Haines électorales « ordinaires » et mise en place d’un ordre démocratique
L’exemple de la Bretagne rurale des années 1830-1930
p. 113-125
Texte intégral
1D’un côté, il y aurait eu la loi. De l’autre, la haine. La norme face au débordement des affects, la codification de la bonne conduite d’un citoyen raisonnable contre l’exaspération d’un sentiment, d’un comportement ou d’une dynamique ô combien lourds d’une destruction possible de la communauté politique. Et, au bout du compte, la victoire – totale ? – de l’une sur l’autre. De cette opposition un brin manichéenne – pour ne pas dire caricaturale –, qui est au fondement de nombre d’études attestant la dépréciation puis le dépérissement d’un phénomène haineux – entendu, ici, comme une galaxie d’attitudes réprouvées par une morale acceptée et intériorisée par la majorité – par rétention, contention voire abrasion de ce qui aurait constitué une somme de périls – une variante du fameux processus de civilisation1 –, surgirait, ainsi, une connaissance renouvelée de la naturalisation d’un ordre démocratique volontiers pacificateur. C’est aller peut-être un peu vite en besogne.
2En faisant de la construction d’une civilité électorale2, au fur et à mesure que les scrutins se répétèrent, un indice de l’élaboration d’un ordre démocratique qui aurait permis d’apaiser les passions, historiens et politistes n’auraient-ils pas été, en effet, amenés à exagérer l’atténuation du rôle des figures locales de la haine dans la maturation dudit ordre ? Plutôt que d’envisager cette maturation comme un processus linéaire indexant l’enracinement de la démocratie sur un amenuisement des violences liées, entre autres, à des comportements haineux, ne devrions-nous pas nous intéresser davantage aux relations qu’entretinrent élections et haines « ordinaires » ? Ces questions, à rebours des thèses les plus couramment admises, peuvent sembler relever du plaisir qu’il y aurait à manier le paradoxe. Elles procèdent toutefois d’un questionnement portant sur la nature même de cet ordre politique.
3En servant de cadre légal, le marché démocratique institué – de plus en plus concurrentiel à mesure que s’opéra la stratification du champ politique – permettait à des candidats de s’affronter au cours de moments électoraux qui restaient exceptionnels… et de rivaliser en fourbissant des armes parmi lesquelles la négation de l’autre figura quelquefois en bonne place. Si toutes les compétitions ne débouchèrent pas sur des logiques et des attitudes où l’outrance le disputa à l’outrage ou à la démesure – se pose ici la question de la manière avec laquelle les agents perçurent et qualifièrent ces haines « ordinaires » –, certaines furent marquées par une radicalisation des discours et des pratiques. Blâmés par les autorités (administratives voire judiciaires) au nom du non-respect des normes élémentaires qui régissaient la procédure de délégation du pouvoir, ces comportements erratiques participèrent incidemment à la production d’un ordre démocratique qui, en permettant qu’ils s’expriment (même s’il s’agissait pour les pouvoirs de les canaliser et, encore plus, de les condamner quand ils semblaient mettre en péril l’équilibre social), se prémunissait contre une menace qui ne cessait de le guetter : la dépolitisation de ceux par qui et pour qui il existait.
Purger la haine : un impératif démocratique ?
4Plus d’un siècle après sa naissance sous la plume des penseurs libéraux, l’électeur rationnel, tel qu’il fut pensé par exemple par Guizot dans ses contours et à travers un dispositif susceptible de l’intégrer (grâce à la réitération de son geste devant l’urne) dans un espace démocratique débarrassé des pulsions qui minaient le corps social, n’était-il pas en passe de terminer sa croissance ? Figure intouchable d’un champ politique qui s’était construit en liant son existence à l’apprentissage d’une procédure bâtie, en théorie, sur des liens civiques constitués de toutes pièces et enserrés dans un ensemble de règles à respecter, n’incarnait-il pas, dans la Bretagne rurale des années 1930 – comme partout en France, d’ailleurs –, le triomphe de valeurs aux antipodes de celles que charriaient les prurits habituels de toute société ? Regardée d’un point de vue électoral comme un cadre spatial et administratif – et non comme une région spécifique parce que dotée de spécificités –, la péninsule armoricaine, au temps des gouvernements de Tardieu et de Blum, peut refléter, en effet, cet achèvement du modèle démocratique qui trouva d’autant plus à s’accomplir qu’il le fit au sein même du laboratoire de la Troisième République3. Quadrillage partisan comme il n’avait jamais existé auparavant – la SFIO comptait 6 866 adhérents en 19364 –, mobilisation des votants aux étiages élevés – lors des élections législatives qui eurent lieu entre 1919 et 1936, le taux de participation au niveau cantonal dépassa les 75 % à quelques exceptions près5 –, acceptation quasi unanime d’un jeu politique qui contraignit les mouvements qui le contestèrent à infléchir leurs actions au risque d’être sinon ravalés à des agrégats aux pratiques réputées archaïques – avec ses faits d’armes et ses outrances, la geste dorgériste, qui trouva un fort écho dans l’ouest de la France, connut un second souffle à condition de passer sous les fourches caudines du suffrage universel6… –, plaident, dans ces limites régionales, en faveur de la thèse qui insiste sur les corrélations entre acculturation démocratique et polissage des attitudes citoyennes.
5D’autres indices confortent cette analyse. à l’épais et volubile corpus de la prose électorale – procès-verbaux des scrutins, réclamations, enquêtes diligentées par le conseil de préfecture – qui émergea sous la monarchie de Juillet puis sous la Seconde République, à la faveur des consultations municipales en particulier, firent suite des recensions beaucoup moins disertes et beaucoup plus désincarnées. Aux nombreux incidents qui émaillèrent, à compter de l’application de la loi du 21 mars 1831, les premières expériences d’un suffrage censitaire étendu dans le cadre des renouvellements des conseillers communaux, se substituèrent progressivement les blancs d’une narration protestataire qui, en témoignant implicitement de la perfection des opérations, rendirent compte de cette atmosphère plus feutrée qui sembla peu à peu environner ces moments d’effervescence démocratique. Appelé à statuer en partie, en 1848, sur la validité de 71 scrutins municipaux7, le conseil de préfecture du Finistère n’eut plus à se pencher, en 1912, que sur 58 affaires électorales8. Au terme d’une normalisation des pratiques et d’une soumission des commettants à des règles contraignantes9, la cacophonie des premières mobilisations aurait donc cédé la place à un apaisement des tensions dont la sanctuarisation progressive du bureau de vote fut sa plus évidente manifestation. Quand bien même ce processus ne fut pas linéaire et put être remis en cause lors des grandes périodes d’affrontement idéologique – que l’on se rappelle, par exemple, les oppositions frontales entre l’Église catholique et les républicains radicaux au début du xxe siècle –, force est de constater que certaines attitudes haineuses furent d’autant plus frappées de l’opprobre général qu’elles apparurent, en leur temps, comme des manifestations anachroniques et contraires à un système de valeurs admis et partagé par la collectivité.
6La haine, justement. à l’aune d’un trend démocratique séculaire (des années 1830 aux années 1930) qui s’accomplit en promouvant une procédure électorale délestée des passions humaines, ses éclats devinrent autant de marqueurs d’un « ancien régime » des affects qui renvoyaient inévitablement à un temps révolu – parce que, dans sa version progressiste de l’histoire d’une humanité qui s’humanisait, la haine ne pouvait que se conjuguer au passé. Observateur peu complaisant envers ses pairs, Jean-Marie Déguignet, qui livra a posteriori ses considérations sur la société basse-bretonne de la seconde moitié du xixe siècle, ne s’offusquait pas qu’une compétition pour le pouvoir déclenchât les foudres des camps en présence. Sa remémoration du duel législatif du 20 février 1876 qui opposa, dans l’arrondissement de Quimper, le républicain Louis Hémon et le monarchiste Augustin Dumarnay, et se termina à l’avantage du premier au terme d’une bataille où presque tous les coups avaient été permis, lui fit écrire : « Les amis et protecteurs du candidat officiel avaient fait distribuer des brochures en français et en breton, dans lesquelles la République et les républicains étaient flétris et maudits sur tous les tons. Le pauvre candidat républicain y était traité et caricaturé de toutes les façons : en diable, en loup, en renard et en âne. Les jésuites et cléricaux, quoique sûrs du triomphe, avaient cependant jugé à propos d’attirer à eux les paysans et les ouvriers par tous les moyens. Ils mettaient leurs agents en campagne avec des pièces de cent sous plein leurs poches, qui distribuaient partout des discours et des boniments appris par cœur, des brochures, des journaux, des cigares et du « guin ardent » [eau-de-vie]10. » Plus de vingt-cinq ans après, dans un Morbihan secoué par la violence d’un conflit entre les partisans du gouvernement de défense républicaine et leurs opposants qui ne cessait de réactiver l’affrontement traditionnel des rouges contre les blancs11 – sur fond d’incidents liés à l’offensive laïque après que la loi du 1er juillet 1901 sur les associations, et donc sur les congrégations, fut appliquée –, les emportements politiques empruntèrent encore les chemins de l’injure et les gestes (quelquefois violents) de la bataille organisée. Privés de traitement après les échéances de mai 1902, deux prêtres du canton du Faouët, l’un, vicaire à guiscriff, et l’autre, desservant à Lanvénégen, payèrent pour la violence de leurs propos au moment de la campagne des législatives : le premier, pour avoir traité le candidat républicain, Le Clec’h, de « Juif », de « franc-maçon » et de « dreyfusard », et empêché certains suffragants de se rendre au bureau de vote ; le second, pour avoir cherché à griffer les enfants et les jeunes gens qui avaient crié « Vive la République » et encouragé les électeurs de son camp à menacer physiquement leurs adversaires12. Disqualifiée pour les excès et les outrages qui lui étaient consubstantiels, mais aussi parce que l’insertion progressive de la manifestation de rue dans un espace politique irréductible à la seule procédure démocratique lui garantissait une alternative où elle pouvait trouver à s’exprimer13, la haine sembla s’édulcorer, au temps de la République des préaux (après la grande guerre), sous une forme bien plus langagière – même si elle fut fréquemment vociférante – et beaucoup moins mouvementée. Il n’est donc pas étonnant que, dans un Poher sensible aux messages socialisants puis communisants, la mise à distance des opposants put prendre les accents de la chanson. à Poullaouen, en 1929, la liste socialiste bénéficia ainsi du renfort rimé d’un cultivateur du coin, Yves Le Bec, qui se fit le parolier de la conquête municipale des partisans de la SFIO en s’ingéniant à ridiculiser méchamment ceux qui incarnaient les ennemis de classe :
« Deux listes, à ce que j’ai entendu dire, recherchent les suffrages des électeurs/Celle de la tripe républicaine et celle de l’orgie/ […] / La seconde est à coup sûr blanche et bâtie par la noblesse/Si vous lui accordez vos voix, le peuple souffrira. Au lieu d’améliorer nos chemins et de nous attribuer des aides/L’argent public sera employé à ériger des séminaires/ […] / Au sein du conseil paroissial, rien que des blancs/Peut-être vous jureront-ils qu’ils sont républicains/Mais dans le lit de Marianne ils ne voudraient pas coucher/Avec leurs manières si hypocrites et leur air arrogant de riches/Ils croient dominer le pays, mais ils ne nous effraient pas14 ! »
7Historicisée, l’euphémisation de la haine électorale au seuil des années 1930 s’accommodait parfaitement de la composition d’un chansonnier.
Configurations haineuses
8La haine, donc. À l’instar de la violence15 dont elle peut apparaître d’ailleurs comme un véhicule et/ou un surgeon, le flou sémantique qui l’entoura sous la plume des observateurs l’assigna à n’être, le plus souvent, qu’une émanation brutale d’une nature humaine soudainement incontrôlée16. Appliquée à la matière électorale, elle apparaît tel un surgissement ou sous la forme d’un arrière-plan dans des affaires qui défrayèrent la chronique tumultueuse de la mobilisation démocratique. Si elle s’exprima quelquefois violemment, elle ne s’écrivit que très rarement. Alors qu’en 1848, la renaissance du suffrage universel suscita bien des convoitises et une très abondante narration protestataire, l’on notera que les occurrences du qualificatif furent exceptionnelles dans la correspondance qu’entretinrent, dans le Finistère, par exemple, les parties prenantes des consultations. À Sizun, l’affrontement entre deux camps avait été tel lors du renouvellement de l’assemblée municipale que le conseil de préfecture jugea bon d’invalider le scrutin du 30 juillet. La répétition du rendez-vous électoral, le 24 septembre, accrut un peu plus les tensions, générant de nouveau des contestations. Battu, le maire sortant qui se fit, pour l’occasion, le défenseur d’une République assaillie dans sa localité par des forces qui lui étaient hostiles, critiqua les manœuvres de ses adversaires en des termes qui n’escamotèrent pas le ressenti – ou la manipulation – de la situation : « Je suis entré dans l’administration municipale de Sizun avec honneur et je désire qu’il en soit de même pour ma sortie. […] huit jours avant l’élection pour le conseil d’arrondissement les sieurs Le Roux et Elle ou et avaient assemblé les maires et adjoints des autres communes du canton et le juge de paix, dans une auberge au bourg de Sizun où il fut convenu de porter les suffrages sur un jeune homme de Commana, beau frère du fils du juge de paix et demeurant dans la même maison ; leur cabale n’ayant pas réussie, je fus nommé à une grande majorité mais depuis leur haine s’est augmentée à un point qui n’a pas de limite17. »
9Éliminée du lexique communément adopté par les différents opérateurs électoraux – du maire au préfet en passant par les mandants qui revendiquèrent –, la haine demeure cette figure ambiguë de la confrontation démocratique : ordinaire, en un sens, parce qu’elle sembla irriguer, de ses manifestations les plus identifiables (insultes18, coups, blessures quelquefois), les scrutins ; extraordinaire, dans un autre, parce qu’elle se lova – qu’elle fût cause ou conséquence – à l’intérieur de situations tellement différentes les unes des autres qu’il est difficile de lui affecter des frontières précises. Catégorie de l’entendement scientifique bien plus que dénomination utilisée par des agents pour qualifier des faits – mais comment aurait-il pu en être autrement alors que morale religieuse et morale civique, pour ne pas dire républicaine à compter des années 1880, se conjuguèrent pour condamner son existence et, partant, sa désignation ? –, la haine électorale19, qui résiste à tout essai de quantification, ne saurait être pleinement objectivée sans un effort de restitution des significations qui lui étaient données dans des configurations particulières. C’est vraisemblablement au prix de cet effort-là que le chercheur en sciences sociales peut espérer lui conférer une dimension interprétative suffisante pour être retenue en tant que catégorie d’analyse.
10Trois exemples pris dans le Finistère nous serviront à étayer ce qui n’est ici qu’une hypothèse de travail. Hanvec, 1848. Instrument de conquête du pouvoir municipal et de collusion des intérêts de deux groupes antagonistes, la haine fut au cœur d’un très long conflit20 qu’alimentèrent des élections à répétition. Opposition classique entre un maire et le recteur de la paroisse, la lutte entre les deux hommes – et, par ricochet, entre deux factions –, qu’entretint la réciprocité de la détestation, fut à ce point incandescente qu’elle incita certains membres de la communauté à vouloir l’anéantissement de leurs ennemis. Révoqué de ses fonctions de porte-parole de Hanvec en novembre 1849, le notaire Olivier Salaün, qui tira les ficelles de l’assemblée locale jusqu’en 1852, ne put définitivement échapper au portrait que dressèrent de lui les représentants de l’État dans le département. Une note confidentielle des services préfectoraux rappelait : « M. S… est vraiment un homme bien étrange, il n’est pas cependant fou. Ce qui l’aurait du moins excusé jusqu’à un certain point. Il est haineux, vindicatif, ambitieux, despote, mais d’un despotisme à la fois sauvage et ridicule. Je le crois capable de tout, car tous les moyens lui sont bons, pour parvenir à ses fins, c’est une bête enragée21. » Accablantes, les charges retenues contre lui – mouillé dans une affaire d’extorsion de fonds, il évita de justesse la prison au tout début des années 1840 après avoir été contraint à la démission – le condamnèrent à ne plus apparaître que comme un individu vénéneux à l’anticléricalisme maladif. Ce serait pourtant faire fausse route que d’indexer uniquement le comportement du notaire sur une dynamique de l’aversion et de l’exclusion qui aurait trouvé dans l’opposition du desservant Pierre Kerloch à ses desseins de quoi la nourrir un peu plus à chaque fois. Notable orléaniste de la première heure, Olivier Salaün, qui avait été promu à la tête de la mairie dès 1830, ne fut pas, en effet, que cet édile aux penchants anticléricaux destructeurs. Empressé de renouer avec une carrière municipale après une éclipse de huit années, il fut aussi un de ces acteurs de la scène quarante-huitarde qui entendirent utiliser l’aubaine des élections au suffrage universel pour appliquer un « programme » politique, (s’il prit une tonalité pour le moins intransigeante et agressive dans le cas qui nous intéresse, il n’en reposa pas moins sur une certaine conception de la société telle qu’elle devait évoluer). Outrancière, l’inimitié anticléricale d’un homme auquel s’agrégèrent des affidés ne fut pas dans tous les cas, à Hanvec, qu’un jaillissement surgissant au hasard des altercations mais bien davantage un instrument au service d’une logique de transformation des bases sur lesquelles la collectivité rurale reposait.
11Le succès de l’abbé Gayraud dans la troisième circonscription de Brest, 1897. Il défraya la chronique en son temps. Par les enjeux qu’il dessina. Par le battage qu’il suscita22. Choisi comme impétrant, après la mort de Monseigneur d’Hulst, par les « grands électeurs » que formaient les principaux curés d’un Bas-Léon clérical, le dominicain, qui avait quitté les ordres pour se consacrer à la propagande de la doctrine sociale de l’Église, s’était vu opposé non pas un républicain de stricte observance mais le comte de Blois, maire de Coat-Méal et candidat de la noblesse locale et de l’évêché. La bataille fit rage sur le terrain, à tel point que la presse nationale s’empara d’une affaire symptomatique des recompositions politiques à l’œuvre qui contrevenaient à la bipolarisation habituelle (défenseurs de la République versus défenseurs d’une autre forme de régime). C’est que le Ralliement était passé par là et que des prêtres démocrates avaient surgi. Obtenue au prix d’une mobilisation exceptionnelle du bas clergé au cours de la consultation, la double victoire d’Hippolyte gayraud – élu, une première fois, le 24 janvier, il fut réélu le 29 août après que la Chambre des députés eut voté l’invalidation du scrutin – annonça, pour certains, la naissance d’un monde à l’envers et l’existence d’une rupture initiatrice. La fin de l’alliance objective – et fantasmée – du lien entre les presbytères et les châteaux, sous les coups de boutoir d’ecclésiastiques « progressistes », eut raison d’un bloc clérico-monarchiste qui se fissura23 en générant une violence des échanges inouïe. Inquiet devant la tournure que prit la campagne électorale, le très catholique Ernest de Poulpiquet, qui avait balancé entre les deux prétendants avant de soutenir le grand propriétaire du canton de Plabennec, reprocha aux ministres du culte d’avoir « attis [é] la haine entre les classes sociales au lieu de prêcher la conciliation24 ». Écrivant tout haut ce qui s’était dit souvent tout bas, le plaideur de la cause royaliste25 fut ainsi ce témoin d’un combat à couteaux tirés qui, parce qu’il prit forme au sein d’une même famille idéologique – un combat « fratricide », d’une certaine manière –, se solda par une envenimation des relations sociales et l’apparition de rancunes tenaces.
12La campagne de Georges Le Bail (1857-1937) dans la Cornouaille maritime, 1906. Cacique radical, héritier d’une lignée de notables républicains qui firent de leur commune de Plozévet le laboratoire et le bastion de leur entreprise politique, le député, maire et conseiller général avait compris tout l’intérêt qu’il y avait à actualiser, au moment des élections, le clivage entre les rouges et les blancs26 – clivage tout autant perçu qu’imaginé d’ailleurs – afin de souder son camp. En jouant sur un antagonisme – cléricalisme versus anticléricalisme – façonné de part et d’autre depuis plus d’un siècle, et qui affectait à chaque camp une position fermement établie dans un espace extrêmement conflictuel, Le Bail tabla sur l’épaississement de la frontière entre ses partisans et ses ennemis pour l’emporter, quand bien même l’approfondissement de cette ligne de démarcation risquait d’engendrer un climat délétère. Sa victimisation plus ou moins consentante et les bénéfices qu’il compta en tirer sont au cœur de l’opuscule qu’il écrivit dans le but de relater l’atmosphère qui environna sa réélection dans la circonscription de Pont-l’Abbé-Douarnenez lors des législatives de mai 1906. Abus du clergé, pressions en tous genres, altercations nombreuses dans une atmosphère de violences latentes tissent la toile de fond haineuse d’une compétition démocratique où l’acharnement des uns contre les autres s’aviva dans le contexte de l’organisation des inventaires après le vote de la loi de Séparation des Églises et de l’État. Somme d’anecdotes à propos d’une campagne électorale fiévreuse, le compte rendu qu’en dressa l’avocat quimpérois ne se résuma pourtant pas qu’à cela. Soucieux d’arrimer son combat à la longue tradition des luttes politiques pour capitaliser les dividendes nés du clivage entre les rouges et les blancs, il écrivit : « J’avais convoqué les électeurs de Plogonnec à deux réunions, pour le vendredi 27 avril. L’une devait avoir lieu au bourg, le matin, et l’autre à Saint-Albin, dans l’après-midi. À peine arrivé au bourg, je fus entouré de chouans qui me menacèrent et faillirent m’écharper après avoir tenté de m’acculer au mur du cimetière. […] Dès mon arrivée sur la place, un groupe nombreux, composé de femmes, d’hommes et d’élèves de l’école congréganiste, jeunes rabatteurs au service des braconniers de sacristie, vint prendre sur la place sa formation de combat. J’essayai en vain de faire ma réunion à l’auberge, puis la mairie. Les mégères de l’action libérale, disposées sur trois rangs et se donnant le bras, formaient à l’entrée des salles une barricade vivante infranchissable. Pendant une heure je tins bon et persistai à vouloir parler sous les injures, les cris, les vociférations, les menaces, les jets d’ordures auxquelles on ajoutait des chapelets. Ce fut peine inutile et je dus battre en retraite devant cette imbécillité cannibalesque qui eut le don de beaucoup amuser les curés postés à l’arrière-plan et de les mettre en vigoureux appétit27. » Alimentant le contentieux démocratique, la haine servit ici d’appendice tactique au cours d’un combat dont la répétition, à intervalles réguliers, acheva de la faire passer pour une arme des plus légitimes.
13Résumons-nous. Si la haine électorale fut excès, débordement, hubris, pulsion, l’on soulignera qu’elle fut aussi, et avant tout peut-être, par-delà l’écume de ses expressions endémiques qui auraient par trop tendance à la rejeter du côté des seules passions humaines, une production sociale dans une configuration donnée. Reste – et le risque est forcément grand – que son analyse à partir de cas particuliers ne saurait déboucher sur un éclatement de son interprétation. Des dénominateurs communs existent en effet. Nous en avons décelé au moins trois. Le premier porte sur la haine électorale en tant que facteur de solidarités plus ou moins circonstancielles ou plus ou moins pérennes28. En stimulant un appétit de pouvoir, la répétition des scrutins fonctionna, à bien des reprises, sur un déni de l’autre qui engageait chaque parti en présence à faire bloc, quitte à ce que cette osmose se fasse en provoquant la reprise d’un cycle haineux. Il n’y a pas si longtemps encore, dans la commune de Saint-Thonan (Finistère), deux familles – pour ne pas dire deux clans –, les Fily et les Jacob, trouvaient dans les élections municipales le débouché de leur exécration mutuelle29. Incapables de déterminer l’origine d’un conflit plus que séculaire – d’aucuns évoquent l’appropriation d’un bien national sous la Révolution –, elles profitaient des rendez-vous démocratiques pour faire le plein des dissensions jusqu’à les penser comme un élément « immémorial » d’identification de leur relation – et cimenter, ce faisant, les liens entre les membres de leur parentèle. Le deuxième point commun – le plus évident – porte sur la haine électorale en tant que répertoire d’une action politique individuelle et/ou collective. Instrumentalisée, manipulée, elle servit à des leaders – à quel que niveau que ce fût – d’arme de mobilisation et de cohésion massives, et de justification à leur entreprise. L’échec de Georges Le Bail à la députation en 1928 peut s’expliquer de nombreuses façons (chef vieillissant, usure du pouvoir, relations tumultueuses avec la SFIO)30 ; son analyse ne saurait toutefois faire l’impasse sur une donnée plus sous-jacente : le décalage entre l’exploitation d’un comportement anticlérical populaire – imaginé par le représentant radical comme une donnée à jamais structurante – et les attentes d’une population dorénavant plus travaillée par les ferments de la lutte des classes. Le troisième dénominateur ressortit, enfin, à tout ce qui concerne la production de l’ennemi à l’intérieur de l’espace démocratique. L’ordinaire des haines électorales gagne assurément en intelligibilité à condition de les intégrer dans le modèle plus général de la guerre civile31. Définissable à partir de ses quatre caractéristiques principales – exclusion de l’adversaire, politique vécue selon le rapport ami/ennemi, couverture idéologique des vengeances et des vendettas, mise en cause de la légitimité de la violence32 –, ce concept opératoire permet, en effet, de replacer lesdites haines dans une histoire des formes concrètes d’une altérité politique problématique qui apparaissait d’autant plus problématique, aux yeux de ses initiateurs, qu’elle pouvait se ressourcer à des clivages idéologiques – ou idéologisés pour les besoins – anciens. Avec tous les gradients qui l’accompagnèrent – la volonté d’éradication du plus proche suscita quelquefois les échanges les plus brûlants33 –, l’élimination de l’autre, dans le cadre de la polarisation qu’instituait le marché électoral, ne fut pas que la résurgence de passions enfouies au plus profond de ses agents. Elle épousa, beaucoup plus certainement, les limites d’un affrontement politique moins irrationnel qu’il n’y paraît.
Une hypothèse de fin : l’élimination de la haine électorale au risque de la dépolitisation
14Revenons à notre point de départ. Frappés d’obsolescence au nom d’une logique étatique d’élimination des affects, les comportements haineux à l’œuvre au moment des premiers scrutins ne seraient devenus, au fil du temps, que des buttes-témoin d’un ordre démocratique qui était alors en gestation. Porté au crédit de l’État républicain, le long « désapprentissage » de la haine électorale – entre intériorisation d’une norme qui la proscrivait et camouflage de cette haine – aurait abouti progressivement à une déréalisation de la figure de l’ennemi au profit de la naissance de la figure de l’adversaire. Promue et acceptée par les agents du champ politique, cette substitution aurait été, en définitive, une des conditions sine qua non de l’existence d’un ordre démocratique et de son renforcement. Les indices collectés semblent donner raison aux tenants de cette thèse34.
15Une autre piste est pourtant envisageable qui, loin de vouloir infirmer cette analyse classique, ne vise qu’à élargir le questionnement. Elle a trait à la logique implicite qui présida aux interventions des autorités administratives. Si elles s’employèrent à censurer des attitudes électorales répréhensibles parce que devenues hétérodoxes – dans les années 1920, les sous-préfets s’étonnaient toujours des « dérives » qui accompagnaient les consultations communales –, elles s’immiscèrent dans des configurations locales au risque de les fabriquer. Représentants d’un État partial dans un jeu à trois – l’électeur, les candidats et leurs soutiens, l’administration –, des agents s’employèrent non seulement à canaliser des tensions – la partie la plus visible de leurs actions – mais ils n’hésitèrent pas non plus à les alimenter. On pourrait multiplier les exemples à l’envi. En Bretagne, la préparation des élections législatives de mai 1924 provoqua de sérieux remous. Récurrent, « l’impossible apaisement religieux35 » et les risques qui lui étaient afférents générèrent des tensions auxquelles les actions de certains représentants de l’État ne furent pas étrangères. Loin de n’être qu’une énième réplique de la lutte des blancs contre les rouges, l’affrontement de la coalition des droites et des candidats regroupés sous l’étiquette de la liste de Concentration républicaine dépendit ainsi, dans le Finistère, des innombrables interventions de l’administration. Faire l’élection ne fut pas, pour le sous-préfet de Morlaix, une vaine expression. Dans son rapport du 16 avril, il écrivit : « Je compte sur cet accroissement des voix de gauche parce que le parti socialiste paraît avoir fait des progrès […] et parce qu’aussi je reste persuadé que les procédés des députés sillonnistes sortants ont éloigné d’eux les républicains modérés qui reviendront facilement à la liste de concentration républicaine… surtout si elle est bien composée et si toutes les fractions du parti républicain, des modérés aux républicains socialistes y sont représentées… Mais c’est là chose fort difficile à faire comprendre à certains, que bloc, cartel ou concentration signifient cohésion, union, et non pas éviction36… »
16Sans aller jusqu’à parler d’une gestion administrative de la haine électorale – ce qui serait exagéré sur la forme et faux sur le fond, puisqu’aucune directive ne vient accréditer cette assertion –, l’on soutiendra l’hypothèse que la vitalité de l’ordre démocratique, au service duquel se trouvaient employés les fonctionnaires chargés d’organiser puis de vérifier le bon ordonnancement du vote, supposant une adhésion de la très très grande majorité des citoyens, il était impératif que la procédure démocratique rencontre un consentement puissant. Que l’État ait systématisé des moyens de contrôle afin de tenir à distance la violence autour de l’urne et de traquer les débordements, cela est vrai. Que ses agents se soient faits les alliés plus ou moins objectifs des compétiteurs électoraux, cela n’est peut-être pas faux. Pour deux raisons au moins. Parce que, conscients de la fragilité de la politisation par le suffrage – combien d’études insistent trop souvent sur l’achèvement des processus de politisation dans la concrétisation de l’archétype d’un citoyen-électeur qui aurait accumulé successivement un capital politique indélébile37, alors même que les « Frontières du politique38 » furent on ne peut plus poreuses et le phénomène on ne peut plus réversible –, ils eurent tôt fait d’admettre que l’acculturation démocratique était gagée sur l’épanouissement de la conflictualité électorale (à condition qu’elle ne mette pas en péril le fonctionnement de la démocratie). Parce que, concurrencée par d’autres formes d’intégration au politique – la manifestation, en particulier – qui tendaient à échapper au droit de regard et au monopole de l’État, cette politisation par le suffrage leur sembla demeurer une voie d’autant plus légitime qu’elle combinait une pratique du vote plus que séculaire et une capacité à susciter des haines qui ne cessaient, en définitive, de la consolider.
17Paradoxalement – mais le paradoxe n’est peut-être qu’apparent –, l’existence d’une certaine « économie immorale » de la haine électorale ne fut pas une entrave à la pérennisation de l’ordre démocratique. Cette hypothèse restant à approfondir et n’en excluant pas d’autres.
Notes de bas de page
1 Dans son étude consacrée aux relations entre politique et politesse dans la France moderne et contemporaine, Robert Muchembled n’intègre pas, curieusement, la dimension électorale : La société policée. Politique et politesse en France du xvie au xxe siècle, Paris, Seuil, 1998.
2 Yves Déloye, Olivier Ihl, (Philippe Braud, dir.) « La civilité électorale : vote et forclusion de la violence en France », dans La violence politique dans les démocraties occidentales, Paris, L’Harmattan, 1993, p. 75-96, p. 77-82.
3 Maurice Agulhon, La République, de Jules Ferry à François Mitterrand (1880 à nos jours), Paris, Hachette, 1990 ; voir aussi les trois premières parties de l’ouvrage de Serge Berstein, Odile Rudelle (dir.), Le modèle républicain, Paris, PUF, 1992.
4 Maurice Lucas (dir.), Les Socialistes dans le Finistère (1905-2005), Rennes, Apogée, 2005, p. 135.
5 Patrick Pierre, Les Bretons et la République. La construction de l’identité bretonne sous la Troisième République, Rennes, PUR, 2001, p. 165.
6 Robert O. Paxton, Le temps des chemises vertes. Révoltes paysannes et fascisme rural, 1929-1939, Paris, Seuil, 1996, p. 109-116 ; David Bensoussan, Combats pour une Bretagne catholique et rurale. Les droites bretonnes dans l’entre-deux-guerres, Paris, Fayard, 2006, p. 454-455.
7 Arch. dép. Finistère, 2 U 1/9.
8 Arch. dép. Finistère, 2 U 1/17.
9 Que l’on songe au mouvement de réforme électorale qui commença avec la loi du 30 mars 1902 sur la répression des fraudes et se termina par le vote de la loi du 31 mars 1914 qui compléta celle du 29 juillet 1913 (elle institua l’isoloir). Sur tous ces points, voir : Alain Garrigou, Histoire sociale du suffrage universel en France, 1848-2000, Paris, Seuil, coll. « Points », 2002.
10 Jean-Marie Déguignet, Mémoires d’un Paysan Bas-Breton, Le Relecq-Kerhuon, An Here, 1998, p. 336.
11 Claude Geslin, Jacqueline Sainclivier, La Bretagne dans l’ombre de la IIIe République (1880-1939), Rennes, Ouest-France, p. 73-81.
12 Arch. dép. Morbihan, M 4 716, lettre du 2 juin 1902 du sous-préfet de Pontivy au préfet du Morbihan ; lettre du 27 juin 1902 du ministre de l’Intérieur et des Cultes à l’évêque de Vannes.
13 Danielle Tartakowsky, Les manifestations de rue en France, 1918-1968, Paris, Publications de la Sorbonne, 1997, p. 305.
14 Traduction française et texte en breton de la Chanson du vote (Son ar vot) dans : Jean-Yves Michel, Religion et politique en Bretagne de 1850 à 1960. Le cas du Poher, Gourin, Keltia Graphic, 2000, p. 173.
15 Yves Michaud, Violence et politique, Paris, Gallimard, 1978, p. 90.
16 L’article « Haine » du dictionnaire de Pierre Larousse débute ainsi : « Sentiment qui nous éloigne violemment de quelqu’un, et qui nous porte à lui faire ou à lui désirer du mal », Grand Dictionnaire universel du xixe siècle, tome IX : H-K, Paris, Administration du grand dictionnaire universel, 1873, p. 23.
17 Arch. dép. Finistère, 3 M 185, lettre du 26 septembre 1848 au sous-préfet de Morlaix.
18 Voir, par exemple, le travail de : Yann Guerrin, Insubordination et opposition en Ille-et-Vilaine de 1800 à 1848, thèse de doctorat d’histoire contemporaine (Michel Lagrée, dir.), 2 volumes, Université de Rennes 2, 1994, volume I, p. 248-255.
19 Qui, soulignons-le, ne fut pas une haine de l’élection.
20 Pour une analyse complète, nous nous permettons de renvoyer à notre travail : L’électeur en campagnes. Une Seconde République dans le Finistère, thèse de doctorat d’histoire contemporaine (Jean-Luc Mayaud, dir.), 5 volumes, Université de Lyon 2, 2004, volume III, p. 694-799.
21 Arch. dép. Finistère, 1 V 25, « note confidentielle » non datée.
22 Pour une analyse détaillée du scrutin et de ses implications, on se reportera à : Marie-Thérèse Quéré, L’élection de l’Abbé Gayraud dans la troisième circonscription de Brest en 1897, mémoire de maîtrise d’histoire contemporaine (Louis Girard, dir.), Université de la Sorbonne, 1966 ; plus récemment : Yves Déloye, Les voix de Dieu. Pour une autre histoire du suffrage électoral : le clergé catholique français et le vote, xixe-xxe siècle, Paris, Fayard, 2007, p. 269-276.
23 André Siegfried nota : « Une bataille épique commença, chacun usant sans vergogne des armes dont il disposait : les nobles faisant pression sur leurs fermiers, les prêtres prononçant en masse les refus de sacrements. […] Et c’est un fait unique, dans la politique électorale de la Troisième République, que de voir des nobles se plaignant de l’intervention du clergé, et des prêtres se plaignant de l’action exercée sur le fermier par le propriétaire ! », Tableau politique de la France de l’Ouest, Paris, Imprimerie nationale, 1995 [1913], p. 256-257.
24 Cité par Marie-Thérèse Quéré, L’élection de l’Abbé Gayraud dans la troisième circonscription de Brest en 1897, op. cit., p. 214.
25 Ernest de Poulpiquet publia cinq brochures pendant la campagne pour servir à la défense de son camp.
26 André Burguière, Bretons de Plozévet, Paris, Flammarion, coll. « Champs », 1978, p. 207-231.
27 Georges Le Bail, Une Élection Législative en 1906 (Miettes électorales) – Mémoires précédés d’une étude sur le clergé breton, Paris, Librairie Léon Vanier Éditeur, 1908, p. 182-183.
28 Georg Simmel, Le conflit, Paris, Circé, 1995 [1908], p. 63.
29 Voir, par exemple, la protestation lors des élections municipales du 5 mai 1912 (Arch. dép. Finistère, 2 U 1/17 et 2 U 8/71).
30 Laurent Paubert, La vie politique en pays bigouden entre les deux guerres (1919-1940), mémoire de maîtrise d’histoire contemporaine (M.-T. Cloître, dir.), Université de Bretagne Occidentale, 1996, p. 111-127.
31 Jean-Clément Martin, « La guerre civile : une notion explicative en histoire », dans La Vendée et la Révolution. Accepter la mémoire pour écrire l’histoire, Paris, Perrin, coll. « Tempus », 2007, p. 108-133.
32 Ibidem, p. 111.
33 Que l’on songe, par exemple, aux expressions de l’antagonisme entre les socialistes et les communistes dans la France des années 1920.
34 Même si, rappelons-le, cette optique qui fait une large place au processus d’autocontrôle rend mal compte de ce que la haine put vouloir exprimer à quelle qu’époque que ce soit.
35 David Bensoussan, Combats pour une Bretagne catholique et rurale. Les droites bretonnes dans l’entre-deux-guerres, op. cit., p. 66.
36 Arch. dép. Finistère, 3 M 319, rapport au préfet du Finistère. Le sous-préfet de Morlaix rajoutait : « Et qu’eusse-été si vous n’aviez point, par vos interventions et leurs résultats, permit la constitution d’un dossier qui, lorsqu’il s’ouvrira, et c’est absolument nécessaire qu’on l’étale, tournera à la confusion de M.M. Bérest et de Guébriant [deux leaders de la droite locale]. »
37 Laurent Paubert évoque, par exemple, « la politisation accomplie du monde rural » finistérien et morbihannais, juste avant la Grande Guerre : Formation de l’opinion publique, politisation et structuration des identités politiques en Bretagne au xixe siècle. L’exemple du Finistère et du Morbihan de 1848 à 1914, thèse de doctorat d’histoire contemporaine (Christian Bougeard, dir.), 3 volumes, Université de Bretagne Occidentale, 2003, volume III, p. 663.
38 Lionel Arnaud et Christine Guionnet,« Introduction », dans Les frontières du politique. Enquête sur les processus de politisation et de dépolitisation, Rennes, PUR, 2005, p. 14-16.
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