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L'Europe des sciences et des techniques

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Liliane Hilaire-Pérez
, 
Fabien Simon
, 
Marie Thébaud-Sorger

Circulations, mobilités

Le voyage de formation en Europe, XVe-XVIIIe siècle

Gilles Bertrand

Texto completo

1Derrière la notion de voyage de formation se profilent des pratiques propres à diverses sphères sociales et professionnelles. Entre le XVe et le XVIIIe siècle, le voyage fut un temps d’apprentissage profitable pour des catégories modestes de la population autant que pour des individus de rang plus élevé. Certes tout voyage était formateur, même accompli dans la maturité. Mais il revêtit un sens particulier au niveau des sciences et techniques, soit comme institution indispensable au seuil d’une carrière, soit comme complément et source d’enrichissement dans le cycle des apprentissages.

2De nombreux jeunes gens furent envoyés sur les routes d’Europe pour consolider des savoir-faire marchands, administratifs ou artisanaux. Le voyage servait alors à affiner les techniques propres à un futur métier, selon des habitudes héritées du Moyen Âge. Une large palette d’expériences fut encouragée par les autorités, les familles ou les corps de métiers en vue de former de jeunes commerçants, artisans ou ingénieurs, bref, des praticiens de savoirs en tout genre dans une multiplicité de secteurs de l’activité humaine.

Formations marchandes

3La préparation technico-théorique qui permettait aux jeunes marchands de lire, écrire et compter et la position derrière le comptoir familial étaient assez souvent complétées par un séjour dans une succursale à létranger. Ces voyages de la Méditerranée au nord de l’Europe auprès d’une filiale ou de correspondants de la maison mère, souvent situés dans des ports, leur permettaient d’acquérir en plus du latin une autre langue, de s’initier aux stratégies et aux échanges bancaires, de s’habituer aux méthodes du commerce, de l’expédition des marchandises, de la gestion des marchés et du contact avec des interlocuteurs. Cette tradition était ancrée chez les hommes d’affaires de l’Italie communale. Aux XIVe et XVe siècles, les marchands d’âge mûr se concentraient depuis la maison mère sur la direction et la coordination des activités et ne se déplaçaient plus personnellement comme aux XIIe et XIIIe siècles pour conclure leurs affaires et accompagner les marchandises (Franceschi et Taddei, 2012). Mais aspirant à une carrière brillante, ils avaient accompli dans leur jeunesse un voyage d’une durée variable et s’étaient exercés auprès de la filiale d’une compagnie localisée dans l’une des grandes places commerciales et financières européennes ou méditerranéennes, laquelle couvrait leurs dépenses de nourriture, logement et habillement. L’écrivain Boccace, né à Certaldo en Toscane (1313-1375), avait été envoyé par son père à Naples avant d’abandonner la carrière marchande. Les deux frères florentins Villani, Giovanni (v. 1276-1348) et Matteo (1283-1363), se rendirent à Avignon et dans les Flandres. Un jeune Siennois recruté par la maison Salimbeni accepta en 1382 d’aller en Tuscia et en Lombardie, dans les royaumes de France, d’Angleterre et de Sicile « et partout où vous voudrez ». Ces déplacements favorisaient la circulation de l’information entre la maison mère et les succursales (Tangheroni, 1987).

4Parallèlement aux voyages de formation, les lettres commerciales et les manuels marchands allaient connaître un vif succès tout au long de l’époque moderne (Burkardt, 2007). Les jeunes marchands recouraient aux dictionnaires, listes de vocables et alphabets réunis dans les guides des pèlerins, à des textes d’apprentissage plurilingues, répertoires de phrases ou listes de vocabulaire spécialisé, à des notes de grammaire et de petits manuels de conversation indispensables pour réaliser des transactions sur le terrain (Soldani, 2014). Dans les places frontalières marquées par une forte présence étrangère, des écoles furent instituées pour l’apprentissage linguistique. À Vérone, une chaire de langue allemande pour les enfants avait vu le jour dès 1407 et fut confiée à un Allemand habitué au commerce. À Venise vers 1420, Giorgio de Nuremberg, auteur d’un petit livre à succès pour apprendre l’allemand, enseignait aux élèves italiens qui profitaient des liens de Venise avec le monde germanique pour s’introduire dans le monde du commerce international. Quand elles travaillaient avec l’étranger, les compagnies prônaient la connaissance de langues difficiles comme l’allemand, le flamand et l’arabe. En sus de la dimension linguistique et des capacités de comptabilité et d’écriture pour tenir les correspondances, l’apprenti devenait expert dans les coutumes locales de places éloignées de sa ville natale. Après s’être perfectionné il lui arrivait de rester à l’étranger et de passer d’une compagnie à l’autre, améliorant toujours davantage sa position, avant de retourner dans sa ville natale.

5Les jeunes les plus chanceux allaient s’exercer à l’étranger dans une compagnie de la famille. Le Génois Francesco Spinola fut envoyé entre 1420 et 1425 à Bruges, ensuite déplacé dans le royaume de Grenade où sa famille avait le monopole des fruits secs, ce qui lui permit d’acquérir plus tard un rôle prééminent dans l’entreprise familiale. Les membres de grandes familles génoises, florentines et vénitiennes étaient accueillis par des marchands qui avaient été en affaires avec leurs parents ou se déplaçaient auprès des communautés de co-nationaux organisées à l’étranger, les fameuses « nations ». Ce fut le cas des Florentins et des Pisans à Barcelone. Le Florentin Filippo di Leonardo Strozzi partit à Avignon en avril 1423, à 17 ans, pour aller travailler à la compagnie de ses co-nationaux Niccolò Serragli et Priore di Mariotto « avec un salaire à leur discrétion », et son jeune frère Lorenzo le rejoignit en 1446, vivant le traumatisme d’un long voyage par mer et éprouvant la sensation d’être isolé et maltraité par un certain Raimondo Mannelli, associé de ses cousins. L’expérience à l’étranger était perçue comme hautement formative parce que le jeune homme y voyait le monde, entrait en contact avec des usages et coutumes différents, habituait son corps au stress des voyages et de la vie à l’étranger. Aussi Giovanni di Pagolo Morelli recommandait-il dans ses souvenirs, au XVe siècle, « qu’enfant il soit avec d’autres aux magasins, aux comptoirs ; qu’il aille au-dehors, ait affaire aux marchands et aux marchandises ; qu’il voie de ses propres yeux les pays, les terres où il pense qu’il trafiquera » (Ricordi, cités dans Soldani, 2014).

Le Tour de France des compagnons

  • 1 Journal de ma vie. Jacques-Louis Ménétra Compagnon vitrier au XVIIIe siècle, édité par Daniel Roch (...)

6Les jeunes ouvriers et artisans se déplaçaient eux aussi dans le cadre de rituels d’apprentissage. Certes une partie d’entre eux était poussée par la nécessité de trouver de quoi vivre, d’aller chercher du travail ailleurs que dans leur lieu de naissance en se faisant travailleurs saisonniers ou marchands ambulants. Parmi les artisans et ouvriers que Pierre le Grand recruta en Hollande, les praticiens expérimentés l’emportaient sur les jeunes en formation, à l’instar de ce qui se passait pour les vitriers de Murano que Louis XIV tenta de faire venir en France. Mais il a existé un mode spécifique d’apprentissage par le voyage des jeunes compagnons des corporations de métiers, qu’incarne l’institution du tour de France depuis la fin du Moyen Âge. Le Journal de ma vie de Jacques-Louis Ménétra raconte le périple que ce Parisien né en 1738 a accompli de 1757 à 1763 en tant que compagnon du tour de France à travers les ateliers des provinces françaises avant de se fixer comme maître vitrier à Paris1. À l’époque moderne ces ouvriers, qu’on appelait des passants parce qu’ils « passaient » de ville en ville, découvraient au cours de leur itinéraire les manières de fabriquer propres à chaque province avant de regagner leur siège compagnonnique. Le voyage leur servait à butiner pour être en mesure de créer à leur retour un chef-d’œuvre. Outre sa dimension de formation humaine, culturelle et morale, il favorisait une large connaissance du métier dans un contexte de solidarité et de contrôle où l’embauche dans un atelier et l’hospitalité dans les auberges étaient en principe garanties. L’itinérance des compagnons n’avait rien du vagabondage (Adell-Gombert, 2008). En échange de ces protections, le compagnon se conformait aux indications de sa lettre de route qui l’autorisait au voyage et précisait sa destination entre villes du Devoir, disposant d’un siège compagnonnique, et villes bâtardes, qui n’en avaient pas.

7Les séjours dans chaque ville duraient de six mois à un an. Échappant à la contrainte des corporations, où le compagnon était soumis à son maître de métier, le tour de France invitait au changement et suscitait le brassage des populations et des savoir-faire dans la mesure où le « passant » exportait des techniques apprises ailleurs, ne pouvait s’incruster dans une ville avant d’avoir terminé son voyage d’apprentissage et parfois finissait par s’établir loin de son village natal. Ce rite de passage impliquait une rupture : pour devenir compagnon, il fallait quitter ses proches et ses habitudes et partir plusieurs années après avoir déjà appris les rudiments du métier. Ménétra avait été apprenti pendant quatre ans, de 1753 à 1757, avant de se mettre en route. Au cours de l’époque moderne, le compagnon parcourait à pied les routes de France en recourant à la chanson pour se donner du courage autant qu’à la gourde et à sa canne de marche, de défilé, de chantier et de combat : « Pour voyager vive la canne ! » dit une chanson composée au XIXe siècle (Icher, 2000). Soutien pour le voyageur solitaire comme en groupe, la chanson resta longtemps un signe de reconnaissance des compagnons : outre qu’elle rythmait le travail des ateliers, elle faisait partie de l’espace sonore dans les villes où arrivaient des ouvriers qui, guidés par elle, pouvaient s’orienter vers un lieu compagnonnique.

De la peregrinatio academica au Grand Tour

8On reconnaît une forme d’apprentissage plus scientifique des élites dans un modèle de voyage moins utilitaire qui s’affine à l’époque moderne, où l’expérience physique et le contact avec d’autres nations complétaient les savoirs théoriques appris dans les collèges ou chez un précepteur. Ce modèle appelé à devenir le Grand Tour dérivait pour partie de la peregrinatio academica, elle-même issue de la naissance des universités au XIIe siècle. Caractérisée par le passage d’une université à l’autre, celle-ci avait été florissante au siècle suivant, manifestant la force attractive de Paris ou de Bologne (Verger, 1973). La multiplication des fondations d’universités à la fin du Moyen Âge avait certes limité leurs aires de recrutement en les régionalisant, relativisant toute idée de « coupure exceptionnelle » pour les étudiants. Les initiatives pontificales avaient depuis le XIVe siècle fait place aux fondations d’universités par les princes et les États y trouvaient les juristes dont ils avaient besoin. Mais la mobilité académique européenne ne disparut pas, donnant naissance aux livres d’amis détenus par chaque étudiant (libri amicorum). De nombreux jeunes gens vinrent aux XVIIe et XVIIIe siècles du monde germanique et de la Confédération Suisse pratiquer leur iter italicum dans les seminaria nobilium de l’Italie du Centre-Nord (Brizzi, 1976) et dans les collèges d’éducation italiens (Brizzi, 2007). Des groupes arrivés de Vienne, Graz, Lubiana, Lucerne, Gorizia, mais aussi des Espagnols, des Français, des Anglais, des Polonais, des Hongrois ou des personnes du Centre-Nord de l’Empire passèrent des universités italiennes aux collèges d’éducation des jésuites, le basculement au profit des seconds s’effectuant vers 1670-1680. C’était là privilégier une formation polyédrique et désintéressée, évitant les aspects plus strictement techniques et professionnels. Quand la faveur des collèges d’éducation diminua à partir des années 1720, la pratique du voyage en Italie perdura grâce au relais assuré par le Grand tour.

9Le cas des Platter, protestants bâlois du XVIe siècle, montre comment un père et ses deux fils nés à près de 50 ans de distance purent devenir des médecins réputés après être allés se former à l’université de Montpellier au sein d’un voyage à travers l’Europe (Le Roy Ladurie, 1995). Inscrites dans un parcours d’ascension sociale, ces trois générations naquirent du père, Thomas, dit le Vieux (1499-1582), petit berger misérable du Valais devenu mendiant itinérant voyageant à pied dans une partie de l’Europe germanique puis à Bâle, d’abord ouvrier cordier et bientôt professeur de latin, de grec et d’hébreu et même patron imprimeur. À son fils Felix Platter, né en 1536, il offrit des études de médecine à Montpellier et une pérégrination initiatique à cheval qui préluda à sa carrière de professeur de médecine, doyen, recteur et auteur de livres médicaux et de physique. Ayant eu à près de 70 ans un second fils, Thomas II, Thomas Platter lui permit à son tour en 1595 de quitter Bâle pour un long voyage jusqu’à Montpellier et Uzès et par la suite en Catalogne, en France, en Angleterre du Sud et aux Pays-Bas du Sud afin de poursuivre quelques années d’études et de se livrer à la pratique médicale.

10La peregrinatio academica évolua à partir des années 1540 vers le Grand Tour, où les jeunes gens des grandes familles, d’abord britanniques et souvent futurs dirigeants des pays européens, s’initiaient aux savoirs administratifs et à la gestion des affaires publiques en parcourant l’Italie, la Suisse, les Pays-Bas, l’Allemagne et l’Angleterre. Les sciences et les techniques relevaient d’un processus éducatif de ces jeunes membres des élites que l’on envoyait se former au loin. En leur enjoignant d’observer les ponts, les fortifications ou les manufactures, les instructions ou artes apodemicae de Bacon ou Misson les invitaient à mobiliser des savoirs techniques et ils apprenaient l’art du gouvernement des hommes, de la diplomatie et de l’administration. Certains jeunes nobles ont pratiqué le Grand Tour en l’orientant vers les sciences exactes, surtout dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Le jeune duc Louis-Alexandre de La Rochefoucauld (1740-1792) se rendit en 1762 de France en Savoie puis en 1765-1766 en Italie accompagné non seulement du peintre Jean-Jacques de Boissieu et de l’homme de lettres Morellet, frère de l’abbé plus connu, mais aussi du naturaliste Nicolas Desmarest, de quinze ans son aîné, qui était également inspecteur des manufactures.

Missions savantes et éducatives

11De nombreux savants figurèrent parmi les jeunes voyageurs en Europe, de Tycho Brahé parti de Copenhague en 1575 vers le monde germanique pour visiter d’autres savants et comparer leurs données, jusqu’à Kepler qui en 1600 voyagea pour rencontrer de visu son aîné Tycho et en obtenir de précieuses informations scientifiques (Nicolaïdis, 1998). Comme beaucoup d’autres, Nicolas-Claude Fabri de Peiresc (1580-1637) fit au début du XVIIe siècle un voyage d’Italie suivi d’un voyage en Angleterre – où il rencontre Bacon – et en Hollande, car c’était le moyen de se communiquer les idées à une époque où le journal scientifique n’existait pas.

12On pouvait aussi acquérir des savoirs spécialisés par le biais de missions financées par les États ou de puissants mécènes. Les voyages de jeunes savants, naturalistes, ingénieurs, militaires ou médecins, furent de plus en plus encadrés au cours de l’époque moderne. Les instructions scientifiques se précisèrent (Collini et Vannini, 1995) [focus Instructions*]. Les États et leurs institutions prirent en charge au XVIIIe siècle l’envoi de jeunes savants en vue de favoriser leurs apprentissages pour qu’ils les répercutent à leur retour dans le pays de départ. En 1776, Roland de la Platière fut chargé par l’intendant des Finances Trudaine de Montigny d’accompagner comme tuteur en Suisse et en Italie le jeune Charles Bruyard, fils du directeur de la Balance du Commerce Pierre Bruyard, dans ce qui s’avéra être en l’absence d’une école officielle un véritable voyage d’éducation administratif pour le jeune homme destiné à pouvoir remplacer un jour son père. De 1776 à 1779, le physicien florentin Giovanni Fabbroni, né en 1752, accompagna son aîné Felice Fontana à Paris et à Londres, et son exploration des réalités technologiques et industrielles dans les districts miniers et manufacturiers du Nord de l’Angleterre le convainquit de la nécessité de la modernisation économique (Pasta, 1989). Ces voyages complétaient les missions d’enquête d’experts déjà confirmés que leurs souverains envoyaient observer les manufactures, les modes de production de la soie, les méthodes du cadastre et les manières d’organiser l’impôt [Sciences du territoire*]. Lors de son tour d’Europe en 1781-1782, Alessandro Volta (1745-1827) rencontra, à Paris, Buffon, Laplace et Lavoisier. Le gouvernement napolitain envoya à Paris et Montpellier le médecin Carmine Antonio Lippi de 1785 à 1788, puis en 1789 le médecin Adamucci, ainsi qu’en 1787 à Cherbourg et Paris un groupe de quatre jeunes ingénieurs hydrauliques napolitains âgés de 19 à 26 ans, élèves de l’Académie militaire. Même si les intéressés se heurtèrent à leur retour aux résistances napolitaines, cette mission avait pour but de former des techniciens aptes à relever la situation des ports du royaume de Naples en les aménageant (D’Angelo, 2011).

  • 2 Rever François, Voyage des élèves du pensionnat de l’école centrale de l’Eure, dans la partie occi (...)

13Le terrain était préparé pour la promotion des voyages dans les stratégies éducatives. Les concours académiques s’en firent l’écho dès avant la Révolution comme à Lyon en 1787. De nouvelles pédagogies furent mises en place de la Suisse à la Prusse pour promouvoir cette dimension de l’apprentissage, que la Révolution ensuite appliqua au moins en France dans les programmes des écoles centrales départementales. Partout en Europe se développa dans les dernières décennies du XVIIIe siècle une pratique du voyage patriotique où les jeunes gens étaient incités à visiter leur pays afin de parfaire leur formation. La Société helvétique lança en 1768, à la demande de la société morale de Zürich, un appel en vue d’encourager les jeunes Helvètes à préférer un tour de Suisse plutôt qu’un tour d’Europe, et le pasteur Bridel fit paraître en 1795 un Essai en allemand « sur la manière de faire voyager utilement les jeunes Suisses dans leur patrie ». L’importance accordée à la connaissance de son propre territoire rivalisait avec l’incitation à se rendre en divers endroits du globe pour faciliter la comparaison des observations. Elle fut systématisée dans les voyages annuels d’élèves en Allemagne, institués par Christian-Gotthilf Salzmann (1744-1811), directeur à partir de 1784 de l’institut d’éducation de Schnepfenthal, près de Gotha en Saxe. On en retrouvera l’esprit par-delà la Révolution lorsque sous le consulat l’école centrale de l’Eure établira que les meilleurs élèves soient récompensés en allant parcourir pendant les vacances « les endroits du département les plus intéressans par leur situation, par l’antiquité des monumens qu’ils renferment, par les manufactures qui s’y trouvent, et par le genre de culture dont on s’occupe dans ces endroits2 ». On songe ici au projet soumis par Louis Portiez en 1794 au Comité d’instruction publique. Allant plus loin que les réponses au concours de l’académie de Lyon de 1787 sur les voyages comme « moyen de perfectionner l’éducation » et l’apprentissage d’un métier, celui-ci prévoyait que dans le façonnement de l’homme régénéré les voyages des jeunes gens à l’étranger et plus encore ceux à l’intérieur du pays se pratiqueraient en groupe, sous une forme collective qui en assurerait la nature républicaine (Gelléri, 2013).

Bibliografía

BIBLIOGRAPHIE

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Pasta Renato, 1989, Scienza, politica e rivoluzione. L’opera di Giovanni Fabbroni (1752-1822) intellettuale e funzionario al servizio dei Lorena, Florence, Olschki.

Soldani Maria Elisa, 2014, « “Molti vogliono sanza maestro esser maestri”. L’avviamento dei giovani alla mercatura nell’Italia tardomedievale », in Isa Lori Sanfilippo et Antonio Rigon (dir.), I giovani nel Medioevo. Ideali e pratiche di vita, Rome, Istituto Storico Italiano per il Medio Evo, p. 146-164.

Verger Jacques, 1973, Les universités au Moyen Âge, Paris, Presses universitaires de France.

Tangheroni Marco, 1987, « Siena e il commercio internazionale nel Duecento e nel Trecento », in Carlo Maria Cipolla et Franco Cardini (dir.), Banchieri e mercanti di Siena, Rome, De Luca, p. 23-103.

Notas

1 Journal de ma vie. Jacques-Louis Ménétra Compagnon vitrier au XVIIIe siècle, édité par Daniel Roche, Paris, Albin Michel, 1998 [1re édition 1982].

2 Rever François, Voyage des élèves du pensionnat de l’école centrale de l’Eure, dans la partie occidentale du département, pendant les vacances de l’an 8, avec des observations, des notes, et plusieurs gravures relatives à l’histoire naturelle, l’agriculture et les arts, à Évreux, chez J. J. L. Ancelle, imprimeur-libraire, an X-1802.

Autor

Professeur d’histoire moderne à l’université Grenoble Alpes et membre de l’Institut universitaire de France, spécialiste de l’histoire de l’Italie de l’époque des Lumières à Napoléon, ainsi que de l’histoire du voyage en Europe au XVIIIe siècle. Il s’intéresse aux modalités de la rencontre entre cultures et fait se croiser l’histoire des pratiques matérielles et du contrôle des mobilités avec celle des savoirs et des représentations sur le monde. Il a publié : Le Grand Tour revisité : le voyage des Français en Italie, milieu XVIIIe-début XIXe siècle, Rome, École française de Rome, 2008 ; Histoire du carnaval de Venise, XIe-XXIe siècle, Paris, Pygmalion, 2013 et en collaboration : La France et l’Italie. Histoire de deux nations sœurs, de 1660 à nos jours (avec J.-Y. Frétigné et A. Giacone, Paris, Armand Colin, 2016). Il a dirigé les ouvrages suivants : (avec P. Serna), La République en voyage, 1770-1830, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013 ; (avec J. Ehrard), édition des Voyages de Montesquieu, Paris/Lyon, Classiques Garnier, 2012 ; (avec A. Guyot), Des « passeurs » entre science, histoire et littérature. Contribution à l’étude de la construction des savoirs (1750-1840), Grenoble, ELLUG, 2011.

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