Les marchands de Nantes et le commerce avec Bilbao au milieu du xviie siècle
p. 249-273
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Index géographique : France
Texte intégral
1Plusieurs ouvrages et quelques textes publiés dans le présent recueil ont déjà souligné l’étroitesse des liens commerciaux existant à l’époque moderne entre Nantes et les ports espagnols, particulièrement Bilbao1. Dans une étude portant sur les années 1549 à 1589, Jean-Philippe Priotti indique, à partir des archives de Simon Ruiz ainsi que de plusieurs livres de consignataires et de cargaisons, que le port biscayen joue un rôle essentiel « dans le commerce franco-espagnol du xvie siècle : [celui] d’un pôle d’importation de tout premier ordre2 ». L’auteur montre également que Bilbao absorbe la presque totalité des exportations nantaises vers l’Espagne, l’un des principaux clients de la France :
« Bilbao fait preuve d’une importance remarquable en tant qu’intermédiaire. […] Après avoir été stockées dans le havre biscayen, les marchandises du royaume français, comme celles acheminées d’Angleterre, des Flandres ou des contrées baltes, irriguent le marché local et les foyers consommateurs castillans et navarrais3. »
2Rappelons que les relations entre les deux places sont favorisées par des réductions de péages concédées réciproquement entre Bilbanais et Nantais sur les principaux produits échangés. L’existence d’une sorte de confrérie aux objectifs commerciaux mais également religieux, réunissant des marchands de la cité ligérienne et du port castillan – la « Contractation » – attestée seulement en 1601, n’en demeure pas moins un facteur de renforcement des échanges.
3Jean Tanguy estime que le débouché espagnol et portugais – surtout espagnol d’ailleurs –, longtemps le plus important pour le port ligérien, perd au début du xviie siècle « la première place en tonnage (sinon en valeur) des pays étrangers en relations avec Nantes au profit des Provinces-Unies4 ». Selon les chiffres de Henri Lapeyre, établis grâce aux fonds de la famille Ruiz, il vient tout de même encore à Bilbao 26 navires en provenance de Nantes en 15985. Ensuite, Jean Tanguy considère que
« […] la guerre de 1635 porte un coup fatal au commerce de Nantes à Bilbao, son principal partenaire en Espagne. Le débouché ibérique, longtemps fondamental, déjà dépassé en importance par les Provinces-Unies, va être relégué définitivement au second plan à la suite du retournement du trafic nantais vers l’Atlantique et les Antilles6. »
4Pour la fi n du xviie siècle, le rapport de Béchameil de Nointel permet d’accréditer ces affirmations, en ne faisant pas du commerce avec l’Espagne l’un des principaux trafics de la cité ligérienne7.
5Dans un tel contexte, marqué par une réorientation des activités maritimes du port de Nantes et par une crise des commerces maritimes traditionnels, fondés largement sur la trilogie médiévale (sel, vin, blés), l’idée est venue de s’intéresser plus précisément à la décennie 1650 ainsi qu’au début des années 1660 et d’étudier les relations entre Nantes et Bilbao. Plusieurs questions sont à élucider, à partir d’une documentation nantaise : tout d’abord l’importance quantitative du trafic franco-espagnol, et la situation de la place de Bilbao dans ce commerce. Il faut ensuite évoquer les possibles incidences du conflit franco-espagnol et de sa fin avec le traité des Pyrénées de novembre 1659 sur les échanges maritimes et commerciaux entre les deux ports. Il s’agit en particulier de vérifier l’hypothèse de Jean Tanguy selon laquelle la guerre porte un « coup fatal » aux échanges bilbano-nantais. Cette assertion mérite d’être discutée à la suite des indications fournies par deux auteurs. En effet, bien avant Tanguy, Paul Jeulin écrivait qu’ » entre 1650 et 1675, la Contractation recouvra presque son importance du début du siècle8 ». Plus récemment, Guy Saupin affinait légèrement la chronologie en signalant que « les décennies 1650 et 1660 viennent s’inscrire à contre-courant dans cette lente érosion de l’impact castillan9 ». Enfin et surtout, la réflexion se centrera sur les acteurs établis à Nantes de ces échanges, qu’ils soient originaires d’Espagne ou de France. Chemin faisant, les principaux produits impliqués dans les relations entre les deux ports seront passés en revue.
La place de Bilbao dans le commerce maritime nantais au milieu du xviie siècle
Un préalable : évaluer l’importance du débouché espagnol pour Nantes
6Pour les années 1650 à 1664, une présentation des principales destinations du commerce nantais peut être faite grâce à un corpus de 799 actes d’affrètements, conservés dans les liasses de plusieurs notaires nantais. Sans prétendre constituer une documentation exhaustive sur les trafics du port ligérien, cet échantillon est suffisamment large pour permettre de dégager quelques grandes tendances.
7Au milieu du xviie siècle, les horizons commerciaux nantais semblent essentiellement européens. Les trafics transatlantiques (pêche morutière et commerce antillais) sont réduits à une faible portion, même s’ils ne sont pas nuls. Notons toutefois que les armements sans location du navire ne font pas l’objet de ce type de contrat notarié. Ces résultats ne reflètent donc pas l’importance réelle des liens entre la cité ligérienne et l’Amérique. À partir d’une documentation notariale variée dans les types d’actes considérés, Chrystelle Laucoin a recensé 36 départs d’embarcations depuis la « rivière de Nantes » à destination des Antilles entre 1638 et 166010. L’inventaire des vaisseaux de 1664, commandé par Jean-Baptiste Colbert, témoigne néanmoins de la lenteur du démarrage antillais du port ligérien puisque seulement trois unités de la flotte de Nantes sont explicitement affectées au commerce en droiture11.
8Les bâtiments cités dans ces contrats jaugent en moyenne 36 tonneaux environ.
9La simple lecture du tableau met en relief la conséquente domination de l’Espagne, puisque 442 bâtiments représentant près de 16 000 tonneaux, soit près de 56 % du tonnage total des embarcations concernées par les actes, doivent se diriger dans cette direction. Cette prépondérance traduit, en l’exagérant, une orientation majeure du commerce nantais depuis au moins la fin du xve siècle13. L’Espagne devance très largement l’Irlande et l’Angleterre avec respectivement 68 et 28 affrètements ; le Portugal arrive ensuite avec une douzaine de contrats dont 10 en direction de Lisbonne. La faiblesse des départs de navires vers l’Europe du Nord paraît davantage résulter de la composition du corpus documentaire que des faibles liens de la cité ligérienne avec les pays riverains de la mer du Nord et de la Baltique. En effet, peu de navires étrangers sont concernés par les affrètements dépouillés et le cabotage européen, particulièrement celui en partance pour le nord du continent, est largement dominé par les nations du Nord, spécialement les Hollandais.
Bilbao : première destination espagnole pour les navires au départ de Nantes
10La ventilation des principaux débouchés espagnols révèle que le nombre de contrats notariés est littéralement « dopé » par les marchés-affrètements passés par les commis des administrateurs des gabelles des provinces de Galice et des Asturies, établis à Nantes. Ces actes représentent à eux seuls 320 des 442 envois d’embarcations vers l’Espagne14. En deuxième position, on retrouve le port de Biscaye avec 75 contrats d’affrètements relevés entre 1650 et 1664 pour une jauge totale de 2 500 tonneaux, soit une moyenne 33,3 tonneaux par embarcation. Comme dans la seconde moitié du xvie siècle, Bilbao devance très nettement son voisin Saint-Sébastien15. Si l’on excepte les marchés-affrètements vers les provinces de Galice et des Asturies, les liens étroits entre Nantes et les ports de Biscaye continuent à dominer le commerce entre la cité ligérienne et la péninsule Ibérique passé le milieu du xviie siècle. En comparant les principaux ports de destinations, Bilbao demeure encore le principal débouché du port ligérien, d’après les affrètements réalisés à Nantes.
11La comparaison des listes de navires sollicités par la Contractation, publiées par Paul Jeulin pour les périodes 1651-1654 et 1660-1667, avec les bâtiments cités dans les contrats notariés dépouillés, révèle de grandes discordances16. La documentation réunie minore fortement les échanges entre Nantes et Bilbao, notamment pour les premières années : deux affrètements trouvés seulement, alors que Jeulin mentionne l’existence de 16 bâtiments chargés de sel et de lamproies ainsi que de 19 embarcations amenant des toiles, du vin, des grains. La deuxième séquence permet une approche plus précise dans la mesure où le nombre de contrats recueilli est plus élevé, soit 49 actes. L’auteur signale 16 unités indiscutablement de Nantes durant les années 1660-1667 et donne en sus une liste de 8 capitaines sans leur navire. De notre côté, les 49 affrètements dépouillés entre 1660 et 1664 impliquent 26 bâtiments différents. Seuls trois embarcations et leurs maîtres se retrouvent dans les deux listes : la Catherine avec Jacques Riel, la Vierge avec Pierre Lelan et l’Étoile avec Michel Bourdic. Il convient d’ajouter deux capitaines rencontrés sur des vaisseaux différents : Gwenolé Le Bihan sur l’Olive au lieu de la Marie et Pierre Lelan sur la Marie au lieu du Pierre. Ce constat doit nous amener à considérer les données recueillies comme des chiffres minimum qui ne prennent pas ou peu en considération les affrètements de la Contractation. Ils renforcent en tout cas l’impression de relance et de vitalité du commerce bilbano-nantais au cours de cette période.
12Signalons également quelques tentatives d’affrètements vers des ports du sud de l’Espagne, comme Malaga et Cadix mais aussi vers les îles Canaries, situées au large de l’Afrique. La plupart des actes notariés prévoient d’ailleurs des circuits entre ces différents ports17. Ces contrats paraissent donner de l’écho à la remarque de Jean Tanguy selon laquelle « l’Espagne du sud compte davantage dans le trafic nantais au xviie siècle qu’au siècle précédent18 ». Cependant, la documentation réunie paraît minorer l’importance de cette réorientation, même si un examen global des liasses notariées révèle un frémissement des échanges avec ces régions à partir de 1660.
13On peut s’interroger sur la répartition chronologique de ces contrats d’affrètements vers les ports du Nord-Est de l’Espagne et sur une éventuelle corrélation avec le contexte international. Auparavant, il faut évoquer la répartition de l’ensemble des contrats d’affrètements relevés pour mesurer la part de variation imputable au corpus documentaire réuni.
14Les monarchies française et espagnole sont en guerre durant une partie de la période considérée. La paix des Pyrénées, signée en novembre 1659, met un terme à ce conflit qui dure depuis mai 1635. Malgré tout, ce contexte n’a eu semble-t-il qu’une influence limitée sur les affrètements vers la péninsule Ibérique. Ainsi, 69 contrats passés en 1658 prévoient un trajet à destination d’un port espagnol ; ils sont 70 en 1659, 49 en 1660, 51 en 1661 et 77 en 1662. Certes, le caractère hasardeux de la documentation notariale peut être invoqué pour justifier cette évolution quantitative. Néanmoins, le nombre de contrats conservés oscille entre 83 et 109 durant ces cinq années, ce qui tendrait à tempérer la critique de représentativité.
15Toutefois, en considérant uniquement la répartition chronologique des affrètements pour Bilbao et Saint-Sébastien, on relève une incidence assez forte du contexte. L’année 1659, marquée par la signature du traité des Pyrénées le 7 novembre mais également par une trêve signée le 8 mai puis par un traité préliminaire, correspond à une forte relance des affrètements de navires à destination des ports biscayens (8 pour Bilbao et 5 pour Saint-Sébastien). La première année de paix se caractérise par le nombre le plus élevé de contrats (12 pour Bilbao et 7 pour Saint-Sébastien). Jean-Philippe Priotti évoque déjà cet aspect des relations entre les deux places pour la seconde moitié du xvie siècle : « Ces éléments [l’auteur sous-entend les guerres de religion en France, la course rochelaise, le conflit entre l’Angleterre et l’Espagne] jugulent durablement le commerce. Toutefois, dès l’apparition d’une “paix relative” terrestre ou maritime, les exportations sont immédiatement réactivées […]. Les relations bilbano-nantaises ne sont pas touchées dans leur structure, dans leur fondement19. »
16Durant les années de conflit, l’évolution du nombre d’affrètements est plus chaotique. De nombreux documents notariés rendent d’ailleurs compte de la prise de bâtiments en partance ou revenant de l’Espagne, particulièrement de Bilbao20. Par exemple, en mars 1654, Denis François, sieur de La Maison Blanche, marchand à la Fosse de Nantes et René Pruchaud, marinier demeurant à Bourgneuf, comparaissent devant notaire pour indiquer des difficultés touchant au bâtiment nommé la Bonne Foy de Bourgneuf, pris par des pataches espagnoles équipées en guerre, puis racheté par ledit Pruchaud21. En novembre de la même année, les chargeurs du Saint-Jacques nomment un procureur pour obtenir la main-levée sur le bâtiment et récupérer les marchandises contenues dans cette embarcation, prise alors qu’elle faisait route du Pouliguen vers Bilbao, très certainement avec une cargaison de sel. Parmi eux, signalons Pierre Valleton, sieur du Cheminet, Martin de Uribarry, Jean Despinoze, sieur de La Caillerie et René de Bourgues, sieur de La Jaunays, tous marchands à la Fosse de Nantes22. En avril 1657, un arbitrage intervient au sujet de ce bâtiment. On y apprend que le Saint-Jacques a été capturé par un navire de guerre et conduit à Lannion où il a finalement été jugé libre par arrêt du Conseil privé du roi. Le contentieux porte sur le paiement des frais de réarmement de l’embarcation pour qu’elle poursuive son expédition selon les ordres initiaux23.
17La navigation peut se révéler parfois délicate à cause de la multiplicité des belligérants. En juillet 1655, Jean Le Pelletier, maître du flibot la Marie de Penerf, jaugeant 55 à 60 tonneaux, déclare la prise de son embarcation au large de l’île d’Yeu, alors qu’il ralliait Nantes avec un chargement de fer reçu à Bilbao. Débarqué sur l’île avec une partie de son équipage, il ne peut donner de précision sur la destination suivie par la frégate anglaise armée en guerre. Il fait enregistrer cet acte à la demande d’Antoine Bruneau, sieur de La Ville-au-Blanc, marchand à Nantes. Le même jour, une autre minute voit Le Pelletier reprendre des termes identiques pour raconter sa mésaventure à la requête cette fois-ci de Pierre Valleton, sieur du Cheminet. Il va toutefois un peu plus loin en indiquant qu’il s’est rendu « à la mercy du cap[itai]ne q[ui] commandoit lad[ite] fregatte et de son equipage qui se disoit estre angloys et nean[moin]tz remarqua q[ue] la pluspart des gens dud[it] equipage parloient françois24 ». Il faut en effet tenir compte des pirates de tout poil infestant les routes maritimes fréquentées. Par un document daté du 25 septembre 1655, Mathurin François, sieur de Beausoleil, Jacques Valleton, sieur de La Garennerie et Paul Despinoze, sieur des Boullaines, tous trois marchands à la Fosse, affirment avoir payé la somme de 900 livres à Robert Michel de Nantes. Celui-ci leur a fourni une lettre de change d’un montant identique sur un habitant de Belle-Île pour être délivrée à Jacob Zacarie, « pirate de mer ». La finalité est de racheter la barque nommée la Marie de Saint-Nazaire, 20 tonneaux, prise non loin de l’île d’Yeu durant une traversée Saint-Sébastien-Nantes avec du fer et diverses marchandises à bord25.
18Malgré ces témoignages qui pourraient être multipliés, il nous semble important d’insister sur le fait que les échanges entre Nantes et les ports de la côte cantabrique ne sont pas totalement interrompus pendant le conflit, les actes mentionnés ci-dessus en apportent l’illustration26. Par ailleurs, sept marchés conclus au cours de l’année 1656 entre des Nantais et des marchands voituriers par eau d’Orléans, conservés dans la liasse du notaire Verger, attestent de la poursuite des réexpéditions de laine. Même si son origine n’est pas systématiquement inscrite, il est probable que les 298 balles acheminées par l’axe ligérien arrivent d’Espagne27. Il est à noter que la très grande partie de ces marchandises est destinée à des marchands-bourgeois de Paris : Charles et Gilles Chellot. Le plus gros expéditeur nantais est Pierre Valleton, sieur du Cheminet ; il négocie au total le transport de 203 balles de laine durant cette année-là. Son frère Jacques est également présent dans ce secteur avec son associé Charles Bazille. La famille Valleton est l’une des plus entreprenantes dans les relations entre Nantes et Bilbao.
Les acteurs du commerce entre Nantes et Bilbao au milieu du xviie siècle
19Pour mieux cerner les participants aux échanges entre le port ligérien et la cité castillane, la liste des principaux affréteurs d’embarcations en partance vers le port de Biscaye a été établie et les résultats dévoilés dans le graphique suivant. Sont présents uniquement les noms qui sont mentionnés à trois reprises au moins. De plus, le choix a été fait de ne retenir que le premier nom lorsque deux personnes affrètent un bâtiment, sauf dans le cas de Jacques Valleton et Charles Bazille qui travaillent presque systématiquement en collaboration. Les éventuelles associations ponctuelles et autres affrètements réalisés pour le compte d’un autre marchand sont toutefois mentionnés dans le commentaire : ils concernent respectivement 8 et 7 contrats.
20Huit familles accaparent visiblement une partie importante des affrètements de navires à destination de Bilbao (66 contrats sur les 75 réunis). Il convient de préciser cependant que derrière les affréteurs, se cachent souvent une multitude de chargeurs, difficiles parfois à identifier. Ainsi, en mars 1662, une minute atteste de la comparution devant le notaire Mathurin Verger de huit marchands de la Fosse de Nantes pour nommer deux procureurs – Pierre Descazaux et Mathurin François, sieur de La Frutière – afin de récupérer les marchandises chargées dans la barque de 30 tonneaux, la Vierge du Pouliguen, prise aux environs de Marennes, en revenant de Bilbao28. Deux contrats de chargements de cette embarcation, passés en 1660, ont été retrouvés ; le dernier date du mois de novembre. À chaque fois, un seul affréteur est mentionné29. Malgré ses défauts, cette entrée par les affréteurs n’en demeure pas moins l’une des seules possibles au plan quantitatif pour la période étudiée. Deux catégories d’acteurs sont à distinguer : ceux qui appartiennent à des familles nantaises de souche et ceux issus de familles espagnoles. Cette césure ne doit pas amener à considérer les deux groupes comme agissant indépendamment l’un de l’autre : de nombreux liens existent entre eux.
Les marchands nantais de souche
21La domination de la famille Valleton sur ce commerce vers le port de Biscaye semble nette au milieu du siècle ; elle est responsable de près du tiers des affrètements dépouillés. Cette famille marchande très influente à Nantes dans le deuxième tiers du xviie siècle est établie sur place depuis longtemps et pourrait avoir des origines anglaises30. Les Valleton entretiennent des liens anciens avec la péninsule Ibérique : dès 1567, Charles Valleton, sieur de La Vergerie, est l’un des principaux Nantais qui chargent vers l’Espagne. Pour le milieu du xviie siècle, deux acteurs sont clairement identifiés : Pierre Valleton, sieur du Cheminet, dit l’aîné (1609-1664) et son frère Jacques, le sieur de La Garennerie puis de La Peille (1608-1674) ; ce dernier est associé à son beau-frère Charles Bazille (1614-avant 1670)31. Pierre et Jacques sont les fils du marchand nantais Pierre Valleton (mort en 1634) et de Marguerite Macé32. Pierre Valleton père est mentionné parmi les membres de la Contractation en 1601 et exerce même la fonction de trésorier de cette institution entre 1612 et 162233. Il est toujours cité par Paul Jeulin parmi les membres influents de l’organisation passé 1625, en compagnie de son fils Jacques34. Celui-ci a effectué de fréquents séjours en Espagne dans le cadre de sa formation, selon un modèle d’apprentissage par le comptoir35.
22Les affrètements diligentés par les deux frères, parfois en collaboration comme en attestent deux minutes d’octobre 1656 et janvier 165736, se concentrent autour de deux périodes : 1655-1657 et 1660-1664. Les années 1661-1662, une fois la paix revenue entre les deux monarchies, paraissent caractérisées par l’activité la plus intense : quatre contrats la première année et sept la seconde.
23Il est à souligner que trois affrètements sont réalisés en 1655-1656 par Pierre Valleton pour le compte de Jacques et Daniel de Win, marchands hollandais demeurant à Amsterdam. Les Hollandais n’étant pas partie prenante dans le conflit franco-espagnol, il est possible que Pierre Valleton poursuive les affrètements en qualité de commissionnaire, limitant du même coup les risques de prises des embarcations. Nantes apparaît toujours, au milieu du xviie siècle, comme un relais entre l’Europe du Nord et la péninsule Ibérique. Dès le début de l’époque moderne, le port ligérien apparaît en effet « comme une étape intermédiaire vers la Flandre et l’Angleterre37 ». Une attestation datée de février 1656 témoigne d’une situation d’étape encore plus marquée géographiquement : Jacques Valleton, Charles Le Rat, René Sauvaget, Macé Lucas et Étienne Bureau, tous marchands à la Fosse de Nantes, reconnaissent qu’un navire dont Pieter Jansen était capitaine est venu de Moscovie sur la rivière de Nantes deux mois plus tôt avec notamment des barils de saumons salés, à l’adresse de Jean Vaurin, marchand hollandais. Ces produits ont été rechargés à bord du Chien de Mer pour les conduire à Bilbao38.
24Malheureusement, les contrats d’affrètements ne sont guère précis sur les produits chargés le long de la rivière de Nantes dans les bâtiments à destination de Bilbao. De nombreux documents se contentent d’évoquer des « marchandises », sans plus de détails. On parvient toutefois à rencontrer des ballots de toiles et de mercerie, du sel principalement du Pouliguen, des morues parées ou encore des fèves. Un traité d’atermoiement passé entre Pierre Valleton l’aîné et ses créanciers en mai 1664 permet cependant d’être plus précis sur le réseau d’approvisionnement de ce marchand. Les difficultés financières du personnage sont dues, par contre-coup, à la défaillance de l’un de ses gros débiteurs : François Le Grand, marchand à Paris. Pierre Valleton rassemble par conséquent ses principaux créanciers pour leur demander un arrangement : tous sont des marchands de Laval. Le Nantais est redevable auprès d’eux d’un montant important, un peu plus de 100 000 livres tournois, « pour reste de payement de touttes marchandises de toiles qu’ils luy ont fournies et envoyées du passé, compris touttes promesses, billets, lettres de changes protestées […] et autres pieces dont ils sont porteurs sur lui39 ». Tout porte donc à croire que Pierre Valleton exporte vers Bilbao en particulier des toiles fines de lin de bonne qualité descendues de Laval à Nantes en empruntant la Mayenne, la Maine puis la Loire. Pour la seconde moitié du xvie siècle, Jean Tanguy indique que « la part des toiles bretonnes sur le marché nantais apparaît comme assez limitée, 25 % environ. Nantes contrôle davantage le trafic des autres provinces [Maine, Anjou et Poitou], qui lui sont commodément reliées par le réseau de la Loire et de ses affluents40 ». Il souligne néanmoins la montée en puissance du pôle malouin au xviie siècle comme débouché pour les toiles de Laval, en estimant que ce port l’emporte à ce moment-là sur la cité ligérienne. Nantes continue en tout cas à attirer une partie de la production toilière de cet espace au milieu du xviie siècle.
25Pierre et Jacques ne sont pas les seuls membres de la famille Valleton à s’intéresser au commerce avec l’Espagne pendant la période considérée. Ainsi, leur frère aîné François, le sieur des Ruisseaux puis de La Garennerie (1602-1674), participe également aux échanges avec la péninsule Ibérique. En janvier 1660, il comparaît devant notaire en compagnie de son fils Pierre dit le jeune (né en 1630), pour faire le bilan financier (« procompt ») « des négoces et traficqz qu’ilz auroyent faictz ensemble depuis le mariage dudit Pierre Valleton [intervenu en 1655] tant en ce royaume de France que celluy d’Espagne et autres lieux, et generallement de touttes affaires sans reservation41 ». Un marché de voiture d’octobre 1658, commandité par François et Pierre Valleton, prévoit d’ailleurs le transport de balles de laines d’Espagne en direction d’Orléans. Les marchandises sont en fait destinées à un marchand de Rouen : Romain Le Febure42. En 1642-1644 déjà, plusieurs contrats passés entre des marchands voituriers par eau d’Orléans et les Nantais François et Jacques Valleton, agissant séparément, prévoient l’acheminement de laines de Ségovie et de Castille par l’axe ligérien pour le compte de marchands de Paris et de Rouen43. On retrouve d’ailleurs Romain Le Febure dans plusieurs documents44. Charles Bazille est même nommé comme le consignataire de bon nombre de chargements ; il est qualifié de marchand rouennais dans les minutes45. Il est possible que le futur associé de Jacques Valleton ait séjourné quelque temps dans le port normand avant de revenir s’établir à Nantes et de s’y marier, probablement en 1647. Il n’est pas donc étonnant de constater que Bazille réceptionne les marchandises expédiées par son futur beau-frère.
26Les liens étroits entre la famille Valleton et la place de Rouen peuvent également apparaître de manière plus indirecte. En 1657, Denis François, sieur de la Maison Blanche, marchand à la Fosse de Nantes et membre éminent de la Contractation, affirme avoir envoyé un de ses fils à Rouen, pour y apprendre le « trafic et négoce » chez le marchand Jean Michel. Comme il craint que le sieur Michel ne refuse de recevoir le jeune homme, à moins qu’il ne soit cautionné, Denis François fait état de l’assentiment de Jacques Valleton pour cette tâche46. La multiplicité des minutes notariales attestant d’envois de laines, originaires d’Espagne, de Nantes vers Rouen via Orléans, illustre la capacité d’adaptation des milieux marchands à la mise en service du canal de Briare en 1642. Cet ouvrage permet de rejoindre par voie d’eau la gigantesque agglomération parisienne depuis Orléans. En tout état de cause, l’existence de ces documents permet de compléter les indications de Bertrand Gautier qui ne mentionne pas la voie fluviale pour l’approvisionnement lainier de Rouen47.
27L’étude des minutes notariales montre également l’existence d’autres activités commerciales de cette famille. Toujours dans le cadre du trafic avec l’Espagne, un acte de février 1660 voit Pierre Valleton l’aîné signaler qu’il a chargé à Saint-Malo dans la frégate appelée la Marguerite, jaugeant 200 tonneaux, des toiles de Morlaix et des tissus de Vitré pour les envoyer à Cadix à l’adresse de Bernard Grou, marchand y demeurant48. En juillet 1661, il comparaît en compagnie d’autres marchands nantais pour nommer un procureur afin d’obtenir la libération du vaisseau le Petit Saint-Jean du port de 150 tonneaux, pris par des Espagnols et mené à Vigo. L’embarcation a été chargée dans le port ligérien de toiles et de mairains pour être conduits à Cadix et Malaga49. Ces documents peuvent être interprétés comme le signe d’une diversification des investissements commerciaux de notre personnage ou encore comme des témoignages d’une possible reconversion vers un port aux horizons plus alléchants. Il n’est pas nécessaire de redire l’importance que prend Cadix dans les échanges entre l’Espagne et ses possessions situées en Amérique dans la seconde moitié du xviie siècle50. Le fait que l’un des chargements se fasse à Saint-Malo permet de souligner le rôle très actif de ce port dans le « commerce de Cadix51 ». La part déterminante du pôle malouin dans cette affaire explique sans doute la timidité des marchands du port ligérien à s’engager plus avant dans les liens avec l’Andalousie.
28L’examen des contrats d’affrètements met en évidence la participation de Jacques Valleton et de son associé Charles Bazille à une autre activité en lien avec le secteur toilier : l’approvisionnement des chantiers de construction navale du roi, et plus particulièrement ceux localisés sur les côtes d’Aunis et de Saintonge. Pas moins de 22 actes, datés de 1661 à 1664, conservés dans liasses de Mathurin Verger, attestent d’envois de marchandises pour le compte de Sa Majesté vers Brouage (2 contrats d’affrètements datés de 1661 et 1664), la rivière de la Seudre (8 contrats de 1662), La Rochelle (8 contrats de 1663-1664) et Soubise (4 contrats de 1664)52. Les marchandises acheminées sont essentiellement des toiles de lin de noyales (secteur localisé à l’est de Rennes, non loin de Vitré), utilisées pour faire des voiles. Le destinataire le plus fréquemment cité dans les actes notariés n’est autre que Colbert du Terron, cousin germain de Jean-Baptiste53.
29Les Valleton ne sont pas absents des nouveaux horizons commerciaux du port de Nantes, notamment de la route antillaise. Dès 1646, François Valleton et son frère Jacques sont mentionnés dans la liste des propriétaires du Grand Armand, 260 tonneaux, équipé pour une traversée à destination des îles de Saint-Christophe et de la Martinique ; ils possèdent respectivement 2/8 et 3/8 des parts54. Un tournant semble intervenir en 1657 avec le départ de Charles Valleton (né en 1641) vers les îles de l’Amérique. À la suite du décès de son père Paul, survenu un plus d’un an auparavant, le jeune homme mineur est engagé auprès de René Allaire pour un contrat de trois ans par son oncle François Valleton55. Il s’agit selon toute vraisemblance d’un contrat d’apprentissage par le comptoir56. Cette orientation coloniale est confirmée par François II Valleton, sieur de La Garennerie (né en 1638) : il est cité en 1676-1677 dans la liste des principaux armateurs nantais en direction des Antilles.
30On ne peut terminer cette présentation des activités de cette famille sans évoquer la Compagnie des Indes orientales, créée sous l’impulsion de Jean-Baptiste Colbert en 1664. François Valleton est un des directeurs nantais de la Compagnie en 1665 tandis que Jacques devient trésorier de cette institution à sa fondation. Ces responsabilités favorisent l’accès des deux frères à l’échevinage, dans un contexte marqué, à partir de la fin des années 1660, par la conquête des responsabilités municipales par les marchands du port ligérien : Jacques est en poste de 1667 à 1670 et François de 1670 à 1673. La réussite de la famille et sa participation au commerce transocéanique expliquent peut-être la baisse d’attrait de ses membres pour le commerce avec les ports de la côte nord de l’Espagne. En effet, aucun Valleton n’est mentionné dans le recensement des marchands les plus influents de la Contractation dans la seconde moitié du xviie siècle57. Il faut prendre en considération également les difficultés financières et le décès de Pierre Valleton, principal artisan de cette famille dans les liens avec la péninsule Ibérique.
31Trois autres marchands appartenant à des familles nantaises de souche sont mentionnés dans le tableau des principaux affréteurs à destination de Bilbao : Gabriel Michel (1635-1687), signalé dans 7 documents ; Julien Gérard, sieur de Nays (1637-1674), à l’origine de 5 contrats ; Denis Marion, sieur des Noyers (1633-autour de 1700), responsable de 4 affrètements.
32Le premier appartient à une famille de marchands de draps de soie depuis trois générations. Il se tourne vers le négoce et la banque, marquant ainsi une évolution par rapport à ses ascendants. La spécialisation familiale dans le domaine de la toile pourrait expliquer les affrètements passés en direction de Bilbao. Malheureusement, les minutes dépouillées ne sont guère loquaces à ce sujet. Toutefois, « c’est sa veuve qui en s’associant avec ses deux fils lance véritablement la famille dans l’armement. Sous des raisons sociales diverses, les Michel arment 41 navires en droiture vers les îles et 42 à la traite58 ». Un cheminement similaire à celui des Valleton peut être mis en évidence, même si l’intérêt pour le commerce des Îles paraît plus tardif. En effet, les Michel n’apparaissent pas au milieu du xviie siècle dans le secteur des armements morutiers autour de Terre-Neuve ni dans celui de la droiture antillaise59.
33Julien II Gérard a, pour sa part, séjourné à Bilbao, sans doute dans le cadre de sa formation60. Fils du marchand nantais Julien I Gérard (mort en 1644) – personnage cité parmi les membres de la Contractation dans le deuxième quart du xviie siècle – et de Jeanne Jonnet, il épouse Françoise Burot en 1662. Le défunt père de sa compagne, Jean Burot, sieur Dupé (1600-1659), a été un marchand très influent de la cité ligérienne ; il se révéla particulièrement actif dans la droiture antillaise au milieu du siècle, en lançant le port de Nantes dans le commerce du sucre61. Lui-même participe directement aux armements antillais comme en témoignent plusieurs contrats de prêts à la grosse aventure conclus en 166762. En 1670, les affaires semblent plus difficiles : il laisse une procuration à son épouse au mois de janvier avant son départ pour les îles de Saint-Christophe et de la Martinique, dans le but avoué de récupérer ses biens restés sur place pour satisfaire ses créanciers63. En octobre 1673, notre personnage est nommé dans une minute relative à un partage familial : il déclare « sa demeure habituelle en l’isle de Bellisle64 ».
34Signalé parmi les marchands influents de la Contractation entre 1650 et 1675, Julien II Gérard disparaît prématurément et n’est pas remplacé au sein de la confrérie par ses enfants. Ces derniers semblent plutôt quitter le milieu marchand pour celui de l’office : paré du titre d’écuyer, Julien III Gérard (1664-1703) est auditeur à la Chambre des comptes de Bretagne. Notons que cette évolution avait été amorcée à la génération précédente puisque le frère puîné de Julien II, Guillaume (né en 1638), était avocat à la Cour65.
35À la différence des personnages évoqués précédemment, Denis Marion, sieur des Noyers, offre l’exemple d’une fidélité à la confrérie commerciale : il est mentionné dans les listes de la Contractation pendant toute la seconde moitié du xviie siècle. Ce marchand ne paraît pas prendre une part active aux commerces transocéaniques et reste cantonné aux secteurs traditionnels et aux échanges européens. En août 1659 par exemple, il reçoit 20 tonneaux de vin blanc nantais contre la livraison de 20 tonneaux de seigle « nouveau mesure nantoise du cru de Hennebond [et] Quimperlé » ; Marion récupère en outre la somme de 300 livres tournois du fait de la différence de prix entre les deux marchandises66. En 1660-1661, il affrète tout de même deux embarcations à destination de Ténériffe dans les îles Canaries67. Les options envisagées pour les retours des bâtiments laissent entrevoir des circuits complexes : le Saint-André de La Barre-de-Monts, 60 tonneaux, peut revenir à Londres ou à Paimbœuf, tandis que la Désirée de Pornic, 38 tonneaux, a le choix de s’arrêter à Bilbao ou de tracer sa route directement jusqu’à la Fosse de Nantes. Denis Marion séjourne même dans le port castillan autour des années 1680, signe de son ancrage dans le commerce bilbano-nantais68. Cependant, un document de 1695 témoigne de soucis financiers rencontrés par le couple Marion pour le paiement d’une rente constituée ; la belle-mère de Denis Marion est contrainte à intervenir pour éviter la ruine de sa fille69.
36La parenté de Denis avec Claude Marion, sieur de Procé (1624-1689), est difficile à établir avec certitude. Sont-ils frères ou éventuellement cousins ? Les éléments réunis sont trop partiels pour trancher. Toujours est-il que Claude participe activement à la droiture antillaise au milieu du xviie siècle et occupe la fonction d’échevin de Nantes de 1669 à 1672. La situation de Denis Marion, mal assurée à la fin du siècle, ne devait pourtant pas être si inconfortable que cela en 1659 au moment de son mariage avec Jeanne Libault (1638-1722). Il s’agit d’une belle union dans la mesure où la jeune femme est la fille unique du très puissant marchand nantais Gratien Libault, sieur du Perray et de La Templerie (1614-1686), et de Jeanne Moreau. Les frères Libault (Guillaume, Gratien et Nicolas) comptent en effet parmi les marchands les plus entreprenants dans l’ouverture de la route antillaise à Nantes et Gratien est maire de la cité ligérienne entre 1671 et 1673. Le contrat de mariage montre d’ailleurs un certain déséquilibre entre les parties : Denis Marion et sa mère s’engagent à donner à Jeanne « à jamais et à perpétuité la tierce partie de tous et chacuns leurs domaines et héritages », qui deviendront le propre de la future épouse ; de l’autre côté, tous les biens mobiliers dont héritera Jeanne Libault seront aussi considérés comme lui appartenant en propre70. Gratien cherche par tous les moyens à conserver sa fortune au sein de sa lignée.
Les marchands d’origine espagnole
37Les marchands issus de familles venues d’Espagne peuvent être scindés en deux groupes, en fonction de l’ancienneté de leur installation dans le port ligérien. Débutée dans les premières décennies du xve siècle, l’immigration espagnole connaît en effet une légère relance à Nantes dans la première moitié du xviie siècle, après un quasi-arrêt71. Parmi les personnages présents dans le tableau, deux noms renvoient à des familles castillanes arrivées depuis au moins le xvie siècle et particulièrement bien intégrées (de Bourgues, Despinoze), et les deux autres à des marchands débarqués depuis quelques années seulement (de Liendo, de Urquixo).
38Originaires de Burgos, les de Bourgues voient un membre de leur famille devenir maire de Nantes : Jacques de Bourgues, sieur de La Jaunays (1579-1661), occupe ce poste de 1646 à 1648, après avoir été échevin entre 1621 et 1624 ; ce personnage est le premier maire marchand du xviie siècle72. L’accès à une telle responsabilité illustre de manière éclatante l’intégration de cette lignée à la bonne société nantaise et sa réussite économique. René de Bourgues, sieur de La Jaunays (1628-1678), et Jean, le sieur de La Loire (1634-1690), cités dans le tableau des principaux affréteurs d’embarcations vers Bilbao, sont deux de ses fils73. L’autre marchand mentionné, François, le sieur du Plessix (1616-1670), est un cousin germain de René et de Jean, fils d’Étienne de Bourgues, sieur de La Novenisme (1583-1662) et de Françoise Sandon74. Il est à noter que les deux affrètements de René de Bourgues et un des trois contrats passés par Jean de Bourgues sont réalisés en collaboration avec Fernando de Liendo.
39L’arrivée des Despinoze dans le port ligérien se fait en deux temps : les premiers membres s’implantent à la fin du xve siècle et sont bien assimilés au groupe des officiers de justice au milieu du xviie siècle75 ; une seconde vague permet l’installation à Nantes de Pierre et de Jacques, en provenance de Burgos, à la fin du xvie siècle76. Paul Despinoze, sieur des Boullaines (1619-1678), est le fils de Jacques Despinoze (mort en 1626) et de Jeanne Chereau77.
40Ces deux familles sont avec les de Marques, les trois plus considérables de la Contractation au début du xviie siècle78. En 1602, Jacques de Bourgues, sieur des Champagnères, est consul de cette institution ; ce poste est ensuite occupé par ses fils Jacques (1619 et 1620) et Étienne (1629 et 1630) et ses petits-fils François (1659-1661), René (1662-1663) et Jean (1673-1674)79. Les trois derniers nommés sont les affréteurs rencontrés dans les actes dépouillés. En ce qui concerne les Despinoze, Jacques, immigré de Castille, est trésorier de la confrérie de 1602 à 1606 et consul en 1613 et 1614. Son fils Pierre, le sieur de La Rostannerie (1605-1678), est lui aussi consul de la Contractation en 1653-1655. Ces familles bien que toujours présentes dans le commerce vers Bilbao paraissent un peu en retrait passé le milieu du siècle.
41L’absence des de Marques est à ce titre remarquable tout comme celle des Santo-Domingo, autre importante famille marchande dans les échanges avec les ports cantabriques durant le premier xviie siècle. Ces lignées ont amorcé de façon très nette une ascension sociale par le biais des offices, même si le testament de Jean de Marques, sieur de La Motte (1614-1663), témoigne d’une prise de participation de plusieurs dizaines de milliers de livres dans la raffinerie du Coudray, en association avec un membre de la famille Santo-Domingo80. En tout état de cause, le commerce franco-espagnol ne constitue plus une priorité pour ces familles. Ce modèle de sortie du négoce par le haut est également suivi par les de Bourgues : les enfants de Jacques de Bourgues, sieur de La Jaunays, paraissent quitter le milieu marchand passées les années 168081. Cependant, dès la génération précédente, l’évolution est engagée : deux filles de Jacques de Bourgues et de Françoise Arnollet épousent des avocats (Françoise se marie avec Martin Le Brun, avocat au Parlement, en 1593, et Ysabeau s’unit à Pierre Paydran, avocat à la Cour, en 1597) et leur fils André, le sieur des Rivières (1593-1639), devient auditeur à la Chambre de comptes de Bretagne.
42À la différence de ces anciennes lignées castillanes, les Despinoze investissent de manière importante dans la pêche morutière en Amérique septentrionale et dans le commerce antillais. Dès 1645, Pierre Despinoze, sieur de La Rostannerie, et François Suhard, sieur du Fonteny (autre pilier des échanges avec l’Espagne), tous les deux marchands à la Fosse de Nantes, fondent une société pour une durée de huit ans avec Philbert de Noually, sieur de Neron, gouverneur des îles de Grenade, Grenadins et Saint-Vincent. Les Nantais doivent recruter et faire passer vers ces îles 40 engagés sur les 400 nécessaires à la mise en valeur des terres82. À peine dix ans plus tard, Paul Despinoze, sieur des Boullaines, et François Despinoze, sieur de La Maronnière, sont chargeurs pour chacun un quart dans le navire le Gédéon de Nantes du port de 300 tonneaux, pour une traversée en direction des îles de l’Amérique83. Par ailleurs, d’après l’inventaire des vaisseaux de 1664, Paul Despinoze possède des parts dans trois morutiers : le Louis 150 tonneaux et le Jacques 90 tonneaux, tous les deux du Croisic, ainsi que le César, 100 tonneaux, de Pornic. Ces participations à la grande pêche sont observables dans la durée : les enfants de Paul Despinoze et de Jeanne Bussoneau, spécialement Michel, le sieur de La Ravelonnière (né en 1655), participent à cette activité dans les années 168084. À l’instar des Valleton, l’attrait pour les nouvelles routes commerciales et les armements transatlantiques éclipse un peu les liens des Despinoze avec la péninsule Ibérique.
43Enfin, le tableau des principaux affréteurs vers Bilbao met en évidence la présence d’Espagnols arrivés en provenance de Bilbao dans la première moitié du xviie siècle comme Fernando de Liendo et Domingo de Urquixo (oncle et neveu)85. Selon plusieurs auteurs, ces marchands arrivés tardivement s’intègrent moins à la société nantaise86. Cette remarque trouve une illustration parfaite dans l’absence de mariage enregistrés à Nantes. Ils bénéficient malgré tout du soutien des grandes familles venues précédemment de Vieille Castille, et dans le cas présent des de Bourgues : en mars 1657, Domingo de Urquixo (oncle et neveu) déclarent habiter dans la maison de Jacques de Bourgues, sieur de La Jaunays, localisée à proximité de la chapelle Saint-Julien à la Fosse87 ; en décembre 1663, Fernando de Liendo partage avec René de Bourgues, sieur de La Jaunays, fils du précédent, une portion du logis familial contre un loyer de 300 livres88. Rappelons que Jacques de Bourgues est décédé en septembre 1661. En tout état de cause, les documents consultés ne sont guère loquaces sur ces trois marchands présents depuis peu de temps dans le port ligérien. Ils sont cependant intégrés à la Contractation. Si Fernando de Liendo ne paraît pas rechercher la naturalisation française, les deux Domingo de Urquixo en revanche obtiennent leurs lettres de naturalité : l’oncle en juillet 1638, étant habitué à Nantes, selon la formule, depuis plus de 6 ans ; le neveu en juin 1657, habitué à Nantes depuis 10 ans.
44Le testament de Domingo de Urquixo l’aîné, rédigé en juin 1657 et révoqué en août 1658, permet toutefois d’en savoir un peu plus sur ce personnage89. Alors âgé approximativement de 60 ans, le marchand ne semble pas disposer d’une fortune personnelle importante. Les dons aux bonnes œuvres sont relativement modestes (quelques dizaines voire centaines de livres tournois selon les institutions) et ne soutiennent en aucun cas la comparaison avec ceux réalisés par exemple par Jean de Marques, sieur de La Motte, quelques années plus tard90. Les dettes affichées par Domingo laissent apparaître des contacts commerciaux à Lisbonne pour l’étranger, dans le triangle toilier de l’ouest français (Morlaix, Laval) et aussi à Nantes. Un acte passé quelques jours auparavant par de Urquixo renforce l’impression d’une situation financière délicate : il reconnaît devoir la somme de 3 000 livres à Michel Lince, prêtre irois, présent en la ville de Guérande. Mais, ne pouvant rembourser son créancier faute de liquidité, le marchand d’origine espagnole est contraint d’abandonner deux cédules au prêtre qu’il détenait de marchands de Nantes91.
45Les activités commerciales de Fernando de Liendo et de Domingo de Urquixo (oncle et neveu) sont largement centrées sur les échanges avec Bilbao. Le premier marchand affrète dix embarcations vers Bilbao entre 1657 et 1664 et semble se concentrer pendant ces années uniquement sur cette route commerciale. Par la suite, Fernando de Liendo dispute durant un court moment (1666-1667) à Gaspard Alvarez de Pereda, autre espagnol implanté dans le port ligérien, la fourniture des greniers à sel de Galice et d’Asturie. Celui-ci était devenu commis des administrateurs des gabelles de ces deux provinces en 1659, en remplacement d’un marchand d’origine portugaise, Alvaro Vaz de Nogueira. De Liendo paraît abandonner à ce moment-là les liens avec les ports de la côte cantabrique. Les investissements des de Urquixo semblent un peu plus diversifiés. Aux cinq contrats à destination de Bilbao, relevés entre 1657 et 1661, il convient d’ajouter un affrètement vers Terre-Neuve conclu en 1657 et un autre pour les îles Canaries en 166092. La mort de l’oncle, survenue en 1662, marque la fi n des activités commerciales de cette famille dans le port ligérien93. Le fait que ces derniers personnages ne fassent pas souche à Nantes ne doit pas amener le lecteur à négliger la proximité des familles marchandes évoquées précédemment.
Des milieux marchands étroitement liés
46Des liens étroits existent entre les différents acteurs mentionnés. Les traditionnelles alliances matrimoniales sont favorisées et accentuées par la proximité des habitations de ces personnages ainsi que par les relations nouées lors de rencontres à la direction des affaires de la Contractation, du Consulat de commerce ou encore du corps de ville de Nantes. Les deux premiers points seront successivement abordés, le dernier ayant déjà été esquissé auparavant.
47Denis, le sieur des Noyers, est le fils de Charles Marion et de Louise Valleton, une des sœurs de François, Jacques et Pierre Valleton déjà cités. Le mariage de Denis Marion avec Jeanne Libault est consolidé en janvier 1671 par l’union de Françoise Valleton, 21 ans, fille de Jacques et de Jeanne Bazille, avec Nicolas Libault, sieur de Beaulieu (1646-1709), fils de Guillaume, le sieur du Boisrobin. Par ailleurs, Claude Marion, dont la filiation avec Denis est incertaine, devient toutefois le deuxième époux de Jeanne Jonnet, c’est-à-dire la mère de Julien II Gérard, sieur de Nays. Le défunt père de l’épouse du sieur de Nays, Jean Burot, sieur Dupé, remplit en 1657 la fonction d’exécuteur testamentaire de Domingo de Urquixo l’aîné. Gabriel Michel se marie pour sa part avec Françoise Despinoze, fille de Pierre, le sieur de la Rostannerie. Une étude plus poussée des parrainages apporterait sans doute d’autres illustrations de ces contacts.
48En ce qui concerne les lieux de résidence, deux exemples pris par Guy Saupin sont tout à fait révélateurs :
« [En 1659,] Gratien Libault, échevin et [futur] maire, possède sur le port au vin un logis qui est encadré par ceux de Louis de La Pelonye [issu d’une famille espagnole] et d’Étienne de Bourgues, échevin. Quelques années plus tôt, en 1653, Denis Marion achète pour 10 000 livres à Bonnaventure de Santo-Domingo, contrôleur général alternatif des finances de Bretagne, une maison “située à la Fosse, au devant du Grand Cail, avec de nombreux locataires […]” bornée d’un côté par une maison [appartenant] à Jacques Valleton, marchand et échevin, et de l’autre par une maison à Jeanne de Marques, veuve de Pierre Valleton, vivant sieur du Cheminet94. »
49Précisons que Jeanne est la deuxième épouse de Pierre Valleton.
50Sans doute faut-il insister pour finir sur la lenteur du démarrage antillais à Nantes ; l’inventaire des vaisseaux de 1664 ne crédite les ports de l’ensemble portuaire nantais que d’une poignée de navires affectés à des traversées en droiture, laissant surtout l’image d’une flotte tournée vers la grande pêche morutière. La non-interruption des liaisons commerciales durant la guerre franco-espagnole entre Nantes et Bilbao et surtout la vigoureuse reprise des affrètements vers le port castillan, partenaire habituel de la cité ligérienne, une fois la paix revenue, traduit l’existence d’un réflexe des marchands, encouragé par l’existence d’une institution, la Contractation, toujours vivace dans la seconde moitié du xviie siècle, même si elle entre dans une phase de déclin. Les analyses de Paul Jeulin et de Guy Saupin, plaidant pour une embellie du commerce bilbano-nantais durant les décennies 1650-1660, semblent confirmées.
51En tout cas, l’ouverture des nouveaux horizons commerciaux du port de Nantes ne s’est pas faite par un abandon brutal des anciens débouchés. Mieux, la plupart des artisans que l’on retrouve dans le trafic antillais, tels les Valleton, Gérard ou Despinoze, sont partie prenante dans les échanges avec Bilbao ; ils comptent même au nombre des acteurs majeurs des liens commerciaux entre les deux places. Sur la longue durée néanmoins, l’évolution brossée par Jean Tanguy est tout à fait valable. La lente détérioration des liens de Nantes avec les ports de la côte cantabrique se fait sentir, accentuée par la guerre de Dévolution (1667-1668). L’arrêt de l’immigration des marchands espagnols à Nantes, conjugué à l’effacement du négoce des anciennes familles venues de Vieille Castille n’étaient, de toute façon, pas de nature à relancer les échanges. Au moment de la « Révolution sucrière », les marchands nantais se tournent de manière décisive en direction des îles de l’Amérique, abandonnant aux Malouins, mieux placés, les possibilités offertes par la Carrera de Indias, ce qui aurait pu constituer une solution de repli pour les habitants du port ligérien. À l’aube du « siècle d’or » de Nantes, la place de Bilbao entrait quant à elle dans une phase de déclin.
Notes de bas de page
1 Il convient de mettre en évidence la pluralité des approches consacrées à la première modernité, période correspondant à l’apogée du commerce franco-espagnol. Du côté français : Touchard H., Le commerce maritime breton à la fin du Moyen Âge, thèse de doctorat ès lettres, université de Paris, 1967 ; Mathorez J., « Notes sur les Espagnols et les Portugais à Nantes », Bulletin hispanique, t. 14 et 15, 1912-1913, p. 1-98 ; Jeulin P., « Une page du commerce nantais du xvie siècle au début du xviiie siècle, aperçus sur la Contractation de Nantes (1530 environ-1730) », Annales de Bretagne, t. 40, 1932-1933, p. 284-331 et 457-505 ; Tanguy J., Le commerce du port de Nantes au milieu du xvie siècle, Paris, Armand Colin, 1956. Citons également quatre études fondamentales construites principalement avec des sources espagnoles : Garcia De Cortazar J. Á., Viscaya en el siglo XV, Bilbao, Ediciones de la Caja de Ahorros Vizcaína, 1966 ; Lapeyre H., Une famille de marchands, les Ruiz : contribution à l’étude du commerce entre la France et l’Espagne au temps de Philippe II, Paris, Armand Colin, 1955 ; Casado Alonso H., « La Bretagne dans le commerce castillan aux xve et xvie siècles », Kerhervé J. et Tanguy D. (éd.), 1491. La Bretagne, terre d’Europe, actes du colloque de Brest (2, 3 et 4 octobre 1991), Brest, Centre de recherche bretonne et celtique, 1992 ; Priotti J.-P., Bilbao et ses marchands au xvie siècle : genèse d’une croissance, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2004. Pour le présent colloque, voir l’article de Bochaca M. et Tranchant M., « État du commerce franco-espagnol au xve siècle » ; voir également la contribution de Zabala A., « Les relations maritimes et commerciales entre Bilbao et Nantes dans la première moitié du xviie siècle ».
2 Priotti J.-P., « Nantes et le commerce atlantique : les relations avec Bilbao au xvie siècle », Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, t. 100, 1993, n° 3, p. 270.
3 Ibid., p. 278.
4 Tanguy J., Le commerce nantais dans la seconde moitié du xvie et au début du xviie siècle, thèse de troisième cycle, université de Rennes, 1967, p. 333.
5 Lapeyre H., op. cit., p. 394-395.
6 Tanguy J., op. cit., 1967, p. 337.
7 Béranger J. et Meyer J., La Bretagne à la fin du xviie siècle d’après le rapport de Béchameil de Nointel, Paris, Librairie C. Klincksieck, 1976, p. 123, 126-127.
8 Jeulin P., art. cit., p. 474.
9 Saupin G., « Nantes et le commerce du sel vers l’Espagne du Nord au xviie siècle », Hocquet J.-C. et Sarrazin J.-L. (dir.), Le sel de la Baie. Histoire, archéologie, ethnographie des sels atlantiques, actes du colloque de Nantes (16-18 septembre 2004), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, p. 262.
10 Laucoin C., La naissance du trafic antillais 1638-1660, maîtrise d’histoire, Saupin G. (dir.), université de Nantes, 1999, p. 55.
11 Bibliothèque nationale, VC Colbert 199 : procès-verbaux de l’inventaire des vaisseaux de 1664 ; Maître L., « Situation de la marine marchande du comté nantais d’après l’enquête de 1664 », Annales de Bretagne, t. 17, 1902-1903, p. 326-343.
12 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1919-1937 : notaire Verger, années 1654 à 1664 ; 4 E 2 / 1559-1560 : notaire Ouairy, années 1660 à 1664 ; 4 E 2 / 1827-1830 : notaire Tesnier, années 1651 à 1662 ; 4 E 2 / 1469-1475 : notaire J. Mariot, années 1650 à 1660 ; 4 E 2 / 1088-1090 : notaire Houet, années 1658 à 1664 ; 4 E 2 / 541-543 : notaire Constans, années 1657 à 1664 ; 4 E 2 / 857 : notaire Garreau, années 1657-1664 ; 4 E 2 / 45 : notaire Allouin, années 1650 à 1662. Pour plus de précisions, voir Michon B., L’aire portuaire de Nantes aux xviie et xviiie siècles, thèse d’histoire, Saupin G. (dir.), université de Nantes, 2005, t. 1, p. 232-236 et 340-349.
13 Mathorez J., art. cit., 1912-1913, p. 4-5 et 39-40 ; Priotti J.-P., op. cit., 2004, p. 98-99. Les liens entre les Castillans et les Bretons sont cependant bien antérieurs. En 1340, le duc de Bretagne signe avec les Biscayens un traité de commerce favorable à la Seigneurie. Près d’un siècle plus tard, le duc Jean V conclut deux traités avec les rois de Castille et Léon, apparemment sur le modèle d’une convention passée entre le duc de Bourgogne Philippe Le Bon et le roi de Castille en 1428. Les accords instituaient une modération des droits fiscaux et l’établissement à Nantes d’un « consul, procureur et boursier » ayant juridiction sur les commerçants de sa nation trafiquant en Bretagne.
14 À propos de ce commerce lié en partie au contexte de guerre d’Indépendance du Portugal, voir Saupin G., art. cit., dans Hocquet J.-C. et Sarrazin J.-L. (dir.), op. cit., p. 259-271 ; voir également Michon B., « Les débouchés du sel de la baie de Bourgneuf au milieu du xviie siècle », ibid., p. 245-258. Pas moins de 23 ports de ces deux provinces réceptionnent les chargements de sel (15 en Galice et 8 en Asturies).
15 Priotti J.-P., art. cit., 1993, p. 270.
16 Jeulin P., art. cit., p. 479-482.
17 À titre d’exemple, voir Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1933 : minutes de Verger, le 12-08-1662. Par ce contrat d’affrètement, Fernando de Liendo, marchand à la Fosse de Nantes, propriétaire en portion du vaisseau l’Olive de la rivière de Nantes, du port de 80 tonneaux, loue l’embarcation à Antoine François, sieur de La Briandière, bourgeois et marchand de Nantes. Le bâtiment doit se rendre au Port-Louis pour y prendre un chargement de sardines et les conduire à Cadix à l’intention du commis du sieur de La Briandière installé sur place. Le navire doit ensuite naviguer jusqu’à Malaga pour livrer le reste de sa cargaison et recharger des marchandises pour les apporter à Paimbœuf. L’acte précise que cette formalité peut aussi s’accomplir à Alicante ou même à Majorque.
18 Tanguy J., op. cit., 1967, p. 345.
19 Priotti J.-P., art. cit., 1993, p. 278.
20 Mathorez J., art. cit., 1912, p. 73. L’auteur écrit : « Durant la guerre de Trente Ans, ce fut entre Espagnols et Nantais une longue suite de prises, de luttes et d’abordages. Les corsaires et les pirates des autres pays se mêlaient souvent à ces luttes. Quand on parcourt les documents, qui relatent tous ces faits de guerre, on demeure surpris que les armateurs aient eu l’audace de continuer l’exercice d’un commerce qui offrait tant de périls et de dangers. » Il renvoie à l’ouvrage de La Nicollière-Tajeiro S. de, La course et les corsaires du port de Nantes, Paris, 1890.
21 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1473, n° 43 : minutes de J. Mariot, le 09-03-1654.
22 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1473, n° 232 : minutes de J. Mariot, le 20-11-1654.
23 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1922, n° 111 : minutes de Verger, le 07-04-1657.
24 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1920, nos 228, 229 : minutes de Verger, le 30-07-1655.
25 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1920, n° 260 : minutes de Verger, le 25-09-1655.
26 Casado Alonso H., « Le commerce des “marchandises de Bretagne” avec l’Espagne au xvie siècle », Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, t. 107, 2000, n° 2, p. 32-33. L’auteur étudie plus particulièrement le commerce franco-espagnol durant la décennie 1550, période marquée par la guerre entre les deux puissances, stoppée momentanément par la trêve de Vaucelles (1556) avant la paix de Cateau-Cambrésis d’avril 1559. Il indique que « le conflit, comme ceux des années précédentes, n’a pourtant pas pour effet l’arrêt total du commerce. Il suffi t d’avoir le sauf-conduit exigé par les autorités royales au moment de l’entrée des marchandises dans les ports espagnols ».
27 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1921, nos 35, 42, 44, 61, 65, 163, 274 : minutes de Verger, année 1656. Un marché porte sur 45 balles de « laines d’Espagne », un autre sur 30 balles de « laines de Ségovie ». Les autres contrats se contentent de distinguer les balles de grande laine (184 unités) de celles agnelines (39 unités), c’est-à-dire la laine courte provenant de la première tonte d’un agneau.
28 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1932 : minutes de Verger, le 17-03-1662. Les huit marchands nantais sont Jacques et Pierre Valleton, Charles Bazille, Domingo de Urquixo l’aîné, Emmanuel Vaz, Jean de Bourgues, sieur de La Loire, Fernando de Liendo et Julien Dureau, sieur de Saint-Georges. La plupart de ces personnages sont déjà cités dans le tableau.
29 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1928, n° 241 et 4 E 2 / 1929, n° 189 : minutes de Verger, les 22-06-1660 et 09-11-1660. Dans le premier cas, l’affréteur est Pierre Valleton l’aîné et dans le second Martin de Alipassaga.
30 C’est du moins ce qu’avance Henriet O., La bourgeoisie nantaise 1650-1700, DES d’histoire, université de Rennes, 1961, p. 30.
31 Jacques Valleton, sieur de La Garennerie puis de La Peille, épouse Jeanne Bazille, peut-être au cours de l’année 1637. D’après les baptêmes inscrits sur les registres de la paroisse Saint-Nicolas de Nantes, 14 enfants sont nés de leur union entre 1638 et 1657. Jeanne Bazille est inhumée le 19 avril 1698 en l’église de la paroisse Saint-Nicolas à l’âge de 80 ans environ. Un acte du 14 mars 1619, mentionné sur les registres de la paroisse nantaise de Saint-Saturnin, signale le baptême d’une petite Jeanne, fille de Claude Bazille et de Gabrielle Belloeil. Quelques années auparavant, un autre baptême, en date du 16 septembre 1614, implique un enfant prénommé Charles, issu des mêmes parents. Claude Bazille, sieur de La Bazillière, marchand à Nantes, est inhumé le 17 mai 1656. En ce qui concerne Charles Bazille, sieur de Malville, il se marie avec Anne Le Lestre, vraisemblablement durant l’année 1647. Pas moins de 13 baptêmes concernant des enfants issus de ce couple sont indiqués dans les registres de la paroisse Saint-Nicolas entre 1648 et 1666. Pour plus de précisions sur ces éléments généalogiques ainsi que sur ceux qui vont suivre, voir Arch. dép. Loire-Atlantique, 25 J : Fonds du vicomte Paul Freslon.
32 Le mariage de Pierre Valleton et de Marguerite Macé intervient le 17 février 1600. Dix enfants, nés de cette union, sont portés sur les registres de catholicité de la paroisse Saint-Nicolas entre 1602 et 1613 : François (février 1602), Louise (juillet 1603), Michel (août 1604), Françoise (mai 1605), Marie (mai 1607), Jacques (juillet 1608), Pierre et Marguerite (novembre 1609), Nicole (juin 1611) et Paul (janvier 1613). Si le sort de Michel est incertain (décès en bas-âge ou carrière ecclésiastique), les quatre autres fils (François, Pierre, Jacques et Paul) sont marchands à la Fosse de Nantes.
33 Saupin G., « Les marchands nantais et l’ouverture de la route antillaise 1639-1650 », Sanchez J.-P. (dir.), Dans le sillage de Colomb. L’Europe du ponant et la découverte de la route antillaise, 1450-1650, actes du colloque de Rennes (5, 6 et 7 mai 1992), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1995, p. 177.
34 Jeulin P., art. cit., p. 328-329.
35 Pour plus de renseignements sur ce thème, voir Lespagnol A., « Modèles éducatifs et stratégies familiales dans le milieu négociant malouin aux 17e et 18e siècles : les ambiguïtés d’une mutation », Angiolini F. et Roche D. (dir.), Cultures et formations négociantes dans l’Europe moderne, Paris, Édition de l’École des hautes études en sciences sociales, 1995, p. 257-274.
36 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1921, n° 196 et 4 E 2 / 1922, n° 28 : minutes de Verger, les 09-10-1656 et 12-01-1657. Dans le premier document, Jacques Valleton, sieur de La Peille, et Pierre Valleton, sieur du Cheminet, agissant pour eux et Charles Bazille, engagent Guillaume Le Mosnier, maître de la barque la Jeanne de Penerf, 30 tonneaux, pour un voyage à destination de Bilbao. Les deux frères sollicitent la même embarcation quelques mois plus tard pour une expédition similaire.
37 Casado Alonso H., art. cit., 1992, p. 89.
38 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1474, n° 161 : minutes de J. Mariot, le 07-02-1656.
39 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1936 : minutes de Verger, le 29-05-1664. Pierre Valleton l’aîné doit 6 755 livres 4 sous à Jean de La Porte, sieur du Manoir, 38 704 livres 8 sous à René Frin, sieur du Pin, 14 785 livres 16 sous à Jean de La Porte père, 18 512 livres à Pierre de La Porte son fils, 16 467 livres à Jean et Pierre du Chemin, enfin 4 974 livres à René du Chemin. Le marchand nantais règle devant notaire le jour du traité un tiers des sommes dues en lettres de changes payables en deux termes égaux : le premier six mois après la signature de la convention et le second un an. Les deux autres tiers correspondent à des transferts de créances détenues par Pierre Valleton sur le sieur Le Grand de Paris. Précisons que le plus gros créancier du sieur Valleton, René Frin, sieur du Pin, obtient un accord plus favorable par un acte daté du même jour : il reçoit la moitié de la somme en lettres de changes au lieu du tiers et a la possibilité de réclamer directement à Bilbao l’argent des ventes des marchandises expédiées par le Nantais.
40 Tanguy J., « L’exportation des toiles de la France de l’Ouest en Espagne dans la seconde moitié du xvie siècle », Sanchez J.-P. (dir.), op. cit., p. 195.
41 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1210, n° 14 : minutes de Lebreton, le 26-01-1660. Cité par Laucoin C., op. cit., p. 93.
42 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 857, n° 6 : minutes de Garreau, le 08-10-1658.
43 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 100, nos 15, 105, 261 et 4 E 2 / 101, nos 12, 63, 250, 349 : minutes de Julien Bachelier, années 1642 et 1643. Cités par Saupin G., art. cit., 1995, p. 177 et 183. D’autres exemples peuvent être ajoutés : ainsi en février 1644, François Valleton engage plusieurs chalands pour convoyer 200 balles de laines de Castille et de Ségovie jusqu’à Orléans ; les marchandises sont destinées à un marchand de Paris. Voir Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 101, n° 401 : minutes de Bachelier, le 13-02-1644.
44 Par exemple Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 100, n° 15 et 4 E 2 / 101, n° 337 : minutes de Bachelier, les 22-01-1642 et 17-12-1643.
45 Par exemple Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 100, n° 105 et 4 E / 101, n° 371 : minutes de Bachelier, les 17-05-1642 et 16-01-1644.
46 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1474, n° 235 : minutes de J. Mariot, le 12-03-1657.
47 Gautier B., Le monde du négoce dans les ports du Ponant sous Richelieu et Mazarin (vers 1625-vers 1660). Les exemples de Bordeaux et de Rouen, thèse d’histoire, Butel P. (dir.), université Bordeaux III, 1996, t. 1, p. 248-250.
48 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1928, n° 51 : minutes de Verger, le 20-02-1660.
49 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1931 : minutes de Verger, le 27-09-1661. Les autres marchands nantais impliqués dans cette affaire sont Antoine François, sieur de La Briandière, François Huré, sieur de La Havardière, son frère et associé Jacques, le sieur de La Roncinière, enfin Pierre Descazaux.
50 Bustos Rodriguez M., Cádiz en el sistema atlántico. La ciudad, sus comerciantes y la actividad mercantil (1650-1830), Silex Universidad, 2005.
51 Lespagnol A., Messieurs de Saint-Malo. Une élite négociante au temps de Louis XIV, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1997, t. 1, p. 403-494. L’auteur met parfaitement en évidence les trois maillons essentiels de la « filière complète d’acheminement vers (et depuis Cadix) et la “Carrera de Indias” » des Malouins : « – la “ligne de Cadix”, un système de navigation régulier et efficace garantissant la liaison permanente avec l’Andalousie ; – le contrôle d’un produit clé du trafic hispano-américain, la toile ; la présence directe des maisons malouines à Cadix, au point nodal du grand trafic intercontinental ».
52 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1931-1937 : minutes de Verger, 2e semestre 1661-2e semestre 1664.
53 Colbert du Terron (1619-1684) succède au cardinal de Mazarin en 1661 dans son gouvernement de Brouage et est nommé au cours de cette année-là en qualité de commissaire général de la marine. Il occupe même le poste d’intendant de la marine au pays d’Aunis, La Rochelle, Brouage en 1661-1662. C’est lui qui fut chargé de la construction de Rochefort à partir de 1665.
54 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1468, n° 286 : minutes de P. Mariot. Cité par Laucoin C., op. cit., p. 93.
55 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1922, n° 90 : minutes de Verger, le 15-03-1657.
56 Saupin G., art. cit., 1995, p. 177.
57 Jeulin P., art. cit.
58 Petre-Grenouilleau O., L’argent de la traite. Milieu négrier, capitalisme et développement : un modèle, Paris, Aubier, 1996, p. 21-22. Pour plus de précisions sur cette société « veuve et fils », voir Dufournaud N. et Michon B., « Les femmes et le commerce maritime à Nantes (1660-1740) : un rôle largement méconnu », CLIO Histoire, Femmes et Sociétés, n° 23, 2006, p. 313.
59 Cette remarque est fondée sur les résultats des analyses des actes notariés de deux études. Voir Michon B., Les négociants nantais et la pêche à la morue à Terre-Neuve dans la seconde moitié du xviie siècle, maîtrise d’histoire, Saupin G. (dir.), université de Nantes, 1999, p. 103-104. Deux périodes de sondages ont été retenues pour ce travail : 1649-1660 et 1680-1697. Pour la droiture antillaise, voir Laucoin C., op. cit.
60 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1926, n° 127 : minutes de Verger, le 06-02-1659. Il s’agit d’une attestation demandée par Bernard Pépin, originaire de Saint-Malo. Celui-ci affirme être arrivé à Bilbao au mois de mars 1657 dans le navire le Faucon Doré avec des fèves et des toiles consignées à Julien Gérard, sieur de Nays, « qui estoit pour lors residant à Bilbao ».
61 Laucoin C., op. cit., p. 94-95.
62 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1944 : minutes de Verger, année 1667 (2e semestre). Dans cette liasse, Julien Gérard emprunte de l’argent dans 13 actes en tant que propriétaire et chargeur de plusieurs navires, pour un montant total supérieur à 6 300 livres. Il est portionnaire et avitailleur pour un tiers du Saint-Joseph, 200 tonneaux, à hauteur d’un quart de la Marie-Thérèse, 180 tonneaux, pour les deux tiers du Saint-Michel, 260 tonneaux ; ces trois navires ont reçu une commission en guerre et marchandises et doivent se rendre aux îles françaises de l’Amérique ou ailleurs. En outre, le Nantais est intéressé pour la totalité dans le vaisseau nommé la Vierge, 50 tonneaux, qui envisage de partir à destination des îles de Saint-Christophe et de la Martinique, enfin il est propriétaire d’1/8 partie du Jacques-Marc, 90 tonneaux, mais chargeur de l’ensemble de la cargaison de ce bâtiment en partance pour les mêmes directions. Par ailleurs, Julien Gérard négocie durant cette même période le passage de 13 engagés pour les îles.
63 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 196 : minutes de Belon, le 29-01-1670.
64 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1378 : minutes de Lemerle, le 18-10-1673. Les deux derniers actes nous ont été communiqués par Jacques Rouziou que nous remercions.
65 En 1694, Julien III Gérard vend à son oncle Guillaume la charge et office de gentilhomme par quartier de la grande Vennerie du roi. Voir Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 12, n° 2 : minutes d’Alexandre, le 14-08-1694.
66 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1927, n° 89 : minutes de Verger, le 21-08-1659.
67 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1929, n° 108 et 4 E 2 / 1931 : minutes de Verger, les 20-091660 et 28-11-1661.
68 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 702 : minutes de Duteil, mars 1680. L’épouse de Denis Marion comparaît devant le notaire avec une procuration de son mari établie à Bilbao. Renseignement aimablement communiqué par Jacques Rouziou.
69 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1977 : minutes de Verger, le 18-06-1695.
70 Arch. dép. Loire-Atlantique, E 1026 : Marion, contrat de mariage, le 07-01-1659.
71 Le Méné M., La ville de Nantes au xve siècle, DES d’histoire, université de Rennes, 1959 ; Croix A., Nantes et le pays nantais au xvie siècle : l’étude démographique, thèse de troisième cycle, université de Nantes, 1969 ; Raimbaud E., Les étrangers en Bretagne d’après les lettres de naturalité (xvie siècle1661), maîtrise d’histoire, Le Page D. (dir.), université de Nantes, 2000.
72 Jacques, le sieur de La Jaunays, est le fils de Jacques de Bourgues, sieur des Champagnères (mort en 1615) et de Françoise Arnollet. Son père est venu de Vieille Castille pour s’installer dans la cité ligérienne et a obtenu ses lettres de naturalité en 1561. Sa mère est elle-même issue d’une famille castillane immigrée à Nantes dès le milieu du xve siècle. Dix baptêmes impliquant des enfants nés de cette union sont signalés par Freslon entre 1573 et 1582, d’après les registres de catholicité de la paroisse Saint-Nicolas. Il semble toutefois qu’une onzième naissance, celle d’André, puisse être ajoutée.
73 Jacques de Bourgues, dit le jeune, se marie en première noce avec Jeanne Langlois et ensuite avec Jeanne Gabory. Trois enfants sont nés du premier lit, dont deux décèdent en bas âges, et 12 du second.
74 Étienne de Bourgues épouse Françoise Sandron le 23 novembre 1609 en l’église de la paroisse Saint-Nicolas. Au moins 16 enfants sont nés de ce mariage entre 1610 et 1635.
75 Saupin G., « Les marchands espagnols dans l’élite dirigeante du Conseil des bourgeois de Nantes au milieu du xvie siècle », Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, t. 112, 2005, n° 4, p. 174-175. L’auteur indique que deux branches Despinoze se développent à partir de Bernardin et de Pierre dans les premières décennies du xvie siècle. Un siècle plus tard, en juillet 1658, une procession a lieu aux Cordeliers pour l’enterrement de Messire Michel d’Espinoze, seigneur de Portery, président du Parlement de Bretagne. Il descend de ces premiers arrivés.
76 Raimbaud E., op. cit., t. 2, p. 8. Les deux frères, fils de Jacques Despinoze, obtiennent leurs lettres de naturalité en 1598. La déclaration précise en des termes identiques pour les deux frères : « Habitué avec son frère, ses parents et sa famille depuis 27 ou 28 ans à Nantes. » Pierre Despinoze épouse Anne Garreau le 26 juin 1595. Jacques Despinoze se marie quant à lui à trois reprises : en première noce avec Esther Bidé le 11 février 1597, puis en deuxième noce avec Marguerite de Santo-Domingo le 9 février 1613, enfin en troisième noce avec Jeanne Chereau le 13 février 1616.
77 L’union de Paul Despinoze, sieur des Boullaines, et de Jeanne Bussonneau est célébrée le 10 janvier 1651.
78 Jeulin P., art. cit., p. 328.
79 Saupin G., Nantes au xviie siècle. Vie politique et société urbaine, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1996, p. 277.
80 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1934 : minutes de Verger, le 28-05-1663.
81 Saupin G., Nantes au xviie siècle…, op. cit., p. 302.
82 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1466, n° 303 : minutes de P. Mariot. Cité par Laucoin C., op. cit., p. 92.
83 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1919, n° 65 : minutes de Verger, le 15-07-1654.
84 Michon B., op. cit., p. 104, 144, 146, 164.
85 À la suite de mon intervention, le professeur Juan E. Gelabert m’a fait remarquer que de Urquixo pouvait correspondre au village espagnol de Aquijo, situé à 200 kilomètres au sud de Bilbao. Ces deux marchands seraient donc peut-être originaires de cet endroit plutôt que de Bilbao.
86 Michaud V., Les négociants étrangers à Nantes pendant la première moitié du règne de Louis XIV (1661-1685), maîtrise d’histoire, Saupin G. (dir.), université de Nantes, 1996, p. 16.
87 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1922, n° 215 : minutes de Verger, le 12-06-1657.
88 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1935 : minutes de Verger, le 29-12-1663. Cité par Saupin G., art. cit., 2006, p. 266.
89 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1922, n° 215 : minutes de Verger, le 12-06-1657.
90 Domingo de Urquixo envisage de donner 300 livres à la fabrique paroissiale, 300 livres aux couvents de Nantes et 60 livres aux pauvres. De son côté, en 1663, Jean de Marques lègue 6 000 livres à la fabrique de la paroisse Saint-Nicolas, 10 000 livres à l’hôpital de Nantes, 1 350 livres réparties entre les différentes congrégations présentes à Nantes, 200 livres pour faire dire des messes, 1 500 livres aux pauvres du Sanitat et 1 500 livres pour les pauvres honteux de la paroisse, soit un total de 20 550 livres tournois.
91 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1922, n° 186 : minutes de Verger, le 31-05-1657.
92 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1922, n° 128 et 4 E 2 / 1929, n° 119 : minutes de Verger, le 20-04-1657 et le 28-09-1660.
93 Arch. dép. Loire-Atlantique, 4 E 2 / 1932-1935 : minutes de Verger, années 1662-1663. Plusieurs actes concernent la succession de Domingo de Urquixo. Au début du mois de mai 1662 par exemple, Fernando de Liendo réclame au nom des héritiers de Domingo le paiement de deux lettres de change au marchand nantais Pierre Ducassia. De Liendo laisse ensuite procuration au neveu de Domingo pour gérer ses affaires pendant son absence. Enfin, le 7 août 1663, Domingo de Urquixo (le neveu du défunt), « estant sur son depart pour aller en Espagne », donne procuration à Fernando de Liendo.
94 Saupin G., Nantes au xviie siècle…, op. cit., p. 419-420.
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