1L’historienne des sciences Lorraine Daston, dans une série d’articles consacrés à la République des lettres au XVIII^e siècle a proposé de ressaisir cette notion comme idéal communautaire alors que triomphent les académies des sciences un peu partout en Europe, en soulignant l’importance d’un désir de connaissance (Daston, 1991, 1999, 2006). En se tenant à distance d’un modèle du professionnel des sciences ou d’une description des infrastructures, Daston réhabilitait une conception de la pratique scientifique comme passion ordinaire, et des « collectifs de pensée » comme « espaces d’attention » (Collins, 1998). La redécouverte dans les années 1980 de l’œuvre de Ludwig Fleck a été déterminante pour repenser aussi le monde des Lumières ou la République des lettres vue non plus comme une organisation internationale des savoirs mais comme une communauté interprétative [Expérimenter*]. L’usage de la République des lettres en histoire des sciences est donc plus spécifique que dans l’histoire culturelle en général, car il s’inscrit dans un débat sur le sens à donner à la communauté savante. À travers elle, Daston montre la multiplicité des formes et des valeurs qui mettent l’accent sur le travail collectif plutôt que sur la recherche individuelle.

La République des sciences, une éthique communautaire

2Deux approches ont été mises en œuvre. Pour les uns d’abord, la réalité de la République des lettres consiste en sa capacité à proposer une éthique de la communication qui unifie les savants malgré la montée en puissance du contrôle des États ou des processus de confessionnalisation qui contredisent une universalité des pratiques scientifiques. La notion qui apparaît dans sa forme latine à la Renaissance oppose souvent une définition idéale à une réalité plus complexe à saisir. C’est au temps d’Érasme, lorsque la genèse de l’État moderne menace cette unité, que naît cette « République des lettres », conçue comme un État élitiste hors de tous les États politiques. Mais loin d’être neuve, puisqu’au Moyen Âge, les lettrés ecclésiastiques formaient déjà une véritable communauté par-delà les frontières, elle n’offre pas de solution de continuité. Elle ne restera cependant qu’une réalité d’espérance à l’époque moderne, tant sont puissantes les solidarités qui lient les lettrés au pouvoir. Le terme de « République des sciences » s’affirme au XVIII^e siècle sous la plume notamment d’un Condorcet. Françoise Waquet a montré que Condorcet avait inventé l’expression. Comme la République des lettres, ce ne sont que des utopies, des rêves d’un espace intellectuel unifié et sans frontières. La réflexion sur la morale comme moteur de la révolution scientifique était depuis Max Weber et Robert Merton au cœur du questionnaire de l’histoire des sciences pour saisir cette formation de l’esprit scientifique (Bachelard) [Protestantismes*]. D’un autre côté, les historiens ont cherché à préciser les contours de cette communauté, à en cerner les pratiques, à en décrire les conjonctures. De Paul Hazard et son livre sur la crise de la conscience européenne jusqu’aux travaux de Françoise Waquet et de Hans Bots en passant par Robert Mandrou, les historiens se sont proposés d’analyser un réseau de recherches, particulièrement centré sur la circulation de l’information (rôle des périodiques, de la confessionnalisation…) et l’échange.

3Voici la définition que donne Furetière dans son Dictionnaire en 1690 : « On dit aussi la République des lettres, en parlant collectivement de tous les gens d’estude. » Les autres dictionnaires ne sont guère plus prolixes. Vigneul-Marville en 1701 dans ses Mélanges d’histoire et de littérature en cerne mieux les contours : « Elle est composée de gens de toute nation, de toutes sortes de langues vivantes et mortes. Les arts y sont joints aux lettres et les mécaniques y tiennent leur rang. » À travers la métaphore républicaine émerge avec force l’idée d’une coopération intellectuelle internationale – qui fait que certains historiens préfèrent souvent parler d’Europe savante. Et ce n’est que lentement que les échanges épistolaires du XVI^e au XVII^e siècles créeront un espace autonome pour le débat d’idées qui préfigure la « société civile universelle » d’un Kant ou la « sphère publique du politique » d’un Habermas. Le champ de recherche que recouvre l’expression de République des sciences est donc vaste et a eu le mérite de mettre en valeur le poids du travail normatif des lieux et des institutions savantes. C’est la question du lieu scientifique à la fois espace de recherche et lieu abstrait du savoir, espace de médiation et lieu commun du discours scientifique. Il s’agit d’insister sur sa constitution, sur son fonctionnement, ses valeurs et les normes qui le définissent et le font perdurer. L’analyse du lien entre lieu de connaissance et lieu de sociabilité est valorisée. Il s’agit aussi de souligner le rôle joué par la diffusion des sciences, leur internationalisation à partir du XVII^e siècle, à travers la problématique de l’avènement de la science publique. L’univers des valeurs des lettrés se structure de plus en plus explicitement à partir d’un modèle communautaire fondé sur une éthique de la conformité, un idéal du travail collectif, des normes d’écriture, qui tend à privilégier le général, l’impersonnel, le « bien du public ». L’éthos donne consistance à des collectifs de pensée, plutôt qu’à des praticiens souvent isolés. Il donne corps à une République des sciences que l’on a tort de réifier et qui fonctionne avant tout comme un idéal souple, comme une communauté d’adhésion. Loin d’être désintéressé, l’homme de sciences est au contraire animé par des impératifs moraux, voire religieux, et c’est au nom de cette éthique de la science moderne qu’il est plus efficace, plus engagé dans la société de son temps. Aux côtés de l’analyse de la professionnalisation, des stratégies de distinction, de la poursuite d’une carrière, de l’exercice d’une expertise, il y a aussi le recours à des principes de justification qui encadrent l’action scientifique, ce que l’on appelle une éthique des sciences. Travailler sur la République des sciences, c’est donc une manière de montrer que la fabrique des sciences est liée à la fabrique des valeurs (matter of facts, matter of concerns, matter of faith) et intégrer le rôle moteur des valeurs d’utilité publique, de bonheur, d’éducation, de divertissement chez les savants qui font de la critique le ciment de la sociabilité savante.

La République des sciences : un espace de communication

4Si l’on dépasse le débat sur le contenu à donner à la notion, on sera attentif aux efforts menés récemment par les historiens pour étudier la République des lettres comme un espace de communication. Reconstituer un groupe qui n’est véritablement formé que par la seule présence de la correspondance pose problème. À trop rapidement qualifier socialement et culturellement les relations entre ces individus, ou en fixer les limites, on court le risque de réifier ce réseau, alors même qu’il constitue une configuration de positions mouvante et instable. Il s’agit par conséquent de ne pas employer un vocabulaire descriptif empruntant à une histoire des institutions culturelles, mais nous chercherons à travers l’usage de notions telles que « collectif », « cercle » ou « ensemble » à suivre les savants dans leurs multiples activités de définition, de formalisation, de construction, ou de déconstruction du monde intellectuel dans lesquels ils s’inscrivent, en dehors des frontières prédéfinies des « systèmes » et des « fonctions ». Au seuil de la République des lettres, il y a d’abord l’échange épistolaire [Écrits savants*].

5En premier lieu, les historiens sont partis de l’analyse des vastes réseaux de correspondance. Plutôt que d’entreprendre d’emblée d’une analyse institutionnelle, ou monographique des institutions savantes, ou au contraire de la reconstitution de réseaux sociaux diffus, mais prégnant, tout un courant de l’histoire des sciences a cherché à questionner les logiques spatiales de ces grands circuits épistolaires. Ainsi, les ordres religieux mettent en place des ordres de l’information qui vont permettre la circulation de nouvelles fiables à grande échelle. Les jésuites, selon Steven Harris, tirent parti de ce monopole de l’information (Harris, 1996). À l’intérieur de la Compagnie de Jésus, des savants réputés tels Christoph Clavius (Romano, 1995), Athanasius Kircher (Gorman, 1997 ; Stolzenberg, 2001 ; Findlen, 2004) ou encore Boscovich, ont laissé de vastes correspondances organisées autour d’eux. D’autres historiens ont été attentifs à une approche plus anthropologique de l’échange. Anne Goldgar, reprenant la séquence historique étudiée par Hazard, montre bien les ambiguïtés de cette forme de communication qui se donne pour libre mais qui est très ritualisée (Goldgar, 1995 ; Shelford, 2007). La configuration informelle de positions que tissent ces échanges épistolaires et ces relations interpersonnelles apparaît dans la correspondance comme continuellement travaillée par un jeu de dénivellation sociale complexe entre ces membres, et par des effets de seuil. Franchir le seuil invisible de ces ensembles exige selon les épistoliers, de se soumettre à des rites de passage répétés : la lettre d’introduction sert de viatique. Grâce à ces correspondances, il est permis aussi d’atteindre une réalité sensible de ces relations et de faire valoir l’importance de l’amitié comme facteur de cohésion de cette configuration. Fréquemment relayé par des visites, des rencontres, l’espace des correspondants donne forme à une sociabilité mondaine marquée par la convivialité, l’amitié et la conversation. Les clauses de style, la rhétorique du compliment et de la louange qui encadre constamment l’écriture de la lettre, soutiennent aussi une solidarité sans faille. Les tensions et les rivalités n’en sont pas moins prégnantes. Et au-delà d’une amitié de façade, peuvent affleurer dans la correspondance, des jugements peu amènes sur les uns ou les autres. L’échange épistolaire est aussi un lieu d’évaluation du travail scientifique. Les savants se pensent à l’intérieur d’un espace intellectuel et relationnel qui est à la fois un réseau d’échange matériel (circulation d’objets) et immatériel (circulation d’idées) (Darmon et Waquet, 2010), et une communauté interprétative. Les espaces périgraphiques, et en particulier les préliminaires, sont le lieu de transaction par excellence de ces échanges, dans lesquels l’auteur s’attache à mentionner ses dettes, comme Gessner et Aldrovandi. Lavoisier utilisera ses mémoires pour alimenter un réseau de dédicataires. Comme l’avait bien analysé Daniel Roche, trois traits témoignent de l’efficacité de ce processus : la création d’une pratique rituelle de la visite, la polarisation de la circulation de l’information dans un espace provincial, et l’accès aux réseaux longs de la République des lettres par la reconnaissance collective du groupe qui permet de faire des économies d’échelles (Roche, 1989). Jadis, Krzysztof Pomian avait mis l’accent sur les fonctions multiples de la lettre dans les échanges entre savants et sur les fondements idéologiques de cette communication (Dibon, 1990). La correspondance se caractérise par une prépondérance accordée à la lettre-information, « qui renseigne le destinataire sur les données bibliographiques qui l’intéressent, sur ce qu’il peut trouver dans les bibliothèques et les dépôts d’actes, sur les nouveautés de librairie et sur ce qu’on est en train d’écrire » (Pomian, 1974). L’indice de rareté, qui revient souvent dans cet extrait, est le critère principal qui décide de l’importance d’une information. L’espace de la recherche semble fragmenté et d’un accès difficile. La correspondance n’a pourtant pas que ce rôle abstrait, elle est aussi concrètement associée à un ensemble d’échanges d’objets. Epîtres, remerciements, lettres témoignent de cette pratique qui oscille toujours entre deux pôles extrêmes de la sociabilité, celui de l’échange généralisé, et celui de la réciprocité négative du contre-don.

6Une seconde piste de recherche tout aussi féconde s’appuie sur une configuration plus précise, autour du réseau d’un savant renommé : Érasme, Peiresc, Aldrovandi, Gessner, Leibniz, Calvet. C’est par exemple l’objet du livre classique de Peter Miller (Miller, 2015). La densité exceptionnelle de la documentation autour du savant provençal Nicolas-Claude Fabri de Peiresc (1580-1637) autorise ainsi à aller plus loin dans la cartographie d’un monde savant et de ses pratiques. En découpant un espace dans le réseau à la fois comme lieu de pensée et problème intellectuel. La curiosité de Peiresc pour la Méditerranée le conduit en effet à s’intéresser aux manuscrits grecs conservés au Mont Athos ou à Constantinople, mais aussi à l’Égypte et au copte, à l’Éthiopie ou encore au syriaque. Ici se joue une géographie ancienne, religieuse et biblique, qui galvanise la recherche de ces antiquaires en relation avec les autorités religieuses à Rome ou les ordres religieux sur le terrain. Mais de manière plus étonnante, en analysant un segment de ce vaste réseau, Peter Miller donne à voir tout un monde d’intermédiaires, des marchands, des diplomates sans compter les informateurs locaux. La documentation sur laquelle il s’appuie permet aussi de sortir du massif de la correspondance pour rendre concrets les multiples attachements de Peiresc auprès des marchands marseillais. L’attention portée à la circulation et à la traçabilité des objets, aux acteurs de cette circulation, ce que l’on peut qualifier de brokers ou de go-betweens [focus Go-betweens*] permet de voir combien l’agrandissement du monde a pu changer la définition des antiquités. L’un des mérites de l’ouvrage est de s’interroger sur cette mobilisation méditerranéenne de la République des lettres.

7Depuis le XVI^e siècle, la Méditerranée orientale cesse d’être une mer inhospitalière, elle laisse la place à une découverte scientifique et intellectuelle active. On sait que depuis le début du XVII^e siècle, la monarchie française aidait les missions françaises jésuites au Levant, et en particulier à Naxos et à Santorin et que ce soutien s’inscrivait dans une compétition entre jésuites français et jésuites italiens soutenus par Venise. Ces tensions prenaient part plus largement à une discussion sur les missions financées par Rome ou par les États. L’implantation des missions dans les Cyclades obéissait ainsi à un projet d’expansion de l’apostolat missionnaire dans le Levant, mais à bonne distance de la capitale. Autour de Pereisc, Peter Miller montre la constitution d’un véritable réseau orientaliste de collecte d’informations dans les années 1630. Aux côtés des diplomates et des missionnaires, les marchands, en particulier protestants, avaient été aussi mobilisés dans le commerce euro-asiatique. Mais déjà, progressivement, un déplacement géographique s’accentue de la Méditerranée orientale, du Levant, à l’Iran safavide, puis à l’Inde moghol. Les voyages en Orient de Jean Thévenot, de Jean-Baptiste Tavernier, de Jean Chardin, ou encore du numismate et antiquaire lyonnais Jacob Spon avaient ainsi montré la voie. Le « moment Peiresc » singularise ainsi la conjonction d’un intérêt érudit, d’un horizon diplomatique et d’une stratégie apostolique de reconquête.

8Plus récemment épaulée par les technologies numériques et par les nouvelles questions posées par le tournant spatial, la République des lettres a été au cœur du renouvellement d’une cartographie historique. Pierre-Yves Beaurepaire et Jean Boutier se sont ainsi attaqués à une histoire de la communication par ce biais (Beaurepaire et Hermant, 2012 ; Beaurepaire, 2014). La seconde approche est associée au projet Mapping the Republic of Letters mené par Dan Edelstein et Paula Findlen à Stanford. Ces approches soulignent d’abord l’hétérogénéité des réseaux au-delà des structures des Lumières françaises centrées sur Paris, Berlin et Saint-Pétersbourg au gré des mobilités des savants français. Les correspondances de Voltaire et celle de d’Alembert offrent des représentations contrastées. Ces techniques de visualisation montrent qu’à l’intérieur de la République des lettres se dessinent des espaces de circulation régionaux : premièrement, le Sud de la France, l’Italie et l’espace méditerranéen autour de Esprit Calvet (1728-1810) ; deuxièmement l’espace anglo-hollandais ; troisièmement l’espace baltique ou encore les relations transatlantiques, à l’exemple de la correspondance de Benjamin Franklin (1706-1790). La correspondance est ainsi articulée au réseau des académies et à celui du grand tour [Voyage de formation*] ou encore des journaux savants et des centres éditoriaux. Ainsi, autour de Francesco Algarotti (1712-1764), ami de Voltaire et de Lady Wortley Montagu, conseiller de Frédéric II et d’August III elle montre l’interdépendance de l’Académie royale des sciences avec l’institut des sciences de Bologne. Ces travaux mettent en valeur aussi les réseaux sociaux qui de ville en ville soutiennent les échanges savants.

Crise et limites de la République des sciences

9Dans la seconde moitié du XVIII^e siècle, cet idéal entre en crise pour plusieurs raisons (Massau, 1992). D’abord, le modèle des réseaux personnels centrés autour d’un individu est dépassé par les réseaux académiques. Cependant, il est bien difficile de montrer la manière dont ces réseaux s’articulent. On n’est pas encore sous l’Ancien Régime dans un système international d’échanges des savoirs scientifiques. Si une première forme d’internationalisation existe, elle se fait selon des figures multiples. Contre un espace considéré comme homogène et fluide (ce qui neutralise la question de la circulation, la rend inopérante et inutile), certaines études ont souligné l’importance d’analyser la matérialité des réseaux en pointant trois éléments : sa genèse et sa stabilisation (sa durée, sa robustesse) ; sa fragilité (dépendant de relations interpersonnelles) ; sa fragmentation spatiale. Jean Pierre Vittu dans sa reconstitution du réseau de correspondants de l’abbé La Roque, rédacteur en chef du Journal des savants, suggère que l’espace savant ainsi esquissé ne saurait se confondre avec l’espace prétendu homogène de la République des lettres, mais au contraire tisse une configuration de positions inégales, sans qu’il y ait interactions nécessaires entre tous ces protagonistes. Ensuite, l’institutionnalisation des pratiques savantes met l’accent sur une concurrence des modèles de sociabilité comme l’a montré Mario Biagioli où il confronte trois modèles : celui de l’Accademia del Cimento ; celui de la Royal Society et celui de l’Académie royale des sciences [Académies*]. Les différents réseaux académiques fonctionnement comme des réseaux circulatoires, qui détournent ou mobilisent à leurs profits d’autres réseaux, diplomatiques, religieux ou commerçants. La critique de ces institutions devient aussi un élément qui décrédibilise la République des lettres. Dans les controverses affleurent plusieurs types de critique : on accuse d’abord les savants de la République des lettres d’être éloignés des préoccupations du public, d’être des pédants et des érudits ; on leur reproche à l’inverse de s’éloigner du modèle du sage en s’appropriant les arguments métaphysiques des philosophes (valeurs anti-chrétiennes par exemple) ; enfin on pointe leur manque de compétences. Les combats de l’anti-philosophie finissent par contaminer les sphères de la République des lettres. Plusieurs auteurs comme Métra ou Pahin de La Blancherie annoncent la création de publications périodiques à l’échelle européenne pour relancer le rêve unitaire de la République des lettres sur de nouvelles bases en articulant un lieu de sociabilité (le musée), une correspondance et un journal [Publics*].

10Les ordres de l’information, loin d’être cumulatifs, entrent en compétition et en conflit les uns avec les autres. Déjà en 1667, Oldenburg pouvait avertir Robert Boyle des dangers que représentait le réseau jésuite (Feingold, 2003) :

« Pour donner à la Royal Society une correspondance couvrant le monde entier d’employer les missionnaires…, sur cette dernière proposition, je doute grandement des intentions de ces voyageurs, dont le but principal est de propager la foi, et de grandir et de s’enrichir eux-mêmes par leur ruse ; cependant je ne dénie pas à certains d’entre eux aussi une ingéniosité et une curiosité pour la philosophie de la nature ; mais ceci étant, je doute que nous soyons obligés, ou au moins que ses propres membres se sentent obligés de relever certaines observations, et je crois qu’ils auraient mauvaise grâce à communiquer avec des hérétiques, sauf s’ils étaient sûrs que ces derniers seraient bien requis pour ça. »

11Dans la seconde moitié du XVIII^e siècle, la guerre de Sept Ans met à mal les réseaux de correspondance ; par la suite, des tensions se font jour entre une nationalisation des espaces scientifiques structurés par les universités et les académies et les idéaux transnationaux d’universalité.