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Aux origines idéologiques de la Révolution

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Roger Dupuy

Le Héraut de la Nation (No 41 à 63)

N° 59. Mont-Joye Saint-Denis. Le Héraut de la Nation sous les auspices de la patrie

Mangourit

Texte intégral

Etats-Généraux

Arrêté de la majorité de l’Ordre du Clergé, du Vendredi 19 Juin

1LE Clergé ayant mis en délibération la proposition de l’Assemblée Nationale de soumettre les pouvoirs de ses Députés à une vérification commune, cent vingt-huit ont été de cet avis, et neuf voix ont été incertaines, à cause de leurs amendemens et réserves. Afin de conserver à la négative l’avantage de la majorité, au moment où l’on invitait les avis écartés à se rapprocher des deux avis dominans, le Président et les partisans de la vérification privée ont cru lever la séance, et le parti de M. l’Archevêque de Paris a quitté la Salle, malgré les réclamations des autres partis qui sont restés, et qui ont continué la séance. A leur tête étaient Messieurs les Archevêques de Vienne et de Bordeaux, et l’Evêque de Chartres. Les neuf qui avaient voté avec amendement et réserve, se sont réunis aux cent vingt-huit, et l’arrêté suivant a été rédigé et signé.

La pluralité des Membres du Clergé assemblé, a été d’avis qu’il sera procédé à la vérification définitive des Pouvoirs dans la Salle de l’Assemblée générale, sous la réserve expresse de la distinction des Ordres, et de tous nos autres droits.

2Le lendemain la majorité s’est encore renforcée par la réunion de plusieurs Députés absens, et, entr’autres, des Evêques de Coutances et de Rhodès, et la minorité a aussi acquis quelques secours, en sorte que la première est fondée sur cent quarante-huit voix, et la seconde sur cent trente-six. La jonction du Clergé devait s’opérer ledit jour ; mais... avant de parler des événemens qui l’ont empêchée, nous devons le récit de quelques préliminaires.

3M. le Duc de Luxembourg, Doyen de l’aggrégation noble, fit un Discours au Roi, dans lequel, en peignant l’attachement de la Noblesse, son respect et son attachement inviolable pour la personne de Sa Majesté, il se plaignit que l’esprit d’innovation menaçait la constitution ; il témoigna la sensibilité de la Noblesse rapport à la réponse du Roi à leur arrêté ; et critiquant avec amertume celui de l’Assemblée Nationale, il finit par cette vérité, toujours contestée par les opprimés, que les intérêts que la Noblesse défend, ne lui appartiennent pas à elle seule, mais qu’ils sont ceux du Roi, de l’Etat, et du Peuple Français. – La réponse du Roi fut très-paternelle ; il excita la Noblesse à adopter les vues de conciliation que Sa Majesté avait proposées.

4Les Aristocrates de la première classe jugeant que l’éloignement du Roi de l’Assemblée Nationale (éloignement qu’ils avaient amené avec leur adresse ordinaire) devait leur être de la plus grande utilité, que jamais circonstance ne s’était aussi bien présentée, et qu’il fallait en profiter avec la plus prompte célérité ; surs d’ailleurs d’être puissamment secondés : les Aristocrates, dis-je, formèrent, dans le plus grand secret, la chaîne, pour porter au Peuple, croyaient-ils, le coup le plus foudroyant. Ils envoyèrent des Députés, sans apparence de mission vers Sa Majesté, et firent en même temps avertir tous ceux qui se souvenant qu’ils étaient nés Gentilshommes, leur avaient voué assistance, en vérité l’on ne sait pourquoi.

5Les Missionnaires cabalistiques dûrent se jetter aux pieds du Roi, déplorer le renversement du Trône, se plaindre de l’audace d’une aristocratie bourgeoise, et représenter à Sa Majesté que le salut de l’Empire dependait du renvoi du Ministre et de l’emploi des lettres-de-cachet. Pleurant comme des Caymans, des Pasteurs, dit on, calomnièrent les brebis. On obtint une Séance royale pour le lundi, et une suspension de l’Assemblée Nationale jusqu’à ce jour. Des Troupes furent commandées pour s’emparer du dedans et des approches de la Salle des Etats-Généraux. On prétend que ce fut M. Dépresmenil qui donna ce perfide conseil, en observant que l’appareil militaire en imposerait ; il ne se souvenait donc pas que ce fut cet appareil qui empêcha la consolidation des loix du 8 Mai, et sa métamorphose en crustacée des îles de Sainte Marguerite.

6Le 20 Mai, lorsque M. Bailly, Président de l’Assemblée Nationale, se présenta pour entrer dans la Salle des Etats-Généraux, l’entrée lui en fut refusée. Il insista ; l’Officier qui commandait ses troupes dut se permettre une réponse d’autant plus indécente, qu’il manquait à la Nation. On s’assemble au jeu de paume, dans l’Eglise de Saint Louis ; on jure de ne se jamais désunir. Ainsi la tempête s’annonce ; ainsi l’affreuse guerre civile menace les seuils paternels ; ainsi les révolutions de la superficie du globe, semblables à celles de l’intérieur, sont précédées d’explosions lointaines, de tremblemens silencieux !...

7L’on ne profère pas une parole. Les mots Séance Royale ont rappelé l’énergie vers le cœur. Lame de l’Etat ne divise plus ses rayons, et ne dispense plus au-dehors sa force bienfaisante. Il semblerait qu’elle en eût besoin pour une haute et nécessaire entreprise, ou plutôt elle embrasse les facultés de tous les Représentai des Français. En effet, ils n’ont qu’une ame assez active pour pénétrer celles de tous ceux qui leur ont confié leurs volontés. Ils devinent le coup affreux qui les menace mais semblables à ces vénérables Sénateurs qui se firent placer sur leurs curules quand nos pères s’emparèrent de Rome, ils attendent le fer des vainqueurs, sans éprouver le sentiment de la crainte... Encore une fois, Citoyens, les Brennus et leurs Druides seront surpris par un nouveau Camille ; les Romains ne donneront point leur or, et les fausses balances des Gaulois seront brisées.

De par le Roi

Le Roi ayant résolu de tenir une Séance Royale aux Etats-Généraux, lundi 22 Juin, les préparatifs à faire dans les trois Salles qui servent aux Assemblées des Ordres, exigent que ces Assemblées soient suspendues jusqu’après la tenue de ladite Séance. S. M. fera connaître, par une nouvelle proclamation, l’heure à laquelle elle se rendra, lundi, à l’Assemblée des Etats.

8En vérité, le Rédacteur de cette proclamation a découvert et manifesté un bien ingénieux prétexte ! Quels préparatifs sont donc nécessaires dans les deux salles où le Roi n’entre point, et dans deux salles qui dans peu seront désertes ? de quels préparatifs est-il besoin, quand le père vient en famille ?

9Ah ! Messieurs les Aristocrates, vous ne jouez, ni n’écrivez en Aristes. Cette proclamation n’est pas la première preuve, depuis votre schisme, que vous ne savez pas écrire. Voyons si vous savez gouverner votre partie d’échecs.

10Vous avez toujours cru, (et ce systême vous a si long-temps réussi, qu’on vous pardonne d’y croire encore), que la terreur était un puissant moyen. Oui, sur des sauvages, des hommes stupides, des enfans et quelques femmes ; mais, Messieurs, la Nation n’est plus un troupeau parqué ; elle veut vivre comme les Castors, et elle a de plus que cette espèce, un Roi qu’elle adore et des armes pour assurer l’honneur de sa Couronne, et la liberté française. Ainsi vuidez votre carquois, lancez vos dernières flêches contre nous, et jetez-vous dans des bras qui s’élancent pour vous pardonner.

11La Séance royale fut retardée jusqu’au Mardi 23. Le génie des Richelieu, des Letellier, des la Chaise, des Saint-Florentin, fut évoqué le Lundi par ceux-là même auxquels il avait été si funeste. Des Lettres-de-cachet furent expédiées contre le Duc d’Orléans, les Archevêques de Bordeaux et de Vienne, MM. Bailly, Rabaud de Saint-Etienne, Target, Mirabeau, etc. Une fois qu’on se décide au papier château, on le fabrique comme du papier monnaie. Pour payer les services du plus grand Administrateur, sa lettre close l’exilait à Genêve. Quiconque eût été à la Cour ce jour-là, eut pu dire, comme le Bazile de Beaumarchais : Mais, qui trompe-t-on ici ? tant la manœuvre était habilement ourdie !

12Au dîner de la Reine, Sa Majesté fut très-affectueuse. Elle prit dans ses bras Monseigneur le Dauphin, et causa le plus vif attendrissement. (V p. 786 du Hér. de la Nat.). La fortune ne quitta plus les drapeaux de Marie-Thérèse, lorsque les Hongrois jurèrent de périr pour soutenir la cause de son fils ; qui naquit Français, n’a pas besoin de prononcer un tel serment.

13Mais les Aristocrates répandirent que la Noblesse assistait au dîner de la Reine, que la Reine avait mis son auguste fils sous la sauve-garde des Nobles, et que ses regards avaient semblé implorer d’eux l’assistance la plus entière contre les Représentans du Peuple Français. – Ceux-ci ne furent point trompés par ces insinuations perfides, ils ne soupçonnent point la Compagne du meilleur des Rois ; ils persistèrent dans l’espérance de sa protection envers un Peuple qui sans cesse occupé de ses devoirs et de ses travaux, n’avait ni le temps ni la méchanceté de compasser des fables calomniatrices et injurieuses à l’honneur de ses Princes. En effet, si des bruits infâmes, si des mémoires atroces ont été répandus avec profusion dans cet Empire, si les moyens les plus impies ont été employés pour affaiblir le culte légitime et sacré que les cœurs Français rendent à leurs Souverains, doit-on en accuser le Peuple le plus industrieux et le plus doux de l’Univers ?... C’est à la rage incurable de l’aristocratie qu’il faut attribuer la naissance et le cours de ces anecdotes infâmes, semées par l’imposture dans toutes les classes du Peuple, afin de le détacher de l’amour qu’il porte à ses Rois, et d’en revêtir d’indignes usurpateurs.

14Attentifs à suivre les mouvemens de notre Souveraine, épiant jusqu’à ses regards, s’érigeant en augures de ses pensées les plus secrètes, les Aristocrates ont envenimé tout ce qui n’avait pas de caractère déterminé ; et dénaturant tout ce qui tendait à rendre la Nation idolâtre de la meilleure des Princesses, ils ont poussé la scélératesse jusqu’à lui ravir les derniers sentimens du grand Dauphin, tandis que les dernières pensées de ce Prince se partagèrent entre elle, son père et la mort inflexible.

15O ! monstres dénaturés, vipères dont les poisons sont les seuls principes de votre odieuse vie, habitez-vous les chaumières des villageois et les atteliers des villes ? Non. Linnocence et l’industrie vous livrent la plus juste des guerres.... Rassemblés dans les masures gothiques, dans les ruines féodales, vous n’en sortez la nuit que pour célébrer vos hideux accouplemens avec la race des serpens de Laocoon, tum gemini angues... vous les trouvez et dans les Temples de la triple Hécate et dans le Palais des Rois.

16M. l’Archevêque de Bordeaux, ce vénérable Pontife, ce vertueux Gentilhomme, ce Breton qui soutient seul l’honneur des hermines de l’Armorique, a fait un Discours si sublime en faveur des Peuples, que le Président de l’Assemblée Nationale a dit qu’on devrait l’imprimer en lettres d’or.

17Le 23, Séance royale, à laquelle n’assista point M. Necker. Pressentant l’effet qu’elle produirait, il s’était abstenu de paraître l’approuver par sa présence ; il avait offert sa démission, et si elle eût été acceptée, on pouvait s’écrier avec douleur : Vélum templi scissum est ! Le voile du Temple National est déchiré, la France recule vers les temps d’ignorance, le crédit public est perdu, la banqueroute est ouverte, la confiance est éteinte, l’Etat est en danger, les factions font flotter leurs bannières, la discorde compte la population de l’Empire, et les furies accourent pour l’anéantir.

18Une Déclaration pour la tenue des Etats-Généraux, une Déclaration des intentions du Roi, contenant cinquante articles, sont encadrées dans trois Discours de Sa Majesté. – Nous n’en ferons aucun extrait : les personnes qui font des recueils se pourvoiront de cette pièce à l’Imprimerie Royale, et la joindront sans doute aux Ordonnances et Déclarations du 8 Mai 1788. Les Journalistes patentés ne manqueront pas d’en faire mention.

19Lorsque le Roi se retira, plusieurs Membres de la Noblesse sortirent en laissant échapper une joie qui mit au fait de ce qui venait de se passer. Le Peuple éprouva les sensations d’un innocent condamné à la mort ; il s’absorba quelque temps dans la profondeur de son affliction : mais cette affliction n’était pas le produit d’une peine justement encourue, pénétré de la bonté du cœur du Roi, il était indigné qu’on se fût servi de son desir de concilier tous les intérêts, pour soumettre, en trompant Sa Majesté, vingt-quatre millions d’hommes au joug de deux à trois cents mille Aristocrates. Il devait résulter nécessairement, de ces grandes réflexions, l’explosion la plus inquiétante, et l’effort le plus démonstratif de la surprise faite au Prince le plus digne d’être éclairé.

20Aussi, quand les Membres de cette tribu préjugée la dernière classe des Français, le dernier chaînon de l’espèce nationale, se montre digne de l’égalité ; quand le peuple de Versailles, compté jusqu’alors comme l’esclave avili du despotisme, se rassemble aux grilles du Château pour faire pénétrer, jusqu’à la chambre du Roi, les cris du respect et de la douleur ; lorsque, pour étouffer de si justes clameurs, pour dérober à l’air les messages de la liberté, l’attentive aristocratie invite les Gardes Françaises à se baigner dans le sang ; lorsqu’elle crie aux armes, les Députés de l’Assemblée, agités par tous les sentimens, excepté celui de la terreur, se présentent à l’Audience de Sa Majesté.

21Mais des baïonettes semblent interdire pour jamais la communication entre le Roi et son Peuple. Parvenir à imprimer, dans l’ame du Souverain, la haine contre la Nation, et à répandre au sein de la Nation la défiance contre le Souverain, voilà le sublime et dernier effort des co-tyrans ; voilà le chef-d’œuvre de leurs menées oppressives !

22Ils ne réussiront point, ces projets désastreux, ces vues odieuses, qui, s’ils ne ramenaient pas des temps déplorables, seraient plus sinistres dans leurs effets, pour la prospérité de ce Royaume, que la révocation de l’Edit de Nantes. Je ne fais aucun doute qu’il n’y eût une émigration presque générale, et l’on verrait au dix-huitième siècle des évasions françaises, plus nombreuses encore que celles qui couvraient autrefois l’Europe et l’Asie de Colonies Gauloises ; mais dès ce jour, le vertueux Monarque sera détrompé ; dès ce jour il rappellera le Sully, que les infâmes Conchini ont voulu écarter de sa personne.

23Les Gardes Françaises n’obéissent point au terrible signal. Ce Corps, plus illustre par sa modération que par des succès achetés dans mille combats, mérite la reconnaissance de toute la France. Elle lui doit un jour pur, un grand jour dans son histoire ; elle lui doit la paix de son immense famille, l’honneur de ses enfans égarés, et l’espoir certain de la régénération publique. Ils ont été les instrumens du bon ordre, et non des assassins : ils réveillent dans nos esprits ces mémorables paroles d’un vertueux militaire : Je n’ai trouvé que des Français, et pas un bourreau. Ah ! si le malheureux Charles IX avait eu de semblables troupes ce Roi plus à plaindre qu’à vouer à l’anathême des Nations, ce prince infortuné n’eût pas consenti à donner le signal de la mort contre ses sujets ; il n’eût pas excité le massacre, en tirant sur eux d’un balcon du Louvre : et l’immobilité de ses Gardes l’eût mieux et plus promptement instruit de l’opinion publique, que les efforts astucieux de ses Conseillers exécrables n’avaient mis de temps et de soins à la lui dérober.

24Le despotisme frémit de voir les baïonettes, immobiles ; une blessure faite par ses ordres pouvait faire verser des flots de sang ; mais les Prétoriens français n’obéissent qu’à la voix du Souverain ; instrumens de la force publique, ils sont assez patriotes pour sentir qu’ils ne le sont pas de la cruelle tyrannie ; ils sont assez éclairés pour connaître la noblesse, la grandeur de leurs fonctions. Défendre le Roi et l’Etat, s’opposer à l’ennemi intérieur et extérieur, voilà des fonctions trop belles pour être avilies. Aussi, ces respectables amis des Alpes dont la Nation fut presque toujours bien servie, ces libres enfans de la Nature qui ne répandirent tant de sang pour nous, que parce qu’ils nous estimèrent assez pour nous juger capables un jour d’atteindre à leur hauteur, les bandes suisses étaient déterminées à contribuer au maintien du bon ordre, et à n’employer, pour y parvenir, s’il était troublé, que l’appareil de leur discipline. Un de leurs Officiers supérieurs avait répondu de leur immobilité, si des ordres injustes étaient surpris à la religion du Monarque. « Nous ne tirerons pas, avait-il dit, sur un Peuple qui nous traite en frères ». En cela, assure-t on, il était l’organe de sa république. D’un autre côté, les Gardes Françaises avaient écrit une circulaire à l’armée cantonnée aux environs de Paris, à cette armée rassemblée d’après le conseil donné à la Régente par M. de Senneterre (Voyez le N° précédent). Leur arrêté avait été porté à chaque Régiment par des Gardes Françaises, afin de s’en assurer la remise. D’après toutes ces précautions, les Denys de Syracuse pouvaient bien écouter ce que le Peuple pensait d’eux, mais ils n’avaient pas une baïonette pour les venger de la trop juste opinion. Se fiant dans une partie de la Nation armée, ils se croyaient assez forts pour outrager l’autre, et la mettre dans les fers ; mais les insensés ! ils n’avaient pas songé que la casaque militaire recouvrait des vêtemens citoyens, et qu’à l’exception d’une centaine d’Officiers dont au moins la moitié avait l’ame nationale pour animer un cœur guerrier, les Régimens n’étaient composés que de plébeïens attachés à la cause commune. Ainsi, la révolution de l’Empire le plus superbe de l’Univers, devait s’opérer par la force seule de la raison. Les guerres civiles, les désordres antérieurs, le despotisme même, n’étaient que des préparations nécessaires pour amener le beau règne de la liberté, pour créer un Gouvernement combiné de manière que la Royauté et la Nation, cessant leurs luttes dangereuses, fussent forcés, pour exister l’un et l’autre, de s’identifier aussi intimement que lame et le corps humain, afin de donner la vie et le mouvement au bonheur public. On peut comparer les troubles qui n’ont cessé d’agiter la France depuis Henri II, à ces volcans antiques, qui n’ont dévasté les contrées qui les environnaient que pour les préparer par leurs sels bienfaisans à la fertilisation. Dès que leurs feux se sont éteints, la Nature a remis ces contrées sous son obéissance, et l’homme qui n’avait plus à redouter pour sa vie et ses propriétés ces torrens de lave qui engloutirent ses devanciers, leurs troupeaux et leurs champs ; l’homme dont le travail est plus facile, et pour qui les rapports de la culture deviennent une source intarissable de richesses, ne pleurera plus de désespoir en recevant de son épouse un nouveau gage de tendresse ; l’impuissance d’exercer l’hospitalité ne déchirera plus son cœur. Il ne connaîtra la sensibilité que par les jouissances qu’elle fait goûter : quand il verra son Roi et son père, sa femme et sa patrie, ses enfans et ses concitoyens, des larmes saintes couleront sur ses joues, et il s’écriera : Deus, Deus ! nobis hœc otia fecit.

(La suite au N° prochain).

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