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L'intrusion balnéaire

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Johan Vincent

Chapitre VIII. Une professionnalisation balnéaire

Texte intégral

1Pour pouvoir accueillir les baigneurs, des services sont nécessaires. À mesure que l’affluence grandit, leur nombre devient plus important, car il s’agit tout autant de profiter de la manne balnéaire que de contenter le baigneur. Comme les stations balnéaires sont souvent, au préalable, des communes rurales, l’équipement des services n’est pas toujours suffisant pour cette nouvelle population. Les populations locales tentent donc de se prémunir face à ces nouvelles difficultés, quand les profits peuvent être captés par des marchands étrangers, quand le patrimoine est mieux valorisé avec la saison d’été, quand de nouveaux métiers saisonniers sont disponibles. Les populations littorales se professionnalisent pour loger et nourrir les baigneurs, nouvelles activités traditionnelles d’une station balnéaire.

Une manne à devoir partager ?

Le plus de profits aux autochtones

  • 1 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1 M 1581, lettre du maire des Moutiers, du 30 mai 18 (...)
  • 2 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1 M 327, pétition (14 signatures) au préfet, du 16 m (...)
  • 3 Délibération municipale de Saint-Gilles-sur-Vie, du 4 mai 1937.
  • 4 Bulletin paroissial du Croisic, d’octobre 1935.
  • 5 Bulletin paroissial de Quiberon, d’août 1925.

2Malgré les conflits, la saison balnéaire demeure généralement bien ressentie par les populations littorales. Les baigneurs amènent leur argent dans le pays, un bienfait parfois supérieur aux activités traditionnelles. En 1849, La Bernerie reçoit entre 250 et 300 baigneurs qui ne laissent, selon le maire des Moutiers, pas moins de 25 000 francs, quand la pêche n’en rapporte que 17 8001. En 1868, quelques propriétaires de Préfailles indiquent que les étrangers qui viennent chaque année versent dans le village plus de deux cent mille francs2. Le conseil municipal de Saint-Gilles-sur-Vie avoue l’importance que revêt la saison balnéaire à la veille de la Seconde Guerre mondiale : « La moitié au moins de la population ne vit que des ressources que lui procurent les baigneurs, soit par la location des maisons ou emplois divers, et […] un séjour prolongé [des] réfugiés [espagnols] en même temps que les colonies scolaires, déjà nombreuses, feraient la ruine de nombreuses personnes en éloignant les étrangers3. » La saison balnéaire doit permettre à une partie de la population de vivre toute l’année. Le curé du Croisic confesse en 1935 à ses paroissiens : « Maintenant que les estivants sont partis, avouons franchement que l’argent que [les touristes] ont laissé chez nous dans les hôtels et chez les logeurs, ainsi que dans les maisons de commerce, nous sera d’un bon appoint pour l’hiver4. » Le curé de Quiberon doit modérer les plus ambitieux : « On commettrait une grave injustice en exploitant [les baigneurs], à l’occasion de leurs achats, même s’ils sont riches. Bon nombre d’entre eux d’ailleurs ne le sont pas et la villégiature est parfois pour eux une coûteuse nécessité5. »

  • 6 Service historique de la Marine de Vincennes, CC5580, rapport du commissaire de l’Inscription mari (...)
  • 7 Hervé Bazin, « La Cornouaille en 1871 ; carnet de voyage d’un écrivain », Cap-Caval n°5, 3e trim. (...)

3La saison balnéaire n’amène pourtant pas que du bienfait. L’arrivée d’une nouvelle population, au pouvoir d’achat fort, représente une modification indéniable dans le système économique des populations littorales. Le commissaire de l’Inscription maritime du Croisic remarque que « les baigneurs qui fréquentent ces établissements [de bains, en 1866,] attirent d’autres personnes qui, moins fortunées, ou redoutant la vie d’hôtel, s’établissent chez les particuliers ; on peut donc avancer que du mois de juin au moins de septembre, la population de la côte est augmentée d’un tiers. Or, par suite de cette augmentation, la vie matérielle atteint une cherté qui ne se rencontre que dans les grandes villes, et comme le produit de la marée fait surtout la base de la nourriture des étrangers, il en résulte que ces établissements influent sur le sort des pêcheurs, qui vendent à des prix exagérés6 ». Pour lutter contre ces hausses dues aux gens de passage, certains marchands refusent de leur vendre des produits, privilégiant les acheteurs fidèles qui habitent la commune à l’année. En 1871, Hervé Bazin rencontre à Concarneau des commerçants qui préfèrent vendre leurs produits aux marins plutôt qu’aux étrangers, même si ces derniers proposent un meilleur prix. Selon lui, le marin est hostile envers les étrangers car il craint de les voir changer les vieux usages, ses naïves croyances, ses traditionnels préjugés7. Léon Dubreuil raconte combien il était difficile de s’approvisionner à Sion dans les années 1900 :

  • 8 Léon Dubreuil, Une Enfance au Marais Breton, Auxerre, Imprimerie L’Universelle, 1930, p. 196.

« Les pêcheurs étaient peu nombreux et, s’ils rapportaient du poisson, c’était bien par hasard. Il était très malaisé d’obtenir qu’ils en vendissent même à un prix supérieur à celui auquel ils le céderaient au marché le lendemain. Il y a de ces habitudes qui étonnent et déroutent8. »

4La saison balnéaire, quand elle est installée dans les mœurs, introduit un nouveau cycle des prix des denrées. Le commissaire de police de Concarneau l’observe en 1923 :

  • 9 Archives départementales du Finistère, 1 M 141, rapport mensuel du commissaire de police de Concar (...)

« Depuis l’arrivée des touristes, le coût de la vie a augmenté. Le pain est toujours à 1,20 franc le kilo, les prix de la viande de bœuf, de mouton et de porc n’ont pas varié mais celui de la viande de veau a augmenté et est passé de 3 à 7 francs le kilo à 6 à 10 francs le kilo. Le prix du sucre a subi une légère diminution, celui du beurre, des œufs, a été augmenté : beurre 10 à 12 francs le kilo au lieu de 9 francs, œufs 5 à 5,50 francs la douzaine au lieu de 4 francs. Le lait non écrémé est toujours vendu 0,80 F et 0,90 F le litre, écrémé 0,40 F9. »

  • 10 Archives départementales du Finistère, 1 M 141, rapport mensuel du commissaire de police de Concar (...)
  • 11 Archives départementales de Loire-Atlantique, 532 S 27, lettre du directeur de l’Enregistrement, d (...)
  • 12 Délibération municipale de Saint-Jean-de-Monts, du 11 novembre 1906.

5Il remarque le même phénomène en juillet 1924 et prévoit, en septembre, que « le départ des touristes, occasionné par le mauvais temps, entraînera sous peu une légère baisse sur les denrées alimentaires10 ». Ce cycle saisonnier existe aussi pour les biens immobiliers, car certains veulent profiter de la présence des baigneurs. Dès 1865, à Pornic, le receveur des Domaines et le maire décident d’attendre le retour de la belle saison, « afin d’attirer à la vente un plus grand nombre d’enchérisseurs et de rendre la publicité aussi complète que possible11 ». Le conseil municipal de Saint-Jean-de-Monts désire tirer avantage de la vente de la maison de la veuve Couthouis, reçue en donation d’héritage, lors de la saison des bains de mer12. Les acheteurs locaux, qui pourraient profiter du hors saison pour devenir propriétaire et se constituer un patrimoine, sont mis en concurrence avec les baigneurs.

  • 13 Délibération municipale de Larmor-Plage, du 13 avril 1936.
  • 14 Délibération municipale de Carnac, du 3 septembre 1939.
  • 15 Délibération municipale de Croix-de-Vie, du 11 juin 1933.

6Ainsi les populations locales sont-elles contrariées quand les sommes versées par les baigneurs ne leur reviennent pas entièrement. Le conseil municipal de Larmor-Plage reçoit en 1936 une pétition de nombreux commerçants de la commune et des environs qui vise les déballeurs venant deux fois par semaine livrer ou vendre leurs marchandises. Il décide de n’autoriser la vente au déballage que le dimanche, afin de sauvegarder les intérêts des commerçants locaux13. En 1939, le conseil municipal de Carnac indique que le Syndicat des propriétaires perçoit, depuis 1935 et au profit de la commune, un droit de circulation sur les commerçants étrangers à la commune qui viennent livrer leurs produits à Carnac-Plage. La taxe est variable suivant la fréquence des livraisons journalières, mais le conseil apprend surtout que cette taxe est régulière, et s’appelle la taxe sur le colportage, régie par la loi du 13 août 192614. La municipalité est d’autant plus sensible à faire profiter ses administrés du commerce avec les baigneurs quand elle s’endette pour moderniser la station balnéaire. Le conseil municipal de Croix-de-Vie énumère « tous les sacrifices que s’est imposés la commune pour développer et améliorer la station (électrification, éclairage public, construction de bordures de trottoirs et clôtures en ciment sur la plage) dans le but d’attirer toujours un plus grand nombre de baigneurs contribuant au développement du commerce local15 ».

Une manne difficile à satisfaire seuls

  • 16 Émile Auzou, La Presqu’île guérandaise ; étude géographique, historique et économique ; manuel des (...)
  • 17 Archives municipales de Brest, 7 S 331 et 332, devis divers pour le Grand Hôtel (1911-1950).

7Les autochtones ne peuvent toutefois pas satisfaire seuls et de manière indépendante les besoins des baigneurs. Émile Auzou raconte la venue des fournisseurs à Pornichet, s’amusant « de voir pousser une ville comme un champignon. On apprend ainsi ce qui est le plus nécessaire à la vie. Les corps de métier s’installent l’un après l’autre. D’abord le service du maître le plus exigeant par ses besoins et ses caprices, l’estomac ; c’est-à-dire, avec les bouchers, épiciers, boulangers, charcutiers, les cafés, hélas ! Puis, on se spécialise grâce aux femmes : mercerie et cordonnerie se séparent de l’épicerie. La construction, plus active, attire maçons, charpentiers, forgerons. La religion et la paresse font élever une chapelle au milieu des maisons. Aux “chers petits”, on doit les loueurs d’ânes et de cycles. Le luxe appelle à son aide les coiffeurs, les vitriers, les pâtissiers, les fleuristes. Enfin, comme il vient décidément des gens riches et détraqués, le pharmacien apparaît. C’est fini, la civilisation s’est emparée du pays16 ». La construction est particulièrement demandeuse de main-d’œuvre. Le Grand Hôtel de Morgat emploie majoritairement, entre 1921 et 1933, des entrepreneurs extérieurs à la commune17. Sur dix-huit entrepreneurs, six habitent Crozon, essentiellement pour le gros œuvre, tandis que huit viennent de Brest.

  • 18 Archives départementales de Vendée, 4 M 110, lettre du sous-préfet des Sables-d’Olonne au préfet d (...)
  • 19 Archives municipales de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, dénombrement de 1911 de Saint-Gilles-sur-Vie, l (...)

8Les entrepreneurs étrangers à la commune s’installent à mesure que l’activité balnéaire grossit. Charles Lesur, né en 1887 à Marle-sur-Serre, arrive aux Sables-d’Olonne en 1926. Il vient du département de l’Aisne où il a travaillé comme entrepreneur à la reconstruction des régions dévastées. En 1934, il dirige une importante entreprise de bâtiment et occupe une centaine d’ouvriers. Selon le sous-préfet, il construit, chaque année, de nombreuses maisons ou villas, pour le compte des particuliers18. L’immigration accompagne le développement d’une station balnéaire, comme le montre la population de Quiberon ou de Saint-Gilles-sur-Vie en 191119. La moitié des habitants de Saint-Gilles-sur-Vie sont nés dans une autre commune et les métiers de la construction n’y échappent pas. Sur quatorze maçons, huit sont nés à Saint-Gilles-sur-Vie, tandis que les autres proviennent des communes proches. Les plus vieux maçons sont autochtones, les maçons étrangers travaillent dans la force de l’âge (nés entre 1872 et 1884). À Quiberon même (villages exclus), les maçons et menuisiers autochtones sont minoritaires. Sur treize maçons, on en compte deux nés à Quiberon, sur seize menuisiers, on en compte six nés dans la commune. Le recrutement apparaît plus étendu qu’à Saint-Gilles-sur-Vie. Les maçons quiberonnais, nés en 1879 et en 1886, s’avèrent être quasiment les plus jeunes des hommes exerçant cette profession. Par contre, dans les villages, la proportion des maçons et menuisiers autochtones est plus forte, ils sont plus âgés. S’il n’est pas exclu que les entrepreneurs qui habitent dans les villages puissent travailler dans le bourg, il est indéniable que l’immigration s’est surtout concentrée sur le bourg, proche du port et de la plage.

  • 20 Délibération municipale de Saint-Brevin-les-Pins, du 28 mai 1893.
  • 21 Côtes bretonnes et vendéennes, de la Vilaine à Olonne ; guide du baigneur, Nantes, Imprimerie mode (...)
  • 22 « Les Petits trous pas chers » ; guide des familles aux bains de mer, plages de la Manche et de l’ (...)

9Face aux déficiences locales, des marchands étrangers proposent rapidement leurs services aux baigneurs. En effet, les commerçants locaux ne sont pas toujours à proximité des baigneurs, installés dans un quartier balnéaire distinct. En 1893, le conseil municipal de Saint-Brevin récrimine contre l’état déplorable du chemin qui va du bourg au Pointeau alors qu’il « est d’une très grande importance, vu les étrangers qui viennent en très grand nombre soit pour visiter les bains de Saint-Brevin-l’Océan, où sont installés hôtels et casino, soit pour y habiter pendant la belle saison, […] les commerçants sont obligés d’y aller presque journellement pour y porter les marchandises qu’ils y vendent20 ». En 1895, il n’existe pas à La Baule d’établissement permanent, selon l’auteur du guide Côtes bretonnes et vendéennes : « Dès que le mauvais temps arrive, les marchands ferment leur porte et s’envolent avec les étrangers21. » La plupart des fournisseurs de Port-Navalo, en 1903, résident au bourg d’Arzon, mais le guide « Les Petits trous pas chers » précise que, pendant la saison, ils y viennent assez facilement22. Les promoteurs de Penthièvre-Plage rassurent :

  • 23 Plage de Penthièvre en Saint-Pierre-Quiberon (Morbihan), Paris, Tourte et Petitin, 1914, non pagin (...)

« La route nationale que suivent les maraîchers, marchands d’œufs et de volailles, paysans qui portent leurs denrées à Quiberon, traversant la station balnéaire, le ravitaillement se trouve, de ce fait, assuré de première main ; les boulangers et bouchers de Plouharnel et de Saint-Pierre, qui se transportent d’une commune à l’autre, servent la clientèle à domicile. De plus, un grand magasin d’approvisionnement permet de trouver sur place tout ce dont on peut avoir besoin. La pêche des crevettes et coquillages se fait à mer basse dans la baie de Quiberon, précisément en face de Penthièvre, et il est très facile de trouver poissons et homards au petit port voisin de Portivy23. »

  • 24 Délibération municipale de Carnac, du 15 décembre 1912.

10La municipalité doit donc ne pas mécontenter des commerçants souvent nécessaires au bon fonctionnement de la station balnéaire. En 1912, MM. Hays et Magueresse, charcutiers à Auray et à Étel, se plaignent auprès de la municipalité de Carnac de payer une patente exagérée pour le peu de temps qu’ils passent dans la ville pendant la saison d’été. Or, ils n’ont qu’un simple dépôt à Carnac, et n’y viennent que deux fois par semaine en été et une fois en hiver. Pour le conseil municipal, « ils rendent de très grands services à la population en été surtout quand [sont là] les touristes et baigneurs (parce qu’il faut remarquer [qu’il n’y a] pas de charcutiers à Carnac). Le conseil à l’unanimité demande à ce que la patente de MM. Hays et Magueresse soit réduite de moitié, autrement [ils se verraient] priver d’un commerce […] très utile sinon indispensable24 ». Les populations locales comprennent qu’elles doivent parfois composer avec les étrangers, sous peine de ne pas contenter les baigneurs et donc nuire à la station balnéaire. Leur volonté de professionnalisme a aussi pour but de limiter ces apports étrangers.

De l’imprévu à la professionnalisation

Héberger

  • 25 « Les petits trous pas chers »…, op. cit., p. 227-237 ; Xavier Dubois, « L’évolution de la pratiqu (...)

11Le logement représente une part intéressante de profits, au xixe siècle jugée relativement facile. Il s’agit d’un complément non négligeable dans les revenus du ménage, bien qu’il soit difficile de connaître les gains variables d’un pêcheur : Louis Tissier, dans Le Matin du 30 avril 1905, alors que le contexte de la pêche, notamment à la sardine, n’est pas bon, rapporte comme revenus moyens annuels à Tréboul 204 francs, Douarnenez 220 francs, Audierne 143 francs, Penmarc’h 122 francs. Xavier Dubois relève des revenus moyens annuels de 500 à 900 francs entre 1865 et 1913 pour la pêche sardinière, contre une centaine de francs pour le chalutage hivernal. Par rapport aux loyers indiqués par le guide « Les petits trous pas chers » de 1903, le revenu d’un marin apparaît réduit. Le séjour dans les logements dans les stations balnéaires de Tréboul, de Douarnenez et de Penmarc’h est estimé peu élevé25. Les appartements meublés, assez nombreux à Douarnenez, se louent entre 30 et 50 francs par mois la pièce. À Guilvinec, port voisin de Penmarc’h, le touriste peut s’installer moyennant un loyer de 100 à 120 francs pour trois mois. L’auteur du guide précise que les prétentions des habitants « sont raisonnables et, n’était la distance, il faudrait conseiller à toutes les petites bourses de se rendre à Guilvinec. [… Par contre,] les personnes qui aiment le confort ne seront pas aussi favorisées que les gens modestes, en effet on ne rencontre pas une villa dans toute la commune ». Ce revenu est apprécié, car il équilibre le budget du ménage en cas de mauvaise pêche.

  • 26 Auguste Duvallon, Pornic et les environs, Nantes, Onaud/Manguin, 1879, p. 5.
  • 27 Pol de Courcy, De Nantes à Lorient, à Saint-Nazaire et à Rennes, Paris, Hachette, 1863, p. 187.
  • 28 Délibération municipale de La Tranche-sur-Mer, du 9 août 1863.
  • 29 « Les petits trous pas chers »…, op. cit., p. 266.

12Ce secteur d’activité est convoité, d’autant qu’il suffit d’aller chercher le baigneur au xixe siècle. Auguste Duvallon prévient, en 1879, que « la population de Pornic est un peu spéciale ; lorsque la saison commence, elle est avide d’étrangers, c’est, du reste, son gagne-pain ; à l’heure de l’arrivée des trains, on voit, par groupes, des familles entières venant se rendre compte du nombre de voyageurs, demander leur nom s’ils ne sont pas connus, ou souhaiter la bienvenue aux habitants, savoir s’ils viennent pour longtemps, où ils vont se loger, ce qu’ils vont faire, etc. Il y a une critique régulière contre tout le monde ; les plus riches sont les plus estimés, c’est surtout les apparences que l’on apprécie à première vue : on veut savoir à tout prix ce que l’on gagnera avec celui-ci, le bénéfice que l’on fera sur celui-là, on calcule, on déduit, on multiplie à l’infini26 ». Les habitants prennent tôt l’habitude de loger des baigneurs. Le logement chez l’habitant, avec l’éventuel hôtel, est le premier type de logement connu dans une station balnéaire. Pol de Courcy précise qu’on trouve, au Pouliguen en 1863, « peu d’hôtelleries, il faut se loger chez les habitants27 ». À La Tranche, en août 1863, 200 personnes environ tiennent des loyers dans le bourg, tant dans les hôtels que dans des maisons particulières28. En 1903, Port-Navalo propose « peu ou point de villas à louer, mais des parties de maisons, chez les habitants du pays et à des prix très modiques29 ».

  • 30 Jules Michelet, Correspondance générale, t. VIII 1856-1858, Paris, Honoré Champion, 1998, p. 775.
  • 31 Bulletin paroissial de Saint-Gilles-sur-Vie, de juillet 1926.
  • 32 Bulletin paroissial L’Écho de Saint-Pierre-des-Sables, de juillet 1934.

13Loger le baigneur devient donc une activité lucrative, pour laquelle il convient de faire des efforts, car il faut rendre le logement agréable. Au milieu du xixe siècle, l’activité réclame encore peu de travail. C’est pourquoi Athénaïs Michelet, la femme de Jules Michelet, précise que, lors de leur séjour à Pornic en 1858, ils sont chez « une vieille demoiselle point gênante et qui, par scrupule de conscience, loue sa maison au prix le plus modeste30 ». Cette dame considérerait qu’elle escroque les touristes en ne faisant que les loger. Les efforts que concèdent les habitants modifient cette mentalité au cours du siècle. En effet, quand les autochtones font de la place dans leur maison, c’est souvent la leur qu’ils laissent. Le curé de Saint-Gilles-sur-Vie commente une saison 1926 superbe à venir : « On se logerait plutôt dans une cave, un fournil ! Et il ne faut pas en disconvenir, ça rapporte. Du mal en cela ? Oh ! non ! Tant de chalets ont tant coûté à bâtir31. » De plus, les efforts doivent être plus réguliers : ce n’est plus seulement le traditionnel ménage de printemps, que l’on voit aux Sables-d’Olonne, où « on tente l’impossible pour que, chez nous, ils soient absolument chez eux. La dernière main est mise à tout, à tout ce qui concourt à la satisfaction des yeux et à la joie des cœurs. Et l’on blanchit. Et l’on peint. Et l’on astique. Et l’on tapisse, ou retapisse. Et l’on modernise… Que ne ferait-on pas32 ? » Le logement doit être parfait à chaque arrivée, ce qui implique des préparatifs plus fréquents à mesure que les séjours raccourcissent, à partir de l’Entre-deux-guerres. Cette activité du quotidien, essentiellement féminine, moins spectaculaire, reste peu mise en avant dans les sources.

  • 33 « Les petits trous pas chers »… op cit., p. 301.
  • 34 Archives municipales de Concarneau, 4 R 1, lettre de E. Rossignol (Paris-Batignolles) au maire de (...)
  • 35 Archives municipales de Concarneau, 4 R 1, réponse du maire de Concarneau à C. Van Halmé (Ostende) (...)

14Avec ce potentiel d’hébergement, le séjour n’est pas toujours préparé à l’avance au xixe siècle. Quelques voyageurs se renseignent toutefois auprès des autorités locales, le maire ou le curé, ou des personnes qui se font connaître comme meilleures indicatrices des locations possibles. Toutes les communes littorales n’ont pas de logements disponibles, comme chez les habitants de Jard en 1903, « ceux-ci n’ayant pas l’habitude de [les] recevoir et n’étant pas organisés pour cela33 ». M. Rossignol, venant de Paris-Batignolles, écrit au maire en 1864 pour s’assurer qu’il va trouver à Concarneau à louer sur le rivage et au bord même de la mer une maison meublée et suffisamment grande pour loger dix personnes, dont cinq enfants et deux domestiques34. En 1890, le maire de Concarneau rassure M. Van Halmé, avocat d’Ostende, sur les hôtels de la ville et le prix du séjour35. Encore en 1934, la population de Piriac considère le curé comme un bon informateur sur les possibilités de logement. Ce dernier doit les raisonner :

  • 36 Bulletin paroissial de Piriac-sur-Mer, du 13 mai 1934.

« Vous désirez amener avec vous quelques amis dans la charmante station balnéaire qu’est Piriac. Combien vous avez raison ! Mais, croyez-moi, ne dites pas à ces amis très chers de se renseigner près du curé de l’endroit sur les villas, chalets, maisons libres à telle ou telle époque. Sans doute ledit curé – tout comme ses prédécesseurs – est très heureux de rendre service à l’occasion, mais que voulez-vous que le pauvre diable puisse répondre quand on lui demande “des renseignements précis, pour tel ou tel mois, sur les maisons à louer”, assez nombreuses désormais à Piriac36 ? »

15Il renvoie les personnes désireuses d’avoir des renseignements aux agences de location. Ce nouveau métier apparaît au début du xxe siècle.

  • 37 Henri Verdon, Le Pin est cuit ; un touriste à Saint-Jean-de-Monts 1912-1980, Saint-Jean-de-Monts, (...)
  • 38 Jacques Boulo, « Il y a 80 ans… », Le Pouliguen infos, n°16, juillet-août 1998, p. 9.

16À Piriac, trois établissements peuvent aider les baigneurs en 1934 : l’agence Legros, au Castel Fleuri, l’agence Piriacaise et le syndicat d’initiative de La Baule, représenté par le maire. La population locale comprend généralement rapidement l’intérêt de cette tâche rémunératrice. À Saint-Jean-de-Monts, dans les années 1910 et toujours en 1936, selon Henri Verdon, « Rose Archambaut, habitant une bourrine isolée non loin de l’actuelle rue des Sports, était l’unique intermédiaire patentée entre propriétaires de villas et candidats locataires37 ». L’agence Boulo exerce son activité de part et d’autre du port du Pouliguen. Elle engrange un chiffre d’affaires en constante augmentation, de 70 003 francs en 1912, 79 287 francs en 1913, à 249 487 francs en 1918. Si les locations s’élèvent à 206, pour une durée moyenne de 53 jours, en 1916, elles atteignent en 1919 le nombre de 278, pour une durée moyenne de 64 jours38.

  • 39 Henri Dardelin, Saint-Brevin-les-Pins, Paris, Le Livre d’histoire-Lorisse, [1re éd. 1931], p. 120- (...)
  • 40 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1829 S 1, délibération de la chambre climatique d’Es (...)
  • 41 Délibération municipale de Saint-Nazaire, du 27 décembre 1929.

17Huit agences se partagent le marché locatif à Saint-Brevin selon la liste alphabétique des agriculteurs, chefs de famille, commerçants, électeurs, industriels, propriétaires, rentiers et retraités, publiée par le guide Saint-Brevin-les-Pins en 193139. Mise à part une agence, toutes se signalent par un encart plus important. Les deux premières pages de cette liste (normalement alphabétique) sont occupées par l’annonce de trois agences, où seul le bar-café Parisien, avec ses consommations de premier choix, résiste. Au xxe siècle, l’agence devient un relais naturel pour trouver à se loger. Mme Catillon loue en 1928, à La Baule, la villa Valencia (allée des Pluviers), location consentie à son mari par l’intermédiaire de la Société des Agences de Bretagne, moyennant le prix de 15 000 francs fixé par M. Matile, propriétaire et garagiste à Nantes40. L’action de l’agence est également reconnue par la municipalité. À Saint-Marc, le conseil municipal de Saint-Nazaire veut que les propriétaires fassent exécuter les installations intérieures au gaz pour que les branchements puissent s’effectuer simultanément à la pose des canalisations. MM. Aulnette et Le Délézir proposent d’en aviser les intéressés soit par la voie de la presse, soit par celle des agences41.

  • 42 Archives départementales du Finistère, 1 M 141, rapport mensuel du commissaire de police de Concar (...)
  • 43 Archives diocésaines de Vannes, correspondance par paroisse, lettre de H. Jourdan, curé de Larmor- (...)
  • 44 Archives départementales du Finistère, 2 Q 462, bail d’immeuble de l’État, fait à Châteaulin, le 2 (...)

18Le marché locatif, avec la saison balnéaire, est également modifié en profondeur, notamment après la Première Guerre mondiale. Louer à l’année devient, par endroits, moins rentable que de louer pour la saison. À Concarneau en 1923, la crise du logement persiste, car les habitations se louent à un prix élevé : « Cette crise provient de ce que la plupart des propriétaires et locataires principaux préfèrent meubler leurs maisons pour louer en garni pendant les quelques mois de la saison balnéaire à des prix souvent supérieurs à ce que leur donnerait pour une année des locataires meublant eux-mêmes leurs logements42. » Le commissaire de police de Concarneau sous-entend que les profits locatifs saisonniers ne rapportent pas qu’aux propriétaires, puisque des locataires principaux sont également concernés par ce réflexe. Le curé de Larmor-Plage explique, en 1920, qu’en pleine saison balnéaire, les immeubles acquièrent une plus-value considérable : « Des maisons de quelque importance se louent aisément pendant deux mois 1 500, 2 000, jusqu’à 3 000 francs. Heureux à ce compte, les propriétaires ne se soucient pas de louer leurs immeubles à l’année : ils préfèrent ces prix. » Il peine pour trouver à louer un presbytère, quand il ne paie jusqu’alors que 500 francs43. M. Daoulas, préposé des douanes, doit accepter en 1922 un étage, auquel on accède par une échelle de meunier, d’un magasin que les douanes possèdent près du môle, location exceptionnel et précaire « en raison de l’impossibilité momentanée pour M. Daoulas de trouver un logement à Morgat, en raison de la saison balnéaire44 ». Une station balnéaire connaît donc un nouveau cycle dans les locations. Le même phénomène intervient pour se nourrir, largement encouragé quand la station balnéaire est installée.

Nourrir

  • 45 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1 M 1352, notice sur les eaux minérales de l’arrondi (...)
  • 46 Bulletin paroissial de Piriac, du 21 août 1938.

19Les premiers baigneurs sont confrontés à une insuffisance des commerces dans les communes littorales. La commune vit selon ses besoins et la nouvelle population, qui apparaît, n’est pas encore prise en compte. En 1823, à Préfailles, « on trouve très peu de ressources dans l’endroit même pour la nourriture. Les buveurs s’approvisionnent en grande partie à Paimbœuf, qui est à cinq lieues de la Plaine. Il y avait autrefois un traiteur au chef-lieu de cette commune. Il a changé de résidence l’an passé et tous les buveurs sont forcés de tenir leur ménage ». La notice précise que les baigneurs laissent, pour le pain qu’ils achètent chez le boulanger et quelques légumes, volailles ou poissons qu’ils trouvent à s’approvisionner dans le pays, entre 3 000 et 4 000 francs – tandis que le prix des logements est évalué à 1 500 francs. L’approvisionnement est un atout pour une station balnéaire et tend à conforter l’attrait des ports, mieux pourvus. L’auteur de la notice observe que l’affluence grandissante que connaît Pornic du point de vue des bains de mer doit surtout aux facilités trouvées pour la nourriture et le logement45. Mme Cado se souvient de Piriac dans les années 1880, où « le ravitaillement n’était pas facile. Piriac ne comptait ni boulangerie, ni boucherie, ni charcuterie46 ». Tant que la station balnéaire n’atteint pas une taille critique, le défaut de commerces reste problématique.

  • 47 Délibération municipale de La Tranche-sur-Mer, du 7 août 1864.
  • 48 Archives départementales de Vendée, S 651, « Causerie ostréicole », La Paix du 6 juillet 1882.
  • 49 Henri Verdon, op. cit., p. 13.
  • 50 « Les Petits trous pas chers »…, op. cit., p. 266.

20Les baigneurs tentent de trouver chez les particuliers le nécessaire pour se nourrir. En 1864, le conseil municipal de La Tranche relaie « les difficultés qu’éprouvent le grand nombre d’étrangers qui viennent prendre des bains de mer, à se procurer les aliments nécessaires à leur consommation, et la perte de temps de leurs domestiques d’aller de porte en porte demander à acheter ce qui leur est indispensable47 ». Il est probable que ce défaut de ravitaillement ait conduit à la stagnation de l’activité balnéaire de La Tranche au cours de la seconde moitié du xixe siècle. Vendre directement aux baigneurs reste une perspective envisageable, notamment pour les produits de la mer. Le journal La Paix sensibilise ses lecteurs en 1882 sur une pétition des vendeuses d’huîtres des Sables-d’Olonne, adressée au ministre de la Marine, qui récrimine contre l’interdiction de vendre le frai de l’huître après le 15 juillet. Or, pendant la saison balnéaire, il est absorbé aux Sables un minimum de 5 à 800 douzaines d’huîtres, vendues par de pauvres femmes qui ne vivent que de cette vente passagère48. Henri Verdon se souvient des maisons basses ordinaires où habitaient les pêcheurs montois, desservies par des chemins de sable : « C’est à ces maisons que venaient les grandes personnes, acheter boucaux [crevettes grises], poissons, crabes ou homards, les jours fastes ou la veille du retour à la maison49. » En 1903, des pêcheurs de Séné apportent à Port-Navalo et à Arzon le produit de leur pêche, plus ou moins régulièrement50.

  • 51 Ibidem, p. 291.
  • 52 Gw. Denez, « Anna, une vie à Douarnenez », Tud ha Bro, Sociétés bretonnes n°1, 1979, p. 118.
  • 53 Archives départementales du Morbihan, S 1161, notice sur Carnac-Plage, liée à la lettre de Gaston (...)
  • 54 Délibération municipale de Croix-de-Vie, du 15 juin 1907.

21Les habitudes sont vite prises de recevoir de la marchandise sans passer par un intermédiaire. À Noirmoutier, en 1903, « nulle difficulté au point de vue des provisions, les fournisseurs et les pêcheurs passant chaque jour à domicile51 ». Anna, Douarneniste née en 1902, se souvient des femmes qui pêchaient les moules dans l’aber de Port-Rhu : « Il y avait “Marie-Louise-les-Moules”, c’est la plus vieille que j’aie connue. […] Elle gagnait assez bien puisqu’elle venait les vendre dans les hôtels52. » La notice sur Carnac-Plage, en 1932, invite les baigneurs à se ravitailler à bon marché : « À la criée aux poissons de la Trinité-sur-Mer (12 minutes de tramway), on peut s’approvisionner à des prix modérés de poissons frais. Les pêcheurs vendent le produit de leur pêche au fur et à mesure de leur entrée dans ce port53. » Pour le conseil municipal de Croix-de-Vie, « les baigneurs qui viennent chaque année à Croix-de-Vie sont, pour la commune, une source de revenus importants, […] ils augmentent considérablement le commerce local, […] les commerçants voient leurs affaires doubler et tripler pendant les trois mois d’été, […] les marins trouvent dans la clientèle des baigneurs pour les produits de leur pêche un écoulement plus facile et plus rémunérateur54 ».

  • 55 Délibération municipale de La Bernerie-en-Retz, du 9 août 1868.
  • 56 Délibération municipale de La Tranche-sur-Mer, du 7 août 1864.
  • 57 Délibération municipale de Piriac-sur-Mer, du 6 mai 1883.
  • 58 Émile Auzou, op. cit., p. 174-177.
  • 59 Délibération municipale de Saint-Hilaire-de-Riez, du 2 juin 1935.
  • 60 Délibération municipale de Croix-de-Vie, du 15 juin 1907.
  • 61 Archives départementales de Vendée, 2 O 380, 460, 540, 620, 724, comptes de gestion de Croix-de-Vi (...)

22Les municipalités désirent répondre aux besoins alimentaires des baigneurs, en créant des marchés d’alimentation, couramment une des premières initiatives qu’elles tentent en faveur des étrangers. En 1868, le conseil municipal de La Bernerie-en-Retz, « voulant satisfaire le désir des nombreux baigneurs qui viennent actuellement », envisage un marché qui se tiendrait pendant la saison des bains les mardi et vendredi de chaque semaine, indépendamment de celui qui a lieu le dimanche55. Certaines communes ne possèdent pas de marché avant l’arrivée des baigneurs. Le conseil municipal de La Tranche désire, en 1864, qu’un marché soit établi le mercredi de chaque semaine, avantage immense pour les étrangers habitant la commune trois mois dans l’année56. Progressivement, le nombre de marchés augmente sur le littoral, souvent pour les trois mois d’été et dans le quartier balnéaire même. La création d’un marché d’approvisionnement est projetée en 1883 à Pornichet, le vendredi de chaque semaine, du 1er juillet au 1er octobre, au lieu-dit la Chapelle57. Émile Auzou y observe, en 1897, « des Messieurs très chics rapporter en triomphe un homard bébé payé comme un patriarche, tout surpris de ses brusques coups de queue, pendant que d’impassibles paysannes restent assises sur les talons, comme des Annamites, devant leur étalage de légumes ou de volailles liées à la patte58 ». Le maire de Saint-Hilaire-de-Riez propose, en 1935, la création d’un marché à Sion, distant du bourg de 4 kilomètres, du 15 juin au 15 septembre le mardi et le vendredi, « afin de faciliter l’approvisionnement des étrangers de plus en plus nombreux qui fréquentent cette partie de [la] plage59 ». Les municipalités y voient aussi leur intérêt. Les baigneurs, selon le conseil municipal de Croix-de-Vie, donnent aux droits de places du marché une plus-value considérable60. En effet, en 1910, la part des droits de place aux halles, foires, marchés et abattoirs y atteint 13 % des recettes61. Ces droits s’élèvent à 2 608 francs, contre 6 500 francs pour la criée. Si la part des droits de place n’atteindra plus, par la suite, ce niveau au sein du budget, ils vont progressivement se révéler aussi importants que ceux de la criée : en 1933, ils s’élèvent chacun à plus de 49 000 francs.

23Les services de première nécessité étant obtenus, le baigneur n’oublie pas pourquoi il est venu sur le bord de mer : le bain de mer requiert, lui aussi, du personnel.

Sécuriser le bain

  • 62 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1M 1352, lettre de M. Révilloud au préfet de Loire-I (...)
  • 63 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1902 S 149, pétitions de baigneurs de Pornichet, de (...)

24Le bain doit se faire en toute sécurité. L’emploi d’un guide baigneur est donc souvent nécessaire pour les établissements de bains, même si de nombreuses plages demeurent sans surveillance au xixe siècle. M. Révilloud, médecin aux bains du Croisic, observe, en 1854, que « rien ne manque dans [les] deux établissements [des plages de M. Deslandes-Orière et de M. Killion] pour la sécurité des baignants. Il n’en est pas ainsi au Pouliguen, au Bourg-de-Batz [Batz-sur-Mer], à La Turballe, et où il n’y a pas même un plongeur, une barque, rien enfin qui puisse venir au secours d’une personne qui se noierait ». Il signale au préfet un tel état de choses, afin qu’il y remédie par un arrêté interdisant aux étrangers la liberté de se baigner ailleurs que là où toutes les précautions sont prises pour conjurer les accidents, semble-t-il sans succès. Il indique d’ailleurs que les baigneurs du pays sont beaucoup plus prudents que ceux qui ne connaissent pas la mer62. La présence d’un guide baigneur s’impose au cours de la seconde moitié du xixe siècle, notamment avec le développement des établissements de bains, car la noyade ne doit plus être considérée comme une fatalité. Le 6 septembre 1901, le maire des Sables-d’Olonne prend un arrêté qui oblige chaque établissement de bains à avoir un bateau de grandeur suffisante et dans de bonnes conditions de solidité, pour pouvoir porter secours aux baigneurs qui seraient en danger. Ces bateaux ne peuvent servir à un autre usage que le sauvetage. Une station balnéaire doit éviter le traumatisme de la noyade, comme le 14 juillet 1935, quand un jeune homme de 18 ans se noie à Mazy-Plage (entre Pornichet et La Baule), endroit où, sur 800 mètres, il n’existe aucune surveillance, ni corde de sécurité. Le règlement de police ne prévoit que deux canots de sauvetage, deux maîtres-nageurs et cinq cordes de sécurité, pour une plage de 2,2 kilomètres63. La municipalité et le concessionnaire de Pornichet sont invités, à la suite d’une enquête départementale, à renforcer la sécurité sur la plage.

  • 64 Service historique de la Marine de Vincennes, CC5696, lettre du ministre de la Marine au préfet ma (...)
  • 65 Service historique de la Marine de Vincennes, CC5266, extraits de la matricule des gens de mer du (...)
  • 66 Service historique de la Marine de Vincennes, CC5 273, procès-verbal d’enquête à la suite d’un sau (...)

25Les personnes employées paraissent être des inscrits maritimes, au moins jusqu’au début du xxe siècle. Le ministre de la Marine rappelle, en 1884, que les sauvetages qu’ils effectuent doivent être considérés comme l’accomplissement d’un devoir professionnel plus que comme un acte de dévouement. Il félicite deux guides-baigneurs des Sables-d’Olonne, Jean-Jules Legall et Albert-Victor Grévery, qui est inscrit à Fécamp, et leur adresse des témoignages officiels de satisfaction64. Deux maîtres-baigneurs des Sables-d’Olonne, en 1901, sont, selon leur matricule, des pêcheurs : Victor Bertin, matelot de 3e classe né en 1871 aux Sables-d’Olonne, a servi au commerce 1 mois et 7 jours, à la petite pêche 136 mois et 3 jours, tandis qu’Emmanuelle Baillache, matelot de 3e classe né en 1872 aux Sables-d’Olonne, a servi l’État 1 mois et 26 jours, au commerce 21 mois et 3 jours, à la petite pêche 144 mois et 18 jours65. Les maîtres-baigneurs sont embauchés par les établissements de bains. En 1903, Joseph Clavery participe à la tentative de sauvetage de MM. Lefièvre et Ruband, partis se baigner par très grosse mer. Né en 1877, inscrit aux Sables-d’Olonne sous le matricule n°1394, il est maître-baigneur aux bains Morincan. Au cours de ce sauvetage, un maître-baigneur, M. Michon, périt, en plus de M. Lefièvre, retrouvé noyé66. Léon Jost se souvient de l’établissement de la Mère Ménard, à Préfailles, dans les années 1900 :

  • 67 Léon Jost, Un dernier tour en ville ; un Nantais, de la Belle-Époque aux cinquante otages, Thonon- (...)

« Elle avait comme maître-baigneur à cette époque, Gernioux, qui devait devenir notre jardinier et notre homme de confiance […] et avec lequel j’aimais bien me trouver quand il avait fini de donner ses leçons pour lui entendre raconter ses lointains voyages dans les colonies, car il avait fait son service dans la Marine67. »

  • 68 Patricia Thibaudeau, Sauver des vies ; la Société nationale de sauvetage en mer, Paris, Textuel, 2 (...)
  • 69 Petite histoire d’une grande station… La Baule de A à Z, La Baule, Archives communales de La Baule (...)
  • 70 Bulletin de la société Olona, « 135 ans de sauvetage aux Sables-d’Olonne », décembre 2002, 100 p.

26Des organismes se mettent en place au xixe siècle pour secourir les baigneurs en difficulté. Le premier organisme français voué au sauvetage en mer près des côtes est créé à Boulogne en 1825, dans l’optique du développement des bains de mer. La municipalité de Boulogne achète des canots destinés à la surveillance des bains et fonde la Société humaine des baigneurs. Après le drame de l’Amphitrite, bateau de prisonniers qui coule au large de Boulogne en 1833, cette société de sauvetage est convertie en Société humaine et des naufrages. Les initiatives sont d’abord locales, avec des sociétés fondées à Dunkerque et à Calais en 1834, à Dieppe en 1839. Les sociétés de sauvetage organisées à l’échelon national n’apparaissent que dans la seconde moitié du xixe siècle. La Société centrale de secours aux naufragés est créée en 1865, les Hospitaliers sauveteurs bretons en 1873. Fondés par Nadault de Buffon, avocat général à Rennes, les Hospitaliers sauveteurs bretons installent des postes de secours sur les rivières à l’intérieur de la Bretagne et sur le littoral68. La société des Hospitaliers sauveteurs bretons établit à partir de 1907 un poste de secours à La Baule, subventionné par l’association syndicale des Propriétaires de La Baule jusqu’en 1913, puis par la commune69. Toutefois, la présence de ces sociétés n’est pas toujours dévolue strictement à la surveillance des bains. L’emplacement du canot de sauvetage, éloigné de la plage principale, fait penser que les entreprises de sauvetage aux Sables-d’Olonne, à partir de 1867, ou de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, à partir de 1889, se concentrent sur le trafic maritime70.

  • 71 Archives départementales du Morbihan, 2 O 186/1613, arrêté municipal de Quiberon, du 23 juillet 19 (...)
  • 72 Archives départementales du Morbihan, 3 ES 55/34, lettre du ministre des Travaux publics aux direc (...)

27Au xxe siècle, de nouveaux modes de prévention se développent, comme les pavillons pour les bains. Le maire de Quiberon prévient le public en 1927 « que le service de surveillance des bains fonctionne chaque jour sauf en cas de mauvais temps, du 15 juillet au 15 septembre, de 10 à 12 heures, et de 16 à 18 heures ½. Dans leur propre intérêt, les baigneurs sont priés d’observer les recommandations suivantes : ne pas dépasser la zone surveillée et qui est délimitée chaque jour par le maître-nageur par des bouées placées parallèlement à la plage ; tenir compte des indications données sur l’état de la mer par le moyen de pavillons divers71 ». Le nombre croissant de baigneurs donne à la sécurité du bain une priorité essentielle et l’information des baigneurs doit les empêcher de se mettre en danger. Le ministre des Travaux Publics constate en 1928 l’insuffisance de la prévention des accidents sur les plages. Il faut organiser la protection des baigneurs, par un service d’information, de surveillance et de sauvetage approprié sur toutes les plages fréquentées. Il prend exemple sur certaines stations, où l’établissement de bains hisse des pavillons de couleur afin de prévenir le public sur la sûreté ou les risques de se baigner. Il faut réagir : « La rubrique “baignades tragiques” reparaît quotidiennement dans les journaux, notamment du 1er juillet au 1er octobre et l’on a pu affirmer et publier que “le nombre des noyades est supérieur au nombre de morts dues aux accidents de chemin de fer, d’automobile et d’avion réunis”72. »

  • 73 Archives départementales de Loire-Atlantique, 534 S 91, lettre du directeur de l’Enregistrement, d (...)
  • 74 Délibération municipale de Quiberon, du 29 juillet 1923.
  • 75 Archives départementales de Loire-Atlantique, ST 109, lettre de M. Hivert à la préfecture de Loire (...)

28Sécuriser le bain a un coût, difficile à connaître. La rémunération du maître-baigneur de la plage du Nau s’élève en 1892 à 240 francs73. En 1923, le maître-nageur employé par la commune de Quiberon reçoit 200 francs pour les mois d’août et de septembre74. Les exemples sont rarissimes, d’autant que cette rémunération est probablement complétée par des leçons de natation et de gymnastique, notamment au xxe siècle, comme pour le maître-nageur de Préfailles, M. Gernioux. M. Hivert, professeur d’éducation physique au lycée de Quimper, signale en 1936 « que sur la plage de Saint-Brevin-les-Pins, le concessionnaire a engagé un surveillant de plage. Comme ce surveillant n’est pas rétribué, le concessionnaire lui fait donner des leçons de natation et de gymnastique. Il s’agit d’un Noir [né à Haïti] : Géo Vlysse, électricien aux Sables-d’Olonne. Des cartons réclame indiquent : Géo Vlysse, professeur diplômé ; natation, boxe, gymnastique suédoise, s’adresser au concessionnaire ». Il ne voit pas d’inconvénient à ce qu’un collègue essaie de gagner sa vie en travaillant sur la plage, mais, à son avis, ce n’est pas un collègue. M. Hivert demande donc son interdiction de travailler avec cette publicité mensongère75. Dans une station balnéaire devenue vigilante quant à sa réputation, le maître-nageur, malgré ce surcoût, devient indispensable.

29L’activité balnéaire ne fait pas que créer une multitude de nouveaux métiers, elle implique également un renforcement des personnels.

Un nécessaire renforcement de personnel

Le service postal

  • 76 Archives départementales de Vendée, 15 P 30, notice individuelle sur Raymond, domicilié à La Tranc (...)
  • 77 Archives départementales de Vendée, 15 P 32, notice individuelle sur le jeune B., domicilié chez s (...)
  • 78 Archives départementales de Loire-Atlantique, 8 P 207, lettre du directeur départemental des Poste (...)

30L’augmentation du nombre de touristes dans les stations balnéaires oblige un service comme la poste à pourvoir à une augmentation de personnel, notamment pour la distribution du courrier. Les notices individuelles, remplies par le sous-préfet ou le préfet pour mesurer l’aptitude (tant morale que physique) du candidat, n’emploient pas le terme de saisonnier pour désigner le poste désiré, mais les termes génériques d’intérimaire ou de surnuméraire. Raymond, domicilié à La Tranche-sur-Mer, étudiant qui a la possibilité de subvenir à ses besoins, postule en 1923 comme surnuméraire. La notice précise qu’il ne peut commencer à travailler qu’à partir du 5 juillet76. En 1928, la notice du jeune B., né en 1914, qui sollicite l’emploi de jeune facteur des télégraphes aux Sables-d’Olonne, souligne que le postulant a déjà « travaillé pendant les mois d’août et septembre 1926 et 1927 (c’est-à-dire pendant les vacances) comme jeune facteur auxiliaire des télégraphes au bureau des Sables77 ». Les notices individuelles, en Vendée, en Loire-Atlantique et au Morbihan, ne conservent toutefois pas trace d’un emploi saisonnier qui réclame des éléments de l’extérieur de la station balnéaire. L’administration postale semble préférer un personnel autochtone. Un inspecteur du service départemental des Postes de Loire-Inférieure est même envoyé en août 1930 au bureau de poste de Saint-Brevin-l’Océan, afin de rechercher un personnel compétent, « en l’absence de tout auxiliaire susceptible d’être recruté sur la côte78 ».

  • 79 Délibération municipale de Fouesnant, du 6 juillet 1902.
  • 80 Délibération municipale de Pornic, du 5 août 1904.
  • 81 Archives départementales de Loire-Atlantique, 8 P 319, lettre du préfet de Loire-Inférieure à M. H (...)
  • 82 Délibération municipale de Fouesnant, du 15 mai 1913.
  • 83 Délibération municipale de Crozon, du 8 juin 1913 ; l’extension de l’ouverture est réalisée moyenn (...)

31De nouveaux facteurs travaillent au cours de l’été. Beg-Meil, station balnéaire principale de Fouesnant, est desservie par un facteur spécial l’été. Il permet une distribution le jour même de l’arrivée du courrier dans la station, comme dans le bourg et à la différence de la campagne et de Cap-Coz, autre site balnéaire moins aristocratique, qui ne l’ont que le lendemain79. Pornic possède un deuxième facteur l’été, apte à desservir particulièrement le quartier balnéaire de Gourmalon (à un kilomètre du bourg), mais le service postal à deux facteurs montre déjà ses limites quand il s’agit de distribuer le deuxième courrier de la journée80. L’étude du fonctionnement du bureau de poste l’été paraît plus difficilement saisissable que l’étude des facteurs. Le préfet de Loire-Inférieure rassure M. Hamelle, conseiller général, sur la situation du bureau de Préfailles : « Le bureau de Préfailles, dont le trafic est peu considérable pendant les trois quarts de l’année, est pourvu de personnel supplémentaire pendant la saison balnéaire81. » Les renforts ne sont pas inutiles, car le personnel du bureau de poste est surmené au cours de la saison estivale, selon le conseil municipal de Fouesnant82 ; qu’il réponde cependant négativement à une demande de l’Administration désireuse d’ouvrir une heure de plus entre midi et deux heures pendant la saison de 1913, sous condition financière, peut poser problème. Le conseil municipal de Crozon ne se pose pas tant de questions et se félicite de l’initiative83. Il ne fait cependant guère de doute qu’un surcroît de travail intervienne avec la saison balnéaire et il n’est pas certain que le bureau de poste ait eu toujours en contrepartie du personnel supplémentaire.

  • 84 Paul Charbon et Pierre Nougaret, Le Facteur et ses métamorphoses, Barembach, Gyss, 1984, p. 88 et (...)
  • 85 Délibération municipale de Pornic, du 20 mai 1856.
  • 86 Henri Dardelin, Saint-Brevin-les-Pins, Paris, Le Livre d’histoire-Lorisse, 2002 [1re éd. 1931], p. (...)
  • 87 Arrêté du maire de La Baule-Escoublac, du 22 octobre 1918.

32Le sort estival quotidien du facteur transparaît un peu plus dans les sources disponibles. Être facteur dans une ville qui, bien souvent, est en développement permanent avec le succès balnéaire n’est pas une tâche simple. Le métier est, par nature, physique. Fin 1879, le parcours moyen que doit accomplir journellement chaque facteur rural, sans jour de congé jusqu’en 1889, est de 27 kilomètres, alors que l’emploi de la bicyclette, commencé en 1912, ne se généralise qu’à partir des années 192084. Être facteur saisonnier dans une station balnéaire combine donc des handicaps certains. En effet, la majorité des habitations ne porte en fait qu’un nom, faute de nom de rues et de numérotage des maisons dans beaucoup de stations balnéaires jusqu’aux années 1920, voire au-delà dans certaines communes. Les conseils municipaux ont d’ailleurs conscience de cette difficulté pour nombre de personnes étrangères à la commune. Celui de Pornic, dès 1856, expose ce « grave inconvénient résultant pour les habitants, et surtout pour la population flottante en été, des dénominations insuffisantes des rues […] et du manque de numéros aux maisons85 ». Henri Dardelin, auteur d’un guide sur Saint-Brevin-les-Pins en 1931, doit donc rassurer ses lecteurs quant à la bonne destination de leur correspondance : les facteurs supplémentaires pour la saison sont des retraités du bureau de poste qui connaissent le pays et qui ont vu se bâtir les villas une à une86. Cette solution de facilité n’est pas toujours possible. À La Baule, pour distribuer le courrier au cours de la saison, l’Administration fait appel à des facteurs étrangers à la commune, qui apparaissent bien en peine face au nombre de villas à connaître87.

Une sécurité de grande ville

  • 88 Délibérations municipales de Croix-de-Vie, des 25 août 1871, 16 février 1873 et 12 avril 1873.
  • 89 Arrêté municipal de Fouesnant, du 31 décembre 1912.

33Les baigneurs doivent également se sentir en sécurité. La station balnéaire transforme le petit bourg rural en petite ville pendant quelques mois. Plusieurs conseils municipaux ressentent le besoin d’avoir des gendarmes pendant la saison, afin de préserver le calme. Celui de Croix-de-Vie observe, en 1871, « que la commune […] possède sept établissements de conserve de sardines à l’huile, que cette industrie et le voisinage de la mer pour les bains attirent chaque année un grand nombre d’étrangers à la localité, que par suite de l’accroissement de la population, une surveillance de la police pour le maintien de l’ordre doit être plus active mais que malheureusement il n’existe à Saint-Gilles et à Croix-de-Vie ni commissaire de police ni gendarmerie pour veiller au maintien du bon ordre dans ces deux localités qui se touchent et dont la population agglomérée peut s’élever à 2 500 ». Il s’entend finalement avec le conseil municipal de Saint-Gilles-sur-Vie pour le paiement du loyer des gendarmes88. Plutôt que de demander un détachement de gendarmes, la majorité des municipalités procède d’abord à la création d’un garde-champêtre. À Fouesnant, cette création est décidée en 1912, de manière, notamment, à sauvegarder les propriétés rurales qui sont souvent l’objet d’incursions nombreuses de la part des touristes89.

  • 90 Délibérations municipales de La Bernerie-en-Retz, des 19 mai 1912 et 25 mars 1928.
  • 91 Délibération municipale de Saint-Jean-de-Monts, du 14 février 1909.
  • 92 Archives départementales du Morbihan, 1 O 54, arrêtés municipaux de Larmor-Plage ; cette liasse co (...)
  • 93 Arrêté municipal de Carnac, du 8 juin 1924.

34Le développement de quartiers balnéaires oblige à des renforcements d’effectifs. La mise en place de tournées de gendarmes est une première étape. Le conseil municipal de La Bernerie-en-Retz demande en 1912 que, pendant la saison balnéaire et pour remédier aux bandes de vagabonds mendiants dont les baigneurs se plaignent, la gendarmerie de Bourgneuf-en-Retz fasse, dans la commune, le plus de tournées possibles. Il réclame leur installation à La Bernerie-en-Retz en 192890. L’augmentation continue du nombre de baigneurs s’accompagne d’un besoin accru de sécurité. L’Administration est sollicitée en 1909 pour que, pendant les mois de juillet, août et septembre, un gendarme supplémentaire soit affecté à la brigade surchargée de travail de Saint-Jean-de-Monts, en vue d’exercer une surveillance journalière de la plage91. Les municipalités emploient, elles aussi, des personnes chargées de l’ordre sur la plage. Larmor-Plage institue l’emploi d’un garde-plage en 1927. Emploi saisonnier reconductible, il est employé de juillet à septembre. Cette expérience peut conduire à un emploi toute l’année : le premier garde-plage remplace le garde-champêtre en juillet 1927. Cet emploi peut aussi être un complément de revenu : le garde-plage nommé en juin 1931 est un retraité né en 185792. En juin 1924, Henri Le Diraison, garde particulier de la Société Carnac-Plage nommé en février, âgé de 52 ans, est nommé garde spécialement chargé de la police municipal pour l’importante agglomération de Carnac-Plage93.

  • 94 Délibération municipale de Pornichet, du 15 mai 1921.
  • 95 Délibération municipale de Larmor-Plage, du 19 avril 1931.
  • 96 Délibération municipale de Saint-Brevin-les-Pins, du 13 mai 1938.

35Les personnes occupées à la sécurité ne chôment pas, surtout quand le sous-effectif ne permet pas la dissuasion. Le conseil municipal de Pornichet s’alarme, en 1921, des « nombreux vols qui ont été commis depuis la fin de la guerre dans des chalets inhabités, [qui] démontrent le risque que courent les propriétaires qui ne viennent à Pornichet que pour la saison et n’assurent pas la garde de leurs immeubles durant le reste de l’année. Il fait observer que, si la police locale est souvent impuissante à prévenir les vols dans les maisons habitées des agglomérations importantes, elle est bien plus impuissante à les prévenir dans une localité qui n’a d’autre agent de police qu’un garde-champêtre dont le temps est absorbé par de multiples travaux ou scissions et dans laquelle la grande majorité des maisons est dépourvue pendant huit mois d’habitants ou de garde sérieux94 ». M. Chailloux milite, en 1931, auprès du conseil municipal de Larmor-Plage, pour une présence permanente de deux gendarmes pendant la saison estivale. De juin à septembre, ils pourraient combattre les « éléments étrangers qui s’y conduisent comme en territoire conquis, y jettent le trouble, étant assurés de l’impunité, […] la présence du seul garde-champêtre ne peut suffire à prévenir et à réprimer95 ». La venue des gendarmes à Saint-Brevin paraît inévitable. Le nombre d’habitants permanents est passé de 2 318 en 1921 à 3 387 en 1936, le nombre de villégiateurs est en progression constante, atteignant en 1937 un chiffre d’environ 25 000, tandis que la commune doit subir l’accroissement de la circulation routière96. Après avoir multiplié les demandes, à partir de 1921, la commune obtient en 1938 ses gendarmes saisonniers, du 3 juillet au 11 septembre.

  • 97 Délibération municipale de Pornichet, du 23 octobre 1921.
  • 98 Délibération municipale de Pornichet, du 15 janvier 1922.
  • 99 Arrêté municipal de La Baule-Escoublac, du 12 juillet 1937.

36L’installation de gendarmes dans la station balnéaire oblige toutefois la commune à payer leur loyer. Certaines municipalités hésitent donc. La présence des gendarmes apparaît économique quand la situation réclame des mesures fortes. En 1921, le conseil municipal de Pornichet, inquiète des cambriolages et des vols, réclame deux gendarmes, car « la commune n’a pas les ressources pour se créer elle-même une police municipale susceptible de protéger efficacement les gens et les propriétaires97 ». L’autorité militaire donne néanmoins un avis défavorable à la création d’un poste de gendarmerie, car la population y est calme, même pendant la saison balnéaire, et Pornichet est visité chaque mois une quinzaine de fois, soit de jour, soit de nuit98. Cette création n’a lieu qu’en 1930. Les plus importantes stations balnéaires connaissent l’importance de la sécurité. La police municipale de La Baule emploie, en 1937, onze saisonniers, comme Lucien Royer, affecté au service de la circulation et de sécurité de la voie publique de la commune, à titre provisoire, du 1er juillet au 20 septembre de chaque année. Il est payé 40 francs par jour99. Il s’agit d’une différence notable entre une station balnéaire qui accueille, dans les années 1930, plus de 30 000 touristes, par rapport à d’autres, qui ne sont investis que par quelques centaines d’estivants.

Une animation de la plage

  • 100 Archives départementales de Loire-Atlantique, ST 107, rapport du capitaine Sautjean, commission co (...)
  • 101 Michel Rainis, Avènement et développement des loisirs du corps sur le littoral Ouest de la France  (...)
  • 102 Archives départementales de Loire-Atlantique, 534 S 21, lettre de M. Moreau-Defarges au chef de di (...)

37Les populations locales investissent aussi la plage, afin de proposer des animations. La station balnéaire se présente comme une ville de bien-être et de santé. Le sport y participe et les éducateurs sportifs occupent une partie de la plage au xxe siècle. Pendant la saison 1931, la commission consultative départementale de l’éducation physique constate la présence, sur les plages de Loire-Inférieure, de neuf professeurs, dont trois femmes, à La Baule, cinq à Pornichet, deux au Pouliguen, un à Batz, un au Croisic, trois, dont une femme, à Saint-Brevin, un à Tharon et deux, dont une femme, à Pornic100. Les clubs de plage demeurent relativement peu nombreux avant la Seconde Guerre mondiale. Michel Rainis n’en dénombre que quatre sur le littoral qui va de La Baule à Morgat : en plus de ces deux stations balnéaires, il en existe à Carnac et à Bénodet101. Le Stade maritime de l’Ouest, fondé et dirigé en 1923 par le docteur Moreau-Defarges, propose sur la plage de La Baule des exercices et des jeux du 1er juillet au 15 septembre. Si, l’été, le docteur Moreau-Defarges habite sa villa bauloise, il demeure l’hiver dans le XVIe arrondissement de Paris102.

  • 103 Délibération municipale du Pouliguen, du 12 juillet 1923.
  • 104 Délibération municipale de Batz-sur-Mer, du 8 juillet 1934.
  • 105 Arrêté municipal de Noirmoutier, du 12 août 1932.
  • 106 Archives départementales de Loire-Atlantique, 534 S 21, pétition (6 signatures) au préfet de Loire (...)

38Les professeurs d’éducation physique se renseignent auprès des municipalités pour savoir s’ils peuvent travailler pendant la saison balnéaire. En 1923, le conseil municipal du Pouliguen autorise M. Bertin-Augaul à donner sur la plage Sainte-Anne des cours d’éducation physique103. En 1934, celui de Batz reçoit la demande d’un professeur d’éducation physique de Saint-Ouen-la-Rouërie (Ille-et-Vilaine), pour être autorisé à donner des leçons sur une plage de Batz. Il lui donne son autorisation, sauf sur la plage Saint-Michel où M. Trotzier officie depuis plusieurs années, un professeur y étant jugé suffisant, vu le peu d’étendue de la plage104. Quelques municipalités surveillent d’ailleurs les conditions dans lesquelles doivent avoir lieu les exercices et veillent à ce que l’usage de la plage n’en souffre pas. À Noirmoutier, à partir de 1932, « les exercices de gymnastique sont autorisés sur des emplacements et à des heures fixés par l’autorité municipale. Au cours des leçons, le costume suivant y sera toléré : pour les hommes, culotte dite de “sport”, permettant de garder le torse nu, cette culotte devant être obligatoirement flottante et en étoffe non transparente ; pour les femmes, tunique grecque en étoffe non transparente et modérément décolletée, recouvrant une petite culotte d’étoffe analogue105 ». Quelques propriétaires se plaignent à La Baule « que les cours de gymnastique autorisés à s’installer sur la plage s’étendent démesurément et que les familles riveraines ne savent plus où placer leurs tentes à certains endroits. Le nombre de ces cours augmente chaque année, leurs agrès aussi ». S’ils ne veulent pas empêcher ces professeurs de travailler, ils demandent néanmoins que leur emplacement soit limité, afin que la plage n’en soit pas envahie106.

  • 107 Gw. Denez, article cité, p. 113.
  • 108 Arrêté municipal de La Baule-Escoublac, du 12 mai 1914.

39Les marchands profitent de la présence de baigneurs pour investir la plage. Ce commerce peut être ambulant. Anna, une Douarneniste née en 1902, se souvient, plage des Dames, d’une femme qui venait avec son panier vendre des gâteaux aux gens qui étaient à la plage. Elle précise que « les gens chics achetaient107 ». Ce type de vente, probablement courant malgré des traces trop rares dans les archives, entraîne parfois quelques débordements. Le maire de La Baule considère, en 1914, « qu’il importe d’épargner aux baigneurs sur la plage, les tracasseries de gens de nationalités diverses qui, sous prétexte d’offrir des marchandises, telles que poteries, tapis d’Orient, et autres objets, s’introduisent sous les tentes et importunent les familles par leur insistance grossière, allant parfois jusqu’aux menaces108 ». Il réitère la limitation des vendeurs sur la plage en 1934.

  • 109 Arrêté municipal de La Baule-Escoublac, du 29 juin 1934.

« L’accès de la plage est formellement interdit aux marchands de pelleteries, tapis, dentelles, ainsi qu’aux colporteurs vendant toutes autres marchandises et objets quelconques. Seuls pourront être autorisés les marchands de gâteaux, confiseries, rafraîchissements, dont les produits seront efficacement protégés contre toute souillure. Pour exercer, ils devront obtenir un permis de circuler, délivré par le maire, qui se réserve au surplus de n’accorder ces autorisations que dans la mesure où elles seront compatibles avec les besoins de la clientèle109. »

  • 110 Archives départementales du Finistère, 4 S 29, rapport de M. Cevaer, ingénieur des Ponts-et-Chauss (...)
  • 111 Archives départementales de Vendée, 1 O 1063, rapport de l’ingénieur du service vicinal sur la per (...)

40En plus de ces marchands ambulants, le baigneur profite de marchands installés dans des cabanes en bois, sur la plage, en dehors des établissements de bains. Les marchandises vendues se limitent à la nourriture et à la boisson, avec parfois des stands dévolus aux articles de plage. Ces boutiques sont souvent tenues par des femmes, notamment des veuves. La veuve Hervé obtient en 1924 une parcelle de terrain de 40 m² sur le terre-plein de la cale de Beg-Meil, pour l’installation d’une cabane de vente de pâtisserie. Elle le transforme en débit de boissons hygiéniques, puis cette concession est cédée en 1930 à M. Le Roux. Cette boutique ne fait pas que vendre des boissons : elle rend de nombreux services, comme des renseignements aux baigneurs ou le développement photographique. Le concessionnaire assure également la propreté du terre-plein110. À Saint-Jean-de-Monts, le petit commerce d’épicerie de la veuve Milcent, placé habituellement pendant la saison balnéaire sur un terrain privé, empiète illégalement sur le chemin d’accès à la plage en 1931. Le président du syndicat d’initiative, Henri Aublé, décrit le magasin : « En fin de route conduisant du bourg de Saint-Jean-de-Monts à la Plage, et sur terrain particulier, à l’alignement de la dite route, était installée une boutique en planches, d’ailleurs assez vétuste, dans laquelle une Mme Veuve Milcent vendait des jouets et des articles de confiserie111. »

  • 112 Délibérations municipales de Douarnenez, des 10 juin 1933 et 29 mai 1937.
  • 113 Archives départementales de Vendée, 7 M 205, arrêté préfectoral du 20 août 1890 sur la demande Niv (...)

41La veuve Gourrot installe, en 1933, une baraque près de la plage des Dames à Douarnenez pour la vente d’articles de plage, contre une redevance de cent francs à verser à la commune pour la période du 1er juin au 31 octobre de chaque année. En 1937, la baraque, transformée entre-temps en débit de boissons hygiéniques, est agrandie. Associée à sa sœur Christine Vigouroux, célibataire et domiciliée à Douarnenez, elle s’engage à payer un loyer de 500 francs par an pour une période de 18 ans112. Quand le commerçant est établi, il semble qu’il renouvelle de nombreuses années sa concession temporaire. Honoré Nivelle, propriétaire à La Faute, occupe à partir de 1 890 une parcelle de domaine public maritime pour des cabines. M. Magniant ne prend sa suite qu’en 1912, avec une buvette et seize cabines de bains113. La multiplication et le panel élargi des activités saisonnières montrent la force économique de l’activité balnéaire. Les petits travailleurs ne sont pas les seuls à en bénéficier, les notables en tirent aussi profit.

La fortune balnéaire des notables

La position favorable des notables

  • 114 Archives départementales du Finistère, 3 P 9/3 et 9/6, Bénodet, matrices cadastrales des propriété (...)

42Possesseurs de terrains ou de fonds, parfois liés aux pouvoirs locaux, les notables bénéficient d’une dynamique balnéaire leur permettant de faire fructifier leurs biens. Avec la construction, la valeur des biens fonciers croît. À Bénodet, plage du Trez, plus de 61 % des parcelles où se sont installés les baigneurs étaient des landes ou des prés. Les terres labourables ne sont toutefois pas épargnées, puisqu’elles forment 32 % des parcelles occupées ultérieurement par les baigneurs. Guillaume Caradec installe son lotissement en 1931 sur une parcelle de terre labourable114. Ce sont les propriétaires que Ludovic de l’Étang veut convaincre du bienfait des stations balnéaires :

  • 115 Ludovic de l’Étang, « Au pays sacré des druides ; le Golfe enchanteur », Le Nouvelliste du Morbiha (...)

« Si des centaines de mille, si ce n’est un million ou plus de riches baigneurs, villégiaturistes et touristes, on ne compte que sur une centaine de mille, voire même sur une cinquantaine de mille qui se rendront aux attractions de la région sud du département du Morbihan, ce nombre serait plus que suffisant pour y faire régner la prospérité parmi tous ses habitants sédentaires. […] Pour arriver à tout cela, il faudrait que les municipalités notamment de quelques localités y mettent de la bonne volonté ainsi que les propriétaires de ces terrains. Espérons qu’il en sera ainsi pour le bien de tous115 ! »

  • 116 Frédéric Le Berre et Emmanuelle Rio, L’Urbanisation du littoral du Morbihan : vocation des sols, é (...)

43Les ventes foncières sont d’ailleurs facilitées par la division multiple des terres en champs ouverts et une agriculture relativement déficiente : Frédéric Le Berre et Emmanuelle Rio constatent que, dans la presqu’île de Rhuys, pour une période postérieure à 1945, les propriétaires dans des communes comme Arzon, Saint-Gildas-de-Rhuys, Sarzeau et Damgan, caractérisées par ce manque de résistance sociale, cèdent progressivement leurs terres agricoles tandis que l’agriculture au Tour-du-Parc, au littoral moins attractif également, profite d’un rythme de déclin plus modéré, qui limite la construction116.

  • 117 Alain Charles, « Sur les rivages du pays de Guérande ; précurseurs et fondateurs de la villégiatur (...)
  • 118 Archives municipales de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, matrices cadastrales des propriétés bâties (191 (...)

44Certains notables utilisent une partie de leur argent pour transformer le littoral. Jules Benoît, qui arrive au Pouliguen à l’âge de seize ans, fonde sa fortune sur une raffinerie de sel, qui permet de ne plus dépendre des caprices de la météo. Il achète en 1834 cinquante hectares de la concession de Donatien de Sesmaison afin de se prémunir contre les sables qui envahissent son usine, située sur la rive gauche de l’étier du Pouliguen. Selon Alain Charles, il reçoit, en véritable notable, les personnalités de passage, comme Balzac, Musset et Victor Considérant, ami d’enfance de Jules et Edouard Benoît. Pendant plusieurs années, il se charge des obligations de la concession Benoît-Levesque (Louis Levesque, décédé en 1840, était son associé), qu’il cède en 1862 à ses fils. Ses fils créent en 1877 la société commerciale Benoît et Compagnie, tandis que quelques terrains trouvent preneurs auprès des baigneurs. M. Crucy construit, le long de l’étier, Ker Tony, M. Douillard, en bord de mer, Ker Blanche (l’Océane). L’entrepreneur Gralpois convainc Jules Benoît de lotir son terrain et François Aubry, jeune architecte paysagiste nantais, conçoit un parc paysager privé totalement résidentiel. Les copropriétaires du parc se regroupent en association syndicale en 1892, un an après le décès de Jules Benoît117. À Saint-Gilles-sur-Vie, Louis Scoofs, conserveur à Croix-de-Vie et propriétaire à Fontenay-sous-Bois, spécule en bâtissant jusqu’à dix chalets dans le quartier de la Plage. Il en construit trois en 1914 (Tamaris et Mouette, Atlantique, Les Dunes), six en 1915 (Les Pins, Brunette, Les Peupliers, Les Vagues, Les Flots et un autre) et un en 1925 (Rochebonne). Il les vend rapidement, puisqu’en 1926, il en cède cinq, et ceux qui lui restent en 1930118.

  • 119 Archives départementales de Loire-Atlantique, 4 E 36/70, procès-verbal de la première assemblée gé (...)
  • 120 Archives départementales de Loire-Atlantique, 4 E 36/70, acte de vente par la Société immobilière (...)
  • 121 Archives départementales de Loire-Atlantique, 4 E 51/97, dépôt des statuts de la Société civile de (...)

45Les autochtones comprennent leur intérêt d’investir dans l’activité balnéaire personnellement. Les notables prennent part aux initiatives de lotissement. La constitution de la Société immobilière des Bains de mer de Pornic, en 1884, se fait sous l’impulsion d’un habitant de Clion, commune limitrophe de Pornic, Alfred Benoist. Y participent de nombreux propriétaires nantais, mais également Raphaël Bertin, charpentier à Pornic, Justin Vallée, propriétaire à Saint-Père-en-Retz, à une dizaine de kilomètres, Alfred Grimaud, négociant à Pornic, Eugène Lecomte, entrepreneur à Sainte-Marie, commune limitrophe, Pierre Douand, horticulteur à Pornic, et Louis Billonet, horticulteur à Pornic119. Une partie des actionnaires locaux est donc directement intéressée par une extension balnéaire, dans la mesure où elle amènera un surplus d’activité. Les parcelles à lotir dépendaient d’une ancienne métairie que le père d’Alfred Benoist avait achetée en 1828120. Justin Vallée fait ainsi fructifier une partie de la somme des neuf hectares de terrains qu’il a vendus en 1883 à la Société civile des Bains de mer et terrains de Saint-Brevin, pour 9243 francs121, même s’il n’achète qu’une action à 500 francs. Dans les années 1920, Valentin Guérin, gros propriétaire à Saint-Jean-de-Monts, s’associe avec l’Angevin Théodore Charpentier, pour créer le lotissement de la Plage des Demoiselles, sur une vaste étendue de terrain lui appartenant, à cheval sur Saint-Jean-de-Monts et Saint-Hilaire-de-Riez.

  • 122 Délibération municipale de Bénodet, du 27 mars 1927.
  • 123 Archives départementales du Finistère, 2 Q 430, plan parcellaire du projet de tracé du chemin vici (...)
  • 124 George Stigler, « The Theory of Economic Regulation », Bell Journal of Economics and Management Sc (...)
  • 125 Délibérations municipales d’Arzon, des 1er février 1931 et 7 juin 1931.
  • 126 Archives municipales du Morbihan, 2 O 5/10, affaires visées dans une note imprimée « Coup d’œil en (...)
  • 127 Archives départementales du Morbihan, S 1458, lettre de R. Tassel, directeur de l’Entreprise breto (...)

46Les postes occupés au conseil municipal permettent aux notables de pallier les déficiences communales et de connaître les opérations profitables. Alors que le conseil municipal de Bénodet ajourne, faute de crédits, le goudronnage d’un certain nombre de chemins, le maire, Maurice Bouilloux-Lafont, se propose de prendre à sa charge le regoudronnage du chemin dit de la grève122. Il profitera, plus tard, de cet encouragement à l’activité balnéaire. Quand est dressée l’avenue de la Mer, en 1937, ce maire peut espérer une plus-value importante pour une partie de ses terrains, qui se trouvent n’être plus qu’à quelques centaines de mètres de la plage, en route directe123. Il met à la disposition de la station balnéaire une part de ses moyens pour en favoriser le développement, mais les moyens dont il dispose lui permettent aussi de profiter du dynamisme de la station. L’école de Chicago a développé un cadre théorique de gouvernement, formulé par George Stigler, pour qui le gouvernement a un pouvoir de coercition qui lui permet de faire certaines choses impossibles s’il fallait l’agrément de tous les membres de la société : toute partie de la société qui prend possession de la machinerie de l’État s’en sert pour renforcer sa propre position124. Certaines insinuations de contemporains corroborent cette théorie. Parmi les dix actionnaires de l’emprunt municipal, émis au taux de 5 % et remboursé au plus tard en 5 ans, destiné à créer le lotissement de Bilgroix afin de dynamiser la station balnéaire de Port-Navalo, deux sont membres du conseil municipal et trois autres ont de possibles liens avec d’autres membres du conseil125. Une feuille volante s’emporte peu après contre le conseil municipal d’Arzon, car ce lotissement, situé « au-dessus de rochers dangereux, sans une crique, ni un grain de sable126 » est un échec, dont seule la commune supporte le coût. Le directeur de l’Entreprise bretonne de construction, R. Tassel, suggère en 1929 que l’arrêté municipal de Palais, interdisant l’extraction de matériaux sur sa plage voisine des Pilotoux, a pour but de consacrer un monopole aux marchands de sable qui font partie du conseil municipal127. D’autres notables, d’une manière moins polémique, profitent de l’activité balnéaire.

Le notaire, intermédiaire inévitable

47Un personnage comme le notaire, procédant à la vente ou à l’échange des parcelles, est un intermédiaire inévitable qui peut espérer de substantiels bénéfices avec l’installation d’un lotissement balnéaire. Il s’avère difficile de connaître les émoluments du notaire, tarifés par un barème, mais il est permis de se faire une opinion à partir des frais d’enregistrement. À Morgat, le notaire Émile Pelliet doit faire face à un surcroît d’activité quand la société Richard et compagnie commence à acheter des terrains, à partir de janvier 1884. Cette société choisit en effet ce notaire pour tous ses actes. Le nombre d’actes notariés enregistrés n’augmente pas au cours des mois de janvier précédents et suivants. L’étude d’Émile Pelliet enregistre une soixantaine d’actes entre 1882 et 1886, le mois de janvier 1883 étant même le plus prolixe avec 91 actes enregistrés, du fait d’une vente par licitation des terres vaines du village de Montourzard et de nombreuses ventes concernant la veuve Lescop. Le mois de janvier 1883 est également plus important dans l’autre étude notariale de Crozon, celle de Georges Louboutin, avec 35 actes contre une vingtaine les mois de janvier habituels. Néanmoins, en janvier 1884, la part des actes notariés qui concerne la société Richard et compagnie représente 45 % du total (soit 29 actes), et encore 24 % en février 1884. Certaines journées sont entièrement consacrées aux affaires de la société de lotissement, notamment au mois de janvier. Les actes d’échange et surtout de vente se multiplient tandis que le nombre des obligations (lien de droit entre deux ou plusieurs personnes en vertu duquel l’une des parties, le créancier, peut contraindre l’autre, le débiteur, à exécuter une prestation), reste stationnaire. La société Richard et compagnie procède à quelques résiliations de bail.

  • 128 Archives départementales du Finistère, 4 E 56/93, étude du notaire Louboutin, vente M. Pelliet, du (...)

48L’action du lotissement balnéaire joue, par contre, pleinement sur les frais d’enregistrement : ils explosent au cours des mois de janvier et février 1884. En janvier 1883, les frais d’enregistrement s’élèvent à 2221,41 francs ; le mois de janvier suivant, ils atteignent les 8079,18 francs. Il apparaît probable que le notaire Émile Pelliet profite d’un enrichissement personnel important au cours de cette période d’achats. D’ailleurs, lui-même achète des biens. Le 10 août 1884, il achète à Pierre Le Mignon et son épouse une maison et des parcelles situées à Trévoal pour 1 200 francs. Le 7 janvier 1885, il achète le corps d’exploitation qui appartenait à Guillaume Martin et son épouse, situé au village de Kerdreux, pour un prix de 2 000 francs ou plus. Le 24 octobre 1885, il achète tous les immeubles et droits immobiliers des époux Daniélou aux dépendances du Caoulac’h, Goulien, Keréon, Kerbasguen et autres lieux, pour une somme de 2 000 francs128. Il n’investit toutefois pas dans l’activité balnéaire, désireux sans doute de ne pas gêner la société Richard et compagnie dans son projet. La réussite du lotissement devient pour lui une sorte d’activité rentière, puisque les ventes que parvient à faire la société Richard et compagnie se règlent dans son étude. Il n’a donc aucun intérêt à perturber un processus éminemment lucratif.

  • 129 Archives départementales du Morbihan, 3 P 2953 et 2958, Saint-Pierre-Quiberon, matrices cadastrale (...)
  • 130 Archives départementales du Finistère, 3 P 9/3 et/5, Bénodet, matrices cadastrales des propriétés (...)

49Les notaires ne sont pas tous désintéressés par l’activité balnéaire émergeante et trouvent à spéculer sur les terres. Ils participent, en tant que notables, à l’élaboration de la station balnéaire, en construisant des villas. Dès que les baigneurs construisent sur le bord de mer, la spéculation commence. Les notaires, attentifs au marché immobilier et pouvant disposer de fonds, en profitent. À Saint-Pierre-Quiberon, Maurice Buguel, notaire à Vannes, est le premier à investir sur le secteur de la plage de Penthièvre. Il achète une parcelle à la commune en 1909, parcelle qui devient la possession de la Société anonyme de la Plage de Penthièvre en 1910. Dès cette époque, le notaire de Carnac, Louis Fily, achète des terrains à la commune en 1910 et en 1914. Retraité, installé à Lorient après 1914, il devient loueur de chambres meublées et poursuit ses investissements. Il achète une nouvelle parcelle à la Société anonyme de la Plage de Penthièvre en 1922, parcelle qu’il revend dès 1924. Il partage une de ses parcelles en 1927, tout en en gardant une partie, en vend une autre en 1934 et vend finalement toutes ses propriétés à Saint-Pierre-Quiberon en 1938129. Yves Joseph Rannou, clerc de notaire à Pleuven, participe au processus à Bénodet. Il achète plage du Trez, en 1927, une petite parcelle, à l’hôtelier Sébastien Daniel. Il la revend l’année suivante, partagée, à Yves Cariou et à Marius Le Derff, lieutenant aux affaires indigènes à Adrar, en Afrique, qui construira en 1930 une maison sur une parcelle limitrophe. En 1928, il achète une partie de parcelle à Maurice Maléjac, plus importante car elle mesure 4 ares 48 (contre 56 centiares pour sa parcelle de 1926). Il la vend en 1930 au Quimpérois Alexandre Jocet, qui fait, lui aussi, bâtir en 1931 une maison sur une parcelle limitrophe130.

50Chacun peut donc espérer trouver profit dans une station balnéaire, soit en y travaillant, soit en y spéculant. L’activité balnéaire est alors pleinement considérée comme une activité importante du littoral, au point qu’elle devient de plus en plus indiscutable, malgré sa saisonnalité.

Notes

1 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1 M 1581, lettre du maire des Moutiers, du 30 mai 1849.

2 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1 M 327, pétition (14 signatures) au préfet, du 16 mai 1868.

3 Délibération municipale de Saint-Gilles-sur-Vie, du 4 mai 1937.

4 Bulletin paroissial du Croisic, d’octobre 1935.

5 Bulletin paroissial de Quiberon, d’août 1925.

6 Service historique de la Marine de Vincennes, CC5580, rapport du commissaire de l’Inscription maritime du Croisic sur la situation des pêches et autres industries maritimes, du 24 mai 1866.

7 Hervé Bazin, « La Cornouaille en 1871 ; carnet de voyage d’un écrivain », Cap-Caval n°5, 3e trim. 1985, p. 28.

8 Léon Dubreuil, Une Enfance au Marais Breton, Auxerre, Imprimerie L’Universelle, 1930, p. 196.

9 Archives départementales du Finistère, 1 M 141, rapport mensuel du commissaire de police de Concarneau, du 9 août 1923.

10 Archives départementales du Finistère, 1 M 141, rapport mensuel du commissaire de police de Concarneau, des 8 juillet et 8 septembre 1924.

11 Archives départementales de Loire-Atlantique, 532 S 27, lettre du directeur de l’Enregistrement, des Domaines et du Timbre, au préfet de Loire-Inférieure, du 24 janvier 1865.

12 Délibération municipale de Saint-Jean-de-Monts, du 11 novembre 1906.

13 Délibération municipale de Larmor-Plage, du 13 avril 1936.

14 Délibération municipale de Carnac, du 3 septembre 1939.

15 Délibération municipale de Croix-de-Vie, du 11 juin 1933.

16 Émile Auzou, La Presqu’île guérandaise ; étude géographique, historique et économique ; manuel des touristes et des baigneurs, Paris, Plon, 1897, p. 173.

17 Archives municipales de Brest, 7 S 331 et 332, devis divers pour le Grand Hôtel (1911-1950).

18 Archives départementales de Vendée, 4 M 110, lettre du sous-préfet des Sables-d’Olonne au préfet de Vendée, du 30 avril 1934.

19 Archives municipales de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, dénombrement de 1911 de Saint-Gilles-sur-Vie, liste nominative ; Archives départementales du Morbihan, 6 M 239, dénombrement de 1911 de Quiberon, liste nominative.

20 Délibération municipale de Saint-Brevin-les-Pins, du 28 mai 1893.

21 Côtes bretonnes et vendéennes, de la Vilaine à Olonne ; guide du baigneur, Nantes, Imprimerie moderne, 1895, p. 31.

22 « Les Petits trous pas chers » ; guide des familles aux bains de mer, plages de la Manche et de l’Océan, Paris, La Fare, 1903, p. 266.

23 Plage de Penthièvre en Saint-Pierre-Quiberon (Morbihan), Paris, Tourte et Petitin, 1914, non paginé.

24 Délibération municipale de Carnac, du 15 décembre 1912.

25 « Les petits trous pas chers »…, op. cit., p. 227-237 ; Xavier Dubois, « L’évolution de la pratique de la pluriactivité chez les pêcheurs sardiniers en Bretagne au xixe siècle : de la tradition à la nécessité », Gérard Le Bouëdec, François Ploux, Christophe Cérino et Aliette Geistdoerfer (dir.), Entre terre et mer ; société littorales et pluriactivité (xve-xxe siècle), Rennes, PUR, 2004, p. 220.

26 Auguste Duvallon, Pornic et les environs, Nantes, Onaud/Manguin, 1879, p. 5.

27 Pol de Courcy, De Nantes à Lorient, à Saint-Nazaire et à Rennes, Paris, Hachette, 1863, p. 187.

28 Délibération municipale de La Tranche-sur-Mer, du 9 août 1863.

29 « Les petits trous pas chers »…, op. cit., p. 266.

30 Jules Michelet, Correspondance générale, t. VIII 1856-1858, Paris, Honoré Champion, 1998, p. 775.

31 Bulletin paroissial de Saint-Gilles-sur-Vie, de juillet 1926.

32 Bulletin paroissial L’Écho de Saint-Pierre-des-Sables, de juillet 1934.

33 « Les petits trous pas chers »… op cit., p. 301.

34 Archives municipales de Concarneau, 4 R 1, lettre de E. Rossignol (Paris-Batignolles) au maire de Concarneau, du 29 juin 1864.

35 Archives municipales de Concarneau, 4 R 1, réponse du maire de Concarneau à C. Van Halmé (Ostende), du 24 mai 1890.

36 Bulletin paroissial de Piriac-sur-Mer, du 13 mai 1934.

37 Henri Verdon, Le Pin est cuit ; un touriste à Saint-Jean-de-Monts 1912-1980, Saint-Jean-de-Monts, APNS, 1981, p. 8 et p. 30.

38 Jacques Boulo, « Il y a 80 ans… », Le Pouliguen infos, n°16, juillet-août 1998, p. 9.

39 Henri Dardelin, Saint-Brevin-les-Pins, Paris, Le Livre d’histoire-Lorisse, [1re éd. 1931], p. 120-168.

40 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1829 S 1, délibération de la chambre climatique d’Escoublac-La Baule, du 9 octobre 1928.

41 Délibération municipale de Saint-Nazaire, du 27 décembre 1929.

42 Archives départementales du Finistère, 1 M 141, rapport mensuel du commissaire de police de Concarneau, du 19 mars 1923.

43 Archives diocésaines de Vannes, correspondance par paroisse, lettre de H. Jourdan, curé de Larmor-Plage, au vicaire général, du 30 septembre 1920.

44 Archives départementales du Finistère, 2 Q 462, bail d’immeuble de l’État, fait à Châteaulin, le 24 juillet 1922.

45 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1 M 1352, notice sur les eaux minérales de l’arrondissement de Paimbœuf, du 27 août 1823.

46 Bulletin paroissial de Piriac, du 21 août 1938.

47 Délibération municipale de La Tranche-sur-Mer, du 7 août 1864.

48 Archives départementales de Vendée, S 651, « Causerie ostréicole », La Paix du 6 juillet 1882.

49 Henri Verdon, op. cit., p. 13.

50 « Les Petits trous pas chers »…, op. cit., p. 266.

51 Ibidem, p. 291.

52 Gw. Denez, « Anna, une vie à Douarnenez », Tud ha Bro, Sociétés bretonnes n°1, 1979, p. 118.

53 Archives départementales du Morbihan, S 1161, notice sur Carnac-Plage, liée à la lettre de Gaston Vary, hôtelier, au préfet du Morbihan, du 23 juin 1932.

54 Délibération municipale de Croix-de-Vie, du 15 juin 1907.

55 Délibération municipale de La Bernerie-en-Retz, du 9 août 1868.

56 Délibération municipale de La Tranche-sur-Mer, du 7 août 1864.

57 Délibération municipale de Piriac-sur-Mer, du 6 mai 1883.

58 Émile Auzou, op. cit., p. 174-177.

59 Délibération municipale de Saint-Hilaire-de-Riez, du 2 juin 1935.

60 Délibération municipale de Croix-de-Vie, du 15 juin 1907.

61 Archives départementales de Vendée, 2 O 380, 460, 540, 620, 724, comptes de gestion de Croix-de-Vie de 1890, 1900, 1910, 1920, 1933.

62 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1M 1352, lettre de M. Révilloud au préfet de Loire-Inférieure, du 17 juillet 1854.

63 Archives départementales de Loire-Atlantique, 1902 S 149, pétitions de baigneurs de Pornichet, de 1935 et du 18 juillet 1935.

64 Service historique de la Marine de Vincennes, CC5696, lettre du ministre de la Marine au préfet maritime de Rochefort, de septembre 1884.

65 Service historique de la Marine de Vincennes, CC5266, extraits de la matricule des gens de mer du quartier des Sables-d’Olonne, par le commissaire de l’Inscription maritime, du 27 août 1901.

66 Service historique de la Marine de Vincennes, CC5 273, procès-verbal d’enquête à la suite d’un sauvetage opéré en rade des Sables-d’Olonne le 25 août 1903, du 28 août 1903.

67 Léon Jost, Un dernier tour en ville ; un Nantais, de la Belle-Époque aux cinquante otages, Thonon-les-Bains, Éd. de l’Albaron, 1991, p. 116.

68 Patricia Thibaudeau, Sauver des vies ; la Société nationale de sauvetage en mer, Paris, Textuel, 2001, p. 6776.

69 Petite histoire d’une grande station… La Baule de A à Z, La Baule, Archives communales de La Baule-Escoublac, 1998, non paginé.

70 Bulletin de la société Olona, « 135 ans de sauvetage aux Sables-d’Olonne », décembre 2002, 100 p.

71 Archives départementales du Morbihan, 2 O 186/1613, arrêté municipal de Quiberon, du 23 juillet 1927.

72 Archives départementales du Morbihan, 3 ES 55/34, lettre du ministre des Travaux publics aux directeurs de l’Inscription maritime, du 10 décembre 1928.

73 Archives départementales de Loire-Atlantique, 534 S 91, lettre du directeur de l’Enregistrement, des Domaines et du Timbre, au préfet de Loire-Inférieure, du 1er août 1892.

74 Délibération municipale de Quiberon, du 29 juillet 1923.

75 Archives départementales de Loire-Atlantique, ST 109, lettre de M. Hivert à la préfecture de Loire-Inférieure, du 30 juillet 1936.

76 Archives départementales de Vendée, 15 P 30, notice individuelle sur Raymond, domicilié à La Tranche, postulant au poste de surnuméraire, par le sous-préfet des Sables-d’Olonne, du 25 juin 1923 ; par souci de discrétion, les noms des personnes concernées par les notices individuelles ne seront pas divulgués.

77 Archives départementales de Vendée, 15 P 32, notice individuelle sur le jeune B., domicilié chez sa mère, aux Sables-d’Olonne, par le sous-préfet des Sables-d’Olonne, du 13 avril 1928.

78 Archives départementales de Loire-Atlantique, 8 P 207, lettre du directeur départemental des Postes de Loire-Inférieure au préfet de Loire-Inférieure, du 14 août 1930.

79 Délibération municipale de Fouesnant, du 6 juillet 1902.

80 Délibération municipale de Pornic, du 5 août 1904.

81 Archives départementales de Loire-Atlantique, 8 P 319, lettre du préfet de Loire-Inférieure à M. Hamelle, conseiller général, du 22 mai 1924.

82 Délibération municipale de Fouesnant, du 15 mai 1913.

83 Délibération municipale de Crozon, du 8 juin 1913 ; l’extension de l’ouverture est réalisée moyennant une redevance de 25 francs pour la période du 1er juillet au 30 septembre.

84 Paul Charbon et Pierre Nougaret, Le Facteur et ses métamorphoses, Barembach, Gyss, 1984, p. 88 et p. 132.

85 Délibération municipale de Pornic, du 20 mai 1856.

86 Henri Dardelin, Saint-Brevin-les-Pins, Paris, Le Livre d’histoire-Lorisse, 2002 [1re éd. 1931], p. 77 ; il explique que le numérotage est en cours, rendant bientôt inutile la nomenclature à laquelle il se livre les pages suivantes.

87 Arrêté du maire de La Baule-Escoublac, du 22 octobre 1918.

88 Délibérations municipales de Croix-de-Vie, des 25 août 1871, 16 février 1873 et 12 avril 1873.

89 Arrêté municipal de Fouesnant, du 31 décembre 1912.

90 Délibérations municipales de La Bernerie-en-Retz, des 19 mai 1912 et 25 mars 1928.

91 Délibération municipale de Saint-Jean-de-Monts, du 14 février 1909.

92 Archives départementales du Morbihan, 1 O 54, arrêtés municipaux de Larmor-Plage ; cette liasse comporte des documents personnels, concernés par le délai d’incommunicabilité de 120 ans. La communication de ces informations a donc été indirecte.

93 Arrêté municipal de Carnac, du 8 juin 1924.

94 Délibération municipale de Pornichet, du 15 mai 1921.

95 Délibération municipale de Larmor-Plage, du 19 avril 1931.

96 Délibération municipale de Saint-Brevin-les-Pins, du 13 mai 1938.

97 Délibération municipale de Pornichet, du 23 octobre 1921.

98 Délibération municipale de Pornichet, du 15 janvier 1922.

99 Arrêté municipal de La Baule-Escoublac, du 12 juillet 1937.

100 Archives départementales de Loire-Atlantique, ST 107, rapport du capitaine Sautjean, commission consultative départementale de l’éducation physique, relatif au contrôle des professeurs d’éducation physique installés sur les plages de la Loire-Inférieure pendant la saison balnéaire 1931, du 20 novembre 1931.

101 Michel Rainis, Avènement et développement des loisirs du corps sur le littoral Ouest de la France ; les stades et les clubs de plage (xxe siècle), thèse de doctorat STAPS, Université de Strasbourg II, 1998, p. 284.

102 Archives départementales de Loire-Atlantique, 534 S 21, lettre de M. Moreau-Defarges au chef de division de la préfecture, du 8 août 1923.

103 Délibération municipale du Pouliguen, du 12 juillet 1923.

104 Délibération municipale de Batz-sur-Mer, du 8 juillet 1934.

105 Arrêté municipal de Noirmoutier, du 12 août 1932.

106 Archives départementales de Loire-Atlantique, 534 S 21, pétition (6 signatures) au préfet de Loire-Inférieure, du 20 mai 1940.

107 Gw. Denez, article cité, p. 113.

108 Arrêté municipal de La Baule-Escoublac, du 12 mai 1914.

109 Arrêté municipal de La Baule-Escoublac, du 29 juin 1934.

110 Archives départementales du Finistère, 4 S 29, rapport de M. Cevaer, ingénieur des Ponts-et-Chaussées, sur la demande de M. Le Roux, du 30 décembre 1933.

111 Archives départementales de Vendée, 1 O 1063, rapport de l’ingénieur du service vicinal sur la permission Veuve Milcent, du 19 juin 1931, et lettre d’Henri Aublé, président du syndicat d’initiative de Saint-Jean-de-Monts, au sous-préfet des Sables-d’Olonne, du 16 mai 1931.

112 Délibérations municipales de Douarnenez, des 10 juin 1933 et 29 mai 1937.

113 Archives départementales de Vendée, 7 M 205, arrêté préfectoral du 20 août 1890 sur la demande Nivelle et rapport de M. Marsat, inspecteur des Eaux et Forêts sur la révocation de l’amodiation Magniant, du 9 septembre 1920.

114 Archives départementales du Finistère, 3 P 9/3 et 9/6, Bénodet, matrices cadastrales des propriétés non bâties (1841-1932).

115 Ludovic de l’Étang, « Au pays sacré des druides ; le Golfe enchanteur », Le Nouvelliste du Morbihan des 8, 12, 15 et 19 avril 1900.

116 Frédéric Le Berre et Emmanuelle Rio, L’Urbanisation du littoral du Morbihan : vocation des sols, évolution et conflits, mémoire de maîtrise Géographie, Université de Rennes 2 Haute-Bretagne, 1995, p. 58-59.

117 Alain Charles, « Sur les rivages du pays de Guérande ; précurseurs et fondateurs de la villégiature maritime », Les Cahiers du pays de Guérande, 1994, p. 10-14.

118 Archives municipales de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, matrices cadastrales des propriétés bâties (1911-1938).

119 Archives départementales de Loire-Atlantique, 4 E 36/70, procès-verbal de la première assemblée générale de la Société immobilière des Bains de mer de Pornic, du 19 février 1884.

120 Archives départementales de Loire-Atlantique, 4 E 36/70, acte de vente par la Société immobilière des bains de mer de Pornic à Mme de Bienville, du 24 avril 1884.

121 Archives départementales de Loire-Atlantique, 4 E 51/97, dépôt des statuts de la Société civile des Bains de mer et terrains de Saint-Brevin, du 3 mars 1883.

122 Délibération municipale de Bénodet, du 27 mars 1927.

123 Archives départementales du Finistère, 2 Q 430, plan parcellaire du projet de tracé du chemin vicinal ordinaire n° 12 dit de Coatalen, dressé par M. Chatté, ingénieur du service vicinal, du 31 octobre 1935.

124 George Stigler, « The Theory of Economic Regulation », Bell Journal of Economics and Management Science, 1971.

125 Délibérations municipales d’Arzon, des 1er février 1931 et 7 juin 1931.

126 Archives municipales du Morbihan, 2 O 5/10, affaires visées dans une note imprimée « Coup d’œil en Arzon » que le préfet demande d’instruire, sans date.

127 Archives départementales du Morbihan, S 1458, lettre de R. Tassel, directeur de l’Entreprise bretonne de construction (Le Palais), au préfet du Morbihan, du 29 mars 1929.

128 Archives départementales du Finistère, 4 E 56/93, étude du notaire Louboutin, vente M. Pelliet, du 10 août 1884 ; 4 E 56/94, vente M. Pelliet, du 7 janvier 1885, le document est rogné, ce qui empêche de lire la somme complète de la vente ; 4 E 56/94, vente Gabriel Daniélou et M. Pelliet, du 24 octobre 1885.

129 Archives départementales du Morbihan, 3 P 2953 et 2958, Saint-Pierre-Quiberon, matrices cadastrales des propriétés non bâties (1891-1963).

130 Archives départementales du Finistère, 3 P 9/3 et/5, Bénodet, matrices cadastrales des propriétés non bâties (1841-1932).

© Presses universitaires de Rennes, 2008

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