L’« influence » politique au temps du suffrage universel
p. 289-302
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Texte intégral
1D’abord, effaçons-nous derrière trois textes, d’âge légèrement différent. Voici en premier lieu un sous-préfet de la République, troisième du nom, commençante et encore mal installée. Le fonctionnaire rend compte d’une abstention électorale que ses supérieurs ont estimée étrange :
« Il ne serait pas absolument vrai d’attribuer uniquement cette abstention à une certaine lassitude ou à de l’insouciance à l’endroit du droit de vote, non plus qu’à la gêne pour beaucoup de se déranger pour l’exercer à des distances considérables. Il est une autre impression, et celle-là plus grave assurément, qui pour un bon nombre d’électeurs les détourne, et on peut le dire, les dégoûte d’aller exercer leur droit de suffrage. C’est pour certains conservateurs plus ou moins importants quant à leur position d’aisance ou de famille, la crainte souvent justifiée de voir leurs votes combattus, annihilés par les votes du nombre, de la masse souvent inintelligente, crédule et souvent aussi jalouse et ombrageuse à l’égard des supériorités quelles qu’elles soient, de position, de savoir ou de fortune. Il est incontestable que ce sentiment agit, bien à tort, mais enfin qu’il agit et inspire ainsi l’abstention1. »
2Ainsi s’exprimait le sous-préfet de Vitré, le 9 décembre 1874, peu de temps après les élections municipales faites sous l’Ordre moral. Texte étonnant : Daniel Halévy ne l’a sans doute pas lu et pourtant, comment ne pas y voir une intuition incertaine mais réelle de la fin des notables et de leur « influence » ?
3Deuxième témoignage divergent et pratiquement contemporain, celui d’un homme de la « base » qui récuse l’inéluctabilité de l’influence des notables, le « paysan rouge », Jean-Marie Déguignet, lors des législatives de 1876 :
« Les amis et protecteurs du candidat officiel avaient fait distribuer des brochures en français et en breton dans lesquelles la République et les républicains étaient flétris et maudits sur tous les tons. Le pauvre candidat républicain y était traité et caricaturisé [sic] de toutes les façons : en diable, en loup, en renard et en âne. Les jésuites et cléricaux, quoique sûrs du triomphe, avait cependant jugé à propos d’attirer à eux les paysans et les ouvriers par tous les moyens. Il mettait leurs agents en campagne avec des pièces de cent sous plein les poches, qui distribuait partout les discours et les boniments appris par cœur, et brochures, des journaux, des cigares et du guin ardent. […] Mais la plupart de ceux qui avaient été se restaurer au château passèrent chez moi après pour me demander des bulletins au nom du candidat républicain. Je leur en avais donné, en leur recommandant de les bien ployer et de les cacher dans leur gilet ou leurs manches, car le sire Malherbe pourrait bien les fouiller avant de leur donner les bulletins blancs, le lendemain.
[…] Il descendit de voiture, offrit encore à boire à ceux qui en voulaient, ensuite il les mit en rangs sur la route et leur donna à chacun un bulletin blanc bien ployé dans la main. Il ne les fouilla pas. La distribution terminée, il commanda par le flanc droit et les conduisit ainsi jusqu’à la salle du vote, marchant derrière eux pour les empêcher de prendre d’autres bulletins. […] Moi qui me tenais aussi vers l’entrée de la mairie, je souriais aussi car je voyais la plupart des électeurs en sortant du scrutin derrière leur conducteur pour aller encore l’auberge boire, manger, toujours au compte de M. le comte, me faire du doigt et des yeux des gestes significatifs qui voulaient dire : Le vieux est roulé, allez2. »
4Troisième texte, plus tardif, celui d’un journaliste de droite des années vingt, Camille Aymard.
« Je me souviens avoir entendu raconter par M. Poincaré comment il était devenu député, et comment, par la suite, il avait pu devenir ministre, Président du Conseil, Président de la République.
M. Raymond Poincaré était chef-adjoint de cabinet d’un quelconque ministre de l’Agriculture. Un siège de député étant devenu vacant dans la Meuse, dont il était originaire, il décida de poser sa candidature.
— Votre sort, lui dit-on, dépend de M. X…, conseiller général. S’il vous appuie, vous serez élu sans coup férir. S’il vous combat, vous êtes battu d’avance.
M. Raymond Poincaré alla voir M. X… C’était pendant l’été. Quand il se présenta à la ferme, on lui dit que M. le conseiller général était aux champs, en train de rentrer son foin. Le candidat partit à sa recherche.
Quand il lui eût exposé sa requête :
— Que faites-vous dans la vie ? Lui demanda le vieux paysan. […]
— Je suis chef-adjoint du cabinet du ministre de l’Agriculture…
— Alors, mon ami, lui répondit le vieux paysan, qui devait être un aimable pince-sans-rire, vous devez savoir rentrer une charrette de foin ? Tenez, prenez ma fourche, chargez cette fourragère, et si vous vous tirez à votre avantage de l’épreuve, je suis votre homme.
J’étais jeune, racontait M. Poincaré. Je désirais vivement être élu. Je chargeai prestement la charrette de foin et, tout en sueur, j’interrogeais du regard mon terrible électeur. Celui-ci, au frais sous un arbre, me regardait en souriant.
— Allons ! Ce n’est pas trop mal pour un débutant, me dit-il. Je vous appuierai.
— C’est ainsi, concluait M. Poincaré, que je devins député, puis ministre, Président du Conseil, Président de la République. Tout de même, à quoi a tenu le sort de toute ma carrière3 ! »
5Peut-être. Car cette « influence » a constitué longtemps une composante majeure de la manière dont élus, observateurs, fonctionnaires analysaient la façon dont certaines catégories sociales transmettaient des conseils ou directives qui pouvaient orienter le vote des électeurs le jour du scrutin. C’est bien ce qui nous retiendra ici et cela seulement : l’influence des notables sur le corps électoral au temps du suffrage universel. Paradoxe : en France, depuis 1848, chacun semble maître de son choix final ; bien avant l’introduction de l’isoloir (1914)4, l’électeur est libre de déposer dans l’urne un bulletin plié et donc anonyme, voire d’amener de chez lui un bulletin déjà rédigé ; en principe, les « notables » ne sauraient donc avoir sur lui aucune « influence ». Dans la réalité, nous savons bien que les choses étaient différentes.
6Établissons d’abord que l’influence telle qu’elle est ci-dessus énoncée (mais jamais définie, tant elle semble une donnée immédiate de la conscience politique) est à la fois proche et distincte des définitions qu’en ont donné Talcott Parsons ou Herbert Kelman5. Herbert Kelman, en 19586, énonçait trois principes différents d’influence, la soumission, l’identification et l’intériorisation. Les trois modes dessinent une hiérarchie, allant du plus petit au plus grand niveau de conformité. La soumission est le résultat d’un calcul utilitaire. L’autre peut user à notre égard de sanctions négatives, pécuniaires, professionnelles, nuisant à notre réputation, à notre honneur, à notre entente avec nos proches – et donc le mieux est d’obtempérer à ses injonctions. L’identification associe symboliquement notre comportement et celui d’autrui, jugé par nature supérieur. L’intériorisation assimile l’image ou le système de valeurs d’autrui, posé comme excellent, au nôtre ; nous nous approprions donc le système de l’autre. On a contesté que le premier mode relève à proprement parler de l’influence. C’est une querelle de « savants ». Comme on va le voir, les praticiens de la politique, dans le cadre qui nous occupe, combinaient les trois modes sous le nom d’influence sans avoir jamais lu Kelman.
7Talcott Parsons7 disjoint complètement pouvoir et influence : le pouvoir implique la contrainte, donc en dernier recours l’appel à la force physique, alors que c’est sur l’intention qu’agit l’influence, en faisant trouver aux « influencés » des raisons positives – réelles ou imaginées – de se conformer aux suggestions extérieures. Parsons y ajoute une distinction entre l’influence proprement dite et l’incitation qui fait bien appel à des pressions certes positives, par exemple une promesse crédible, une distinction valorisante ou le versement d’une somme d’argent8, mais qui n’en demeurent pas moins des pressions. L’influence véritable repose, elle, sur la persuasion qui suppose une participation active de l’influencé. « Il ne peut y avoir, aux yeux de Parsons, une influence directe des objets et des personnes sur l’acteur social ; c’est toujours ce dernier qui réinterprète les choses et les revêt d’une signification9. » Il n’y a donc pas d’influence sans que l’élément dominant ait « gagné la confiance » de celui qu’il influence10.
8Or, l’influence telle que la définissent – ou plutôt ne la définissent pas – nos locuteurs du xixe siècle participe à la fois d’une forme de soumission d’habitude, ainsi que d’identification et d’intériorisation en proportions variables. Mais aussi, on va le montrer ci-dessous, de l’exercice d’une forme de pouvoir qui n’est pas nettement distinguée de l’influence – avec menaces de sanctions très réelles à la clé si le « bon » aboutissement n’est pas obtenu, sanctions collectives faciles à déduire du résultat, ou même sanctions individuelles si l’on parvient à déterminer qui a voté quoi – ce qui n’est pas tout à fait impossible.
Des hommes d’influence
9Lorsqu’il publie le Recueil des adhésions adressées au prince président, à l’occasion de l’acte du 2 décembre, le gouvernement énonce assez tranquillement les catégories de personnes qui ont suscité ou rassemblé des adhésions au Prince-Président et donc qui peuvent légitimement être considérées comme porteuses d’« influence », le mot étant utilisé à propos du clergé – et des instituteurs qui, à l’époque, y sont très liés :
« On a cru devoir faire des Maires une catégorie distincte des Conseils municipaux […]
Il n’est pas besoin de justifier la raison pour laquelle les Curés ou Desservants forment une catégorie particulière en dehors de celles des fonctionnaires proprement dits […]. Une considération analogue a fait assigner une classification spéciale aux ministres des autres cultes autorisés (protestants ou israélites), ainsi qu’aux Instituteurs qui tous, à des degrés divers quoique inégaux, sont en possession d’exercer ou de représenter des fonctions d’une influence spirituelle11. »
10Il existe donc des catégories de personnages qui, en tout cas à la campagne sont préposées à exercer une influence institutionnelle sur leurs compatriotes. Le Second Empire usera fortement et longuement de leur pouvoir, mais la IIe République commençante n’aura guère un comportement différent. Gabriel Leroux, préfet de combat en Ille-et-Vilaine, se dépensera sans compter pour assurer la victoire républicaine aux élections municipales de 1896. « Les opportunistes et les radicaux ont fulminé jadis contre la candidature officielle et les préfets autoritaires de Napoléon. On voit que toute cette belle vertu était de la fumisterie, et qu’une fois au pouvoir, ils n’ont eu rien de plus pressé que de jouer à leur tour aux Féart12. » Reste que l’influence ne s’exerce pas de la même façon partout et par tous. On citera entre mille exemples ceux qui suivent.
Les juges de paix
11Magistrats amovibles, révocables ad nutum en fait sinon en droit, déplaçables, mais en même temps très proches de leurs justiciables, connus de tous et s’occupant des plus infimes affaires, les juges de paix avaient toutes les qualités pour exercer de « l’influence » en milieu rural. Cette influence relève de toutes les catégories « kelmaniennes » : le juge est prestigieux (aux yeux des paysans), instruit (un peu), détient une part de l’autorité de l’État et peut prendre des décisions impliquant sanction, gêne, déception13. Un exemple entre mille :
« M. Brulé, je l’ai déjà dit, n’est pas républicain : il serait, par suite, inutile de chercher en lui un adhérent au Gouvernement actuel : l’administration l’a si bien compris qu’elle l’a remplacé dans ses fonctions de Maire. Cependant, il est un fait certain, c’est qu’il n’envisageait pas d’un œil favorable la candidature de M. Rouxin notoirement connu pour être attaché au parti impérialiste ; il l’avait même combattu, en 1869, pour appuyer la candidature légitimiste de M. de Lorgeril ; ce ne fut que sur les ordres de l’administration et sur les instances de quelques personnages importants, qu’il prit parti pour M. Rouxin, au mois d’octobre dernier. Il le fit naturellement à l’aide de l’influence dont il dispose et des nombreuses relations que ses fonctions lui ont créées14. »
« Il a agi de même en faveur de M. Guibert pour le Conseil Général, et son action a pu lui créer des inimitiés d’autant plus vives que le concurrent de M. Guibert – M. Galène – habite La Ville-ès-Nonais15. »
12Il est possible que cette influence directe et voulue du juge de paix en matière électorale ait suivi une courbe descendante : maximale sous le Second Empire, elle reste vivace jusqu’en 1879, mais la IIe République aura tendance, si l’on suit J.-G. Petit et ses coauteurs, notamment Jean-Claude Farcy, à cantonner de plus en plus le magistrat dans ses fonctions judiciaires, lui demandant simplement soumission et obéissance passive.
13La nature de l’influence du juge de paix explique pourquoi les pouvoirs publics s’intéressent moins à l’« influence » des autres magistrats : plus éloignés du public, hommes de pouvoir en puissance de sanctionner de manière bien plus dure, ne constituant à aucun degré des entraîneurs d’hommes, leur « influence » ne saurait s’exercer selon toute la palette requise. L’influence exige, même si le pouvoir ne s’en distingue pas dans la réalité, une possibilité d’identification. Celle d’un colonel sur ses soldats est possible, celle d’un procureur sur les prévenus ou d’un président sur les parties en conflit, évidemment pas.
Les maires et autres élus locaux
14Parmi les « petits » notables ruraux détenant une fonction officielle, le maire est l’homme dont l’influence est certainement la plus reconnue, la plus recherchée, la plus sollicitée et celle que les pouvoirs publics cherchent à définir le plus précisément. Si le mode de désignation des maires a fait problème durant tout le xixe siècle alors que personne n’a jamais pensé à élire les préfets ni à nommer les députés, c’est bien que la fonction faisait problème et que son importance, y compris dans les plus modestes communes, était ressentie comme fondamentale par tous les pouvoirs en vue de la tentative constamment poursuivie de maîtriser de la manière la plus rationnelle possible le territoire et les populations. Or, la loi majeure du 28 mars 1882 accordait à toutes les communes, sauf Paris, le droit d’élire leur maire sans aucun contrôle de l’État.
15Aussi, lors des élections municipales de 1878 à 1888, les préfets et leurs subordonnés ont été littéralement obsédés par cette question : le maire élu a-t-il ou non de « l’influence » ? S’il est du « bon » côté (républicain), on s’en félicitera ; sinon, il faudra le tenir à l’œil. S’il n’a pas d’influence (cela arrive), on pourra le négliger mais à l’évidence ce n’est pas la configuration idéale : un maire sans influence laisse la porte ouverte à toutes les pressions inorganisées. Encore en 1888, alors que la République est bien installée, ce caractère demeure essentiel. Ainsi en Ille-et-Vilaine. À Saint-Aubin-du-Cormier16, le maire réactionnaire, Joseph Thomas, a « une assez grande influence sur le canton ». Il en est de même du maire de Grand-Fougeray, Jean-Marie Chapin, notaire réactionnaire, qui possède une « influence assez sérieuse ». Mais on trouve des mentions similaires pour les républicains : à Bain, Henri Guérin, propriétaire, « républicain très ferme, très estimé » a aussi une « grande influence dans le canton ». Selon le sous-préfet de Redon, sa « situation […] lui assurait le succès qu’il a obtenu17 ». À un échelon supérieur, voici Ferdinand de La Riboisière, maire de Louvignédu-Désert, de l’illustre famille de serviteurs du Premier Empire, seul aristocrate à être qualifié de « républicain sincère » et dont on note la « grande influence » non seulement sur le canton, mais, fait exceptionnel, sur tout l’arrondissement de Fougères, dont il est ancien député.
16L’influence du maire peut se comprendre de plusieurs façons : notable local, connu, il peut faire l’objet d’un processus d’identification des administrés à un homme qui, même nommé, incarne la défense des intérêts locaux face à l’État ; qui est, même s’il est un notable, « de chez nous » ; qu’on a élu, lorsqu’il devient élu ; mais dont les pouvoirs, de police, d’administration, économiques, en matière d’urbanisme aussi peuvent faire redouter l’intervention. Ici encore, pouvoir et influence sont indissociables.
17Les conseillers généraux sont eux aussi des notables locaux en vue – et comme on l’a vu au début de cet article, des personnages politiques de premier plan les ont considérés comme des « hommes d’influence » majeurs. Constamment élus au suffrage universel depuis 1848, ils ont une grande légitimité, ils sont de plus très stables ; souvent notables du canton, gros propriétaires, médecins, notaires, avocats, marchands, assez souvent nobles, surtout dans l’Ouest, acteurs de la vie économique du département, ils ont souvent leurs entrées à la préfecture et même à Paris. Leurs moyens d’action juridiques et institutionnels sont faibles mais le contraste qu’offre cette faiblesse avec leur « influence », contraste qu’ils soulignent eux-mêmes ou que soulignent leurs amis, est saisissant.
« À vrai dire ce sont les conservateurs qui ont, comme toujours, montré le plus d’humeur pacifique. Dans d’innombrables circonscriptions, ils n’ont pas eu de candidats ; et, sous le prétexte mensonger que les élections cantonales ont une médiocre importance politique, bon nombre d’entre-eux [sic] ont accordé leurs suffrages à des candidats républicains. Pas d’importance politique ! Ils le verront au jour des prochaines élections sénatoriales ; ils le verront encore lorsqu’un intérêt religieux sera en cause devant tel ou tel conseil général18. »
18Un des fondements de l’influence des conseillers généraux (comme des maires, d’ailleurs) est leur durée, leur enracinement. Reste qu’il ne faut pas exagérer ce facteur. Dans l’arrondissement de Saint-Brieuc, entre 1871 et 1914, tous conseillers départementaux confondus (généraux et d’arrondissement), les plus nombreux assument un mandat de 6 à 12 ans (43 %) ; 18 % font encore moins bien. L’« influence », pourrait-on penser, commence vraiment au-delà19 : mais ces personnalités inexpugnables existent et beaucoup plus encore dans les cantons ruraux. À Saint-Brieuc ville, les mutations sont assez fréquentes ; mais le canton de Quintin est représenté par Guillaume Limon de 1877 à 1919, Pléneuf par Le Gal La Salle de 1854 à 1901, Lamballe par Haugoumar des Portes de 1871 à 1910 ; enfin, le record est détenu par Louis Armez, le très républicain conseiller général de Paimpol, de 1871 à 1919. À cette date, est-il battu ou prend-il sa retraite ? Pas du tout, il meurt – à la tâche20.
19Encore plus influents sont-ils s’ils cumulent ces charges avec des mandats nationaux, cas d’une minorité, ou l’animation d’un comité électoral important, ce qui est plus fréquent. Ils peuvent être plus influents que le préfet auprès de Paris et leur accord est alors indispensable au fonctionnement de l’administration locale.
Les propriétaires
20On risque par ce titre de donner l’impression que les « propriétaires » constituent un groupe social qui se distinguerait par sa nature même des précédents. Ce n’est évidemment pas le cas. Un « propriétaire » peut être – il l’est souvent – maire ou conseiller général. Mais il peut aussi, hors de toute fonction élective, agir en tant et uniquement en tant que propriétaire. Dans des départements possédant une hiérarchie sociale forte, les pressions sont nombreuses, et celle du « châtelain » demeure l’une des plus fortes. La structure sociale très archaïque du fait du régime foncier et du mode d’exploitation de la terre, là où elle existe, contribue à entretenir une relation quasi vassalique entre le propriétaire et le paysan exploitant. L’exemple de la Mayenne est un des plus nets. Les nobles, en général grands propriétaires terriens, sont pour cette raison les véritables dirigeants politiques de cette société. Dans cette œuvre de patronage, le prêtre devient, on va le revoir ci-dessous, l’allié politique, incontournable, du noble. Siegfried évoque le « condominium du presbytère et du château ».
21Mais l’« influence » des propriétaires ne doit pas être vue seulement comme une domination de type Ancien Régime. Les conditions d’exercice de la politique au temps du suffrage universel contraignent à user de manœuvres très diverses où la démagogie tient une place considérable. Le « monsieur » qui se distingue par sa morgue n’a aucune chance de devenir le « patron » politique de son secteur. Voyons dans le Finistère la famille de Mauduit, qui appartient à la plus haute noblesse de France :
« Ces Mauduit jouent un rôle important à Quimperlé. Henri […] ancien officier de mobiles, chevalier de la Légion d’honneur, est directeur d’usine. Il est robuste, entreprenant, assez sympathique, parle le dialecte du pays, plaît aux ouvriers et aux paysans en leur payant à boire. Il vise à la députation. Sa femme est une Clermont-Tonnerre21. »
22L’intervention directe des propriétaires pouvait d’ailleurs se faire de plusieurs façons ; deux semblent avoir été particulièrement efficaces, par les régisseurs et au moins autant par des personnages beaucoup plus modestes, les gardes particuliers. En 1900 encore, le marquis de Dion se fait élire conseiller général de Carquefou (Loire-Inférieure) en usant de son « influence » sur son régisseur sans aucun fard (lequel régisseur a dû à son tour user de son « influence » auprès des fermiers et locataires…).
« M. Briand est régisseur et intendant de M. le marquis de Dion, & en cette qualité, il va passer au moins une journée chaque semaine au château de Maubreuil, résidence du marquis ; dans ces conditions, tous les fermiers de ce dernier sont placés sous sa dépendance, n’ayant jamais affaire qu’à lui tant pour le paiement de leurs fermages que pour l’exploitation de leurs fermes22. »
23Les gardes particuliers constituent un autre moyen efficace de pression : on ne détaillera pas ici leur rôle complexe que nous avons étudié ailleurs23. Leur rôle seul d’instrument de pression nous intéresse ici : il est indéniable. La pesée sur des locataires, usagers de la forêt, chasseurs, pêcheurs est un mode des plus courants. La pratique est connue24 mais ce qui nous intéresse ici est l’utilisation fréquente du garde particulier pour l’accomplissement de ces basses œuvres. Tel cet exemple édifiant :
« Le garde Machard les jours d’élection circule aux alentours de la Mairie, racolant les électeurs et leur payant manifestement à boire dans les auberges réactionnaires, en laissant bien entendre que c’est au nom du marquis de Beaufort et pour qu’ils votent bien […]. Il a manifestement aussi employé des menaces et des intimidations envers des électeurs hésitants pour les inciter à voter contre les candidats républicains en leur laissant entendre que dans le cas contraire, ce qui serait toujours connue [sic], on leur enlèverait les terres qui leur ont été affermées25. »
24Ce genre de comportement, habituel, s’accentue en période de crise d’ampleur nationale. On ne voudrait toutefois pas laisser le lecteur sur l’impression que les « propriétaires » sont tous des nobles antirépublicains. Les propriétaires républicains ne devaient pas procéder autrement pour exercer leur « influence ». Simplement, leurs moyens n’étaient pas les mêmes. Le personnel républicain dans les campagnes entre 1870 et 1914 se distingue bien par une appartenance spécifique de classe au sens le plus banalement marxiste : petits propriétaires, notaires, médecins, commerçants26… Lorsqu’il fait l’inventaire des maires élus en Ille-et-Vilaine en 1888, le préfet classe comme « grand propriétaire » 21 personnes sur 35827. Sur ces 21 grands notables, 19 sont classés « réactionnaires », deux seulement républicains. Encore parmi ces deux derniers, faut-il compter Ferdinand de la Riboisière, qui « Réside à Paris, grande influence dans le canton et l’arrondissement » mais dont le républicanisme est très, très modéré28.
Le clergé
25Avec le clergé, on aborde un type d’influence un peu différent. Nous avons limité notre propos à l’influence de l’individu sur le(s) groupe(s). L’influence du clergé est souvent plus collective. Souvent, mais pas toujours. Disons que le discours clérical est en général assez uniforme, mais au fond, il se transmet par l’intermédiaire d’un ecclésiastique précis, curé, supérieur de couvent, évêque. Les fortes personnalités peuvent témoigner de façon voyante de ce mode d’influence29. Mais il est courant chez les autres. Dès 1848, à l’aube du suffrage universel, les préfets de Bretagne signalent le rôle du clergé dans la façon dont le vote s’est (mal) orienté. L’installation de la République n’améliorera évidemment pas la situation dans l’Ouest. Dans les années difficiles, le clergé pèsera de tout son poids – qui n’est pas mince – pour éviter ce qu’il voit comme une catastrophe nationale. Le 15 janvier 1876, peu avant les premières élections législatives sous l’empire de la nouvelle constitution, l’évêque de Saint-Brieuc adresse à tous ses prêtres cette lettre édifiante qui « n’est pas faite pour être lue en chaire » mais donne des instructions d’une précision absolue :
« O pauvre peuple, est-il donc vrai que toujours tu croiras ceux qui te trompent et te méprisent, ceux qui font servir ta loyauté crédule à leurs égoïstes ambitions ? Est-il donc vrai que toujours tu garderas tes défiances pour ceux dont la vie se passe à te servir, à t’aimer, à te faire du bien ? […] C’est à nous Messieurs, qu’il appartient de l’éclairer : grande mission n’a jamais été plus belle ni plus difficile qu’à l’heure présente ! Les préjugés vis-à-vis de la religion sont partout. […] La presse, cette puissance effrayante, inconnue à nos pères, n’a plus de freins. C’est le bélier qui frappe, frappe sans cesse la base de l’édifice ; c’est la voix qui retentit perpétuellement aux oreilles les moins attentives, et jette l’insulte à tout ce que le monde a jusque-là respecté30. »
Les modes d’influence
26Au total, l’« influence » telle que la définissent les autorités politiques s’exerce de nombreuses façons31. Tentons une esquisse de synthèse.
Par les pressions directes
27Jusqu’à Mac Mahon (et peut-être un peu après, mais de moins en moins), elles peuvent être le fait du maire qui par ses propos, son prestige, ses menaces éventuellement, donne véritablement des ordres. « M’sieur l’Maire, quoi donc que c’est qu’un bibiscite ? – C’est un mot latin qui veut dire oui. » Encore en 1878, lors des élections municipales, au lendemain du 16 mai, le maire de Breteil (Ille-et-Vilaine) n’hésite pas à user de toutes les bonnes vieilles méthodes contre les (pourtant) nouveaux maîtres de l’heure. Il fait distribuer à domicile, illégalement, ses propres listes en même temps que les cartes électorales32.
28La conduite collective des électeurs au bureau de vote semble avoir perduré longtemps ; en témoigne un avis du préfet des Côtes-du-Nord du 26 juillet 1904 :
« Le préfet des Côtes-du-Nord, officier de la Légion d’honneur, rappelle qu’en vertu de l’article 41 du décret organique du 2 février 1852 et de la circulaire ministérielle en date du 5 mai 1902, il est interdit d’amener en groupe les électeurs au scrutin, de les embrigader, et que l’entrée des lieux de vote et de leurs dépendances est exclusivement réservée aux électeurs se présentant individuellement pour user librement de leurs droits de citoyen. Toute entrave à la liberté du vote, tout fait de pression ou de corruption sera poursuivie selon la rigueur des lois. La gendarmerie est spécialement chargée d’assurer l’exécution des dispositions qui précèdent33. »
29Du même type d’influence relèvent les menaces de propriétaires envers leurs fermiers, etc. Doit-on distinguer les menaces du clergé en chaire (menaces de l’enfer par exemple) de ce mode de pressions ? Ce sont deux variétés d’un même type.
Par le prestige ou la reconnaissance de qualités variées
30L’influence peut aussi résulter des effets de l’admiration, de la reconnaissance intériorisée d’une supériorité sociale ou personnelle. Mais autant il est facile d’identifier les pressions, autant il est problématique de saisir les modalités d’une « influence » qui n’exerce aucune forme de contrainte, même morale. Comment se transmettent des façons d’agir (et ici, d’agir électoralement) qui n’entraveraient en aucune façon la liberté de l’électeur ? On pourra bien sûr invoquer tous les cas de corruption grande ou petite, de cadeaux divers tels qu’en évoquait Deguignet (voir ci-dessus)34. Mais il y a bien là encore une forme de pression, même s’il n’y a pas contrainte. De même exclura-t-on ici les effets de la propagande, de l’affichage, des harangues, des visites porte à porte… Même si on ne partage pas la vision peut-être simpliste de Serge Tchakhotine35, il est incontestable qu’il s’agit bien là de formes de violence, même symbolique.
31L’« influence » électorale proprement dite semble donc une variante des multiples formes de clientélisme qui existent depuis la nuit des temps, bien avant de s’appliquer au suffrage universel. Si l’on retient la définition de Jean-François Médard :
« La relation de clientèle est diffuse en ce sens qu’elle lie deux personnes, face à face, en tant que personnes. En d’autres termes, la relation est multidimensionnelle, elle n’est pas fonctionnellement spécifique, bien qu’une relation à l’origine fonctionnellement spécifique puisse engendrer, par la suite, une relation multidimensionnelle. Les services échangés seront donc de nature diverse, et chaque lien contribuera à renforcer l’autre. Enfin, la relation est affective. Liant deux personnes d’une manière diffuse et particulariste, elle ne peut être affectivement neutre. Certes la relation a toujours un aspect instrumental et fonctionnel, mais si le calcul est loin d’en être absent, il baigne dans un environnement de sentiments de reconnaissance, de fidélité, d’amitié ou d’affection. La relation de clientèle connaît par là un climat psychologique bien différent de celui qui préside aux échanges économiques dans la logique du marché capitaliste ou au fonctionnement de bureaucraties impersonnelles36. »
32L’influence pourrait donc s’analyser comme un clientélisme pyramidal dont le personnage influent constituerait le sommet et les influencés la base. Ils peuvent être aussi nombreux que l’on veut, dans la mesure où l’influent peut se démultiplier suffisamment. S’il lui manque du temps, il pourra se faire aider par des membres de son réseau qui à leur tour influenceront des personnages de troisième rang, etc. Les très grands notables peuvent ainsi se constituer des clientèles d’importance majeure, tel le baron de Mackau37.
33Reste que dans ce cas, on a encore affaire à un système, non de contraintes mais d’obligations réciproques. Or, l’influence peut aussi s’exercer de manière totalement gratuite, par un processus d’identification et/ou intériorisation, l’influencé acceptant les instructions de l’influenceur avec joie et sans aucune contrepartie, sinon le sentiment de faire partie du « bon » camp et de « bien » voter. Ce processus existe : il s’applique de multiples manières, par le vote pour un « pays » contre un « horsain », pour un homme exerçant le même type d’activités, ce qui ne veut pas dire de la même classe sociale, contre un « parasite », pour quelqu’un que l’on connaît depuis longtemps contre un inconnu, etc. À l’homme d’influence d’exploiter ces avantages : tout le monde ne peut ni ne sait le faire. L’influence est alors le résultat d’une chimie complexe et à peu près aussi imprévisible que les interactions médicamenteuses (celles du xxie siècle). En 1888, le préfet d’Ille-et-Vilaine note de Victor Roussin, maire de Saint-Brice-en-Coglès, « Actif et intelligent, mais trop autoritaire ce qui nuit à son influence dans le canton38 », autrement dit, influence ne rime pas avec autorité. De même que l’influence peut se garder quand la puissance matérielle a disparu ; ainsi le préfet des Côtes-du-Nord apprécie-t-il le vicomte de Belizal en 1885 : « Gentilhomme ruiné, criblé de dettes ; mondain ; influent encore ; politesse avec le préfet39. » L’identité entre l’élu et l’électeur est parfaitement incarnée dans le cas du député et conseiller général de Quintin (Côtes-du-Nord) à partir de 1902, Limon, homme de droite, membre de l’Action libérale, et auquel le Gaulois consacre ce bref mais édifiant article :
« Monsieur Limon peut se dire avec raison représentant des agriculteurs. Agriculteur lui-même, il est aimé de tous par sa bonhomie et son obligeance dans cette circonscription de Lamballe qui lui donne des majorités écrasantes de 12 000 voix contre 6 000. Je l’ai entendu un jour à Saint-Brieuc dans une grande réunion ; il ne vise pas à l’éloquence, mais à la clarté, à la vérité, à la sincérité et à la parfaite connaissance des choses dont il parle. Sa haute stature se profilait sur l’estrade et sa causerie familière était coupée de bravos. Monsieur Limon fut lauréat de la prime d’honneur, lauréat de l’École d’Agriculture de Grandjouan, et collabore de nombreux journaux agricoles. Libéral en politique et catholique convaincu, il y a entre lui et ses électeurs bretons un lien qui ne se dénouera pas40. »
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34N’en déplaise aux mânes de Daniel Halévy, l’influence notabiliaire n’a pas disparu dans les années 1870. Il y faudra sans doute plus d’un siècle et il n’est pas sûr que le processus soit achevé (mais les règles sont sûrement différentes aujourd’hui). Il est vrai que dès les premiers jours du Second Empire, et encore beaucoup plus de la IIIe République, des réalités techniques, économiques et sociales vont porter des coups à l’influence personnelle des notables, petits ou grands : les chemins de fer puis les chemins vicinaux carrossables, la presse et son aptitude à déchaîner les passions et à mobiliser les foules, l’école, le service militaire universel… Reste que dynasties et réseaux se maintiendront vaille que vaille, plus ou moins, au moins jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, et que de nos jours, l’« influence » de certains grands notables d’un genre très différent demeure une réalité. On ne citera pas de noms.
Notes de bas de page
1 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 4 M 427.
2 Déguignet Jean-Marie, Histoire de ma vie, Le Relecq-Kerhuon, An Here, 2001, p. 389-390.
3 Aymard Camille, Bolchevisme ou fascisme ? Français, il faut choisir !, Paris, Flammarion, 1925, p. 246-247.
4 Loi du 29 juillet 1913.
5 Ici fortement résumées. Voir pour une analyse approfondie, Chazel François, « Réflexions sur la conception parsonienne du pouvoir et de l’influence », Revue française de sociologie, V, 1964, p. 387-401 ; du même, La Théorie analytique de la société dans l’œuvre de Talcott Parsons, Paris, Mouton, 1974.
6 Kelman H., « Compliance, Identification and Internalization : Three Processes of Attitude Change », Journal of Conflict Resolution, vol. 2, p. 51-60.
7 Parsons T., « On the Concept of Influence », Public Opinion Quarterly, t. XXVII, n° 1, 1963.
8 On a vu que selon Deguignet (voir plus haut), l’influence comporte presque systématiquement le recours à des moyens matériels de ce type.
9 Rocher Guy, « La sociologie parsonienne : influence et controverse », Sociologie et sociétés, vol. 3, n° 2, novembre 1971, Montréal, PUM, p. 135-150, § III.
10 Sur les liens complexes avec la notion de confiance, voir Mangematin Vincent et Thuderoz Christian, Des mondes en confiance, Un concept à l’épreuve de la réalité sociale, Paris, CNRS Éditions, 2004, 296 p.
11 C’est nous qui soulignons. Recueil des adhésions adressées au prince président, à l’occasion de l’acte du 2 décembre, Paris, Imprimerie Napoléon Chaix, s. d. (1854 ?).
12 Les Nouvelles de Redon, 26 avril 1896, coupure contenue dans le dossier personnel de Leroux, Archives nationales, F 1 bI 497. Féart avait été le « grand » préfet politique d’Ille-et-Vilaine sous Napoléon III.
13 Voir Petit Jacques-Guy, en collaboration avec Banat-Berger Françoise, Bernaudeau Vincent et Bianchi Serge et al., Une justice de proximité : la justice de paix (1790-1958), Paris, PUF, 2003.
14 C’est nous qui soulignons. Idem ensuite.
15 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 1 U, dossier Brûlé, Le procureur de Saint-Malo au procureur général, 24 février 1878.
16 Toutes les citations qui suivent sont issues, sauf mention contraire, de la synthèse préfectorale de juin 1888, Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 3 M 507.
17 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 3 M 507, rapport du sous-préfet de Redon, 18 mai 1888.
18 La Gazette de Bretagne (journal royaliste des Côtes-du-Nord), 5 août 1898.
19 Avec une différence marquée pour les conseillers généraux, bien plus stables et qui apparaissent comme de plus hauts personnages. Mais l’élection au conseil d’arrondissement est presque obligatoirement un premier grade, un stage, pour « monter ».
20 Source : Daniel Marine, Les Élections cantonales dans l’arrondissement de Saint-Brieuc, 1871-1914, mémoire de master 1 sous la direction de J.-F. Tanguy, Rennes 2, 2005, p. 28 sqq.
21 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 1 U, dossier Collinet de la Salle, brouillon d’une lettre adressée par le procureur général de Rennes (Quesnay de Beaurepaire) au procureur général près la Cour de cassation, 24 juin 1882.
22 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 1 U, dossier Louis Briand, lettre du juge de paix de Carquefou au procureur de la République de Nantes, 24 avril 1900. Briand est suppléant du juge de paix.
23 Communication au colloque « Autour du château » organisé par Annie Antoine à Craon (Mayenne) en septembre 2003, à paraître.
24 Voir par exemple, Huard Raymond, Le Suffrage universel en France, Paris, Aubier, 1991, plus particulièrement les chapitres viii : « La campagne électorale » et ix : « Le scrutin : pendant et après » ; ou Phélippeau Éric, L’Invention de l’homme politique moderne. Mackau, l’Orne et la République, Paris, Belin, 2002, surtout les chapitres v : « L’acte de candidature » et vi : « La consolidation d’un centre de force ».
25 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 4 M 29, dossier Machard, rapport du commissaire spécial de Saint-Malo, Gagnon, 28 août 1904.
26 Très rarement encore instituteurs. Cela ne viendra qu’après la Première Guerre mondiale. On est obligé ici de se restreindre ; mais l’influence des petits notables ruraux, même quand ils ne sont ni propriétaires, ni élus, n’est sûrement pas négligeable. Voir, entre autres, Barrière Jean-Paul, « Notaires des villes et des champs : les origines sociales d’une profession au xixe siècle », Le Mouvement social, n° 181, octobre-décembre 1997 ; Bougeard Christian et Jarnoux Philippe, Élites et notables en Bretagne de l’Ancien Régime à nos jours, Kreiz, n° 10, Brest, Centre de recherche bretonne et celtique, 1999, p. 111-121 ; Léonard Jacques, La Vie quotidienne du médecin de province en France au xixe siècle, Paris, Hachette, 1977.
27 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 4 M 507.
28 Le seul vrai républicain du groupe est Hippolyte Bousquet, maire de Bruz, dont il est vrai la fortune personnelle (50 000 francs de revenus annuels) est la troisième du département parmi les maires « grands propriétaires », et la quatrième si l’on compte Le Bastard, maire de Rennes, industriel. On peut donc être républicain et riche, mais ce n’est pas la règle dans l’Ouest.
29 Tel l’abbé Jaffré, supérieur du Petit séminaire de Sainte-Anne-d’Auray (Morbihan), puis recteur de Guidel (idem), et député à l’Assemblée nationale de 1871 à 1875. Voir notre article « L’abbé Jaffré : paysan, érudit, député d’extrême droite à l’Assemblée nationale. Un Huron à Paris », Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, 2005-3.
30 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, V 50, lettre circulaire de l’évêque Augustin David à tous les prêtres du diocèse.
31 Sur ces questions complexes et mystérieuses, Gaxie Daniel et al., Explication du vote. Un bilan des études électorales en France, Paris, PFNSP, 1989 (nouvelle éd.)
32 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 3 M 427.
33 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, K 9, avis du préfet des Côtes-du-Nord.
34 Huard Raymond, Le Suffrage universel en France, Paris, Aubier, 1991, en a relevé un grand nombre (p. 286 sq.).
35 Tchakhotine Serge, Le Viol des foules par la propagande politique, Paris, Gallimard, 1952.
36 Médard J.-F., « Le rapport de clientèle : du phénomène social à l’analyse politique », Revue française de science politique, 1976, vol. 26, n° 1, p. 103-131 (106).
37 Voir Phélippeau Éric, L’Invention de l’homme politique moderne. Mackau, l’Orne et la République, op. cit.
38 Arch. dép. d’Ille-et-Vilaine, 3 M 507.
39 Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 3 M 140.
40 Cité dans Wagner R., Dictionnaire biographique illustré des Côtes-du-Nord, Paris, Flammarion, 1912, art. « Limon ».
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