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Le sport dans la presse communiste

 | 
Michaël Attali
, 
Évelyne Combeau-Mari

Deuxième partie. Le temps de la Libération en France : le sport vecteur moderne d’unité et de promotion

Le quotidien Sports (1946-1948) : une antithèse de L’Équipe ?

Gilles Montérémal

Texte intégral

  • 1 Entretien avec Jacques Marchand, le 12 décembre 2002 : « Peut-être qu’avec Pierre Chany et Pierre (...)
  • 2 M. Halbwachs, La mémoire collective, Paris, Albin Michel, 1997.
  • 3 A. et J. Assmann, « Schrift, Tradition und Kultur », W. Raible (dir.), Zwischen Festtag und Alltag (...)
  • 4 F. Dosse, « Le moment Ricoeur », XXe siècle, no 69, 2001, 1, p. 148.

1Depuis l’Antiquité, il est admis que les vainqueurs écrivent l’Histoire. La constatation s’applique avec pertinence à l’affrontement virulent entre deux des quotidiens sportifs français de l’immédiat après Seconde Guerre mondiale, L’Équipe et Sports. En effet, le premier a sculpté pour la postérité sa version, La version, devenue officielle après les disparitions de son adversaire et des témoins. La génération victorieuse forge une culture d’entreprise, incubatrice de cette histoire fondatrice, la cristallise et l’essaime dans le microcosme du journalisme sportif. La propagation est horizontale par capillarité, activée par les réseaux professionnels et amicaux. Elle est aussi verticale, relayée par les générations suivantes, fières de cet héritage quasi mythifié. Certains transfuges1 intègrent la « mémoire collective ». Le concept a été théorisé par Maurice Halbwachs2 et affiné par Aleida et Jan Assmann3 qui distinguent la « mémoire communicative », ancrée dans le quotidien pour guider un groupe avec des modèles d’action communs et exemplaires, et la « mémoire culturelle », inscrite dans le temps long, façonnée par des images identitaires actualisables. Une telle situation renforce l’exigence de l’historien, contraint de débroussailler une terra incognita, sise « entre l’histoire-vérité et la mémoire-fidélité4 ».

  • 5 Le Parti communiste obtient 28,3 % des suffrages et 182 députés.

2Au-delà des compétences intrinsèques de chacun, l’argument décisif de L’Équipe, martelé à longueur de colonnes, focalise sur l’apolitisme du journal. Une telle posture vise à neutraliser les nombreuses critiques adressées à son ancêtre L’Auto, coupable d’avoir traversé l’Occupation, jusqu’au 17 août 1944, sous le contrôle allemand du groupe Hibbelen. La Libération et les débuts de la IVe République entérinent la puissance de la direction de Sports, le Parti communiste. Pilier du gouvernement tripartite, avec les socialistes et les centristes du Mouvement des républicains populaires (MRP), il triomphe aux élections législatives de novembre 19465. En position de force, Sports dénonce chez son adversaire la collusion d’intérêt entre le médiateur et le promoteur de spectacle sportif. Il aurait, dans la continuité de L’Auto, conservé toute la fibre mercantile au détriment du sport amateur. Ainsi campées, les critiques sont récurrentes et se répondent par l’intégration de « pastilles » dans le corps des journaux. L’Équipe se revendique le « journal sans parti, ni parti pris », affichant sa neutralité politique, alors que Sports le qualifie de « journal commercialisé » et affirme que lui-même « sert le sport sans s’en servir ».

  • 6 Sports livre une version quotidienne du 23 février 1946 au 25 mars 1947 avant d’opter pour la péri (...)

3La sélectivité de la mémoire n’a-t-elle pas minoré ou éludé des pans entiers du contenu de ces journaux ? Une investigation dans les collections et dans les sources nuance-t-elle une caractérisation aussi manichéenne ? Pour y répondre, nous nous appuierons sur un dépouillement exhaustif de tous les numéros de ces quotidiens6 et des dossiers déposés aux Archives nationales. Nous mobilisons également un certain nombre de témoignages. Il semble dans un premier temps nécessaire d’envisager les stratégies de séduction adressées aux lecteurs avant de vérifier si les deux critiques majeures sont valides.

À la chasse aux lecteurs

Capter un lectorat

  • 7 Archives nationales (AN), ministère de l’Information, F/41/1262.
  • 8 AN, F/41/1262. Ils seront doublés par la suite. Les tirages s’élèvent à 50 000 puis 125 000 en jui (...)
  • 9 Le tirage autorisé est fixé à 191 250 exemplaires (AN, F/41/1262) mais L’Équipe n’en utilise pas l (...)

4Dans le contexte de la Libération, marqué par des pénuries dans tous les domaines : alimentaires, énergétiques, industrielles, le ministre de l’Information Pierre-Henri Teitgen favorise les journaux d’opinion issus de la Résistance7. Ce n’est que le 23 février 1946 qu’une publication trihebdomadaire (lundi, jeudi et samedi) est autorisée, sur deux pages. Sports, en hommage à Sport libre, sa feuille clandestine pendant l’Occupation, apparaît cinq jours avant L’Équipe et Élans. Un début anticipé demeure un atout indiscutable lorsqu’émerge une concurrence et lorsque le gouvernement limite de façon drastique les tirages autorisés8. La fusion des deux concurrents de Sports, le 18 juin 1946, améliore nettement les tirages9. Fidéliser le lectorat – clientèle serait un vocable plus approprié pour des entreprises de presse – exige une politique promotionnelle imaginative, d’autant plus que ni le prix au numéro (2 francs au départ, 4 francs à partir du 26 juin 1946 lors du passage à quatre pages), ni les tarifs des abonnements ne sont incitatifs. En mars 1946, la formule trimestrielle coûte 70 francs, soit une baisse très faible (10,26 %) par rapport au coût au numéro et le prix triple en dix mois, victime de l’inflation.

  • 10 L’Équipe, série de unes : 8 avril 1946 et 30-31 mars pour le football ; 13-14 avril pour le rugby ; (...)

5En fait, toute la stratégie repose sur la vente au numéro. Il s’agit de susciter l’acte d’achat en organisant des concours, reposant sur les sports populaires lors de temps forts médiatiques et lors des rencontres majeures pour les villes de province. L’Équipe garantit ainsi le remboursement de cinquante places, tirées au sort, pour le match international de football France-Tchécoslovaquie, pour le sommet du championnat entre Marseille et le stade français, en rugby, lors du derby basque Bayonne-Biarritz et en cyclisme à l’arrivée de Paris-Roubaix10. Les résultats sont publiés le mercredi, jour le moins attractif de la semaine, avec l’espoir de dynamiser les ventes. L’absence de données chiffrées nous empêche d’évaluer l’efficacité du dispositif.

  • 11 Des encadrés vantent « le quotidien sportif le plus lu » mais L’Équipe, fin juin, commence à reven (...)
  • 12 259 500 exemplaires sont vendus le lundi 1er juillet.

6La concurrence fonde son offre sur deux ressorts : des gains élevés et la facilité des questions posées. Le 20 mai 1946, Sports propose un concours, doté de 50 000 francs, dont 25 000 pour le gagnant. Il s’agit de trouver le score et le vainqueur de la coupe de France de football. Présentée comme un succès populaire11, l’idée est gardée pour annoncer l’épreuve, la « Ronde de France » cycliste, avec cette fois comme récompense une « semaine de vacances » pour celui qui découvre le tirage exact du journal12, ou encore, en janvier 1947, 30 000 francs sont promis à celui qui trouve le meilleur club amateur en coupe de France.

  • 13 Sports, 14 mai 1946. A. Jany laisse croire qu’il lit Sports. Une calligraphie différente du titre h (...)
  • 14 Sports, 10 mai 1946, p. 2.
  • 15 L’Équipe, 3 avril 1946.
  • 16 L’Équipe, 12 octobre 1946, avec le cycliste Senfftleben.

7L’appât des concours ne peut suffire à fidéliser un public. Chaque direction en est consciente et traque l’exclusivité, atout commercial pour happer des hésitants. La figure du champion est utilisée, voire instrumentalisée, de deux façons. Les photographies mettent en scène des sportifs connus qui posent, plongés dans la lecture d’un journal au titre aisément identifiable. Ces clichés déforment parfois habilement la réalité13. La sollicitation peut être collective, avec les footballeurs de Roubaix (9-10 novembre) ou encore concerner des artistes, comme Édith Piaf14. L’Équipe utilise moins ce procédé mais il s’ouvre aux étrangers en sollicitant le sélectionneur des rugbymen néo-zélandais, Vic Butler15. Entrer dans la voiture du journal transforme les sportifs en véritable « homme-sandwich16 ». Les prémices d’une logique de marque sont indéniables.

  • 17 L’Équipe, 18 décembre 1946. Ce premier combat à New York, face à Abrams a déçu, malgré une victoire (...)

8Le cas le plus emblématique reste Marcel Cerdan, omniprésent dans les colonnes des journaux. À la sortie de la guerre, ses prouesses sportives le positionnent en espoir de dimension mondiale même si son manque d’assiduité aux entraînements et son attrait pour la fête parisienne alimentent une prose, critique et unanime17. Sujet médiatique choyé ou rudoyé selon la valeur de ses prestations, il n’en reste pas moins l’étendard valeureux, permettant au pays de retrouver une respectabilité évanouie pendant les années d’Occupation. Son style spectaculaire plaît aux spectateurs et aux promoteurs américains.

9Son départ pour affronter le « roc », Georgie Abrams aiguise une féroce concurrence médiatique. Le 12 novembre 1946, Sports, avec l’hebdomadaire communiste Miroir-Sprint, propose un « Déjeuner des Champions du Monde ». C’est l’occasion d’immortaliser le populaire Georges Carpentier en discussion avec M. Cerdan, dans une transmission symbolique. La riposte de L’Équipe est immédiate : pour faciliter son adaptation, le journal organise une rencontre entre le boxeur et Yvon Petra, vainqueur de Wimbledon, et avec Marcel Hansenne. L’offre oppose le passé, le gotha français de la boxe, au présent, avec des champions en activité. L’Équipe déplace l’événement, baptisé une « Nuit Cerdan » dans la rue du Faubourg-Montmartre. Le 7 décembre 1946, des informations sont actualisées sur un écran lumineux placé sur l’immeuble de L’Équipe. Pour attendre l’heure tardive du combat, des animations musicales égayent le public. L’organisation est améliorée le 21 septembre 1948 lors du match pour le titre mondial. Sports réplique le 11 décembre, en demandant aux lecteurs l’envoi d’une lettre ou d’une carte postale de félicitations. Les cinq primés, parmi seulement 1 337 lecteurs, accueillent l’idole nationale à Cherbourg.

  • 18 Les dirigeants (clubs, fédérations) occupent souvent la une ce qui est fort rare à Sports sauf pou (...)
  • 19 Sports, 3 janvier 1947.
  • 20 L’Équipe, 1er janvier 1947.
  • 21 Sports, 29 janvier 1947.

10Autopromotion et distinction, marques supérieures de la valorisation d’un champion, se nourrissent donc mutuellement. Les journaux hiérarchisent et récompensent la réussite sportive par une plaquette magnifiant un exploit, individuel ou collectif. Parmi une multitude de célébrations, le 3 avril 1946, c’est le vainqueur du cross des Nations, Raphaël Pujazon, qui est honoré. Il signe ensuite le « Livre d’or », imité par Paul Méricamp, son président fédéral18. Sports agit de même avec le rugby19. Le summum est atteint par l’invention d’un trophée annuel. L’Équipe honore le « champion des champions » français20, distingué par une élite recrutée au sein de ses journalistes. Le rameur Jean Séphériadès inaugure le palmarès grâce à sa victoire aux régates de Henley, épreuve considérée à l’égale d’un championnat du monde encore dans les limbes. La contre-attaque de Sports se veut plus représentative du monde sportif car elle sollicite dirigeants et champions pour élire un des leurs tout en retenant l’exploit majeur21. Le nageur Alex Jany et l’équipe de France de football grâce à sa victoire sur l’Angleterre en sont les lauréats. Si le savoir-faire de chacun rivalise dans la promotion événementielle, il se porte aussi sur le contenu.

Captiver un lectorat

  • 22 Sports, 26 juin 1946.
  • 23 Sports, 4 et 5 juillet 1946.

11Le volume rédactionnel augmente fortement car la périodicité de L’Équipe passe à six numéros hebdomadaires le 8 avril 1946 et la pagination double le 26 juin 1946. Le quadruplement du nombre de colonnes permet un traitement étoffé des sports favoris, la création de nouvelles rubriques (« L’Équipe parisienne » pour les sports amateurs pratiqués dans cette région) et une nouvelle orientation de la dernière page (la « der »). Sports diversifie son offre en lui conférant une tonalité « magazine », abondamment illustrée, avec des jeux, un feuilleton policier traduit de l’anglais, « Le Goal de la mort », des angles originaux – un graphologue analyse l’écriture de champions – ou people, des sportifs découverts dans leur intimité, comme le cycliste Soffietti présenté avec sa fiancée dans un cadre bucolique (6-7 juillet). L’objectif vise à dépasser l’image médiatique pour humaniser le champion. Par ailleurs, des reportages décalés démontrent l’utilité du sport pour tous : « Le sport chez les aveugles de guerre » (5 juillet) ou illustrent sa renaissance en Europe, notamment en Grèce et en Allemagne22 ou dans le bassin danubien23.

  • 24 L’Équipe, 9 mai 1946. Le chanteur André Dassary entretient sa forme physique.

12Pour sa part, L’Équipe perpétue l’œuvre de L’Auto dans sa mise en page (espaces emboîtés, marqueurs d’insistance), comme dans le contenu, y compris pour la pipolisation24. La continuité rassure ses fidèles lecteurs. Toutefois, dès le 27 juin, le journal dédie sa dernière page aux sports populaires les plus vendeurs. L’athlétisme inaugure l’orientation. Suivent, selon le calendrier de leurs saisons respectives, le cyclisme, l’automobile, la boxe, le ski, le football et le rugby. Le succès de cette formule contraint Sports à imiter assez souvent cette architecture de la « der », à partir de septembre 1946, et à insérer ses rubriques ludiques en pages intérieures. Le lecteur privilégie l’information et ses commentaires ; il n’est pas mûr pour adopter une formule « magazine » dans un format quotidien.

  • 25 L’Équipe, 24 mars 1947, « le champion du monde des journaux de sport » pour un « tirage record de 4 (...)
  • 26 Sports, 11 mars 1946.
  • 27 G. Montérémal, « Photographes », M. Attali et J. Saint-Martin (dir.), Dictionnaire culturel du spo (...)
  • 28 Sports, 6 août 1946. « Photo Keystone transmise spécialement pour Sports par avion » pour les arriv (...)

13Tout en vantant ses qualités, toujours dans l’emphase25, chaque publication met en scène les efforts financiers, en particulier pour l’iconographie : « Une bonne photo en dit aussi long qu’un long compte rendu26. » L’absence de télévision prive d’images suggestives les passionnés, ce qui accentue leur désir de les visualiser. Les journaux enrichissent leurs articles avec cette « plus-value informative et émotionnelle, imagerie propice à ancrer l’événement et le champion dans l’imaginaire collectif27 ». Ils envoient leurs photographes sur les lieux majeurs ou achètent à des agences étrangères28.

  • 29 Sports, 29 avril 1946.
  • 30 L’Équipe, 21 juin 1946. Lors de la victoire du champion des poids « lourds » Joe Louis sur Bill Con (...)
  • 31 Sports, 24 avril 1946. Deux photographies décomposent l’accident. La première montre la voiture à l (...)

14Néanmoins, plusieurs différences émergent. Ce support est privilégié dans Sports puisque le journal utilise 53,8 % de photographies en plus (1 486 contre 968) sur l’année 1946. La ventilation traduit un choix éditorial : la une accueille l’essentiel des clichés : 58,76 % pour Sports et 71,38 % pour L’Équipe. Chacun valorise les images d’instants décisifs (but, essai, sprint à l’arrivée…), parfois pris à l’étranger (finale de la coupe d’Angleterre pour le but victorieux29). Tous goûtent également les clichés spectaculaires dans les sports à risques, surtout les knock-out en boxe30, avec une litanie de boxeurs, captés en phase de perte d’équilibre, au sol voire face contre terre. L’exposition de visages ensanglantés se veut la preuve de la qualité d’un combat. L’iconographie de l’automobile marque une divergence éditoriale. Lors du grand prix de Nice, Sports propose une « exclusivité photographique » du seul accident « sans gravité31 ». Il insiste sur la dangerosité du sport tandis que L’Équipe, avec cinq images, décompose les faits de course : départ, duel, passage proche des bottes de paille, qui mettent en exergue la vitesse et la dextérité des pilotes.

15Les trente-deux colonnes quotidiennes sont nourries par les réseaux, tissés en France par les correspondants locaux, issus de la presse régionale, et à l’étranger. Une cartographie pour l’année 1946 démontre la plus grande implantation de Sports, présent dans dix-huit pays (États-Unis, Europe occidentale, à l’exception de l’Espagne, Europe de l’Est, à l’exception de la Bulgarie et de l’Albanie). L’Équipe se limite à treize pays (Scandinavie, pays limitrophes de la France, en dehors de l’Espagne, et aux États-Unis) ce qui explique l’absence d’enquêtes sur l’Europe de l’Est.

  • 32 L’Équipe, 29 juillet 1946.
  • 33 Sports, 30 juillet 1946.

16Par ailleurs, le milieu journalistique développe une hiérarchie au sommet de laquelle trônent les spécialistes respectés, ceux qui, par leurs commentaires, adoubent ou relèguent le sportif. Les problèmes économiques nationaux donnent plus de relief aux départs pour les États-Unis, scénarisés comme un événement. Héritiers des grands reporters, cette élite maîtrise un autre idiome qu’elle égrène dans ses papiers, les parfumant d’une touche d’authenticité et d’exotisme. Les champions de la rubrique « boxe », Georges Peeters32 et Georges Février33 sont ainsi des habitués des yellow cab et des highways.

  • 34 J. Marchand était ami avec des boxeurs comme Laurent Dauthuille et Robert Villemain (entretien du (...)
  • 35 Sports, 6-7 avril 1946.
  • 36 Sports, 27 mars 1946, photographie.

17Les rédacteurs côtoient et, parfois, partagent l’intimité des sportifs de haut niveau, dans et hors de l’arène athlétique, tissent des liens solides34, propices à l’obtention d’une exclusivité. Sans doute grâce à une moyenne d’âge nettement plus jeune, les cas de journalistes « embarqués » fourmillent à Sports. Fernand Lomazzi, correspondant à Lausanne, traverse la Suisse dans le wagon de l’équipe de football de Tchécoslovaquie en route pour Paris35. Le 16 mai, J. Marchand « conduit Marcel Cerdan à son camp d’entraînement » à Bois-le-Roi. Avanti Martinetti, ancien champion du monde cycliste amateur, partage des séances d’entraînement36. La proximité établit un journalisme de connivence, délicat pour garder un sens critique. La situation est encore plus problématique pour les sportifs encore en activité, tels Monique Berlioux et Josette Arène-Delmas, internationales de natation, rédactrices à Sports ou pour l’athlète M. Hansenne à L’Équipe.

18La lecture chronologique de toutes ces initiatives, promotionnelles et journalistiques, révèle la réactivité des adversaires et les inscrit dans des lignes directrices exposées dans les éditoriaux fondateurs.

Convaincre avec sa profession de foi

  • 37 J. Goddet, L’Équipée belle, Paris, Robert Laffont/Stock, 1991, p. 144.
  • 38 Sports, 20-21 juillet 1946 : « Lucien Faccio débarqua en Normandie avec les premiers commandos de l (...)
  • 39 Sports, 27 février 1946.
  • 40 Sports, 4 octobre 1946.
  • 41 Sports, 15 juillet 1946.

19Le 23 février 1946, Sports se positionne d’emblée contre L’Auto puisqu’il brandit comme un étendard l’œuvre de son martyr et caution morale, Auguste Delaune, fondateur de Sport libre. J. Goddet la conteste à tort37. Mesurées à l’aune de l’action résistante et de la déportation, Sports resitue les trajectoires des sportifs. Il serait fastidieux de les lister tant les exemples surabondent dans les rangs de la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT) à l’image de ces « héros marocains38 » ou de cet athlète du club des cheminots de Nantes, « rescapé de Buchenwald39 ». Il en est de même pour les enceintes sportives. L’Équipe occulte la rafle de juillet 1942 lors de la réouverture du vélodrome d’Hiver car J. Goddet est un actionnaire. Sports, dans l’introduction de l’article, reproduit le contenu de la plaque commémorative40. De plus, il médiatise le procès du « Kolonel Pascot41 », l’ancien responsable du sport sous Vichy pour lequel L’Équipe ne mentionne que la sanction encourue, l’indignité nationale.

  • 42 G. Montérémal, « L’Équipe entre mythe et réalité (1944-1948) », M. Attali (dir.), Sports et médias (...)

20Le 28 février 1946, L’Équipe se trouve dans l’obligation de justifier l’héritage de L’Auto sous contrôle nazi pendant la guerre par la formule, « notre action commune servait la Résistance », même si la vérité est plus complexe. D’authentiques résistants agirent pour imprimer et diffuser des tracts et des journaux clandestins, comme le chef de l’atelier Roger Roux ou le secrétaire de rédaction Jean Lafitte. Les comportements de J. Goddet et de Marcel Oger, le rédacteur en chef, restèrent plus ambigus42. Les deux présentations sont manichéennes et simplificatrices mais fédératrices pour une culture d’entreprise.

  • 43 Sports, 3 avril 1946.

21Par ailleurs, Sports revendique une « action au service du sport et des sportifs » car « [c]’est à la presse sportive de défendre non seulement le sport en général, mais les sportifs en particulier. Le sport ce n’est pas seulement les 1 200 professionnels, c’est avant tout les 800 000 pratiquants en général peu fortunés43 ».

  • 44 « Des milliers de clubs en détresse », Sports, 16-17 mars 1946.
  • 45 Sports, 28-29 septembre. Un tableau chiffre l’inflation entre 1939 et 1946. Ainsi un ballon coûte 1 (...)
  • 46 Sports livre une série de reportages (« Au berceau des rois du ballon rond ») à partir du 8 janvier (...)

22Le journal porte le costume du défenseur des faibles face à la cécité des pouvoirs publics qui ne soutiennent pas assez les amateurs et les clubs. Ses thèmes de prédilection s’articulent autour de la question des transports collectifs SNCF dont il cherche à réduire les charges44, celle des équipements, jugés en mauvais état ou détruits, ou encore le coût des articles de sport45. En outre, des rubriques distinguent les amateurs dans des sports professionnels et valorisent de nouvelles pratiques (volley-ball…). Des reportages encouragent les clubs formateurs46. Si la stratégie initiale focalise sur le plus rentable, L’Équipe suit le mouvement à partir de septembre 1946, conscient du vivier de lecteurs. La sous-rubrique footballistique « Dans le monde des 500 000 amateurs » apparaît et les sports affinitaires obtiennent davantage de place.

  • 47 Le 20 juin 1940, le discours de Pétain affirme que « l’esprit de jouissance l’a emporté sur l’espr (...)
  • 48 L’Équipe, 7 mai 1946.

23La formation de la jeunesse reste la pierre angulaire de l’identité journalistique, mais la finalité diffère. L’Équipe veut « une génération vaillante, capable de réparer dans l’amour de la patrie les fautes de celles qui l’ont précédée » et « rendre à la jeunesse de France l’esprit de sacrifice, la foi et l’enthousiasme ». Les accents nationalistes du barrésien Henri Desgrange inspirent ces mots autant que l’idéologie maréchaliste et la culture chrétienne47. La dimension normative du sport est affirmée par des leçons de morale qui pérennisent un paternalisme institué par L’Auto. De courtes maximes cadrent les comportements sociaux. Elles réclament le respect des adultes : les garants du jeu (arbitres) et de l’équipe (entraîneurs, dirigeants), dont les décisions ne souffrent aucune contestation. Incarnation du chef, le capitaine y est objet d’exemplarité, « le sport est une école qui doit apprendre […] le sens des responsabilités48 ». Sports est en partie sur cette ligne de régénérescence nationale pour « viriliser » le pays selon un principe coubertinien. Toutefois, il préfère évoquer une jeunesse mue par « l’amour du sport et […] le culte de la liberté ». Il adhère aux fondements d’un sport émancipateur et hygiéniste, source de bien-être.

  • 49 Sports, 24 décembre 1946.
  • 50 S. Jamain, « Les “Pin-up” de la presse sportive des années 1950 : l’exemple du journal L’Équipe », (...)

24Une lecture en creux souligne des divergences et une critique commune. Seul Sports intègre les jeunes filles dans la pratique sportive, instituant une rubrique régulière « Nous, les sportives » confiée à deux championnes, pour rendre compte de la démocratisation de la pratique féminine. Une série d’articles, inaugurée le 24 décembre 1946, attaque par un titre tonitruant : « L’ère de la tapisserie est aujourd’hui terminée. La place de la femme est maintenant égale à celle de l’homme dans l’histoire du sport. » M. Berlioux revendique une pratique sportive féminine qui « soigne son corps et sa santé […] [sans] nuire à sa grâce et à son esthétique49 ». Le regard reste néanmoins imprégné du discours masculin dominant, proche de celui lu dans L’Équipe50.

  • 51 LÉquipe, 24 avril et 7 mai 1946.
  • 52 Sports, 22 mai 1946.

25Le sport professionnel n’est pas premier dans Sports tandis qu’il est une des composantes structurantes de L’Équipe. Ce journal promeut une liberté d’entreprendre pour les organisateurs et un cantonnement du rôle de l’État qui ne doit pas instrumentaliser le sport comme l’ont fait les dictatures évoquées par le traumatisme de 1936. Il traduit une logique performative qui distingue le « sport anonyme, dérivatif et santé » de « la compétition supérieure, le sport-spectacle ». L’éditorial fondateur se positionne en faveur du « sportspectacle » et réclame une liberté totale d’exercer ce métier pour le sportif, sous peine d’entorse aux règles de l’amateurisme. Les récentes disqualifications des meilleurs athlètes suédois ont marqué les esprits. Il est à noter que les deux journaux se rejoignent sur la critique du Comité international olympique à propos de l’amateurisme intégral, déconnecté de la réalité sociale. L’Équipe évoque une « pureté inaccessible » et s’inquiète du « profit indirect51 » qui toucherait les sportifs journalistes, tel M. Hansenne, payés par leur employeur pendant des compétitions. Sports laisse tribune libre à la critique de cet amateurisme « marron » avec un argumentaire communiste typique52.

26L’ordonnancement du journal répond ainsi aux lignes éditoriales. Il hiérarchise et met en scène les informations issues d’un large spectre, de la proximité à l’international, proposant la médiation d’une épreuve en région parisienne à un championnat du monde, tout en parcourant la France des régions dans les présentations d’avant-saison (football, rugby). Cette stratégie vise le plus grand dénominateur commun de lecteurs. Son implication dans l’organisation d’épreuves s’avère cruciale pour l’augmenter.

Entre politique, argent et société : deux perceptions du sport ?

Des réseaux

  • 53 Sports, 9-10 mars 1946.
  • 54 Sports, 6 mai 1946.

27Face à l’hybridation des activités professionnelles (médiation, organisation) de son adversaire, la direction de Sports estime affronter une concurrence déloyale. À diverses reprises, des récriminations ponctuent la rubrique d’échos « Sports… Piques ». Deux anecdotes trahissent un comportement victimaire face au puissant groupe. Sports considère que son rival est protégé par la profession puisque « certains [kiosques] oublient de l’afficher ou favorisent un titre concurrent53 ». Le journal communiste note que certains dirigeants du football l’interdisent d’entrée des vestiaires54. Nous n’avons pas trouvé de traces de ces accusations. Les archives ont-elles disparu ou Sports exagère-t-il sa situation face au « trust des sports » ?

  • 55 Archives départementales de Paris, 1805 W 235. En 1946, J. Goddet est le PDG de cette société qui (...)
  • 56 J. Goddet, op. cit., p. 239.

28En étudiant la liste des actionnaires des principales enceintes sportives parisiennes, nous découvrons souvent les mêmes noms. Outre J. Goddet et les Thominet, Patrice, le père et Robert, le fils, apparaissent en effet des réseaux d’amis et des relations d’affaires. Sur les seize actionnaires de la société du vélodrome du parc des Princes en 1946, dix ont investi dans la SOPUSI, la société éditrice de L’Équipe55. Le football semble une annexe du journal. Le président de la Fédération internationale, Jules Rimet en est un actionnaire, Emmanuel Gambardella, président de la Fédération française, y écrit des comptes-rendus, son secrétaire général, Henri Delaunay, perçoit des subsides de L’Équipe pour diffuser en exclusivité certaines informations56. Le sélectionneur de l’équipe de France en 1949, Gabriel Hanot, conjugue ces fonctions avec celle de chef de la rubrique « football », sans oublier qu’il est membre de la commission à la Fédération chargée de concevoir les calendriers du championnat. Une telle imbrication professionnelle ne se réduit-elle pas à une confusion des genres ? Lors d’une défaite cuisante (1-5 !) de son équipe face à l’Espagne en juin 1949, G. Hanot réclame même la démission du sélectionneur ! De telles connexions avec les dirigeants du sport professionnel le plus populaire favorisent donc la diffusion d’exclusivités et justifient les craintes de collusion d’intérêt.

  • 57 En septembre 1947, lors des championnats d’Europe, ses protégés, Roger Heinkélé et Mady Moreau, so (...)
  • 58 Encyclopédie générale des Sports et des sociétés sportives en France, Paris, 1946. Les pigistes con (...)

29De même, certains pigistes du quotidien sportif sont impliqués dans d’autres Fédérations. Cazamayou, dont l’apocope « Caza » signe les caricatures dans L’Auto puis à L’Équipe (« La case à Caza » du mercredi), est un spécialiste de natation et de ski. En 1946, il est membre de la commission « propagande » de la Fédération française de natation et entraîneur de l’équipe de France de plongeon57. Deux autres pigistes, Dallier, pour la gymnastique, et Fasquel, pour le hockey sur gazon, sont également membres de la commission « propagande » de leurs Fédérations, tout en étant dirigeants de clubs58.

30Les arènes du sport-spectacle, contrôlées par les dirigeants de la SOPUSI, dévoilent l’efficacité de leur communication. Elles constituent une machine de guerre redoutable pour tout concurrent. Les sportifs professionnels le savent et ne peuvent exercer en dehors de ce circuit.

L’argent et le sport-spectacle comme ligne de fracture ?

31L’analyse des unes d’un même jour, sélectionné dans une période d’atonie médiatique, serait-elle révélatrice de deux perceptions du sport ? Le 20 août 1946 est retenu pour la variété de son iconographie. Deux sports : football et athlétisme, avec les Français en partance pour les championnats d’Europe à Oslo, intéressent les deux journaux. Les deux derniers clichés de Sports ont été pris à Moscou pour la « Parade des Sports ». Ceux de son concurrent s’inscrivent, pour l’un, dans le sport-spectacle, avec la patineuse Sonja Henie, championne olympique et vedette de galas professionnels, et, pour l’autre, dans l’hommage nécrologique à un fidèle ami, le marquis de Dion. Industriel prospère de l’automobile, ce fervent nationaliste a été à l’origine de L’Auto pour combattre le dreyfusard Pierre Giffard, en 1900.

  • 59 « Il est de graves fonctionnaires », L’Équipe, 27 mars 1946.

32La proximité originelle avec le milieu professionnel explique les raisons pour lesquelles les thuriféraires du moyen de locomotion relayent les desiderata et les craintes de cette industrie. Proche des puissants chefs d’entreprise dont il intègre certains cercles de sociabilité, tels l’Automobile club de France (ACF), le polytechnicien Charles Faroux leur sert de héraut dans sa chronique. Il dresse un perpétuel panégyrique de l’inventivité française et de la qualité de ses productions, brosse un éloge de la libre entreprise, matrice féconde de l’industrie, et vénère les États-Unis. En revanche, il fustige avec constance le comportement contre-productif de l’État français qui taxe trop lourdement et le rôle sclérosant de l’administration59.

  • 60 « l’État pour une […] fiscalité absurde pesant sur l’industrie et les usagers », Sports, 2 octobre (...)
  • 61 L’étude retient la période allant du premier numéro au 1er juin 1946.

33Le journal s’implique dans des campagnes en faveur d’un prix de l’essence libre pour éviter le marché noir (17 janvier 1947), quitte à sortir de la neutralité pour épingler Jules Moch, le ministre des Travaux publics et des Transports, qualifié d’« ennemi […] de l’automobile ». Soutien constant face au rail nationalisé, ardemment défendu par Sports, « L’Équipe-Élans engage le combat » le 12 décembre 1946, car c’est « l’avenir de la France ». Si le titre est plus dramatisant : « Danger mortel pour notre industrie automobile » et la critique de l’État identique60, son concurrent n’épargne pas les industriels, portés par le « profit immédiat […], leur production en trop petites séries et […] l’abaissement de la qualité. » Ces liens, proches ou distendus, sont confirmés par les photographies en une61 puisque la présence de la compétition automobile est minimaliste dans Sports (1,65 %) et valorisée dans L’Équipe (8,04 %). 35,78 % des annonces de publicité de L’Équipe proviennent de cette industrie contre 6,62 % pour Sports, alimenté surtout par les entreprises de l’habillement masculin (43,97 % contre 16,56 %).

  • 62 J. Goddet, op. cit, p. 70-71.
  • 63 Entre octobre et décembre 1946, cinq patineuses sont photographiées en action pour attirer le publ (...)
  • 64 L’Équipe, 27 mai 1946. G. Peeters reconnaît que « le cercle enchanté du ring s’est refermé sur une (...)

34 L’Équipe possède un atout supplémentaire avec le contrôle de plusieurs enceintes sportives parisiennes dont l’offre repose sur les piliers les plus rentables du sport-spectacle. J. Goddet insiste sur cette synergie pour la boxe : « Cette salle de rédaction était réputée comme lieu de pesée des pugilistes […] en application d’une politique maison : marquer que tous les pôles d’activité, dans le sport, se situaient à L’Auto62. » Le patinage artistique agrémente également les programmes avec des vedettes américaines, Holiday on ice ou d’autres sportives européennes de renom63. Sports n’évoque pas ce type de spectacle et se contente d’un compte-rendu minimal pour les compétitions hebdomadaires sur les vélodromes sauf si l’affiche est attractive. Vendu comme exceptionnel par L’Équipe, le championnat de France entre Cerdan et Charron suscite un engouement populaire au parc des Princes le 25 mai 1946. G. Février de Sports critique l’habileté promotionnelle et le discours laudateur qualifiant de « match du siècle » entre le « super-champion » et Charron au « punch inégalable », source en définitive d’« une amère déception pour la plupart des spectateurs » car l’affrontement n’a pas été à la hauteur. L’Équipe abonde dans son sens64, signe d’une liberté de ton. J. Goddet, lui-même constate que « [Cerdan] n’avait ni le rythme, ni le souffle pour […] mener la danse infernale ».

  • 65 L’Équipe, 17 mai 1946.
  • 66 Les boxeurs perçoivent 2,225 millions de francs pour Cerdan et 1,8 pour Charron, la Fédération fra (...)
  • 67 R. Colombini, « Trop de fisc tue le fisc », L’Équipe, 18 septembre 1946, p. 2.

35En revanche, les colonnes de L’Équipe soutiennent continûment les organisateurs de sport-spectacle dans leur lutte contre les charges imposées par l’État et légitiment leurs exigences par l’exemple étranger65. Le combat Cerdan-Charron est là encore significatif. Une foule de 35 000 spectateurs contribue à une recette record de 16,5 millions de francs. Un encadré s’inquiète : « La plus grosse part au fisc », c’est-à-dire 7,5 millions, et détaille les charges66… en oubliant le gain net des organisateurs (3,595 millions de francs) et la somme touchée par les actionnaires du parc des Princes. De plus, un article veut démontrer que la lourdeur de la taxation pénalise les sportifs et le fisc lui-même puisqu’une ponction moins onéreuse permettrait de multiplier les réunions et de collecter davantage d’argent67. Le journal se comporte ainsi comme le bras médiatique des promoteurs de spectacle sportif.

  • 68 « Sport ou commerce ? Nous votons sport ! », Sports, 12-13 octobre 1946. Les anciens de L’Équipe c (...)
  • 69 Sports, 9 octobre 1946.

36Loin de ce rôle, Sports défend des passionnés du sport-spectacle et des compétiteurs. En premier lieu, il critique le comportement des matchmakers de boxe en lien avec des enceintes sportives comme le palais des Sports68 car les querelles d’argent privent le public parisien du championnat d’Europe Cerdan-Hawkins. Il se pose également en rempart face aux « mœurs pugilistiques américaines », corruption, promiscuité avec la mafia…, afin qu’elles ne pénètrent pas en France69.

  • 70 Sports, 14 mai 1946. Sept photographies complètent l’article.
  • 71 Sports, 11 février 1947.

37Le deuxième souci de Sports touche un sujet sensible : les billets. En fil rouge de la rencontre France-Angleterre de football à Colombes, il vilipende, toujours en une, l’impéritie des organisateurs. Par un micro-trottoir, le journaliste recueille la déception de ceux qui ont échoué à en obtenir, malgré des heures d’attente70. Une telle surface dédiée à des anonymes inscrit le traitement médiatique dans la veine populaire voire populiste, chère à France-Soir, plus forte vente nationale. Son enquête du 17 mai est prolongée par la dénonciation du marché noir, moyen illégal par lequel un rédacteur se procure un billet. Le lundi 20, son témoignage, montre doublement la gravité du fléau puisque ses voisins ont utilisé le même système et possède des entrées réservées à… des dirigeants de clubs. La thématique des puissants lésant le peuple plaît. Sa réitération en 1947 dévoile la profondeur d’un problème irrésolu71. De son côté, L’Équipe fait bref en annonçant l’arrestation de revendeurs aux abords du stade. Malgré l’éditorial, « Le néo-marché noir », du 8 mai qui soupèse l’étendue du mal, le sujet ne l’intéresse guère, peut-être en raison de ses relations privilégiées avec la Fédération et les clubs.

  • 72 Sports, 17 décembre 1946, une et p. 4.
  • 73 M. Attali et T. Chapron, « Le sport au carrefour des idéologies : le cas du Figaro et de l’Humanit (...)

38 Sports n’oublie pas les sportifs par la voix de Victor Linart, ancien champion du monde de demi-fond. Il dévoile l’envers du décor des vélodromes parisiens72 dont il fut interdit en 1920 pour avoir demandé une augmentation de ses cachets. Il dépeint les promoteurs comme des exploiteurs de la main-d’œuvre cycliste et conseille à ses successeurs de se faire payer au pourcentage des recettes. Ce témoignage corrobore l’analyse sur la prose sportive de l’Humanité73.

  • 74 Ibid., p. 274.
  • 75 Sports, 30-31 mars 1946.

39Dans l’organisation des épreuves routières, le contexte est défavorable à L’Équipe, fragilisé par des procès en cours d’instruction et par le placement sous séquestre des biens de la société « L’Auto-Sports », administrés par les Domaines puis par la Société nationale des entreprises de presse (SNEP). Ses adversaires s’engouffrent dans la brèche. l’Humanité récupère ainsi l’organisation de « Paris-Roubaix », fleuron des « classiques » printanières74. Un tel contexte rend l’attitude de Sports ambigüe. D’un côté, il critique la marchandisation du sport, de l’autre, le journal s’implique dans le sport-spectacle, faisant sienne l’hybridation originelle. Avec habileté, il suscite l’événement car il place sa course d’un jour en début du calendrier routier, le 30 mars, récompensé par l’afflux de coureurs français et étrangers : « 193 engagés : un record75 ! » Sans surprise, L’Équipe assure le service minimum et rejette l’information en troisième annonce, après le football (coupe de France) et le cross des Nations. Il évoque la « course parisienne d’ouverture » pour masquer le plus possible le nom du créateur. Néanmoins, l’envoyé spécial admet l’incessante animation et le suspens préservé jusqu’au sprint final.

40Le second champ d’affrontement touche les compétitions par étapes. Suspendu pendant la Seconde Guerre mondiale, un succédané du Tour de France est accepté par la Fédération française de cyclisme en 1946, réduit à cinq étapes à cause de l’état des routes et du manque de matériel. Les deux journaux sportifs soutiennent des projets présentés par des quotidiens généralistes, Ce soir et Le Parisien libéré. Pour masquer ses liens avec L’Auto, L’Équipe propose la co-organisation au vélodrome du parc des Princes, dirigé par J. Goddet.

  • 76 Sports, 8 juillet 1946, avec le col du Galibier.
  • 77 G. Demouveaux, Les débats de presse autour de la réorganisation du Tour de France, après la Libéra (...)

41Les tracés traduisent l’intérêt profond des entreprises de presse. Sports inscrit la « Ronde de France », du 10 au 14 juillet, dans la mémoire de la Résistance, de Bordeaux à Grenoble, « capitale des maquis » et titulaire de l’Ordre de la Libération. « La Course du Tour de France », du 23 au 28 juillet, se concentre sur le Sud-Est, part de Monaco et achève son périple au parc des Princes, rentabilisant l’enceinte. Pour renouer les liens avec le Tour de France, un trophée honore H. Desgrange, un des fondateurs, et récompense la « Fédération nationale à laquelle appartient le coureur vainqueur ». Chaque compétition cherche ainsi à s’enraciner dans la « tradition », vocable récurrent, pour en accaparer la popularité et à s’inscrire dans la continuité des Tours d’avant-guerre. Sports publie des photographies des années 1920 pour investir la mythologie des lieux emblématiques76. La tentative de captation d’héritage soulève une défense ombrageuse de L’Équipe qui a beau jeu de rappeler la posture très hostile pour la compétition, de la presse communiste avant 1939. Sans surprise, chacun se félicite de son œuvre et dénigre les déficiences adverses : improvisation sur les horaires, incompétence avec des erreurs de fléchage et de classement, voire favoritisme pour René Vietto, dans « la course du Tour de France ». L’Équipe insiste sur un insuccès populaire, faussement martelé77.

  • 78 G. Vigarello, « Le Tour de France », P. Nora (dir.), Les Lieux de mémoire, tome III, volume 3, Par (...)

42Tous légitiment leurs compétences pour obtenir le vrai Tour en 1947. Ce joyau du sport-spectacle, intégré dans la mémoire collective et le patrimoine national78, a révolutionné les compétitions par étapes. Source d’inspiration feuilletonnesque, propice à fidéliser un lectorat, et support publicitaire incitatif, il constitue une source financière lucrative. Sa renaissance motive l’activation des réseaux professionnels et politiques. Malgré plusieurs projets, dont une organisation collégiale de la presse française, Sports et ses alliés échouent. La candidature du Parisien libéré et du vélodrome du parc des Princes est retenue par l’Union cycliste internationale (UCI) et validée par le gouvernement, garant des biens sous séquestre. Si l’influent Émilien Amaury agit efficacement en coulisses, le contexte géopolitique pèse, entre explosion de la coalition tripartite, le 2 mai 1947, et annonce du plan Marshall, le 6 juin 1947. Dès lors ce monument national ne peut échoir dans l’escarcelle communiste.

Les champions des deux blocs ?

  • 79 L’Équipe, 30 avril 1946. Frère aîné du général de Gaulle, il a exercé cette fonction de consul de 1 (...)
  • 80 Sports, 30 avril 1946.
  • 81 Sports, 13 mars 1946. René Lamps, député d’Amiens, propose des mesures pour démocratiser la pratiqu (...)

43Les turbulences politiques se répercutent dans la presse sportive. Des traces, égrenées dans le corps des articles, positionnent chaque journal sur l’échiquier national, sans citer les partis concernés. Lors des championnats d’Europe masculins de basket, seule L’Équipe nomme le consul de France à Genève, Xavier de Gaulle79, de même que des gaullistes apparaissent souvent, présentés avec leurs seules qualités sportives, tel le général et rugbyman Jacques Chaban-Delmas. Ces exemples, parmi d’autres, égratignent la posture apolitique. Ils revendiquent en creux un attachement à un mouvement de la Résistance pour effacer le soutien maréchaliste. De son côté, Sports profite de la course cycliste « Paris-Nice » pour relever que le départ est donné par Maurice Thorez, « vice-président du Conseil », sans mentionner qu’il est député de la Seine et secrétaire général du Parti communiste80. Ce procédé est systématique pour éluder l’appartenance politique lors des interventions en faveur du sport81.

  • 82 Sports, 11 juillet 1946.

44Par ailleurs, une lecture attentive des villes dans lesquelles Sports patronne des manifestations sportives dessine une carte de la « banlieue rouge » : Pantin, Stains, La Courneuve, Saint-Denis et bien d’autres dont Montreuil, ville qui accueille un match de football entre l’équipe du Vietnam, composée de résidents métropolitains et le club local. Ho Chi Minh, chef de ce territoire récemment reconnu autonome (6 mars 1946), évoque sa pratique sportive quotidienne et son intérêt pour « le sport […] qui développe la force du peuple et la coopération entre les peuples82 ». L’Équipe se limite à une annonce succincte, relevant la présence de la sous-secrétaire d’État à la Jeunesse et aux Sports.

  • 83 Sont concernés l’Italie, la Scandinavie, l’Europe centrale, l’Angleterre (Wimbledon) et la Holland (...)

45L’ancrage de L’Équipe au camp occidental ne souffre aucun doute. Il suffit d’observer les choix iconographiques et les destinations des envoyés spéciaux. Les seules étrangères présentes jusqu’à la fusion avec Élans sont des Américaines ! Apparaissent également dans la rue, devant l’enseigne du journal, le bo xeur Holman Williams (13 juin) tandis que Sports met en exergue le footballeur hongrois Nyers (12 août) ou l’haltérophile soviétique Novak (23 octobre), sortant de la voiture du journal. Le 26 juin, Sports se vante dans une formulation excessive : « Nos reporters courent à travers le monde ». En réalité, le « monde » se réduit au continent européen83 et aux États-Unis (G. Février). La réponse de L’Équipe ne se fait pas attendre puisque, le 29 juin, elle surenchérit avec quinze envoyés spéciaux dont sept à l’étranger dans cinq pays (États-Unis, Italie, Angleterre, Hollande et Suisse). Le quotidien délaisse les contrées européennes lointaines, sous contrôle soviétique (Europe danubienne), et ne couvre pas les Jeux travaillistes d’Helsinki. Sports oublie l’escrime et l’aviron, sports connotés socialement. Se dessinent en creux les réticences idéologiques de chacun.

46Reste le traitement médiatique de l’URSS. Son affiliation à la Fédération internationale de football est célébrée à la une de Sports, le 21 novembre 1946. Le lendemain, L’Équipe se contente de lister les pays membres mais oublie de l’inscrire pour noter à deux reprises les États-Unis ! Pourtant, le 31 juillet, l’éventualité de cette adhésion satisfait M. Oger car elle confère une valeur réelle aux titres mondiaux et intègre un État devenu, « depuis la révolution d’octobre, […] par la volonté toute-puissante de ses dirigeants, un grand pays sportif [ayant] le souci de la performance des élites aussi bien que la formation corporelle des masses ». Cependant, les articles sur ce pays demeurent rarissimes.

47 Sports fournit des papiers précis sur les performances soviétiques et couvre la « Parade des sports », c’est-à-dire la fête de la jeunesse (komsomol), dans le « temple moderne des élites sportives » (21 août). Le directeur de la rédaction, René Rousseau, communiste encarté, loue le rassemblement de tous les peuples de ce vaste pays, sous le regard de Staline. Il en profite pour rédiger des articles sur la pratique sportive gratuite, de l’école au club corporatif, sans négliger la reconversion des champions comme le nageur Metchkov, responsable d’une piscine (23 août). Nulle note sur la dictature n’assombrit le tableau.

Conclusion

48 L’Équipe développe son idéologie sportive, ancrée dans le sport-spectacle. Il en tire la quintessence avec une nette hiérarchisation des sports et des compétitions, tout en valorisant le culte des champions, héroïsés par une dialectique emphatique et empathique, visant à séduire le maximum de lecteurs et à dégager des profits. Même si les amateurs ne sont pas absents, ils n’ont qu’une portion congrue. Le journal s’identifie bien par son hybridation à un « trust des sports ». En approfondissant l’analyse, émerge également un discours sous-jacent, réceptacle de valeurs caractéristiques des strates dominantes de la société française : méritocratie, libéralisme économique, valeurs traditionnelles maréchalistes.

49De son côté, Sports se démarque par l’originalité du traitement de certains thèmes, panachage de rationalisation technique et de sujets de société, parfois mâtinés de papier people. Il s’enrichit d’une double ouverture vers l’élite sportive internationale et vers la masse des pratiquants, dont la surface va grandissante. Pourtant, les dirigeants de Sports ont oublié à quel point la presse est une entreprise, exigeant structures et financement solides. Une posture trop ouvertement anticapitaliste ne peut que braquer l’immense majorité des annonceurs. Des élans politisés, exposant plus ou moins discrètement les thèmes chers aux communistes, froissent un lectorat, peut-être idéaliste, mais enclin à évacuer les contingences quotidiennes et à sceller la victoire du récréatif sport-spectacle. La puissance des réseaux des correspondants, des industriels et des dirigeants sportifs valide la victoire de L’Équipe. Si la mémoire a bien gardé les grandes lignes idéologiques de ces journaux, elle en a gommé les nuances et fusionné certaines étapes.

  • 84 Nous renvoyons aux deux articles consacrés à ce titre dans cet ouvrage.
  • 85 Sports, 24 mars 1947. Le directeur affirme une vente proche de 80 000 exemplaires quotidiens pour u (...)
  • 86 F. Thébaud, Mon itinéraire (1944-1978), site Internet, « Les Amis de François Thébaud ».

50Gaston Bensan et les autres décideurs communistes ont anticipé et investissent dans une périodicité vierge de concurrence. Le 29 mai 1946, à grands frais publicitaires, démarre l’hebdomadaire Miroir-Sprint84, conçu sur le modèle des magazines sportifs d’avant-guerre, à la riche iconographie, Match, Miroir des sports. Qualité du produit, positionnement stratégique pertinent : les succès populaire et financier couronnent cette entreprise… et rendent la publication quotidienne moins indispensable85. Les finances ne supportent pas la longue grève des ouvriers du Livre : la périodicité devient bihebdomadaire (lundi et samedi). Malgré des ventes solides, « au-delà de 100 000 exemplaires pour Sports-Lundi86 », la publication disparaît le 4 octobre 1948. L’Équipe, avec pragmatisme, accorde désormais une place plus large aux rubriques affinitaires et amateurs pour tenter de capter le lectorat de la publication défunte.

Notes

1 Entretien avec Jacques Marchand, le 12 décembre 2002 : « Peut-être qu’avec Pierre Chany et Pierre Tessier nous avons trop insisté sur la politisation de ce journal alors que je n’ai jamais souffert de censure. C’était certainement une manière de faire oublier notre passé journalistique dans la presse communiste. »

2 M. Halbwachs, La mémoire collective, Paris, Albin Michel, 1997.

3 A. et J. Assmann, « Schrift, Tradition und Kultur », W. Raible (dir.), Zwischen Festtag und Alltag. Zehn Beiträge zum Thema, « Mündlichkeit und Schriftlichkeit », Tübingen, Narr, 1988, p. 28-50.

4 F. Dosse, « Le moment Ricoeur », XXe siècle, no 69, 2001, 1, p. 148.

5 Le Parti communiste obtient 28,3 % des suffrages et 182 députés.

6 Sports livre une version quotidienne du 23 février 1946 au 25 mars 1947 avant d’opter pour la périodicité bi-hebdomadaire jusqu’au 4 octobre 1948, date de sa disparition. L’Équipe débute le 28 février 1946.

7 Archives nationales (AN), ministère de l’Information, F/41/1262.

8 AN, F/41/1262. Ils seront doublés par la suite. Les tirages s’élèvent à 50 000 puis 125 000 en juin 1946 pour L’Équipe ; 50 000 jusqu’à 100 000 pour Élans ; 75 000 pour Sports mais nous ignorons son tirage en juin, peut-être également doublé.

9 Le tirage autorisé est fixé à 191 250 exemplaires (AN, F/41/1262) mais L’Équipe n’en utilise pas la globalité. Il est probable que le surplus ait servi à augmenter l’offre lors de Monaco-Paris, son organisation cycliste (AN, F/41/2073).

10 L’Équipe, série de unes : 8 avril 1946 et 30-31 mars pour le football ; 13-14 avril pour le rugby ; 20-21 avril pour le cyclisme.

11 Des encadrés vantent « le quotidien sportif le plus lu » mais L’Équipe, fin juin, commence à revendiquer ce statut. Les seuls chiffres à disposition confirment l’âpreté de la lutte sans pouvoir trancher car les ventes peuvent être supérieures tout en ayant un « bouillon » plus important. Tout dépend du tirage. Les invendus à Paris s’élèvent pour Sports à 29,55 % et à 36,16 % pour L’Équipe du 21 juin au 20 juillet 1946 (archives de la préfecture de police de Paris, dossier BA 1875).

12 259 500 exemplaires sont vendus le lundi 1er juillet.

13 Sports, 14 mai 1946. A. Jany laisse croire qu’il lit Sports. Une calligraphie différente du titre habituel prouve le subterfuge.

14 Sports, 10 mai 1946, p. 2.

15 L’Équipe, 3 avril 1946.

16 L’Équipe, 12 octobre 1946, avec le cycliste Senfftleben.

17 L’Équipe, 18 décembre 1946. Ce premier combat à New York, face à Abrams a déçu, malgré une victoire aux points. Parmi d’autres, Marcel Hansenne se désole : « Ah ! Si Marcel Cerdan consentait à devenir un véritable boxeur professionnel ! »

18 Les dirigeants (clubs, fédérations) occupent souvent la une ce qui est fort rare à Sports sauf pour des clubs amateurs.

19 Sports, 3 janvier 1947.

20 L’Équipe, 1er janvier 1947.

21 Sports, 29 janvier 1947.

22 Sports, 26 juin 1946.

23 Sports, 4 et 5 juillet 1946.

24 L’Équipe, 9 mai 1946. Le chanteur André Dassary entretient sa forme physique.

25 L’Équipe, 24 mars 1947, « le champion du monde des journaux de sport » pour un « tirage record de 412 400 exemplaires » ; Sports, 25 mars 1946, « Sports, le journal le mieux informé. Le journal le plus lu de toute la presse sportive française ».

26 Sports, 11 mars 1946.

27 G. Montérémal, « Photographes », M. Attali et J. Saint-Martin (dir.), Dictionnaire culturel du sport, Paris, A. Colin, 2010, p. 358.

28 Sports, 6 août 1946. « Photo Keystone transmise spécialement pour Sports par avion » pour les arrivées des courses à Londres lors de la défaite de la France. Dans L’Équipe du 28 février 1946, un cliché de Jack La Motta est acheté à Keystone.

29 Sports, 29 avril 1946.

30 L’Équipe, 21 juin 1946. Lors de la victoire du champion des poids « lourds » Joe Louis sur Bill Conn, deux photographies décrivent l’effondrement du challenger, assis sur le tapis. La légende livre la cause (uppercut du droit). Le même jour, Sports ne propose qu’un cliché en plan large montrant Conn de profil, en train de s’affaisser et la légende réitère l’explication du KO.

31 Sports, 24 avril 1946. Deux photographies décomposent l’accident. La première montre la voiture à la verticale, grimpant sur les bottes de paille. Le bras droit du pilote frotte le sol. Sur la seconde, il sort indemne d’une automobile stabilisée.

32 L’Équipe, 29 juillet 1946.

33 Sports, 30 juillet 1946.

34 J. Marchand était ami avec des boxeurs comme Laurent Dauthuille et Robert Villemain (entretien du 28 avril 2007).

35 Sports, 6-7 avril 1946.

36 Sports, 27 mars 1946, photographie.

37 J. Goddet, L’Équipée belle, Paris, Robert Laffont/Stock, 1991, p. 144.

38 Sports, 20-21 juillet 1946 : « Lucien Faccio débarqua en Normandie avec les premiers commandos de l’armée Leclerc […] tandis que Jean Rey participait à la libération de la Provence », p. 3.

39 Sports, 27 février 1946.

40 Sports, 4 octobre 1946.

41 Sports, 15 juillet 1946.

42 G. Montérémal, « L’Équipe entre mythe et réalité (1944-1948) », M. Attali (dir.), Sports et médias du XIXe siècle à nos jours, Biarritz, Atlantica, 2010.

43 Sports, 3 avril 1946.

44 « Des milliers de clubs en détresse », Sports, 16-17 mars 1946.

45 Sports, 28-29 septembre. Un tableau chiffre l’inflation entre 1939 et 1946. Ainsi un ballon coûte 1 200 francs au lieu de 140.

46 Sports livre une série de reportages (« Au berceau des rois du ballon rond ») à partir du 8 janvier 1947.

47 Le 20 juin 1940, le discours de Pétain affirme que « l’esprit de jouissance l’a emporté sur l’esprit de sacrifice ».

48 L’Équipe, 7 mai 1946.

49 Sports, 24 décembre 1946.

50 S. Jamain, « Les “Pin-up” de la presse sportive des années 1950 : l’exemple du journal L’Équipe », É. Combeau-Mari (dir.), Sport et presse en France (XIXe-XXe siècles), Paris, Le Publieur, 2007, p. 173-188.

51 LÉquipe, 24 avril et 7 mai 1946.

52 Sports, 22 mai 1946.

53 Sports, 9-10 mars 1946.

54 Sports, 6 mai 1946.

55 Archives départementales de Paris, 1805 W 235. En 1946, J. Goddet est le PDG de cette société qui comprend également son frère et sa sœur. Les autres actionnaires appartiennent au premier cercle d’intimes et aux relations d’affaires les plus régulières, telles qu’Hubert Grünwald, PDG du vélodrome d’Hiver, et les Thominet père et fils.

56 J. Goddet, op. cit., p. 239.

57 En septembre 1947, lors des championnats d’Europe, ses protégés, Roger Heinkélé et Mady Moreau, sont sacrés au tremplin.

58 Encyclopédie générale des Sports et des sociétés sportives en France, Paris, 1946. Les pigistes concernés sont : Caza, p. 550 ; Dallier, p. 442 ; Fasquel, p. 474.

59 « Il est de graves fonctionnaires », L’Équipe, 27 mars 1946.

60 « l’État pour une […] fiscalité absurde pesant sur l’industrie et les usagers », Sports, 2 octobre 1946.

61 L’étude retient la période allant du premier numéro au 1er juin 1946.

62 J. Goddet, op. cit, p. 70-71.

63 Entre octobre et décembre 1946, cinq patineuses sont photographiées en action pour attirer le public au palais des Sports.

64 L’Équipe, 27 mai 1946. G. Peeters reconnaît que « le cercle enchanté du ring s’est refermé sur une déception ».

65 L’Équipe, 17 mai 1946.

66 Les boxeurs perçoivent 2,225 millions de francs pour Cerdan et 1,8 pour Charron, la Fédération française de boxe 450 000 francs, le parc des Princes 900 000.

67 R. Colombini, « Trop de fisc tue le fisc », L’Équipe, 18 septembre 1946, p. 2.

68 « Sport ou commerce ? Nous votons sport ! », Sports, 12-13 octobre 1946. Les anciens de L’Équipe confondent cet éditorial avec celui du 2 mai pour justifier une politisation préjudiciable aux ventes de leur concurrent.

69 Sports, 9 octobre 1946.

70 Sports, 14 mai 1946. Sept photographies complètent l’article.

71 Sports, 11 février 1947.

72 Sports, 17 décembre 1946, une et p. 4.

73 M. Attali et T. Chapron, « Le sport au carrefour des idéologies : le cas du Figaro et de l’Humanité (1945-1952) », É. Combeau-Mari (dir.), op. cit., p. 265-283.

74 Ibid., p. 274.

75 Sports, 30-31 mars 1946.

76 Sports, 8 juillet 1946, avec le col du Galibier.

77 G. Demouveaux, Les débats de presse autour de la réorganisation du Tour de France, après la Libération, 1945-1947, mémoire I.E.P. Lyon, 2007. L’étude porte sur les quotidiens L’Équipe, Sports, Combat, Le Parisien Libéré.

78 G. Vigarello, « Le Tour de France », P. Nora (dir.), Les Lieux de mémoire, tome III, volume 3, Paris, Gallimard, 1997, p. 3801-3833.

79 L’Équipe, 30 avril 1946. Frère aîné du général de Gaulle, il a exercé cette fonction de consul de 1944 à 1953.

80 Sports, 30 avril 1946.

81 Sports, 13 mars 1946. René Lamps, député d’Amiens, propose des mesures pour démocratiser la pratique sportive.

82 Sports, 11 juillet 1946.

83 Sont concernés l’Italie, la Scandinavie, l’Europe centrale, l’Angleterre (Wimbledon) et la Hollande.

84 Nous renvoyons aux deux articles consacrés à ce titre dans cet ouvrage.

85 Sports, 24 mars 1947. Le directeur affirme une vente proche de 80 000 exemplaires quotidiens pour un tirage à 300 000.

86 F. Thébaud, Mon itinéraire (1944-1978), site Internet, « Les Amis de François Thébaud ».

Auteur

Doctorant à l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne. Ses recherches portent sur la presse sportive et les réseaux journalistiques.

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