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Avant-propos

p. 7-11


Texte intégral

1Cet ouvrage collaboratif, écrit par 27 enseignants-chercheurs de l’IGR-IAE de Rennes (université de Rennes 1), se propose de faire le point sur le thème « Collaborations et réseaux ». Les liens entre ces deux concepts sont effectivement étroits. Car si la collaboration peut avoir lieu hors d’un réseau, elle nous semble aussi (et surtout) être une dimension constitutive du réseau. Par exemple, les clients et les fournisseurs sont en relations, mais ils ne vont constituer un réseau que lorsqu’ils vont mettre en place une forme de collaboration entre eux. Plus généralement, il y a réseau lorsque la coordination entre les organisations ou les hommes qui les composent ne se fait pas uniquement par les prix comme le suppose la théorie économique standard. C’est en cela que cet ouvrage est ancré dans les sciences de gestion. Les réseaux seront donc caractérisés par la plus ou moins grande place accordée à la coordination hiérarchique ; elle peut être assez forte dans les réseaux de distribution ayant des magasins en propres, elle est plus faible dans les réseaux de franchise ou de sous-traitance, elle devient quasiment nulle dans les réseaux de PME.

À qui est destiné cet ouvrage ?

2Cet ouvrage se destine à un large lectorat qui ne se restreint pas à nos seuls col lègues enseignants-chercheurs des universités, des IAE et des écoles de commerce. Il s’adresse également aux étudiants, aux dirigeants, aux cadres d’entreprise, et pourquoi pas aux curieux. Pour cela, nous nous sommes attachés à éviter le jargon universitaire, à limiter les longs développements théoriques et la multiplication des références, à réduire la formalisation mathématique et l’utilisation des modèles statistiques et économétriques au strict nécessaire. L’objectif est bien de faire découvrir le thème « collaborations et réseaux », sous ses différentes facettes, à un large public

Pourquoi cette thématique ?

3Ce thème nous semble particulièrement pertinent pour plusieurs raisons :

  • tout d’abord, car c’est un thème qui peut donner lieu à des recherches transdisciplinaires, croisant différentes disciplines de la gestion, comme le montrent plusieurs contributions de cet ouvrage : croisement entre le marketing et la finance (contributions p. 85-108 et 229-246), entre le contrôle de gestion et le marketing (contributions p. 65-84 et 247-270), entre la théorie des organisations, le marketing et la finance (contribution p. 339-356), ou encore entre les ressources humaines, la stratégie et la théorie des organisations (contribution p. 25-46), entre la finance et la logistique (contributions p. 151-170 et 271-300). Ces regards croisés entre plusieurs disciplines des sciences de la gestion nous semblent porteurs de sens, source de propositions intéressantes et pourront faire l’objet, à n’en pas douter, de futures recherches fructueuses. N’est-il pas important que les enseignants chercheurs de l’IGR-IAE de Rennes illustrent, par leur pratique même, le thème choisi pour cet ouvrage ? ;
  • ensuite, car c’est un thème qui s’inscrit dans un courant de recherche actif avec de fortes implications managériales. L’intérêt de ce type de travaux pour le monde économique est démontré par les projets et relations de long terme qui se sont noués par exemple entre les enseignants chercheurs de l’IGR-IAE Rennes et le monde professionnel. Nous pensons notamment aux travaux menés au sein de la chaire « Franchise et commerce en réseau1 », dont la mission est de rapprocher les étudiants, les chercheurs et les professionnels de la franchise et du commerce en réseau autour des problématiques de ce secteur et de faire émerger des synergies grâce à une approche globale (multi-métiers, multidisciplinaire et multi-pays). Nous pensons aussi au projet Risk Credit-finance chain and Supply chain Management (RCSM), qui associe des chercheurs en finance et en logistique de l’IGR – IAE avec d’autres laboratoires et des acteurs majeurs de la chaîne logistique. Il part du constat qu’une optimisation des financements de la supply chain permettrait d’obtenir un gain financier global pour celle-ci, mais que ce gain ne peut être réalisé que par une gestion financière collaborative. Bien d’autres projets petits ou grands pourraient encore être cités pour illustrer les liens de collaboration forts entre les enseignants chercheurs de l’IGR-IAE et les entreprises et réseaux qui les entourent ;
  • enfin, dans l’esprit d’un premier ouvrage collectif portant sur « Recherches et innovation en sciences de gestion », ce thème nous a semblé pertinent pour montrer les thématiques de recherches traitées au sein de l’IGR-IAE de Rennes : les réseaux de distribution, la compétence collective et l’innovation collaborative, ou encore le pilotage des chaînes logistiques globales.

Qu’est-ce que vous pourrez découvrir à la lecture des contributions de cet ouvrage ?

4Tout d’abord, ce qui saute aux yeux à la lecture des différentes contributions, c’est la diversité des acteurs qui collaborent ou qui participent à des réseaux : collaboration des clients et fournisseurs au sein de la chaîne logistique (contributions p. 133-150 et 151-170) à laquelle viennent s’ajouter les institutions financières (contributions p. 151-170 et 171-194), collaboration entre les entreprises (et plus particulièrement de PME) au sein d’un même territoire (contributions p. 111-132 et 339-356), collaboration des différents professionnels au sein d’une organisation (contribution p. 47-64) ou au sein d’organisations différentes (contribution p. 24-46), collaboration entre les entreprises et leurs clients (contribution p. 65-84), collaboration au sein d’un réseau de distribution (contributions p. 247-270 et 301-320), ou collaboration entre deux réseaux de distribution (contribution p. 85-108).

5Cette grande hétérogénéité des acteurs démontre que la collaboration a lieu, en dépit, ou plutôt à cause, des différences entre les parties qui collaborent. Ces différences sont cognitives ou culturelles, elles peuvent porter sur les informations ou les ressources, les objectifs et les contraintes. Cette hétérogénéité va expliquer à la fois l’objectif des réseaux ou de la collaboration : la mise en commun de ressources et de compétences, mais aussi les obstacles à la collaboration (incompréhension, perte de pouvoir, asymétries).

6Nous pouvons également retenir l’importance de la dimension spatiale ou territoriale pour expliquer les réseaux et la collaboration. En effet, l’étendue peut être homogène (espace) ou hétérogène (territoire). On trouve d’ailleurs « territoire » et « espace » dans le titre de deux contributions (contributions p. 111-132 et 321-338). L’espace, où le territoire, joue bien sûr un rôle fondamental pour les réseaux de distribution (contributions p. 85-108, 229-246, 247-270, 301-320 et 321-338), il convient pour eux de l’occuper au mieux. Dans les chaînes logistiques, la localisation des fournisseurs et clients a un impact direct sur les coûts, la sécurité et le fonctionnement de ces chaînes (contributions p. 133-150, 151-170, 171-194 et 271-300), sans parler de la localisation des ressources communes, objet de la collaboration comme les entrepôts. C’est aussi le cas dans des réseaux d’école, comme le réseau des IAE (contribution p. 195-226), qui permet un maillage du territoire avec une offre de formations de qualité homogène. La contribution de Rozenn Perrigot et Guy Basset étudie les problèmes soulevés par l’irruption d’un nouvel espace : l’espace virtuel.

7Le lecteur pourra aussi comprendre pourquoi des réseaux se créent et se développent et pourquoi des collaborations se nouent. L’objectif final est l’amélioration de la performance des entreprises qui collaborent au sein ou hors d’un réseau. Cette performance doit être entendue au sens large, cela peut être la performance financière ou commerciale bien sûr ou même les deux (contribution p. 229-246), mais aussi la performance sociale et gouvernementale (contribution p. 339-356), la qualité de l’offre de soin (contribution p. 47-62) ou de l’enseignement et de la recherche en gestion (contributions p. 25-46 et 195-226). Cette amélioration est possible car la collaboration entre les membres permet de lutter contre les externalités dites « de réseau ». Dans les réseaux, la recherche de la meilleure performance individuelle n’aboutit pas à la meilleure performance collective. Je peux optimiser mon niveau de stock aux dépens de mes clients et fournisseurs, mais, au final, il n’est pas sûr que la compétitivité du produit final y gagne ! La performance est donc multidimensionnelle, comme le montre bien la contribution de Florence André-Le Pogamp, Emmanuelle Fromont et Dany Vyt sur les relations entre la performance en marketing et en finance. L’objectif général de performance peut être décliné en plusieurs sous-objectifs dont : la réduction des charges financières (contributions p. 151-170 et 171-195), de gestion des stocks (contribution p. 133-150), de personnel (contribution p. 111-132), de production et de distribution (contributions p. 65-84, 95-108 et 247-270), mais aussi l’augmentation du chiffre d’affaires (contributions p. 65-84 et 321-338) ou le développement et la diffusion des innovations (contributions p. 25-46 et 195-226).

8Les méthodes pour atteindre ces objectifs sont nombreuses et diversifiées. Les principales nous semblent être : la mise en commun de ressources (toutes les contributions) et une meilleure répartition du coût de ces ressources entre les membres qui collaborent (contributions p. 133-150, 151-170, 171-194 et 247-270), le partage d’information (toutes les contributions), d’expériences, de connaissances, de savoir et de compétences (contributions p. 25-46, 47-64, 85-108, 111-132 et 339-356), l’amélioration de la prise de décision (toutes les contributions). Les moyens employés sont eux aussi très variés : l’utilisation des technologies de l’information et de plateformes électroniques (contributions p. 133-150, 151-170 et 171-194), la mise en place de procédures spécifiques de collaboration (contributions p. 25-46, 47-64, 65-84 et 85-108), le développement de méthodes pour partager les gains et les coûts (contributions p. 133-150, 151-170, 171-194 et 247-270).

9Finalement, il ne faut pas oublier que le développement de la collaboration et des réseaux ne se fait pas sans obstacles car, si collaboration et réseaux per mettent d’obtenir un gain global de performance, ce gain peut être inégalement réparti entre les membres qui collaborent. La collaboration doit donc également porter sur les modes de répartition des gains et des coûts pour que chaque partenaire trouve un équilibre entre sa contribution à la relation et le bénéfice qu’il en retire. Souvent, les méthodes de collaboration existent, mais elles ne sont pas mises en œuvre car aucun principe de partage des gains satisfaisant n’a pu être trouvé entre les parties. Ce principe est difficile à trouver car, dans une relation de collaboration ou dans un réseau, il est, par la nature même des relations, difficile d’isoler la contribution de chacun au résultat final.

10Le problème du passager clandestin se pose donc ici plus qu’ailleurs. Avant même de partager les gains, il faut que la collaboration s’enclenche, or, comme nous l’avons vu, elle repose essentiellement sur le partage (d’informations, de ressources). Le partage ne va pas de soi, il engendre une vulnérabilité que beaucoup d’acteurs ne sont pas prêts à accepter. Pour lever ce frein, la solution principale est de développer la confiance entre les partenaires ce qui demande du temps. Il existe donc une dynamique de la collaboration et des réseaux : au départ, les domaines de la collaboration sont étroits et la coordination se fait essentiellement par contrat, puis la confiance se développe et la collaboration peut s’approfondir. La collaboration n’est pas un état, c’est un processus.

11Les quatre premières contributions présenteront différentes formes de collaboration, les cinq contributions suivantes les raisons de la création et du développement de réseaux et les six dernières contributions présenteront divers modes de gestion des réseaux.

12Nous espérons que vous ressentirez le plaisir que nous avons eu à collaborer pour l’écriture de cet ouvrage.

13Bonne lecture.

Notes de bas de page

1 [http://www.chaire-franchise-commerce-reseau.fr].

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