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Prêtres de Bretagne au xixe siècle

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Samuel Gicquel

Conclusion

Texte intégral

1L’analyse de la carrière de plus de 7 000 prêtres des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes a permis de distinguer trois temps concordataires et de confirmer dans les grandes lignes les périodisations de travaux antérieurs. Les trois premières décennies du xixe siècle sont marquées par le manque de prêtres et par la rapidité des promotions. Le deuxième tiers de la période concordataire se distingue par un spectaculaire blocage des carrières, en raison de l’exceptionnelle fertilité de ces évêchés. Le vicariat devient alors une étape exceptionnellement longue dans le cursus honorum paroissial. Enfin, à partir des années 1860, les profils de carrière se diversifient. Les passages vers l’enseignement, les aumôneries et les départs vers les missions et les ordres religieux limitent quelque peu l’encombrement des carrières.

2Les carrières varient dans le temps, mais aussi dans l’espace. Dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes, la dimension culturelle et linguistique est essentielle. Du point de vue des carrières paroissiales, chaque évêché tend à se diviser en deux « sous-diocèses », les franchissements de la limite linguistique étant exceptionnels. À la faveur d’un recrutement moins abondant, et en dépit de l’envoi de quelques « coucous » gallos dans les paroisses brittophones, les Bas-Bretons du diocèse de Saint-Brieuc sont promus plus rapidement que leurs confrères hauts-bretons. Par ailleurs, la déterminante urbaine est essentielle. Les prêtres citadins, grâce à leurs réseaux et leurs avantages culturels, occupent davantage que les ruraux les postes enviés, notamment dans les villes.

3Sur le plan social enfin, le xixe siècle apparaît comme une période d’uniformisation des profils cléricaux. Les séminaires jouent un rôle structurant croissant ; la formation continue se complète et s’impose progressivement, en dépit des résistances rencontrées. Dans le dernier tiers du xixe siècle, le prêtre cultivé et l’animateur d’œuvres tendent à supplanter le prêtre bon et pieux.

4Au final, l’un des principaux acquis de ce travail est de montrer l’absence de modèle qui régirait l’ensemble des carrières. Les itinéraires pastoraux sont divers et les voies de la distinction multiples. La belle carrière est protéiforme. Les administrations diocésaines gèrent chaque cas individuellement et cherchent à faire coïncider au mieux, selon des critères variés, l’offre et la demande pastorales.

5Au terme de cette recherche, plusieurs questions restent en suspens : le fonctionnement des conseils épiscopaux, les échanges entre l’administration épiscopale et son clergé au sujet des carrières demeurent largement inconnus, fautes d’archives. Les demandes de mutations, les négociations, les affrontements passent essentiellement par l’oral et laissent peu de traces. L’investissement politique et associatif des ecclésiastiques, effleuré ici, méritent également d’être approfondis.

6Quelques sondages prometteurs dans la série 3 Q des archives départementales laissent également un sentiment d’inachèvement. Il faudra un jour entreprendre le long travail de recensement des patrimoines de prêtres, peut-être complété de celui de leurs familles, pour proposer une étude précise sur la vie matérielle des ecclésiastiques concordataires, en s’appuyant sur les bases de données constituées. Ce travail pourrait s’étendre avec profit aux rapports des prêtres avec l’argent.

  • 1 Le Coadic, Ronan, L’identité bretonne, Rennes, Terre de Brume, PUR, 1998, 478 p.

7D’autres sujets mériteraient également d’être abordés, au regard de la richesse de certains dossiers documentaires et des principales conclusions de ce travail. Des études du cadre paroissial en Bretagne et de l’histoire collective des vicaires sont à entreprendre. Enfin, les problématiques soulevées dans le domaine culturel peuvent être reprises. La mémoire de la confrontation des Gallos et des Bas-Bretons au cours des dernières décennies mérite d’être collectée et analysée. Elle pourrait être comparée avec profit aux études sociologiques récentes sur l’identité bretonne1 et permettrait de mieux con naître l’histoire religieuse et culturelle, de part et d’autre de la frontière linguistique.

Notes

1 Le Coadic, Ronan, L’identité bretonne, Rennes, Terre de Brume, PUR, 1998, 478 p.

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