Les finances royales dans la monarchie espagnole
|Quatrième partie. La négociation avec les contribuables
Chapitre XIX. Des finances royales aux finances publiques : le contribuable et l’administration dans le nouvel ordre fiscal (1833-1852)
Texte intégral
1Au cours du règne de Charles IV (1788-1808), les mécanismes traditionnels de recouvrement et de gestion des finances royales se révèlent définitivement insuffisants pour soutenir les dépenses qu’impose la politique extérieure, en particulier les guerres que la nouvelle situation internationale créée par la Révolution française a provoquées. La monarchie est au bord de la banqueroute, surtout après que la perte de la flotte à Trafalgar (1805), l’invasion française de la Péninsule (1808) et la rébellion des colonies américaines (1810) ont interrompu le commerce d’outre-mer et l’arrivée de ressources tirées de l’Empire. Sans ces ressources, les finances royales en sont réduites à quelques recettes fiscales obsolètes, peu rentables, que l’on continue de percevoir sur le territoire appauvri de l’Espagne péninsulaire et de ses « îles adjacentes ». Les mécanismes d’obtention de ressources que conserve la monarchie sont de toute évidence insuffisants, même pour financer un État minimal qui ne développe guère de politique extérieure, comme le montre l’endettement croissant des finances royales.
Le modèle
- 1 Constitución política de la Monarquía española, 19 mars 1812.
2La solution proprement libérale, une fois abandonné le mythe de la contribution unique – qui a longtemps fasciné tous ceux qui rêvaient d’une réforme fiscale – est de nationaliser les finances. En d’autres termes, éliminer tout impôt non étatique, tout en unifiant les recettes fiscales en vigueur sur tout le territoire de ce que l’on commence à appeler la Nation. Les Cortès de Cadix fixent le programme de cette réforme alors que l’invasion française a provoqué l’effondrement de la monarchie, la rébellion des colonies et l’interruption du recouvrement régulier des impôts, désarticulant les mécanismes de perception et l’administration des finances royales. Il faut abolir les charges seigneuriales, créer une Contribution Directe étendue à tout le territoire national et aux citoyens de tout rang, et donner une assise constitutionnelle à des principes tels que la légalité, l’universalité et le caractère proportionnel des contributions (art. 339) 1.
- 2 Constitución política de la Monarquía española, 19 mars 1812.
3Le document public qui doit concrétiser ces principes financiers est le budget, norme légale qui chaque année formalisera le lien financier entre gouvernants et gouvernés, sous le contrôle de la représentation nationale. La Constitution de Cadix est le premier texte légal européen à faire mention d’un budget, puisqu’elle établit : « Les Secrétaires des Dépêches prépareront les budgets annuels des dépenses de l’administration publique que l’on jugera nécessaire de faire dans leurs départements respectifs » (art. 227) ; « Les facultés des Cortès sont : […] Fixer les dépenses de l’administration publique […]. Établir les contributions et impôts chaque année » (art. 131) 2. Cette prévision constitutionnelle s’applique pour la première fois lors de la présentation du budget de 1814. L’annulation postérieure de l’œuvre législative des Cortès, lors de la Restauration de Ferdinand VII, met un terme à l’institution du budget.
4Les difficultés pratiques et les résistances suscitées par ce modèle fiscal en retardent l’implantation et en modifient le contenu, affecté par des renoncements successifs, tant pendant la guerre d’Indépendance (1808-1814) que pendant le Trieno liberal (1820-1823) et les régences du début du règne d’Isabelle II (1833-1843). Mais malgré ces difficultés, le programme fiscal des premiers libéraux demeure une référence jusqu’au milieu du xixe siècle et inspire les traits fondamentaux des finances publiques espagnoles jusqu’aux premières décennies du xxe. Ce programme financier libéral tient en quatre points :
- Élimination complète de tout impôt non étatique, en donnant aux finances de l’État le monopole du droit d’exiger des contributions.
- Renforcement des contributions directes, véritable pilier de l’édifice des finances d’un État constitutionnel, en mettant en pratique le principe de proportionnalité entre la richesse des citoyens et la charge financière qu’on leur imposera.
- Création d’un espace économique et financier unifié dans toute la nation, qui passe par l’élimination des douanes intérieures et l’unification des figures fiscales en vigueur sur le territoire national (seules les colonies d’outre-mer – Cuba, Porto Rico et les Philippines – devant rester séparées).
- Création d’une administration financière centralisée propre à l’État qui, renonçant aux intermédiaires et aux négociations, établira une relation directe avec les contribuables, leur imposant leur obligation fiscale comme un des éléments du lien politique qui doit exister entre chaque citoyen et le gouvernement de la Nation.
5Tous ces objectifs posent des difficultés spécifiques et suscitent des résistances. Ainsi, alors que les deux premiers sont atteints au début des années 1840, on finit par juger les deux autres inaccessibles et les libéraux de la décennie modérée (1844-1854) acceptent des compromis qui dénaturent ces objectifs. À cette époque, en effet, les temps ont changé par rapport au moment « révolutionnaire » de 1808-1823. Les libéraux conservateurs du règne d’Isabelle II pensent en d’autres termes, moins préoccupés par la pureté idéologique des principes que par leur objectif primordial : la construction et la consolidation en Espagne d’un État qui puisse remplir le vide laissé par l’effondrement de la monarchie d’Ancien Régime et garantir l’ordre.
6C’est pourquoi le sens des réformes financières et de la politique fiscale change peu à peu : elles visent moins à définir un citoyen contribuable à partir des principes d’équité et de justice fiscale qu’à surmonter la faillite financière de l’État, dotant ce dernier de finances capables d’obtenir les ressources qui lui permettront de renforcer le contrôle du territoire, développer une administration publique et asseoir son pouvoir. Au terme de ce processus, les anciennes Finances Royales se trouveront transformées en Finances Publiques. La référence linguistique au souvenir du lien ancien avec le monarque aura même disparu, une fois pleinement établis les mécanismes institutionnels et bureaucratiques nécessaires au fonctionnement autonome et impersonnel d’une construction financière au service de l’État et de son expansion.
- 3 Real Academia Española : 1817, 1837, 1843 et 1852.
7Cette évolution apparaît nettement quand on compare les définitions successives du dictionnaire de l’académie royale de la Langue. En 1837, il conserve encore la définition ambiguë adoptée en 1817, qui fait des Finances Royales les « biens de la Couronne ou de l’État », indistinctement, jugeant équivalents les concepts latins de pecunia publica et de fiscus regius. En 1843, sans modifier la définition, le titre ajoute à Finances Royales la mention « ou Finances Publiques ». En 1852, ce double titre est maintenu mais la définition est simplifiée, toute référence à l’ancienne relation entre Finances et Couronne disparaissant : désormais, les Finances Royales ou Finances Publiques sont les « rentes de l’État 3 ». Les rentes, non les biens, comme dans les définitions antérieures : on renonce ainsi non seulement à la tutelle de la Couronne sur l’appareil financier mais aussi à la conception patrimoniale de ce dernier comme un ensemble de biens propres. C’est maintenant un ensemble de recettes destinées à supporter les dépenses correspondantes.
- 4 Luis : 2002, p. 230-236.
8La construction de l’État national et la définition de finances publiques sont toutefois freinées par la confrontation entre absolutistes et libéraux et les changements de régime qui en résultent entre 1808 et 1833. On observera cependant que dès le règne de Ferdinand VII, malgré les préjugés idéologiques et les limitations qu’impose la monarchie absolue, la nécessité urgente d’assainir les finances royales amène à introduire d’importantes mesures rationalisatrices. Signalons le projet avorté de contribution générale de Martín de Garay (1817-1818) et les réformes mises en place par Luis López Ballesteros pendant son long séjour à la tête du secrétariat aux Finances (1812-1832) 4.
Transition et révolution
9La mort de Ferdinand VII, en 1833, ouvre une période de transition vers un régime de monarchie constitutionnelle dont le moteur fondamental est la faillite des finances de l’Ancien Régime. Il faut attendre l’arrivée au pouvoir des libéraux les plus avancés, réunis au sein du parti progressiste en 1836, pour voir le changement atteindre le domaine des finances. Cependant, au cours des trois années précédentes, des pas importants ont été faits : la continuité avec les réformes modernisatrices de López Ballesteros est claire, mais les obstacles juridiques et idéologiques qu’imposaient les principes de la monarchie absolue ont été levés. Le modèle de gestion des finances est à présent inspiré par les principes d’uniformité, de rationalité bureaucratique et de centralisation, qui constituent l’ethos auquel obéit la construction de toute l’administration du nouvel État.
Parler un nouveau langage
- 5 Burgueño : 1996, p. 95-166.
- 6 Sur le ministère dit du Fomento : Luis : 2003, p. 237.
10En 1833, le réseau des intendants est adapté à la nouvelle division provinciale du territoire espagnol approuvée par le premier gouvernement de la régente Marie-Christine, matérialisation de principes et projets lancés par les libéraux de 1810-1814 et 1820-1823, réélaborés et mûris sous la dernière administration absolutiste 5. Par la suite, toute relation des finances étatiques avec les contribuables et les ressources dispersées sur le territoire sera gérée dans le cadre de ces 49 provinces. Dans la capitale de chacune d’entre elles, l’intendant est à la tête d’une administration provinciale des finances. Une structure similaire sera implantée dans les autres branches de l’administration, par le biais d’une autre figure administrative : les subdelegados de Fomento (représentants du ministère de l’Intérieur dans les provinces) 6.
- 7 DR du 24 mars 1834.
- 8 DR du 16 juin 1834.
- 9 DR du 13 septembre 1835.
- 10 Garriga : 2002.
11Le Conseil des finances, héritier d’un système financier marqué par la tradition, la judicialisation et l’inefficacité, est aboli en même temps que les autres Conseils de la monarchie 7. À sa place, un ministère des Finances réorganisé – comme les autres – en 1834 est placé au sommet des finances publiques 8. Un an plus tard, la juridiction spéciale des finances disparaît, les questions financières relevant maintenant du tribunal suprême 9. Ces mesures illustrent le triomphe final de la logique de gouvernement face à celle de la juridiction : les contradictions et le blocage auxquels étaient confrontées les institutions de la monarchie sont ainsi surmontés, tandis que se crée un espace propre de l’Administration au service du Gouvernement 10. C’est dans le domaine des Finances que cette nouvelle logique administrative et gouvernementale se développe d’abord et plus largement qu’ailleurs, peut-être parce que la pression de la nécessité y est plus forte.
- 11 Constitución de la Monarquía española, 18 juin 1837.
12L’arrivée des progressistes au pouvoir en 1836 permet, dans le contexte de radicalisation révolutionnaire imposé par la guerre civile (la première guerre carliste de 1833-1840), d’adopter les mesures décisives censées, au-delà d’un simple changement de style de gouvernement, donner forme à ces finances publiques qui pour les libéraux sont la base matérielle de l’État. La Constitution promulguée en 1837 entérine cette nouvelle conception des finances : elle fait du paiement des contributions l’une des obligations qui, à côté des droits fondamentaux, définissent le citoyen dans le Titre Premier. L’article 6 précise ainsi que le citoyen est obligé de contribuer aux dépenses de l’État de façon « proportionnelle à ses ressources 11 ». Non seulement, cette clause applique au domaine financier le principe d’égalité devant la loi, en supprimant toute discrimination fiscale – même territoriale –, mais elle impose un critère permettant à l’avenir de déterminer la justice des tributs : ceux-ci devront être proportionnels à la capacité de paiement de chaque contribuable.
- 12 Real Academia Española : 1837.
13Les finances se voient aussi consacrer un des titres de la Constitution (le numéro XII : Des contributions), preuve de l’importance qui leur est attribuée dans la nouvelle configuration de l’État. Le texte établit l’obligation faite aux Cortès, représentantes de la souveraineté nationale, d’approuver tous les ans le « budget général de toutes les dépenses de l’État pour l’année suivante et le plan des contributions qui les financeront ». Il réserve aussi au parlement le contrôle a posteriori des comptes des exercices passés (art. 72), sans qu’aucun impôt non prévu par la loi du budget ou une loi spéciale puisse être exigé (art. 73). Le modèle de finances uniques, les finances de l’État, modèle uniforme sur tout le territoire, identique pour tous, quel que soit leur rang, et soumis à la discipline d’un budget contrôlé par la représentation nationale, trouve ainsi sa traduction légale. Le langage commun se fait alors l’écho de la consolidation du concept de budget, fondamental pour les finances modernes. Ainsi, l’édition de 1837 du Dictionnaire de l’Académie royale de la langue définit le budget comme l’ » évaluation anticipée du coût d’une œuvre », acception présente dans les éditions antérieures, depuis 1803, mais elle ajoute : « Et aussi des dépenses, ou des rentes d’un hôpital, d’une ville ou d’un autre corps, et même des dépenses générales d’un État ou particulières d’un département administratif, comme la guerre ou la marine 12. »
- 13 Décret des Cortès du 18 novembre 1836.
14Reste cependant à traduire ce modèle dans les faits, surmontant des inerties, des habitudes et des privilèges bien enracinés, et affrontant les puissants intérêts que l’implantation du nouveau modèle fiscal menace. En 1836, l’état de guerre justifie l’une des mesures majeures, l’interruption du service de la dette publique, décrétée par Mendizábal. Elle suppose que le nouvel État, d’une certaine manière, ne reconnaît pas les obligations héritées de l’ancienne monarchie, traduction sur le plan financier de la rupture entre les deux régimes politiques 13.
L’attaque des biens de l’Église
- 14 DR des 22 juillet et 11 octobre 1835, 19 février et 8 mars 1836, 29 juillet 1837.
- 15 Lois des 2 septembre 1841 et 1er mai 1855.
15C’est aussi Mendizábal qui entreprend la réforme la plus audacieuse de l’époque quand il décrète la nationalisation et la vente des biens de l’Église. Le processus graduel commence par la fermeture des couvents et des monastères, la sécularisation du clergé régulier, la confiscation de ses biens et leur vente aux enchères publiques pour recueillir les ressources nécessaires au recrutement et à l’entretien d’une armée véritablement nationale qui puisse gagner la guerre 14. Dans un second temps, le processus connu sous le nom de desamortización ecclésiastique (la vente des biens de mainmorte), s’étend au clergé séculier, en 1841, puis est complété par une desamortización civile à partir de 1855 15.
- 16 DR du 29 juillet 1837 ; loi du 1er septembre 1841.
- 17 Loi du 26 août 1837.
16Son importance pour la construction de l’État est décisive, car cette vente des biens de mainmorte permet d’assainir les finances, renflouées par les recettes extraordinaires qu’elle rapporte, et de jeter les bases de ce qui sera une armée nationale – improvisée en pleine guerre civile à partir de 1837-1838 – mais aussi d’une administration publique civile. Ce sont d’ailleurs les bâtiments nationalisés pendant la desamortización qui servent de sièges aux ministères, bureaux publics et tribunaux, et même aux deux chambres des Cortès qui symbolisent la souveraineté nationale. En même temps, l’annulation de l’Église comme pouvoir économique permet d’éliminer des finances ecclésiastiques qui disputaient aux finances de l’État leurs sources de revenus. Les contributions ecclésiastiques – dîmes et prémices – sont abolies en 1837 et 1841, la nationalisation des bases fiscales de l’Église venant ainsi compléter celle de ses biens 16. Le monopole financier de l’État est ainsi parachevé, car l’élimination définitive des impôts seigneuriaux, troisième base de « Finances » indépendantes sous l’Ancien Régime, a eu lieu en 1837, rencontrant moins d’opposition que celle des impôts ecclésiastiques 17.
- 18 Velarde : 1968.
17La dîme est alors l’impôt direct le plus solide et le mieux administré dans une société avant tout rurale où le produit agricole – base essentielle des dîmes – est la principale source de revenus réguliers. Les libéraux espagnols sont convaincus, depuis 1810, que l’État constitutionnel en Espagne doit fonder son financement sur les contributions directes des citoyens, ce qui veut dire que les finances de l’État doivent reposer pour l’essentiel sur le produit agricole, qui représente environ 70 % du revenu national 18. La dîme ecclésiastique grevant déjà cette activité au plus haut point, la création de finances publiques libérales exige que l’État se l’approprie telle quelle ou bien qu’il l’élimine pour créer une contribution propre qui pèse sur les sources de revenus qui seraient alors libérées. On opte pour la seconde solution, plus facile à justifier et qui permet de créer une contribution directe d’un nouveau type, débarrassée des limites de l’impôt ecclésiastique ancestral.
Unifier la nation
18La nationalisation des finances est déterminante, puisqu’elle élimine la concurrence des finances seigneuriales et ecclésiastiques qui pesaient sur les mêmes contribuables et permet d’atteindre le premier objectif du programme financier du libéralisme espagnol énoncé plus haut. Mais l’unification de l’espace économique et financier de la nation – second de ces objectifs – est tout aussi capitale. Dans la lutte que mènent les libéraux pour créer un marché national unifié, les premiers obstacles à la libre circulation des marchandises à disparaître sont ceux liés aux droits seigneuriaux, abolis en 1837 : péages divers et batelages.
- 19 Loi du 9 juillet 1841.
19En revanche, les véritables douanes intérieures connues sous le nom d’almojarifazgos * et puertos secos *, qui séparaient les anciens royaumes et territoires de la monarchie, tardent à disparaître complètement. L’essentiel de l’unification du marché péninsulaire a eu lieu depuis le début du xviiie siècle, quand a été décrétée la suppression des douanes qui séparaient les Couronnes d’Aragon et de Castille (1714). Mais, quoique l’on ait tenté alors d’éliminer aussi celles qui séparaient la Navarre et les provinces basques du reste de l’Espagne, celles-ci ont perduré jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. Les Provinces dites Exemptes, par conséquent, sont restées séparées du reste du pays par des douanes et ouvertes au contraire au commerce avec la France, où elles s’approvisionnaient. Les Cortès de Cadix ont déjà tenté d’abolir ces dernières douanes intérieures, mais il faut attendre la fin de la dernière guerre carliste pour qu’Espartero les supprime, en 1841 19.
- 20 Décret de la régence du 15 septembre 1841.
20L’organisation du système douanier espagnol en vigueur pour le reste du xixe siècle date de cette mesure et de l’établissement d’un périmètre extérieur de douanes censé protéger un marché national unifié. S’y ajoute l’implantation de systèmes pratiques de gestion visant à rendre cette protection efficace, tels les dépôts francs où l’on stocke les marchandises confisquées pour ne pas avoir acquitté les droits en vigueur. À la même époque, est créée une bureaucratie des douanes, encadrée par la direction générale des Douanes au sein du ministère des Finances 20. En 1842, est institué le corps des carabiniers du Royaume, force militaire spécialisée dans le contrôle des frontières, ports et douanes, qui aide le ministère des Finances à se faire respecter.
21Pour parfaire l’unification financière de l’Espagne métropolitaine, il faut encore remplacer les systèmes fiscaux particuliers qui restent en vigueur dans les territoires de l’ancienne monarchie par un ensemble unique d’impôts qui soit commun à tout le pays. Dans la pratique, les systèmes fiscaux de Catalogne, Aragon, Valence, Majorque, Navarre, Biscaye, Guipúzcoa et Álava exigent des contribuables un effort fiscal inférieur à celui que supporte la Couronne de Castille. En outre, la répartition de la charge varie d’un territoire à l’autre. Toutes les tentatives d’implanter une contribution commune ont échoué, en 1810, 1813, 1817, 1820, 1837, 1841 et 1842. Aussi, une fois la dîme ecclésiastique abolie et le marché national unifié, aborde-t-on avec prudence la mise en place d’un nouveau système fiscal homogène, tâche longuement préparée et âprement négociée. La réforme a finalement lieu en 1845, alors qu’Alejandro Mon est ministre des Finances, et elle permet d’atteindre le second objectif du programme financier libéral en Espagne, la prépondérance des contributions directes. Ce système national des Finances inspiré des principes libéraux tarde donc à s’implanter (35 ans après la première tentative) mais il le fait si bien qu’il impose à l’Espagne une structure fiscale pour plus de cent ans.
Le système
- 21 Loi du 23 mai 1845.
22Le système fiscal de 1845 se résume à la création de toute une batterie de contributions de produit inspirées du modèle français, mais que l’on adapte pour les assimiler à celles connues sous l’Ancien Régime 21. Malgré les efforts réalisés pour présenter la réforme comme le simple prolongement de ce qui existe, les nouveaux impôts innovent du simple fait que l’obligation de contribuer est universelle – les privilèges fiscaux des nobles et du clergé ont disparu – et que, pour la première fois, un même système fiscal s’étend à tout le territoire national.
23Pourtant les circonstances imposent des infléchissements. La première guerre carliste se conclut par une paix négociée qui prévoit la préservation partielle des privilèges fiscaux des provinces vaincues, d’où une exception territoriale : le maintien des finances privilégiées de Biscaye, Guipúzcoa, Álava et Navarre. Ces provinces, que la suppression des douanes intérieures a intégrées au marché national, conservent donc leurs privilèges fiscaux, restant en marge du système général des contributions. C’est sans aucun doute une trahison de l’esprit de la Constitution, le premier renoncement dans le chemin vers l’égalité de traitement fiscal promise par l’État libéral à tous les citoyens. Le troisième objectif de la réforme fiscale du libéralisme que nous avons mentionné n’est donc atteint que partiellement puisque les 49 provinces espagnoles conservent des systèmes fiscaux différents dans cette époque de pragmatisme conservateur : l’on n’hésite pas, en effet, à sacrifier les principes libéraux à l’objectif fondamental de consolider le pouvoir de l’État, l’ordre public et la paix intérieure.
24Le quatrième objectif du programme fiscal du libéralisme espagnol de la première moitié du xixe siècle peut se résumer, nous l’avons vu, au remplacement des mécanismes indirects de recouvrement des ressources – par l’intermédiaire de corporations ou de fermiers – par des instruments administratifs propres aux finances publiques susceptibles de couvrir tout le territoire et d’établir une relation directe avec les contribuables. De là doit dériver une nouvelle relation fiscale, fondée sur la connaissance directe qu’aurait l’État des possibilités de contribution de chaque citoyen – grâce à la statistique, une autre branche administrative nouvellement créée. Chaque citoyen aurait alors la garantie de voir sa charge fiscale évaluée de façon objective, l’État visant la proportionalité de l’effort, dans la plus stricte légalité et la sécurité juridique. En échange, on souhaite inspirer aux citoyens une conscience civique de leur obligation de contribuer sincèrement et volontairement : c’est la contrepartie des droits que l’État constitutionnel leur accorde. Des quatre objectifs énoncés, celui-ci est celui qui est abordé le plus tard, en raison de l’impossibilité pratique de disposer au début du xixe siècle de données fiables pour répartir les contributions directes de façon graduée et du manque de personnel et de bureaux suffisants pour toucher tous les contribuables et établir avec eux une relation fiscale permanente. Plus encore, on manque de moyens pour entreprendre l’œuvre pédagogique nécessaire au développement d’une nouvelle conscience citoyenne qui se traduirait par le paiement ponctuel des impôts. Bien au contraire, l’implantation durable de la réforme fiscale provoque pendant le demi-siècle suivant des résistances antifiscales qui dans certains cas débouchent sur des soulèvements. L’échec est donc complet pour ce qui est du quatrième objectif du programme financier des libéraux, sacrifié à des objectifs plus propres au conservatisme dominant au milieu du xixe siècle.
Mettre les nouvelles contributions en application
- 22 Comín et Vallejo : 2002.
25Le système fiscal de l’État espagnol entre en fonction dès son approbation en 1845, sur la base de deux contributions directes : la contribution sur les immeubles, l’agriculture et l’élevage et la contribution sur l’industrie et le commerce. Toutes deux sont des contributions de produit, payables en proportion directe des recettes générées par les activités grevées. Le système est complété par un certain nombre d’impôts indirects qui le dotent de la flexibilité qui manque aux impôts directs tout en renflouant l’État sans alourdir exagérément la coûteuse et traumatisante contribution directe. Ce sont pour l’essentiel les droits de douanes et la contribution sur la consommation22.
- 23 Serrano : 1994.
26La contribution des douanes est conçue comme un instrument de la politique commerciale : elle vise à protéger certaines productions nationales de la concurrence étrangère, plus qu’à recueillir des fonds importants, à la différence de ce qui se pratique dans les autres États indépendants nés de la dissolution de la monarchie espagnole au début du siècle. Même si sa finalité n’est pas de récolter des fonds, le système douanier a donc pour importante mission de préserver le marché interne et l’unité nationale sur le plan économique. Les douanes sont régies par des ordonnances remises à jour au fil de l’évolution des tarifs. Les premières ordonnances de l’époque libérale sont celles de 1847, qui établissent un strict contrôle sur les entrées et les sorties du territoire. Elles déterminent un espace géographique proche des frontières et des côtes, la zone fiscale, où sont appliquées des restrictions visant à faciliter le contrôle douanier : par exemple, la possibilité de réclamer à quiconque les documents prouvant la légalité, l’origine et la destination des marchandises ou l’obligation qui leur est faite d’obtenir des autorisations pour établir magasins ou négoces. Pour rendre possible la poursuite des contrebandiers, les ordonnances décrivent aussi la documentation qui devra accompagner les marchandises en circulation dans le pays 23.
- 24 Pan-Montojo : 1994 et 1996.
27La contribution sur la consommation est en théorie un impôt indirect sur les transactions intérieures. Toutefois, elle est détournée de sa signification par la cession de la perception aux villes, par le biais d’abonnements : la ville verse alors dans les caisses des finances la somme fixée et perçoit ensuite les fonds par les méthodes qui lui conviennent le mieux. Celles-ci peuvent aller d’un relèvement des contributions directes à la capitation répartie entre les habitants ou l’installation de magasins qui vendront les produits grevés par l’impôt à un prix plus élevé. Ceci, quand le recouvrement de l’impôt n’est pas tout bonnement confié à un fermier, la ville revenant alors à une pratique honnie de l’Ancien Régime 24.
- 25 Vallejo : 2001 ; Pro : 1992.
28Le recouvrement adéquat des autres contributions implantées en 1845, les impôts directs, ne saurait être mis en œuvre sans passer par la création improvisée de mécanismes administratifs dont l’État d’alors ne dispose pas. Pour y parvenir, il faudrait en effet dresser la liste de toutes les formes de richesses, de leurs titulaires et de leur volume, et les évaluer pour répartir les contributions en respectant la proportionalité prévue par la Constitution et les lois. En particulier, la plus importante des contributions, qui grève la propriété de la terre, les immeubles urbains, l’agriculture et l’élevage, requiert un cadastre dans lequel ces biens et activités seraient inventoriés. Il faut attendre les premières décennies du xxe siècle pour que ce cadastre soit mis au point, en raison de l’insuffisance des moyens disponibles pour le mener à bien et de l’absence de volonté politique. Pour y pallier, on recourt à des succédanés, comme les amillaramientos (listes des propriétés) et les cartillas evaluatorias (livrets d’évaluation), systèmes qui confient l’évaluation de la richesse immobilière et agricole aux municipalités et aux grands propriétaires. Inutile de préciser que, les municipalités étant aux mains de ces mêmes groupes sociaux de propriétaires, ce mode d’évaluation de la richesse fait que la distribution de la charge fiscale est le résultat d’une négociation entre les contribuables et l’État, dans laquelle les municipalités jouent le rôle d’intermédiaires au pouvoir décisif 25.
- 26 Pro : 1996.
29D’autres impôts connaissent une évolution semblable, car le contraste entre l’ambition théorique de leur définition légale et les possibilités administratives limitées qu’offre l’État espagnol à l’époque est général. Ainsi, la contribution sur l’industrie et le commerce n’est pas facile à recouvrer en l’absence d’une connaissance détaillée des gains de chaque activité du pays. La solution consiste à confier aux municipalités l’élaboration des listes nominatives (matrículas) dans lesquelles les contribuables sont classés par tarifs et montants. Souvent, en outre, on négocie des abonnements avec les corps de métiers. Ceci garantit aux finances un volume déterminé de recettes mais fait du corps l’intermédiaire entre État et contribuables. Toute possibilité de répartir équitablement la charge fiscale est donc annulée 26.
Créer une administration des Finances
30La distance qui sépare la définition théorique des impôts créés en 1845 et leur mise en œuvre pendant les années qui suivent tient à la structure et aux dimensions de l’administration espagnole d’alors. Le ministère des Finances se compose de plusieurs directions générales spécialisées dans les différents types de contributions et rentes. Mais il a du mal à étendre cette structure au territoire : le personnel manque pour multiplier par 49 (le nombre de provinces) les services centraux du ministère, d’autant que les Finances demandent un certain professionnalisme, un personnel nombreux et proche du citoyen.
31À défaut de moyens propres, le ministère doit déléguer les fonctions fiscales de base aux municipalités. Une telle opération est risquée, puisque lesdites municipalités sont plus proches des intérêts des contribuables que de l’intérêt général des finances. En outre, elles n’ont pas davantage de moyens et de personnel pour assurer les multiples tâches qui leur sont demandées. Pour éviter que cela conduise à une chute des recettes qui acculerait l’État à la banqueroute permanente, on recourt au système des forfaits (cupos). Gouvernement et Cortès fixent le forfait à prélever pour chaque impôt dans toute la nation, le répartissent en forfaits provinciaux de paiement obligatoire. Le forfait provincial est ensuite divisé en forfaits locaux négociés au niveau de la Députation *, puis les municipalités et juntes de contribuables ventilent le forfait local entre les habitants qui doivent le payer effectivement. À chaque niveau, il faut payer intégralement le forfait, de sorte que, si un contribuable ne paie pas, les autres, solidairement responsables, doivent payer pour lui. Cela vaut pour les contribuables des villes comme pour les forfaits locaux d’une province. Ainsi, l’inefficacité ou la corruption des services chargés du recouvrement ne peuvent avoir d’incidence sur la somme totale perçue par l’État. La rationalité, l’équité ou la justice de la répartition sont une autre affaire.
32En définitive, en recourant à ces procédés, l’administration des finances du milieu du xixe siècle se procure des recettes sûres en minimisant les coûts de perception, mais elle renonce à rendre effectifs les principes du libéralisme prônés par la Constitution. Au lieu d’établir une relation directe entre l’État et chaque contribuable, elle délègue à d’autres entités – municipalités, corps de métiers, commissions de gros contribuables… – la répartition de la charge fiscale, et celles-ci le font en fonction de leurs propres intérêts.
33Ce qui justifie cette situation est le constat que l’État ne dispose pas des moyens nécessaires pour toucher tous les points du territoire et en contrôler les activités économiques. Là où le contrôle est possible, on modifie les mécanismes de recouvrement. Il est ainsi fréquent que les procédés des zones rurales diffèrent de ceux des « capitales de provinces et ports habilités », villes où les services des finances du gouvernement provincial peuvent exercer un contrôle sur la vie économique et la répartition des contributions.
34Les conséquences négatives de ces pratiques fiscales sautent aux yeux. D’une part, elles pétrifient l’impôt, empêchant son rendement de s’élever parallèlement à la croissance économique. Ce gel des recettes fiscales fait que le système, à peine créé, se révèle vite incapable de couvrir les dépenses de l’État. La situation est aggravée par l’existence d’une volumineuse dette intérieure et extérieure ; qui plus est, le recours au crédit extérieur est interdit de fait à l’Espagne depuis qu’elle a cessé de payer les intérêts de sa dette en 1836.
35La seconde conséquence négative est que, dans la pratique, la charge fiscale est régressive. En abandonnant la répartition des impôts à des intermédiaires qui représentent les intérêts des plus gros propriétaires et entrepreneurs, on admet que ces derniers se soustraient en partie à l’effort fiscal qui leur échoit et le reportent sur leurs voisins ou collègues moins influents. L’expérience du manque d’équité dans la répartition fait que les impôts, qui auraient pu devenir un instrument de création d’une conscience citoyenne et d’une identité nationale, aient un effet contraire : pour les citoyens, payer ses impôts ou contourner cette obligation est seulement une affaire de pouvoir, pas de morale civique. Aussi se développe-t-il une culture de résistance antifiscale généralisée, qui contribue pour longtemps à compliquer le financement de l’État.
Consolidation et bilan
- 27 Pro : 2005.
36Le passage par le ministère des Finances de Juan Bravo Murillo en 1849-1852 vient clore le cycle des réformes des finances, consolidant et complétant le système financier libéral-conservateur de l’État espagnol qui a remplacé les finances royales de la monarchie de l’Ancien Régime. Bravo, dirigeant du secteur le plus autoritaire du parti modéré, ne prétend pas réformer le système pour le rendre moins régressif ou plus fidèle aux principes du libéralisme. Sa vision est celle des administratifs du parti, obsédés par la centralisation du pouvoir et l’augmentation de la capacité d’action de l’État. Ses réformes sont donc avant tout techniques. Elles contribuent à consolider le système financier créé en 1845, lui permettant de survivre sans changement notable jusqu’à la fin du siècle 27.
- 28 DR des 28 décembre 1849 et 21 juin 1850.
- 29 DR du 25 juin 1850.
- 30 Circulaire de la direction générale des contributions, 7 mai 1850.
- 31 Loi des bases tarifaires, 17 juillet 1849 ; tarif, 5 octobre 1849.
- 32 DR du 14 juin 1850.
- 33 DR du 20 juin 1852.
- 34 Loi du 1er août 1851.
- 35 Loi du 17 octobre 1851.
37Parmi les réformes réalisées par Bravo en 1849-1852, on retiendra : la création des Administrations provinciales des Rentes, chargées de diriger la gestion des finances dans les provinces, supervisées par les gouverneurs civils ; l’introduction de la figure des visiteurs et inspecteurs des Douanes, embryon d’un service d’inspection fiscale attaché aux gouvernements provinciaux ; la réorganisation des services centraux du ministère, refondus en huit directions générales, parmi lesquelles une direction générale du Contentieux spécialisée dans la défense des intérêts des finances publiques devant les tribunaux de justice 28 ; l’unification des archives du ministère 29 ; la fondation du Bulletin Officiel du Ministère des Finances en 1850 ; l’introduction du système des amillaramientos et cartillas evaluatorias, pour rendre possible la répartition du forfait de la contribution des immeubles, cultures et élevages 30 ; l’approbation du premier tarif douanier moderne, qui tourne le dos à une pratique d’Ancien Régime, l’interdiction de l’entrée ou de la sortie de certaines marchandises aux frontières – des tarifs spécifiques sont adoptés au lieu de grever les produits ad valorem 31 - ; la création du Corps d’Experts des Douanes 32 ; la régulation des procédés de poursuite des contrebandiers et fraudeurs, confiés à des tribunaux spéciaux des finances 33 ; le règlement de la dette publique, qui évite qu’elle continue d’absorber une part élevée des recettes fiscales de l’État 34 ; enfin, la signature d’un Concordat avec le Saint-Siège, qui rend la desamortización irréversible, lui donnant l’aval de l’Église 35.
- 36 DR du 20 octobre 1849 ; Loi du 20 février 1850 ; Instruction du 20 juin 1850.
- 37 Loi du 25 août 1851.
- 38 DR du 18 juin 1852.
- 39 Luis : 2002, p. 290.
38Mais le plus grand apport de Bravo Murillo est sans aucun doute sa réforme de l’administration et de la comptabilité des finances publiques 36. Cette réforme crée les mécanismes formels nécessaires pour soumettre toute l’administration à une discipline comptable et financière, imposant un budget et l’élaboration régulière de comptes publics que le tribunal des comptes puisse contrôler 37. Elle fait du vieux rêve libéral d’une unité de caisse dans les administrations publiques une réalité, donnant naissance au trésor public et soumettant tout mouvement financier à l’Intervención General del Estado (l’organisme chargé du contrôle des comptes). Enfin, alors que Bravo Murillo est déjà président du Conseil des ministres, en 1852, il parachève cette œuvre en édictant un règlement général pour les employés de l’État qui régulera la fonction publique jusqu’en 1918 38. En fait, ce décret étend à l’ensemble de l’administration les principes déjà en vigueur au ministère des Finances 39.
39Après avoir concentré sur les finances publiques les plus gros efforts d’organisation des années 1845-1852, on parvient à mettre en place un ministère que les modérés jugent pleinement efficace et dont ils font un modèle pour toute l’administration publique naissante. Ce modèle répond à un dessein centraliste, fidèle à l’État unitaire défini dans toutes les constitutions. Depuis la capitale de l’État, on prétend régir une machine administrative dense, homogène, professionnelle, qui permette au gouvernement de contrôler l’ensemble du territoire, de maintenir l’ordre mais aussi de transformer la réalité. C’est là le modèle dont rêvent les administratifs du parti modéré, qui s’inspirent de la France de Napoléon, que la dictature de Louis Napoléon Bonaparte, en 1851-1852, a remise à la mode. Dans la pratique toutefois, le développement de ce modèle de Grand État, fondé sur le gouvernement direct et le style administratif, se heurte à de grands obstacles, en raison de la pénurie de moyens matériels et de la résistance des groupes et institutions qui craignent d’y perdre une partie de leur pouvoir ou de leurs privilèges. L’implantation des finances publiques libérales en est une bonne illustration. En effet, il s’avère impossible, malgré toutes les réformes administratives, d’établir une gestion directe et centralisée des contributions. Celles-ci doivent être négociées avec des pouvoirs intermédiaires, tels ceux que représentent les municipalités, corps de métiers ou groupes de gros contribuables.
40Nul doute que le système fiscal et le style de gouvernement ont changé, mais les finances parviennent tout au plus à remplacer les réseaux traditionnels d’intermédiaires qui conditionnaient le système financier par de nouveaux réseaux, ceux du caciquisme dont la naissance a accompagné celle de la compétition électorale et des nouveaux systèmes de représentation politique. La culture du citoyen contribuable ne saurait s’implanter dans ce contexte politique dans lequel la négociation et la médiation restent au premier plan.
Notes
1 Constitución política de la Monarquía española, 19 mars 1812.
2 Constitución política de la Monarquía española, 19 mars 1812.
3 Real Academia Española : 1817, 1837, 1843 et 1852.
4 Luis : 2002, p. 230-236.
5 Burgueño : 1996, p. 95-166.
6 Sur le ministère dit du Fomento : Luis : 2003, p. 237.
7 DR du 24 mars 1834.
8 DR du 16 juin 1834.
9 DR du 13 septembre 1835.
10 Garriga : 2002.
11 Constitución de la Monarquía española, 18 juin 1837.
12 Real Academia Española : 1837.
13 Décret des Cortès du 18 novembre 1836.
14 DR des 22 juillet et 11 octobre 1835, 19 février et 8 mars 1836, 29 juillet 1837.
15 Lois des 2 septembre 1841 et 1er mai 1855.
16 DR du 29 juillet 1837 ; loi du 1er septembre 1841.
17 Loi du 26 août 1837.
18 Velarde : 1968.
19 Loi du 9 juillet 1841.
20 Décret de la régence du 15 septembre 1841.
21 Loi du 23 mai 1845.
22 Comín et Vallejo : 2002.
23 Serrano : 1994.
24 Pan-Montojo : 1994 et 1996.
25 Vallejo : 2001 ; Pro : 1992.
26 Pro : 1996.
27 Pro : 2005.
28 DR des 28 décembre 1849 et 21 juin 1850.
29 DR du 25 juin 1850.
30 Circulaire de la direction générale des contributions, 7 mai 1850.
31 Loi des bases tarifaires, 17 juillet 1849 ; tarif, 5 octobre 1849.
32 DR du 14 juin 1850.
33 DR du 20 juin 1852.
34 Loi du 1er août 1851.
35 Loi du 17 octobre 1851.
36 DR du 20 octobre 1849 ; Loi du 20 février 1850 ; Instruction du 20 juin 1850.
37 Loi du 25 août 1851.
38 DR du 18 juin 1852.
39 Luis : 2002, p. 290.
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