Version classiqueVersion mobile

Les transports de la démocratie

 | 
Mathieu Flonneau
, 
Léonard Laborie
, 
Arnaud Passalacqua

Deuxième partie. La popularisation de la mobilité et le projet démocratique

Suivre les lignes, briser les cercles : le chemin de fer urbain et l’idéal socialiste à Londres et Paris au tournant du XXe siècle

Carlos López Galviz

Texte intégral

  • 1 Cet article est une version française de López Galviz C., “Converging lines, dissecting circles: r (...)

1Au long du XIXe siècle, le chemin de fer a été présenté aussi bien à Londres qu’à Paris comme l’un des instruments des transformations urbaines et de la réforme sociale, en accord avec les intérêts tantôt convergents tantôt divergents des grandes compagnies ferroviaires, d’une part, et des autorités métropolitaines de l’autre1. Sous cet angle, les rapports entres les zones centrales de forte densité, les périphéries en perpétuelle extension et la possibilité d’offrir des moyens de transport accessibles et rapides ont été constamment redéfinis en fonction des intérêts de chaque acteur. La conception et la mise en œuvre du développement d’un réseau ferré pour chacune des agglomérations supposait la définition d’un plan coordonné. Or un tel document se trouvait nécessairement contraint simultanément par l’inertie administrative et les pratiques des compagnies, comme par le poids des institutions chargées de définir la nature et l’étendue du réseau à construire.

2L’analyse proposée ici vise à comprendre dans quelle mesure la planification ferroviaire élaborée à Paris et à Londres à la fin du XIXe siècle a été à la fois un des éléments et le résultat de la prise en considération de l’intérêt général dans les réflexions sur l’espace urbain des deux capitales. Pour Paris, nous considérerons l’un des derniers plans du métro avant sa construction à la veille du XXe siècle, en interrogeant les idées qu’il porte et son lien avec la quête de légitimité du conseil municipal. Cette réflexion sera contrebalancée par l’analyse des tentatives de réorganisation du réseau ferré londonien, dont l’objectif, défendu conjointement par des autorités centrales et des figures comme celle de Charles Booth, fut d’obtenir une meilleure coordination. De cette confrontation ressort l’image d’une capitale française marquée par une vision relativement fragmentée des questions en jeu, s’opposant à la coordination entre logement et transport qui fut alors proposée à Londres.

Londres et Paris, capitales ferroviaires

3Depuis les premiers discours proposant un chemin de fer urbain à Londres et à Paris dès les années 1830, le problème de la forte congestion des voies en surface s’est trouvé articulé avec les projets de métropolitain mais aussi avec l’idée d’une réforme plus générale des institutions, du cadre légal et des pratiques sociales. Des réformateurs comme Florémond de Kérizouet à Paris et Charles Pearson à Londres alertèrent leurs contemporains sur la nécessité d’établir une réelle coordination entre les problèmes de logement et de transport. À partir des années 1860, la planification et la construction des premières sections des lignes Metropolitan et District à Londres et les nombreux débats tenus par les Conseils municipal et général à Paris à propos de projets de métro débouchèrent sur la possibilité de concrétiser la vision du chemin de fer comme instrument du développement urbain. À Londres, la ligne District, dont le premier tronçon fut ouvert en 1868, fut conçue comme le maillon sud d’une « rocade intérieure » (inner circle), dont l’objectif était de délester les voies de surface, notamment en distinguant le trafic de voyageurs du trafic de marchandises, alors tenu en grande partie par les principales compagnies ferroviaires. À Paris, l’absorption administrative du territoire de la banlieue proche en 1860 suscita des propositions de lignes circulaires comme transversales capables de relier le centre à la périphérie, au risque de renforcer la division déjà marquée par l’enceinte de Thiers. Un premier tronçon du Chemin de fer de ceinture fut d’ailleurs inauguré en 1852 afin d’assurer un trafic de marchandises entre les banlieues n’ayant pas de lien direct avec le centre de l’agglomération.

4Les années 1880 à 1900 furent marquées par l’introduction de nouvelles technologies dans le monde des transports urbains, en particulier l’électricité. Le tube londonien fut ainsi conçu comme un chemin de fer électrique parcourant des tunnels d’acier creusés plus profondément dans le sous-sol urbain. Le discours récurrent promouvant la connexion d’un centre-ville pollué aux banlieues plus saines fut l’un des arguments majeurs des promoteurs des lignes successivement ouvertes : la ligne City and South London en 1890 (ultérieurement intégrée à la Northern), la Central London en 1900 et les lignes de tube inaugurées au cours de la première décennie du XXe siècle (Bakerloo, Piccadilly et Hampstead). À Paris, les six premières lignes du métro construites entre 1898 et 1910 reflètent les tensions entre les idéaux socialistes du Conseil municipal et les intérêts de l’État et des grandes compagnies ferroviaires. De ce fait, la frontière de l’enceinte fut répliquée en sous-sol : le chemin de fer régional et national fut complètement déconnecté de ce chemin de fer local qu’est le métro.

5Cette avancée du chemin de fer dans les deux agglomérations a été déterminée par des jeux d’acteurs très différents, marqués par des dynamiques distinctes au long du XIXe siècle. Malgré la montée en puissance de la nouvelle autorité métropolitaine qu’est le London County Council (LCC), fondé en 1889, le rôle prédominant des initiatives privées est à l’origine de l’organisation généralement fragmentée des chemins de fer londoniens. À Paris, les plans successifs ont été le plus souvent marqués par l’antagonisme entre les niveaux d’administration, du national au local. Simultanément, les débats sur les chemins de fer urbains achoppaient sur une difficulté majeure : la croissance de l’agglomération semblait devoir exclure certaines parties de la population, notamment les travailleurs et les pauvres. Pearson comme de Kérizouet ont identifié cette tendance dès les années 1840 en proposant déjà les solutions à leurs yeux les plus efficaces pour résoudre ce problème. Rien ne semble avoir réellement changé au cours des années 1890-1900, lorsque les projets de métro s’alimentaient encore de l’idée de réparer ce qu’avaient créé les réalisations passées. Ainsi, l’enjeu principal du chemin de fer urbain, à Paris comme à Londres, était bien d’inscrire dans le sous-sol ces rêves et visions idéales.

À Paris : la vision socialiste des atouts du chemin de fer

  • 2 Villain P., Le 107e projet de Chemin de Fer Métropolitain, Paris, 1887 (extrait des Annales indust (...)

6La multiplicité des projets de métro proposés pour Paris à partir des années 1880 comprend aussi bien de simples schémas de lignes circulaires ou de lignes traversant la ville d’Est en Ouest ou du Nord au Sud que des systèmes plus élaborés composés de plusieurs moyens de transport et présentant un caractère assez complet voire complexe. Le 107e Projet de chemin de fer métropolitain que publie P. Villain en 1887 figure parmi ces derniers2. Il se fonde notamment sur sept sections qui combinent lignes de métro, funiculaires, correspondances et station centrale près de l’Hôtel de Ville pour l’usage exclusif des voyageurs et des postes. Comme dans ses développements précédents, la vision de Villain reste confinée à la théorie ; mais ses idées, comme celles des autres acteurs impliqués dans la promotion d’un chemin de fer urbain depuis les années 1830, viennent renforcer l’expertise à propos des différentes options qui s’offrent à la ville et, surtout, à propos des caractéristiques qui rendent un projet plus faisable qu’un autre.

7Selon Villain, deux conditions principales doivent être réunies pour concevoir un système de circulation cohérent pour Paris. D’abord la disponibilité d’espaces urbains permettant la construction de nouvelles lignes de transport. Ensuite, les éléments techniques liés au choix de la traction et de l’infrastructure. Mais une autre dimension décisive et systématiquement présente durant le dernier quart du XIXe siècle méritait également d’être prise en considération : le combat politique entre le pouvoir municipal et le pouvoir national.

  • 3 Voir l’exposé par Lefebvre-Roncier P.-F., Conseil municipal de Paris, Rapports et Documents, 1886, (...)
  • 4 Cette question est abordée dans le troisième chapitre de López Galviz C., Cities, railways, modern (...)

8En avril 1886, le ministre des Travaux publics, Charles Baïhaut, présenta un projet de loi en faveur d’un nouveau chemin de fer urbain à Paris3. Après consultation du Conseil municipal, le projet reçut en mai l’approbation des Ponts et Chaussées. Le projet fut examiné par la suite par une commission municipale chargée d’étudier sa cohérence par rapport aux besoins en transport de la ville. La détermination de ces besoins était justement devenue l’un des sujets majeurs après la Commune de 1871. Depuis cet épisode, les tensions entre les pouvoirs national et municipal s’étaient exacerbées. Les deux niveaux adoptèrent bien souvent des positions antagonistes, en particulier sur le projet de métro pour la capitale qui se trouva chargé d’une forte valeur symbolique4.

  • 5 Parmi les demandes du Conseil municipal, citons également les tarifs ouvriers, l’utilisation de ma (...)

9La commission mit en avant l’importance du double choix du système constructif (sur viaduc ou en tunnel) et du type de méthode retenue pour sa réalisation. Une expertise technique de première main était disponible du fait de la construction d’infrastructures similaires à Berlin, Londres ou New York, mais la commission insista sur l’emploi d’une main-d’œuvre locale, stipulant clairement l’obligation d’imposer des mesures décrites comme « protectionnistes et socialistes5 ».

  • 6 Bien que complexe, il s’agit en fait d’un contrat par lequel les parties s’obligent chacune envers (...)

10Après de nombreux échanges entre le Conseil municipal et le ministère, le projet fut officiellement divisé en lignes essentielles et en lignes non essentielles. Un contrat synallagmatique concernant les premières lignes essentielles existait déjà entre l’État et le concessionnaire d’une part et entre l’État et les compagnies de chemin de fer de l’autre. Ceci rendait difficile tout changement à leur sujet6. C’est essentiellement en raison de nouvelles négociations sous la pression municipale que le tracé sur la rive gauche de la ligne circulaire devant relier la Gare d’Orléans au Trocadéro après avoir traversé la Seine fut abandonné et que de nouvelles études furent ouvertes. Un tracé révisé fut proposé après consultation des élus des arrondissements directement concernés. La nouvelle ligne devait bénéficier aux travailleurs en offrant un lien entre les quartiers périphériques du Sud (13e et 14e arrondissements) et des zones comme Montparnasse et Maison Blanche qui manquaient généralement de liaison avec le reste de Paris.

11Paul-Frédéric Lefebvre-Roncier, rapporteur au Conseil municipal, insista sur la nécessité d’une liaison directe avec les Halles, résultat d’une modification de l’itinéraire original, présenté comme l’un des exploits de la commission. Une nouvelle ligne souterraine reliant la gare Saint-Lazare et la place de la République, déjà étudiée en 1883, fut ajoutée au projet. Selon Lefebvre-Roncier, doté de cette nouvelle ligne et ayant reçu gain de cause du ministre, le projet revêtait « le caractère définitif d’un Métropolitain véritable et bien parisien ». Une liaison à l’Ouest entre la Ceinture et la nouvelle Ceinture, de la place de l’Étoile à la porte Maillot fut également ajoutée à la nouvelle version du projet, après consultation des quartiers concernés.

  • 7 Selon M. André, ce n’est que quatre ans plus tard que la crise prit fin, lorsque les indicateurs f (...)
  • 8 Conseil municipal de Paris, Rapports et Documents, 1886, no LXIX, p. 17.

12Mais les effets de la crise économique ouverte en 1882 étaient encore sensibles en 18867. Lefebvre-Roncier défendait donc l’intérêt politique et social d’un projet dont l’ampleur permettrait de favoriser la relance de l’activité, malgré le capital requis par une telle réalisation. La prise en considération des conditions locales du marché du travail des corps d’état se trouvait rappelée au ministre en charge de l’exécution du projet. L’entreprise devenait ainsi un symbole simultanément républicain, national et municipal. Bien que ne s’étendant que sur le territoire restreint de la capitale, le métro pourrait devenir un instrument pour faciliter la renaissance de la prospérité publique en France, grâce à l’approbation et l’appui des instances nationales8.

  • 9 Voir Larroque D., « Le Métropolitain : histoire d’un projet », op. cit., p. 60-68.

13Les Conseils municipal et général publièrent leur projet au mois de juillet 1886. Par une lettre du 21 juillet, Baïhaut demanda une rectification, si bien qu’une version amendée fut rendue publique le 6 août. Un nouveau projet de loi fut donc examiné par une commission parlementaire, qui rendit son rapport à la Chambre le 27 octobre 1886. Mais le projet fut finalement rejeté en juillet 18879.

  • 10 Voir ibid, p. 64 et 82.

14Ce rejet est lié aux tensions entre le Conseil municipal, les Préfectures et les institutions nationales, combinées aux facteurs économiques et politiques, qui mirent en avant certains enjeux. Ce qui mua la discussion en un débat apparemment sans fin incapable de déboucher sur une décision et encore moins sur une quelconque réalisation10. En outre, la coordination des transports parisiens portée par le projet fut diluée dans une atmosphère marquée par l’antagonisme des échelles administratives. « Telle est notre condition actuelle », affirmait Yves Guyot en 1883, avant de succéder à Baïhaut :

  • 11 Guyot Y., “The municipal organization of Paris”, Contemporary Review 43 (1883), p. 448. Voir aussi(...)

« Les deux préfectures [de la Seine et de police] toujours en guerre entre elles et avec le Conseil Municipal – une énorme machine, incapable de se déplacer sans friction par laquelle elle s’épuise sans résultat utile ; roues tournant dans des directions opposées ; l’intérêt public écrasé ou blessé à chaque tour ; efforts gigantesques sans résultat ; personne n’est responsable de quoi que ce soit ; une anarchie complète et sans espoir ; c’est la situation actuelle parce que l’autorité centrale est déterminée à être le maître de Paris et à laisser rien que l’ombre de la liberté municipale11. »

  • 12 Pour une liste des projets d’initiative privée, voir Reverard P., Des conditions d’exploitation du (...)
  • 13 Selon Dominique Larroque, le débat, ouvert en 1889, fut surdéterminé par des considérations plus l (...)

15La dichotomie apparemment insoluble entre l’intérêt local centré sur l’ouverture d’un système de transport exclusivement urbain et l’intérêt général le liant au réseau ferré national et, de ce fait, aux grandes compagnies, se mua en un conflit entre l’échelon national et le pouvoir local alors en quête d’autonomie. Ce qui empêcha toute réalisation avant 190012. La conciliation des différents intérêts s’avérait effectivement souvent mettre en tension les enjeux politiques et économiques13.

  • 14 Voir notamment Conseil municipal de Paris, Rapports et documents, Paris, 1898, xxiv.

16En 1897, le Conseil général des ponts et chaussées reconnut au métropolitain un caractère municipal, ce qui le fit relever de fait de l’intérêt local, mettant ainsi en quelque sorte fin au débat. Trois amendements furent produits par les Conseil d’État, le ministère de la Guerre et le Conseil général des ponts et chaussées : la largeur du matériel roulant fut portée de 2,10 m à 2,40 m afin d’accroître la capacité, l’écartement des rails fut porté de 1,30 m à 1,44 m, afin de supporter ces trains plus larges, et les conditions de travail furent améliorées afin de garantir un salaire minimum et une limitation du temps de travail quotidien14.

  • 15 Procès verbal, Paris, Conseil municipal de Paris, 30 mars 1898, p. 357. Pour un exemple de prolonge (...)

17La décision d’engager les travaux fut inscrite dans la loi du 30 mars 1898, qui déclara le projet d’utilité publique. La discussion autour de ce texte révéla les nombreuses insatisfactions qu’entretenaient encore les conseillers municipaux. Comme le notait le préfet de la Seine, aucun autre projet n’avait fait l’objet d’une étude aussi détaillée et de discussions aussi approfondies et pourtant, quand le débat semblait clos, de nouvelles objections se trouvaient encore exprimées15.

  • 16 Sur le rôle du baron Empain dans l’approvisionnement du métro en électricité, voir Beltran A., « U (...)

18La loi de 1898 définit un chemin de fer électrique d’intérêt local destiné aux voyageurs et à leur bagage à main. La concession fut initialement confiée à la Compagnie générale de traction qui s’associa aux Établissements Schneider du Creusot, afin de construire et d’exploiter le réseau envisagé, ce qui constituait un tournant : les nouvelles entreprises impliquées dans la production et la distribution d’électricité prenait ainsi pied dans un secteur dominé jusqu’alors par les compagnies ferroviaires. Ce qui fut accentué avec l’accord passé entre le concessionnaire final, la Compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris (CMP) et la Société d’électricité de Paris, à propos de la construction de l’usine d’approvisionnement électrique à Saint-Denis, ouverte en 1906. En outre, les capitaux étrangers – notamment ceux du conglomérat belge du baron Empain – jouèrent un rôle de plus en plus crucial au fur et à mesure de l’ouverture de lignes nouvelles16.

19Les lignes construites entre 1898 et 1910 dotèrent la ville d’un réseau de radiales est-ouest et nord-sud mais vinrent également renforcer l’offre circulaire de la Petite Ceinture. Le choix fut toutefois maintenu de rendre impossible l’accès des trains de grandes lignes à ce réseau, du fait du diamètre réduit des tunnels (2,40 m contre 3,20 m pour la norme nationale).

  • 17 Cette distinction entre le métro et les lignes ferroviaires nationales ne fit que s’accroître au l (...)

20Ainsi, dans une certaine mesure le cadre légal défini en 1898 représentait un compromis entre la Ville et l’État, qui intégrait notamment la demande des autorités militaires de maintenir un écartement des rails standard pour des raisons stratégiques. Mais le réseau de transport construit représentait aussi une affirmation de la souveraineté locale contre différentes pressions étatiques. En outre, les premiers plans ferroviaires qui avaient placé Paris au cœur du réseau national, dans les années 1840, se trouvaient déjoués par la décision de doter la capitale d’un réseau ferré urbain indépendant et incompatible. Si les coûts de construction furent réduits du fait de ce choix de gabarit, la réalisation du métro s’opéra clairement en opposition au réseau national17.

  • 18 Ce précédent du métro influença notamment les négociations postérieures dans les secteurs du gaz e (...)

21Par ailleurs, la CMP fut érigée en exemple en matière de conditions d’embauche et de travail : emploi statutaire, salaire minimum, limitation de la durée du travail à 10 heures par jour, jour de repos hebdomadaire, paiement plein des congés pour maladie, service médical et pharmaceutique gratuit, etc. Autant d’avancées considérées comme une victoire par la majorité socialiste du Conseil municipal et qui constituèrent un précédent important marquant une avancée sociale sans révolution, comme l’a souligné Dominique Larroque18.

22À Paris, le poids du pouvoir local fut décisif dans les choix finalement opérés. La vision socialiste de l’intérêt général l’a emportée, même si elle n’intègre qu’une partie de ce que serait un intérêt général commun aux différentes parties prenantes. C’est donc bien une vision partielle, voire partisane qui l’emporte, ce qui témoigne d’une réflexion peut-être encore inaboutie sur le concept. De même, l’idée d’utilité publique, discutée à la même époque à Londres, est sujette à un débat préalable aux choix des projets de transport.

À Londres : qu’est-ce que l’utilité publique ?

23Début 1901 se tint à Londres une conférence dont la conclusion unanime est explicite :

  • 19 Booth C., Improved Means of Locomotion as a First Step towards the Cure of the Housing Difficultie (...)

A complete system of transportation radiating from urban centres, and which shall be cheap, rapid and under municipal ownership, is a primary step towards dealing with the housing problem19.”

24Ce qui semblait valoir pour toute agglomération britannique prenait un poids particulier dans la capitale, qui posait les problèmes les plus aigus. Charles Booth, l’un des plus grands avocats de la question du logement, mais également de celle des transports de masse, était le principal orateur de cette conférence. Pour lui, le logement était principalement déterminé par les changements de la répartition des activités dans les districts londoniens, par l’arrivée constante de nouveaux migrants et par le manque de foncier dans les zones les plus centrales. La richesse produite, largement liée à ces facteurs, devait donc nettement contribuer à résoudre le problème : la question était bien de savoir comment les investissements à consentir pouvaient être appuyés sur la richesse qu’ils rendraient possible.

25Booth proposait un système combinant le tramway pour les courts trajets et les lignes souterraines et en viaduc pour les plus longs, capable de dépasser les limites métropolitaines de l’époque, afin de desservir les populations contraintes à un fort éloignement. Contrairement à la doctrine qui prévalait alors dans les milieux parlementaires, Booth subordonnait donc le réseau souterrain (Metropolitan, District et tube) aux lignes de surface et l’intérêt privé de son exploitation à l’intérêt public municipal, représenté par le LCC. Son apport le plus important était de proposer un service de transport accessible, financièrement comme spatialement, à l’ensemble de la population. De ce point de vue, les idées de Booth alimentèrent le débat plus large sur le rôle que le chemin de fer pouvait jouer dans la réforme sociale et dans l’amélioration du fonctionnement de la métropole.

26L’attachement de Booth à une autorité centrale ne relevait pas d’une volonté centralisatrice, mais bien plus d’un schéma destiné à renforcer la tendance d’alors à une autonomisation des quartiers, dont la vie locale devenait toujours plus intense. Partant de cette analyse des évolutions récentes de Londres, Booth proposait donc de planifier la métropole selon des axes de transport radiaux, un schéma de plus en plus classique, mais qui n’avait pu émerger jusqu’alors du fait de l’atomisation des initiatives privées des compagnies de chemin de fer.

27La tendance au développement de nouveaux noyaux urbains qui devenaient progressivement eux-mêmes de nouvelles extensions de la métropole est l’un des thèmes récurrents du débat sur la croissance de Londres, notamment au cours de la seconde moitié du XIXe siècle. Ainsi, H. G. Wells voyait-il les moyens de transport, en particulier le chemin de fer, comme les vecteurs de nouvelles relations entre l’individu, la société et ses lieux de vie :

  • 20 Wells H. G., « A paper on administrative areas read before the Fabian Society », annexes à Mankind (...)

A large proportion of our population to-day, a large and an increasing proportion, has no localized interests, at all as an eighteenth-century person would have understood locality20.”

28Pour lui, les nouvelles dynamiques métropolitaines devaient nécessairement l’emporter sur les structures anciennes en faisant éclater les repères spatiaux traditionnels. Des centres ruraux périphériques basculeraient alors dans les limites métropolitaines.

29Les transports semblaient donc être l’une des voies permettant de conserver une certaine unité à cet ensemble aux formes nouvelles que Wells définissait comme la de-localization. Il ne s’agissait pas uniquement de doter Londres de moyens de déplacement efficaces, mais aussi et même surtout de donner un sens aux relations nouvelles qui s’établissaient entre lieu de travail et lieu de résidence et à leurs effets sur l’administration de la capitale.

30Dans ce but, le schéma proposé par Booth s’appuyait sur cinq lignes radiales partant de Bank qui rejoignaient, en périphérie, le réseau ferroviaire national. Le tarif uniforme et abordable devait permettre une desserte de fréquence élevée – un train toutes les trois minutes – afin de réduire les temps d’arrêt. Les arrêts fixes s’accompagneraient de passages pour les piétons, témoins de l’attention portée à la sécurité.

  • 21 Booth C., « Could the housing problem of London be solved by improved means of communication? », p (...)

31L’un des reproches adressés à Booth fut le problème ancien de la convergence des intérêts publics et privés, notamment à propos des valeurs foncières de la propriété et des impôts. Le réseau programmé était contraire aux accords existants entre les conseils locaux et les propriétaires21. Le pro-gramme de Booth supposait également un nouveau modèle socio-économique pour Londres comme pour les autres villes britanniques. Il ouvrait la porte à un monopole public des moyens de transport, comme dans le cas des routes, mais sans que cela porte atteinte au libre fonctionnement du marché foncier.

  • 22 Voir Young K. et Garside P., Metropolitan London, Politics and Urban Change, 1837-1981, Londres, E (...)

32Cette peur d’encourager les monopoles du fait d’interventions municipales ou nationales renvoyait aux résistances face aux demandes régulièrement émises en faveur d’une centralisation ou de la coordination des différents districts de la capitale anglaise22. C’est au même moment que la détermination de l’utilité publique s’avéra un facteur décisif pour justifier ou repousser l’idée que les chemins de fer et les transports en général puissent être des instruments aux mains des pouvoirs publics en vue de résoudre le problème du logement.

  • 23 Plusieurs commissions et comités furent missionnés sur ce point (voir, par exemple: Notes of Confe (...)
  • 24 La différence entre les cas français et britannique est ici significative. Alors qu’en France l’ut (...)

33L’utilité publique était liée au type de service offert par les compagnies ferroviaires et à l’évolution du marché foncier. La connexion entre transport et logement était effectivement devenue un sujet important en cette fin de XXe siècle, portée par des figures comme celle de Booth23. Mais ce constat ne pouvait que se heurter à l’inertie et à l’obstination du fonctionnement institutionnel de l’époque, dans lequel, selon Booth, les compagnies privées optent pour les dessertes les plus profitables au détriment des liaisons utiles pour tous. Le modèle alors en place permettant le soutien des pouvoirs publics à l’exploitation des lignes entravait généralement toute tentative de coordination entre actions privée et publique. Ce modèle, caractéristique du monde ferroviaire britannique visait à protéger la liberté individuelle en évitant la formation de tout monopole. L’utilité publique était donc conçue comme un domaine relativement équitable, ouvert à tous et dans lequel la compétition devait stimuler la croissance – même si l’expérience démontrait souvent le contraire24. Le décalage entre des lignes ferroviaires exploitées par des compagnies en compétition entre elles, d’une part, et le besoin de penser ensemble les problèmes de transport et de logement, de l’autre, était une conséquence directe de cette conception de l’utilité publique.

  • 25 Report from the Joint Select Committee on London Underground Railways (Parl. Papers 1901 [Cd. 279] (...)

34Entre mai et juillet 1901, une commission parlementaire, composée de membres des Communes et des Lords, en charge de la question du métro londonien examina 10 projets, notamment la création d’une boucle à chaque extrémité de la ligne Central London, le prolongement de la ligne City and South London vers Islington et Euston, la création de la West and South London Junction, l’amélioration de la desserte dans le nord-est de la ville par les lignes City and North-East Suburban et North East London, et trois lignes dans la City et le West End25.

  • 26 Voir The Times, 23 novembre 1899, p. 12.

35Le comité émit donc un avis sur les techniques constructives et les choix technologiques, mais aussi sur les prévisions de trafic et sur la nécessité de prendre des mesures exceptionnelles pour protéger les riverains et propriétaires concernés par les nuisances de la nouvelle infrastructure. Les questions foncières restèrent effectivement au cœur du débat sur les projets d’extension du réseau métropolitain. Le choix du meilleur tracé se fondait sur quatre critères. Premièrement sur la possible extension vers la campagne et le lien avec la demande existante et les infrastructures déjà réalisées. Deuxièmement sur les responsabilités et obligations des opérateurs envers le public et les moyens légaux de les assurer. Troisièmement sur le droit de la City, du LCC et d’autres conseils locaux de s’opposer en justice contre les schémas qui affecteraient leur juridiction. Et, finalement, sur le fonctionnement des terminus et des jonctions de lignes. Le comité confirma également une orientation précédemment émise en 1892 en faveur des droits de passage sur les propriétés publiques comme privées ainsi que la recommandation de correspondances souterraines, comme l’illustraient déjà des passages menant de la station Bank à la Banque d’Angleterre, à la Bourse et à Mansion House26.

  • 27 À l’exception de la boucle est de la Central London pour laquelle une étude plus approfondie fut d (...)
  • 28 JSC London Railways 1901, ix.

36Au final, le comité appuyait tous les projets soumis27. Mais il s’interrogeait sur la possibilité et la façon dont ces différentes lignes pourraient être réalisées dans le cadre d’un pouvoir central28. La City of London et le LCC semblaient partager ce point de vue, en raison des relations entre le réseau souterrain, l’expansion de la périphérie urbaine et les résultats financiers d’exploitation. Du point de vue de ces deux institutions, la question d’une autorité centrale capable de coordonner les différents projets, qui avait émergé dans la discussion parlementaire, devait être considéré d’une façon prudente. Quelle autorité ? Et quel contrôle pourrait-elle exercer sur les tarifs, qui, dans le modèle financier alors en vigueur, dépendaient des revenus attendus au vu du capital investi ? L’une des solutions alternatives, tant pour la City et le LCC que pour les conseils locaux, pouvait être de jouer le rôle de déclencheurs d’une planification de nouvelles lignes, desservant des quartiers peuplés de nouveaux habitants, comme dans le cas du Light Railways Act de 1896.

37De façon implicite le comité entérinait l’importance d’une coordination des efforts qui devait avoir des conséquences sur l’organisation de l’expansion urbaine et des transports dans ces nouvelles zones, en particulier pour les travailleurs et les plus pauvres. En outre, par son rapport, le comité se prononçait en faveur d’un modèle centralisé, reconnaissant ainsi la nécessité de dépasser la fragmentation administrative et l’inertie institutionnelle et opérationnelle, qui caractérisaient l’histoire des lignes déjà ouvertes (Metropolitan, Metropolitan District, City and South London et Central London).

  • 29 Voir Simmons J., « The pattern of Tube railways in London: a note on the joint select committee of (...)
  • 30 Ce problème était identifié par nombre d’observateurs (voir, par exemple, Robinson J., « Electric (...)

38À l’époque où la commission publia son rapport, aucune vision hiérarchique du réseau de transport londonien n’était forgée : quatre lignes étaient exploitées en utilisant deux énergies différentes (vapeur et électricité). En outre, la desserte de banlieue offerte par les principales lignes ferroviaires contribuait à brouiller les distinctions entre trafic spécifiquement urbain et trafic d’intérêt national. Cette distinction était pourtant réclamée par certains acteurs, comme J. Greathead, ingénieur en chef de la City and South London et de la Central London, en vue de garantir le succès des lignes métropolitaines29. Sur la voirie, le paysage se brouillait également par la multiplication des omnibus, des tramways et des vélos puis des voitures à moteur, qui causait une intensification d’usage de l’espace urbain. Les compagnies préférèrent d’ailleurs défendre leur propre secteur d’activité, au risque de ruiner tout effort d’établir un système de transport efficace et cohérent30.

  • 31 Voir Barker T. C. & Robbins M., A History of London Transport: Passenger Travel and the Developmen (...)

39Finalement, ni la proposition de Booth d’un projet de réseau cohérent, ni l’idée d’une autorité centralisée telle que défendue par le comité de 1901 ne virent le jour. Néanmoins, la nécessité d’une coordination et la conception des lignes de métro comme des instruments de planification s’affirmèrent progressivement comme des éléments importants au long du XXe siècle. Dès 1902, l’Underground Electric Railways of London fut créé afin de construire les lignes projetées, qui devinrent le premier réseau unifié exploité par une seule compagnie31. Une vision intégrée résulta donc de pratiques existantes, notamment celles des compagnies privées dont la focalisation sur le profit était le résultat d’une interprétation particulière et ancrée de l’utilité publique.

Conclusion

40La relation entre les projets ferroviaires et les idéaux socialistes constitue un point important des transformations idéologiques et physiques que connurent Londres et Paris au tournant du XXe siècle. Des visions du nouveau visage de la ville furent ainsi élaborées du fait de ces tensions entre les conditions politiques et socio-économiques et les pratiques à l’œuvre dans les deux capitales. Mais l’opposition irréconciliable entre coopération et compétition, combinée aux effets des dynamiques plus larges de réforme sociale et de métropolisation, rendirent leur concrétisation difficile, malgré la force des idées proposées. Les conceptions traditionnelles de l’administration, de l’espace et de ses fonctions, ébranlées par ces nouvelles visions, résistèrent, si bien que l’élaboration de projets futurs se fit sous la contrainte des choix passés.

41En 1910, à Londres, sept lignes de métro étaient exploitées par quatre compagnies différentes employant la vapeur et l’électricité. À Paris, la CMP exploitait un réseau de six lignes uniquement intra muros et tout électrique. Les systèmes offraient tous deux un réseau différant substantiellement des autres moyens de transport, par les multiples possibilités qu’ils offraient aux pendulaires, voyageurs réguliers, touristes et visiteurs, comme par les espaces nouveaux utilisés pour leur circulation. En outre, au-delà de leurs effets sur la circulation, les métros furent perçus et souvent employés comme des vecteurs du changement capables de résoudre certains des problèmes parmi les plus pressants de ces agglomérations.

42À Londres, Charles Booth figure parmi les principaux défenseurs d’un système ferroviaire unifié, dont la cohérence devait être garantie par une autorité centrale. Le problème du logement devait ainsi être amoindri en rendant accessible aux plus pauvres des territoires jusque-là trop éloignés. La mise en œuvre de ce plan était comprise comme relevant du LCC. Mais les puissances privées en prirent finalement la tête, et non l’autorité métropolitaine récemment créée. Ce qui eut pour conséquence directe la concentration de l’offre de transport dans certaines zones centrales et du West End, au détriment d’autres, à l’Est et au Nord-Est.

43À Paris, le Conseil municipal utilisa le métro comme le symbole sur lequel fonder son identité. La résistance à la volonté des compagnies ferroviaires nationales d’étendre leur réseau dans Paris passa par le dessin d’un plan systématique couvrant l’ensemble du territoire parisien. Aux dépens des liaisons avec la périphérie, puisque le réseau demeura longuement exclusivement parisien. Plutôt que de croiser les intérêts de la République, de la Nation et de la Ville, le projet exacerba les oppositions.

44La définition et l’interprétation de l’utilité publique ont joué un rôle-clé dans ce processus. La configuration préalable du jeu d’acteurs (compagnies ferroviaires, autorités nationales et locales) détermina la conception, la construction et l’exploitation des lignes de Londres, où la création d’un système supposait une vision globale des choix les plus appropriés. En réalité, la convergence de lignes concurrentes s’opéra sous l’égide d’une compagnie privée, l’Underground Electric Railways of London. Le métro parisien fut, au contraire, conçu comme un système dès ses débuts. Sa réalisation démontra toute l’étendue des antagonismes entre les échelons administratifs et politiques et les multiples interprétations de l’utilité publique qui en découlaient. L’exclusion du réseau ferré national dans la construction du métro correspondit au triomphe des élus municipaux dans la constitution de la CMP comme employeur modèle.

45Ainsi, le chemin de fer urbain fut à la fois un projet qui intégrait en son sein des visions divergentes du futur des deux capitales et une infrastructure qui les transforma par la création d’un réseau distinct capable d’offrir des liaisons efficaces pour les voyageurs. Ce qui est encore le cas aujourd’hui, mais reste également un rêve au vu des changements à venir.

Notes

1 Cet article est une version française de López Galviz C., “Converging lines, dissecting circles: railways and the socialist ideal in London and Paris at the turn of the twentieth century”, Davies M. et Galloway J. (dir.), London and Beyond : Essays in honour of Derek Keene, Londres, Institute of Historical Research, 2012, p. 311-332.

2 Villain P., Le 107e projet de Chemin de Fer Métropolitain, Paris, 1887 (extrait des Annales industrielles, 30 octobre 1887, p. 8-13).

3 Voir l’exposé par Lefebvre-Roncier P.-F., Conseil municipal de Paris, Rapports et Documents, 1886, no LXIX.

4 Cette question est abordée dans le troisième chapitre de López Galviz C., Cities, railways, modernities : London, Paris and the nineteenth century (à paraître).

5 Parmi les demandes du Conseil municipal, citons également les tarifs ouvriers, l’utilisation de matières premières et d’équipements nationaux pour le génie civil et un pourcentage de main-d’œuvre étrangère (voir le compte rendu anonyme paru dans Le Journal des économistes, vol. 4, no XXXV, 1886, p. 148).

6 Bien que complexe, il s’agit en fait d’un contrat par lequel les parties s’obligent chacune envers l’autre, notamment par un intérêt sur capital assuré par l’État, des péages à payer par les grandes compagnies et des recettes fixes correspondant aux projections de trafic de chaque compagnie (voir Larroque D., « Le Métropolitain : histoire d’un projet », Larroque D., Margairaz M. & Zembri P., Paris et ses transports, XIXe-XXe siècles. Deux siècles de décision pour la ville et sa région, Paris, Éditions Recherche, 2002, p. 61-62).

7 Selon M. André, ce n’est que quatre ans plus tard que la crise prit fin, lorsque les indicateurs financiers touchèrent au plus bas historique. De façon intéressante les chiffres de fréquentation de 1882 ne montrent pas d’impact sur le trafic de voyageurs, mais uniquement sur celui de marchandises (voir André M., Note sur les variations de la circulation dans les rues de Paris de 1872 à 1887, Paris, Imprimerie nouvelle, 1888, p. 34 et 44 et Marchand B., Paris. Histoire d’une ville, XIXe-XXe siècles, Paris, Le Seuil, 1993).

8 Conseil municipal de Paris, Rapports et Documents, 1886, no LXIX, p. 17.

9 Voir Larroque D., « Le Métropolitain : histoire d’un projet », op. cit., p. 60-68.

10 Voir ibid, p. 64 et 82.

11 Guyot Y., “The municipal organization of Paris”, Contemporary Review 43 (1883), p. 448. Voir aussi Yearley C. K., “The ‘provincial party’ and the megalopolises: London, Paris, and New York, 1850-1910”, Comparative Studies in Society and History, xv, 1973, p. 84.

12 Pour une liste des projets d’initiative privée, voir Reverard P., Des conditions d’exploitation du Chemin de Fer Métropolitain de Paris, Paris, Arthur Rousseau, 1905, p. 72-78.

13 Selon Dominique Larroque, le débat, ouvert en 1889, fut surdéterminé par des considérations plus larges et non par le choix entre enjeu local ou national, notamment la discussion sur la nature du régime politique, républicaine ou plus autoritaire (Larroque D., « Le Métropolitain : histoire d’un projet », op. cit., p. 69).

14 Voir notamment Conseil municipal de Paris, Rapports et documents, Paris, 1898, xxiv.

15 Procès verbal, Paris, Conseil municipal de Paris, 30 mars 1898, p. 357. Pour un exemple de prolongement du débat après que la décision avait été prise, voir « Établissement d’une ligne métropolitaine complémentaire... », Procès verbal, Conseil municipal de Paris, 1er juillet 1898, p. 54-57.

16 Sur le rôle du baron Empain dans l’approvisionnement du métro en électricité, voir Beltran A., « Une victoire commune : l’alimentation en énergie électrique du Métropolitain (1re moitié du XXe siècle) », Merger M. et al. (dir.), Métropolitain : l’autre dimension de la ville, Paris, 1988, p. 115-117.

17 Cette distinction entre le métro et les lignes ferroviaires nationales ne fit que s’accroître au long du XXe siècle, en dépit des projets qui visaient initialement à les connecter (voir notamment Dupuy G., « Les stations nodales du métro de Paris : le réseau métropolitain et la revanche de l’histoire », Annales de géographie, dlxix, 1993, p. 17-31).

18 Ce précédent du métro influença notamment les négociations postérieures dans les secteurs du gaz et de l’électricité (Larroque D., « Le Métropolitain : histoire d’un projet », op. cit., p. 86-87). Voir aussi les travaux d’Alain Cottereau (Cottereau A., « L’apparition de l’urbanisme comme action collective, I, De Haussmann à la construction du métropolitain », Sociologie du travail, 4, octobre-décembre 1969, p. 341-365 et Cottereau A., « Les débuts de la planification urbaine dans l’agglomération parisienne, II, Le mouvement municipal parisien », Sociologie du travail, 4, octobre-décembre 1970, p. 362-392).

19 Booth C., Improved Means of Locomotion as a First Step towards the Cure of the Housing Difficulties in London, 1901, p. 10 (Archives de la London School of Economics and Political Science [ALSE], Booth Collection).

20 Wells H. G., « A paper on administrative areas read before the Fabian Society », annexes à Mankind in the Making, Londres, Chapmann & Hall, 1906, p. 161.

21 Booth C., « Could the housing problem of London be solved by improved means of communication? », p. 20-22 (ALSE, Booth Collection, A55).

22 Voir Young K. et Garside P., Metropolitan London, Politics and Urban Change, 1837-1981, Londres, Edward Arnold, 1982.

23 Plusieurs commissions et comités furent missionnés sur ce point (voir, par exemple: Notes of Conference held at the Board of Trade on 29th of June 1893, with Representatives of the London County Council and Representatives of the Railway Companies Having Termini in the Metropolis, House of Commons, Londres, 1894).

24 La différence entre les cas français et britannique est ici significative. Alors qu’en France l’utilité publique était définie par un ensemble relativement clair d’objectifs collectifs qui subordonnaient l’action individuelle, en Grande-Bretagne, la préservation de l’égalité entre les acteurs individuels devait permettre d’atteindre des objectifs collectifs dont la véritable définition était sujette à de nombreuses interprétations (voir, par exemple, Dobin F., Forging Industrial Policy : the United States, Britain and France in the Railway Age, Cambridge, Cambridge University Press, 1994).

25 Report from the Joint Select Committee on London Underground Railways (Parl. Papers 1901 [Cd. 279] [désormais JSC London Railways 1901], vii-ix).

26 Voir The Times, 23 novembre 1899, p. 12.

27 À l’exception de la boucle est de la Central London pour laquelle une étude plus approfondie fut demandée.

28 JSC London Railways 1901, ix.

29 Voir Simmons J., « The pattern of Tube railways in London: a note on the joint select committee of 1892 », Journal of Transport History, 1966, vii, p. 236.

30 Ce problème était identifié par nombre d’observateurs (voir, par exemple, Robinson J., « Electric traction : London’s tubes, trams and trains, 1902 », Journal of the Society of Arts, 1, 1902, p. 419).

31 Voir Barker T. C. & Robbins M., A History of London Transport: Passenger Travel and the Development of the Metropolis, ii, Londres, Allen & Unwin, 1974, p. 61-84.

Auteur

Architecte et historien. Il enseigne l’histoire contemporaine des villes européennes, notamment au XIXe siècle, à la School of Advanced Study, University of London, et à l’University of Southern California à Londres. Sa monographie Cities, Railways, Modernities. London, Paris and the Nineteenth Century est en préparation.

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search