Histoires de la souffrance sociale
|Deuxième partie. Figures et expressions
Mesurer la souffrance des enfants abandonnés
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FranceTexte intégral
1Il n’y a pas si longtemps qu’on fait le lien entre l’abandon et la souffrance morale. Sous la Troisième République, rares sont ceux qui mettent en rapport l’absence de relation parentale (et maternelle), les carences affectives et les déséquilibres dans la construction de la personnalité. Au fil du xxe siècle, l’abandon commence à être perçu comme un traumatisme, une des plus grandes souffrances morales qu’on puisse infliger à un être. La vulgarisation du freudisme, à partir de la Seconde Guerre mondiale, fournit aux psychologues et aux pédopsychiatres de nouveaux outils pour comprendre les troubles de l’enfance et de l’adolescence. Les assistantes sociales se penchent alors sur le développement affectif et intellectuel des enfants, confectionnent à leur usage des tests psychomoteurs, rédigent des rapports sur leur maturité ou leurs cauchemars, évaluent les manifestations d’agressivité et les phénomènes de labilité émotive. C’est tout un vocabulaire qui entre dans les mœurs.
- 1 G. Gaspart, Vie du pitau : enfant né au départ moins que rien : matricule 198 437, Nantes, édition (...)
2Mais, au xixe siècle et au début du xxe siècle, les agents de l’Assistance publique ne sont guère sensibilisés à ces questions. Pour cette raison, les archives témoignent mal des souffrances éprouvées par les enfants. Les violences physiques et sexuelles sont difficiles à mettre au jour, mais les dossiers en portent parfois la trace parce que les corps peuvent être examinés, auscultés, autopsiés. Le sentiment d’abandon et d’humiliation, lui, ne donne lieu à aucun signalement, aucun dépistage, aucune preuve tangible. Pourtant, on n’imagine pas que Gaby Gaspart soit un cas isolé lorsqu’à treize ans il revient voir son ancienne nourrice qui n’a pourtant cessé de le maltraiter : « L’affection me manquait terriblement1. » Faute d’autres sources, l’historien est donc réduit à avancer à tâtons. S’il veut saisir l’expression d’une souffrance psychique, il doit fourbir ses propres instruments.
Le chagrin et la dépression
- 2 R. Spitz, « Anaclitic depression », dans Psychoanalytic Study of the Child, 1946, tome I, p. 313-3 (...)
3Le petit enfant abandonné a une psychopathologie propre. Le premier qui s’en soit rendu compte est le psychiatre René Spitz, qui a observé après la Seconde Guerre mondiale la dépression du nourrisson. En travaillant au sein d’une pouponnière attachée à une institution pénitentiaire pour jeunes délinquantes, Spitz s’est aperçu qu’un bébé séparé de sa mère après six mois de bonnes relations se laisse littéralement mourir. Ce marasme psychique et physique se traduit, après une phase de pleurs et de cris, par un refus du contact, une indifférence à l’entourage, une régression des acquisitions, une conduite anorexique, un arrêt du développement, une inertie motrice et une plus grande sensibilité aux infections, autant d’attitudes de repli susceptibles de provoquer un décès2. Nous ne savons pas si la séparation provoque chez les nouveau-nés confiés à l’Assistance publique une apathie massive pouvant conduire à la mort. Pas plus que les nourrices et les employés de l’hospice dépositaire, les directeurs d’agence ne sont sensibles à ces manifestations qu’on peut facilement confondre avec les symptômes d’une maladie infantile.
- 3 Direction de l’action sociale, de l’enfance et de la santé (DASES) de la mairie de Paris, Jeannett (...)
- 4 DASES, Laurent Fissel, abandonné, non reconnu, né le 30 mars 1902, admis le 31 mars 1902 (à un jou (...)
- 5 DASES, Suzette Harewitz, abandonnée, née le 20 juin 1902, admise le 2 novembre 1903 (à un an), age (...)
- 6 DASES, Marie Xavier, abandonnée, légitime, née le 15 mars 1902, admise le 21 mai 1902 (à deux mois (...)
4Au xixe siècle et dans le premier xxe siècle, les adultes sont aveugles à la psychologie du nouveau-né, mais ils savent apprécier les variations d’humeur chez les enfants, si bien qu’on est mieux renseigné sur la nature de leur dépression. Sous la Troisième République, les directeurs d’agence n’ont pas le temps ni l’envie de procéder à des entretiens individuels très poussés ; pourtant, selon leur personnalité et leur conception du service, ils sont sensibles à l’humeur qu’affichent les pupilles et notamment les enfants à la pension. Dans les années 1910, le directeur de l’agence de Romorantin, Olivier Boudard, note scrupuleusement les expressions de repli psychologique qui peuvent s’apparenter à une dépression. La tristesse prononcée d’un pupille est souvent signalée dans le dossier, ce qui ne signifie pas que son « père républicain » tente d’y remédier. Ainsi, en octobre 1912, Boudard remarque qu’une fillette de dix ans « a presque toujours une physionomie ennuyée ou triste3 ». Placé à Lassay à la veille de la Grande Guerre, un garçon d’ » aspect timide et hésitant » a « toujours l’air triste ou ennuyé » et « paraît peu expansif4 ». En 1915, une fillette de treize ans récemment placée à Loreux est « peu communicative » et « paraît triste5 ». En avril 1920 et février 1921, une jeune fille qui a changé trois fois de famille d’accueil dans son enfance est hospitalisée pour dépression. Après sa sortie, Boudard constate qu’elle est « difficile à placer » et lui fait attribuer une pension mensuelle extraordinaire de quatre-vingt-dix francs pour « crises nerveuses6 ».
- 7 DASES, Coralie Mingant, abandonnée, reconnue, née le 4 novembre 1902, admise le 15 juin 1911 (à hu (...)
- 8 DASES, Perrine Vivian, abandonnée, née le 21 février 1899, admise en avril 1909 (à dix ans), agenc (...)
- 9 DASES, Catherine Bienne, en dépôt, née le 6 octobre 1922, admise le 10 septembre 1935 (à treize an (...)
- 10 DASES, Benjamin Joncour, abandonné, légitime, né le 30 mars 1903, admis le 29 mars 1915 (à douze a (...)
5Il arrive que le pupille évoque lui-même sa tristesse. Dans ce cas, la dépression est admise par l’intéressé et l’historien n’a plus à lire entre les lignes. En janvier 1916, après une fugue, une fillette de treize ans est replacée à Maison-Roland (Somme). Quelques jours plus tard, elle se confi e au directeur : « C’est que l’ennui qui me désole [sic] et je ne cesse de pleurer. Vu que l’ennui [sic] je crains de devenir malade. » En conclusion de sa lettre, elle demande seulement que le directeur lui réponde7. Paradoxalement, la souffrance morale s’accentue lorsqu’est projetée la remise à la famille. En 1917, une pupille de dix-huit ans se plaint auprès de son directeur : « Voilà six mois que ma famille me réclame et je suis toujours loin d’eux. […] Je veux revoir ma famille, je n’ai plus de goût à rien8. » Contrairement aux moralement abandonnés, souvent soulagés d’être éloignés de leur famille, et contrairement aux enfants abandonnés en bas âge, qui n’ont pas connu leurs parents, les enfants en dépôt sont constamment rappelés au souvenir de leur famille d’origine. En 1936, le directeur de l’agence d’Abbeville apprend qu’une jeune fille de quatorze ans fait des cauchemars ; elle « parle de sa mère qui lui écrit souvent et trouble ses esprits9 ». En mars 1915, un garçon est placé en dépôt pour toute la durée de la guerre par son père veuf et mobilisé. Après la victoire, le père mutilé ne veut pas reprendre son fils qui est donc immatriculé dans la catégorie des abandonnés. En 1920, le pupille se tourne vers sa sœur mariée demeurant à Puteaux : « J’ai des idées noires qui me parcourent la tête d’un moment à l’autre. […] Si je vois que je ne peux pas être déplacé, je me noie. » Il n’espère rien d’autre que de revenir avec elle. Avant de clore sa lettre, il demande à sa sœur d’embrasser son père pour lui et signe « ton frère qui t’aime et pense toujours à toi et à être déplacé10 ».
6La solitude conduit-elle les pupilles à la mort, comme le menace ce pupille de dix-sept ans ? En fait, on n’observe aucun suicide directement lié à l’abandon. Il n’en reste pas moins que la disparition des parents, les carences affectives et le sentiment de honte font vivement souffrir les enfants assistés. De fait, certaines affections, mal identifiées à l’époque, voire niées, peuvent être interprétées comme la traduction physique et palpable de souffrances psychologiques.
La traduction psychosomatique
7Pour mener à bien ce que les psychologues appellent des « recherches épidémiologiques d’intervention », qui consistent à évaluer les effets de l’abandon et du placement sur l’enfant, on s’intéressera à deux dysfonctionnements corporels : l’anorexie (parfois appelée « anémie » au début du xxe siècle) et l’énurésie (qualifiée d’ » incontinence » dans les rapports de la direction et de l’inspection).
8La plus belle description de la jeune fille chlorotique que nous ayons au xixe siècle est signée Balzac. Dans Pierrette, l’écrivain raconte les malheurs d’une petite orpheline placée à Provins chez des cousins merciers, les Rogron. Innocente, pieuse et pleine de bonté, l’enfant souffre dans son corps ; sa chlorose est due à la solitude et au chagrin, mais aussi aux mauvais traitements que lui inflige le couple :
- 11 Honoré De Balzac, Pierrette, dans La Comédie humaine, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiad (...)
« La blancheur excessive de sa figure trahissait une de ces horribles maladies de jeune fille à laquelle la médecine a donné le nom gracieux de chlorose, et qui prive le corps de ses couleurs naturelles, qui trouble l’appétit et annonce de grands désordres dans l’organisme. Ce ton de cire existait dans toute la carnation. Le cou et les épaules expliquaient par leur pâleur d’herbe étiolée la maigreur des bras jetés en avant et croisés. Les pieds de Pierrette paraissaient amollis, amoindris par la maladie. Sa chemise ne tombait qu’à mi-jambe et laissait voir des nerfs fatigués, des veines bleuâtres, une carnation appauvrie. Le froid qui l’atteignit lui rendit les lèvres d’un beau violet. […] Pierrette souffrait de bien des manières11. »
- 12 DASES, Charline Wauquiez, abandonnée, reconnue, née le 18 octobre 1882, admise le 4 juillet 1883 ( (...)
- 13 Archives de la Ville de Paris (AVP), EA 3464, Germaine Joute, abandonnée, non reconnue, née le 8 f (...)
- 14 DASES, Yvette Latrama, abandonnée, née le 25 juillet 1890, admise au début 1893 (à deux ans et dem (...)
- 15 DASES, Renée Gérart, abandonnée, non reconnue, née le 5 mars 1902, admise le 10 juin 1902 (à trois (...)
- 16 DASES, Micheline Favre, abandonnée, non reconnue, née le 5 mai 1922, admise le 8 septembre 1922 (à (...)
- 17 DASES, Mathilde Hautefontaine, abandonnée, reconnue, née le 16 juin 1922, admise le 14 mai 1923 (à (...)
9Sous la Troisième République, la chlorose est toujours la maladie des orphelines. En 1897, le directeur de l’agence de Romorantin juge qu’une pupille de quinze ans va « bien mais [qu’elle est] délicate ». Deux ans plus tard, elle est soignée à l’hôpital pour anémie12. À la même époque, une adolescente semble en bonne santé mais elle a « peu d’appétit ». En 1901, les médecins de l’hospice s’inquiètent de sa « chloro-anémie » et l’envoient à Berck. En 1903, à l’âge de vingt et un ans, elle est à nouveau traitée pour « anémie profonde », cette fois à l’Hôtel-Dieu13. En 1909, une jeune fille de dix-huit ans est « profondément anémique14 ». En 1916, une pupille de quatorze ans déjà maigre « devient anémique15 ». À l’âge de onze ans, une fillette accuse un « développement insuffisant [et] manque d’appétit ». En outre, elle perd ses cheveux. En 1938, à l’âge de seize ans, elle est fatiguée en raison de règles abondantes16. En février 1936, une patronne demande au directeur de passer voir sa pupille : « Malgré sa bonne volonté de vouloir travailler, [la jeune fille] n’en a pas la force. » « Extrêmement maigre », elle doit s’asseoir cinq à six fois pour essuyer la vaisselle17.
- 18 Vigny, Musset et Baudelaire ont tour à tour évoqué ces jeunes vierges pâles comme la mort. Plus pr (...)
10Cette liste de jeunes filles anémiées offre peut-être une version modernisée de la vierge chlorotique que le romantisme encensait au début du xixe siècle18. Cependant, les termes « profond » ou « extrême » indiquent que la maigreur paraît mettre en danger la santé, voire la vie de la jeune fille, et que le directeur s’en rend compte. De ce fait, elle entraîne souvent l’hospitalisation. Indépendamment de cette approche médicale, les fiches du directeur suggèrent qu’il ne s’agit pas d’abus de la part de patrons trop pingres : c’est la pupille qui « manque d’appétit ». D’ailleurs, les patrons s’inquiètent parfois eux-mêmes des troubles de leur servante. Faut-il en conclure que ces pupilles, à la suite de carences affectives, refusent de s’alimenter ? En effet, toutes ces jeunes filles trop maigres ont été abandonnées en bas âge, le plus souvent avant un an. Quoi qu’il en soit, le fait que ces troubles concernent exclusivement des adolescentes entre treize et vingt ans laisserait penser qu’on est en présence de formes plus ou moins aiguës d’anorexie.
- 19 On considère aujourd’hui que la fréquence de l’énurésie est élevée : elle touche 10 % des enfants, (...)
11L’énurésie, beaucoup plus répandue, touche les deux sexes et les pupilles plus jeunes. Certes, le contrôle sphinctérien est lié à la maturation du système nerveux ; c’est la raison pour laquelle personne n’attend d’un enfant de moins de deux ans qu’il soit propre. Mais le contrôle sphinctérien dépend aussi de l’environnement socio-éducatif de l’enfant et notamment des relations avec la mère, si bien qu’on peut considérer l’énurésie diurne après quatre ans comme un symptôme de troubles19. Or, dans les agences de l’Assistance publique, l’énurésie est très répandue. Il est aisé (pour l’administration comme pour l’historien) de la prendre en compte, car les nourrices se plaignent systématiquement de la surcharge de travail que ce trouble occasionne et les inspecteurs répercutent les doléances dans leurs rapports.
- 20 AVP, D1X4 43, agence de Dompierre, inspection de M. Thirault (novembre 1894), exercice 1893.
12En 1894, dans l’agence de Dompierre (Allier), l’inspecteur Thirault s’étonne de la « fréquence des incontinences d’urine, principalement chez de grands élèves », laissés à eux-mêmes sans traitement20. Dans les agences d’Abbeville et de Romorantin, les troubles du contrôle mictionnel affectent environ 10 % des pupilles sur l’ensemble de la période.
- 21 AVP, D1X4 31, agence de Romorantin, inspection de M. Aubry (mai 1882), exercice 1881.
- 22 AVP, D1X4 67, agence d’Abbeville, inspection de M. Jalabert (octobre 1910), exercice 1909.
- 23 DASES, Jules Desmarets, abandonné, reconnu, né le 27 mars 1902, admis le 12 avril 1902 (à deux sem (...)
- 24 DASES, Suzanne Mauret, abandonnée, née le 10 décembre 1884, admise le 20 décembre 1884 (à dix jour (...)
- 25 DASES, Catherine Ponge, abandonnée, non reconnue, née le 19 mai 1902, admise le 31 mai 1902 (à deu (...)
13Prise en charge par l’administration, l’énurésie donne lieu à la distribution de nombreuses pensions supplémentaires, voire extraordinaires pour les pupilles gagés. En 1881, l’Assistance publique accorde dans l’agence de Romorantin quarante-six pensions supplémentaires dont seize pour « incontinence ». Ce taux paraît à l’inspecteur « hors de proportion avec la réalité21 ». En 1909, l’agence d’Abbeville répartit treize pensions supplémentaires dont dix pour « incontinence22 ». En 1915, une nourrice de Vandenesse, dans l’agence de Moulins-Engilbert (Nièvre), touche une pension extraordinaire de vingt-deux francs par mois pour son pupille encore énurétique à treize ans23. Si l’administration n’accorde pas de pension supplémentaire ou extraordinaire, elle peut apporter une aide en nature. En 1898, le directeur de l’agence d’Abbeville sollicité par une nourrice lui donne « une toile en caoutchouc24 ». En avril 1904, une nourrice de Châtres demande des couches et des langes au directeur, car sa pupille (âgée de deux ans à peine) urine sur les autres : « Elle est toujours bien sale. […] C’est comme une enfant d’un an25. »
- 26 DASES, Caroline Loubry, abandonnée, légitime, née le 20 mars 1902, admise le 9 août 1904 (à deux a (...)
- 27 DASES, Aimé Frémont, en garde, né le 31 octobre 1902, admis le 1er octobre 1915 (à treize ans), ag (...)
- 28 DASES, Paul Felstin, moralement abandonné, légitime, né le 24 juin 1922, admis le 9 novembre 1932 (...)
14On peut établir une relation directe entre les troubles et les mauvais traitements subis par l’enfant. De 1910 à 1913, c’est-à-dire entre huit et onze ans, une fillette placée à Quend dans l’agence d’Abbeville souffre continûment d’ » incontinence d’urine », en conséquence de quoi l’administration lui achète un drap de caoutchouc. Or, à la même époque, le directeur s’aperçoit qu’elle est « mal tenue » et qu’elle « serait malheureuse dans son placement. […] [Elle] était envoyée à glaner aux champs. Le mari [de la nourrice] s’alcoolise et le grand-père aussi. Les gendarmes sont même venus. [Elle] fait le café le matin et le porte au lit aux nourriciers. [En outre, elle] arrive en retard en classe26 ». En février 1916, un garçon de treize ans, malingre, illettré et précocement initié au vol par ses parents, est « paresseux » et « affligé d’incontinence27 ». En 1933, un enfant martyr signalé depuis plusieurs années par les services sociaux est encore énurétique à l’âge de onze ans. Selon le directeur, ce trouble est attribuable à la paresse28.
- 29 P. Quincy-Lefebvre, Familles, institutions et déviances. Une histoire de l’enfance difficile (1880 (...)
- 30 DASES, Rémi Passavant, orphelin, légitime, né le 21 juin 1902, admis le 7 octobre 1909 (à sept ans (...)
- 31 DASES, Olivier Rist, abandonné, légitime, né le 4 janvier 1922, admis le 22 juillet 1930 (à huit a (...)
15L’énurésie, en effet, est perçue au xixe siècle et dans toute la première moitié du xxe siècle comme « un acte de mauvaise volonté, l’expression d’une fainéantise29 ». Elle est combattue par la culpabilisation et l’humiliation. Le « pissou » est taxé d’infantilisme, de saleté, de paresse et, s’il persiste, il peut être envoyé à l’asile. En 1912, une nourrice affirme que son pupille, un orphelin de dix ans, urine au lit « par vice30 ». En janvier 1931, un garçon de neuf ans abandonné quelques mois plus tôt et placé avec sa sœur à Hallencourt n’arrive pas à devenir propre. Sa nourrice, très mécontente, fait part de ses vains efforts au directeur : « J’ai employé toute la force possible pour le corriger, mais rien n’a réussi, je l’ai corrigé, mis au pain sec, puni en classe, je vois que tous mes efforts sont impossibles, il fait toujours dans sa culotte pour des raisons sans signification31. »
- 32 Archives départementales de la Somme, 3 X 76, Georges Puyez, moralement abandonné, né le 17 octobr (...)
- 33 DASES, Paulin Acheux, né le 1er septembre 1902, admis le 3 septembre 1902 (à deux jours), agence d (...)
16L’énurésie est aussi perçue comme une maladie. En 1910, à la faveur d’une tournée, l’inspecteur départemental de la Somme constate qu’un pupille moralement abandonné de douze ans est atteint d’ » incontinence d’urines diurne et nocturne ». Pourtant, l’enfant « paraît très bien soigné et proprement tenu. Il couche dans un bon lit dans la chambre de ses nourriciers ». Un médecin de Long examine le garçon et attribue son dysfonctionnement sphinctérien à une « faiblesse générale. Cet enfant est en effet chétif et d’un tempérament lymphatique ». Le praticien lui prescrit un sirop tonique32. En 1915, après s’être entichée d’un pupille de treize ans, une dame de la bonne bourgeoisie le rend parce qu’il mouille son lit : elle évoque « une maladie qu’a cet enfant » et craint que sa fille ne tombe malade à cause de lui33. En juillet 1930, une nourrice du Plessiel (Somme) donne au directeur des nouvelles de ses deux pupilles, un garçon de sept ans et sa petite sœur de cinq ans, retirés à leurs parents indignes : les enfants vont bien, mais « leur maladie est de pisser très souvent au lit ». Le directeur lui a bien dit de patienter et a même grondé les enfants, mais
« ça devient de pire en pire. […] Ils m’ont pourri un matelas, et lorsqu’ils sont couchés ils n’ont même pas le courage de descendre en bas, ils font tout sur le parquet, je suis forcée de les changer deux et des fois trois fois de linge par semaine. Je les ai pris par toutes les manières, bonnes paroles, punitions, rien n’y fait. Je me rends malade après eux. […] La fille a ses culottes pourries à force d’uriner dedans. »
- 34 DASES, Iris Donrémy, abandonnée, légitime, née le 12 septembre 1922, admise le 8 octobre 1928 (à s (...)
17Les enfants sont déplacés et confiés à une nourrice de Beaumetz34. Qu’elle soit imputée à la paresse, au vice ou à la maladie, l’énurésie constitue un trouble infantile qu’on comprend mal sous la Troisième République. En tout état de cause, elle justifie souvent le renvoi de l’enfant.
18La surreprésentation des garçons parmi les pupilles énurétiques pourrait laisser croire que l’abandon a peu d’incidence en matière de dysfonctionnements sphinctériens ; mais, à la fi n du xixe siècle, près de 15 % des mineurs confiés à l’Assistance publique de la Seine sont concernés, souvent après six ans, parfois même après l’âge de la puberté. Parmi les énurétiques, on rencontre beaucoup d’enfants admis récemment dans le service et beaucoup d’enfants maltraités, soit par leurs parents déchus, soit par leurs nourriciers, de telle sorte qu’on est tenté de valider l’hypothèse selon laquelle l’énurésie à un âge avancé reflète des troubles psychologiques liés à l’abandon et au placement. Or l’Assistance publique comprend mal cette réalité.
L’« anormalité de caractère »
- 35 A. Bodin, Les Pupilles de l’Assistance publique difficiles ou vicieux (loi du 28 juin 1904), thèse (...)
- 36 D.-M. Bourneville, Histoire de la section des enfants de Bicêtre, Paris, Bureaux du progrès médica (...)
- 37 « La turbulence de l’enfant constitue une plainte fréquente des parents, souvent partagée par les (...)
19L’administration recense scrupuleusement les cas d’enfants « difficiles » (qu’ils soient fugueurs, délinquants, épileptiques, hystériques ou instables) parce qu’elle leur réserve un traitement particulier. La loi du 28 juin 1904 prévoit en effet que les « pupilles vicieux » seront confiés à des établissements spécialisés ou à des maisons de correction35. Mais, sous un autre angle, on peut considérer que le « vice » ou la « turbulence » pointés du doigt par les directeurs, les nourrices et les instituteurs désignent une forme d’hyperactivité. Cette instabilité psychomotrice infantile, qui se traduit notamment par un refus de l’autorité et une mauvaise scolarisation, a été décrite à la fi n du xixe siècle par Désiré-Magloire Bourneville qui en faisait une preuve de débilité mentale légère36. Pour notre part, nous considérerons l’hyperactivité comme le symptôme d’un désordre psychique37.
- 38 DASES, Michel Litte, abandonné, reconnu, né le 12 mars 1903, admis le 20 juin 1905 (à deux ans), a (...)
- 39 DASES, Arnaud Devanlet, abandonné, reconnu, né le 30 janvier 1922, admis le 3 mars 1931 (à neuf an (...)
- 40 DASES, Dominique Moncel, abandonné, né le 10 mai 1896, admis le 20 mai 1896 (à dix jours), agence (...)
- 41 Archives départementales du Loir-et-Cher, 3 X 109, Paul Pouyer, moralement abandonné, légitime, né (...)
20À l’Assistance publique, les nourrices sont les premières à se plaindre d’un enfant instable. Entre 1909 et 1914, une nourrice de l’agence de Romorantin menace plusieurs fois de rendre un garçon « turbulent et tapageur38 ». Rapidement, l’instituteur se joint à la nourrice pour signaler le comportement anormal de l’enfant. En 1931, un garçon de neuf ans, dont la mère est internée, épuise tous les adultes qui essaient de le prendre en charge. Sa nourrice rapporte au directeur qu’ » il déroute tous les élèves par ses folies, il se frappe la tête sur la table, il court partout dans la classe et il répond très malhonnêtement à l’instituteur et chez moi c’est la même chose. […] Je pense que par moments il a le cerveau dérangé39 ». S’ajoutent à la liste des perturbations infantiles toutes les conduites jugées extravagantes. Entre 1905 et 1907, un pupille d’une dizaine d’années est signalé au directeur parce qu’il est insolent, vole du sucre et essaye de s’étrangler avec sa cravate à l’école40. En juin 1936, l’inspecteur départemental du Loir-et-Cher déclare qu’un garçon moralement abandonné de huit ans est « maniaque : [il] mange du foin41 ».
- 42 DASES, Aimée Charquet, abandonnée, non reconnue, née le 21 décembre 1882, admise le 3 janvier 1883 (...)
- 43 DASES, Frédéric Gâche, orphelin, reconnu, né le 20 mars 1902, admis le 9 février 1911 (à huit ans (...)
- 44 DASES, Michel Parent, en dépôt, né le 9 avril 1922, admis le 15 octobre 1934 (à douze ans et demi) (...)
- 45 DASES, Michelle Koutchy, abandonnée, légitime, née le 24 juin 1922, admise le 4 avril 1930 (à sept (...)
21L’épilepsie est une maladie chronique, due à des décharges du système central nerveux et caractérisée par la répétition de crises convulsives. Le « mal sacré » inquiète l’administration, qui le diagnostique mal et ne sait pas si elle doit l’attribuer à l’hérédité familiale ou à une maladie mentale. En novembre 1898, une jeune fille de seize ans rétive à tout soin est admise à l’hôpital : « Pour bronchite et épilepsie ? », demande le directeur42. En 1914, un orphelin de douze ans insuffisamment développé souffre de « crises nerveuses », probablement épileptiques43. Dans l’entre-deux-guerres, les médecins sont plus assurés dans leur dépistage. En 1934, à la suite de l’internement de son père, un garçon de douze ans est placé en dépôt. L’année suivante, le médecin diagnostique des crises d’épilepsie avec de légers troubles psychiques. L’Institut médico-pédagogique d’Armentières accepte de prendre l’enfant pour lui prodiguer des soins spéciaux44. En 1930, une mère internée à l’asile de la Maison-Blanche et souffrant de « débilité foncière, [d’]alcoolisme [et de] crises épileptiques », est contrainte d’abandonner sa fillette de sept ans. À la majorité de celle-ci, en septembre 1943, le directeur trouve qu’elle a un « tempérament nerveux, sujet aux syncopes45 ».
22Si leur anormalité ne relève pas de la gendarmerie ou de la justice, les pupilles qui posent problème sont taxés d’arriération mentale. De la part de l’Assistance publique, cette accusation trahit généralement une impuissance éducative. Le cas de Jean Genet est emblématique de cette incompréhension. En octobre 1924, après une brillante scolarité à Alligny-en-Morvan, Genet est envoyé à l’école professionnelle D’Alembert, grâce à laquelle il échappe aux placements dans les fermes. Or, un mois plus tard, Genet s’enfuit et commence une vie errante. Consternée par ce qu’elle considère comme un immense gâchis, l’Assistance publique met ce comportement sur le compte de l’instabilité mentale. La première mention du « dérangement » de l’enfant remonte à octobre 1925. D’après son patron et le directeur de l’hospice dépositaire, Genet « donne depuis quelques temps des signes de dérangement cérébral et se livre fréquemment à des manifestations incompréhensibles ». Le garçon, âgé de quinze ans, est alors placé en observation en même temps qu’une pupille de l’agence de Toucy. Le docteur Roubinovitch, chargé de la consultation des « enfants arriérés et anormaux au dispensaire de prophylaxie mentale » à l’asile Sainte-Anne, examine Genet et rend son verdict le 5 novembre 1925 :
« Le jeune Genet Jean âgé de quinze ans présente en effet un certain degré de débilité et d’instabilité mentales qui nécessitent une surveillance spéciale. Avant de prendre une mesure aussi importante que l’internement dans un asile spécial, j’estime qu’on doit essayer au préalable de confier ce garçon à un patronage comme celui de la rue de Vaugirard, 379, XVe [le Patronage de l’enfance et de l’adolescence, dit Patronage Rollet]. »
- 46 DASES, Jean Genet, abandonné, non reconnu, né le 19 décembre 1910, admis le 28 juillet 1911 (à sep (...)
23Le lendemain, le directeur de l’hospice dépositaire informe sa hiérarchie que Genet « présente depuis quelque temps des signes de débilité mentale et n’a pu rester dans son placement ». Sur les conseils de Roubinovitch, le directeur de l’hospice dépositaire confie Genet (et sa camarade de l’agence de Toucy) à l’Institut neuropsychiatrique dépendant du Patronage de l’enfance et de l’adolescence46.
24Si Genet fut qualifié d’arriéré et menacé de l’asile, c’est pour s’être soustrait aux normes de sa tutrice légale, l’Assistance publique, et pour avoir refusé la voie qu’elle lui proposait : une formation professionnelle à l’école D’Alembert et, au-delà, une vie de labeur dans l’artisanat qualifié. La seule explication que l’Assistance publique a avancé pour rendre compte du cas Genet (c’est-à-dire la manie du vagabondage chez un enfant brillant et doux ou, pour le dire autrement, le refus du modèle par un pupille modèle), c’est la déficience mentale.
25L’absence des parents fragilise l’équilibre psychologique des enfants. Malgré la parenté nouvelle que les pupilles peuvent établir au sein de leur famille d’accueil, l’abandon a une traduction psychologique et psychosomatique durable. Quatre facteurs concourent à approfondir la détresse morale des enfants abandonnés : la séparation proprement dite, les carences affectives ressenties lors du placement familial, les préjugés qui forgent aux enfants une réputation infamante et l’aveuglement de l’administration. Anorexie, énurésie, crises d’épilepsie, hyperactivité, états dépressifs et fugues révèlent des souffrances psychologiques que l’administration est incapable de dépister, de comprendre et, a fortiori, de prendre en charge. Il est pourtant important de noter que la souffrance est tout aussi intense lorsque le pupille est séparé de ses nourriciers, soit qu’il parte pour être gagé à treize ans, soit qu’une cause accidentelle l’éloigne du pays où il a grandi. Mais, aussi affectueux et stable que soit le placement, aussi dévoué que soit le directeur d’agence, l’abandon reste une épreuve traumatisante : être un enfant de l’Assistance publique sous la Troisième République, c’est subir, à l’état paroxystique, une souffrance morale et sociale.
Notes
1 G. Gaspart, Vie du pitau : enfant né au départ moins que rien : matricule 198 437, Nantes, éditions du Petit Véhicule, 1992, p. 40.
2 R. Spitz, « Anaclitic depression », dans Psychoanalytic Study of the Child, 1946, tome I, p. 313-341. Voir également J. Bowlby, Attachement et perte, tome II, « La séparation », PUF, 1978, et tome III, « La perte, tristesse et dépression », PUF, 1984 ; ainsi que P. Mazet, « La dépression du nourrisson. Modèle théorique ou modèle expérimental ? », dans M. Dugas (dir.), Dépression chez l’enfant, théories et réalités, Paris, éd. Médecine et Enfance, 1985, p. 23-34.
3 Direction de l’action sociale, de l’enfance et de la santé (DASES) de la mairie de Paris, Jeannette Sombart, abandonnée, non reconnue, née le 15 décembre 1902, admise le 2 janvier 1903 (à deux semaines), agence de Romorantin. Tous les noms et prénoms utilisés dans cet article sont des pseudonymes, excepté dans le cas de Jean Genet.
4 DASES, Laurent Fissel, abandonné, non reconnu, né le 30 mars 1902, admis le 31 mars 1902 (à un jour), agence de Romorantin.
5 DASES, Suzette Harewitz, abandonnée, née le 20 juin 1902, admise le 2 novembre 1903 (à un an), agence de Romorantin.
6 DASES, Marie Xavier, abandonnée, légitime, née le 15 mars 1902, admise le 21 mai 1902 (à deux mois), agence de Romorantin.
7 DASES, Coralie Mingant, abandonnée, reconnue, née le 4 novembre 1902, admise le 15 juin 1911 (à huit ans et demi), agence d’Abbeville.
8 DASES, Perrine Vivian, abandonnée, née le 21 février 1899, admise en avril 1909 (à dix ans), agence d’Abbeville.
9 DASES, Catherine Bienne, en dépôt, née le 6 octobre 1922, admise le 10 septembre 1935 (à treize ans), agence d’Abbeville.
10 DASES, Benjamin Joncour, abandonné, légitime, né le 30 mars 1903, admis le 29 mars 1915 (à douze ans), agence de Romorantin.
11 Honoré De Balzac, Pierrette, dans La Comédie humaine, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », tome IV, 1976 [1840], p. 36. Les Rogron, qui ont fait fortune, ont accueilli Pierrette par calcul et pour meubler leur solitude. La fi llette finit par mourir.
12 DASES, Charline Wauquiez, abandonnée, reconnue, née le 18 octobre 1882, admise le 4 juillet 1883 (à sept mois), agence de Romorantin.
13 Archives de la Ville de Paris (AVP), EA 3464, Germaine Joute, abandonnée, non reconnue, née le 8 février 1882, admise le 22 février 1882 (à deux semaines), agence d’Abbeville.
14 DASES, Yvette Latrama, abandonnée, née le 25 juillet 1890, admise au début 1893 (à deux ans et demi), agence de Romorantin.
15 DASES, Renée Gérart, abandonnée, non reconnue, née le 5 mars 1902, admise le 10 juin 1902 (à trois mois), agence de Romorantin.
16 DASES, Micheline Favre, abandonnée, non reconnue, née le 5 mai 1922, admise le 8 septembre 1922 (à quatre mois), agence de Romorantin.
17 DASES, Mathilde Hautefontaine, abandonnée, reconnue, née le 16 juin 1922, admise le 14 mai 1923 (à onze mois), agence de Romorantin.
18 Vigny, Musset et Baudelaire ont tour à tour évoqué ces jeunes vierges pâles comme la mort. Plus prosaïques, les médecins ont essayé de soumettre les malades à un régime diétético-hygiénique ou à des traitements à base de fer, de zinc et de phosphore (voir par exemple R. Moriez, La Chlorose, thèse de la faculté de médecine de Paris, Masson, 1880, p. 145 et suiv.). Sur les jeunes filles anorexiques, voir J.-J. Brumberg, Fasting Girls. The History of Anorexia Nervosa, Cambridge, Harvard University Press, 1988.
19 On considère aujourd’hui que la fréquence de l’énurésie est élevée : elle touche 10 % des enfants, et davantage les garçons que les filles. Elle constitue « un motif de consultation fréquent en pédiatrie et en pédopsychiatrie », note Pierre Ferrari dans « Troubles du contrôle sphinctérien », dans P. Ferrari et C. Epelbaum, Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Flammarion médecine-sciences, 1993, p. 75.
20 AVP, D1X4 43, agence de Dompierre, inspection de M. Thirault (novembre 1894), exercice 1893.
21 AVP, D1X4 31, agence de Romorantin, inspection de M. Aubry (mai 1882), exercice 1881.
22 AVP, D1X4 67, agence d’Abbeville, inspection de M. Jalabert (octobre 1910), exercice 1909.
23 DASES, Jules Desmarets, abandonné, reconnu, né le 27 mars 1902, admis le 12 avril 1902 (à deux semaines), agence de Romorantin.
24 DASES, Suzanne Mauret, abandonnée, née le 10 décembre 1884, admise le 20 décembre 1884 (à dix jours), agence d’Abbeville.
25 DASES, Catherine Ponge, abandonnée, non reconnue, née le 19 mai 1902, admise le 31 mai 1902 (à deux semaines), agence de Romorantin.
26 DASES, Caroline Loubry, abandonnée, légitime, née le 20 mars 1902, admise le 9 août 1904 (à deux ans et demi), agence d’Abbeville.
27 DASES, Aimé Frémont, en garde, né le 31 octobre 1902, admis le 1er octobre 1915 (à treize ans), agence de Romorantin.
28 DASES, Paul Felstin, moralement abandonné, légitime, né le 24 juin 1922, admis le 9 novembre 1932 (à dix ans), agence d’Abbeville.
29 P. Quincy-Lefebvre, Familles, institutions et déviances. Une histoire de l’enfance difficile (1880-fi n des années trente), Paris, Economica, 1997, p. 76.
30 DASES, Rémi Passavant, orphelin, légitime, né le 21 juin 1902, admis le 7 octobre 1909 (à sept ans), agence d’Abbeville. Le pupille souffre d’énurésie de 1910 à 1917.
31 DASES, Olivier Rist, abandonné, légitime, né le 4 janvier 1922, admis le 22 juillet 1930 (à huit ans et demi), agence d’Abbeville.
32 Archives départementales de la Somme, 3 X 76, Georges Puyez, moralement abandonné, né le 17 octobre 1898, admis en novembre 1908 (à dix ans).
33 DASES, Paulin Acheux, né le 1er septembre 1902, admis le 3 septembre 1902 (à deux jours), agence de Doullens.
34 DASES, Iris Donrémy, abandonnée, légitime, née le 12 septembre 1922, admise le 8 octobre 1928 (à six ans), agence d’Abbeville. Il s’agit de son frère et de sa sœur.
35 A. Bodin, Les Pupilles de l’Assistance publique difficiles ou vicieux (loi du 28 juin 1904), thèse de la Faculté de droit de l’université de Rennes, Laval, Barnéoud, 1913.
36 D.-M. Bourneville, Histoire de la section des enfants de Bicêtre, Paris, Bureaux du progrès médical, Battaille, 1892.
37 « La turbulence de l’enfant constitue une plainte fréquente des parents, souvent partagée par les enseignants », écrit Christian Mille dans « Instabilité psychomotrice », dans P. Ferrari et C. Epelbaum, Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, op. cit., p. 203.
38 DASES, Michel Litte, abandonné, reconnu, né le 12 mars 1903, admis le 20 juin 1905 (à deux ans), agence de Romorantin.
39 DASES, Arnaud Devanlet, abandonné, reconnu, né le 30 janvier 1922, admis le 3 mars 1931 (à neuf ans), agence d’Abbeville.
40 DASES, Dominique Moncel, abandonné, né le 10 mai 1896, admis le 20 mai 1896 (à dix jours), agence de Doullens.
41 Archives départementales du Loir-et-Cher, 3 X 109, Paul Pouyer, moralement abandonné, légitime, né le 14 juin 1928, admis vers 1933 (vers cinq ans).
42 DASES, Aimée Charquet, abandonnée, non reconnue, née le 21 décembre 1882, admise le 3 janvier 1883 (à deux semaines), agence de Romorantin.
43 DASES, Frédéric Gâche, orphelin, reconnu, né le 20 mars 1902, admis le 9 février 1911 (à huit ans et demi), agence de Romorantin.
44 DASES, Michel Parent, en dépôt, né le 9 avril 1922, admis le 15 octobre 1934 (à douze ans et demi), agence d’Abbeville.
45 DASES, Michelle Koutchy, abandonnée, légitime, née le 24 juin 1922, admise le 4 avril 1930 (à sept ans et demi), agence d’Abbeville.
46 DASES, Jean Genet, abandonné, non reconnu, né le 19 décembre 1910, admis le 28 juillet 1911 (à sept mois), agence de Saulieu.
© Presses universitaires de Rennes, 2007