Version classiqueVersion mobile

Développement rural et rapports de genre

 | 
Hélène Guetat-Bernard

Conclusion

Texte intégral

PHÉNOMÉNOLOGIE DE L’HABITER

1La maison sous-tend un rapport singulier et codifié aux autres là et aux autres lointains, dans le temps et l’espace. En réfléchissant à un rapport existentiel dénué de la réalité des relations de pouvoir et de domination, l’approche phénoménologique propose de comprendre le chez-soi « comme un “là” s’affranchissant des lois de la distance et de la différence pour se constituer selon un projet d’existence, […] celui d’être toujours-déjà “auprès” des choses et des lieux par la préoccupation, mais aussi d’être toujours-dejà “avec” les autres êtres par la sollicitude à l’égard des autres, dans la coexistence. Ce projet d’existence […] relève de la nécessité de s’entourer d’un monde que l’on domestique. Ce n’est pas d’avoir une maison pour y vivre, mais d’être cette maison par la construction du monde que l’on habite » (Hoyaux, 2003 : 38). Or, cette disposition d’ouverture au monde implique que le lieu, l’espace, le territoire et le monde ne se comprennent qu’en tant que relations de proximité versus mise à distance qu’opère l’être au sein du monde. En ce sens, l’approche phénoménologique en géographie invite à comprendre que l’espace domestique revêt une intentionnalité. Par ailleurs, ce sens donné inclut ce qui se passe dans un là-bas plus ou moins éloigné (dès lors, le « en quoi ce ceci – ce que je suis là ne relève pas forcément et uniquement de « ce cela » – l’espace domestique, mais aussi ce qu’il y a dans un là-bas ») (ibid.). En clair, l’appréhension de l’habiter par l’espace domestique doit inclure l’ensemble des unités spatiales constitutives de la territorialité de l’habitant. L’espace domestique en tant que tel n’est qu’un espace parmi d’autres des différents mondes domestiqués, même si l’espace domestique joue un rôle primordial de la praxis, dans le sens où les êtres et les choses sont toujours-déjà à leur place (p. 42).

2En 1976 déjà, Armand Frémont (2005), dans son ouvrage : la région, espace vécu, avait montré que « la notion d’espace vécu aboutit à une inversion du regard du géographe, à un changement de nature de ses rapports à l’espace étudié. Il ne s’agit plus seulement d’un espace tenu pour objectif a priori, un objet, avec ses formes, ses paysages, sa nature, ses hommes, leurs activités, mais un espace vécu et appréhendé dans des rapports de plus en plus complexes à l’espace, ceux des déplacements, des habitudes, des perceptions, des émotions ».

LIEU AU FÉMININ, ESPACE AU MASCULIN ?

3À partir de la signification concrète et symbolique de la maison, les deux rapports de la mobilité à l’immobilité et du lieu à l’espace des hommes et des femmes ont été interrogés comme figure centrale du rapport d’habiter : réalité et métaphore – lien des individus hommes et des individus femmes au lieu maison. L’exemple mobilisé du pays bamiléké de l’ouest Cameroun est marqué par un système de représentations où les places du féminin et du masculin procèdent fortement de l’analogisme qui construit des chaînes de correspondances entre des éléments apparemment éloignés. La référence à la géographie corporelle a aussi permis d’explorer quels sont les symboles culturellement disponibles dans la construction du masculin et du féminin pour comprendre l’organisation des espaces sexués, au fondement de la « domination masculine ». Les femmes, de par le biologique – celui du don de vie – y sont situées dans l’ordre d’une impureté relative (par le rapport au sang). Cette impureté impose, matériellement et/ou idéellement, d’une part, leur isolement et la nécessité d’un contrôle social, d’autre part, l’étroite articulation entre leur destin biologique et leur destin social.

4Les concepts normatifs proposent des interprétations des sens des symboles et, en ce sens, les légitiment, en tant que construction sociale. De cette place imposée, le féminin occupe une position sociale (dans la structure du temps par le contrôle des étapes de la vie) et spatiale (à partir de la maison) de médiation. La maison est alors la métaphore de l’engagement dans un lieu (qui est autant un lieu de fondation du temps familial et collectif) et du passage par la maîtrise des liens entre le dedans et le dehors. Dans l’ordre pratique et symbolique, le féminin (s’)inscrit (dans) une topographie du lien social et familial. En mêlant temps et espace, les femmes rencontrées produisent alors du collectif territorialisé. C’est bien en étant là (au sens de ce « il-y-a » dont parle Berque), en y maintenant ce rôle social spatialisé et par ce lieu symbolique de la maison, que leur est accordé socialement le droit « d’aller voir ailleurs ». C’est bien parce qu’elles assurent toujours leur place en tant que mères ou parce qu’elles se doivent d’assurer ce lien (celui qui les tient à leur place dans la cuisine, pour transformer la nourriture et la servir) que les paysannes bamilékées ou les citadines de Yaoundé quittent l’espace domestique et s’engagent dans des mobilités spatiales, entre la ville et la campagne.

5L’étude des institutions, notamment de la maison, en tant qu’organisation sociale et économique, a permis de comprendre, concrètement, comment le jeu des normes, qui régit les relations entre les sexes, est légitimé et peut se lire dans l’espace. La production territoriale permet de lire les projections du champ du pouvoir sur un espace donné. Le pouvoir, en tant que codes et symboles, est opérationnel lorsque sont connues les règles et les normes et que chacun agit en conformité avec elles. Les symboles (du pouvoir) assument alors une fonction de médiation, d’échange. Pour comprendre ces symboles, ont été interrogés les fondements politiques, économiques et idéologiques de l’organisation sociale (Scott, 1986). Ainsi, les pratiques – et notamment celles des mobilités spatiales – et leur sens n’ont pu être dissociés : la compréhension des constructions territoriales, dans leur matérialité, ne peut se détacher de la manière dont, symboliquement, elles sont construites par les sociétés et plus particulièrement par les groupes qui dominent la scène sociale. L’organisation des rapports de pouvoir des hommes sur les femmes est d’autant plus opératoire qu’elle est culturellement légitimée. C’est bien parce qu’hommes et femmes ont intégré ces représentations et qu’ils appliquent ces normes qu’elles sont d’autant plus efficaces.

6Le rapport au lieu (à la maison) est ainsi le signe d’un rapport analogique toujours présent, parfois masqué, qui associe symboliquement le féminin à l’ordre du dedans. La « modernité » n’a pas complètement balayé cet ordre du monde. La figure des individus-femmes, si elle existe dans toute société, doit être interrogée dans sa signification sociale. Mais insistons : en ce cas l’association et l’inscription des femmes à une identification dans l’immobilité du lieu contribuent à soumettre leur place sociale, concrètement et idéalement, en tant qu’individus, à la cohérence et à la stabilité d’un collectif territorialisé. Ce retour, cet horizon bouclé, dans et par ce collectif associé à un lieu, collectif que contribuent à produire les femmes par les places sociales qui leur sont reconnues, mais aussi imposées et qui, ainsi, les contraignent, fonde l’ambiguïté majeure de la figure du lieu. La mobilité spatiale féminine est toutefois socialement reconnue et acceptée par l’organisation des passages que les femmes maîtrisent. Dans le même temps, cette logique socio-spatiale les contraint à l’immobile, réellement ou symboliquement, selon le contexte historique. Car l’enjeu social contemporain, auxquelles les femmes sont contraintes, par les contextes de développement, est bien pour elles d’être mobiles tout en tenant toujours leur place à la maison. Ambiguïté renforcée par l’engagement des femmes à « tenir à cette place ». D’où les situations à la fois d’engagement et de soumission où les femmes vivent des situations de surcharge de travail et de responsabilités, car elles tentent d’assurer le dehors, tout en préservant le dedans. Le maintien de l’association du féminin au-dedans du lieu-maison rend difficile la reconnaissance du sujet-femme. C’est pourtant tout l’enjeu actuel, celui de mesurer la signification des expériences nouvelles des femmes, expériences de mobilités spatiales et de rapport à l’argent, expérience aussi de nouveaux engagements dans des espaces de parole et de prises de décision.

7L’identité subjective (représentation de soi et des autres) du masculin et du féminin résulte des informations et des prescriptions culturellement disponibles. Comprendre les rapports de pouvoir dans les liens aux constructions sociales des symboles, des normes, des pratiques sociales et spatiales et de la construction de l’identité sexuée suppose ainsi, dans le même temps, de réfléchir aux « interactions, c’est-à-dire aux problèmes d’ordre et de désordre » (Bisilliat, 1989). Les relations entre les hommes et les femmes, comme les constructions identitaires et les territorialités qui leur sont liées, ne sont pas statiques mais ancrées dans des dynamiques sociales. Elles sont soumises aussi aux imaginaires. Dès lors, réfléchir aux inégalités matérielles et aux relations de pouvoir traduites par les organisations sociales et spatiales n’a pas été le seul enjeu de ce livre. Il a surtout été de comprendre comment les hommes et les femmes les modifient, par leurs représentations, pratiques et discours (dans un jeu d’influences réciproques). Ce dépassement des limites, recherché frontalement ou plus subtilement, questionne les frontières des appartenances et des projections du masculin et du féminin (Chivallon, 2001).

DÉVELOPPEMENT ET CONFRONTATION DE VALEURS

8La période coloniale a rigidifié les catégorisations spatiales et économiques du masculin et du féminin. L’introduction des cultures marchandes et des techniques modernes de production en agriculture a bouleversé les relations de travail des hommes et des femmes en ouvrant ces innovations uniquement aux hommes. Les femmes occupaient jusqu’alors un rôle central, selon les contextes, dans la production, la transformation, voire la commercialisation des denrées alimentaires. Ces transformations s’expliquent pour partie par la manière dont les puissances coloniales ont appréhendé ces contextes sociétaux étrangers. La domination coloniale a favorisé la transposition, aux cultures colonisées, des rapports sociaux de genre construits dans le cadre de l’histoire européenne. Nous avons montré qu’il ne s’agit pas de comprendre ces rapports comme la reconduction d’un même processus de modernisation qui serait le reflet d’un effet de décalage dans le temps. Il s’est agi au contraire de comprendre quels ont été les effets des regards portés par les acteurs coloniaux sur les réalités sociales des peuples dominés. Car, précisément, le XIXe siècle a été à la fois un siècle de conquête et de changements de ces rapports dans le cadre européen et occidental. Les acteurs coloniaux étaient inévitablement marqués par les catégories d’analyse de leur temps. Il n’y a pas eu simple transfert des processus économiques et sociaux européens aux contextes coloniaux. Encore moins en pays bamiléké qu’ailleurs, car, précisément, les Bamilékés ont su résister aux pressions coloniales et l’innovation qu’a supposée l’introduction du café a été appropriée et insérée dans les systèmes productifs (Dongmo, 1981, I : 116). Loin du cliché de sociétés rurales africaines passives et victimes de la modernité imposée par la domination coloniale, les Bamilékés ont opposé l’exemple d’un dynamisme endogène, voire d’une « audace » en agriculture (idem, 129). Les Bamilékés présentent ainsi un contre-exemple éloquent à la théorie de la dépendance. Toutefois, en mobilisant les grands traits de ces changements, il a été surtout question d’approfondir, en retour, tout en reconnaissant la force des résistances, la manière dont ont été influencés les rapports des hommes et des femmes à l’espace dans le terrain étudié. Les travaux sur les rapports de genre et le développement questionnent en effet cette histoire afin de mieux comprendre comment elle a été productrice de normes nouvelles, mais aussi de représentations dont nous sommes encore porteurs, comme chercheurs observant ces contextes d’action contemporains.

9La question du rapport à l’argent introduit celle de la modalité des échanges dans le contexte du marché et du hors marché. Elle pose finalement la question de savoir comment les femmes se sont inscrites et ont été inscrites corrélativement dans ces deux univers, à la fois distincts et parfois mêlés du marché, marqué par les relations d’indifférenciation, d’utilité et d’autonomie des individus et celui des relations de dons, marqués par le domestique, la réciprocité et le collectif. Elle croise inévitablement les relations des lieux aux espaces sans qu’il y ait d’association systématique : l’univers du don répond à une logique d’inclusion symbolique au lieu comme métaphore de l’ordre domestique ; l’univers du marché engage l’individu dans des relations dépersonnalisées et d’égalité supposée. Le marché modifie les règles du lieu : idéalement, il rompt les liens d’encastrement de l’économique dans le social. Il fragilise ainsi les relations ambiguës d’association de proximité versus dépendance. Il fait entrer l’espace dans le lieu. Mais nous avons surtout vu que les conditions de développement rendent compte du maillage entre logique de don et logique de marché. Ce qui est en jeu est de trouver la bonne distance entre le prix et le sans prix, entre le lieu et l’espace.

MODÈLE DE RÉFÉRENCE ET RÔLES (ÉCONOMIQUES) FÉMININS : QUEL DÉCALAGE ?

10Justement, si les femmes parviennent difficilement à se distancier des contraintes sociales qui pèsent sur elles, en raison de leur rôle central dans la reproduction (biologique, matérielle et symbolique) du groupe, elles tentent pourtant de négocier aujourd’hui, prudemment, derrière la scène sociale, en provoquant des écarts entre les règles et les pratiques, l’évolution des rapports sociaux de genre. En deçà d’un continuum apparent et revendiqué, car fortement intériorisé comme nécessaire, s’opèrent, en soubassement, des changements impulsés par les femmes, mais vécus comme en continuité et rarement en rupture avec les modèles du passé. Persiste alors un décalage entre la position sociale des femmes dans le modèle de référence et leur rôle (économique) réel sur l’exploitation, dans les collectifs, dans les liens entre ville et campagnes.

11Il nous a ainsi importé de comprendre comment, en quelque sorte, la modification de leur « horizon » permet aux femmes de modifier leur « conscience géographique ». Celle-ci se définit comme « la conscience de se concevoir soi-même par la place qui est la sienne » (Lazzarotti, 2006 : 152) dans les lieux et les espaces, y compris dans un rapport sexué. La part géographique de l’identité des femmes s’ouvre aujourd’hui à d’autres opportunités. Nous avons ainsi proposé de progresser dans une approche géographique des hommes et des femmes, conjointement à une géographie des lieux.

LES MOBILITÉS SPATIALES : UN FAIT SOCIAL TOTAL ET UNE FORME ÉLÉMENTAIRE DE LA VIE QUOTIDIENNE1

  • 1 E. Le Breton, 2006 : 26.

12L’enquête qui s’achève est partie d’une double interrogation. La première portait sur l’éclairage des sciences sociales sur le sens sociétal et historique des mobilités spatiales rurales contemporaines. La deuxième interrogation concernait les associations établies, à partir de l’exemple bamiléké au Cameroun, de l’ordre de l’entendu, entre le féminin et le lieu, le masculin et l’espace. Plus précisément, l’enquête s’est nourrie d’une réalité récente : les situations de précarité économique ou de changements des systèmes productifs mobilisent plus largement les femmes rurales dans des implications spatiales nouvelles faites d’une ouverture plus grande à des espaces de travail nouveaux. Pour autant, l’engagement des lieux aux espaces n’a pas bouleversé les systèmes de représentations qui associent doublement le féminin à la centralité des lieux et à l’immobilité spatiale. Il s’agissait alors de comprendre comment sont vécus ces décalages entre l’implication réelle des femmes dans le développement, mobilisant des compétences spatiales nouvelles, et la reconnaissance sociale et économique de leur travail ?

13Aujourd’hui, les sciences sociales appréhendent les mobilités spatiales comme un phénomène majeur, en somme « une question de société » (Haumont, Lassave, 2001), centrale pour analyser le changement. La mesure et la qualification des mobilités, l’analyse des flux ou encore celle des trajectoires – en particulier celles liées aux pratiques conjointes de la résidence et du travail (Bonnet, Desjeux, 2000) –, plus largement les incidences socio-spatiales de la mobilité questionnent les fondements de l’approche géographique. L’homologie entre population et lieu, par exemple, qui assoit la géographie des localisations (Stock, 2006 : 6) ne permet pas de saisir les itinéraires migratoires ou les mobilités circulatoires. Elle affirme au contraire les liens en sociologie entre identités collectives et individuelles et en géographie pense les territoires comme des structures spatiales stables. Elle suppose l’association entre proximité aux lieux et familiarité et fonde une anthropologie de l’espace (Ségaud, 2007).

14Cet ouvrage n’a pas une prétention épistémologique. Il a surtout été question de comprendre les raisons historiques à la prédominance du point de vue de la sédentarité sur la mobilité. Il s’est agi de comprendre comment, en façonnant les regards portés sur des réalités autres, les changements majeurs de la modernité ont supposé, pour les sociétés dominées par le fait colonial, des ajustements et des traductions, notamment dans les rapports entre les hommes et les femmes, et plus encore dans la sexuation des espaces, notamment de travail. En effet, ces détours historiques ont surtout eu pour enjeu de comprendre, dans le contexte du terrain d’étude, comment l’entrée par les rapports de genre impose de comprendre les catégories d’analyse utilisées pour appréhender le sens des placements et déplacements des uns et des unes dans l’espace mais aussi la valeur sociale donnée aux temps, espaces et revenus du travail des femmes. La déconstruction et la reconstruction des catégories d’analyse – notamment celle de sphères privée et publique ou celle de sphères productive et reproductive – a eu pour objet de fournir des outils opérationnels pour comprendre les dynamiques actuelles de développement. La prise en considération de la place du fait mobilitaire au fondement des territorialités féminines et masculines a eu pour ambition d’appréhender les dynamiques de changements sociaux aujourd’hui dans les rapports socio-spatiaux des hommes et des femmes. Elle a eu aussi pour ambition de comprendre les liens entre mobilités spatiales et développement.

15La mobilité spatiale est un « fait social total » (Dureau et al., 2000), y compris en regard des sociétés rurales et paysannes. Pour autant, un point de vue de la mobilité ne se substitue pas au point de vue de la sédentarité (contrairement à la proposition de Mathis Stock [2006] en géographie ou de John Urry en sociologie [2005]). Car valoriser le point de vue de la sédentarité, comme celui de la mobilité, engage idéologiquement vers une croyance nouvelle en des sociétés hyper mobiles traversées par des individus totalement libres de toutes attaches, allant et venant, maîtrisant toutes les métriques et les échelles, soucieux de maximiser leurs intérêts. Restons critiques aussi à la vision d’une histoire évolutionniste. Bernard Debarbieux (2009), à partir des écrits, notamment, d’Arjun Appadurai (1996) et d’Ulrich Beck (2001), indique que nous serions passés de territorialités communautaires centrées sur des aires restreintes, propres à la période pré-moderne, à des territorialités institutionnelles imposées, au cours de la période moderne, par les États-nations et centrées sur des aires en réseaux, à enfin, une situation actuelle marquée par des territorialités réflexives et électives, valorisant les lieux mis en réseaux dans le cadre de sociétés hyper mobiles et post-modernes. Certes, le fait mobilitaire a pris « une nouvelle importance dans le contexte de la mise en relation multiforme des sociétés et des territoires que le processus de mondialisation sous-tend, notamment dans le cadre des migrations internationales. La visibilité des questions migratoires, les interrogations que les déplacements de population posent et la façon dont les acteurs politiques ou les opinions publiques s’emparent des débats autour de ces questions apparaissent de plus en plus comme les témoignages d’une transformation profonde des dynamiques sociales et économiques en ce début du XXIe siècle » (Baby-Colin et al., 2007).

16Pour autant, l’étude qui s’achève a démontré qu’au fondement du social et du spatial sont ancrées les dialectiques du mobile et de l’immobile, du proche et du lointain, hier comme aujourd’hui, pour les sociétés urbaines comme pour les sociétés rurales. Les territorialités féminines et masculines réfèrent conjointement au mobile et à l’immobile, à l’ancrage et au mouvement, au proche et au lointain, même si des contextes de temps et d’espaces les valorisent différemment. Les relations entre urbanité/mobilité et ruralité/sédentarité, pourtant souvent encore reprises par les travaux contemporains sur les mobilités spatiales, sont mises à mal par les historiens des mondes ruraux eux-mêmes, qui placent désormais la mobilité au cœur du fonctionnement social à la campagne (Moriceau, 2002). Ils relativisent le modèle homéostatique selon lequel les migrations rurales ne seraient qu’une conséquence des déséquilibres macroéconomiques ou démographiques (qui supposerait l’expulsion de populations en sur-numénaires lors de crises économiques). L’étude de la transmission des biens et des statuts, inventée par les sociétés rurales pour assurer leur perpétuation, montre bien que les institutions familiales et communautaires ont placé au cœur du fonctionnement de leur territorialité la mobilité spatiale en valorisant notamment deux principes : la mobilité des hommes et la stabilité des biens – privilégiant le patrimoine et l’héritier (et/ou le successeur) – ou la mobilité des biens (par l’équité de la transmission des biens entre germains) et l’ancrage des hommes (Augustins, 1989). Les femmes, selon les contextes sociétaux, ne sont d’ailleurs pas toujours dans des conditions de transmission défavorable des biens et des statuts, que ce soit au moment de l’héritage ou au moment des négociations matrimoniales, y compris dans des contextes culturels apparemment plus contraignants pour elles. Finalement, alors que l’État moderne a construit sa légitimité sur l’affaiblissement des collectifs « domestiques » et a imposé une spatialité reposant sur des aires délimitées, circonscrites, et aux frontières linéaires, l’interrogation porte aujourd’hui sur la validité de ce modèle dans le cadre de la mondialisation. D’autres rapports spatiaux, passés inaperçus ou volontairement transformés dans le cadre de la domination coloniale par exemple, sont interrogés aujourd’hui. Ces interrogations permettent surtout d’appréhender la mobilité et la fluidité comme étant finalement au cœur des principes de perpétuation des collectifs territorialisés : principe de territoires et de collectifs ouverts, association entre des territoires de références et des lieux traversés par des mobilités. Les mobilités sont ainsi à appréhender dans leur logique propre et non toujours en regard de la sédentarité comme mode de spatialité référentielle (Tarrius, 2000).

17Lieux et espaces sont constitutifs des territorialités individuelles et collectives. Les collectifs se nourrissent du partage d’un lieu, dans la durée, la quotidienneté et l’habitude, tout en étant comme l’espace porteur d’inégalités, d’enjeux de pouvoir et de domination. L’association mémoire/territoire/identité collective fabrique de l’imaginaire, des discours et se vit dans les pratiques, les projets tout en étant contrainte par des cadres et des structures élaborées par les institutions (communautaires, familiales, étatiques, religieuses). Pour autant, les identités collectives ne sont pas toutes historiquement construites sur le principe de la clôture. Les travaux sur les mobilités spatiales, les constructions identitaires et territoriales interrogent la multiplicité des identifications territoriales et surtout leur inscription dans des temporalités différenciées. L’idée de reconnaissance publique « du soi », par l’inscription dans des projets et des actions publiques qui rendent compte de la capacité des acteurs à se faire reconnaître et à agir, ne centre pas la discussion sur le sujet et la reconnaissance de soi, mais bien sur sa mise en visibilité par l’espace public (Debarbieux, 2006 : 350). Question qui est bien sûr centrale dans l’approche des rapports de genre.

L’APPROCHE GÉOGRAPHIQUE DES RAPPORTS DE GENRE :

18Les trois grands changements sur lesquels s’est focalisé l’ouvrage sont, d’une part, un rapport d’une ampleur nouvelle des femmes à l’économie marchande, d’autre part, leurs implications dans des mobilités spatiales plus larges, enfin, une préoccupation sur le croisement entre rapport de durabilité et de genre. Revenons en conclusion sur ces trois points.

Les mobilités spatiales

  • 2 Béteille, 1981, parle d’espace relationnel ; Rousse, 1989 et Durand, 1988 de circuits migratoires.

19Dans le contexte des travaux sur les mobilités spatiales, les manières d’habiter ont été abordées en montrant comment la figure du lieu est traversée par la conjonction de la mobilité et de l’immobilité spatiale. Il faudrait poursuivre la compréhension de ces articulations. Comme il faudrait mieux comprendre celles des significations et des implications des hommes et des femmes aujourd’hui dans des formes de spatialités, certes territorialisées, mais plus éphémères, plus fluides, différentes de spatialité centrée sur des territoires marqués par une histoire longue et réciproque des organisations sociales et spatiales. Comment, aussi, se vivent des modalités complexes du rapport d’habiter entre plusieurs lieux ? Cette articulation de l’immobile au mobile a été questionnée, dès les années 1970, par les travaux sur les relations villes/campagnes notamment, souvent initiés par des géographes ou par des démographes pour les sociétés rurales contemporaines des pays des Suds. Les connaissances scientifiques circulant entre disciplines, les travaux des géographes et démographes ont suscité, dans les années 1990, un renouvellement en retour de l’approche des historiens du monde rural européen, notamment dans leur souci de prendre en considération les logiques familiales de la mobilité en lien avec la notion de champ migratoire2. Les faits de mobilité sont alors devenus un nouveau thème d’études reposant sur l’hypothèse d’une mise en relation multiforme des lieux. Or toute explication sur les mobilités spatiales est une explication sur les formes de développement (Spaan, 1999), en interrogeant comment hommes et femmes s’y insèrent.

20Les mobilités spatiales peuvent rendre compte de forme identitaire « triadique : l’être d’ici, l’être de là-bas et l’être d’ici et de là-bas à la fois », qui organise parfois des territoires circulatoires (Alain Tarrius, 2000 : 7). Le territoire est alors et avant tout un « moment d’une négociation » (Giddens, 1987). La notion d’espace liminal (Turco, 2000) et celle d’espaces intermédiaires (Roulleau-Berger, 1991 et 2005) maintiennent le doute à penser que les territoires se construiraient toujours selon une permanence temporelle et spatiale. En effet, « si l’espace parataxique est celui de la permanence, l’espace liminal est l’espace de la fragmentation et de la recomposition, qui se déploie aussi bien dans les faits que dans les discours » (Turco, 2000). Ces travaux introduisent la question de construction territoriale transitoire, momentanée, au gré des regroupements et des intentionnalités d’acteurs et à la fois de territoires qui peuvent se juxtaposer à d’autres formes territoriales plus stables, inscrits dans la longue durée et la permanence des collectifs qui leur donnent sens et une certaine matérialité (inscrite dans les paysages et les rapports à la nature, les institutions, les normes, etc.). Les territoires circulatoires ou les espaces intermédiaires sont d’un autre ordre car ils s’organisent sur la superposition avec les ordres territoriaux « traditionnels » et selon un principe de polycentralité. C’est alors les questions de la conjonction et de la disjonction (Roulleau-Berger, 2005 : 188) qui se posent, c’est-à-dire ce qui se passe dans des articulations possibles entre les mondes ou au contraire leur désarticulation.

21Les mobilités spatiales ont été fréquemment appréhendées dans le cadre de circulation migratoire à l’échelle régionale et nationale ; elles le sont de plus en plus à l’échelle internationale, l’inscription dans la mondialisation actuelle contribuant à élargir les échelles d’inscription spatiale. La réalité de ces mobilités observées à ces différentes échelles rend compte d’une augmentation importante des flux (notamment depuis ces dernières années), d’une diversité des parcours, d’une complexification des champs migratoires, d’une diffusion des manières de vivre entre mobilité et sédentarité à de nouvelles catégories de populations (en passant souvent de logiques communautaires à des logiques plus individuelles) et à partir de nouvelles zones de départ (Baby-Colin et al., 2009 ; Faret, Cortes, 2010 ; Gildas, 2010). La proportion d’individus et de familles engagées dans ces pratiques s’accroît pour devenir un phénomène prépondérant, y compris dans le monde rural et paysan des pays du sud. Ainsi, si l’histoire des campagnes doit être relue à l’aune du rapport mobilitaire (Moriceau, 2002), il apparaît, malgré tout, que les mobilités spatiales contemporaines s’inscrivent dans un contexte singulier, y compris pour les femmes qui y prennent massivement part (Catarino et al., 2005 ; Falquet et al., 2010). Nous ne sommes pas passés d’une société à individus sédentaires à une société à individus mobiles, mais il est clair qu’aujourd’hui la mobilité spatiale prend une ampleur nouvelle, à la hauteur aussi de la crise de développement que vivent certains lieux. La mobilité spatiale n’est donc pas toujours le signe d’un apaisement et, même si elle s’inscrit au cœur des logiques sociales, son ampleur varie au rythme des contextes économiques.

22L’actualité de ce phénomène de circulation, quelles que soient les échelles d’appréhension, s’inscrit dans un environnement de plus en plus contradictoire : d’un côté, la production et la diffusion d’images rendent « palpable » le différentiel de richesses entre le monde rural et le monde urbain, entre le sud et le nord, tout en diffusant l’espoir d’une modernité proche et accessible. Pourtant, la réalité est faite d’inaccessibilité (réelle et symbolique) et de l’accroissement du différentiel des richesses. D’un autre côté, les discours prônent la fluidité, la liberté et la flexibilité, mais la réalité est celle de la sélectivité et de la protection des marchés des pays développés. Cette ambiguïté entretenue permet d’imposer une illégalité aux travailleurs migrants avec une demande d’adaptabilité aux règles contraignantes qui l’accompagnent. On assiste, alors, tout à la fois à une augmentation forte des circulations entre les campagnes et les villes, entre le sud et le nord, et à une diversification des itinéraires, mais aussi à une augmentation de la dangerosité et de la précarité : la mobilité a un coût, en particulier pour les femmes, qui impose de comprendre les systèmes de domination dans lesquels elle s’inscrit. Dès lors, si le souci de la mesure des flux est incontournable, il faut aussi comprendre le sens social, politique et économique de ces circulations.

23Sens tout à la fois pour les individus et les groupes sociaux, en particulier le statut et la fonction donnés à ces déplacements. Les femmes sont de plus en plus nombreuses à être impliquées dans ces formes mobilitaires, y compris dans le cadre des migrations internationales où elles représentent la moitié des migrants. La sur représentation des femmes dans le secteur des services à la personne questionne sur les formes de division du travail et d’exploitation qui s’instaurent à une échelle intercontinentale. Ces femmes sont mobiles sans migrer définitivement, ce qui leur assure de ne pas se couper de leur réseau familial et de leurs enfants, souvent restés au pays. Leur place, parfois comme chef de famille, questionne aussi sur le sens conféré à la maternité : la contribution croissante des femmes à l’entretien de familles élargies en Afrique, à travers les ressources qu’elles parviennent à mobiliser, interroge les recompositions de rôles au sein des familles.

Le nouveau rapport des femmes à l’argent

24Implicitement l’autosuffisance a été posée par l’historiographie des sociétés paysannes comme un idéal. Chayanov (1966), dont les travaux ont influencé le concept de paysannerie, considérait que, dans un contexte où l’autoconsommation domine, les paysans modulent leurs ventes en fonction de leurs besoins monétaires. La relation entre autoconsommation et marché est alors interprétée selon un degré d’indépendance. Contrairement à cette vision du passé, les historiens, aujourd’hui, travaillent sur la diversité des inscriptions dans différents marchés, ceux des céréales, de la terre et du travail. S’ouvre ainsi un pan nouveau de recherche rurale sur la construction historique du rapport au marché et sur les relations entre économie de marché et univers du don. Les femmes y jouaient un rôle particulier car elles assuraient une entrée régulière d’argent, même si les montants étaient faibles. Autrefois, c’était par la vente de volailles, d’œufs, de lait, d’arachides, de bananes, etc. Aujourd’hui, le lien à l’économie urbaine s’opère grâce à la vente des produits de ce qui est nommé par la littérature scientifique le « vivrier marchand ».

  • 3 Ismaël Moya choisit d’utiliser le mot corrosion car son « emploi permet de s’abstraire de la dimen (...)
  • 4 En suivant la théorie marxienne définie dans Le Capital. Critique de l’économie politique.

25L’argent a toujours été crédité d’une puissance menaçante : « des anathèmes lancés depuis l’Antiquité à l’encontre de l’argent, aux revendications des mouvements antimondialisation, l’argent est associé à une menace de déchirure que la démesure induite par le désir d’argent fait peser sur la communauté » (Moya, 2004 : 167). Que cet argent soit aux mains des femmes n’est donc pas sans intérêt lorsqu’on sait que « l’argent s’annonce dans le sillage de la fascination et de la réprobation qu’il engendre sous le motif de la corrosion3 » : détenir de l’argent c’est détenir du pouvoir. Car l’argent est un équivalent général significatif de toutes les valeurs d’usage4 et ce n’est que lorsque « l’argent est pris au sérieux, comme signifiant de toutes valeurs, que s’annonce le « mauvais infini » qui le caractérise » (p. 168). Une autre caractéristique de l’argent fait de sa possession par les femmes un événement historique : la singularité de l’argent vient de sa réduction monétaire. Elle permet d’exprimer en unités monétaires des ordres hétérogènes de biens, de services, de valeurs qui deviennent dès lors homogènes et se laissent ainsi comparer. L’argent possède aussi une capacité d’anonymat pour celui qui le détient : « rien n’indique ce qui a été transformé en lui et rien ne présage de son usage à venir » (ibid.). Il permet donc de s’inscrire dans la durée, dans les projets, dans l’accumulation.

26Le paradoxe est qu’aujourd’hui, en Afrique, alors que la monétarisation des rapports sociaux s’est généralisée, l’argent s’inscrit dans l’espace du manque par une rareté inédite de la monnaie. La circulation d’argent, soutenue auparavant par les logiques communautaires, hiérarchiques, redistributrices et clientélistes à travers lesquelles les structures et les jeux sociaux se maintenaient, s’est grippée (Moya, en référence aux travaux d’Alain Marie [1997] : 170). La crise économique qui touche le monde rural et urbain africain et la chute du pouvoir d’achat de la grande majorité des ménages et des chefs de famille en particulier ont considérablement alourdi la responsabilité financière reposant sur les épaules des femmes. Il revient in fine aux femmes de rassembler ou de compléter la « dépense quotidienne ». L’argent s’inscrit ainsi aujourd’hui dans « une grande proximité féminine : constamment manipulé par les femmes et mis en circulation dans un circuit complexe où s’enchevêtrent l’activité économique, les dépenses quotidiennes, les relations d’endettement, les dons, les contre-dons, les formes d’épargne, etc., se dessine alors un espace social inter-féminin marqué par une intense circulation d’argent » (p. 172). Disséminé dans de multiples relations d’endettement et utilisé dans les cérémonies familiales et communautaires, l’argent sert alors à former et à élargir la trame de l’espace social. En ce sens, l’argent est intégré dans l’univers du don. Il est intéressant en géographie d’interroger, à partir du recours à l’argent des femmes, cet entrelacement entre univers du don et économie marchande par le médiateur qu’est le concept d’argent. L’argent pose en effet la question de la liberté à entrer en relation avec un tiers, à s’ouvrir donc à d’autres relations sociales moins surdéterminées par le lieu pour s’ouvrir à l’espace, à s’inscrire dans des temporalités nouvelles, mais il peut dans le même temps être introduit dans les échanges de dons et contre – dons dans lesquelles les femmes se sont toujours inscrites.

LA QUESTION DU GENRE ET DE LA DURABILITÉ

27Socialement, les hommes et les femmes sont inscrits dans des logiques d’orientation spatiale différenciées. La vision analogique du monde présente au Cameroun, et sous des formes enfouies en Europe, interprète le féminin vers ce qui ramène dans la maison et le masculin vers ce qui part du dedans vers le dehors. Il s’agit alors de comprendre comment des changements associés à la modernité se sont surimposés à d’autres visions du monde qui auraient perdurées. La question du développement nous oblige d’ailleurs à comprendre comment le changement prend en compte l’articulation de ces représentations entre ontologie analogique et ontologie naturaliste, celle-ci même qui fonde le projet moderne. De ce débat, retenons deux interrogations : celle sur les liens entre l’univers du don et l’économie marchande ; celle sur le développement durable qui s’interroge sur les manières de renouer des liens de correspondances entre les sociétés humaines et leur milieu. Il faudrait engager le travail pour comprendre comment ces deux rapports connotés par les rapports de genre, du mobile à l’immobile et du lieu à l’espace, construisent des contraintes mais aussi des compétences, et notamment dans les liens à la nature. La question de la durabilité est, elle-même, complexe. Elle suppose de renouer des liens de patrimonialité avec la nature et les lieux. Elle suppose de remobiliser des relations de proximité, d’alliance, de confiance, voire de communauté autour de biens communs. Le débat est complexe : le rapport territorialisé et patrimonialisé introduit positivement à la question de la réciprocité, à l’identité collective, à la confiance, à l’intimité mais ce rapport patrimonial et communautaire, proche de l’univers du don, se juxtapose parfois aussi avec celui de l’histoire de la domination et de la servitude personnalisées et territorialisées. L’univers du marché introduit précisément à d’autres relations puisque les relations de domination reposent justement sur la mise à distance souhaitée par les dominants vis-à-vis du marché. Finalement, au cœur même de la question du don et/ou du marché est posée la question de la (bonne) distance qui était précisément la question initiale de l’enquête qui s’achève.

Notes

1 E. Le Breton, 2006 : 26.

2 Béteille, 1981, parle d’espace relationnel ; Rousse, 1989 et Durand, 1988 de circuits migratoires.

3 Ismaël Moya choisit d’utiliser le mot corrosion car son « emploi permet de s’abstraire de la dimension morale impliquée par le terme de corruption. En outre, le motif de la corrosion introduit le temps qui inscrit l’action de l’argent comme progressive (l’argent en tant qu’il ronge) ».

4 En suivant la théorie marxienne définie dans Le Capital. Critique de l’économie politique.

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search