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Du ciel à la terre

 | 
Florent Quellier
, 
Georges Provost

Quatrième partie. Clergé et agriculture dans la modernité du xixe siècle

De la charrue à la plume : les prêtres et l’agriculture dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes au xixe siècle

Samuel Gicquel

Texte intégral

  • 1 Michel Lagrée, Religion et cultures en Bretagne, 1850-1950, Paris, Fayard, 1992, 602 p.

1Dans l’ensemble de la France, les relations entre la religion et la politique ou la religion et la culture ont davantage suscité l’intérêt des historiens de la période concordataire que les liens entre le champ religieux et le champ économique. En Bretagne, les recherches de Michel Lagrée constituent toutefois une exception. Son ouvrage pionnier Religion et cultures en Bretagne 1 démontra l’importance de l’influence du catholicisme sur l’économie en général et sur l’agriculture en particulier. Ses travaux, centrés sur la période 1850-1950, décrivent l’émergence des organisations et de l’enseignement agricoles ; toutefois, ils ne livrent pas un tableau exhaustif des relations entre le catholicisme breton et l’agriculture.

  • 2 Samuel Gicquel, Prêtres de Bretagne. Les carrières ecclésiastiques dans les diocèses de Saint-Brie (...)
  • 3 D’après les « états des jeunes gens qui se destinent à l’état ecclésiastique » (Archives nationale (...)

2Des recherches sur le clergé concordataire des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes, entreprises pour la réalisation d’une thèse sur les carrières ecclésiastiques2, permettent de compléter cette approche. L’étude de l’interaction entre l’un et l’autre est davantage qu’une simple recherche sur l’articulation entre un groupe social et une activité économique. Il s’agit aussi d’un travail sur l’identité des ecclésiastiques, massivement issus de la paysannerie3. En outre, le prisme des liens entre clergé et agriculture permet d’appréhender la diversité des formes d’apostolat et l’évolution de celles-ci.

3L’intérêt des prêtres étudiés pour l’agriculture se manifeste tout au long de la période concordataire mais il se traduit de façon variée selon l’époque et l’origine sociale de l’ecclésiastique : tandis que certains ecclésiastiques sont de véritables cultivateurs, d’autres préfèrent la réflexion à la pratique, au sein de sociétés d’agriculture, ou, à la fin du xixe siècle, de syndicats.

Les prêtres cultivateurs

  • 4 E. Vivier, « Note sur les défrichements qui se sont accomplis dans la commune de Saint-Jacut-du-Mé (...)

4De la direction de véritables fermes au jardinage, les pratiques agricoles des prêtres sont très diverses. L’élevage et la mise en valeur de terres par des ecclésiastiques semblent tolérés dès lors qu’ils permettent une amélioration collective du bien-être. Mathurin Boinet (1796-1882), recteur de Saint-Jacut-du-Méné de 1833 à 1850, qui exploite une douzaine d’hectares de terre et encourage ses paroissiens à défricher les landes, est autorisé par Mgr Le Mée à poursuivre son travail, après avoir convaincu l’évêque de l’utilité de sa tâche. En utilisant le bénéfice de 26 000 fr. occasionné par la vente des landes pour reconstruire l’église, l’école et le presbytère4, il montre en effet que ses activités agricoles sont la prolongation de son sacerdoce, et non pas une activité « étrangère à son ministère », comme le prétendent ses opposants.

  • 5 Abbé Person, L’abbé Guy Homery, fondateur de la Congrégation des Filles de la Divine Providence de (...)
  • 6 Semaine religieuse du diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier, 28 avril 1881.
  • 7 Auguste Chatton, Souvenirs d’un ancien élève du Petit séminaire de Plouguernével, Saint-Brieuc, im (...)

5À la même époque, le fondateur et supérieur des Filles de la Providence de Créhen, Guy Homery (1781-1861), est autorisé à cultiver du lin pour produire du linge pour sa communauté5. L’exemple d’Honoré Carré (1828-1881), un cultivateur de Saint-Guen devenu prêtre seulement à 32 ans, est encore plus spectaculaire. Après avoir enseigné le français pendant cinq ans au Petit séminaire de Plouguernével, cet ancien élève de l’école d’agriculture de Grandjouan fut nommé directeur des cultures du séminaire cornouaillais par son supérieur. En fait, il exploita la ferme voisine de Coathual, qui appartenait alors au séminaire. En douze années d’activité, il mit en culture 200 hectares de landes 6 et obtint la reconnaissance des cultivateurs environnants qui le nommèrent président du comice agricole du canton de Rostrenen. Le vicaire général Auguste Chatton (1825-1914), auteur d’une monographie sur le petit séminaire de Plouguernével, rapporte qu’ » il dirigeait toutes les opérations de son comice, présidait toutes les assemblées, et ne paraissait nulle part plus heureux qu’au milieu de ces bons laboureurs7 ». À sa mort, la gestion des terres du petit séminaire fut confiée à un autre ancien agriculteur devenu prêtre, Claude Padel (1843-1885).

  • 8 Abbé Sérandour, Histoire de la commune de Duault dans les Côtes-du-Nord, exemplaire dactylographié (...)
  • 9 Archives diocésaines de Saint-Brieuc, 4 F 2, rapport du curé-doyen de Rostrenen, 5 juillet 1853.

6Les prêtres cultivateurs se rencontrent jusqu’à la fin de la période concordataire, comme le prouve l’exemple de François Colin (1835-1909), recteur de Duault de 1876 à 1909. « Sa ferme et son église sont les pôles de [s] a vie » écrit à son sujet l’un de ses successeurs8. Depuis 1893, l’abbé Colin avait en fermage quatre hectares de terre, qu’il cultivait lui-même dans l’intention d’utiliser les bénéfices pour résorber la dette contractée à l’occasion de la construction de la nouvelle église. Ici encore, sa présence dans un champ est tolérée car l’activité agricole est perçue comme un investissement qui profite à l’ensemble de la communauté paroissiale. À l’inverse, elle est critiquée lorsqu’elle s’apparente à un loisir individuel qui ne sert pas l’intérêt général. Au milieu du xixe siècle, dans un rapport adressé à l’évêque de Saint-Brieuc, le curé-doyen de Rostrenen s’indigne ainsi qu’un vicaire du canton de Callac passe trop de temps à s’occuper de son cheval et à le mener dans les foires agricoles9.

  • 10 Voir par exemple A. Chatton, Souvenirs d’un ancien élève…, op. cit., p. 329-330.

7À la lumière de ces quelques exemples, il semble que de nombreux prêtres bretons aient pratiqué l’élevage ou aient cultivé la terre en marge de leur sacerdoce. Pour beaucoup d’ecclésiastiques, cette activité est une véritable passion, qui permet de retrouver sa culture familiale. L’argument économique n’est pas forcément un simple prétexte pour s’attirer les faveurs de l’évêque mais un élément supplémentaire qui rend l’agriculture attractive aux yeux du clerc. En travaillant la terre pour son ministère, il réconcilie la culture héritée de sa famille et la culture imposée au séminaire. Par ailleurs, le travail agricole bénéficie à cette époque d’une image positive. Les sermons et les textes apologétiques abondent en effet de références évangéliques aux travaux des champs, en particulier à la moisson des champs. En outre, les figures tutélaires de saint Bruno et de saint Bernard sont souvent évoquées pour montrer l’utilité des défrichements réalisés par les clercs10.

8L’objectif de ces prêtres qui se font cultivateurs n’est pas de partager le quotidien de leurs fidèles. Parfois, certaines pratiques agricoles contribuent même à accentuer la distance symbolique entre le clerc et ses ouailles. La diffusion d’innovations agronomiques ou le lancement de travaux de défrichement peuvent être pour un prêtre le moyen de montrer son savoir ou d’affirmer son autorité. Les remarquables plantations du recteur de Groix, une île pauvre en bois, le distinguent ainsi assurément de ses fidèles. L’élevage ou la culture de céréales n’étant pas indispensable à sa subsistance, il couvre d’arbres les terres du presbytère. Le 10 mars 1827, le recteur-arboriculteur Marc Le Livec (1788-1852), d’origine rurale, établit fièrement la liste de ceux qu’il vient de mettre en terre :

  • « 2 acacias
  • 2 tilleuls
  • 2 hêtres
  • 2 bouleaux
  • 3 peupliers
  • 6 châtaigniers
  • Un chêne
  • Un frêne
  • Trois ormeaux
  • 15 pommiers à écussonner ou à greffer
  • 15 poiriers à écussonner ou à greffer
  • 3 noyers
  • 5 amandiers
  • 9 cerisiers à greffer
  • 9 pruniers à greffer
  • Plusieurs boutures de peupliers, de saules, d’osier11. »

9Après ces plantations, la « prairie » du presbytère – qui s’apparente alors davantage à un bois ou à un verger – compte au total 140 arbres, sans compter les néfliers dont le nombre est inconnu. Il faut en plus y ajouter les arbres de la cour du presbytère, à savoir six pommiers, six poiriers, trois pruniers, trois néfliers, quatre cerisiers, un noyer, un lilas, un sumac ainsi que huit ormeaux à proximité. Ses ressources arboricoles et fruitières font du recteur de Groix un acteur économique incontournable dans l’île. Il n’est pas un simple paysan parmi d’autres.

  • 12 Arch. dép. du Morbihan, 1 V 221, état des presbytères en 1808.
  • 13 Arch. dép. du Morbihan, 1 V 220, communes dépourvues de presbytères en 1816.
  • 14 Archives de la paroisse Saint-Michel de Saint-Brieuc, cahier de paroisse, paragraphe relatif au pr (...)
  • 15 Archives municipales de Plaintel, registre des délibérations du conseil municipal, 18 août 1850.

10De nombreux presbytères sont ainsi de petites exploitations agricoles. Il faut toutefois attendre la seconde moitié du xixe siècle pour que la plupart des presbytères des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes soient entourés d’un jardin et d’une prairie propices à la culture ou à l’élevage. Au début de la période concordataire, plusieurs en sont dépourvus. Dans le diocèse de Vannes, c’est le cas par exemple à Belle-Île en 1808, où le jardin du presbytère a été vendu pendant la Révolution12, à Auray jusqu’au milieu des années 1810 ou à Lignol en 181613. Aucun cas de presbytère sans jardin n’a été rencontré dans la deuxième partie du xixe siècle. Celui de la paroisse Saint-Michel à Saint-Brieuc, bâti dans un milieu urbain en 1833, permet par exemple au curé François Jus (1815-1886), un prêtre d’origine rurale, de construire un poulailler et un verger de plusieurs dizaines d’arbres fruitiers. Cet ecclésiastique avait visiblement des notions d’arboriculture : il remplaça en effet les arbres les moins productifs, ajouta des pruniers contre le mur mal exposé et quelques pommiers nains devant les poiriers, soucieux de ne pas leur faire d’ombre14. Les chefs de paroisse ne sont pas les seuls à posséder un jardin autour de leur logement. Pierre Quintin (1799-1875), aumônier des Filles de la Sagesse de Saint-Quihouët, à Plaintel, possède autour du domicile mis à sa disposition un poulailler, une prairie pour son cheval et un jardin délimité par un talus de fraisier, un carré de haricots et une « couche à melons15 ».

  • 16 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, V 2252.
  • 17 Arch. dép. du Morbihan, 30 J 34/6.

11À la fin du xixe siècle, un grand jardin devient même un élément indispensable pour un presbytère. À Plessala, dans le diocèse de Saint-Brieuc, la surface de la parcelle du presbytère édifié à la fin des années 1860 est ainsi plus de cinq fois supérieure à celle de l’ancien16. Dans la paroisse de Carnac, dans le diocèse de Vannes, le modeste presbytère est remplacé par un édifice imposant entouré d’un jardin, de prairies et d’un verger17.

12La présence d’un vaste espace de production, conjugué au caractère imposant du nouveau bâtiment, contribue à marquer l’honneur du sacerdoce et souligne l’effort de la communauté paroissiale en faveur de ses prêtres.

Plan général du presbytère de Carnac avec ses dépendances.

Plan général du presbytère de Carnac avec ses dépendances.

Source : Arch. dép. du Morbihan, 30 J 34/6.
« Légende :
A : pavillon à démolir
B : entrée de la cour projetée
C : terrasse à défaire
D : cour
E : construction projetée
F : terrasse de plain-pied avec rez-de-chaussée
G : lieux d’aisance
H : entrée
I : parterres
J : allée élevée, séparant les deux parties du jardin
K : ancien presbytère, à démolir
L : cour
M : remises
N : écuries
O : bûcher
P : entrée de la cour
Q : buanderie
R : lieux d’aisance
S : petit parterre
T : tonnelle projetée
U : escalier pour descendre de l’allée dans la cour
V : prairie à transformer en verger.
X : entrée de la prairie
 : puits
La ligne XY sépare le jardin de la prairie. »

  • 18 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 3 E 74/280, inventaire après décès de Jean-Louis Jouet, 18 octobre 1 (...)

13Comme de nombreux presbytères ruraux, celui de Carnac possède également une écurie. Si l’existence d’écuries se justifie par la nécessité de posséder un cheval dans les vastes paroisses, leur présence contribue encore davantage à faire de certains presbytères de petites fermes. L’inventaire après-décès du curé de Plouguenast, Jean-Louis Jouet (1827-1900), est celui d’une petite exploitation agricole. À sa mort, le curé possédait deux vaches, deux ares de choux, trois de rutabagas, près de deux tonnes de foin ainsi que le matériel nécessaire à la fabrication du cidre, à savoir un moulin à pommes, un pressoir et plus de vingt barriques et fûts18. L’élevage et la culture de quelques ares constituent pour de nombreux prêtres une source de revenus difficile à quantifier, mais qui contribue certainement à la relative aisance matérielle du clergé paroissial et à l’attractivité de la prêtrise chez les fils de paysan.

  • 19 Archives diocésaines de Vannes, Z 4, Petite histoire de ma vie, autobiographie manuscrite de Jean- (...)
  • 20 Semaine religieuse du diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier, 1er avril 1892, p. 231. Manuel théoriqu (...)

14À la fin du xixe siècle, un jardin d’ornement entoure de plus en plus souvent le presbytère. À Carnac par exemple, l’espace d’agrément avoisine ainsi l’espace de production. La figure du prêtre-jardinier fait alors son apparition. Dans son autobiographie, Jean-François Le Gouguec (né en 1875) se rappelle ainsi qu’il s’adonnait avec bonheur à la culture des fleurs au cours de ses loisirs, alors qu’il était jeune vicaire, dans le diocèse de Vannes19. Les autorités diocésaines semblent alors encourager ces pratiques, comme en témoigne le compte rendu d’un manuel d’horticulture, publié dans la Semaine religieuse de Saint-Brieuc en 1892. L’administration épiscopale porte ainsi à la connaissance des prêtres le moyen de parfaire leurs notions de botanique, d’arboriculture et de savoir cultiver un jardin potager20.

  • 21 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest au xixe siècle, Lille, atelier de reproduction des thèses (...)

15L’importance de l’activité de ces prêtres-cultivateurs ou jardiniers doit être tempérée par deux observations. Premièrement, cette autarcie relative n’est pas spécifique au clergé. Jacques Léonard l’a également décrite chez les médecins bretons, nombreux à se transformer en agriculteurs21. Par ailleurs, l’activité réelle des prêtres-cultivateurs est en partie inconnue. S’il est certain que beaucoup de prêtres gèrent de quelques ares à quelques hectares de terre et que certains ecclésiastiques n’hésitent pas à manier la charrue, la réalité du travail effectué échappe largement. S’agit-il de parcelles cultivées par le prêtre, occasionnellement ou tout au long de l’année, ou plutôt de terres dont la mise en valeur est réalisée par des laïcs sous les ordres du recteur ?

Agriculture et sociabilité

  • 22 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 7 M 18.
  • 23 Bulletins de l’Association bretonne, listes des membres.

16L’intérêt des clercs pour l’agriculture ne se limite pas à la pratique. À partir de la Monarchie de Juillet, il se manifeste aussi par l’importance des adhésions de prêtres aux associations qui débattent des questions agricoles. En 1846, quatorze souscripteurs de la Société départementale d’agriculture des Côtes-du-Nord appartiennent au clergé séculier du diocèse de Saint-Brieuc22. L’Association bretonne, qui s’intéresse particulièrement à l’agriculture et à l’archéologie, compte également plusieurs ecclésiastiques des évêchés de Saint-Brieuc et de Vannes parmi ses membres : deux en 1843, onze en 1853, puis seize en 187623. À la différence des prêtres-cultivateurs ou jardiniers, qui sont souvent de simples vicaires ou des chefs de paroisse ruraux, les prêtres qui adhèrent à ces associations sont souvent des ecclésiastiques à la carrière remarquable.

Fonction occupée par les membres de la Société d’agriculture des Côtes-du-Nord en 1846 et de l’Association bretonne en 1876

Fonction occupée par les membres de la Société d’agriculture des Côtes-du-Nord en 1846 et de l’Association bretonne en 1876

17Les curés et les membres de l’administration diocésaine sont sur-représentés par rapport aux vicaires et recteurs. Alors que l’intérêt de ces derniers pour les questions agricoles se voit principalement à leur activité dans les champs et les jardins, l’élite diocésaine est surtout présente dans les salons. Elle se sent davantage à sa place au sein d’associations ou de sociétés savantes fréquentées par de nombreux hommes politiques tels Glais-Bizoin pour la Société départementale d’agriculture ou Huon de Pénanster pour l’Association bretonne, par la bourgeoisie et par l’aristocratie foncière, cette dernière étant surtout présente dans l’Association bretonne, plus conservatrice. La présence de quelques vicaires ne doit pas tromper ; les deux vicaires d’Uzel suivent vraisemblablement leur curé en 1846 et l’adhésion de Pierre Euzenot (né en 1842) à l’Association bretonne est celle d’un jeune prêtre érudit qui devient curé en 1888.

  • 24 Jean-Pierre Chaline, Sociabilité et érudition. Les sociétés savantes en France, xixe-xxe siècles, (...)
  • 25 Catherine Pellissier, Loisirs et sociabilités des notables lyonnais au xixe siècle, Lyon, Éditions (...)

18Son itinéraire montre que le passage par ces associations, qui permet de nouer des relations et de s’insérer dans des réseaux laïcs et cléricaux, peut constituer une bonne stratégie de carrière pour un prêtre. Louis Épivent (1805-1876) devient ainsi évêque d’Aire et Dax en 1859 alors qu’il est curé de la cathédrale et membre de la Société départementale d’agriculture des Côtes-du-Nord et Claude Guitterel (1843-1925), professeur du Petit séminaire de Plouguernével, finit sa carrière comme curé. Ces associations sont en effet un lieu de sociabilité 24 fréquenté par les élites civiles et religieuses ; leur fréquentation permet d’étendre ses réseaux et de se distinguer aux yeux des membres de l’administration diocésaine. Pour les prêtres bretons, comme pour les notables lyonnais du xixe siècle25, l’adhésion à une association savante, y compris à celles qui s’intéressent aux questions agricoles et agronomiques, permet d’entretenir des relations préexistantes et de multiplier les contacts. Toutefois, cette voie propice à la distinction n’est pas à la portée de tous les ecclésiastiques concordataires. Y adhérer nécessite en effet de posséder un capital culturel ou intellectuel compatible avec les formes de sociabilité propres aux associations agricoles.

  • 26 Édouard Loisy, Saint-Ilan, 1843-1993. 150 ans au service des jeunes, Saint-Brieuc, Les Presses bre (...)
  • 27 Pascal Clément, Saint-Ilan, destin d’une colonie pénitentiaire agricole privée et catholique au xi (...)
  • 28 Marcel Launay, Le diocèse de Nantes sous le Second Empire. Mgr Jaquemet (1849-1869), Nantes, Cid É (...)

19La proximité entre le clergé et les élites sociales et économiques sur les questions agricoles s’observe également lors de la création de l’école Saint-Ilan, située à Langueux, aux portes de Saint-Brieuc. Cette colonie agricole, qui joua simultanément le rôle d’établissement pénitentiaire éducatif et d’orphelinat, fut fondée par le philantrophe briochin Achille Latimier du Clésieux, dont la famille avait fait fortune dans le commerce de la toile au xviiie siècle26. Il reprenait ainsi en partie le projet d’orphelinat agricole, conçu par son ami Jean-Marie de Lamennais, ancien secrétaire et vicaire général capitulaire du diocèse de Saint-Brieuc. En outre, il était assisté par un autre clerc ultramontain, Pierre Ropers (1796-1882), qui exerça la fonction d’aumônier et aida le fondateur à diriger la colonie entre 1846 et 185527. L’abbé Ropers quitta cette fonction lorsque Achille du Clésieux décida de faire appel à la Congrégation des Pères du Saint-Esprit, ce qui constituait selon lui un gage de pérennité pour la survie de sa fondation, encore fragile. La présence de ce prêtre dans un établissement agricole à vocation éducative est révélatrice de l’intérêt porté par les prêtres aux questions agricoles. Elle n’est d’ailleurs pas une exception en Bretagne, l’abbé Bauduz ayant fondé un orphelinat agricole similaire près de Nantes en 185728.

L’engagement syndical

  • 29 Il s’agit soit de Pierre Videlo (né en 1838), recteur de Moréac à la fin du xixe siècle, soit de J (...)
  • 30 Pierre-Yves Toullelan, La notion de syndicalisme agricole dans le Morbihan, 1880-1940, mémoire de (...)
  • 31 Semaine religieuse du diocèse de Vannes, 9 septembre 1905, p. 709-711 et 23 septembre 1905, p. 751 (...)

20À la fin du xixe siècle, le tournant social observé dans l’Église entraîne l’apparition d’une nouvelle forme d’engagement des prêtres passionnés par les questions agricoles. Ceux-ci ne se contentent plus de cultiver quelques ares ou de débattre des questions agronomiques mais cherchent à défendre les agriculteurs par la voie syndicale. Cette forme d’action ne se substitue pas aux précédentes mais elle s’y ajoute, confirmant ainsi l’intérêt que portent les prêtres aux questions agricoles et la diversité de l’expression de celui-ci selon la période. L’abbé Videlo29, par exemple, tout en demeurant membre de l’Association bretonne, est à la fin du xixe siècle un membre actif de l’USABM (Union des syndicats agricoles de Bretagne méridionale), présidée par le sénateur-maire de Vannes. Il rédige notamment pour le bulletin de l’Union un rapport sur le mouvement syndical dans le Morbihan en 1898 et dirige la commission chargée de promouvoir l’enseignement agricole30. L’Union des syndicats agricoles, bien secondée par le curé d’Hennebont, Jean-Marie Le Moing (1852-1928), joua notamment un rôle décisif dans l’ouverture de l’école d’agriculture d’Hennebont en 1905. L’objectif de cet établissement quelque peu élitaire à en juger par la division des élèves en fonction des frais de scolarité dont ils s’acquittent, est de faire acquérir aux élèves des « connaissances théoriques et pratiques pour la culture raisonnée du sol » et de lutter ainsi contre l’exode rural31.

  • 32 P.-Y. Toullelan, La notion de syndicalisme…, op. cit., p. 58.
  • 33 Annuaire administratif des Côtes-du-Nord, 1905, p. 200.

21L’action syndicale de l’abbé Videlo n’est pas isolée. Selon Pierre-Yves Toullelan, dans la plupart des syndicats agricoles, « on voit à côté du président aristocrate, le secrétaire curé32 ». Dans le diocèse de Saint-Brieuc, l’action de Rémi Le Mée (1836-1920) fournit un exemple probant de la diversité avec laquelle l’intérêt pour les questions agricoles s’exprime à la fin du xixe siècle. Ce recteur de Mérillac, une paroisse d’environ 800 habitants, est simultanément membre de l’Association bretonne, apiculteur et président de la Société des apiculteurs de Bretagne, fondée en 1896, dont le « but est de propager et d’encourager l’élevage des abeilles en Bretagne et de servir d’intermédiaire pour la vente avantageuse des produits et pour l’achat des instruments et objets nécessaires à l’apiculture 33 ». Cette société est donc un véritable syndicat d’apiculteurs. Depuis son presbytère, il rédige un mensuel consacré à l’apiculture, L’Abeille de Mérillac, dont la couverture, qui associe le clocher et la ruche, montre symboliquement l’importance des liens entre le catholicisme et l’apiculture, et plus généralement l’agriculture.

  • 34 L’Abeille de Mérillac, n° 9, juin 1897.

22Dès sa première année, en 1897, 35 prêtres du diocèse de Saint-Brieuc y sont abonnés34. Ces ecclésiastiques, d’une moyenne d’âge de 47 ans, appartiennent à toutes les générations. Parmi eux fi gurent de nombreux vicaires et recteurs ainsi que deux supérieurs de séminaire : le clergé y semble représenté dans sa diversité. En revanche, la liste ne compte que deux Bas-Bretons.

Source : L’Abeille de Mérillac, n° 1, 1896.

  • 35 L’Abeille de Mérillac, n° 27, décembre 1898.

23Pour autant, le rayonnement de L’Abeille de Mérillac et la renommée de son président ne se limitent pas à la partie gallèse du diocèse de Saint-Brieuc. Rémi Le Mée remporte ainsi un premier prix pour ses cires gaufrées et un prix d’honneur pour ses hydromels lors du concours de l’Association bretonne, organisé à Vannes en 189835 ; il prononce dans l’ensemble de la Bretagne des conférences remarquées sur l’état de l’apiculture bretonne et obtient un soutien financier de plusieurs Conseils généraux. En outre, les publicités et les lettres insérées dans L’Abeille de Mérillac montrent que l’abbé Le Mée est en contact avec des apiculteurs de toute l’Europe occidentale. Il est alors probablement l’apiculteur le plus connu de l’un des départements les plus mellifères de France. Son exemple illustre ainsi la diversité des formes de réussite personnelle et d’accès à la notabilité au sein du clergé à la fin du xixe siècle.

  • 36 Archives diocésaines de Vannes, Z 4, Mémoires de Guillevic, p. 309.
  • 37 Christian Sorrel, Libéralisme et modernisme. Mgr Lacroix (1855-1922). Enquête sur un suspect, Pari (...)
  • 38 André du Bois de la Villerabel, « Syndicats agricoles paroissiaux », Revue du clergé français, 1er(...)

24L’investissement personnel des prêtres dans les syndicats agricoles n’est pas l’apanage des prêtres des paroisses rurales. Le supérieur du grand séminaire de Vannes, Pierre-Emmanuel Dieulangard (né en 1845), dont l’engagement social s’inscrit dans la lignée de Rerum Novarum, fonda ainsi au début des années 1890 un syndicat d’agriculteurs de la région vannetaise. Alertés de leurs difficultés notamment par Jean-Augustin Guillevic (18611937) – un professeur qui avait un frère cultivateur – il réunit alors au Grand séminaire les agriculteurs des environs pour les aider à faire face aux marchands vannetais, mieux organisés36. André du Bois de La Villerabel (1864-1938), un ancien directeur de la Semaine religieuse de Saint-Brieuc qui s’était fait remarquer à l’échelle nationale en collaborant à plusieurs reprises à la Revue du clergé français37, encouragea pour sa part les prêtres à s’impliquer dans la création de syndicats agricoles paroissiaux. Il rédigea pour cette publication un article destiné à servir de guide aux ecclésiastiques désireux d’en fonder38. Sa réflexion théorique, publiée dans une revue nationale, le distingue de ses confrères. Il manifeste lui aussi son intérêt pour les questions agricoles mais se place exclusivement sur le terrain intellectuel et définit des orientations sociales et pastorales, en utilisant de surcroît le canal d’une revue renommée. Tout en partageant les préoccupations de ses confrères, il fait fructifier son capital intellectuel – il est docteur en théologie et en droit canonique – et sa position acquise au sein du clergé. Cette stratégie de la distinction lui permet de devenir vicaire général du diocèse de Saint-Brieuc en 1906 puis évêque d’Amiens en 1915 et archevêque de Rouen en 1920.

  • 39 Michel Lagrée, Religion et cultures…, op. cit., p. 455-504.

25Ainsi, selon la période, les capacités physiques ou intellectuelles de chacun, l’intérêt des prêtres pour les questions agricoles s’exprime de façon différente : il peut se manifester tout simplement par la pratique de l’agriculture mais aussi, à partir de la monarchie de Juillet, par l’adhésion à des sociétés savantes ou, à la fin du xixe siècle, par l’engagement syndical. Cette typologie, qui présente les principaux liens entre le clergé séculier breton et l’agriculture pendant la période concordataire, laisse toutefois quelques questions en suspens. Le milieu des séminaires notamment reste méconnu : quels y sont les produits cultivés ? Par qui ? Y a-t-il la volonté de faire pénétrer les dernières innovations agronomiques ? En outre, dans les séminaires comme dans les presbytères, il demeure difficile de savoir exactement quels sont les revenus générés par la mise en culture de quelques ares ou hectares. Une photographie d’une exploitation à un moment donné ne remplace pas la description précise d’une activité sur plusieurs années. Enfin, il faudrait une étude d’ampleur pour connaître le rôle exact des clercs au sein des syndicats agricoles. Si, assurément, quelques prêtres comme les abbés Videlo ou Le Mée ont joué un rôle actif, certains ecclésiastiques y ont sans doute adhéré davantage par conformisme social ou politique que par réelle conviction. Et d’autres sont demeurés critiques, se méfiant de structures qui se situaient parfois hors du maillage paroissial. Il faut en effet attendre la Séparation des Églises et de l’État et surtout les années 1920 pour que le clergé breton s’implique plus massivement dans les organisations agricoles et dans la formation des jeunes cultivateurs39.

Notes

1 Michel Lagrée, Religion et cultures en Bretagne, 1850-1950, Paris, Fayard, 1992, 602 p.

2 Samuel Gicquel, Prêtres de Bretagne. Les carrières ecclésiastiques dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes (1801-1905), thèse d’histoire, 3 vol., Rennes 2, 2006.

3 D’après les « états des jeunes gens qui se destinent à l’état ecclésiastique » (Archives nationales, F19 830 et F19 832), réalisés à la fin du Premier Empire, la proportion de fils de paysans dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes est alors respectivement de 65 et 70 %. En 1896, le supérieur du Grand séminaire de Vannes, Jean-Marie Dubot, confirme qu’« en général, les élèves ecclésiastiques se recrutent dans les familles moyennes de paysans » (Archives diocésaines de Vannes, Z 4, lettre du 27 juillet 1896).

4 E. Vivier, « Note sur les défrichements qui se sont accomplis dans la commune de Saint-Jacut-du-Méné », Mémoires de la Société d’émulation des Côtes-du-Nord, 1865, t. I, p. 39-46.

5 Abbé Person, L’abbé Guy Homery, fondateur de la Congrégation des Filles de la Divine Providence de Créhen, Paris-Tournai, Casterman, 1928, p. 315.

6 Semaine religieuse du diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier, 28 avril 1881.

7 Auguste Chatton, Souvenirs d’un ancien élève du Petit séminaire de Plouguernével, Saint-Brieuc, imprimerie Prud’homme, 1899, p. 329-330.

8 Abbé Sérandour, Histoire de la commune de Duault dans les Côtes-du-Nord, exemplaire dactylographié conservé aux Archives diocésaines de Saint-Brieuc, non coté, p. 206.

9 Archives diocésaines de Saint-Brieuc, 4 F 2, rapport du curé-doyen de Rostrenen, 5 juillet 1853.

10 Voir par exemple A. Chatton, Souvenirs d’un ancien élève…, op. cit., p. 329-330.

11 Archives paroissiales de Groix, cahier de paroisse intitulé « Notes et renseignements par M. Le Recteur », 10 mars 1827.

12 Arch. dép. du Morbihan, 1 V 221, état des presbytères en 1808.

13 Arch. dép. du Morbihan, 1 V 220, communes dépourvues de presbytères en 1816.

14 Archives de la paroisse Saint-Michel de Saint-Brieuc, cahier de paroisse, paragraphe relatif au presbytère.

15 Archives municipales de Plaintel, registre des délibérations du conseil municipal, 18 août 1850.

16 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, V 2252.

17 Arch. dép. du Morbihan, 30 J 34/6.

18 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 3 E 74/280, inventaire après décès de Jean-Louis Jouet, 18 octobre 1900.

19 Archives diocésaines de Vannes, Z 4, Petite histoire de ma vie, autobiographie manuscrite de Jean-François Le Gouguec, p. 3.

20 Semaine religieuse du diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier, 1er avril 1892, p. 231. Manuel théorique et pratique d’horticulture, Paris, Téqui, 1892, 700 p.

21 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest au xixe siècle, Lille, atelier de reproduction des thèses, Lille III, 1978, p. 1499-1500.

22 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 7 M 18.

23 Bulletins de l’Association bretonne, listes des membres.

24 Jean-Pierre Chaline, Sociabilité et érudition. Les sociétés savantes en France, xixe-xxe siècles, Paris, Éditions du CTHS, 1998, 479 p.

25 Catherine Pellissier, Loisirs et sociabilités des notables lyonnais au xixe siècle, Lyon, Éditions lyonnaises d’art et d’histoire, Presses universitaires de Lyon, 1996, p. 95-102.

26 Édouard Loisy, Saint-Ilan, 1843-1993. 150 ans au service des jeunes, Saint-Brieuc, Les Presses bretonnes, 1993.

27 Pascal Clément, Saint-Ilan, destin d’une colonie pénitentiaire agricole privée et catholique au xixe siècle (1843-1903), mémoire de maîtrise d’histoire, Paris XIII, 1990, 88 p.

28 Marcel Launay, Le diocèse de Nantes sous le Second Empire. Mgr Jaquemet (1849-1869), Nantes, Cid Éditions, 1982, p. 332-334.

29 Il s’agit soit de Pierre Videlo (né en 1838), recteur de Moréac à la fin du xixe siècle, soit de Jean-Marie Videlo (né en 1866), vicaire de Bignan de 1891 à 1906.

30 Pierre-Yves Toullelan, La notion de syndicalisme agricole dans le Morbihan, 1880-1940, mémoire de maîtrise d’histoire, université de Rennes 2, 1978, p. 93.

31 Semaine religieuse du diocèse de Vannes, 9 septembre 1905, p. 709-711 et 23 septembre 1905, p. 751-752.

32 P.-Y. Toullelan, La notion de syndicalisme…, op. cit., p. 58.

33 Annuaire administratif des Côtes-du-Nord, 1905, p. 200.

34 L’Abeille de Mérillac, n° 9, juin 1897.

35 L’Abeille de Mérillac, n° 27, décembre 1898.

36 Archives diocésaines de Vannes, Z 4, Mémoires de Guillevic, p. 309.

37 Christian Sorrel, Libéralisme et modernisme. Mgr Lacroix (1855-1922). Enquête sur un suspect, Paris, Cerf, 2003, p. 89-91 et 122.

38 André du Bois de la Villerabel, « Syndicats agricoles paroissiaux », Revue du clergé français, 1er mai 1896, p. 453-464.

39 Michel Lagrée, Religion et cultures…, op. cit., p. 455-504.

Table des illustrations

Titre Plan général du presbytère de Carnac avec ses dépendances.
Légende Source : Arch. dép. du Morbihan, 30 J 34/6.« Légende :A : pavillon à démolirB : entrée de la cour projetéeC : terrasse à défaireD : courE : construction projetéeF : terrasse de plain-pied avec rez-de-chausséeG : lieux d’aisanceH : entréeI : parterresJ : allée élevée, séparant les deux parties du jardinK : ancien presbytère, à démolirL : courM : remisesN : écuriesO : bûcherP : entrée de la courQ : buanderieR : lieux d’aisanceS : petit parterreT : tonnelle projetéeU : escalier pour descendre de l’allée dans la courV : prairie à transformer en verger.X : entrée de la prairie : puitsLa ligne XY sépare le jardin de la prairie. »
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/5271/img-1.png
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Titre Fonction occupée par les membres de la Société d’agriculture des Côtes-du-Nord en 1846 et de l’Association bretonne en 1876
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/5271/img-2.png
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Légende Source : L’Abeille de Mérillac, n° 1, 1896.
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/5271/img-3.png
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