Chapitre V. La déstabilisation de la FFMJC 1966-1968
p. 129-148
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Texte intégral
« Au revoir M. Herzog, bienvenue M. Missoffe. […] Après sept années d’exercice, Monsieur Herzog nous quitte […] : une période de collaboration souvent amicale entre le ministère et les associations. Nous ne doutons pas que la même collaboration, que la même confiance s’établiront avec M. Missoffe et nous lui présentons en tout cas, tous nos vœux de réussite1. »
1L’éditorial du magazine fédéral de janvier 1966 saluait ainsi le départ de Maurice Herzog et l’arrivée de François Missoffe à la tête d’une administration de la Jeunesse et des Sports, promue pour la première fois au rang de ministère. Six mois plus tard, le « bienvenue Monsieur Missoffe » avait pris un effet de comique involontaire, tant les relations entre le nouveau ministre et la fédération étaient devenues exécrables. Si Lucien Trichaud en faisait une affaire personnelle, le problème dépassait, de beaucoup, les simples questions individuelles. Le nouveau ministre souhaitait, en effet, mettre en place une politique d’intervention directe auprès des jeunes, et pour cela, devait bouleverser l’équilibre construit depuis plusieurs années entre ses services et la « Jeunesse », c’est-à-dire les milieux associatifs : l’existence même de la fédération était en jeu, au moment où elle abordait la plus forte croissance de son histoire.
Un ministère hostile
Un ministre pour les jeunes
2Gaulliste historique, François Missoffe avait, au début de la Ve République, été chargé du Commerce, puis du secrétariat aux Rapatriés. Ambassadeur au Japon depuis 1964, il fut rappelé par le général de Gaulle pour entrer au gouvernement. Pour la première fois, le secteur accédait au rang de ministère, ce qui laissait augurer d’actions d’envergure, surtout envers la jeunesse, pour laquelle François Missoffe marquait sa prédilection2. Son titre était d’ailleurs celui de ministre de la Jeunesse, et non plus à la Jeunesse. La composition du cabinet de François Missoffe et la création d’un service des Études et de la documentation montrait la volonté ministérielle d’accorder la priorité à une vaste campagne de relations publiques, en s’adressant à la presse et en ayant recours à la télévision. Si cette orientation correspondait à un choix personnel, elle s’inscrivait aussi dans un programme qui avait été fixé par Matignon. Tirant le bilan des sept années de Maurice Herzog à la tête du secteur, une note pour le Premier ministre concluait en effet : « On fait beaucoup […] Reste la manière. Manière de faire. Manière de faire valoir3. »
3Les ambitions de François Missoffe étaient grandes, comme le prouve le projet d’action de son ministère qu’il soumit, en mars, au Premier ministre. Il fallait « repenser toutes les actions entreprises jusqu’à présent, en fonction d’un but précis : la formation du caractère, l’intégration progressive des jeunes dans la société ». L’action se plaçait donc dans une large perspective, mais se donnait plus particulièrement pour cadre l’éducation extra-scolaire de la jeunesse. L’échec des politiques menées tenait à une seule raison selon le ministre :
« La règle fondamentale qu’on s’est imposée d’éviter toute intervention directe et de s’appuyer exclusivement sur les mouvements de jeunesse. Or les mouvements de jeunesse […] ne touchent que 10 % des jeunes (pour beaucoup élèves etétudiants) malgré de larges subventions. […] Seul, l’État est en mesure d’apporter les solutions globales qu’appelle cet immense problème4. »
4L’intention était donc de rompre non seulement avec la politique menée par son prédécesseur depuis les débuts de la Ve République, mais, bien au-delà, de revenir sur l’équilibre établi depuis la Libération qui reposait sur une division simple du travail : aux associations le contact direct avec les jeunes, à l’État, le contrôle a posteriori et une part du financement.
5François Missoffe accorda de multiples entretiens à la presse, au cours desquels il s’efforçait d’avoir un style « jeune ». Dans sa première interview au Figaro littéraire en février 1966, sous le titre « Missoffe veut aider les jeunes à trouver leur visage d’homme », il déclarait :
« Je reprends pour la jeunesse ma doctrine pour les réfugiés [il veut parler des rapatriés] : Comment allez-vous voter ? – Je m’en fous. Je dois vous insérer dans notre société […] Je ne suis pas un type à système […] Il y a des petits vieux de vingt-cinq ans5. »
6Après avoir convié les jeunes à établir un contact direct avec lui en les invitant à lui écrire et à lui rendre visite au ministère, François Missoffe passait à l’action. En mai, il présentait un projet de Livre blanc, la première enquête par laquelle l’État donnait la parole aux jeunes, qui étaient invités à remplir des dossiers d’enquête. L’opposition et le monde de la jeunesse accusèrent aussitôt le gouvernement d’enrégimenter la jeunesse. L’hebdomadaire communiste France Nouvelle parlait d’un « Suivez-le jeune » qui faisait écho au fameux « Suivez-le bœuf » popularisé par François Missoffe, lorsqu’il était secrétaire d’État au Commerce6. Le contre-gouvernement lançait, par l’intermédiaire de Pierre Mauroy, un contre-questionnaire.
7L’objectif du ministre était de fonder sa politique sur une vaste consultation qui devait fournir les éléments d’un Livre blanc pour la jeunesse. L’intention était double, bien que mal définie dans les détails. Pour le nouveau ministère, il s’agissait de s’affirmer par rapport aux administrations anciennes, et donc, de revendiquer une vocation interministérielle, en affirmant le caractère polyvalent et global d’une politique de la jeunesse. Vieille ambition, puisqu’elle remontait, au moins à la Libération. L’autre objectif du Livre blanc était plus étroitement politique, au sens commun du mot. François Missoffe y voyait une occasion de déborder l’opposition, sur un terrain, où, a priori, elle disposait d’avantages. Cette seconde orientation rejoignait, d’ailleurs, la première, puisqu’elle pouvait faire ressortir l’importance du nouveau ministère, comme l’affirmait, non sans une certaine naïveté, le nouveau ministre, dans une lettre pour la présidence de la République :
« La fureur que nous déclenchons est la preuve que nous sommes sur la bonne voie. […] Il n’est pas un jour où je ne sois pas violemment pris à parti par le PCF. Il est bien évident que la façon dont nous avons présenté le problème les place en porte à faux et que s’ils ne réagissent pas vivement, ils ne peuvent plus être qu’à notre remorque, comme le sont déjà Lecanuet et Mitterrand. Il est de fait que la ministère de la Jeunesse et des Sports est maintenant connu de tous les Français7. »
8Les élections présidentielles avaient fait apparaître la jeunesse de certains candidats face au général de Gaulle. Plus généralement, la jeunesse devenait un enjeu politique, que l’opposition n’hésitait pas à utiliser. Depuis fin 1963, la gauche avait, par exemple, relancé une campagne pour l’abaissement de la majorité à dix-huit ans.
Les MJC mises en cause
9En décembre 1966, au moment où François Missoffe se félicitait des attaques de ses adversaires politiques, le délégué général de la FFMJC faisait ses comptes : depuis février 1966, il n’avait pu obtenir un seul entretien avec le ministre qui ne répondait même plus aux courriers8. Le contraste avec l’époque de Maurice Herzog était complet. D’institution privilégiée, la FFMJC était devenue une institution dénigrée, accusée d’être « à 80 % communiste9 ». Le ministre avait monté en épingle la publication par la revue fédérale Pas à pas, d’un extrait des Cahiers du communisme critiquant l’opération Livre blanc. La fédération put, cependant, fort justement répondre que de multiples extraits de presse, favorables ou non à l’enquête, avaient été publiés dans ses colonnes. Au lieu de formuler des griefs précis, François Missoffe s’était contenté de préciser qu’il attendait les résultats d’une enquête en cours sur les MJC, et n’avait formulé qu’un seul souhait : les directeurs devraient suivre une formation commune avec les autres mouvements et institutions. Cette demande n’avait pas grand sens, car depuis 1964-65, des formations de longue durée avaient été mises en place par d’autres fédérations, même si la FFMJC bénéficiait d’un avantage réel à l’INEP de Marlyle-Roi10. Cette exigence n’avait donc qu’une seule signification : rappeler que le statut « privilégié » de la fédération n’était plus de mise. Les griefs restaient toujours aussi vagues lorsque le ministre, dans diverses déclarations, dénonçait « ces MJC pensées par des adultes pour les jeunes qui ne s’y sentent pas chez eux ». La FFMJC réaffirma les principes auxquels elle était attachée. Le ton devenait très critique :
« Des personnes même fort autorisées, dit-on, affirment qu’il faut libérer les jeunes de la contrainte des adultes. […] Nous avons toujours affirmé combien nous croyions en la collaboration jeunes et adultes au sein des MJC […] C’est vrai qu’il faut libérer la jeunesse, mais d’abord de ses flatteurs, de ses séducteurs et de ses conducteurs11. »
10L’annonce d’un projet de Mille-clubs pour les jeunes précisait les intentions de François Missoffe. Il entendait promouvoir de petites structures préfabriquées assemblées par les jeunes eux-mêmes, à partir de kits fournis par des constructeurs, selon des plans élaborés par le service de l’Équipement du ministère. Il s’agissait, selon François Missoffe, de favoriser l’initiative et l’autonomie des jeunes, hors de la présence des adultes, afin qu’ils se sentent chez eux dans ces micro-équipements, loin des bâtiments trop vastes qui étaient ceux des MJC. L’objectif était de s’appuyer sur la sociabilité informelle des jeunes. Les difficultés rencontrées par les MJC avec les bandes n’étaient pas étrangères aux propositions de François Missoffe, mais ce dernier critiquait plus généralement le côté trop « intellectuel » des MJC, ce qui précisait le sens de son projet, ou du moins son orientation. En soi, former le caractère n’était pas une idée de droite. En revanche, opposer « caractère » et « intellectuel » ou « culturel » indiquait davantage le sens d’une politique… Le ministre avait aussi mis en cause en décembre ces MJC où l’on évoquait des problèmes politiques qui n’intéressaient que les adultes. Le délégué général répliqua par un communiqué, qui fut republié dans un éditorial de la revue fédérale, sous le titre « Le temps des invectives » :
« Certains voudraient qu’en cette période [préélectorale] nos institutions demeurent à l’écart de ce qui les entoure. À les croire, les Maisons des jeunes et de la culture ne devraient pas “faire de la politique” et les jeunes devraient y rester entre eux, sans que les adultes les gênent, et bien entendu, sans que les jeunes gênent les adultes. […] Le but de toute éducation est-il de former des “sujets”, une fois pour toutes ou bien de nous préparer à la vie, d’ouvrir l’esprit vers les choses et vers les êtres, d’apporter un sens de recherche et de confrontation, en somme de faciliter une sorte de remise en cause permanente de nous-mêmes, des autres, et de notre monde12 ? »
11Enfin, le programme des Mille-clubs remettait en cause la présence d’animateurs, puisque, dans un premier temps, le ministre envisageait de se passer entièrement d’eux, avant d’accepter l’idée d’inspecteurs-animateurs chargés de conseiller les mini-clubs d’un secteur géographique. François Missoffe ne croyait pas à la nécessité d’une profession d’animateur, encore moins d’une carrière. La rumeur qui se répandit à la FFMJC voulait qu’il ait déclaré que pour être animateur « il fallait être un saint ou un raté13 ».
12Les menaces devinrent encore plus explicites lorsqu’au moment de la préparation du budget, des informations officieuses mais précises, firent état d’une subvention prévisible de 6,9 millions de francs pour 7,7 millions demandés. Fin janvier 1967, les premiers versements de la subvention pour 1967 n’étaient pas assurés, et plus grave encore, le montant de la subvention n’était même pas indiqué, ce qui empêchait la fédération de préparer un budget qui aurait déjà dû être mis en œuvre. Cette dernière était donc mise dans l’obligation de recourir à des emprunts pour assurer les traitements de février, mars et avril : les problèmes de trésorerie, oubliés depuis 1959, revenaient avec une ampleur inconnue jusqu’alors. Jamais, depuis vingt ans, selon André Philip, la FFMJC n’avait été placée devant une telle difficulté. Le président proposait, en conséquence, de donner un préavis de licenciement de trois mois au personnel : c’était une manière d’attirer l’attention des MJC et des municipalités sur l’urgence du problème. Les syndicats du personnel s’y opposèrent et préférèrent la tenue d’une assemblée générale extraordinaire à Paris pour lancer un mouvement d’opinion, ce qui fut accepté par le conseil d’administration, malgré le risque de « politisation », à trois semaines des élections législatives de mars 196714.
13Le non-versement des subventions affectait l’ensemble des associations du secteur jeunesse et éducation populaire. Il prenait, cependant, dans le cas d’une fédération employant plus de 350 salariés une importance cruciale15. Le salut de la FFMJC vint des pressions exercées par l’Élysée sur François Missoffe :
« [Devant les menaces des mouvements] de licencier leur personnel et d’appeler à une manifestation de masse devant le siège du ministère, Monsieur Jobert a aussitôt indiqué au Ministre qu’il convenait d’éviter que ne se crée en ce moment une agitation inutile dans un secteur demeuré jusqu’à présent calme. Il a été convenu avec M. Missoffe que celui-ci réaffirmerait sa légitime intention de reconsidérer la liste des associations subventionnées ainsi que le montant de l’aide, mais qu’il donnerait des instructions à ses services pour que des “12e provisoires16” soient versés à ces mouvements. Cette décision devrait couper court à la campagne amorcée17. »
14L’épisode illustrait parfaitement la place qu’occupait la « politique » de la jeunesse : un secteur d’intervention qui n’attirait l’attention que par les dangers qu’il pouvait susciter pour le gouvernement. François Missoffe subissait, au même moment, une seconde déconvenue, puisque le Premier ministre s’opposait à ce que les premiers résultats de l’enquête menée dans le cadre du Livre blanc soient présentés, avant les élections législatives de mars, afin de ne pas donner prise aux attaques de l’opposition. Pour un ministre qui, quelques semaines plus tôt, voulait faire de cette enquête un atout dans la campagne de la majorité, voilà qui n’était pas de bon augure !
15L’assemblée générale extraordinaire de la FFMJC eut lieu, le 19 février à la MJC Maurice Ravel de Paris, en dépit du revirement du ministre, intervenu la veille. Ce fut une démonstration de force, puisque plus de 700 participants se réunirent et approuvèrent l’action menée par le conseil d’administration fédéral. Ils prirent acte du versement d’un acompte correspondant à la moitié du montant de la subvention de… 196618. Cela impliquait donc, que la FFMJC adopte une attitude revendicative afin d’obtenir pour 1967 une subvention en progression. Le problème était d’autant plus urgent que la fédération abordait une phase de croissance sans précédent : plus de 200 MJC avaient été affiliées, soit plus qu’au cours des deux années qui précédaient (1964-65) ou encore autant qu’entre 1946 et 1959, ce qui avait de profondes répercussions sur le fonctionnement de la fédération.
Le malaise interne de la FFMJC
16Le retournement de la situation à partir de 1966 modifia profondément l’équilibre institutionnel de la fédération. Ce dernier reposait, jusqu’en 1964 au moins, sur une primauté accordée à l’exécutif fédéral qui rendait des comptes à un bureau, dominé par la haute personnalité d’André Philip, et, dans une moindre mesure, par celle de Marcel Auvert, membre fondateur, dont les avis étaient respectés. Pour le reste, le conseil d’administration entérinait les décisions. La politique de François Missoffe bouleversait la situation : elle contraignait le conseil à intervenir davantage dans la définition de la politique fédérale.
Les transformations de la sociabilité fédérale
17La vie réelle d’une association, les rapports entre les différents groupes qui la composent, se lisent autant à travers ses usages, ses rites, qu’à travers la politique qu’elle mène. Les assemblées générales de la FFMJC se déroulaient sur plusieurs jours selon un rituel figé : l’accueil des congressistes, la validation des mandats, la réception par les autorités locales, les discours, l’assemblée générale proprement dite, les excursions, le banquet enfin, au cours duquel André Philip faisait une allocution, à laquelle répondait un autre orateur. L’usage de ce banquet fut contesté dès le début des années soixante, mais plusieurs élus en défendaient l’intérêt car il permettait, selon le secrétaire général Berrurier, de « nouer des contacts intéressants pour la fédération ». On connaît le passage – vite devenu d’anthologie – dans lequel Henri Mendras décrit La seconde révolution française 1965-1984, à travers le prisme de la « bouffe autour du barbecue » qui succède au « repas bourgeois19 ». À la FFMJC, les usages culinaires changèrent à la même époque, indiquant, eux aussi, une modification des manières de vivre, du moins de vivre les assemblées générales. Le banquet mit du temps à disparaître : à Lyon en 1965, malgré l’importance de l’assemblée réunie pour célébrer le XXe anniversaire de la fédération, il fut maintenu. On tourna seulement la difficulté du nombre en en organisant plusieurs qui eurent lieu simultanément dans la ville. À Lisieux, deux ans plus tard, le banquet avait fait place à un buffet froid-soirée dansante. Évolution générale des mœurs à laquelle la fédération ne faisait que se conformer ? Effets de la croissance des effectifs réunis en assemblée générale ? Sans doute, mais cette évolution était d’abord l’indice d’une modification des fonctions de l’assemblée générale, et, d’une manière plus large, de la démocratie fédérale.
18La dénomination officielle et statutaire de la principale instance fédérale était « assemblée générale ». Mais de plus en plus, les responsables de base utilisaient aussi le terme « congrès » pour désigner cette manifestation. Or, comme le soulignait Albert Léger, qui avait le sens de la précision du langage, l’assemblée générale désignait la réunion de délégués mandatés, tandis que le congrès permettait à la totalité des présents, mandatés ou non, de prendre la parole. Officiellement, jusqu’en 1968, seuls les représentants officiels désignés par les MJC pouvaient prendre la parole. Ils étaient même, en théorie, séparés du reste de l’audience. Cependant, dans la pratique, au cours des assemblées générales de 1966 et 1967 et, de façon ponctuelle antérieurement, les interventions ne provenaient pas uniquement des représentants mandatés, mais de l’ensemble de l’assistance. À l’assemblée générale de Troyes en 1966 les représentants du ministère furent pris à parti par la salle, ce qui provoqua des remous dans une fédération dont la revue, six mois plus tôt, s’ouvrait par un « bienvenue Monsieur Missoffe ». Les temps changeaient !
19Les conseils d’administration se transformaient encore plus rapidement. Quelques indices matériels en témoignent dans les archives : leur durée de plus en plus longue (neuf heures début 1968), la contestation fréquente des procès-verbaux, la nécessité, enfin, à partir de décembre 1967, d’enregistrer des débats de plus en plus confus20. Les instances fédérales élues passaient d’une sorte de comité de patronage par quelques mouvements de jeunesse, des représentants de MJC anciennes ainsi que des personnalités, à une fédération dans laquelle les MJC de base défendaient leurs intérêts. Sans doute, le conseil fédéral, comme le regrettait Albert Léger, n’avait-il pas encore pris toute la mesure de son rôle, mais les choses pouvaient paraître en bonne voie, et conformes, en tout cas, au projet pédagogique fédéral, qui visait, par le haut, à faire émerger graduellement, « pas à pas21 », un conseil d’administration responsable. Cette évolution s’accompagnait, en très léger décalage, d’une évolution du rôle du bureau fédéral : en 1959, à l’exception du trésorier, aucun des membres ne représentait uniquement une MJC. Dès 1966, à l’exception des trois membres fondateurs André Philip, Marcel Auvert et Albert Léger, tous les autres (10 élus) représentaient les intérêts de MJC. Deux des trois vice-présidences étaient détenues par des représentants de MJC, dont l’une par Paul Jargot, qui, plus que tout autre, incarnait cette appropriation progressive des instances par « les élus de la base ».
Paul Jargot
20Parmi les administrateurs qui prenaient de l’importance en cette seconde moitié des années soixante, il était incontestablement la figure qui s’imposait. Membre du CA depuis 1962, vice-président depuis 1965, il avait été le premier élu de la base à accéder à ces fonctions22. Il venait de la région grenobloise, la plus dynamique. Il était, d’autre part, un « professionnel » de l’éducation populaire, conseiller technique et pédagogique de la Jeunesse et des Sports. Il avait, surtout, une expérience d’élu local : maire de Crolles (Isère), il avait développé, avec des universitaires grenoblois, une école destinée à la formation des élus qui lui valut une reconnaissance certaine dans les milieux politiques de sa région23. Fils d’agriculteur, il était passé par les petit et grand séminaires et avait été formé à l’école de la JAC. Catholique progressiste, homme d’action, il était, selon le mot de Paul Jansen, « rude24 ». Jeune, puisqu’il avait tout juste quarante ans, lorsqu’il fut élu à une des vice-présidences, ambitieux, efficace, doté de compétences financières qui manquaient à beaucoup d’élus, il incarnait, incontestablement, une nouvelle orientation pour le bureau fédéral. Ses analyses, sans concessions, injustes parfois aussi, faisaient mouche. Il fut surtout le premier élu à affirmer haut et fort que le fonctionnement de la fédération n’était plus adapté à la taille qu’elle avait prise, et que les élus ne jouaient pas un rôle suffisant dans la définition de la politique fédérale.
21À partir de 1967, l’homme incarnait pour ses collègues, à la fois un incontestable renouveau, et l’influence du PCF, au sein du conseil d’administration, bien que Paul Jargot ne fût pas officiellement membre de ce parti. Il ne le devint qu’en 1973, lorsque la clause d’athéisme fut supprimée. Cependant, il ne fait guère de doute qu’il était déjà proche du parti communiste. Certains de ses propos pouvaient, pour le moins, porter à équivoque, lorsqu’il évoquait comme modèle possible pour la FFMJC « ce qu’on appelle le centralisme démocratique dans certaines organisations25 ». Cette comparaison témoignait sans doute autant de l’obsession de l’efficacité chez Paul Jargot, que d’une allusion strictement politique. Les témoins le décrivent plus comme un « fonceur », « un pragmatique », qu’un théoricien ou un idéologue. Mais ces allusions ne pouvaient être perçues que comme une provocation par le ministère qui dénonçait l’influence communiste au sein de la fédération. Pourtant, rares étaient alors, parmi les élus fédéraux, les autres membres ou sympathisants du PCF : la SFIO, le PSU, recueillaient, sans nul doute, beaucoup plus de suffrages que le parti communiste parmi les élus, dont quelques-uns également étaient proches de l’UNR ou du MRP. D’autre part, si tout le monde savait où se situait chacun sur le plan idéologique, les étiquettes n’empêchaient nullement la collaboration au conseil, selon les témoignages26.
L’affirmation du pouvoir des directeurs
22Depuis les origines de la fédération, des représentants du personnel siégeaient au conseil d’administration, avec voix délibérative. Cette présence des directeurs, au sein des instances, n’était pas illégale au sens strict. Le texte de 1901, sur les associations ne prohibait, en effet, que le partage des bénéfices, auxquels les salaires ne pouvaient être assimilés. Seuls, les statuts des associations reconnues d’utilité publique interdisaient explicitement, à l’article 7, à un salarié de participer à l’administration de l’association qui l’employait27. Or la FFMJC n’était pas déclarée d’utilité publique. Mais plus encore que la loi, la légitimité de la présence des directeurs avait été cautionnée par l’usage, en particulier par l’assentiment tacite de l’administration de la Jeunesse et Sports qui n’avait pas mis en cause cette présence avant 1967. Les représentants des directeurs étaient au nombre de quatre titulaires, auxquels se joignaient quatre suppléants. Ils étaient désignés par les syndicats. Le syndicat CGT créé en 1947 avait longtemps été le seul et en dépit de la création d’un syndicat FEN en 1962, puis de la CFDT en 1965, il réunissait de loin le plus grand nombre de suffrages et désignait, selon les années, trois ou quatre des représentants titulaires au conseil d’administration fédéral. Si beaucoup de directeurs syndiqués à la CGT n’étaient pas membres ou sympathisants du PCF, la direction syndicale était marquée par l’influence communiste à la fin des années soixante.
23Les relations entre le syndicat majoritaire des directeurs et le conseil d’administration étaient conflictuelles depuis l’origine, mais avaient connu une phase d’apaisement du milieu des années cinquante jusqu’à 1964. Cette année-là, à l’occasion du débat sur le FONJEP, les dissensions entre représentants syndicaux et certains membres du conseil d’administration, plus encore, entre les représentants des directeurs et l’exécutif fédéral, éclatèrent au grand jour. De 1965 à 1968, les directeurs ne cessèrent de jouer un rôle plus important au sein des instances. La raison en était simple : les problèmes de gestion prenaient une place grandissante dans la vie de la fédération. Or, quand on parlait de gestion à la FFMJC, on parlait, de fait, de salaires, donc, des directeurs salariés.
La question des traitements
24Les grilles de rémunération du personnel étaient définies par le conseil d’administration fédéral, c’est-à-dire par l’exécutif fédéral, après des négociations avec les représentants syndicaux des directeurs. Le ministère « reconnaissait » cette grille en prenant en compte les augmentations prévues par la nouvelle grille pour le calcul de la subvention. Au cours des heureuses années Herzog, le processus avait reposé sur la confiance en la parole de Maurice Herzog, exactement comme pour les créations de postes. Dans les deux cas, le secrétariat d’État donnait son « accord », et l’augmentation des subventions suivait. Mais juridiquement, il n’existait aucune obligation pour l’administration de la Jeunesse et Sports en ce domaine. Ce dialogue de janvier 1968 entre Christiane Guillaume, représentante du ministère et Lucien Trichaud, exprimait on ne peut plus clairement la fragilité des « accords » entre FFMJC et secrétariat d’État :
LT : [Du temps de M. Herzog] « le montant des subventions était connu en novembre par mes contacts avec le ministère.
CG : Les discussions avec les représentants des associations ont lieu de novembre jusqu’au 15 décembre environ, mais jamais nous n’avons pu donner un chiffre définitif en novembre.
LT : Mais Mademoiselle, il n’y avait pas de différences entre nos conversations orales et les lettres que nous recevions par la suite. Depuis plusieurs années, le chiffre de novembre était bon28 ».
25Or, la fin du mandat de Maurice Herzog et l’arrivée au ministère de François Missoffe avaient coïncidé avec d’importantes discussions salariales, liées à la mise en place du DECEP (Diplôme de conseiller d’éducation populaire), le premier diplôme du secteur. La FFMJC avait été étroitement associée à l’élaboration des contenus du programme, ce qui avait suscité des critiques parmi les responsables des mouvements29. Toutefois, l’importance qu’elle y avait prise tenait peut-être à ses tendances hégémoniques, mais d’abord au fait que ses directeurs constituaient de loin le premier corps d’animateurs. L’exigence d’un diplôme reconnu supposait une revalorisation salariale qui avait été proposée par la FFMJC au secrétariat d’État, en juillet 1965. Un point posait problème : l’assimilation par la FFMJC des directeurs formés avant 1965 aux titulaires du DECEP, pour valoriser leur expérience sur le terrain. Le conseil d’administration fédéral avait adopté ce principe à l’unanimité. La sous-direction de l’Éducation populaire s’y opposa de la manière la plus absolue. Elle avait de bonnes raisons de le faire : elle la refusait à ses propres fonctionnaires, qui devaient subir les épreuves du DECEP. De plus, elle tardait à reconnaître les grilles indiciaires proposées, y compris pour les titulaires du DECEP. Là encore, la proximité de la FFMJC et de l’administration de la Jeunesse et des sports posait problème : certains murmuraient que la part faite aux directeurs de MJC était trop belle, plus belle, en tout cas, que ce que l’administration réservait à ses propres fonctionnaires.
26Lorsque Maurice Herzog avait quitté le gouvernement en janvier 1966, les lettres de subventions étaient préparées, mais non encore signées. François Missoffe, compte-tenu des intentions qui étaient les siennes, dès le début de son ministère, ne pouvait que s’opposer à ces augmentations. L’affaire fut repoussée au budget 1967. Le bureau fédéral prit la décision, en décembre 1966, d’adopter la nouvelle grille indiciaire et de la mettre en application30. L’analyse partagée, tant par l’exécutif fédéral que par les syndicats était simple : il s’agissait de faire pression sur le ministre, qui était ainsi placé devant le fait accompli. Le contexte pouvait paraître favorable. Au cours de l’année qui s’était écoulée, la FFMJC avait signé 160 contrats avec des municipalités pour l’engagement de personnel, et elle n’avait pu en honorer qu’à peine un tiers, faute de subventions ministérielles. Les communes étaient donc prêtes à rémunérer intégralement des directeurs, plutôt que d’attendre une hypothétique prise en charge à 50 % par le biais du FONJEP31. Le second plan d’équipement commençait à faire sentir ses effets32. Le pari semblait pouvoir être tenu.
27Dès la fin de janvier 1967, devant le non-versement de la subvention et la situation préoccupante de la trésorerie fédérale, le conseil d’administration revenait sur la décision d’appliquer la nouvelle grille. Tout laisse à penser qu’un marché fut passé entre les représentants du personnel et l’exécutif fédéral : contre le report de la mise en œuvre de la nouvelle grille de traitement, les représentants des directeurs obtinrent la convocation d’une assemblée générale extraordinaire. Deux stratégies étaient possibles : soit tenter d’obtenir une amélioration des crédits en poussant le ministère à combler le déficit, sous la menace de licencier le personnel, soit mobiliser les MJC, donc leurs adhérents pour une assemblée générale extra-ordinaire, dans un contexte de campagne électorale. Cette dernière stratégie n’était pas dans les habitudes de la fédération. Ce fut pourtant elle qui fut choisie, sous l’influence incontestable de la CGT. On notera, toutefois, que plusieurs membres du conseil d’administration, peu suspects de philo-communisme, comme Gilbert Hillairet, suggérèrent aussi cette démarche. Les représentants des directeurs contribuèrent donc à orienter l’action du conseil dans un sens beaucoup plus revendicatif qu’il ne l’avait été jusque-là.
Le poids des experts
28Sous l’influence des directeurs, les questions financières firent aussi l’objet d’une plus grande attention. Certes, le contexte l’exigeait : la trésorerie était dans une situation alarmante, les perspectives de croissance nulles, le déficit paraissait difficilement évitable sans économies sévères. Mais tous les membres du conseil fédéral n’étaient pas égaux en matière de compétences financières. Les directeurs, dont certains se trouvaient, en cette fin des années soixante, à la tête de MJC qui pouvaient prendre l’allure de véritables PME, disposaient d’une expertise en matière comptable, sans commune mesure avec celle de la plupart des élus du conseil d’administration. De fait, la tournure prise par les débats au cours des années 1967 et 1968 transformait ceux-ci de plus en plus en affrontements entre exécutif fédéral et représentants du personnel, tantôt divisés, tantôt solidaires contre un ministère qui se contentait d’observer. Les représentants de l’exécutif fédéral entendaient, eux aussi, défendre la FFMJC, ce qui passait également par la défense des services fédéraux que les représentants des directeurs avaient tendance, selon eux, à négliger. Restait la question de l’assemblée générale annuelle, dont on a vu les profondes transformations après 1965. Le poids des directeurs y crût pour les mêmes raisons qu’au sein du conseil, en particulier à cause de l’importance des questions financières. Début 1966, le trésorier fédéral pouvait regretter que le rapport financier soit escamoté et voté pour la forme. Ce n’était plus le cas l’année suivante, compte-tenu de l’urgence en la matière. L’influence des directeurs passait aussi, par un autre canal. Ils disposaient, en effet, d’un pouvoir non négligeable sur les membres du conseil d’administration fédéral : celui de susciter des candidatures parmi les membres de la MJC qui les employait. Jean-Baptiste Glorieux explique que sa candidature, celle d’un homme de gauche, membre du PSU, fut appréciée par les directeurs, qui y voyaient une occasion de « gauchir » et de rajeunir le conseil : l’effectif des voix qu’il recueillit s’expliquait aussi par le soutien discret des directeurs qui faisaient savoir aux élus qu’il s’agissait d’un « bon candidat33 ».
29Ces pratiques demeuraient cependant marginales et révélaient, moins un hypothétique complot des directeurs, que la force d’un noyau de professionnels face à des bénévoles qui se connaissaient peu ou mal. Mais surtout, la « sympathie » des représentants des MJC allait vers les directeurs dont ils connaissaient le travail et dont ils savaient aussi que la présence était indispensable à la vie de leur Maison. Ajoutons un dernier point, décisif : les responsables syndicaux, qu’ils appartiennent à la CGT ou à la FEN, étaient de fortes personnalités, des directeurs respectés pour la qualité de leur travail. Ils avaient su favoriser dans « leurs » Maisons, des conseils d’administration vivants, développer une conscience des enjeux fédéraux qui manquaient à beaucoup des responsables de base. Les syndicalistes défendaient leurs intérêts corporatifs, c’était indéniable. Il était sans doute vrai, également, que les représentants de leur syndicat CGT défendaient une ligne proche des analyses du PCF ; mais, en même temps, ils se plaçaient en défenseurs de la fédération, rôle que leur fonction et leur poids au sein de la fédération leur faisaient « objectivement » jouer.
30La CGT des directeurs concentrait ses attaques, souvent ad hominen, sur l’exécutif fédéral. Étaient particulièrement visés : le délégué chef du personnel, Pierre Mulet et, bien sûr, Lucien Trichaud, accusé de se soumettre aux volontés politiques du ministère. Les syndicalistes lui reprochaient aussi sa politique de coopération avec Maurice Herzog, surtout dans la mise au point du FONJEP. L’attitude de Lucien Trichaud, sa politique vis-à-vis de François Missoffe facilitaient, il est vrai, la critique de ses adversaires. Le sociologue Michel Amiot, qui fréquentait la FFMJC avec le regard extérieur de l’observateur, décrit la trajectoire du délégué général au sein de la fédération comme un exemple typique des dérives du « leader-technicien » décrit par Roberto Michels dans son ouvrage classique de sociologie des partis politiques34. Le phénomène n’était pas nouveau en soi, puisque dès sa prise en charge de la délégation générale, Lucien Trichaud avait, de fait, joué un rôle déterminant dans l’orientation de la politique fédérale, la création du FONJEP en apportait la preuve éclatante. Mais la dérive technicienne s’amplifia à partir de 1967 : il existait désormais clairement une « question » Trichaud, un « problème » disaient ses adversaires au sein de la FFMJC. Un des administrateurs, pourtant les plus proches de lui, Gilbert Hillairet le mettait en garde contre sa capacité à concentrer les oppositions sur sa personne et la nécessité qu’il y avait à déléguer ses pouvoirs35. Enfin, l’homme qui avait excellé dans sa politique de contact du temps des belles années des MJC était singulièrement démuni. L’analyse qu’il faisait des difficultés fédérales semblait se résumer à la question « Missoffe ». Anecdote révélatrice : Lucien Trichaud en était arrivé à faire effectuer des analyses graphologiques des écrits du ministre36.
Une crise de croissance ?
31Or, de toute évidence, les difficultés étaient d’une tout autre ampleur. Les services fédéraux purement parisiens atteignaient l’effectif de 48 salariés au 30 septembre 196737. Les dysfonctionnements y étaient flagrants, malgré les réorganisations successives. Le caractère bureaucratique de la fédération n’était pas nouveau. Mais jusqu’en 1965, cette bureaucratie avait été parfaitement efficace. Ce n’était plus le cas deux ans plus tard : les multiples circulaires restaient sans effet ou sans réponse, on gaspillait du temps dans la rédaction de documents périmés dès leur publication. La réduction des crédits y entrait sans doute pour une part, mais surtout la croissance mal maîtrisée du nombre de MJC faisait sentir ses effets : début janvier 1968, la FFMJC comptait un peu plus de 900 Maisons en France métropolitaine, soit 200 de plus qu’à la fin de l’année 1966. De vives tensions montaient entre délégués et entre délégués et personnels subalternes… À cela s’ajoutaient d’évidentes lacunes dans l’organisation administrative, ainsi qu’un certain relâchement des méthodes de travail38. Devant ces difficultés, on s’efforça de réfléchir à une décentralisation des structures fédérales39. Une commission « réforme des structures » fut mise en place. Ses travaux furent sérieux, mais souffrirent d’un manque de suivi. Début 1968, ils n’avaient débouché que sur des considérations générales et le délégué Pierre Casamayou, dans un bilan critique, pouvait écrire : « Si la question vitale à l’étude n’a guère avancé, du moins n’a-t-elle pas reculé, ce qui est déjà un résultat40. » Le ministre Missoffe entendait lui bien faire avancer les choses, ses « amis » aussi…
L’échec du projet ministériel de suppression de la FFMJC (été 1967-fin avril 1968)
Une solution radicale ?
32Si le projet de suppression de la FFMJC remontait sans doute aux premières semaines qui suivirent la prise de fonction de François Missoffe, il ne commença à prendre véritablement forme qu’au cours de l’automne 1967. La création d’un poste de directeur de la Jeunesse et de l’éducation populaire au sein du ministère, confié à Jean Maheu, en juin 1967, traduisait la volonté de mettre les deux secteurs d’intervention, la jeunesse et le sport, sur un plan d’égalité. Elle s’inscrivait aussi dans la perspective de création d’un secteur « fonctionnarisé » de l’animation, qui supposait, à terme, la disparition de la FFMJC. Quelques éléments du projet en cours filtraient à travers les notes confidentielles du conseiller de Georges Pompidou, Claudius Brosse, en charge du secteur. En juin 1967, il précisait au directeur de cabinet du Premier ministre « qu’entre le ministère et la FFMJC on [allait] vers un conflit qui ne fai [sait] que commencer » et recommandait, en conséquence, de rester extrêmement vague dans les réponses aux parlementaires : « Ne répondez-pas avec trop de précisions sur le niveau de la subvention, car il se pourrait qu’elle soit réduite au centième de ce qu’elle est actuellement. […] Dans l’affaire ministère-FFMJC, il convient d’être très circonspect41. »
33Cependant, il y avait loin d’un vague projet à un programme précis qui supposait la création d’une structure administrative destinée à remplacer la FFMJC. Certains députés de la majorité mettaient en cause l’inaction du ministre dans un domaine où l’opposition disposait, selon eux, d’avantages considérables. Lors du débat à l’assemblée autour du Livre blanc rebaptisé Rapport sur la jeunesse, le gaulliste Robert-André Vivien avait déclaré à François Missoffe que si son « prédécesseur Maurice Herzog avait mérité le nom de ministre du dialogue, [lui] ne pouvait se contenter d’être le ministre du catalogue42 ». Quelques mois plus tard, en novembre, lors des assises UNR de Lille, le même député concluait les travaux de la commission jeunesse en ces termes : « Il est important que les Maisons de Jeunes cessent d’être des pépinières de marxistes et qu’une semaine de la pensée gaulliste succède à celle de la pensée marxiste43. »
34Quinze jours plus tard, Bernard Marie, député UNR des Basses-Pyrénées, et spécialiste des questions de jeunesse et sports, faisait part de son impatience au Premier ministre devant la lenteur de François Missoffe à lutter contre le « sabotage44 ».
« Il faudrait créer le corps d’animateurs actuellement prévu mais de façon telle qu’il ne puisse y entrer que des sympathisants ou de véritables apolitiques. […] Lors du récent débat budgétaire, tous les partis ont réclamé la création de ce corps, l’opposition pensant ainsi pouvoir faire fonctionnariser ses affiliés qui, dans la plupart des cas, sont à la tête des MJC et des foyers Léo Lagrange. Personne ne pourra donc trouver à redire à une telle création ; ce sera au gouvernement, pour une fois, à l’utiliser pour écarter les sabotages. […] La direction des services de l’administration, des CREPS ainsi que des écoles de formation d’animateurs devrait être confiées à des amis politiquement sûrs, afin que ces derniers empêchent qu’elles deviennent des bases anti-gouvernementales45. »
35Lors du conseil des ministres du 6 décembre 1967, qui avait précédé l’envoi de ce courrier, François Missoffe n’avait guère convaincu le Premier ministre. Il avait éprouvé des difficultés à présenter des actions concrètes, se contentant de prôner une action interministérielle dans un certain nombre de domaines : l’accès aux sports, l’emploi, le service national et enfin l’information des jeunes, soulignant les bienfaits du service Info-jeunesse de l’ORTF mis en place depuis deux ans.
« Cette information ne doit pas être considérée comme un simple service de renseignement, il est indispensable de créer un lien entre l’informateur et l’informé. Si les jeunes prennent, par exemple, l’habitude de s’adresser au ministère de la Jeunesse et des Sports pour les renseignements dont ils ont besoin, ils établissent par là un lien avec le gouvernement tout entier et, là encore, cette action pourra influencer leur comportement lors d’une consultation électorale. Je ne veux pas là non plus entrer dans les détails, mais je voudrais encore indiquer que si l’ORTF est en voie de devenir la première Maison de le Culture de la nation, il y aurait avantage à ce qu’elle soit aussi la Maison des jeunes n° 1 du pays, c’està-dire un laboratoire d’échange et de dialogue entre jeunes et adultes sur tout ce qui concerne la réalité de la vie46. »
36Georges Pompidou suivit les conseils de Claudius Brosse qui lui recommandait de « contraindre Missoffe à passer des paroles aux actes en l’obligeant à fournir un calendrier précis pour chacune de ses actions envisageables ». Fin décembre il exigea la liste précise de ses projets dans le domaine de l’information des jeunes et surtout dans celui du secteur public d’éducation extra-scolaire. Les autres domaines lui étaient interdits, aucun des ministres n’acceptant une immixtion dans ses domaines de compétence. L’ultime phrase enfonçait le clou : « Je vous demande de faire à chacun des ministres compétents toutes suggestions que vous croiriez utiles47. » On ne pouvait guère être plus clair sur le caractère nettement subordonné du ministère de la Jeunesse et des Sports. Ce qui donnait une coloration d’ironie, bien involontaire, au titre de la conférence que François Missoffe avait tenue quelques semaines plus tôt : « Une politique de la jeunesse pour quoi faire48 ? »
37Ce fut une note blanche des renseignements généraux parvenue le 8 janvier 1968 au Premier ministre qui accéléra le projet ministériel de trouver un substitut à la FFMJC49. Cette note signalait qu’un délégué régional des MJC dont l’appartenance au PCF n’avait pas été rendue publique, avait rendez-vous avec Gaston Plissonnier, secrétaire du comité central du PCF50. Elle fut aussitôt transmise à François Missoffe. Quelques mots du Premier ministre y étaient griffonnés : « Ceci-dit, de qui se moque t-on ? Il faut que vous agissiez. Prière de me retourner cette note51. »
38Rude journée, que ce 8 janvier 1968 pour François Missoffe : dans la soirée avait lieu l’incident de la piscine de Nanterre. Daniel Cohn-Bendit l’interpella au sujet des silences du Livre blanc sur les problèmes sexuels de la jeunesse. Le ministre conseilla au jeune homme de « piquer une tête dans la piscine » pour régler ses « problèmes ». Le reste… appartient à la légende, considérablement amplifiée, selon le témoignage de Daniel Cohn-Bendit lui-même52.
39Le projet fut prêt en mars, et aurait été retardé, selon le ministre, par les jeux olympiques de Grenoble et « la très grande discrétion que nécessitait une affaire fatalement complexe53 ». François Missoffe le justifiait en ces termes :
« Alors que l’État a su prendre il y a près d’un siècle ses responsabilités dans le domaine de l’enseignement, il a jusqu’à présent laissé aux initiatives privées le soin d’apporter aux jeunes le complément indispensable de leur formation – notamment en ce qui concerne l’acquisition de qualités de caractère – en dehors du cadre familial. […] Il s’agirait désormais de créer un véritable secteur public de l’animation. […]
Depuis dix ans l’importance [de la FFMJC] n’a fait que croître et sa politisation par les éléments d’extrême gauche s’affirme chaque jour davantage. Actuellement le CA est composé en majorité d’éléments adhérents ou proches du PC ou du PSU. […] Les deux dernières AG ont été le prétexte à de violentes attaques politiques contre le gouvernement. De nombreux cas de prosélytisme politiques des directeurs sont fréquemment signalés […] Lors de la dernière campagne pour les élections législatives beaucoup ont été des foyers de propagande anti-gouvernementale. La FFMJC est une véritable administration parallèle. Elle constitue vis-à-vis des collectivités locales un groupe de pression important qui risque de devenir bientôt une “puissance” analogue à la Ligue de l’enseignement. […] La politisation croissante de la FFMJC appelle à mon sens une solution radicale qui vise à créer un corps d’animateurs contractuels de droit public dépendant directement ou indirectement de l’État54. »
40Techniquement, l’opération était difficile, comme le soulignait le ministre lui-même, puisqu’il n’était « pas possible de dissoudre par voie autoritaire la FFMJC », association loi 1901. Cependant, le ministre ajoutait aussitôt que la suppression des subventions pour les traitements du personnel aurait pour effet de réduire, voire de faire disparaître les moyens de la FFMJC. C’était donc la voie dans laquelle il comptait s’orienter. Restait, cependant, à présenter l’opération à l’opinion publique : « dans un but de tactique pour isoler la FFMJC », le ministère demanderait une réforme des statuts afin de faire une plus grande place aux jeunes. Pour preuve de sa bonne foi devant l’opinion, il renoncerait, en même temps, au poste de membre de droit pour l’inspecteur de la Jeunesse et des sports, « qui continuerait à disposer de pouvoirs de contrôle a posteriori bien suffisants55 ».
41Le Premier ministre, dans les notes de travail, ne cacha pas un certain scepticisme : « On peut se demander si on ne lâche pas la proie pour l’ombre. » Surtout, il redoutait de laisser aux municipalités les responsabilités du fonctionnement courant : vieille crainte gaulliste du pouvoir municipal. Son conseiller, lui, chiffrait les mesures annoncées à 18 millions de francs, soit une hausse de 11 millions par rapport au coût en vigueur à ce moment, mais avec, il est vrai, davantage d’animateurs en poste. Matignon donna, cependant, son accord pour la poursuite du projet :
« On comprend le souci du ministère de mettre fin aux activités d’une fédération qui est sans doute plus puissante que la direction de la Jeunesse, qui au rythme actuel de son accroissement recevra bientôt une subvention annuelle de 10 millions de francs et dont l’activité principale est de faire auprès des jeunes de la propagande anti-gouvernementale56. »
42Au même moment, les premiers Mille-club, destinés à concurrencer les MJC, commençaient à être livrés, après une genèse très difficile, vivement critiquée à l’Élysée, où en janvier encore on signalait :
« L’opération 1000 clubs de jeunes, dont on a beaucoup parlé dans la presse ces jours-ci, était en fait, pour nombre de gens, une affaire déjà en cours d’exécution. Peut-être aurait-il été plus opportun de ne pas souligner ainsi qu’une opération annoncée à grand bruit il y a déjà plus de huit mois, n’avait pas encore reçu le moindre commencement de réalisation57. »
43Les statuts des clubs étaient définis par une circulaire de mars qui précisait à son article 4 : « L’association [club de jeunes] s’interdit toute discussion ou manifestation présentant un caractère politique ou religieux58. »
44La suite du projet de suppression de la FFMJC supposait son examen par le ministère des Finances, parce qu’il nécessitait la création de deux nouveaux corps de fonctionnaires (un d’animateurs, un d’inspecteurs spécialisés) et d’une nouvelle sous-direction au sein du ministère. Voici le résumé que René Haby, directeur de cabinet, faisait le 25 avril 1968 des négociations et de l’entrevue entre François Missoffe et Michel Debré, ministre des Finances :
Les problèmes des rapports entre le ministère et les Maisons des jeunes a fait l’objet d’une étude approfondie. M. Debré souhaite que soit étudiée une formule de conventionnement donnant une garantie à l’État, ce qui impliquerait, en particulier, la prise en charge directe de la formation et le développement de l’inspection des directeurs de MJC. Cette solution différente de celle que nous avions préconisée, fera l’objet d’une étude approfondie59. »
45Les services de la rue de Rivoli estimaient que la situation qui prévalait – concession de fait à la FFMJC – était globalement satisfaisante et surtout moins onéreuse que celle que proposait le ministre de la Jeunesse et des Sports. Fin avril 1968, le projet de François Missoffe était donc repoussé, au moins temporairement, mais la situation financière de la FFMJC n’avait fait qu’empirer, aggravant les tensions internes.
Démission d’André Philip
46Malgré la discrétion dont s’était entouré François Missoffe, des bruits alarmants circulaient au sujet des projets du ministère. Des « amis » du ministre se chargeaient de faire courir certaines informations, peut-être pour lui forcer la main60. André Philip était persuadé, depuis l’automne précédent, que « le ministre avait juré la perte de la FFMJC ». Il tenta donc, à deux reprises, sans en informer les autres responsables de la fédération, de faire pression sur le ministre, en en appelant au général de Gaulle61. Il eut avec lui, en janvier et en mars, deux entretiens au sujet de l’avenir de la fédération. Au cours de la seconde entrevue, il demanda au chef de l’État de faire en sorte que deux à trois millions de francs soient inscrits au budget de la Jeunesse, dans le cadre du collectif budgétaire alors en préparation, « de façon à ce que la Fédération puisse en toucher, au moins, un62 ». François Missoffe, refusa une nouvelle fois, toute augmentation des subventions affectées au chapitre éducation populaire. Cette attitude était en cohérence avec le projet qu’il mettait en œuvre. La situation fédérale devenait donc critique. Un emprunt à long terme avait été engagé pour couvrir le déficit du budget fédéral, diverses mesures d’économie prises et un franc fédéral prélevé sur chaque adhérent par les MJC pour contribuer au budget fédéral. Cette dernière mesure n’avait pas donné les résultats escomptés, en raison de la réticence des administrateurs locaux et des directeurs. Au printemps 1968, l’avenir même de la fédération paraissait en cause et des rumeurs de faillite circulaient. Le 31 mars, lors de la réunion du conseil d’administration fédéral, André Philip, après avoir estimé que Paul Jargot avait critiqué la gestion de la fédération par le bureau, donna sa démission de la présidence63. La surprise fut totale. André Philip lut un texte qu’il publia dans Le Monde dans une version très légèrement remaniée64. Ce texte était, à la fois, le testament d’une présidence et un appel au sursaut de la fédération. Dans des termes extrêmement durs, François Missoffe et le syndicat CGT des directeurs y étaient tenus pour co-responsables de la crise qui menaçait la fédération.
« Depuis deux ans, tout a changé. Un ministère de la jeunesse a été constitué, considérant, comme au temps de Vichy, ce groupe d’âge comme une classe sociale séparée, confinée dans son ghetto. […] J’ai tenté à deux reprises d’expliquer au ministre de la jeunesse les problèmes de l’éducation permanente ; j’ai dû constater que rien ne l’intéressait, en dehors de sa publicité personnelle, ce qui ne me permet plus de le respecter. […] Les progrès mêmes de la Fédération ont ossifié sa structure. […] Enfin, le syndicat CGT du personnel, renforcé par le mécontentement général suscité par l’attitude du ministre, a substitué à la coresponsabilité gestionnaire un esprit de revendication et d’agitation permanente. […] Tout se passe comme s’il y avait objectivement une collusion entre un ministre désireux de détruire la Fédération et un syndicat soucieux de profiter de cette destruction pour favoriser la propagande d’un parti politique65. »
47Après la lecture de la lettre de démission, les représentants du personnel quittèrent immédiatement la salle. Les élus, puis rapidement l’ensemble de la fédération, furent plongés dans la stupeur. Tout au long du mois d’avril, de nombreuses MJC écrivirent au président démissionnaire pour lui demander de revenir sur sa décision. Beaucoup redoutaient le vide du pouvoir à la tête de la FFMJC, au moment où elle affrontait une situation financière extrêmement difficile. En revanche, le bureau fédéral, à l’unanimité moins trois membres, revint sur sa décision initiale d’adresser à André Philip une motion lui demandant de reprendre son poste66. Les responsables désapprouvaient la publication de la lettre de démission dans Le Monde qui avait, selon eux, pour effet d’affaiblir la fédération au moment où celle-ci était menacée par les restrictions budgétaires du ministère. Ils niaient l’existence d’une crise interne à la fédération et confièrent l’intérim au premier vice-président, Paul Jargot, jusqu’à l’assemblée générale, prévue fin mai67.
Conclusion
48Fin avril 1968, à la veille d’un mois de mai qui devait rester dans les mémoires, les MJC et leur fédération étaient profondément touchées et isolées. La démission d’André Philip était le symptôme des profondes difficultés qui frappaient la FFMJC. Celles-ci étaient dues pour une part à la croissance mal maîtrisée qui avait été la sienne, depuis le début de la décennie. D’autre part, l’équilibre entre « l’exécutif fédéral » (l’encadrement), les élus des MJC et les directeurs révélait sa précarité. Cependant, la déstabilisation provenait d’abord d’un facteur externe, l’attitude hostile de François Missoffe à son égard et à celui des MJC. Sans cela, la rupture n’aurait pas été aussi brutale. Les intentions du ministre étaient peu claires, y compris pour les membres de la majorité, qui lui reprochaient d’avoir ouvert un dossier « jeunesse », avec le Livre blanc, mais d’avoir été incapable de le mener jusqu’à son terme. Le ministre subit donc les pressions d’une partie de sa majorité qui avait parfaitement compris l’enjeu électoral que constituaient les jeunes générations. Les MJC étaient victimes de l’hostilité de la fraction droitière de la majorité, pour qui la Jeunesse, comme l’Éducation nationale, formait un monde dangereux qu’il fallait museler. Le projet de suppression de la FFMJC par asphyxie financière, qui avait été lancé dans les faits dès 1967, mais que le ministre entendait bien faire passer à un stade supérieur était peut-être avant tout une forme de réponse aux critiques de la majorité. Le projet de Mille-clubs, qui se voulait moderne (« club », montage « en kit ») relevait pour une part de la même logique : la jeunesse ne s’intéressait pas, et, ne devait surtout pas, s’intéresser aux affaires de la cité. Seul comptait le loisir. Toutefois, les Mille-clubs étaient aussi destinés à répondre à un besoin d’animation plus informelle que celui que les MJC semblaient pouvoir prendre en compte. La FFMJC fit d’ailleurs quelques propositions pour que les MJC collaborent davantage avec des structures légères du type Mille-clubs ou équivalent. Mais ces propositions étaient difficiles à mettre en œuvre parce qu’elles allaient à l’encontre de deux tendances profondes des MJC : la professionnalisation des directeurs, dont le poids dans l’organisation fédérale apparut à l’occasion des tensions avec François Missoffe, et l’importance des équipements, des bâtiments, dont la taille augmentait, sous l’effet, de la croissance des activités et des demandes des communes. C’est à ces deux réalités qu’il convient donc de s’intéresser maintenant.
Notes de bas de page
1 Pas à Pas, n° 160, jan 1966, p. 1
2 Cf. son « Message à la jeunesse française » du 13/1/1966, note n° 2 du service presse du MJS.
3 Note 11/1/1966, AN Section xxe siècle AG 5 1/884. Désormais AG 5…
4 Projet 10/3/1966, AG 5 1/885.
5 Le Figaro littéraire, 17 fév. 1966.
6 Jean Laurens, « Suivez le jeune », France Nouvelle, 25/5/1966.
7 Lettre de François Missoffe à Étienne Burin des Roziers, 3/12/1966. AG 5 1/884.
8 André Philip avait eu une entrevue en juin 1966. Lucien Trichaud faisait état de 8 courriers sans réponse depuis fév. 1966 dans une lettre du 14/12/1966. Arch. Lucien Trichaud, AUN.
9 L’expression est de Lucien Trichaud qui rapporte « l’accusation propagée dans certaines sphères » dans une correspondance à Olivier Philip à qui il demande d’intervenir auprès du Premier ministre. 14/12/1966. AG 5 1/885.
10 BF 12/6/1966, AFF 318.
11 Gilbert Hillairet, « Il faut libérer les jeunes de la contrainte des adultes », Pas à pas, n° 172, mars 1967, p. 3.
12 Lucien Trichaud, « Au temps des invectives », Pas à pas, n° 170, janv. 1967.
13 Nous n’en avons pas trouvé trace dans les déclarations officielles. Toutefois ces propos « collaient » bien avec le style de François Missoffe à sa prise de fonction.
14 CA 29/1/1967, AFF 706.
15 Directeurs et personnel administratif de la FFMJC.
16 L’équivalent d’un mois de la subvention annuelle.
17 Note de Jean Maheu à Étienne Burin des Roziers, 2/2/1967, AG 5 1/881.
18 CA 19/2/1966 (après l’AG extraordinaire) AFF 706 et AFF 718.
19 Henri Mendras, La seconde révolution française 1965-1984, Gallimard, 2de éd. 1994, p. 84.
20 Gilbert Hillairet déplorait d’avoir à établir un condensé à partir de 82 pages ! BF 17/2/1968. AFF 684.
21 Rappel : titre de la principale revue fédérale.
22 Seuls auparavant des membres fondateurs (non élus par les MJC) y avaient accédé, à l’exception de Robert Fareng, qui présentait toutefois la particularité d’être un ancien délégué.
23 Je remercie Marc Malet et Paul Markidès d’avoir attiré mon attention sur ce point. Paul Jargot, décédé en 2003, a été l’initiateur d’une politique de réserve foncière, qui a permis le développement depuis d’une zone industrielle de haute technologie à Crolles.
24 Communiqué de Paul Jansen au sujet de sa délégation par intérim, avril 1969, AFF, dossiers scission.
25 Intervention de Paul Jargot aux journées d’études des directeurs des 2 et 3 nov. 1967, p. 8.
26 Entretiens avec Robert Lenoir et Jean-Baptiste Glorieux.
27 Robert Brichet, Associations et syndicats, Librairies techniques, 3e éd., 1971, p. 88-92.
28 Compte-rendu intégral du CA du 14/1/1968, AFF 706.
29 La FFMJC avait testé à Grenoble un programme qui correspond presque intégralement à celui du DECEP tel qu’il fut mis en place en 1965.
30 CA 4/12/1966. AFF 318.
31 BF du 27/3/1966 et CA 6/11/1966 AFF 701.
32 En fait l’année 1966, année charnière entre les deux plans ne vit pas un très grand nombre de projets aboutir, mais on peut supposer que les communes anticipaient.
33 Entretien avec Jean-Baptiste Glorieux.
34 Michel Amiot, « La crise de la FFMJC », in Esprit, n° 387, déc. 1969, p. 771-786.
35 Lettre personnelle de Gilbert Hillairet à Lucien Trichaud 26/10/1966, AFF 701.
36 Comme il ne disposait pas de courrier du ministre (et pour cause !), il en fut réduit à faire analyser une préface d’un document officiel du ministère de la Jeunesse et Sports, qui comportait des lignes manuscrites. arch. Lucien Trichaud, AUN.
37 Bilan comptable du centre fédéral FFMJC 1967-68, arch. Lucien Trichaud, AUN.
38 Programme d’action syndicale présenté par André Jager, août 1967, AFF.
39 Cette décentralisation -en fait déconcentration- avait été évoquée dès l’AG de Nancy en 1963.
40 Pierre Casamayou, Étude pour la commission Structures, avr. 1968, arch. Lucien Trichaud, AUN.
41 Note de Claudius Brosse pour M. Galy-Dejean 28/6/1967, AG 5 1/885.
42 Extraits du JORF/DP/an/24 et 25/5/1967 reproduits in Pas à pas, n° 175-176, juil. 1967, p. 12.
43 Le Monde, 26/11/1967.
44 Bernard Marie a été le premier Français arbitre international de rugby et membre de l’International Board.
45 Lettre de Bernard Marie à Georges Pompidou, 15/12/1967. AG5 1/881.
46 Communication de François Missoffe au Conseil des ministres du 6/12/1967. AG 5 1/884.
47 Lettre de Georges Pompidou à François Missoffe 22/12/1967. AG 5 1/884.
48 François Missoffe, Une politique de la jeunesse, pour quoi faire ? Conférence des ambassadeurs, 19/10/1967, nouvelle série n° 33, s. d., 24 p.
49 Les notes blanches étaient des documents sans indication d’origine émanant des Renseignements généraux et destinées à l’information du gouvernement. Elles ont été supprimées en 2002. Le Monde, 11/10/2002.
50 D’après les témoignages, la personne en question n’était pas membre du PCF. La rencontre avait, semble t-il, un caractère officiel et s’inscrivait dans une politique de consultation des divers partis politiques. Le délégué avait cependant exercé des responsabilités (modestes) à la CGT des directeurs.
51 Note blanche, AG 5 1/885.
52 « Quelqu’un a lancé : tiens, il y a Missofffe qui vient, on va aller voir ! Alors nous sommes partis, nous avons regardé, j’ai sorti mes trois vannes et cela a fait une histoire qui fait maintenant quasiment partie du patrimoine historique de la France, alors que c’était une anecdote ridicule… » « Entretien avec Daniel Cohn-Bendit », in Geneviève Dreyfus-Armand et Laurent Gervereau (dir.), Mai 68, les mouvements étudiants en France et dans le monde, BDIC, Nanterre, 1988, p. 127.
53 François Missoffe dans un plaidoyer pro domo affirmait à Georges Pompidou qu’il voulait agir dans la plus grande discrétion.
54 Lettre de François Missoffe (confidentielle) à Georges Pompidou, 12/3/1968, AG 5 1/884.
55 Note de la conseillère technique Marie-Aimée Latournerie 27/3/1968, AG 5 1/884.
56 Note de Claudius Brosse 20/3/1968. AG 5 1/884.
57 Note de Philippe Maistre à Bernard Tricot 9/1/1968, 5 AG/5 881.
58 Circulaire « Statuts Clubs de jeunes » reproduite in Jean-Claude Leroyer, Une régionalisation non concertée, naissance de la FRMJC Picardie, maîtrise de Sc. soc. du travail, Université de Caen, juin 1984, p. 221 sq.
59 Lettre de René Haby à Claudius Brosse, 25/4/1968. C’est nous qui soulignons. AG 5 1/886.
60 CR confidentiel réunion des délégués des 28 et 29/3/1968, arch. Lucien Trichaud AUN.
61 André Philip s’était rapproché du général de Gaulle depuis 1962 et avait même voté pour lui au second tour de la présidentielle de 1965. Léo Hamon in Loïc Philip, André Philip, Beauchesne, 1988, p. 299.
62 Lettre de André Philip à Charles de Gaulle, 11/3/1968, arch. Lucien Trichaud, AUN, Paris.
63 Pour tout ce qui suit compte-rendu intégral du CA du 31/3/1968 et documents en rapport, AFF 706.
64 Le Monde, 3 avril 1968.
65 Compte-rendu du CA du 31/3/1968, AFF 706.
66 Seuls, Albert Léger, Robert Fareng et Jean Yché, non présents, n’ont pas approuvé cette décision.
67 Manifeste du bureau fédéral 12/4/1968, arch. Lucien Trichaud AUN.
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