Version classiqueVersion mobile

L'entreprise en restructuration

 | 
Claude Didry
, 
Annette Jobert

Première partie. Regard historique sur les restructurations en France

La genèse des restructurations en France, le tournant des années soixante

Rémi Brouté

Texte intégral

  • 1 Cohen D., Trois leçons sur la société post-industrielle, Paris, Le Seuil et La Républiq (...)
  • 2 Lyon-Caen A., « Le comité d’entreprise et les restructurations », Droit social, 2004, n (...)

1Simples ajustements fonctionnels aux yeux des économistes industriels, les restructurations sont rarement envisagées comme une catégorie socialement et politiquement construite. Dans la perspective couramment admise des théories de la régulation, la restructuration est rattachée au « phénomène permanent de mutations » né de la crise pétrolière de 1973 et de la remise en cause des systèmes de production fordistes ou tayloristes. Daniel Cohen, dans sa description de la société post-industrielle, insiste à son tour sur la « grande transformation » du milieu des années soixante-dix1 en retenant cinq ruptures majeures : la révolution technologique, l’organisation du travail bouleversée, la culture individualiste, la financiarisation et la mondialisation marquée par l’émergence de la Chine et de l’Inde. Cependant, cette juxtaposition des cycles économiques et des séquences historiques ignore la réforme politique du capitalisme français opérée en amont, dans les années soixante. Dès le préambule de l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969 sur l’emploi, la langue du droit délivre une définition de la restructuration, le texte indiquant que le mot « vise également les opérations de modernisation d’une certaine ampleur et entraînant des conséquences sur l’emploi2 ». Car les Trente Glorieuses, malgré des taux de croissance de l’activité élevés et réguliers, sont déjà le théâtre de nombreux licenciements que les employeurs prennent alors à peine le temps de justifier.

La République gaullienne opte pour un régime de compétitivité

  • 3 De Gaulle C., Mémoires d’espoir, Le renouveau 1958-1962, L’effort 1962…, Paris, Plon, coll. (...)
  • 4 Discours de Charles de Gaulle à l’occasion de sa prise de fonction le 28 décembre (...)
  • 5 De Gaulle C., op. cit., p. 165.
  • 6 Aron R., Dix-huit leçons sur la société industrielle, Paris, Gallimard, coll. Folio (...)
  • 7 Touchelay B., « Le patronat français et le partage du pouvoir dans l’entreprise ent (...)
  • 8 Voir Denord F., Néolibéralisme version française, histoire d’une idéologie politique, Paris (...)
  • 9 Entreprise, n° 97, 1er août 1957.
  • 10 Jeanneney J.-M., Forces et faiblesses de l’économie française, Paris, Armand Colin, (...)
  • 11 Entreprise, op. cit.

2Si la genèse de la catégorie de restructuration renvoie bien à une étape de modernisation déclarée, c’est d’abord à celle de la modernisation gaullienne. C’est-à-dire à cette volonté politique d’inscrire l’économie française dans le marché commun, au moment de l’entrée en vigueur du Traité de Rome et au crépuscule de l’empire colonial, par une série de réformes visant à fabriquer « à meilleur compte et à meilleure qualité », selon la formule du général de Gaulle3. À son retour au pouvoir en 1958, le promoteur des nationalisations et de la planification étatique de la Libération entend désormais préparer le pays et ses entreprises aux conditions du libre jeu de la concurrence créées par le désarmement douanier. Il se fixe comme objectif prioritaire d’« établir la nation sur une base de vérité et de sévérité4 ». Une perspective qui implique, estime-t-il, « des équipements modernisés, une organisation qui réduise les frais généraux, un affrontement de la concurrence5 ». Le choix du dirigeant politique ne relève pas de l’intuition solitaire. D’autres forces sociales, plus ou moins inspirées par l’exemple américain, militent en faveur d’un nouveau régime économique fondé sur une « atmosphère permanente de compétition », trait distinctif de la future société industrielle dépeinte par Raymond Aron dans ses leçons6. Le grand patronat, mis au piquet à la Libération pour son implication dans la collaboration, retrouve de la voix. Le Conseil national du patronat français (CNPF) considère avoir conquis « une autorité morale indéniable » et réclame une réforme des institutions politiques pour préserver les structures de l’entreprise à l’heure de l’harmonisation européenne7. Dans les milieux intellectuels et les élites technocratiques, un courant néolibéral8, dont Raymond Aron est l’une des figures de proue, soutient que le marché commun doit être utilisé comme « un aiguillon extérieur pour remettre de l’ordre dans l’économie française » et qu’il faut « prendre le risque des pressions extérieures pour le faire9 ». Dans le même registre, Jean-Marcel Jeanneney, qui occupera le poste de ministre de l’Industrie de 1959 à 1962 dans le gouvernement Debré, déplore que « l’économie française, engourdie par le protectionnisme, manque de cette aptitude à des conversions rapides dont l’économie américaine a fait preuve depuis dix ans10 ». Face à ce volontarisme libéral, Pierre Mendès-France, bien que partisan lui aussi de la construction européenne, s’inquiète des conséquences sociales, car, prévient-il, « on veut mettre la France, dans un délai assez bref, en contact avec la concurrence de ses voisins sans créer en même temps des conditions qui permettraient d’affronter la concurrence sans danger11 ».

  • 12 Sur l’importance du changement constitutionnel de 1958, voir la thèse de Delphine Dulong co (...)
  • 13 Berstein S., La France de l’expansion, I. La république gaullienne 1958-1969, Paris (...)

3Le pouvoir exécutif dirigiste du début de la cinquième République va offrir une assise suffisamment forte pour permettre l’émergence de cet ordonnancement, toujours d’actualité, qui fait de l’entreprise et de l’impératif de compétitivité des cadres d’action que la société se doit de mobiliser pour assurer sa prospérité12. Serge Berstein a justement démontré comment, à partir de 1959, « l’agent essentiel du dynamisme espéré est l’entreprise dont on attend un esprit de conquête et la réalisation des profits qui sont sa raison d’être et lui fourniront les moyens de l’innovation et d’une nouvelle agressivité commerciale13 ».

Le rapport Rueff-Armand pose les jalons d’un monde de changements structurels

  • 14 De Gaulle C., op. cit., p. 154.
  • 15 Voir Margairaz M., L’État, les Finances et l’économie en France (1932-1952). Histoire d’une (...)
  • 16 Chélini M.-P., « Le plan de stabilisation Pinay-Rueff, 1958 », Revue d’histoire moderne et (...)
  • 17 Le Comité comprend 16 membres, dont deux vice-présidents en charge d’animer les tra (...)

4Pour le conseiller dans son « œuvre nationale » de renouveau économique, Charles de Gaulle s’en remet à Jacques Rueff, homme de la situation « par l’envergure de son esprit et la nature de sa formation ». Le général ne tarit pas d’éloges à l’égard de l’auteur de L’ordre social : « À ce théoricien consommé, à ce praticien éprouvé, rien n’échappe de ce qui concerne les finances, l’économie, la monnaie. Doctrinaire de leurs rapports, poète de leurs vicissitudes, il les veut libres. Mais, sachant de quelles emprises abusives elles se trouvent constamment menacées, il entend qu’elles soient protégées14. » Polytechnicien, inspecteur des Finances, sous gouverneur de la Banque de France avant-guerre, époque à laquelle il se singularisa par sa contestation des thèses de Keynes, directeur du Trésor dans les derniers mois du Front populaire, Rueff est connu pour avoir inspiré la politique de restrictions budgétaires engagée à partir de 1938 par Paul Reynaud15. De Gaulle, dès la fin de 1958, le charge d’élaborer, à la tête d’un collège d’experts, un premier rapport sur l’assainissement des finances. Sa contribution, dont les principales préconisations seront appliquées par décret, restera célèbre sous l’appellation de plan Pinay-Rueff. En sollicitant l’expertise de l’artisan du colloque Walter Lippmann, du membre de la section française de la Société du Mont Pèlerin, le gouvernement gaulliste marque sa préférence pour l’option libérale qui s’affirme. Michel-Pierre Chélini rappelle en effet que « deux optiques partagent alors le monde des spécialistes et des politiques : un courant s’oppose à toute dévaluation et à la réduction de la dépense collective, proposant de faire jouer la fiscalité, l’encadrement du crédit, la planification, le contrôle des prix : c’est le cas d’Albin Chalandon à l’UNR, de Guy Mollet à la SFIO. Un second courant, plus libéral, souhaite ouvrir les frontières pour renforcer les tendances concurrentielles et agir sur la demande intérieure par la fiscalité et le crédit. Jacques Rueff […] émerge du second courant16 ». Mais la commande gouvernementale ne se limite bientôt plus à la recherche de solutions conjoncturelles. Par décret du 13 novembre 1959, le Premier ministre, Michel Debré, désigne à nouveau Jacques Rueff pour co-présider avec Louis Armand, autre polytechnicien influent, directeur général de la SNCF, un comité chargé de « proposer des réformes de nature à mettre fin aux situations de fait ou de droit qui constituent, d’une manière injustifiée, un obstacle à l’expansion économique ». Cette fois, échoit au comité Rueff-Armand la tâche de redéfinir les conditions de l’action économique et de fixer le cap de la modernisation gaullienne17.

  • 18 Rueff J., Les fondements philosophiques des systèmes économiques, Paris, Payot, 1967.

5Avec ce second rapport, Jacques Rueff peut donner corps à une vision plus pragmatique du marché que celle qu’il a pu défendre en 1939 lors de la création du Centre international pour la rénovation du libéralisme, l’un des embryons de la Société du Mont Pèlerin, parrainée par des théoriciens du marché à l’état de nature que sont von Hayek ou von Mises. Ses fonctions de juge et de président de chambre à la Cour de justice de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, puis à la Cour de justice des Communautés européennes, postes qu’il occupe de 1952 à 1962, le conduisent à reconnaître que le mécanisme des prix et la « liberté spontanée des échanges » n’existent pas sans institutions politiques et juridiques. L’État, à ses yeux, a le devoir d’imposer la concurrence, en orientant les structures de production et de consommation par le biais de l’impôt et des subventions vers « la recherche du rendement maximum », mais aussi en créant des dispositifs « d’intervention d’intérêt social » capables de faire accepter et de panser les « blessures » que le marché est susceptible d’infliger18.

  • 19 Rapport sur les obstacles à l’expansion économique (Rueff-Armand), présenté par le comité i (...)
  • 20 Murcier J.-P., « Pour un code du travail moderne », Droit Social, 1955, n° 4, p. 2 (...)

6Dans le rapport rendu en juillet 1960, les auteurs se livrent à une révision des fondements de l’expansion économique19. L’amélioration du sort de la classe ouvrière et la redistribution des profits à toutes les parties de la nation constituaient les ambitions prioritaires légitimant, au cours de la décennie précédente, le consensus sur les nécessaires efforts de productivité20. Ces deux buts s’effacent désormais devant les exigences du Marché commun, au nom desquelles il est impératif de « mettre nos entreprises à même de faire face à la concurrence européenne ; faciliter les adaptations structurelles et les spécialisations ; assurer un taux de croissance » (p. 15). Pour le comité Rueff-Armand, la quête de la compétitivité impose « en permanence des changements structurels affectant la nature, l’allocation et l’emploi des ressources, la répartition des activités, l’implantation et l’organisation des entreprises, la localisation des populations » (p. 17). Au nom de la vérité des prix, les pouvoirs publics doivent en finir avec le « maintien artificiel des entreprises marginales, le soutien des activités désuètes, les subventions à l’improductivité » qui, « s’ils fournissent de l’emploi, n’apportent qu’un produit net inférieur à celui qu’auraient procuré des activités de substitution » (p. 30). Toutefois, ces « changements structurels », que les rédacteurs du rapport ne désignent pas encore sous le terme contracté de restructurations, ne peuvent intervenir naturellement. Il appartient aux agents responsables, et à l’État au premier chef, de prévoir ces « indispensables adaptations », d’informer les agents économiques, de faciliter les reconversions, de les rendre socialement acceptables par la création de dispositifs adéquats.

Diffusion et mise en musique de la partition Rueff-Armand

  • 21 Le rapport proposait de « réduire les rigidités qui affectent » l’exercice de certaines pro (...)
  • 22 Fabra P., « Le comité Rueff-Armand : un remord récurrent », Les Échos, 18 janvier (...)
  • 23 « Pour répondre à l’accélération, il faut partout favoriser la mobilité, le déclois (...)
  • 24 Drancourt M., Mémoire de l’entreprise, Paris, Robert Laffont, 1993, p. 45.
  • 25 Gelinier O., Morale de l’entreprise et destin de la nation, Paris, Plon, 1965.
  • 26 Ibid., p. 29.
  • 27 Ibid., p. 27.
  • 28 Gelinier O., Le secret des structures compétitives, Paris, Hommes et techniques, 1 (...)
  • 29 Luc Boltanski relate cette ascension : « La CEGOS qui compte environ 40 collaborateurs dans (...)

7Le rapport relève tout à la fois du programme d’actions pragmatiques et du carnet de route à prétention visionnaire. Toutes les réformes catégorielles ou sectorielles préconisées par le comité Rueff-Armand n’ont certes pas vu le jour21. À tel point qu’en janvier 2008, le journal Les Échos soulignait combien « leur non-réalisation, pour l’essentiel, est à la source d’une sorte de remord durable. En témoigne la nomination par Nicolas Sarkozy de la commission Attali qui doit […] remettre son rapport pour une ‘‘libération de la croissance’’22 ». Il n’en demeure pas moins que, tout au long des années soixante, plusieurs personnalités et relais institutionnels vont s’inspirer du canevas fourni par les seize « sages » pour tenter de donner corps à ce système de désordres nécessaires. Les membres du comité mettent eux-mêmes la main à la pâte. Tandis que Jacques Rueff expérimente sa conception du libre marché institutionnalisé au sein de la Cour de justice des Communautés européennes, Louis Armand, de son côté, étend le rayonnement du rapport par la publication, en 1961, d’un ouvrage à destination du grand public intitulé Plaidoyer pour l’avenir. Ce livre, qui prône l’entrée du capitalisme dans l’« âge des structures en mouvement23 », a été rédigé en association avec Michel Drancourt, rédacteur en chef d’Entreprise. Ce premier magazine du monde des affaires doté d’une large audience poursuit une ligne éditoriale militante, puisqu’il s’agit de donner « la priorité aux entreprises sur les administrations, au marché sur les règlements, à l’optimisme sur le pessimisme24 ». Michel Drancourt, qui pilotera plus tard l’Institut de l’entreprise, s’applique à populariser ce qu’il appelle l’ordre entrepreneurial. Sa voix porte jusque dans les chaumières par l’intermédiaire des premières chroniques économiques télévisées qu’il inaugure entre 1962 et 1969. Par ailleurs, Michel Drancourt collabore régulièrement avec son ami Octave Gélinier, un ingénieur des Mines qui préside alors à la croissance de la Cegos, devenue aujourd’hui le plus important cabinet conseil en management. Dans Morale de l’entreprise et destin de la nation, Octave Gélinier développe une conception du rôle de l’entreprise qui ne se limite pas à la création de richesses mais envisage le « profit concurrentiel » comme le but de toute « bonne gestion25 ». Il édicte douze règles du jeu concurrentiel que l’État, si nécessaire, doit imposer et faire respecter. La généralisation de la concurrence, déclinée dans toutes les sphères économiques et sociales, y compris en matière de qualifications et de rémunérations, doit se manifester à travers « une contestation permanente et omniprésente de tous les niveaux de l’activité de l’entreprise26 ». Gélinier, conscient que ce régime de compétitivité est « douloureux », que « la concurrence frappe fort et fait saigner », invite pourtant le pouvoir politique à ne pas « ralentir le progrès ». Le dirigeant de la Cegos, à l’instar du comité Rueff-Armand, insiste sur la fonction d’accompagnement des mutations qui incombe désormais à l’État, ce dernier devant « plutôt laisser les changements se dérouler à vive allure, mais simultanément aider massivement ceux qui se trouvent transitoirement atteints : travailleurs d’industries périmées que l’on reloge, rééduque et reclasse dans les conditions les plus larges, plutôt que de leur accorder un sursis dans une activité non viable27 ». La parution de cet essai doctrinal sera suivie, deux ans plus tard, par celle d’un manuel à destination des chefs d’entreprise, Le secret des structures compétitives, qui connaîtra une dizaine de rééditions28. L’ouvrage explique comment intégrer les contraintes de l’environnement en éliminant les poids morts et en bouleversant le fonctionnement de la firme, sans craindre la pression concurrentielle évaluée sous la foi d’indicateurs financiers ou non financiers. Avec la Cegos, Gélinier marque de son empreinte la période où la restructuration du champ des entreprises, la production, la formation et la rééducation des cadres contribuent à faire de l’« organisation » une industrie florissante29.

  • 30 Sellier F., La confrontation sociale en France 1936 1981, Paris, PUF, 1984, p. 63.
  • 31 Braun A., Le CRC du Centre de Recherches et d’Études des Chefs d’entreprise à l’Institut de (...)
  • 32 Dulong D., op. cit., p. 29.
  • 33 Cité par Caron F., Histoire économique de la France xixe-xxe siècle, Paris, Armand (...)

8Autre membre du comité Rueff-Armand, Marcel Demonque, président des ciments Lafarge et éminence grise du CNPF, participe à la fondation du Centre de recherches et d’études des chefs d’entreprise (CRC), de sa section d’études installée à Paris et de sa branche formation implantée à Jouy-en-Josas. À l’époque, le grand patronat cherche à se constituer en « acteur capable de proposer une doctrine et d’affirmer des valeurs30 ». C’est à partir de ces embryons de l’Institut de l’entreprise, en prenant pied sur le nouveau campus de l’école des Hautes Études Commerciales (HEC) inauguré en 1964, que le CNPF anime un mouvement de restauration intellectuel. L’objectif est d’ériger l’entreprise en « facteur de transformation de la civilisation », ainsi que l’expose Paul Huvelin, futur numéro un du CNPF, dans une série d’articles publiés par les Cahiers du CRC entre 1956 et 196931. Marcel Demonque, comme nombre de ses collègues du comité Rueff-Armand, dispose d’un réseau relationnel étendu pour distiller ses vues. Trésorier du Centre international de prospective, où se côtoient au conseil d’administration Louis Armand, le président du CNPF Georges Villiers et le directeur général de la Caisse des dépôts et consignation François Bloch-Lainé, le PDG de Lafarge siège également au Commissariat général du Plan, à partir de 1963, au sein de la commission dite « 1985 », dont la mission est de « dégager l’horizon général à vingt ans32 ». Ce groupe de réflexion, où se retrouvent le président d’Elf-Aquitaine Pierre Guillaumat, mais aussi l’économiste Jean Fourastié et le théoricien libéral Bertrand de Jouvenel, a été installé par Pierre Massé, un autre artisan du rapport Rueff-Armand. Massé sera le chef d’orchestre du Ve plan (1965-1970) qui concrétise la politique des champions nationaux, une stratégie visant, selon les conclusions des rapporteurs, à « fortifier la puissance de la compétitivité de l’industrie française en hâtant la création et le développement de groupes à capitaux français de taille internationale constitués par la concentration technique, commerciale et financière des entreprises33 ».

Mise sous tension de l’emploi, conflictualité et dispositifs de délibération

  • 34 Caron F., op. cit., p. 255.
  • 35 Bellon B., « Origines et conditions des restructurations en France », Les restructurations (...)
  • 36 Ibid.
  • 37 Sellier F., op. cit., p. 60.
  • 38 Houssiaux J. et Amoy C., « L’évolution de la concentration dans les industries fran (...)
  • 39 Alexandre R., La Croix du 16 février 1966.

9Le projet de modernisation gaullienne ne relève pas de la seule construction idéologique. Il entre progressivement dans les faits. Des réformes sont conduites. Lois et règlements se succèdent : en 1960 pour interdire le refus de vente et favoriser ainsi l’essor de la grande distribution, en 1966 pour renforcer l’assise des sociétés commerciales, en 1967 pour encadrer les grosses opérations d’achats d’entreprise par la création de la Commission des opérations de bourse (COB) et par l’instauration de dispositions sur l’information des actionnaires et la publicité des OPA et OPE. L’agriculture n’échappe pas à ces programmes de « modernisation », la loi d’orientation du 5 août 1960 se fixant comme objectif de rationaliser les exploitations familiales et de les rendre ainsi performantes à l’échelle européenne. Les finalités du Plan, dont l’exécution doit avoir, d’après les vœux de Gaulle, « un caractère d’ardente obligation », sont réorientées en faveur des secteurs compétitifs sur la scène internationale, tandis que la part des investissements publics dans l’économie reflue au bénéfice de l’initiative privée. Les mécanismes de financement des entreprises, où l’État occupait une place prépondérante par l’intermédiaire du Trésor, sont réformés afin d’accorder une plus grande latitude aux banques et de faciliter le recours aux marchés. Le plan Debré, lancé en 1966, s’apparente à une opération de vérité des prix dans les grands réseaux publics du gaz, de l’électricité, de l’eau, des transports et du téléphone. Parallèlement, sous l’impulsion de l’État et avec l’assentiment du CNPF, les premières vagues de restructurations se manifestent par des fusions de sociétés. Depuis 1955, des décrets prévoient la possibilité d’accorder des prêts et des bonifications diverses en cas de rapprochement d’entreprises. Ces mesures concernent en priorité les alliances entre petites et moyennes entreprises. Mais la loi du 12 juillet 1965 franchit une étape supplémentaire et instaure un traitement fiscal privilégié, ces avantages étant encore accrus en 196734. Dès lors, le nombre d’opérations de concentration de sociétés anonymes va doubler, passant de 843 entre 1950 et 1960 à 1 850 pour la décennie suivante35. On assiste à deux vagues successives de restructurations. La première, de 1958 à 1965, voit de grosses entreprises absorber des sociétés de taille secondaire pour élargir, diversifier ou intégrer leur champ d’activité. La deuxième, commencée en 1966 avec une apogée vers 1971, donne lieu à la naissance d’entités de taille internationale à partir de la réunion de groupes déjà constitués36. C’est en particulier le cas de Saint Gobain et Pont-à-Mousson, BSN et Gervais-Danone, Pechiney et Ugine Kuhlman, Marine et Wendel, Peugeot, Citroën et Chrysler, Agache Willot et Bossois mais également Suez et la banque de l’Indochine, Paribas et la Compagnie Bancaire, etc. Les IVe et Ve plans programment aussi des recompositions de filière. Celle du textile est réaménagée progressivement autour de quatre groupes dominants (Prouvost, Boussac-DMC, Agache-Willot, Rhône-Poulenc). Le Centre interprofessionnel de rénovation des structures industrielles et commerciales de l’industrie textile (CIRIT), organisme dépendant du ministère de l’Industrie où siègent des représentants des syndicats professionnels et de l’État, accorde des aides sur examen des dossiers37. Deux chercheurs, témoins de la période, ont constaté comment la sélection s’est opérée dans ce secteur au profit des grandes firmes qui, seules, disposent des capacités de modernisation38. Rien qu’entre 1954 et 1962, tandis que les marchandises italiennes et allemandes pénètrent le marché, le nombre d’entreprises du secteur se réduit passant de 9 094 à 6 634 et 100 000 emplois sur 600 000 sont supprimés, dont 82 000 postes d’ouvrier. Les projets de restructuration intègrent déjà un calibrage normatif défini par la notion de « dimension minimum ». Les méthodes de gestion appliquées renvoient à des schémas toujours en vigueur. Recourant à l’externalisation par la sous-traitance, les dirigeants orientent leurs investissements dans le but de réduire les coûts salariaux par la diminution des effectifs ouvriers. Autre industrie ciblée, la construction navale, objet d’un livre blanc en 1960, est redimensionnée pour résister à l’offensive de la concurrence. Le nombre de chantiers est ramené de quatorze à huit à l’issue du IVe plan. En 1966, 12 000 travailleurs ont déjà été mis hors travail, dont 3 000 sans conversion39.

  • 40 Delion AG., « Le plan d’adaptation des charbonnages français », Droit Social, 1961, n° 12, (...)
  • 41 Abdelmoumene A., « Les formes d’emploi dans la sidérurgie lorraine avant la crise des année (...)
  • 42 Schwartz B., Moderniser sans exclure, Paris, La découverte, 1994.
  • 43 Béthoux É., Brouté R. et Didry C., De l’Europe au territoire : information, consult (...)
  • 44 Aucouturier A.-L. et Didry C., Des politiques de plein emploi à la pluralité des formes jur (...)

10Comme le recommandait le rapport Rueff-Armand, les pouvoirs publics créent des dispositifs d’accompagnement et d’amortissement social. L’appareillage institutionnel est mis en place par branche, à l’image du plan d’adaptation des charbonnages français en 196040 et de la convention État-sidérurgie signée en 196641. Mais aussi à plus vaste échelle : entre la naissance de l’assurance chômage, l’UNEDIC, en 1958 et celle de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) en 1967, l’État active, le 18 décembre 1963, un système de préretraites à partir de 60 ans, dont le Fonds National pour l’Emploi (FNE) constituera la colonne vertébrale. La formation professionnelle devient un instrument de conversion42. Ces initiatives n’empêchent pas de premiers conflits d’éclater. La relative « pacification des relations sociales » des années cinquante, fondée sur l’acceptation par les syndicats d’un relèvement de la productivité en échange de l’amélioration du niveau de vie des ouvriers, est remise en cause. La diffusion du discours sur la primauté des contraintes extérieures à l’entreprise, légitimant une révision du partage supposé équitable des gains de productivité, conduit les syndicats à intégrer la défense de l’emploi dans un registre dominé jusqu’alors par les revendications salariales et les négociations collectives de branche sur les revenus et les retraites. Ce glissement intervient bien avant la mobilisation emblématique des ouvriers de Lip, en 1973, pour la sauvegarde de leur fabrique d’horlogerie. En marge de la longue grève des mineurs de 1963 contre le plan Jeanneney prévoyant la fermeture des puits non rentables, des luttes se développent dans plusieurs entreprises de taille moyenne, comme à Neyrpic. L’année même où les gueules noires livrent leur combat retentissant, la prise de contrôle par le groupe Alstom de la société grenobloise, spécialisée dans les turbines hydrauliques, provoque une réaction sociale inédite. Toutes les catégories sociales de salariés, ingénieurs comme techniciens, agissent de concert non seulement pour la préservation d’acquis conventionnels mais, plus largement, pour protéger une communauté de production autonome, un « laboratoire social », face aux pressions financières exercées par un groupe soucieux d’occuper une place dominante sur l’échiquier industriel français43. Les élus du personnel dans les comités d’entreprises (CE), ces institutions représentatives créées dans les entreprises d’au moins cinquante salariés à partir de 1945, font l’expérience des débats avec un employeur qui met en balance impératifs économiques et résolution du problème humain. C’est le cas d’Émile Combe, prêtre ouvrier stéphanois, élu au comité central d’entreprise (CCE) de Creusot-Loire, qui est confronté, en 1964, à un plan de 500 licenciements que la loi ne qualifiera d’économiques qu’en 198944. Cette instabilité de la relation contractuelle de travail nourrit une exigence de justification de l’employeur, tenu d’argumenter ses choix et de les soumettre à la critique de son personnel. Ainsi le problème de la responsabilité patronale dans le maintien de l’emploi fait-il irruption sur la place publique et impose la recherche de formes délibératives véhiculées par le droit.

  • 45 Journal Officiel du 22 septembre 1965, documents de l’Assemblée nationale, annexe n° 1448, (...)
  • 46 Selon les termes de Bonhomme J., rapporteur du projet de loi sur le droit de licenciement, (...)

11Pour la première fois, la loi du 18 juin 1966 portant sur les comités d’entreprise crée une obligation d’information et de consultation sur la formation professionnelle et sur les restructurations appréhendées comme des actes de gestion portant atteinte à l’emploi. L’ordonnance de 1945 sur les CE ne prévoyait qu’une consultation aux contours assez flous sur « les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise ». Dorénavant, le comité d’entreprise est obligatoirement informé et consulté sur les mesures qui sont de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs. Il est de plus obligatoirement saisi en temps utile des projets de compression d’effectifs. Le comité émet un avis qui est transmis à l’inspecteur du travail. Dans le domaine économique, le chef d’entreprise est désormais obligé d’assurer aux élus une information plus étendue et trimestrielle sur l’exécution des programmes de production, sur l’évolution générale des commandes et sur la situation de l’emploi. Dans l’optique du législateur, les conflits d’intérêt doivent pouvoir s’exprimer dans un cadre rationnel. « À l’heure où l’évolution économique exige des travailleurs une adaptation permanente, il est justifié que le comité ait à connaître de ses questions, de même qu’il soit consulté sur l’emploi », déclare le député René Caille, rapporteur du projet de loi45. Le processus d’institutionnalisation va se poursuivre. La lettre incitative adressée par Georges Pompidou aux organisations représentatives des salariés et des employeurs, le 3 août 1967, porte ses fruits. Un accord sur le chômage partiel intervient en février 1968, année même de la reconnaissance de la section syndicale d’entreprise. En 1969, les confédérations syndicales et le patronat s’entendent à nouveau, sur l’emploi cette fois. Cet accord national interprofessionnel, évoqué en introduction, porte sur la généralisation des commissions paritaires de l’emploi, l’information et consultation du comité d’entreprise sur les projets de licenciements collectifs pour raisons économiques et sur les garanties prévues en cas de mutations et de licenciements collectifs d’ordre économique. Enfin, en mai 1973, le gouvernement fait adopter une loi ayant pour objet de « chercher à libérer les hommes des risques et des incertitudes de la vie professionnelle ». Prenant acte du « système d’économie de compétition et de concurrence », la majorité parlementaire espère trouver « un point d’équilibre entre la meilleure sécurité du salarié et la préservation des capacités de nos entreprises46 ». La réforme aboutit principalement à la création des articles L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du Code du travail qui instaurent une justification du licenciement. Ces dispositions vont ouvrir la voie à un contrôle par le juge du « caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur ». Avant même la rupture macro-économique de 1974, le visage de la restructuration contemporaine émerge donc et la question de la sécurité professionnelle, qui continue de tarauder notre société prétendument post- industrielle, s’est déjà imposée au tournant des années soixante.

Conclusion

12La perspective historique que nous venons de tracer à grands traits nous amène à envisager l’organisation des systèmes de production et la destinée des entreprises dans la durée, dans un environnement social politiquement construit et évolutif. Les restructurations, dès lors, ne se réduisent plus à des ajustements fonctionnels, routiniers et abstraits, déterminés par des théorèmes économiques intangibles. Elles s’apparentent plutôt, de notre point de vue, à des mises à l’épreuve des conventions de travail dans l’entreprise, l’emploi étant (re)configuré sous la tension des contraintes d’un régime de compétitivité voulu et organisé. Les restructurations sont ainsi des figures institutionnalisées de l’action collective dans un contexte de droit mouvant, des figures à chaque fois imprévisibles en fonction de la réalité des entreprises et de leurs produits, des différentes politiques publiques, des formes d’expression de la conflictualité et des processus délibératifs, des capacités cognitives des parties impliquées et des relations entre les acteurs. Elles sont comme autant de solutions provisoires dessinant la trajectoire de l’entreprise.

Notes

1 Cohen D., Trois leçons sur la société post-industrielle, Paris, Le Seuil et La République des Idées, 2006. La thèse figure déjà dans le rapport du Plan sur « les nouvelles armes du défi industriel » de Coriat B. et Taddéi D., Made in France, Paris, La librairie générale française, coll. Le livre de poche, 1991. Cf. aussi Veltz P., Le nouveau monde industriel, Paris, Gallimard, 2000.

2 Lyon-Caen A., « Le comité d’entreprise et les restructurations », Droit social, 2004, n° 3, p. 285-289.

3 De Gaulle C., Mémoires d’espoir, Le renouveau 1958-1962, L’effort 1962…, Paris, Plon, coll. Presses Pocket, 1970, p. 165.

4 Discours de Charles de Gaulle à l’occasion de sa prise de fonction le 28 décembre 1958.

5 De Gaulle C., op. cit., p. 165.

6 Aron R., Dix-huit leçons sur la société industrielle, Paris, Gallimard, coll. Folio-essais, (1962) 1982.

7 Touchelay B., « Le patronat français et le partage du pouvoir dans l’entreprise entre 1946 et 1968 », communication aux neuvièmes Journées d’histoire de la comptabilité et du management, Gouvernement d’entreprise et perspectives historiques, 2003.

8 Voir Denord F., Néolibéralisme version française, histoire d’une idéologie politique, Paris, Demopolis, 2007, p. 305.

9 Entreprise, n° 97, 1er août 1957.

10 Jeanneney J.-M., Forces et faiblesses de l’économie française, Paris, Armand Colin, 1956, p. 275. Cité par Asselain J.-C., « Le tournant des années cinquante : les prémices de la réouverture de l’économie française », L’économie française dans la compétition internationale au xxe siècle, colloque des 3 et 4 octobre 2002, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2006, p. 239-288.

11 Entreprise, op. cit.

12 Sur l’importance du changement constitutionnel de 1958, voir la thèse de Delphine Dulong consacrée au processus de basculement du pouvoir du législatif à l’exécutif : Dulong D., Moderniser la politique, Aux origines de la Ve République, Paris, L’Harmattan, 1987.

13 Berstein S., La France de l’expansion, I. La république gaullienne 1958-1969, Paris, Le Seuil, coll. Points, 1989, p. 156.

14 De Gaulle C., op. cit., p. 154.

15 Voir Margairaz M., L’État, les Finances et l’économie en France (1932-1952). Histoire d’une conversion, Paris, Imprimerie nationale, CHEFF, 1991, 2 vol.

16 Chélini M.-P., « Le plan de stabilisation Pinay-Rueff, 1958 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2001, n° 48-4, p. 102-121, p. 106.

17 Le Comité comprend 16 membres, dont deux vice-présidents en charge d’animer les travaux : Jacques Rueff et Louis Armand, président de la Commission européenne de l’énergie atomique en 1958-1959. À leurs côtés siègent le statisticien Alfred Sauvy, également ancien élève de Polytechnique, le sénateur radical Jean Filipi, inspecteur des Finances comme Rueff, Pierre Massé, inspecteur général des Ponts et chaussées, Marcel Demonque, dirigeant des ciments Lafarge et membre influent du CNPF, Henry Toulouse, le fils du fondateur des supermarchés Docks de France, André Grandpierre, ingénieur de formation et président de la société Saint-Gobain-Pont-à-Mousson, René Courtin, un universitaire libéral, Louis Estrangin, patron de Ouest-France, Jean Keilling, un ingénieur agronome, Alexandre Verret, dirigeant des Charbonnages de France. Les confédérations syndicales sont représentées, à l’exception notable de la CGT, par Gabriel Ventejol (CGT-FO), André Malterre (CGC) et Gaston Tessier (CFTC). L’inspecteur général des Finances Michel Albert assure le secrétariat général.

18 Rueff J., Les fondements philosophiques des systèmes économiques, Paris, Payot, 1967.

19 Rapport sur les obstacles à l’expansion économique (Rueff-Armand), présenté par le comité institué par le décret n° 59-1284 du 13 novembre 1959, Paris, Imprimerie nationale, 1960.

20 Murcier J.-P., « Pour un code du travail moderne », Droit Social, 1955, n° 4, p. 216-219.

21 Le rapport proposait de « réduire les rigidités qui affectent » l’exercice de certaines professions comme celles de notaire ou de courtier maritime et d’« éliminer les atteintes à la véracité des coûts et des prix » dans des secteurs comme le logement, la production sucrière ou la viticulture.

22 Fabra P., « Le comité Rueff-Armand : un remord récurrent », Les Échos, 18 janvier 2008.

23 « Pour répondre à l’accélération, il faut partout favoriser la mobilité, le décloisonnement, la prévision générale, la flexibilité, en un mot la capacité de dominer l’événement. On se heurte malheureusement à la résistance des structures. » Armand L. et Drancourt M., Plaidoyer pour l’avenir, Paris, Calmann-Levy, 1961, p. 104-105.

24 Drancourt M., Mémoire de l’entreprise, Paris, Robert Laffont, 1993, p. 45.

25 Gelinier O., Morale de l’entreprise et destin de la nation, Paris, Plon, 1965.

26 Ibid., p. 29.

27 Ibid., p. 27.

28 Gelinier O., Le secret des structures compétitives, Paris, Hommes et techniques, 1967.

29 Luc Boltanski relate cette ascension : « La CEGOS qui compte environ 40 collaborateurs dans les années 50, lorsque Octave Gélinier devient directeur des ingénieurs-organisateurs, augmente, les années suivantes, au rythme de 20 % par an, multiplie les départements (marketing, direction du personnel, organisation administrative, contrôle financier, direction générale, informatique, perfectionnement des cadres,etc.), se spécialise dans les opérations de fusion et d’absorption, ouvre des filiales dans différents pays d’Europe. Au milieu des années soixante, la CEGOS emploie 600 personnes dans plusieurs pays (Espagne, Hollande, Italie, Belgique, etc.). Son conseil d’administration réunit des universitaires (comme le doyen Capelle), des financiers (BNP, Banque d’Indochine, etc.), des grands patrons (Chenevier, qui dirige les pétroles BP, etc.). » Voir Boltanski L., Les cadres, formation d’un groupe social, Paris, Minuit, 1982, p. 203.

30 Sellier F., La confrontation sociale en France 1936 1981, Paris, PUF, 1984, p. 63.

31 Braun A., Le CRC du Centre de Recherches et d’Études des Chefs d’entreprise à l’Institut de l’Entreprise, Paris, Institut de l’entreprise, 2001.

32 Dulong D., op. cit., p. 29.

33 Cité par Caron F., Histoire économique de la France xixe-xxe siècle, Paris, Armand Colin, (1981) 1995, p. 255.

34 Caron F., op. cit., p. 255.

35 Bellon B., « Origines et conditions des restructurations en France », Les restructurations industrielles en France, Ve Rencontre nationale de Chantilly, septembre 1979, Paris, Economica, p. 7-23, 1980, p. 19.

36 Ibid.

37 Sellier F., op. cit., p. 60.

38 Houssiaux J. et Amoy C., « L’évolution de la concentration dans les industries françaises : l’exemple de l’industrie textile », Revue d’économie politique, 1965, p. 405-439.

39 Alexandre R., La Croix du 16 février 1966.

40 Delion AG., « Le plan d’adaptation des charbonnages français », Droit Social, 1961, n° 12, p. 580-589.

41 Abdelmoumene A., « Les formes d’emploi dans la sidérurgie lorraine avant la crise des années soixante-dix », Friot B. et Rose J. (dir), La construction sociale de l’emploi en France. Les années soixante à aujourd’hui, Paris, L’Harmattan, 1996, p. 137-159.

42 Schwartz B., Moderniser sans exclure, Paris, La découverte, 1994.

43 Béthoux É., Brouté R. et Didry C., De l’Europe au territoire : information, consultation et mobilisations des travailleurs dans les restructurations d’Alstom, document de travail de l’IDHE, UMR n° 8533 du CNRS, n° 06-02, 2006.

44 Aucouturier A.-L. et Didry C., Des politiques de plein emploi à la pluralité des formes juridiques de la relation de travail, Collection des rapports, n° 179, Paris, CREDOC, 1997.

45 Journal Officiel du 22 septembre 1965, documents de l’Assemblée nationale, annexe n° 1448, rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi (n° 1348) modifiant certaines dispositions de l’ordonnance n° 45-280 du 22 février 1945 instituant des comités d’entreprises.

46 Selon les termes de Bonhomme J., rapporteur du projet de loi sur le droit de licenciement, JO du 23 mai 1973, Assemblée nationale, compte rendu intégral 26e séance, 1re séance du mardi 22 mai 1973, p. 1440.

Auteur

Chercheur à l’IDHE.

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search