorgeu ne dispose pas d'informations précises sur ce département éloigné avant la seconde quinzaine du mois d'août, le courrier postal n'étant pas assuré et le téléphone étant coupé. À l'échelle locale ou départementale, l'autorité de l'État GPRF est bien réelle, nonobstant les dysfonctionnements des télécommunications et des communications qui entravent la bonne marche des services et qui, surtout, neutralisent pour l'instant toute velléité de centralisation. Le gouvernement central, lui-même, ne reçoit des données sur la région que par l'intermédiaire de ses membres en déplacement : le 14 août, André Le Troquer, commissaire d'État aux territoires libérés, venu à Rennes, Vannes, Saint-Brieuc, Dinan, et le général de Gaulle, bien sûr, en visite à Rennes du 20 au 22, découvrent la Bretagne en libération. Avant cette date, des télégrammes répétés depuis Londres réclamaient des informations sur la situation administrative, le personnel des préfectures et des sous-pré- fectures, les comités de libération. Le Gorgeu inlassable répondait : « prise pouvoir a eu lieu sans difficultés à Rennes et chefs-lieux départements région Rennes [...] d'une manière générale situation politique et administrative bonnes », sans que ces télégrammes parviennent à leur destinataire dans les premiers jours. Déjà, aux alentours du 20 août, les communications entre le commissariat de la République et le pouvoir central semblent plus régulières. Le 22, Le Gorgeu, dans un nouveau télégramme au commissaire de l'intérieur écrivait : « Situation bonne d'une façon générale. Les difficultés administratives s'aplanissent et disparaîtront lorsque le territoire sera complètement libéré »25. Ainsi, dans les semaines d'août, l'appareil d'État fonctionne, certes de manière déconcentrée, mais il s'affirme et son autorité n'est nullement contestée. À partir de septembre, la situation s'est normalisée, tous les postes à responsabilités sont pourvus, ce qui n'est pas sans poser des problèmes de compétences26 ; désormais, le commissaire de la République communique régulièrement avec le centre et avec ses préfets.
À la base, l'appareil d'État n'a jamais cessé de fonctionner
13Parallèlement à la prise du pouvoir par en haut s'est produit une prise du pouvoir par en bas qui concerne les administrations sensibles ; dans ce contexte fut entreprise la première forme d'épuration administrative. Celle-ci fut le plus souvent entreprise par des fonctionnaires issus eux-mêmes de la Résistance. Ainsi, ils prirent en main les services dans lesquels ils travaillaient. De ces groupes naîtront, quelques jours plus tard, les comités professionnels d'épuration qui, en liaison avec les CDL, préparèrent les dossiers d'épuration.
14Le commissariat de la police d'État à Rennes était un haut lieu stratégique. On y observe une prise du pouvoir simultanée à la base et au sommet. Elle rappelle la course de vitesse dans la prise du pouvoir qui opposa les gaullistes, les communistes et les autres, tant décrite ailleurs, en France et au-delà. Prise du pouvoir par en haut : l'ex-commissaire divisionnaire Lepage, révoqué par le gouvernement de Vichy, occupa le secrétariat général de la police ; dans la clandestinité, il avait participé, au côté de Le Gorgeu, à la préparation de la réorganisation administrative de la Bretagne en tant que membre de Libération-Nord27. La priorité des responsables régionaux était de faire fonctionner les services ; de ce fait, ils envisageaient l'épuration avec moins de passion. « L'épuration qui s'imposait a été faite et continue de se faire [...] il n'en reste pas moins qu'une grande partie de l'ancien personnel doit être conservé à raison de sa formation technique et de sa conduite sous l'occupation »28. C'est certainement dans cet état d'esprit qu'il faut lire un premier rapport très optimiste de Lepage quant à la fidélité de son personnel : au « commissariat central la totalité des fonctionnaires et agents de la sécurité publique est acquise depuis longtemps à la doctrine libératrice »29. Cette perception n'était certainement pas partagée par les policiers résistants de base. Prise du pouvoir par en bas : des inspecteurs de la sûreté en poste, résistants de la mouvance communiste, commencent les arrestations de « collaborateurs » parmi les notables dès le 2 août 1944, autrement dit avant même le départ des Allemands30. Puis ils arrêtent certains de leurs collègues, à partir du 4 août, créant souvent une situation d'inversion de la hiérarchie, le subordonné mettant son supérieur en état d'arrestation, le jeune homme effectuant l'arrestation de son aîné. Un inspecteur principal raconte ainsi son arrestation :
« Le vendredi 4 Août, je suis arrivé au bureau rue d'Antrain vers 9 heures. Tandis que je m'entretenais avec X, Commissaire Divisionnaire, dans son bureau, est entré l'Inspecteur A qui m'a prié de le suivre dans le couloir. En présence de X qui n'y a fait aucune opposition, l'Inspecteur A s'est assuré que je n'étais pas armé et m'a pris ma carte professionnelle. Ayant demandé à X la raison de ces mesures il m'a répondu de façon évasive, en termes dont je ne puis me souvenir et j'ai donc cru que j'étais arrêté avec son autorisation ou sur ses ordres. J'ai alors été conduit au Commissariat Central de la rue Paul Bert où j'ai été gardé à vue avec d'autres personnes appréhendées. Le dimanche suivant seulement j'ai été interrogé verbalement par Y, Commissaire Principal et Z, Commissaire de Police, en présence de l'Inspecteur A. Y me demanda ce qui m'était reproché, je lui répondis que je l'ignorais. C'est alors que l'Inspecteur À prit la parole en accusateur, me reprochant d'être un "collaborateur", d'avoir livré un homme aux Allemands, d'avoir été chef de mission dans une affaire terroriste à Brest. Je me suis expliqué brièvement sur ces faits à Y.
Ce n'est que le lendemain ou le surlendemain qu'a été rédigée la notice que vous me présentez, notice tapée postérieurement à la machine à écrire, d'après les notes manuscrites prises tout d'abord par Z, lors de ma seconde audition. Ces notes résumaient succinctement les réponses aux chefs d'accusation formulées par l'Inspecteur A. Je vais donc m'expliquer plus longuement aujourd'hui sur chacune de ces questions. »31
15L'inspecteur A est un nouveau venu dans la police rennaise. Arrivé dans la brigade le 1er mai 1944, il est âgé de 25 ans ; s'il n'est pas membre du PCF, il en est très proche. L'inspecteur principal accusé est entré dans la police en 1919. À Rennes depuis 1920, il est à l'époque âgé de 50 ans. Ce récit montre plus que la seule inversion des pouvoirs. Tout en signalant l'autorité soudaine dont le jeune résistant se trouve paré aux yeux de l'ensemble de la hiérarchie policière, il prouve également qu'une forme de légalité est respectée dès cette première épuration professionnelle. Elle se situe finalement à l'interface entre la « justice au coin du bois », pratiquée encore en août 1944 en Bretagne par le maquis, et « l'épuration légale » qui se mettra véritablement en place à compter du troisième trimestre 194432. Ici, les résistants préparent l'épuration professionnelle en respectant certaines garanties de la légalité républicaine, même s'ils prennent des libertés dans la procédure. Il est clair que malgré certains dysfonctionnements manifestes et l'anormalité de la situation, l'organisation générale des services était maintenue. À Quimper, l'épuration du commissariat avait été préparée deux mois à l'avance. Les comités d'épuration ne se sont pas constitués spontanément à la Libération ; par contre, il est extrêmement difficile de collecter des informations précises sur leur genèse. Le 15 juin 1944, une cellule mixte s'est tenue, réunissant les responsables FFI départementaux et des fonctionnaires de police. Des mesures très précises avaient été décidées concernant l'épuration des policiers collaborateurs et leur remplacement, respectant les règles de la fonction publique en matière de sanctions.
16Avaient été prévues : la révocation d'un commissaire, la mise à la retraite anticipée du secrétaire principal, la révocation de trois inspecteurs de la sûreté, la rétrogradation de cinq policiers en tenue. Ce qui fut effectivement réalisé dès le 4 août ; le nouveau commissaire, désigné lors de la réunion du 15 juin, ayant reçu l'ordre du commandant FFI Berthaud d'assurer le maintien de l'ordre pour la région de Quimper, il prit son poste et engagea l'épuration de ses services33. À Quimper comme à Rennes, on retrouve un certain flou provisoire des hiérarchies, en particulier en ce qui concerne l'articulation entre la police et les FFI. Mais la police est présente dans la cité et s'efforce de (faire) respecter les formes légales. Ces dysfonctionnements mineurs ne perturbèrent pas outre mesure le bon fonctionnement du service, puisque le préfet Le Comte jugeait dans un rapport daté du 4 septembre sa police plus efficace que les FFI en matière d'épuration34.
17Il a pu se produire localement des moments d'anomie ou de vide administratif en raison de la situation créée par l'insurrection. Dans le Morbihan, au 15 août, sur les 311 gendarmes du département, une soixantaine n'avaient pas encore regagné leur caserne, mais le préfet Onfroy voyait là plutôt un signe illustrant la rapidité du retour à l'ordre35 étant donné que l'ensemble de la compagnie de gendarmerie avait basculé dans le maquis AS. Ce problème se posa également pour les instituteurs. Ils avaient été nombreux parmi les hommes à profiter de leurs congés d'été pour gagner le maquis. Certains éprouvèrent des réticences à rentrer dans les classes fin septembre et quelques- uns avaient souscrit un engagement dans les FFI pour la durée de la guerre. Ce problème fut posé dans les quatre départements36. On évaluait à la mi- septembre, dans le Morbihan, à une centaine les maîtres d'école mobilisés dans les FFI dont il fallait prévoir le remplacement pour la rentrée des classes37. Néanmoins, rapportées à la masse des enseignants du primaire, ces absences à la rentrée, finalement inférieures aux prévisions, n'étaient pas nombreuses, en effet, la reprise des cours fin septembre s'est faite « sans difficultés »38. Ces cas exceptionnels mis à part, l'administration a continué de tourner pendant le mois d'août, le passage de l'ancien régime au nouveau ne perturbant pas outre mesure le travail des employés de l'État. À Saint- Brieuc, les rapports journaliers du commissariat s'interrompirent le vendredi 4 août pour reprendre le dimanche 6. Le lundi 7, le même inspecteur signait et le même commissaire contresignait les rapports qu'ils adressaient au même chef de cabinet de la préfecture d'avant la Libération39. À Rennes, des prostituées clandestines furent interpellées le 4 août par des agents de police comme elles l'étaient avant, le 3, et comme elle continueront de l'être par la suite. Il ne se produisit pas de vacance de l'État. En août, le rectorat prépare la rentrée des classes et l'organisation des examens. Le Trésor assure, certes de manière ralentie, mais continue, le recouvrement de l'impôt. Les services du Trésor attendent, pour Rennes, qu'on leur remette la liste des contribuables sinistrés, afin d'adresser aux non sinistrés les avertissements relatifs aux impôts mobiliers et fonciers pour 1944. La police se préoccupe autant de l'arrestation des « indésirables » que du renseignement, de la sécurité publique et des mœurs40. Quant à l'administration pénitentiaire, elle garde les prisonniers d'avant et d'après41 la Libération. Autrement dit, même si le mois d'août 1944 ne peut-être considéré comme un mois normal en Bretagne, la réalité de fond pour le plus grand nombre reste le quotidien marqué par la routine.
18En ce qui concerne l'activité de l'administration, c'est le règne de la continuité, mais pour ce qui est de la réalité perçue, les fonctionnaires partagent, avec le reste de la population, le sentiment de vivre et de participer à une rupture. Ainsi, le directeur des services pénitentiaires se félicite de l'arrivée des Américains qui a permis de libérer des personnes détenues sur ordre des Allemands. Les officiers de police de Saint-Brieuc, dont il vient d'être fait mention, décrivent en ces termes les premières heures de la libération de leur cité :
« La population attend patiemment l'arrivée des troupes américaines, toutes les rues sont pavoisées et l'enthousiasme est général.
La voiture avec haut-parleur qui circule en ville depuis ce matin donnant connaissance des décisions prises par le commandement militaire a été d'une grande utilité. Les habitants qui s'étaient crus pendant les jours précédents livrés à eux-mêmes, ont compris qu'une nouvelle administration était en place et que l'ordre serait maintenu. »42
19Tout en restant à leur poste, ces officiers de police ont acquis la conviction de faire partie d'une « nouvelle administration », par le seul fait de dépendre du GPRF, alors que, deux ou trois jours auparavant ils relevaient encore du gouvernement de Vichy ; c'est là une perception de l'événement voisine de celle du directeur des services pénitentiaires. Les signaux de fidélité à l'égard du GPRF lancés par les fonctionnaires sont très nombreux. « L'ensemble des fonctionnaires et agents de l'enseignement public a salué avec enthousiasme et sans réserve la libération du département » écrivait le préfet Onfroy, le 16 août43. En des termes voisins, rappelant le rapport du secrétaire général de la police Lepage, le directeur régional des services pénitentiaires signale que « dans son ensemble et d'une manière générale le loyalisme du personnel à l'égard des institutions républicaines, n'est pas sujet à suspicion, (et) dans des temps récents, le personnel a fait preuve, en certaines régions de Bretagne, de beaucoup de courage »44. Les auteurs de ces citations donnent plutôt un sentiment sur leurs subordonnés formulé quelques jours après la Libération, il ne s'agit pas d'une analyse mesurée des événements venant de se produire. Ils en restent aux intentions, supposées partagées, de leur personnel. Il est vrai que, face à cette prise du pouvoir par en haut, la base ne se contente pas d'adhérer en silence, elle agit en faisant coïncider son adhésion verbale, conjuguée au présent comme au passé, avec un comportement explicitant son accord avec le nouveau régime. Les rédacteurs se manifestaient en laissant filer une formule explicite au détour d'un rapport. Quant aux obscurs scribouillards de l'administration, ils raturaient, rageurs, en haut des formulaires, l'en-tête ignoble « État français » et le remplaçaient à la plume par un opulent « République française ». Ces ralliements sont sincères et opportunistes, spontanés et anticipés ; certes, l'administration était en partie noyautée par la Résistance et avait perdu en efficacité à la fin de l'Occupation, mais elle n'avait pas basculé dans la dissidence contre l'État français. Il ne faut pas lire dans cette adhésion massive au nouveau régime de la duplicité : la majorité change de chef, à la fois soulagée et heureuse, tout en continuant de travailler.
20Ces comportements démonstratifs de ralliement, cette exhibition de sentiments patriotique et/ou républicain, sont massifs, mais aussi provisoires. À la manière des pharaons dont le règne débutait par le grattage du nom de leur prédécesseur sur les inscriptions commémoratives des monuments, les autorités issues de la Libération firent rapidement disparaître les références à l'ancien régime : les effigies du maréchal et l'État français furent remplacés par les symboles républicains, Marianne et le sobre RF. Les formulaires officiels ou les papiers à en-tête furent imprimés aux emblèmes du nouveau régime. Si, fin août 1944, le cabinet de Le Gorgeu continue de raturer les en-têtes de l'État Français, son collègue de Normandie utilise déjà à cette date un papier officiel républicain. Le 15 septembre 1944, le CDL des Côtes-du-Nord demande à ce que le restaurant dit « du maréchal Pétain » à Saint-Brieuc s'appelle désormais restaurant « du général de Gaulle ». Finalement, il fut décidé la semaine suivante, avec plus de bonheur, qu'il se dénommerait « restaurant de la Libération »45. À Rennes, le conseil municipal avait désigné la place de l'Hôtel de ville « Place du Maréchal Pétain » le 21 janvier 1941. Le 16 septembre 1944, la délégation spéciale de Rennes adopta à l'unanimité le retour à la dénomination antérieure de « Place de la Mairie »46. À la différence des pièces de monnaie à la francisque côté face, les timbres-poste à l'effigie de Pétain furent retirés de la circulation à compter du 1er novembre 1944 ; leurs propriétaires purent les échanger contre un coq fier dressé sur ses ergots flanqué d'une croix de Lorraine, ou une Marianne encadrée de lauriers. Plus ambiguë mais symboliquement plus forte, en août 1944, fut la décision d'Yves Milon, « en plein accord avec les membres de la délégation spéciale », de masquer le nom de Pétain, parmi la liste des grands chefs militaires vainqueurs de la première guerre mondiale ciselée dans la moulure du plafond du monument aux morts sis à l'Hôtel de ville de Rennes47. Le maire de la Libération se contenta de faire couvrir les lettres en bas-relief par un carton, laissant ainsi un blanc ostentatoire et dysharmonieux (illustration n°l). Autrement dit, tout en cachant le nom, on le signalait par une plaquette muette, à la droite de Joffre, à la gauche de Castelnau. Les six lettres « Pétain » restent à leur place, attendant de réapparaître d'un simple coup de ciseau48.
21Quand l'État n'a pas pris en charge la disparition des marques vichystes voire des traces collaborationnistes, les fonctionnaires se lassèrent rapidement de commencer par raturer le formulaire avant de le remplir, et ce dès 1945. La municipalité rennaise, sans doute trop fourmi, avait édité sous l'Occupation des centaines de fiches avec pour titre : « Personnel au service de l'Armée d'Occupation ». À la Libération, les employés municipaux rayèrent avec acharnement d'un large trait noir le « au service de l'Armée d'Occupation », le rendant totalement illisible, tant il était, à cet instant, indécent à lire, rajoutant au-dessus d'une belle écriture d'officier public « auxiliaire Mairie ». À partir de 1945, le « au service de l'Armée d'Occupation » n'était plus raturé ; ces fiches furent utilisées telles quelles probablement jusqu'à épuisement du stock en 194949 ; c'était donc que, désormais, la mémoire honteuse de la France occupée laissait pour le moins indifférent ceux qui remplissaient ces fiches.
22Les hommes du GPRF n'ont pas eu de difficultés à s'imposer, l'administration s'est ralliée naturellement à eux, avec l'enthousiasme du moment et l'inertie habituelle. Ce ne fut pas sans tensions internes et externes. La prise en main de l'administration ne signifie pas automatiquement la maîtrise de l'ordre public par cette administration. L'autorité des administrations les plus exposées (police, justice, ravitaillement) fut souvent contestée. En outre, adhérer au GPRF ne signifiait pas non plus la soumission pleine et entière à la hiérarchie en place ; certains fonctionnaires avaient pris des habitudes d'autonomie dans la Résistance ; l'insubordination n'avait- elle pas été salutaire ? Ces deux observations soulignent qu'il fallut compter avec un flottement chronique de l'appareil d'État jusqu'à la fin de 1945.
Notes de bas de page
1 Mazower M. (s.d.), After the war was over. Reconstructing the family, the society and the law in southern Europe, 1944-1950. Pré-actes du colloque tenu à Brighton du 4 au 6 Juillet 1996.
2 Peschanski D., Les tziganes en France 1939-1946, CNRS, 1994, 177 p.
3 À cette date Paris était en pleine insurrection.
4 De Gaulle C., Mémoires de guerre - tome 2, op. cit., p. 362.
5 Article 1er relatif au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental – ordonnance du 9-08-1944.
6 Ordonnance du 21-04-1944 portant organisation des pouvoirs publics en France après la Libération et ordonnance du 9-08-1944.
7 Ordonnance du 9-08-1944 sur le rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental. En effet, la législation de Vichy reste pour l'essentiel en vigueur, cf. Lindnberg D., « Guerres de mémoire en France », Vingtième Siècle, n°42, 1994, p. 89.
8 Ordonnance du 10-01-1944 ; cf. Foulon C.-L., Le pouvoir... op. cit.
9 L'essentiel des informations qui suivent sont tirées d'un mémoire manuscrit rédigé par Victor Le Gorgeu le 13 octobre 1948 alors qu'il était conseiller d'État, ADF 178 W 21.
10 Fin décembre 1941, il fut révoqué de ses fonctions de maire pour avoir refusé de voter un ordre du jour de confiance dans la politique du maréchal Pétain. En février 1942 les membres du conseil d'administration du journal La Dépêche, dont il était le président, furent contraints de démissionner. Le 9 mars 1943, il fut arrêté par les Allemands et incarcéré pendant 24 heures. À sa libération il se réfugia avec sa famille dans la Sarthe.
11 ADIV 43 W 150, dossiers individuels du personnel préfectoral désigné à la Libération - dossier V. Le Gorgeu.
12 Aldéric Le Comte, ingénieur des ponts et chaussées à Brest de 1928 à 1944, chef régional du réseau de renseignements Cohors-Asturies dans la Résistance. Cf. ADIV 43 W 151, dossier Le Comte.
13 Gabriel Gamblin, recruté sur proposition de l'abbé Cherruel de DF au nom semble-t-il du CDL. Il apparaît qu'initialement Henri Avril a été désigné ; celui-ci refusa, préférant la présidence du CDL (Cf. un mémoire sur le CDL, ADCA 1140 W 1). Gamblin était seulement en contact avec les dirigeants de DF ; sous l'Occupation en tant qu'avocat il défendit des résistants, mais mal inséré dans les milieux de la Résistance du département il ne parvint pas à s'imposer à la Libération. Finalement Henri Avril le remplaça au début de l'été 1945. Cf. ADIV 43 W 151, dossier Gamblin.
14 Bernard Cornut Gentille ne dirigea la préfecture d'Ille-et-Vilaine qu'au mois d'août 1944. Le poste fut occupé de septembre 1944 à janvier 1946 par Bernard Vigier, entré dans l'administration préfectorale en 1919, qui avait passé la majeure partie de la guerre en Guinée. Il eut quelques difficultés à s'imposer également dans le département, l'appréciation de son supérieur hiérarchique n'est pas sans reproche. Cf. ADIV 43 W 150, dossiers Cornut Gentille et Vigier.
15 Jacques Onfroy, issu de l'administration préfectorale, précédemment sous préfet à Saint-Malo en 1940 et à Cambrai en 1941. Est entré en contact avec les organisations de résistance au début 1944, désigné comme préfet du Morbihan en avril 1944. Cf. ADIV 43 W 151, dossier Onfroy.
16 Crémieux-Brilhac J.-L., La France Libre. De l'appel du 18 juin à la Libération, Gallimard, 1996, p. 765.
17 Tous deux furent traduits devant la Cour de justice de Rennes et condamnés. Ce furent les travaux forcés à perpétuité pour Robert Martin et 5 ans de prison pour Tosello Bancal ; ADIV 213 W, séance du 19-06-1945 pour Martin et du 22-10-1945 pour Tosello Bancal.
18 Le secrétaire général de la préfecture d'Ille-et-Vilaine a été aussitôt nommé sous-préfet de Lorient. Le sous-préfet de Redon a été provisoirement maintenu le temps qu'un autre poste lui soit confié, tandis que ceux de Lorient et Pontivy ont simplement été mis provisoirement en congé dans l'attente qu'une mutation leur soit proposée.
19 Ce fut le cas de M. Bonafous, secrétaire général de la préfecture des Côtes du-Nord.
20 ADM M 13224.
21 Leroux R., Le Morbihan... op. cit., p. 536.
22 Ibid.
23 Publié dans : élèves du Collège de Chartres de Bretagne, La Libération de Rennes, Musée de Bretagne, 1989, p. 71.
24 Leroux R., Le Morbihan...op. cit., p. 48.
25 ADIV 43 W 128.
26 Ces problèmes se posent essentiellement avec des sous-préfets désignés faute d'hommes disponibles. Ils seront remplacés en général fin 1944 ou courant 1945. Cf. dossiers individuels du personnel préfectoral, ADIV 43 W 150-151.
27 ADIV 43 W 128 rapport du CR, 13-09-1944.
28 ADIV 43 W 128, rapport du CR, 30-09-1944.
29 ADIV 43 W 128, le secrétaire général à la police à Rennes, 11-08-1944.
30 ADIV 213 W audience 11-12-1945, audition du commissaire inculpé par le commissaire de police de la Surveillance du Territoire, 27-09-1944.
31 ADIV 213 W audience du 27-07-1945, audition de l'inspecteur principal ineulpé par commissaire de police de la Surveillance du Territoire, 26-08-1944.
32 Avant la mise en place des chambres civiques et des Cours de justice, furent réunis les tribunaux militaires ; nombre de procédures ont d'ailleurs été ouvertes par des procureurs militaires avant d'être confiées à des magistrats.
33 ADF 200 W 280, rapport du commissariat de Quimper sur l'épuration de la police, 4-09-1944.
34 ADIV 43 W 169, rapport du préfet du Finistère, 4-09-1944.
35 ADIV 43 W 171 rapport du préfet du Morbihan, 16-08-1944.
36 ADIV 43 W 128 rapport du recteur, 31-08-1944.
37 ADIV 43 W 171 rapport du préfet du Morbihan, 14-09-1944.
38 ADIV 43 W 128, rapport du CR, 30-09-1944.
39 ADCN 2 W 36, comptes rendus et rapports journaliers du commissariat de police de Saint-Brieuc de mai 1944 à décembre 1944.
40 ADIV 43 W 128, le secrétaire général à la police à Rennes, 11-08-1944.
41 ADIV 43 W 128, rapport du directeur régional des services pénitentiaires et de l'éducation surveillée de Rennes, 30-08-1944.
42 ADCA 2 W 36, rapports journaliers du commissariat de police de Saint-Brieuc, 7-08-1944.
43 ADIV 43 W 171 rapport du préfet du Morbihan,6-08-1944.
44 ADIV 43 W 128, rapport du directeur régional des services pénitentiaires et de l'éducation surveillée de Rennes, 30-08-1944.
45 ADCA 1140 W 2, PV du CDL, 15 et 26-09-1944.
46 AMR 1D108, PV de la délégation spéciale, 20-09-1944.
47 AMR, cabinet du maire, bordereau 10.77 boite 85 ; séance publique du conseil municipal, 20-11- 1957.
48 Ce fut fait fin décembre 1957 par effraction. Suite à cet épisode, le conseil municipal décida, à l'unanimité, à nouveau de recouvrir le nom de Pétain par un nouveau carton. AMR, cabinet du maire, bordereau 10.77 boite 85, séance du 27-12-1957.
49 AMR KX 136 fiches de renseignement sur le personnel auxiliaire de la ville de Rennes 1941-1949.
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