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Ports et littoraux de l'Europe atlantique

 | 
Michel Bochaca
, 
Jean-Luc Sarrazin

Introduction

Michel Bochaca et Jean-Luc Sarrazin

Entrées d'index

Géographique :

France

Texte intégral

1Le présent recueil d’articles rassemble treize communications présentées lors du séminaire d’histoire économique et maritime qui s’est tenu à l’université de La Rochelle le 24 juin 2005. Cette rencontre a été organisée dans le cadre des échanges noués depuis 2004 entre les enseignants chercheurs, les chercheurs et les doctorants médiévistes de deux équipes : OTELO (Organisation des Territoires et Environnement dans les Espaces Littoraux et Océaniques – JE 2433) et le CRHIA (Centre de Recherche en Histoire Internationale et Atlantique – EA 1163). Elle avait aussi pour objectif de jeter les bases d’un groupe de recherche international sur les ports et les littoraux médiévaux de l’Europe atlantique qui, au-delà des universités de Nantes et de La Rochelle, pouvait compter avec la collaboration de chercheurs d’autres universités, tant françaises (université d’Artois) qu’espagnoles (universidad de Cantabria), portugaises (universidade Nova de Lisboa, universidade Portucalence Infante D. Henrique) et néerlandaises (université de Leyde).

2La thématique proposée invitait les participants à réfléchir sur les évolutions naturelles et les transformations humaines que les sites portuaires et les secteurs littoraux qui leur sont proches ont connues entre la fi n du Moyen Âge et le début de l’époque moderne. Le choix de la séquence chronologique, tout en brisant le cloisonnement habituel entre grandes périodes historiques, dénué de sens sur ce sujet, répondait au souci de disposer d’une documentation suffisamment abondante et précise entre un Moyen Âge finissant et l’aube des Temps moderne. Après l’ » optimum climatique » des xie-xiiie siècles, les xive, xve et xvie siècles connaissent des accidents climatologiques violents qui marquent l’entrée de l’Europe dans un « petit âge glaciaire ». Les contemporains ont été frappés par les manifestations les plus extrêmes, tels les « vimaires » de mer et les « volements » de sables. Des transformations insidieuses, car lentes et progressives, comme le comblement des baies par les alluvions ou l’ensablement des estuaires, ont modifié la physionomie du littoral et compromis les activités traditionnelles liées à la mer (saliculture, pêche, navigation). Si les historiens ont prêté une attention particulière à la conquête et à l’aménagement des littoraux au cours du Moyen Âge central, leur effort s’est relâché pour les siècles immédiatement postérieurs.

3La décision de cantonner l’étude à trois siècles, au risque de perdre la référence du temps long essentielle à la compréhension des évolutions, s’explique certes par l’état actuel de la recherche, mais aussi par la nature des sources mobilisables selon les périodes. La connaissance du trait de côte entre la Protohistoire et la fin de l’Antiquité a progressé grâce aux apports de l’archéologie. Des textes de plus en plus nombreux et précis, complétés par les relevés cartographiques à partir du xviie siècle, ont permis une analyse poussée de l’évolution de certains secteurs littoraux depuis l’époque moderne jusqu’à nos jours, où les moyens d’observation aériens puis satellitaires ouvrent des perspectives incomparables. C’est donc dans un « entre-deux documentaire » que nous avons pris le risque de nous situer, sachant à l’avance qu’il nous faudrait nous accommoder de sources écrites limitées en nombre et livrant au mieux des informations fragmentaires et dispersées.

4Le propos initial était de saisir l’action des agents naturels (mer, eaux fluviales, vent) en termes d’érosion et de transport de matériaux (alluvionnement et ensablement dus aux écoulements fluviaux et aux courants marins, épandage et accumulation de dépôts éoliens), afin de mesurer leurs effets sur les sites portuaires stricto sensu et, plus largement, sur les portions de littoraux qui en commandaient les accès. Il s’agissait aussi de voir dans quelle mesure les groupes humains avaient cherché à se prémunir de ces transformations, voire à les combattre lorsqu’elles mettaient en péril leurs activités. Afin d’éviter de verser dans le déterminisme géographique, la démarche se voulait dialectique. Il fallait également prendre en compte l’action de l’homme sur le milieu naturel. Des aménagements (digues, quais, perrés), destinés à améliorer les installations portuaires, ont pu à leur tour déclencher ou accélérer des évolutions naturelles (surcreusement ou colmatage de certains sites). Lorsque des travaux ont été entrepris pour assurer la pérennité des activités menacées (maintien en eau des zones de mouillage et des chenaux d’accès, protection contre les houles et les courants marins, lutte contre les divagations d’un cours d’eau), quels furent les choix techniques retenus et les moyens employés, et avec quels résultats ? Comment ces ouvrages ont-ils ensuite résisté à l’usure du temps ? Quand les travaux se sont avérés vains ou impossibles à réaliser d’un point de vue technique ou financier, quelles ont été les solutions de rechange adoptées ? On peut penser au transfert des installations portuaires vers des avant-ports ou à l’abandon des anciens sites au profit de nouveaux emplacements. Dans ce cas, comment les autorités et les populations ont-elles réagi face à la perte d’activité des ports déchus et à la menace d’asphyxie économique ?

5Il avait été convenu que, en fonction des sources disponibles et des centres d’intérêt de chacun, les intervenants aborderaient tout ou partie des aspects de la question, soit par l’étude de cas concrets ayant valeur d’exemple, soit dans une perspective comparative à l’échelle d’une portion de littoral plus ou moins vaste. Au fil des présentations, le comblement des ports et de leurs accès par envasement ou ensablement est apparu comme l’une des principales transformations naturelles. Limitées par la faiblesse des moyens techniques et financiers, les solutions apportées passèrent presque toujours par des aménagements modestes et fragiles mais néanmoins coûteux à construire et à entretenir. Il était donc difficile de mettre les communications en forme autour d’une problématique articulée en thèmes nettement individualisés. Nous avons opté pour un tour d’horizon géographique qui, à partir des ports et des littoraux français du golfe de Gascogne, nous conduira sur le pourtour de la péninsule Ibérique, du littoral septentrional de la Castille à celui de la Basse Andalousie, en passant par le Portugal, avant de remonter vers la Flandre et les anciens Pays-Bas « à droite décharge » pour paraphraser une formule maritime de l’époque. Ce panorama des transformations des littoraux de l’Europe atlantique entre le xive et le xvie siècle est sans nul doute très incomplet. Il reflète l’état des forces que nous avons pu mobiliser autour du projet. Que tous ceux qui nous ont accompagné et appuyé dans cette entreprise trouvent ici exprimés nos remerciements.

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