Firmin Gémier, un vieux tonton du théâtre populaire ?
p. 75-90
Texte intégral
1Né peu avant la Commune de Paris, mort peu avant le Front populaire, Firmin Gémier (1869-1933) n’a pas eu beaucoup de chance avec les grands moments de l’histoire du peuple français bien qu’il ait consacré sa vie et sa carrière au théâtre populaire. Pour évoquer son approche et rendre compte de son originalité dans la belle équipe des pionniers du théâtre du peuple, il faut remonter à ce qui pourrait être le big bang du théâtre populaire : La Lettre sur les spectacles de Jean-Jacques Rousseau.
Une nouvelle lecture de La Lettre sur les spectacles
2Volontiers compris comme une condamnation du théâtre, La Lettre sur les spectacles est un texte réactif : Jean-Jacques Rousseau est furieux contre Jean Le Rond d’Alembert et le projet de création d’un théâtre à Genève dont il a formulé le vœu par son article éponyme. Dans la petite république théocratique qu’est alors Genève, l’existence d’un théâtre est incompatible avec les options de Calvin. De telle sorte, écrit d’Alembert dans L’Encyclopédie, que les Genevois sont réduits à la grossièreté des spectacles de foire et ne peuvent ni goûter aux joies du théâtre ni profiter de ses vertus éducatives.
3Jean-Jacques Rousseau, qui tient les amateurs de la culture française à Genève pour les oppresseurs et les corrupteurs de la République, voit dans le propos de d’Alembert une ingérence française dans les affaires de sa cité. Avec La Lettre sur les spectacles, il dispute longuement de la fonction éducative du théâtre, de Molière à Racine en passant par Jean-François Regnard, pour conclure à sa vacuité. En contrepoint d’une condamnation sans appel de la scène française contemporaine, Jean-Jacques Rousseau évoque le modèle grec antique et observe « que la Grèce fournit des exemples d’acteurs chargés de certaines fonctions publiques, soit dans l’État, soit en ambassade1 ». À la proposition de d’Alembert, Rousseau oppose la fête comme modèle de divertissement collectif républicain, décrit les fêtes et les bals de Genève et conclut par le souhait de divertissements « sans pompe, sans luxe, sans appareil » à l’exemple des fêtes de Lacédémone.
4Lorsqu’il expose ses options pour le théâtre populaire, Firmin Gémier cite volontiers ce fragment de La Lettre sur les spectacles :
ne faut-il aucun spectacle dans une République ? Au contraire, il en faut beaucoup… À quels peuples convient-il mieux de s’associer souvent et de former entre eux les doux liens du plaisir et de la joie, qu’à ceux qui ont tant de raisons de s’aimer et de rester à jamais unis2 ?
5Par cette lecture, Gémier propose l’ancrage du théâtre à la société civile, le rattache au processus citoyen. À ses yeux, l’art théâtral ne se caractérise ni par la forme, parlée ou lyrique, ni par le genre, tragique ou comique, mais par le maillage au public. Comme il mentionne Jean-Jacques Rousseau à l’envi, Firmin Gémier rappelle aussi ce mot de Billaud-Varenne : « Le théâtre, c’est l’art qui s’adresse à la foule directement, qui l’émeut, qui l’électrise3 » et retient de l’art théâtral la prégnance émotionnelle. Éthique autant qu’esthétique, le projet de Gémier vise la fusion émotionnelle du public au partage de ce qui est conçu davantage en fête d’art qu’en spectacle tarifé. Notre histoire des spectacles a qualifié de populaire ce théâtre auquel Gémier accole volontiers une majuscule. Notre mémoire a donné le nom de Gémier à la petite salle du Palais de Chaillot qui abrita le Théâtre national populaire.
6Dans un itinéraire artistique qui va modifier en profondeur la scène française, Gémier n’est pas un inventeur génial et solitaire mais le héraut d’un mouvement. Tout au long de sa vie en effet, il reste lié à ceux qui, avec lui, retiennent de La Lettre sur les spectacles la perspective civique du théâtre, dont Maurice Pottecher, Romain Rolland, Louis Lumet et Camille de Sainte-Croix : Maurice Pottecher a fondé à Bussang le premier théâtre du peuple moderne. Romain Rolland résumera en 1903 « une campagne de plusieurs années, pour soutenir en France la cause du théâtre populaire4 » avec Le Théâtre du peuple, essai d’esthétique d’un théâtre nouveau. Louis Lumet, qui fonde en 1897 le Théâtre Civique avec Charles-Louis Philippe et Jacques-Gabriel Prod’homme, fait appel à Gémier et aux autres compagnons du Théâtre-Libre pour des représentations dans les salles d’arrondissements parisiens périphériques, comme la Maison du Peuple à Montmartre. Gémier partage enfin ses projets avec Camille de Sainte-Croix, dramaturge et critique dramatique, qui a lancé en 1887 l’idée d’une institution appelée théâtre populaire. L’idée de théâtre populaire les fédère comme les unit un même engagement à la cause du Capitaine Dreyfus. Ces compagnons toutefois ne parlent pas d’une voix unanime. Les tensions et contradictions qui les animent vont étayer la belle aventure du théâtre citoyen comme l’appellera plus tard Jean Vilar. D’ailleurs, quand on se rappelle : « Pour moi, le peuple, par exemple, c’est mon père5 », on peut se demander comment Maurice Pottecher, fils d’industriel, Charles-Louis Philippe, fils de sabotier, Romain Rolland, fils de notaire et Firmin Gémier, fils de compagnon tanneur peuvent conjointement définir ce peuple dont le théâtre qu’ils inventent est à la fois le destinataire et l’initiateur.
7Pour Gémier, le peuple est une foule. Deux ans après la fondation du TNP dont il est le premier directeur, il écrit : « C’est pour la foule que je travaille6 ! » Son théâtre s’adresse à tout le public, sans exclusive. Mais Gémier doit composer avec les lois commerciales : le Théâtre de la Renaissance, puis le Théâtre-Antoine dont il est directeur à partir de 1906 appellent une gestion d’entreprise de spectacle. Pour le rassemblement du peuple dans son théâtre, Gémier s’arrange d’abord de compromis. Au Théâtre de la Renaissance, qu’il dirige au cours de la saison 1901-1902, il donne « des œuvres populaires et des pièces mondaines7 » et accueille ainsi bourgeois aux loges et baignoires, ouvriers ou petits employés aux galeries et à l’amphithéâtre. Au Théâtre-Antoine, Firmin Gémier s’efforce de ménager une accessibilité financière du théâtre à ce qu’on appelle encore « le petit public » et hâte les représentations du dimanche en matinée « ce qui permet aux spectateurs qui habitent la banlieue la plus éloignée d’être rentrés chez eux avant sept heures8 ». Pourtant, il ne se satisfait pas de ces conciliations. Le théâtre populaire dont il rêve est ailleurs.
L’aventure du Théâtre national ambulant
8En 1911 et 1912, sur les routes du nord et de l’est de la France, Gémier et la troupe du Théâtre-Antoine partent rassembler les foules avec un théâtre ambulant extraordinaire, un chapiteau de toile pouvant accueillir plus de 1 600 spectateurs, une régie lumière dont les unités sont mobiles et segmentées, de fameux véhicules de traction, les locomobiles, baptisés du nom des muses. Cette structure pharaonique appelle une équipe de plus de cent personnes, artistes et techniciens confondus.
9Le Théâtre national ambulant Gémier est conçu dans le fantasme rousseauiste : il oppose à la rigidité mortifère de l’institution le dynamisme de l’imprévu. C’est, écrit Firmin Gémier, un « élément bruyant d’intérêt, tombant brusquement sur la petite ville endormie, réveillant toutes les curiosités assoupies9 », qui ambitionne de réunir la société civile. Son théâtre palais décoré par Émile Bertin, modèle de confort, de sécurité, d’hygiène et d’élégance, est une alternative à la bonbonnière dont les étages et les recoins scindent le public en classes sociales et empêchent qu’il se mêle en foule. Parce qu’il vise une fraternisation de dynamique émotionnelle, Gémier retient un spectacle qui « plaise à l’élite comme à la majorité compacte et dans toutes les contrées10 ». Toutefois, malgré des loges « ornées de glaces […] drapées de soie et de velours11 », l’élite boude le Théâtre national ambulant tandis que la ruée sur les places bon marché fait émeute, à Amiens, par exemple.
10Cet échec n’altère pas la conviction de Firmin Gémier d’un théâtre pour le peuple par le peuple auquel il cherche à donner une forme institutionnelle. Il œuvre pour cela avec Camille de Sainte-Croix qui appréhende le peuple, comme le faisait Louis Lumet, en travailleurs manuels et intellectuels. Gémier et Sainte-Croix ont imaginé en effet un théâtre du peuple parisien, un théâtre palais, qui fait l’unanimité de la commission instaurée par la Chambre des députés à l’initiative de Charles Couyba12. Mais les pouvoirs publics y restent placidement indifférents comme ils le seront au Nouveau Projet de décentralisation intéressant la province13 que Gémier remet au ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts à l’automne 1912.
Le personnage de la foule
11Dans ce projet qui procède alors, comme celui de Maurice Pottecher, de l’unanimisme, la visée est autant esthétique qu’institutionnelle. Dès 1901 en effet, Firmin Gémier invente un protagoniste original au théâtre populaire : le personnage de la foule. Après avoir pendant huit ans partagé comme comédien et régisseur les combats d’André Antoine, Firmin Gémier a claqué la porte. Avec d’autres du Théâtre-Libre, il est en désaccord avec les choix artistiques et politiques d’Antoine : André Antoine n’a-t-il pas trahi l’engagement du « théâtre littéraire à bon marché14 » ? Indifférente aux inévitables compromis que les lois de l’industrie théâtrale imposent à Antoine, la troupe se disloque. Firmin Gémier, Alexandre Arquillière, Jean-Louis Janvier, Albert Verse, Louis Séruzier… rejoignent le Théâtre du Gymnase. Gémier y devient directeur de la scène. À la saison suivante, il prend la direction du Théâtre de la Renaissance.
12Parmi les spectacles qu’il met alors en scène, certains, d’inspiration politique, appellent une distribution importante : au Théâtre du Gymnase, Le Domaine de Lucien Besnard et 20 000 âmes de Franc-Nohain, au Théâtre de la Renaissance, La Vie publique d’Émile Fabre et Le 14 Juillet de Romain Rolland. Pour ces spectacles, Gémier dirige de trente-quatre (Le Domaine) à soixante (Le 14 Juillet) acteurs sur une scène à l’italienne. Une multitude d’interprètes sature le plateau. Est-ce bien original lorsqu’on pense aux cinq cents figurants représentant un meeting dans un square de Londres pour Nell Horn15 mis en scène par André Antoine en mai 1891 ?
13Plus qu’au nombre de personnes en scène, la singularité de ces pièces tient à une écriture qui surprend le public. Le Domaine, 20 000 âmes, La Vie publique pourraient s’inscrire dans la veine naturaliste au registre des pièces sociales, n’était leur inspiration comique, voire « une fantaisie parfois outrancière mais le plus souvent réjouissante16 ». La critique rend compte de l’étonnement des spectateurs, depuis Henry Fouquier, pour la sérieuse revue Le Théâtre, qui note que « le public est resté hésitant devant cette forme nouvelle du théâtre17 » proposée par 20 000 âmes jusqu’à Gaston Jollivet pour qui Émile Fabre prend le risque de se heurter « à l’aversion du public pour un sujet qui n’est pas théâtre18 » en passant par Félix Duquesnel décrivant le 14 Juillet comme d’une « sorte de cinématographe parlant de la Prise de la Bastille19 » que, d’ailleurs, Romain Rolland n’appelle pas pièce mais « action populaire en trois actes ». Il s’agit en effet d’écritures impliquant le travail de plateau. À propos du 14 Juillet, dit Romain Rolland, « je ne crois pas qu’il y ait beaucoup de tours de force pareils dans l’histoire du théâtre. Une soixantaine de rôles, une foule, nulle indication précise sur le texte, tout à créer sur les planches, sans compter une partie musicale difficile à régler d’accord avec le dialogue20 ». Le récit didascalique qui apparaît à la publication du texte, postérieure aux représentations, est une trace de la mise en scène. À un moment où les auteurs se piquent de diriger les acteurs et où certains directeurs emploient un régisseur, « comédien vieilli ou ayant peu réussi dans la carrière […] à débrouiller une pièce, à faire le travail préliminaire21 », l’auteur s’en remet ici à ce nouvel artiste théâtral qu’est le metteur en scène22, et dont Firmin Gémier dira qu’il est à l’écrivain ce que le chef d’orchestre est au compositeur23.
14Pour ce spectacle qui se crée conjointement en mots et en images, la multitude en scène n’est pas une figuration, une sorte de décor vivant mais, comme le dit Romain Rolland, « une soixantaine de rôles, une foule ». Elle n’illustre pas le cadre de l’action dramatique mais au contraire en est le protagoniste. La combinaison des écritures qui la mettent en jeu affirme une théâtralité originelle, filtre entre « la société théâtrale (celle représentée sur scène dans une œuvre dramatique)24 » et la société civile.
15Le personnage est un peuple. 20 000 âmes est « une suite de tableaux de mœurs d’une petite ville25 ». La Vie publique, qui raconte une élection, présente le peuple dans ses rapports socio-politiques et met en scène maire, conseillers municipaux, directeurs de banque ou de journaux, ouvriers, ingénieurs, bourgeois… Romain Rolland appelle peuple ses personnages qu’il décline en prostituées, crocheteurs, marchands, étudiants, ouvriers… Il les nomme aussi foule et je retiendrai cette appellation pour le personnage auquel Gémier donne forme scénique car la représentation théâtrale du peuple en multitude renvoie à la modernité. Une thèse contemporaine de Gustave Le Bon, observant que « l’âge où nous entrons sera véritablement l’ère des foules26 » le confirme a contrario.
16Ni pittoresque ni décorative, cette foule est mobile. La pièce d’Émile Fabre débute ainsi sur un brouhaha sonore et corporel. Dans cette confusion, les signes visuels fonctionnent en repère, dont les costumes. Pour Le 14 Juillet, écrira Romain Rolland, ce sont « des costumes très soignés […] une foule suffisamment loqueteuse. Le crocheteur et la femme à la fenêtre, tout particulièrement à noter, pour leur consciencieuse et héroïque pouillerie27 ».
17De ce tumulte affleurent alors des singularités ou des groupes. Ainsi, la première réplique de La Vie publique est celle d’un chœur inorganisé. La forme s’apparente aux voix de la foule dans le cinquième acte de Cromwell à cette différence majeure près qu’elle n’est pas un commentaire : les bribes de conversations audibles, parcellisées sur le plateau, donnent l’argument de la pièce. Puis, de la masse des acteurs en scène, par un jeu de focalisation, des duos et des trios installent l’intrigue amoureuse et l’intrigue politique. Le mouvement du dernier acte se construit également de variations du singulier au collectif, mouvements morcelés d’un grand nombre d’interprètes en scène, mouvements d’entrée latérale de personnages ou de groupes de personnages, mouvement d’un groupe vers le fond de scène, mouvement choral autour de Ferrier. L’action dramatique ordonne cette agitation dans un tempo d’exclamations et d’applaudissements qui se développe en crescendo jusqu’à l’ultime exclamation unanime : « Vive Monsieur le Maire ! »
18À partir des groupements et éparpillements se développe ainsi une rythmique qui anime la multitude dans son agglomération et sa dispersion. La Vie publique, écrit un critique contemporain, « est jouée par la troupe du Théâtre Gémier avec un ensemble inouï, une sorte de furie admirable et féroce on ne peut plus prenante et enivrante28 ».
19Chez Firmin Gémier, la mise en scène du personnage de la foule n’est donc pas le réglage des déplacements sur scène d’un grand nombre de comédiens mais l’interprétation d’une action dramatique par un acteur pluriel. Élaboré d’une rythmique visuelle, le jeu de la foule permet que « l’action parle aux yeux29 » comme l’arrivée, au premier acte du 14 Juillet, d’un homme qui annonce l’exil de Necker, affolé, époumoné, traînant après lui une grappe d’hommes et de femmes, courant, affolés comme lui.
20Le personnage de la foule se construit ainsi d’images dramatiques pour un théâtre qui, s’adressant à l’intelligence émotionnelle du public, se définit en fête d’art. Quelques années après sa création au Théâtre de la Renaissance, Le 14 juillet constitue du reste le programme d’une fête populaire proposée à l’approbation du conseil municipal de Paris par le Comité des fêtes du peuple, à l’initiative de La Revue d’Art Dramatique, dont les membres, avec Firmin Gémier et Romain Rolland, sont Maurice Pottecher, Lucien Besnard et Eugène Morel30.
21Pour ce personnage, il faut inventer un nouvel espace suggérant un possible surgissement comme les effets de profondeur pour Le 14 Juillet, les portes en fond de scène du cabinet de Ferrier dans la Vie publique. Ainsi, à l’opposé d’Antoine qui « marque sa prédilection pour les scènes de dimensions modestes31 » et souligne l’importance du décor dans l’économie de la représentation, Firmin Gémier ne clôt pas l’espace scénique. Il poursuit sa carrière à la recherche des formes scéniques nouvelles qu’appelle ce personnage inédit.
Un peuple de chair et de larmes
22Comme celui de Maurice Pottecher, le travail de Firmin Gémier est nourri d’une représentation du peuple venue d’une expérience originelle décisive. Pour Maurice Pottecher, il s’agit de la procession des premiers spectateurs au Théâtre du Peuple de Bussang. Pour Firmin Gémier, c’est le Festival Vaudois. En 1903, il met en scène ce Festspiel qui célèbre à Lausanne l’entrée dans la Confédération helvétique. C’est un spectacle donné à ciel ouvert par deux mille trois cents exécutants, amateurs natifs du canton, pour vingt mille spectateurs. Émile Jaques-Dalcroze – que Firmin Gémier surnommera le Jean-Jacques Rousseau de notre époque musicale – en a écrit la musique et le livret.
23À la fin de la dernière partie, Gémier mêle au public les acteurs en scène : empruntant « le chemin des cortèges », tous les interprètes gagnent la salle par cour et jardin32, provoquant ainsi une émotion collective telle que tous les spectateurs se lèvent tout à coup. Ce moment, que Gémier évoque volontiers, décide de son esthétique :
jeter l’action dans le public, transformer le spectateur en acteur, l’émouvoir en le faisant entrer dans le drame. […] C’est ce que donne encore, aujourd’hui, le geste du clown qui lance son ballon dans la salle. C’est le plus gros effet de joie obtenu dans le cirque, parce que, en recevant et en renvoyant le ballon, l’assistant entre dans le jeu. C’est le théâtre de l’avenir, celui des grandes démocraties33.
24Dire que Firmin Gémier ou Maurice Pottecher cultivent une appréhension mythifiée du peuple serait en conséquence rapide. Il semble néanmoins que leur travail soit guidé par un fantasme : celui de reproduire une expérience initiale dont les circonstances exceptionnelles permettaient raisonnablement la confusion peuple/public. Que penser des premières nuits d’Avignon, du premier week-end de Suresnes dans l’itinéraire de Jean Vilar ?
25L’épreuve de la Première Guerre Mondiale infléchit toutefois l’option unanimiste qu’affiche Gémier quand il dit qu’il s’adresse « à la Société tout entière, à toutes les catégories sociales à la fois, car tel est le sens large que je donne au nom peuple34 ».
26En août 1914, il contribue au rapatriement des réfugiés ardennais. Dans le programme du spectacle qu’il donne plus tard à leur profit au Théâtre-Antoine, il décrit le corps souffrant de la foule, « des corps durs35 » sur la route, dans le silence de la nuit où l’on n’entend que le bruit des pas et déclare « la vue de ces douleurs silencieuses, la communion avec ces misères, l’émotion violente et contenue de ces heures-là nous ont unis en même temps qu’elles nous grandissaient36 ». Ce souvenir, puis l’expérience du théâtre aux armées, bouleversent sa représentation. L’image des soldats de l’An II se substitue au modèle raisonné d’une conjugaison de la masse et de l’élite. Le peuple, dit Firmin Gémier « a souffert, il s’est sacrifié, il nous a sauvés37 ». Le peuple, ce sont « tous les soldats citoyens, issus de toutes les classes accourues de toutes nos provinces38 ».
27L’image d’un peuple, corps de sang et de larmes, va insuffler à Gémier l’opiniâtreté qui permet la fondation du TNP. Alors qu’il n’aime pas écrire, qu’il agit plutôt qu’il ne théorise, Gémier multiplie dans la presse articles et communications. L’expérience de l’unanimisme dans la douleur lui semble pouvoir abolir les anciens clivages. Ressentie sur le mode privé et collectif, la souffrance a nourri d’affects le contrat social. Pour Firmin Gémier, le TNP pourrait réparer cette souffrance. Il projette qu’on y désapprenne « la vieille chanson de la misère humaine39 ».
28L’État consent à la création de la cinquième scène nationale qu’il confine en consortium dans l’improbable salle des fêtes du Trocadéro. Avec le statut de concessionnaire, il en nomme Firmin Gémier directeur. Le spectacle inaugural, Les Chants de la République, donné le 11 novembre 1920, met en scène l’histoire de la République depuis 1789. Le peuple en scène renvoie, dit Firmin Gémier, « sa miniature40 » au public, au peuple dans la salle. Dans l’optique wagnérienne de L’Art et la Révolution, Firmin Gémier privilégie la danse et le chant41. Quelques jours avant la représentation, il écrit : « Son âme […], je la sens vivre, palpiter. J’ai la douce et sublime sensation de poser la main sur le cœur de la Nation. C’est fragile et immense42. »
29Mais Gémier pense aussi que de l’épreuve de la guerre naît la conviction unanime d’un autre monde :
Désormais, on ne peut plus vivre en soi et pour soi, on vit avec les autres et pour les autres. Chacun de nous est forcé d’appartenir à une association, corporation, nation. Il est pris dans ces réseaux qui s’enchevêtrent. Il est une cellule de ces organismes. Ses instincts, ses facultés, ses forces se multiplient par les leurs43.
30Cette métaphore de la cellule renvoie au peuple simple et laborieux de Genève. Chacun s’inscrit dans un réseau en perspective du bien commun. Elle souligne par ailleurs l’approche sensible, presque charnelle, par laquelle Firmin Gémier maille l’individu au corps social. Ce qu’on a appelé la fraternité des tranchées impulserait-elle une cohésion nouvelle dont le théâtre assurerait le ciment par « un art vraiment collectif et supérieur, accessible à l’instinct aussi bien qu’à l’intelligence, accordant la matière et l’esprit, un art propre à prolonger la joie en des salles où le manuel pourra s’asseoir à côté du savant44 » ?
Une scène moderne pour le nouveau protagoniste du drame
31Depuis 1901, Gémier est en quête des formes de cet art accessible à l’instinct aussi bien qu’à l’intelligence, de cet art nouveau dont l’éthique l’anime. C’est un art théâtral révolutionnaire en ce qu’il libère le théâtre de la tutelle littéraire. Après le cuisant échec financier de sa direction du Théâtre de la Renaissance, désormais plus humble vis à vis d’Antoine, il a appris à composer avec le marché du spectacle : au Théâtre-Antoine, il équilibre par ce qu’il appelle des pièces-mécènes les créations plus audacieuses. Pour autant, il travaille dans la conjugaison des écritures dramatiques et scéniques. En témoignent ses collaborations, avec Émile Fabre particulièrement, mais encore avec Pierre Frondaie, Edmond Guiraud ou Lucien Népoty.
32Dans cette recherche, il partage avec Émile Jaques-Dalcroze l’intérêt pour toute innovation scénographique permettant le jeu de la foule. Ici encore, un Festspiel lui donne des clefs de représentation. En juin 1914, Gémier et Jaques-Dalcroze créent Les Fêtes de Juin à Genève, sur un livret de Daniel Baud-Bovy et Albert Malsch, avec mille deux cents interprètes, quatre-vingts musiciens et quatre cents choristes. Le spectacle, à représentation multiple, se donne dans un espace fermé pour plus de cinq mille spectateurs. À cette occasion, on construit un théâtre dont le mur de fond de scène, comme celui de Bussang, s’ouvre sur un espace naturel. C’est ici le lac de Genève. Firmin Gémier se risque à l’allégement scénographique et à l’emploi du projecteur. Il y expérimente encore la jonction fusionnelle des interprètes et du public lorsqu’au final accoste en fond de scène la barque des Confédérés et que les interprètes rejoignent sur le plateau le peuple soldat traversant la salle pour gagner la scène. La lumière naturelle envahit alors scène et salle. La musique soutient ce mouvement de convergence corporel et lumineux : pris dans le jeu, les spectateurs entonnent le chant final.
33Le succès des Fêtes de Juin confirme Gémier dans une voie où il entraîne Lucien Népoty et Saint-Georges de Bouhélier. « Par le Verbe et l’Image45 », à partir des œuvres de Shakespeare ou Sophocle, ce seront Shylock ou Le Marchand de Venise puis Antoine et Cléopâtre en 1917-1918, Œdipe roi de Thèbes en 1919.
34À partir de Shylock ou Le Marchand de Venise donné au Théâtre-Antoine en 1917, Gémier conçoit le théâtre, scène et salle réunies, en aire de jeu : il supprime la rampe, installe des escaliers de la scène à la salle, utilise la lumière mobile, facture inédite qu’il mettra en œuvre à l’Odéon et au TNP. L’entrée par la salle et la circulation des groupes d’interprètes de la scène à la salle se retrouvent lorsqu’à l’automne 1923, Gémier tente de relever le défi esthétique de la Salle des Fêtes du Trocadéro et invente un mode de représentation où s’associent cinéma et spectacle vivant : tandis qu’est projeté L’Empire du soleil, film sur la Provence et que, simultanément, l’orchestre soutient le chant des chœurs provençaux, des farandoles dansent dans la salle.
35Le jeu de la foule, protagoniste original du théâtre populaire, exige « les vastes enceintes, cirque ou hall d’usine, faciles à agencer en salles de spectacles46 », dit Firmin Gémier qui transforme ainsi le Cirque d’Hiver en 1919 :
alors que le public occupe une large partie de l’enceinte sur les gradins et la piste, l’aire scénique se développe en deux niveaux sur l’autre portion du cirque. À partir d’une première plate-forme, elle se déploie en hauteur par deux volées d’escaliers latéraux et de larges degrés centraux vers un portique qui symbolise le palais d’Œdipe. Ce portique est percé de cinq portes qui donnent une profondeur supplémentaire à la scène47.
36Composé alors de deux cent cinquante interprètes, le personnage de la foule évolue dans un espace architecturé. En 1924, Firmin Gémier renvoie à la modernité cette stylisation qui rompt avec les options naturalistes : « C’est, du reste, une tendance de tous les arts modernes, en particulier de la sculpture et de la peinture, de rechercher la simplification monumentale. On s’oriente vers une vérité vigoureuse qui interprète les sentiments par des traits et des reliefs fortement accusés. Il est bon que le théâtre suive la même direction48. » Ainsi, lorsqu’Antoine propose une « peinture de chevalet49 », Firmin Gémier compose au contraire des fresques vivantes50 dans un espace épuré. L’allègement progressif de l’apparat scénique va de pair avec le recours aux nouveaux dispositifs d’éclairage de scène, dont le jeu d’orgue, le projecteur et les gélatines :
Le décor de mes rêves, ce serait une toile de fond qui entourerait la scène, et derrière laquelle seraient placés des projecteurs qui feraient successivement apparaître et disparaître ce qu’il faut montrer, puis dérober. Un rôle immense est réservé à l’emploi savant de la lumière51.
37Depuis 1902, l’emploi de la lumière – techniquement plus restreint – soulignait le mouvement du drame. Ce n’est pas une illumination mais un éclairage comme à la fin du deuxième acte du 14 Juillet où le fond de scène rougeoie, révélant la sombre silhouette de la forteresse. Pour Guerre52, pièce sans héros, à l’intrigue discontinue, qui ne tient que deux jours à l’affiche, Gémier utilise les lumières colorées en fond de scène comme élément rythmique ou expressif du jeu collectif. Le premier acte, qui présente un champ de bataille après le combat, se construit au rythme de leur alternance tandis que les soldats blessés passent de la souffrance à la révolte puis à la folie.
38On peut raisonnablement comprendre les options de Gémier dans la filiation de La Théorie des couleurs de Goethe, les thèses d’Effet physico-moral de la couleur étant alors assez connues. Les liens étroits qui unissent Firmin Gémier à Louis Anquetin et Henri-Gabriel Ibels le confirment. Le premier, familier de Toulouse-Lautrec et de Van Gogh, a composé le portrait de Gémier dans le rôle du Bridau de La Rabouilleuse. Inventeur du cloisonnisme, Louis Anquetin met en évidence les effets produits par les différentes couleurs sur l’impression qu’a le spectateur du décor. Henri-Gabriel Ibels, directement impliqué dans le travail scénique de Gémier, appartient au groupe des Nabis qui l’ont surnommé « Nabi journaliste » en raison de son penchant pour l’illustration politique. Lié au mouvement anarchiste, Ibels rencontre Gémier dès le Théâtre-Libre pour lequel il illustre plusieurs programmes. Il crée décors et costumes de Shylock ou Le Marchand de Venise, d’Antoine et Cléopâtre, d’Œdipe roi de Thèbes… Quand il fait le compte-rendu du spectacle au Cirque d’Hiver, Henri Béraud écrit :
La foule et la lumière ! À cela qui est de Gémier, il convient d’ajouter la couleur qui est de M. Ibels, le costumier d’Œdipe. Cet artiste a osé des tons, si j’ose dire, périlleux. Ce ne sont que roses d’aurore, bleus de pierres malades, carmins flamboyants, bruns saurs ou violets quasi sanguinolents. Et tout cela constitue une palette prestigieuse qui tantôt fait penser à Puvis et tantôt à Bonnard et tantôt à Signac. Cela aussi est sans précédent53.
39La lumière colorée se décline en nuances et suscite des impressions auxquelles le public s’abandonne. Pour Œdipe roi de Thèbes, « inondée par des rayons bleus ou violets, [la foule] prend un aspect mystérieux et fantastique54 ». Au troisième tableau des Chants de la République, la lumière bleue, en faisceau, souligne l’effet dramatique du cortège des femmes en deuil. Avec l’allégement du décor, les variations de lumières colorées permettent à Firmin Gémier l’association rythmique du drame à la musique qui le soutient. Les lettres qu’il écrit à Henri Rabaud55 pendant la préparation d’Antoine et Cléopâtre témoignent du maillage expressif des arts qui fonde pour lui la mise en scène.
Le théâtre d’un monde qui se lève
40L’invention théâtrale du personnage de la foule bouleverse ainsi les canons de l’esthétique théâtrale et substitue l’architecture moderne au théâtre à l’italienne. Elle est tissée à la fois d’audace et d’humilité : audace du créateur souvent en butte aux critiques de l’élite, de ceux qu’on appelle alors « les ayant-droit » et qui tentent de résister par une raillerie infondée à la petite révolution culturelle qu’est le théâtre populaire. Mais aussi humilité de l’artisan qui fédère les écritures et met en cohérence de l’œuvre les éléments scéniques. Dans cette perspective, la reconduction de procédés en système est impossible : le personnage de la foule est mis en scène dans la relation de miniature qu’il entretient avec le public.
41Au public, le personnage renvoie à la fois son unité et sa pluralité. La foule des Thébains pour Œdipe roi de Thèbes est à la fois corps unique et agrégat d’individus. Dans l’attaque de la garde royale d’Œdipe, par exemple, des singularités émergent de ce grand corps puis s’y évanouissent, comme Paoli, qui « empoigne un soldat pantelant, le brandit à bout de bras et […] dégringole l’escalier avec cette proie autour de laquelle des forcenés aboient comme des chiens furieux56 ». La critique rend compte de l’originalité théâtrale du personnage : « Pour nous, le personnage principal est un héros à mille têtes57. »
42Mue par cette unanimité affective que Le Bon appelle « âme des foules », et dont le mouvement scénique renvoie l’expression, la foule est une entité. Pour autant, le jeu des acteurs n’est pas uniforme. Émile Jaques-Dalcroze écrit à ce propos :
La foule doit être considérée par le metteur en scène comme une entité, comme un seul individu aux membres multiples. La simultanéité même des gestes individuels n’est pas en état de révéler la pensée collective d’une foule. C’est ainsi que cinquante personnes étendant lentement les bras ne produisent qu’un effet de renforcement de lignes. Il faudra, pour que le spectateur éprouve la sensation que c’est bien le peuple tout entier qui tend les bras que le geste de chaque acteur isolé continue le geste commencé par un autre et le transmette ensuite à son voisin à l’aide d’un mouvement continu58.
43Ici encore se conjuguent éthique et esthétique : la fusion du public en peuple, comme le jeu de la foule, ne signifie pas la dissolution de l’individu dans le groupe.
44Ces propositions esthétiques nouvelles rencontrent un succès massif. Avec la direction du TNP, Firmin Gémier obtient celle de l’Odéon qui lui est nécessaire pour donner au théâtre populaire les moyens de son existence. Après l’euphorie pourtant vient la désillusion : les clivages se reconstituent. Gémier vilipende ces « deux douzaines de mandarins et de snobs qui auraient honte de partager leurs plaisirs avec la foule et qui apprécient seulement les raretés psychologiques, les cas de tératologie morale exposés en une langue si obtuse que personne n’y comprend que goutte59 ».
45Comme elle a boudé le Théâtre national ambulant, l’élite boude la salle des fêtes du Trocadéro. Le public du TNP, rapporte Paul Gsell, se compose « d’ouvriers, d’ouvrières, de leurs nombreux enfants, de boutiquiers et de petits bourgeois60 ». La foule, à laquelle Gémier destine son théâtre est alors clairement synonyme de masse puisque dans le projet utopico-républicain, l’élite a failli.
46À cette désillusion se greffe une lecture du cours de l’Histoire qu’inquiète la menace d’un conflit à venir. Émerge alors, dans les textes de Gémier en 1925, une conception du peuple qui se réfère à Louis Lumet, à Camille de Sainte-Croix et à Romain Rolland. Le peuple renvoie désormais à une mosaïque d’artistes, de paysans, de biologistes, de terrassiers, d’écrivains, de menuisiers… C’est une foule des lendemains qui chantent, décrite selon des critères fonctionnels plutôt qu’en communauté d’affects : « Les travailleurs unis, manuels ou intellectuels, voilà ce qui constitue véritablement le peuple61. » La perspective est résolument politique.
Quand toutes les professions seront organisées par-dessus les frontières, quand cette grande internationale du labeur sera établie dans tous les domaines, arts, lettres, sciences, industrie, commerce, lorsqu’elle fonctionnera avec régularité, ni les intérêts capitalistes, ni les appétits politiques ne pourront plus rien contre la paix62.
47Rejetant le projet unanimiste initial, Gémier radicalise une appréhension du peuple dont la fusion n’est plus envisagée à l’échelle d’un quartier ou d’une petite ville mais à l’échelle européenne et mondiale. « C’est le peuple européen qui sauvera l’Europe, comme plus tard ce sera le peuple universel qui assurera la Paix, qui protègera la Civilisation63. »
48La Société universelle du théâtre, que Gémier fonde au printemps 1925, procède de l’Internationale ouvrière. Gémier définit alors le peuple selon des critères opératoires. Il se constitue par/pour/contre/avec : par le travail, pour la paix, contre les puissances d’argent et les ambitions politiques personnelles, avec le théâtre dont ce levain qu’est la dynamique émotionnelle permet aux hommes de traditions et d’horizons divers de se comprendre.
49Passant de l’étroitesse hexagonale à l’échelle européenne et mondiale, l’image du peuple perd sa palpitation pour une représentation par le truchement des œuvres du patrimoine dramatique. Le projet relève peu ou prou désormais de l’échange culturel. Pour Gémier, « c’est par la fraternité des plus hauts génies que les peuples pourraient le plus facilement comprendre qu’ils doivent fraterniser eux-mêmes64 ».
50Le parcours de Gémier pointe ainsi les questions qui ont traversé l’histoire du théâtre populaire français contemporain. L’image du peuple qu’il renvoie, inévitablement fluctuante selon les rendez-vous de l’histoire, est affectivement marquée de ses contradictions, de ses choix, et de ses renoncements.
51En 1974, Yves Coppens et Donald Johanson découvrirent Lucy dans leur campagne de fouilles menée en Éthiopie. L’humanité, réjouie, crut alors avoir identifié sa grand-mère. On sut plus tard que l’homo sapiens ne descend pas en ligne directe de Lucy. En recherche de paternité, notre théâtre populaire contemporain pourrait icôniser Firmin Gémier, dont l’énergie a permis le TNP. Jean Vilar ne parle-t-il pas de Gémier comme d’un « père65 » ?
52Mais Vilar ajoute « ou un frère aîné66 ». Lucy n’est pas notre grand-mère mais une vieille tante, sans doute joyeuse et bienveillante, buvant l’eau des sources et mangeant des baies, en guise de tisane et de petites madeleines. De même Firmin Gémier, et avec lui Maurice Pottecher, Louis Lumet, Romain Rolland, Camille de Sainte-Croix, sont les vieux tontons du théâtre populaire. Quand on les lit attentivement, on s’aperçoit que ce sont des tontons flingueurs.
Notes de bas de page
1 Jean-Jacques Rousseau, Lettre sur les spectacles, édition de L. Brunel, Paris, Hachette, s. d., p. 118.
2 Ibid., p. 186.
3 Cité par Firmin Gémier, Volonté, 20 février 1926.
4 Romain Rolland, Le Théâtre du peuple, essai d’esthétique d’un théâtre nouveau, Paris, Albin Michel, nouvelle édition, 1913, p. vii, édition de Chantal Meyer-Plantureux, Bruxelles, Complexe, 2003, p. 25.
5 Jean Vilar, « Jean Vilar s’explique », Bref, no 7, 15 octobre 1955, in Le Théâtre Service public, Paris, Gallimard, nouvelle édition, 1986, p. 189.
6 Firmin Gémier, Comœdia, 4 septembre 1922.
7 Firmin Gémier, « Entretien avec Alfred Delilia », in Théâtre Populaire. Acte I, Lausanne, L’Âge d’Homme, 2006, p. 34.
8 Comœdia, 28 mars 1912.
9 « Statuts de la Société anonyme du Théâtre Gémier », in Catherine Faivre-Zellner, Firmin Gémier, héraut du théâtre populaire, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, p. 276.
10 Firmin Gémier, « Le Théâtre ambulant », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 42.
11 Comœdia, 29 juin 1911.
12 Archives de l’Assemblée nationale, Annexe 344, 13 juillet 1906.
13 Comœdia, 28 septembre 1912.
14 André Antoine, « Circulaire-programme diffusée à l’ouverture du Théâtre-Antoine », 10 juillet 1897, in Jean-Pierre Sarrazac et Philippe Marcerou, Antoine, l’invention de la mise en scène, Arles, Actes-Sud Papiers, 1999, p. 104.
15 Nell Horn, drame en quatre actes et six tableaux de Joseph-Henri et Justin Rosny, 25 mai 1891, 31e spectacle du Théâtre-Libre.
16 Henry Fouquier, Le Théâtre, no 57, 1901.
17 Ibid.
18 Gaston Jollivet, Le Théâtre, no 69, 1901.
19 Félix Duquesnel, Le Théâtre, no 86, 1902.
20 Romain Rolland, « Le 14 Juillet, monté et joué par Firmin Gémier », Théâtre populaire, no 4, novembre-décembre 1953, p. 5.
21 André Antoine, « Causerie sur la mise en scène », in Jean-Pierre Sarrazac et Philippe Marcerou, Antoine, l’invention de la mise en scène, op. cit., p. 111.
22 Sur cette question, voir Jean-Pierre Sarrazac, « Introduction », in Jean-Pierre Sarrazac et Philippe Marcerou, Antoine, l’invention de la mise en scène, op. cit., ainsi que Jean-Pierre Sarrazac, « La Mise en crise du drame par la mise en scène », Mise en crise de la forme dramatique 1880-1910, 1999, Études théâtrales, no 15-16, Louvain-La-Neuve, Centre d’études théâtrales et Marco Consolini, « Arsène Durec, un metteur en scène oublié du vingtième siècle, quelques réflexions à propos d’un métier qui ne laisse pas de traces », Arts du spectacle, métiers et industries culturelles, 2005, Presses de la Sorbonne Nouvelle, p. 187-206.
23 Firmin Gémier, Rt 12 233, Département des Arts du Spectacle, Bibliothèque nationale de France.
24 Élie Koningson, « Avant-Propos », in Figures théâtrales du peuple, Paris, Éditions du CNRS, 1985, p. 8.
25 Henry Fouquier, Le Théâtre, no 57, 1901.
26 Publié en 1895, Psychologie des foules de Gustave Le Bon a fait l’objet d’une réédition, Paris, Presses universitaires de France, 1983.
27 Romain Rolland, « Le 14 Juillet, monté et joué par Firmin Gémier », Théâtre populaire, no 4, op. cit., p. 7.
28 Maurice Beaubourg, La Plume, 1901, p. 932.
29 Firmin Gémier et Paul Gsell, « La Dramaturgie nouvelle », La Revue mondiale, no 13, 1er juillet 1924.
30 Pour l’occasion, le premier acte aurait été joué, les deuxième et troisième actes remplacés par un intermède symphonique et des chants de la Révolution. On passerait alors à la scène finale, scène de la fête à laquelle se mêlerait la foule des enfants des écoles, des Universités populaires, des étudiants. Le projet n’aura pas de suite. Sur ce point, voir La Revue d’Art Dramatique et Musical, 20 novembre 1906.
31 Jean-Pierre Sarrazac, « Introduction », in Jean-Pierre Sarrazac et Philippe Marcerou, Antoine, l’invention de la mise en scène, op. cit., p. 18.
32 L’Alpe célèbre son indépendance. Tous ceux qui ont participé au spectacle reviennent en scène. « Sur la montagne apparaît la confédération, enveloppée dans le drapeau fédéral et entourée des vingt-deux Cantons. Le canon tonne, les cloches sonnent, les troupes présentent les armes, et la patriotique apothéose se termine par le chant du Cantique suisse, entonné par trois mille personnes et repris en chœur par les vingt mille spectateurs. L’effet est d’une grandeur irrésistible » (Le Théâtre, no 11, août 1903).
33 Firmin Gémier, choix de textes et notes de Catherine Faivre-Zellner, Arles, Actes Sud-Papiers, coll. « Mettre en scène », 2009, p. 55.
34 Firmin Gémier, Odéon Magazine, no 35, 1923.
35 Firmin Gémier, programme, Les Huns et les Autres, mars 1915.
36 Ibid.
37 Firmin Gémier, « L’Ère nouvelle au théâtre », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 84.
38 Ibid.
39 Firmin Gémier, « Un Théâtre dans un cirque », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 59.
40 Firmin Gémier, « L’Ère nouvelle au théâtre », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 89.
41 L’expression populaire chez Gémier n’est pas archaïque même si elle peut être d’inspiration régionaliste. C’est une ressource ; elle n’est pas exclusive. Participent de l’expression populaire toutes les formes d’art vivant dont celles qui sont tenues pour mineures comme la chanson ou le cirque. La programmation du TNP de 1920 à 1923, pendant ce moment que j’appelle de l’euphorie, est d’expression populaire en ce qu’y apparaissent, entre autres, Tosca et Hernani, L’Arlésienne ou Madame Butterfly, les artistes de l’Odéon donnant La Revue des chants et chansons populaires puis La Mégère apprivoisée, les clowns Fratellini jouant en matinée pour Noël et avec la troupe de l’Opéra-Comique pour Les Saltimbanques.
42 Firmin Gémier, « L’Ère nouvelle au théâtre », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 89.
43 Firmin Gémier, Choses de théâtre, no 13, janvier 1923.
44 Firmin Gémier, « Du tréteau sur la place », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 96.
45 Firmin Gémier, Odéon Magazine, no 31, 1923.
46 Programme d’Antoine et Cléopâtre, 1918.
47 Danièle Pauly, La Rénovation scénique en France, Paris, Norma, 1995, p. 91.
48 Firmin Gémier et Paul Gsell, « La Dramaturgie nouvelle », La Revue mondiale, no 13, 1er juillet 1924.
49 Romain Rolland, Le Théâtre du peuple, essai d’esthétique d’un théâtre nouveau, op. cit., p. vii.
50 Firmin Gémier et Paul Gsell, Rt 3282, 11 janvier 1920, Département des Arts du Spectacle, Bibliothèque nationale de France.
51 Firmin Gémier, « La Mise en scène », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 80.
52 La pièce est créée au Théâtre-Antoine le 19 février 1909. Elle est présentée comme pièce de Robert Reinert. Paul Blanchart dit qu’il ne s’agit pas d’une pièce mais de l’adaptation, pour la scène, d’un texte en faveur de la paix universelle.
53 Henri Béraud, coupure de presse, 21 décembre 1919, Rt 12 233, Département des Arts du Spectacle, Bibliothèque nationale de France.
54 Cri de Paris, 21 décembre 1919.
55 Firmin Gémier, « Lettres à Henri Rabaud », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 47-52.
56 Comœdia, 11 janvier 1920.
57 Cri de Paris, 21 décembre 1919.
58 Émile Jaques-Dalcroze, La Tribune de Genève, 9 et 23 avril 1919.
59 Firmin Gémier, « Suis-je un mystique », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 94.
60 Firmin Gémier et Paul Gsell, « Le Théâtre National Populaire », in Catherine Faivre-Zellner, Firmin Gémier héraut du théâtre populaire, op. cit., p. 309.
61 Firmin Gémier, « L’Internationale du théâtre », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 132.
62 Ibid.
63 Ibid.
64 Firmin Gémier, « Le Théâtre éducateur par la joie », in Théâtre Populaire. Acte I, op. cit., p. 114.
65 Jean Vilar, « Firmin Gémier », in Le Théâtre service public, op. cit., p. 100.
66 Ibid.
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Shakespeare au XXe siècle
Mises en scène, mises en perspective de King Richard II
Pascale Drouet (dir.)
2007
Eugène Scribe
Un maître de la scène théâtrale et lyrique au XIXe siècle
Olivier Bara et Jean-Claude Yon (dir.)
2016
Galions engloutis
Anne Ubersfeld
Anne Ubersfeld Pierre Frantz, Isabelle Moindrot et Florence Naugrette (dir.)
2011