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Du diocèse à la paroisse

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Anne Lunven

Introduction générale

Texte intégral

1Le diocèse est une circonscription placée sous la juridiction d’un évêque. Ce territoire est lui-même divisé en paroisses, cellules de base de l’organisation ecclésiastique, qui correspondent à la fois à une unité territoriale et à une communauté de fidèles confiée à la garde d’un curé (ou d’un recteur, selon l’appellation en usage en Bretagne avant le XIXe siècle). L’évêque exerce un droit prééminent sur les églises paroissiales et leurs communautés, dont il a la charge spirituelle. Il est assisté dans sa tâche de gouvernement par plusieurs intermédiaires, les archidiacres et les doyens, qui contrôlent des subdivisions du diocèse : l’archidiaconé et le doyenné. Cette hiérarchie, qui s’étend de la paroisse au diocèse, constitue l’aboutissement d’un long processus de territorialisation des structures ecclésiales au cours du Moyen Âge, que nous nous proposons de suivre et d’analyser en haute Bretagne, dans les diocèses de Rennes, Dol et Alet/Saint-Malo, entre le Ve et le XIIIe siècle.

Le renouvellement historiographique sur la paroisse et le diocèse

  • 1 Imbart De La Tour, 1979 (1900), p. 51. Sur le sens ancien des termes diocesis et parochia, voir : (...)

2Il y a peu de temps encore, la formation des territoires ecclésiastiques n’était pas envisagée comme un sujet digne d’intérêt au motif que leur existence était conçue comme une constante obligatoire et naturelle d’une Église qui, dès ses origines, se serait caractérisée par une forte emprise temporelle. Ainsi, on considérait que la paroisse et le diocèse seraient nés en même temps que le christianisme était devenu religion officielle. Les termes parochia et diocesis n’étaient-ils pas apparus dans le droit canon dès la basse Antiquité ? Et tant pis si de l’aveu même de P. Imbart de la Tour, dont l’ouvrage sur les paroisses a longtemps fait autorité, ces deux mots étaient alors très polysémiques et ne renvoyaient pas encore à leur sens ordinaire1.

  • 2 Voir, par exemple, C. Jullian : « l’Église a adapté aux circonscriptions administratives de l’Empi (...)
  • 3 En Bretagne, malgré l’absence évidente de continuité entre la carte des diocèses et celle des civi (...)
  • 4 Sur le problème que pose l’utilisation des limites communales pour la reconstitution du réseau par (...)
  • 5 Aubrun, 1981, p. 223-230 et id., 1986. Pour les diocèses étudiés : Vallérie, 1986.

3La mise en place d’un tel découpage territorial ne résulterait pas d’une création ex nihilo, mais d’un héritage, selon le postulat que les institutions religieuses se seraient coulées dans des cadres civils préexistants. Les diocèses, regroupés à l’intérieur des anciennes provinces de l’Empire, hériteraient du territoire de la civitas antique. Au dernier échelon, les paroisses se seraient dans un premier temps confondues avec les territoires des vici (agglomérations secondaires antiques) et les fundi (domaines d’exploitation des villae), avant que leur nombre ne se multiplie et donne naissance à un maillage territorial de plus en plus serré2. Dans ce contexte, les études sur le territoire diocésain importaient moins pour la période médiévale que pour les époques antérieures, afin de retrouver les limites des civitates gallo-romaines, voire celtes3. Concernant la paroisse, les études consistaient à reconstituer le réseau primitif et ses divisions successives, essentiellement à partir de critères de superficie et de morphologie des communes, elles-mêmes considérées comme les héritières civiles de la paroisse médiévale4 : plus une commune est grande et dotée de frontières naturelles, plus la paroisse correspondante serait ancienne, alors qu’au contraire, les créations plus récentes y auraient été découpées à l’emporte-pièce5.

  • 6 Zadora-Rio, 2005b, p. 105-120.
  • 7 Voir les nombreux exemples répertoriés par Mazel, 2009a, chapitre 3. Je remercie son auteur de m’a (...)

4Cette approche qui faisait de l’Église la garante de l’héritage territorial antique a été récemment remise en cause. Ce fut la paroisse qui éveilla en premier les soupçons. Le paradigme de la continuité territoriale, qui reposait sur la mention − notamment dans l’œuvre de Grégoire de Tours − des vici et villae comme lieux où furent fondées les premières églises, supposait que dès l’Antiquité un maillage administratif avait existé à l’échelle de la localité. Or, ainsi que le rappelle É. Zadora-Rio, les agglomérations secondaires et les fundi n’avaient jamais formé un découpage continu de l’espace, d’autant plus que les premières ne possédaient pas de territoires associés. Les pagi ruraux antiques ne correspondaient pas non plus à une subdivision régulière de la civitas, leur répartition ne recouvrant pas entièrement l’espace6. À ce titre, le réseau paroissial constitue donc une nouveauté du Moyen Âge. La filiation entre la civitas et le diocèse est plus difficile à récuser puisque les limites des diocèses sont souvent utilisées pour reconstituer le cadre de la cité antique. Pour peu que des données matérielles et écrites subsistent et se substituent à la méthode régressive, les discordances apparaissent toutefois nombreuses et ce, même dans les régions très romanisées, obligeant à reconsidérer un principe qui n’avait jamais été réellement discuté7.

  • 8 Ibid., p. 140.
  • 9 Ibid., p. 140-145.

5L’hypothèse que l’Église avait repris des cadres plus anciens ignorait surtout la question du sens et de l’usage du territoire, comme si celui-ci formait un cadre neutre et immuable, dont les fonctions pouvaient varier au gré des sociétés et de leurs besoins. Ainsi que le souligne F. Mazel, « un territoire n’est défini que pour un ou plusieurs usages. Il ne dure que si l’usage pour lequel il a été créé conserve un sens ou si les évolutions politiques et sociales le réinvestissent d’un sens nouveau8 ». Dans la Rome antique, la civitas existait principalement en raison de son rôle fiscal, qui nécessitait de disposer d’un appareil administratif et technique complexe pour assurer l’organisation et la levée des impôts. Or, l’Église n’avait pas vocation à perpétuer un tel système, lequel, du reste, ne survécut pas à Rome9. Il semble donc illusoire de penser que la période médiévale avait conservé intacts des cadres, dont elle ne faisait plus du tout le même usage.

  • 10 Sur le renouvellement historiographique dont a récemment bénéficié la paroisse, voir les contribut (...)
  • 11 Lauwers et Ripart, 2007, p. 115-171.

6La paroisse apparaît désormais comme un concept tardif qui émerge à l’époque carolingienne, mais dont l’expression concrète n’aboutit pleinement qu’entre les XIe et XIIIe siècles, tandis que les travaux sur le diocèse révèlent le caractère mouvant de la domination épiscopale sur l’espace avant le XIIe siècle, dans une société médiévale où les rapports personnels ont pendant longtemps davantage compté que les principes territoriaux10. M. Lauwers et L. Ripart parlent ainsi d’un processus de déterritorialisation au haut Moyen Âge par rapport à l’Antiquité, où d’une conception de l’espace borné et orthonormé, on serait passé à une logique non-territoriale des formes d’organisation et de domination sociale11. Dès lors, il s’agit de comprendre pourquoi l’Église a transformé son rapport à l’espace et par quels moyens elle s’est finalement imposée comme une institution éminemment territoriale.

L’« espace » et le « territoire » : quelques précisions d’ordre conceptuel et sémantique

  • 12 Cette nouvelle approche de l’espace comme objet historique a suscité un grand enthousiasme en hist (...)
  • 13 Guerreau, 1996, p. 85-101. Sur cette représentation non géométrique de l’espace au Moyen Âge, cons (...)
  • 14 Cursente, 2005, p. 151-167 ; Zadora-Rio, 2005b, p. 115-118 ; id., 2008b, p. 117-118.

7Le renouvellement récent de la recherche sur la paroisse et le diocèse prolonge une réflexion sur l’« espace » qui caractérise plus largement les sciences sociales depuis les années 1990. Ce « tournant spatial » consiste à se dégager de la vision substantialiste, selon laquelle l’espace est une donnée de la nature. En réalité, l’espace est construit et résulte d’un système de représentations et de pratiques sociales. Sa conception est donc culturellement et historiquement située12. Aussi, notre propre perception de l’espace, issue d’une conception galliléo-newtonienne, fondée sur les mathématiques et la géométrie euclidienne, apparaît-elle aujourd’hui totalement étrangère aux sociétés anciennes. Pour A. Guerreau, l’espace à l’époque féodale n’était pas pensé comme continu, homogène (c’est-à-dire que tous ses points sont identiques entre eux) et isotrope (c’est-à-dire que toutes les droites qui passent par un même point sont identiques entre elles), selon la représentation actuelle, mais comme discontinu et hétérogène, en ce sens qu’il était à chaque endroit polarisé, « certains points [comme les églises et les châteaux] étant valorisés, sacralisés, par rapport à d’autres, perçus – à partir des premiers et en relation avec eux − comme négatifs13 ». L’idée même d’un découpage régulier et parfaitement emboîté de l’espace est anachronique et les historiens empruntent aux géographes la notion de cospatialité, qui met en évidence la superposition de réalités spatiales complexes, plus à même que la notion d’interface de restituer la représentation de l’espace au Moyen Âge14.

8Dans ces conditions, comment parler de « territoire », dont la propriété est d’être précisément une étendue homogène et parfaitement circonscrite ? Le concept de « territoire » constitue plus un outil qui, faute de décrire parfaitement le réel, permet d’appréhender le processus qui fit que l’Église − établie à l’origine sur des relations immatérielles, d’homme à homme − s’enracina dans l’espace (entendu dans son sens actuel comme réceptacle, existant indépendamment des objets qui s’y trouvent), c’est-à-dire se territorialisa pour créer des structures d’encadrement fondées sur le principe d’un rapport de dépendance unilatéral et pérenne à un lieu de culte, que celui-ci soit épiscopal ou paroissial. L’expression de « territoires ecclésiastiques » renverra donc aux espaces de domination spécifiques que l’Église, en tant qu’institution, a mis en place au cours du Moyen Âge, sans que ce terme ne suppose une forme déterminée d’organisation de l’espace. En temps voulu, il importera toutefois de préciser ce qu’étaient concrètement la paroisse, le diocèse et ses cadres intermédiaires.

  • 15 Mazel, 2009a, p. 8-12.

9Notre approche s’inscrit pleinement dans la démarche poursuivie par F. Mazel, dont l’étude sur la genèse du diocèse est définie avant tout comme une question « d’histoire politique », celle de l’espace comme enjeu de pouvoir15. Il reste désormais à préciser les contours de cette étude ainsi que les sources mises en œuvre pour la réaliser.

Le cadre géographique et chronologique retenu

10L’espace étudié n’a plus d’existence administrative. Il correspond à trois diocèses de l’Ancien Régime − Rennes, Dol et Alet (devenu celui de Saint-Malo après le transfert de son siège au milieu du XIIe siècle) – dont les territoires recoupent aujourd’hui quatre départements : l’Ille-et-Vilaine, le nord du Morbihan, l’ouest des Côtes d’Armor, et trois communes au nord de la Loire-Atlantique (figure 1).

Figure 1. – Localisation des diocèses étudiés.

  • 16 La liste des paroisses des trois diocèses étudiés est présentée en annexe I. Elle a été établie à (...)

11L’emprise du diocèse de Dol dépassait toutefois le cadre ainsi défini (figure 2). En effet, la majorité des paroisses doloises n’étaient pas regroupées autour de leur évêché : à la veille de la Révolution, le territoire central ne comptabilisait que quarante-trois paroisses, tandis que cinquante et une étaient enclavées à l’intérieur d’autres diocèses, dont ceux de Rennes (trois paroisses) et de Saint-Malo (vingt-quatre paroisses). Les autres se répartissaient entre les diocèses de Saint-Brieuc (douze paroisses), Tréguier (sept paroisses), Saint-Pol-de-Léon (une paroisse) et l’archevêché de Rouen (quatre paroisses). L’étude se concentrera toutefois sur les enclaves doloises situées dans les limites des deux autres diocèses envisagés, lesquels comptabilisaient deux cent dix-huit (Rennes) et cent soixante-deux paroisses (Saint-Malo) en 178916.

Figure 2. – Les enclaves doloises. D’après Guillotel, 1977a, p. 67-68 et Neveux, 1995, p. 16.

12Le choix d’un tel cadre se justifie en raison de sa localisation de part et d’autre de la limite linguistique entre les parlers breton et roman, laquelle constitua également jusqu’à l’époque carolingienne une frontière politique entre la Bretagne et le royaume des Francs. L’évêché de Rennes, dont la première mention remonte au Ve siècle, relevait de la domination franque. Plus à l’ouest, les évêchés de Dol et d’Alet, attestés par les sources écrites seulement à partir du IXe siècle, appartenaient à l’espace breton, où une Église particulière se serait développée suite à l’installation de communautés d’émigrants venues d’outre-Manche, entre la fin de l’Antiquité et le très haut Moyen Âge. Alors qu’au XIXe siècle s’imposait le dogme d’une Église territoriale, héritière des structures civiles antiques, la recherche locale proposa en effet son propre modèle d’organisation ecclésiastique, conçu comme aterritorial et non hiérarchisé. La plebs, ou son équivalent breton plou, constituerait à l’origine une communauté de fidèles et non un territoire, dont le clergé serait totalement indépendant d’une autorité épiscopale, qui ne siègerait pas au chef-lieu de la civitas, mais dans les grands centres monastiques de la péninsule. Contrairement à l’idée que l’on se faisait des sièges épiscopaux gallo-francs, ces abbayes-évêchés seraient dépourvues d’une assise territoriale homogène et circonscrite. Au moment où la recherche réexamine la question de la territorialité initiale de l’Église, il s’agit donc de s’interroger sur la validité du schéma breton et l’apport qu’il peut éventuellement constituer pour aborder de façon plus large les formes d’organisation des communautés ecclésiales au haut Moyen Âge.

13Le choix d’étudier une longue période chronologique, s’étendant du Ve au XIIIe siècle, permet de suivre le processus de territorialisation des structures ecclésiales depuis l’origine, c’est-à-dire depuis l’installation des premiers évêchés et la christianisation des campagnes, jusqu’à l’achèvement institutionnel de la hiérarchie territoriale ecclésiastique. La distribution chronologique des sources tendra toutefois à privilégier la période comprise entre les IXe et XIIIe siècles, la documentation faisant largement défaut pour les premiers siècles du Moyen Âge.

Sources de l’enquête

Les sources écrites

  • 17 Pour les actes originaux antérieurs à 1121 qui ont été consultés, leur référence dans la base de d (...)

14L’étude repose sur le dépouillement exhaustif des sources diplomatiques antérieures au XIVe siècle, relatives à notre espace de recherche. Bien que plusieurs actes du cartulaire de l’abbaye Saint-Sauveur de Redon se rapportent à des acquisitions de biens dans ce qui correspondait anciennement aux diocèses de Vannes et de Nantes, ce manuscrit, qui constitue la documentation principale sur la plebs bretonne, a été considéré intégralement. Au total, ce sont près de deux mille cinq cents actes qui ont été consultés et qui proviennent dans leur grande majorité de fonds monastiques (figure 3)17.

Figure 3. – Distribution chronologique des actes consultés, selon le type d’institutions.

  • 18 Les cinq établissements de chanoines réguliers fondés au cours du XIIe siècle dans l’espace étudié (...)
  • 19 Un tableau récapitulatif des actes consultés, selon l’origine des fonds, est présenté en annexe IV

15La première documentation apparaît au IXe siècle avec le cartulaire de Redon qui recelait près de trois cent-soixante-dix actes carolingiens, en comptabilisant ceux contenus dans ses cahiers perdus (quatre-vingt-sept actes datés du IXe siècle), connus uniquement par une tradition moderne. Après un hiatus des sources au Xe siècle dans le contexte des incursions scandinaves, la documentation augmente progressivement et surtout se diversifie. Dans un premier temps, elle provient essentiellement d’établissements étrangers à la Bretagne et plus particulièrement des abbayes ligériennes de Marmoutier et de Saint-Florent de Saumur. Hormis les abbayes de Redon et de Saint-Georges de Rennes (fondée dans les années 1020-1030), aucun établissement bénédictin local ne fournit en effet d’actes avant le XIIe siècle. Au siècle suivant, les archives cisterciennes constituent les fonds les plus importants. On constate un déficit de sources visant les établissements de chanoines réguliers18, ainsi que pour les évêchés et leur chapitre, particulièrement concernant Rennes et Saint-Malo19.

Figure 4. – Tradition manuscrite des actes consultés.

  • 20 Un tableau détaillé de la tradition des actes consultés est présenté en annexe IV.
  • 21 Le travail de rédaction du cartulaire de Redon fut réalisé sous l’abbatiat d’Aumod vers les années (...)
  • 22 Les cartulaires bretons ont fait l’objet d’une présentation générale dans : id., 1993b, p. 325-341
  • 23 Ces copies appartiennent dans leur majorité au fonds des Blancs-Manteaux, prieuré parisien où fut (...)
  • 24 BIF, 2383 (Cartulaire du prieuré de la Sainte-Trinité de Combourg).
  • 25 BNF, ms. fr. 22325, p. 511-542 (copie du cartulaire de la Vieuville) ; p. 543-613 (copie des titre (...)
  • 26 BNF, ms. fr. 22322, p. 469.
  • 27 Sur les cartulaires comme enjeu de memoria, voir en dernier lieu : Chastang, 2001.
  • 28 Guillotel, 1993b, p. 335.

16En ce qui concerne la tradition des actes (figure 4), les pièces originales restent peu nombreuses avant le XIIIe siècle et proviennent en majorité d’abbayes étrangères : Marmoutier, Saint-Florent de Saumur et Savigny20. Une partie de notre documentation est issue des cartulaires, dont la rédaction fut tardive en Bretagne, seule l’abbaye de Redon, parmi les établissements bénédictins locaux pris en compte, ayant conduit une telle entreprise dès le XIe siècle21. Les cartulaires des abbayes Saint-Melaine de Rennes et Saint-Georges de Rennes ont ainsi été compilés seulement au XIVe siècle22. Pour la plupart des institutions considérées, les fonds médiévaux sont perdus et sont connus par des copies modernes et/ou contemporaines, dont la provenance n’est pas toujours indiquée avec précision23. En outre, ces entreprises de transcriptions n’offrent pas tout le temps la même qualité. Le cartulaire factice de la Trinité de Combourg, compilé à la fin du XVIIIe siècle par l’abbé Bétencourt, semble contenir de bonnes copies des originaux perdus et des titres anciennement conservés dans le cartulaire breton de Marmoutier et celui du prieuré de Combourg24. En revanche, la transcription des originaux et du cartulaire de l’abbaye de la Vieuville, réalisée par les bénédictins mauristes bretons à la fin du XVIIe siècle, s’est faite essentiellement sous forme abrégée25. Par ailleurs, pour plusieurs établissements, il semble que la copie des fonds et des manuscrits subsistant avant la Révolution n’ait pas été menée exhaustivement. C’est le cas du cartulaire de Paimpont (Livre noir), dont seule une dizaine d’actes ont été retranscrits avant sa disparition26. Ces remarques soulignent les processus multiples qui président à la transmission des actes, laquelle ne relève pas seulement de la « taphonomie » des siècles, c’est-à-dire des calamités naturelles et des guerres, mais également d’une sélection, qui implique une part d’oubli aussi bien chez les moines mauristes de l’époque moderne que les copistes de la période médiévale. En effet, les cartulaires ne constituent pas, contrairement à ce que l’on avait longtemps cru, la transcription in extenso des fonds des institutions en question. Il s’agit d’un travail de mémoire et, par voie de conséquence, de reconstruction du passé, qui entraîne un tri, mais aussi des réécritures dans des proportions souvent difficiles à évaluer : la rédaction de ces codices s’est souvent accompagnée de la destruction des originaux, dont la conservation était alors jugée inutile27. Ainsi, le fonds carolingien de l’abbaye de Redon, qui existait encore aux années 1070, a été entièrement supprimé à la fin du XIe ou au XIIe siècle, à partir du moment où la compilation du cartulaire fut reprise et des faux insérés28. La documentation diplomatique dont on dispose ne peut donc être considérée comme un état fiable et objectif d’une réalité passée. Son élaboration, comme sa transmission, relèvent de mécanismes sociaux et mémoriaux complexes, ce qui exige une lecture critique du contenu des actes ainsi que des conditions de leur production et de leur conservation.

  • 29 Le cartulaire du chapitre de Rennes a toutefois disparu et il faut se contenter de quelques copies (...)

17Par ailleurs, les lacunes qui caractérisent un certain nombre d’institutions en Bretagne posent la question de l’existence ancienne d’archives. En effet, comment expliquer que seule l’abbaye de Redon, parmi les établissements bretons du haut Moyen Âge (Saint-Méen, Saint-Jacut-de-la-Mer, Saint-Melaine de Rennes et Saint-Magloire de Léhon), fournisse des actes antérieurs au XIIe siècle ? Pour les trois évêchés étudiés, il semble même envisageable qu’aucun service organisé de conservation des actes n’ait jamais existé au Moyen Âge, l’essentiel de leur fonds correspondant en réalité à ceux de leur chapitre qui, au moins à Rennes et à Dol, se dotèrent d’un cartulaire au cours du XVe siècle29.

  • 30 Goullet, 2006.

18Une dizaine de sources hagiographiques, composées entre les VIIe/VIIIe et XIIe siècles, ont également retenu notre attention. Ces récits ont souvent été exploités sans véritable esprit critique ou, au contraire, rejetés sans appel, car jugés fantaisistes. Les recherches en hagiologie soulignent aujourd’hui l’intérêt de replacer ces productions dans leur contexte le plus précisément possible, afin de déterminer quels enjeux ont guidé leur composition30. Le processus d’écriture ou de réécriture d’une vita s’insère en effet dans un projet délibéré qu’il faut savoir décrypter et qui peut donc apporter de nouveaux éléments sur l’histoire des évêchés bretons, à défaut d’éclairer l’origine de leur fondation. À ce titre, les vitae les plus anciennes des saints évêques Samson de Dol et Malo d’Alet, qui sont traditionnellement invoquées pour appréhender les conditions d’apparition des deux sièges, ont fait l’objet d’un examen particulier. D’autres récits hagiographiques ont été utilisés plus ponctuellement, soit qu’ils mentionnaient un lieu de culte, soit qu’ils informaient sur l’espace de domination d’un évêque. Les précisions sur la chronologie et/ou les débats que ces textes peuvent éventuellement susciter au sein de la communauté scientifique sont présentés au fil des pages, lors de leur exploitation.

  • 31 Ces documents ont tous été édités par Longnon (éd.), 1930.

19Un dernier type de sources a été sollicité, bien qu’il ne remonte pas formellement à la période étudiée : il s’agit de la documentation fiscale interne à chaque diocèse, laquelle fait son apparition à la fin du Moyen Âge. On dispose ainsi pour les trois évêchés étudiés d’un compte de décimes pontificales, rédigé vers 1330, ainsi que d’un pouillé diocésain, dont la composition remonte aux XIVe-XVe siècles31. Ces documents, qui fournissent les premières listes d’églises en les répertoriant généralement par doyenné, offrent enfin la possibilité d’appréhender la réalité territoriale du diocèse et de ses circonscriptions intermédiaires.

20Notre étude ne se fonde pas uniquement sur des données documentaires ; une large place a également été accordée aux sources archéologiques, selon une démarche qui peut paraître plus surprenante, compte tenu des apports récents de la recherche.

L’approche archéologique

  • 32 Zadora-Rio, 2005a, p. 15-23.
  • 33 Id. (dir.), 2008, p. 15.

21É. Zadora-Rio a démontré combien les données issues du terrain venaient contredire plusieurs présupposés fondamentaux du modèle relatif à l’apparition précoce de la paroisse32. D’une part, les chantiers de l’archéologie préventive ont révélé la complexité de l’histoire de l’occupation du sol, laquelle ne peut se résumer à une succession de flux et de reflux du peuplement, ce qui remet directement en cause le principe d’un développement croissant du maillage paroissial au fur et à mesure de la lente reconquête humaine et spatiale censée avoir succédé à la chute de Rome. En effet, la multiplication des lieux de culte ne saurait être significative d’une augmentation de la population et la transition Antiquité-Moyen Âge doit être envisagée, non plus sous l’angle de la rupture, selon l’idée dépassée d’une désertion et reforestation massive, mais en termes de reconfigurations microlocales de l’habitat. D’autre part, la fouille des ensembles funéraires datés du haut Moyen Âge a montré que la proximité d’un lieu de culte n’était pas nécessairement recherchée par les populations, le rassemblement obligatoire des tombes autour de l’église ne constituant pas un effet immédiat de la christianisation. Par voie de conséquence, l’apport que représentaient traditionnellement les données archéologiques dans l’étude de la paroisse se trouve réduit, puisque la découverte de sépultures à proximité d’un lieu de culte du haut Moyen Âge ne permet pas d’identifier un cimetière paroissial. Par ailleurs, l’occupation ancienne d’un centre de paroisse, fondée sur la présence de vestiges antiques ou d’inhumations du haut Moyen Âge, ne peut pas constituer à elle seule un critère fiable pour reconnaître un vieux site ecclésial, la répartition des hommes n’entretenant pas de lien de cause à effet obligé avec celle des églises33.

  • 34 Voir infra, au chapitre II : « Les vestiges d’édifices datés du haut Moyen Âge. »
  • 35 Cet aspect est présenté au chapitre III.
  • 36 Sur l’élaboration de la doctrine du lieu de culte, voir : Iogna-Prat, 2006a ; pour le cimetière : (...)
  • 37 En revanche, il faut indiquer qu’à ce jour aucun site funéraire du Moyen Âge central n’a fait l’ob (...)

22Quelle place l’archéologie peut-elle dès lors occuper dans une étude sur la formation des territoires ecclésiastiques ? Le nombre de lieux de culte du haut Moyen Âge mis au jour par les fouilles archéologiques reste totalement marginal à l’échelle de l’espace étudié34. Par ailleurs, ces fouilles ne permettent que très rarement de préciser la fonction de ces édifices et donc leur rôle auprès des populations. Aucun baptistère n’a jamais été découvert et la présence de sépultures ne fournit pas d’argument en faveur de la vocation cultuelle d’un lieu de culte ; au contraire, les fonctions funéraire et eucharistique semblent être restées pendant longtemps strictement séparées35. En revanche, l’archéologie constitue une source privilégiée pour aborder le processus de matérialisation et de spatialisation du sacré sur terre, c’est-à-dire comment l’Église a progressivement transformé son rapport au monde et a fait d’un Dieu – défini à l’origine comme présent partout, en tout temps et en tout lieu − une entité localisable, dont l’essence se trouverait concentrée dans l’église-bâtiment et ses environs immédiats. En effet, les travaux sur la doctrine du lieu de culte et du cimetière ont montré que ce fut seulement au terme de transformations ecclésiologiques et sociales majeures que l’église-bâtiment fut considérée comme le seul lieu possible pour la célébration du culte et qu’un espace d’inhumation spécialement dévolu aux chrétiens fut créé autour de lui, entraînant une redéfinition profonde des rapports qui unissaient les fidèles à leur église36. Une analyse fondée sur l’évolution des relations topographiques entre les sites funéraires et les lieux de culte du haut Moyen Âge a donc été menée afin de préciser les modalités d’apparition du cimetière. Dans l’espace étudié, le nombre de découvertes de sépultures datées avant le XIe siècle est relativement important, près d’une cinquantaine de sites pouvant être inventoriés37. Les études se sont toutefois davantage focalisées sur les modes d’inhumation et les différences dans les pratiques funéraires entre l’est franc et l’ouest breton, que sur l’environnement social des tombes, lequel reste, il est vrai, souvent difficile à appréhender, en raison de la faiblesse des surfaces fouillées ou du contexte fortuit de la découverte.

23Un intérêt particulier a également été porté aux édifices de culte présentant des vestiges dits « romans » (fin du Xe-XIIe siècle), cette phase de construction relativement importante dans la région (une cinquantaine d’églises répertoriées sans prendre en compte les destructions du XIXe siècle) pouvant témoigner de la nouvelle spécificité conférée à l’église-bâtiment. Cette problématique constitue une approche fondamentalement neuve, la question des enjeux de la construction étant rarement posée par les études portant sur le bâti religieux, lesquelles s’interrogent essentiellement sur la chronologie du site et la manière de construire.

Remarques méthodologiques concernant la cartographie

  • 38 Sur les problèmes relatifs à la cartographie des paroisses, voir les remarques éclairantes de Haut (...)
  • 39 Gorry, 2008, p. 123-183. Contra G. Duby (dans Meynier, et al., 1958, p. 463) pour qui le réseau co (...)
  • 40 Pour évaluer tout le potentiel que représente une telle étude, on se référera aux travaux menés su (...)
  • 41 Il s’agit de la limite séparative entre les toponymes au suffixe en – ac et au suffixe en – é. Les (...)

24L’étude inclut un important travail de représentation cartographique, le passage par l’image étant apparu indispensable à la compréhension fine du processus de construction du maillage ecclésiastique. Les limites paroissiales n’y sont jamais représentées, à l’exception de quelques cas particuliers, lorsqu’un texte permet de les restituer. Sur plusieurs cartes, il a toutefois semblé nécessaire de faire figurer les limites communales actuelles, afin de fournir un cadre propice à la réflexion38. On rappellera en effet, en suivant la démonstration de J.-M. Gorry sur la formation des communes de Touraine, que le maillage communal ne doit pas être confondu avec celui de la paroisse39. Ce sont les collectes, c’est-à-dire les communautés d’habitants sur lesquelles pesait l’impôt, qui ont donné naissance aux communes et non les paroisses, ce qui explique qu’un certain nombre de succursales sont devenues communes à la Révolution, alors qu’au contraire, les villes, souvent divisées en plusieurs paroisses, n’ont donné naissance qu’à une seule et même commune. La filiation n’est pas non plus directe entre le réseau communal actuel et celui de la fin du XVIIIe siècle : des disparitions, des créations, mais aussi des échanges et des transferts de territoires, notamment pour supprimer des enclaves, ont modifié de manière importante la carte communale depuis la Révolution. Cela implique également que les limites des diocèses reportées sur les cartes proposées au sein de ce travail restent en partie théoriques, leur tracé ayant été déduit des limites communales lorsqu’il ne correspondait pas à une rivière. Par ailleurs, l’impossibilité de disposer directement d’une carte fiable pour étudier la forme des territoires paroissiaux (il aurait fallu reconstituer le réseau communal tel qu’il existait en 1790, ce qui représentait une recherche trop importante pour être menée dans le cadre de cette étude) explique qu’aucune analyse de ce type n’a été réalisée40. Enfin, il faut préciser que les différentes limites du parler breton (dont la « Ligne Loth41 » pour l’époque carolingienne) figurées sur nos cartes sont fournies à titre indicatif : une zone de bilinguisme existait de part et d’autre de cette représentation linéaire, laquelle rend donc mal compte de la complexité du phénomène.

Objectifs et plan

  • 42 Au XIXe siècle, des mesures hygiénistes ont souvent conduit à déplacer le cimetière en périphérie (...)

25Les apports récents de la recherche sur la formation des territoires ecclésiastiques ont largement orienté notre analyse, laquelle tente d’appréhender les modalités de mise en place du maillage ecclésiastique dans sa globalité et de faire ainsi la jonction entre l’échelon paroissial et l’échelon épiscopal. Il s’agissait également de ne pas négliger l’aspect matériel de cette construction ecclésiale de l’espace, en s’inscrivant dans une démarche pluridisciplinaire, qui combine à l’approche plus traditionnelle par les sources écrites, l’enseignement des « archives du sol ». L’emprise de plus en plus forte exercée par l’Église sur la société au cours du Moyen Âge est en effet un phénomène très visible, à la fois par la pérennité des édifices de culte construits à l’âge roman et par la nouvelle topographie que l’institution ecclésiale avait fondé, en imposant la réunion des sépultures autour de l’église, selon une situation qui a pu perdurer jusqu’à nos jours en certains villages42.

26Pour atteindre ces objectifs, notre étude s’articule autour de trois parties thématiques, lesquelles sous-tendent toutefois un tournant à l’horizon du XIe siècle. La première se conçoit avant tout comme une mise au point sur le fonctionnement des structures ecclésiales au haut Moyen Âge. Elle pose la question d’une originalité ecclésiastique bretonne et d’un développement différencié de part et d’autre de la Vilaine, avant de conclure sur l’impossibilité de parler du « diocèse » et de la « paroisse » avant les XIe-XIIe siècles. Dans la partie suivante, il s’agit de voir comment, dans le contexte de la réforme dite « grégorienne », l’église-bâtiment et tout ce qui entrait en contact avec lui furent définis comme des lieux particuliers, où s’incarnait le ciel, selon un processus déterminant pour créer une sphère ecclésiastique autonome, relevant directement de Dieu. Cette institutionnalisation de l’Église constituait une condition nécessaire pour qu’apparaissent des territoires strictement ecclésiastiques, dont la formation est analysée dans une dernière partie.

27En annexes, sont présentées une liste des paroisses, suivie par celles des évêques et des archidiacres, pour chaque diocèse étudié. On y trouvera également un inventaire des églises conservant des vestiges romans, une présentation générale des sources diplomatiques sollicitées et, enfin, l’édition des actes relatifs aux délimitations de Gahard et de Livré-sur-Changeon, lesquelles font l’objet d’une analyse détaillée au chapitre VI.

Notes

1 Imbart De La Tour, 1979 (1900), p. 51. Sur le sens ancien des termes diocesis et parochia, voir : Delaplace, 2002, p. 11-40 ; Lauwers, 2005b, p. 11-32 ; id., 2008 ; p. 23-65, Mazel, 2009a, p. 74-79.

2 Voir, par exemple, C. Jullian : « l’Église a adapté aux circonscriptions administratives de l’Empire aussi bien ses paroisses rurales que ses diocèses et ses provinces » (cité par Iogna-Prat et Zadora-Rio, 2005, p. 6). Sur le démembrement croissant du diocèse, identifié comme la parochia primitive, voir : Chaume, 1937-1938, p. 61-73, 1-9 et plus récemment, Aubrun, 1981, deuxième partie et id., 1986.

3 En Bretagne, malgré l’absence évidente de continuité entre la carte des diocèses et celle des civitates, les entreprises de reconstitution des cadres antiques à partir de la méthode régressive ont été nombreuses. Voir notamment : Couffon, 1942, p. 1-24 et Merlet, 1951a, p. 5-61 et 137-172.

4 Sur le problème que pose l’utilisation des limites communales pour la reconstitution du réseau paroissial sous l’Ancien Régime, voir infra : « Remarques méthodologiques concernant la cartographie. »

5 Aubrun, 1981, p. 223-230 et id., 1986. Pour les diocèses étudiés : Vallérie, 1986.

6 Zadora-Rio, 2005b, p. 105-120.

7 Voir les nombreux exemples répertoriés par Mazel, 2009a, chapitre 3. Je remercie son auteur de m’avoir permis de consulter ce travail, à ce jour inédit.

8 Ibid., p. 140.

9 Ibid., p. 140-145.

10 Sur le renouvellement historiographique dont a récemment bénéficié la paroisse, voir les contributions rassemblées dans Iogna-Prat et Zadora-Rio (dir.), 2005 et dans Zadora-Rio (dir.), 2008 ; pour le diocèse, voir les contributions rassemblées dans Mazel (dir.), 2008, ainsi que Mazel, 2009a.

11 Lauwers et Ripart, 2007, p. 115-171.

12 Cette nouvelle approche de l’espace comme objet historique a suscité un grand enthousiasme en histoire médiévale comme le prouve la multiplication des publications à ce sujet depuis quelques années. Parmi une bibliographie abondante, voir notamment : Bourin et Zadora-Rio, 2002, p. 493-510 ; Cursente et Mousnier (dir.), 2005 ; Lienhart (dir.), 2007 ; Cohen et Madeline (dir.) [à paraître].

13 Guerreau, 1996, p. 85-101. Sur cette représentation non géométrique de l’espace au Moyen Âge, constitué de lieux plutôt que de territoires, voir également : Devroey et Lauwers, 2007, p. 435-453 et Méhu, 2007, p. 275-293.

14 Cursente, 2005, p. 151-167 ; Zadora-Rio, 2005b, p. 115-118 ; id., 2008b, p. 117-118.

15 Mazel, 2009a, p. 8-12.

16 La liste des paroisses des trois diocèses étudiés est présentée en annexe I. Elle a été établie à partir des ouvrages de Guillotin De Corson, 1880-1886, t. 4-6 (Ille-et-Vilaine), Tanguy, 1992 (Côtes-d’Armor) et Le Mené, 1891 (Morbihan). Pour les enclaves doloises, nous avons utilisé : Merlet, 1951b, p. 133 et Guillotel, 1977a, p. 67-68. Le réseau paroissial tel qu’il existait en 1789 sert de référence tout au long de cette étude. Ce choix s’explique en raison des incertitudes qui pèsent sur l’état du maillage paroissial au Moyen Âge. En effet, les pouillés diocésains de la période, bien que supposés récapituler l’ensemble des bénéfices, présentent quelques lacunes, impossibles à chiffrer exactement.

17 Pour les actes originaux antérieurs à 1121 qui ont été consultés, leur référence dans la base de données Artem (disponible en ligne à l’adresse http://www.cn-telma.fr/originaux/recherche/) a systématiquement été indiquée en note de bas de page.

18 Les cinq établissements de chanoines réguliers fondés au cours du XIIe siècle dans l’espace étudié (Beaulieu, Notre-Dame de Paimpont, Rillé, Saint-Jacques de Montfort et Saint-Jean-des-Prés) ne totalisent ainsi qu’une soixantaine d’actes antérieurs au XIVe siècle. L’abbaye Saint-Jean-des-Prés, située au sud du diocèse de Saint-Malo, est même entièrement dépourvue de documentation pour la période médiévale.

19 Un tableau récapitulatif des actes consultés, selon l’origine des fonds, est présenté en annexe IV.

20 Un tableau détaillé de la tradition des actes consultés est présenté en annexe IV.

21 Le travail de rédaction du cartulaire de Redon fut réalisé sous l’abbatiat d’Aumod vers les années 1070, avant que de nouvelles transcriptions ne soient entreprises à partir de la fin du XIe siècle jusqu’au milieu du XIIe siècle. Sur la structure de ce manuscrit, voir : Guillotel, 1998a, p. 9-26.

22 Les cartulaires bretons ont fait l’objet d’une présentation générale dans : id., 1993b, p. 325-341.

23 Ces copies appartiennent dans leur majorité au fonds des Blancs-Manteaux, prieuré parisien où fut rassemblée au XVIIIe siècle toute la masse documentaire nécessaire à la rédaction d’une nouvelle histoire de Bretagne, dont Dom Morice avait la charge. Ces archives furent transférées ensuite à la Bibliothèque nationale de France, où elles ont été intégrées au fonds français (fr.). Nous avons notamment consulté les manuscrits 22322, 22325 et 22329. Ces copies ont pu servir à la confection de cartulaires factices, tel que celui de l’abbaye Saint-Sulpice-la-Forêt par P. Anger au début du XXe siècle. Pour une présentation plus détaillée du travail de copie réalisé par les mauristes bretons, voir : Henry, 2010, t. 1, p. 18-19.

24 BIF, 2383 (Cartulaire du prieuré de la Sainte-Trinité de Combourg).

25 BNF, ms. fr. 22325, p. 511-542 (copie du cartulaire de la Vieuville) ; p. 543-613 (copie des titres).

26 BNF, ms. fr. 22322, p. 469.

27 Sur les cartulaires comme enjeu de memoria, voir en dernier lieu : Chastang, 2001.

28 Guillotel, 1993b, p. 335.

29 Le cartulaire du chapitre de Rennes a toutefois disparu et il faut se contenter de quelques copies modernes incomplètes : BNF, ms. fr. 22325, p. 11-19. Quant au cartulaire du chapitre de Dol, appelé le Liber Alanus, il manque les deux cents premiers folios : AD Ille-et-Vilaine, 1 G380 G. En raison du mauvais état de ce manuscrit, il ne nous a pas été permis de le consulter et nous avons dû utiliser des copies modernes : BNF, ms. fr. 22329, p. 67-109. Sur le problème des archives bretonnes, voir les remarques de Henry, 2010, t. 1, p. 134-135.

30 Goullet, 2006.

31 Ces documents ont tous été édités par Longnon (éd.), 1930.

32 Zadora-Rio, 2005a, p. 15-23.

33 Id. (dir.), 2008, p. 15.

34 Voir infra, au chapitre II : « Les vestiges d’édifices datés du haut Moyen Âge. »

35 Cet aspect est présenté au chapitre III.

36 Sur l’élaboration de la doctrine du lieu de culte, voir : Iogna-Prat, 2006a ; pour le cimetière : Treffort, 1996b ; Lauwers, 2005a.

37 En revanche, il faut indiquer qu’à ce jour aucun site funéraire du Moyen Âge central n’a fait l’objet d’investigations archéologiques, même si dans plusieurs cas, l’hypothèse d’une continuité des inhumations sur les sites du haut Moyen Âge jusqu’aux XIe-XIIe siècles reste envisageable.

38 Sur les problèmes relatifs à la cartographie des paroisses, voir les remarques éclairantes de Hautefeuille, 2005, p. 24-32.

39 Gorry, 2008, p. 123-183. Contra G. Duby (dans Meynier, et al., 1958, p. 463) pour qui le réseau communal est l’héritier direct du réseau paroissial et qu’à ce titre, sa forme n’a que très peu évolué depuis le milieu du Moyen Âge. Ce paradigme est repris par les auteurs des enquêtes visant à reconstituer les paroisses « primitives » à partir de la morpho-superficie des communes.

40 Pour évaluer tout le potentiel que représente une telle étude, on se référera aux travaux menés sur les paroisses et communes de Touraine, sous la direction de Zadora-Rio (dir.), 2008. La reconstitution du réseau communal de ce département en 1790 par J.-M. Gorry a permis à une équipe de chercheurs de tester, à l’aide d’un Système d’information géographique (SIG), plusieurs modèles explicatifs pour comprendre les critères déterminants dans la forme et la superficie des paroisses : Blin, et al., 2008, p. 187-263.

41 Il s’agit de la limite séparative entre les toponymes au suffixe en – ac et au suffixe en – é. Les premiers auraient vu leur évolution pleinement romane en – é, stoppée par l’implantation des insulaires bretons : Loth, 1907, p. 374-403.

42 Au XIXe siècle, des mesures hygiénistes ont souvent conduit à déplacer le cimetière en périphérie de l’espace bâti, rompant ainsi l’unité construite par l’Église médiévale avec le lieu de culte. Sur la relation entre monumentalisation de l’église, mise en place du cimetière et naissance de la paroisse, voir les jalons posés par Iogna-Prat, 2007, p. 347-363, et Lauwers, 2010, p. 201-224.

Table des illustrations

Légende Figure 1. – Localisation des diocèses étudiés.
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Légende Figure 2. – Les enclaves doloises. D’après Guillotel, 1977a, p. 67-68 et Neveux, 1995, p. 16.
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Légende Figure 3. – Distribution chronologique des actes consultés, selon le type d’institutions.
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Légende Figure 4. – Tradition manuscrite des actes consultés.
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