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Prêtres de Bretagne au xixe siècle

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Samuel Gicquel

Chapitre I. 7 300 prêtres pour deux diocèses

Texte intégral

1Les variations de la population cléricale conditionnent la carrière des prêtres. Les possibilités de promotions changeant selon l’offre et la demande, les horizons des ecclésiastiques s’obscurcissent ou s’éclaircissent au gré des pics ou des déficits d’ordinations. Une concurrence accrue place le prêtre dans une position d’attente, l’obligeant à se conformer au modèle comportemental imposé pour se distinguer. Les fluctuations d’effectifs ont ainsi des répercussions sur l’itinéraire des prêtres, les relations sociales au sein du clergé, et la pastorale.

2Le nombre de prêtres ayant été ordonnés ou ayant exercés une fonction pendant la période concordataire dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes s’élève respectivement à 4 233 et 3 138. Ces chiffres doivent être arrondis en raison des doublons toujours possibles entre les fiches et du recensement d’ecclésiastiques étrangers qui ne font qu’une incursion dans les évêchés de Vannes et Saint-Brieuc. Au total, ces deux diocèses ont donc été le cadre du sacerdoce d’environ 7 300 prêtres entre 1801 et 1905. Pour chacun, la carrière a été reconstituée, d’autant plus aisément et intégralement que le xixe siècle avance. Les bases de données ainsi constituées permettent une analyse numérique du clergé qui met en évidence les variations des effectifs cléricaux, dans le temps comme dans l’espace.

Reconstituer les carrières

  • 1 AEV, AP Treffléan, lettre de Joachim Le Guénédal au desservant de Treffléan, 3 décembre 1892.

« Monsieur le Recteur, je désire refaire l’état de tout le personnel du clergé du diocèse depuis 1802. Je viens recourir à votre concours en ce qui con cerne votre paroisse1. »

3Ainsi le vicaire général Joachim Le Guénédal (1839-1917) prie-t-il en 1892 le desservant de Treffléan, paroisse des environs de Vannes, de venir à son aide dans son entreprise de reconstitution des carrières des prêtres concordataires de son évêché. Sa démarche visant à compléter les omissions passées est à la fois symptomatique des carences de l’administration diocésaine dans le suivi du personnel clérical depuis le début du siècle et du changement de regard quelques décennies plus tard sur la gestion des ressources humaines. Qui veut connaître les trajectoires de chaque prêtre se retrouve aujourd’hui dans la même position que ce vicaire général. Aucun fichier ou registre ne retrace la totalité des carrières des ecclésiastiques concordataires. La reconstitution des carrières, parfois problématique au début du xixe siècle, est plus aisée ensuite.

  • 2 Les archives de l’évêché de Vannes et de Saint-Brieuc possèdent toutes deux un tel registre (non c (...)

4Si dans la première décennie de la période concordataire, les mutations sont globalement bien connues grâce à l’abondante production de documents engendrés par la réorganisation religieuse, ce n’est pas le cas dans les années 1810. Les listes des mutations envoyées régulièrement à la préfecture constituent alors l’un des rares témoignages directs des nominations réalisées. Les informations qu’elles contiennent recoupent la plupart du temps les données des registres du clergé par paroisse, réalisés a posteriori par les autorités diocésaines, et dont l’aide s’avère précieuse pour connaître les prêtres qui se sont succédé à la tête d’une succursale ou d’une cure2. Les nominations des chefs de paroisse peuvent être ainsi connues sans difficulté majeure. Chanoines, vicaires généraux et surtout évêques sont pour leur part aisément repérables en raison de leur fonction qui les distinguent. Il en va tout autrement pour les postes moins prestigieux, particulièrement pour ceux qui ne sont pas rétribués par l’État.

5Le traitement versé par l’État étant en effet attaché à une charge et non à une personne, de nombreux vicaires ne reçoivent aucune aide des finances publiques au début du xixe siècle. Aucun relevé systématique de leur nomination n’est entrepris à cette époque, ce qui rend leur repérage difficile. La situation s’améliore quelque peu à la fin des années 1810, lorsque les mutations de vicaires sont consignées plus rigoureusement à mesure que leur nombre augmente et que l’État prend en charge financièrement un nombre croissant de vicariats. Par ailleurs, les sorties de postes laissent des traces qui permettent d’améliorer le suivi des vicaires ; les archives, tout en mentionnant l’accès d’un prêtre à la fonction de chef de paroisse, renseignent fréquemment sur sa fonction antérieure. Les nécrologes précisent également la dernière fonction occupée par le prêtre. Malheureusement, seul le diocèse de Saint-Brieuc dispose d’un tel outil pour la première moitié du xixe siècle. La reconstitution précise de l’itinéraire d’un vicaire s’avère difficile jusqu’aux années 1820, mais le suivi ne s’avère impossible que pour les prêtres à l’instabilité chronique.

  • 3 AEV, D 46, registre du conseil épiscopal (1804-1826).
  • 4 AESB, M 24, état du clergé en juin 1811.
  • 5 ADCA, V 376, état du clergé en 1820.
  • 6 AEV, D 7, état du personnel du diocèse de Vannes (1824-1864).
  • 7 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers en Haute-Bretagne au xviiie siècle, Rennes, P (...)

6Le manque de sources exhaustives se pose de façon plus cruciale pour les fonctions non-paroissiales. Dans le premier tiers du xixe siècle, à de rares exceptions près3, elles n’ont pas laissé de trace. Le cumul de fonctions ne peut être connu que par une précision exceptionnelle dans un relevé de mutations ou un compte rendu de conseil épiscopal par exemple. Synchronisme rassurant, les lacunes observées se situent à une période au cours de laquelle les chefs de paroisse forment l’essentiel du clergé. En 1811, alors que les difficultés pour suivre les vicaires sont maximales, ceux-ci ne sont que 153 dans le diocèse de Saint-Brieuc contre 268 desservants et 46 curés4. En 1820, leur nombre s’élève à 222 mais les sources permettent alors de mieux les suivre. À cette date, les professeurs et aumôniers réunis se limitent à 27 individus5. Les chiffres sont proches dans le diocèse de Vannes qui compte, en 1824, 17 professeurs et aumôniers, 227 vicaires et 236 chefs de paroisse6. Ainsi, même si quelques zones d’ombre subsistent, la difficulté de rassembler les informations s’avère globalement moins délicate qu’au xviiie siècle7.

7Les lacunes se font rapidement plus rares. L’amélioration de la gestion administrative des effectifs cléricaux entre les années 1820 et 1840 est rendue nécessaire par l’augmentation croissante des effectifs, illustrée par le graphique ci-après.

Évolution numérique du clergé vannetais et briochin entre 1805 et 1905

Évolution numérique du clergé vannetais et briochin entre 1805 et 1905
  • 8 AESB, 10 CD 2.

8Dans le diocèse de Saint-Brieuc, de volumineux registres sont ouverts au cours de cette période8, ce qui traduit le désir nouveau de doter le diocèse d’instruments de gestion efficaces pour les décennies à venir et permet de reconstituer la plupart des carrières. Il faut toutefois attendre les années 1850 pour que les fonctions non-paroissiales soient systématiquement notées dans les registres briochins. Ce n’est donc que dans la seconde moitié du xixe siècle que l’ensemble des mutations est connu pour le diocèse de Saint-Brieuc. Si d’aventure un doute subsiste dans la lecture des dates et des lieux surchargés de ratures au fil des changements, les annuaires diocésains et, à partir des années 1860, les Semaines religieuses fournissent une aide précieuse.

  • 9 AEV, D 13, nécrologe du clergé, nominations, démissions, traitements (1848-1863).

9Les évolutions chronologiques sont similaires dans le diocèse de Vannes mais les lacunes y sont plus nombreuses. La principale source pour connaître les carrières cléricales des prêtres vannetais est un état du clergé par paroisse, vraisemblablement réalisé dans le dernier quart du xixe siècle. De nombreuses imprécisions subsistent dans le relevé des nominations de vicaires dans la première moitié du xixe siècle. La liste des prêtres qui occupent cette fonction est connue, mais de nombreuses dates de nomination manquent. Aucun registre aussi précis que ceux utilisés dans le diocèse de Saint-Brieuc ne semble avoir été ouvert. La bonne tenue des archives repose sur le zèle des vicaires généraux. Et, dans le diocèse de Vannes, il faut attendre 1848 pour que soient recensés systématiquement les décès, les nominations et les démissions9. Comme dans le diocèse de Saint-Brieuc, les carrières de la deuxième moitié du xixe siècle sont donc, à de rares exceptions près, toutes connues.

10Dans les deux diocèses, les lacunes des années 1805-1820 s’opposent ainsi à la profusion de sources pour la deuxième moitié du xixe siècle. Les trois décennies intermédiaires forment donc une période de transition au cours de laquelle les autorités diocésaines mettent au point des outils leur permettant de suivre individuellement les prêtres et de connaître leur passé. La multiplication des archives ne résout toutefois pas l’ensemble des problèmes relatifs à la reconstitution des carrières.

11Le choix de s’appuyer d’abord sur les sources diocésaines, indispensables pour viser la masse, n’est pas sans défaut. Le risque d’étourderie s’ajoute aux confusions possibles. Six prêtres nommés Joseph Rio occupent par exemple une fonction pendant la période concordataire dans le diocèse de Vannes. L’évêché de Saint-Brieuc compte sept François Morin dont trois furent ordonnés entre 1794 et 1797. Quatre Morin dont le deuxième prénom est François accroissent le risque d’erreur, l’ordre des prénoms n’étant pas tou jours scrupuleusement respecté dans les sources. La reconstitution des carrières suppose donc une part d’interprétation, surtout quand les renseignements distinctifs comme la date d’ordination ou de naissance manquent. La part d’erreur dans la reconstitution de la carrière est par nature impossible à quantifier mais le travail sur les fiches individuelles contribue à la minimiser.

12Un deuxième écueil doit être évité lors de l’interprétation. Le risque de la reconstruction d’une carrière est de rendre celle-ci trop linéaire. Les registres de mutations gardent la trace des décisions de l’évêque mais restent muets sur l’effectivité des nominations. Que faut-il penser par exemple du cas de Charles Bagas (1809-1883), nommé vicaire à Saint-Aaron le 4 septembre 1838 et à Plouër le 19 septembre de la même année ? A-t-il fait le déplacement dans la première paroisse ou ce brusque revirement correspond-il à une impossibilité quelconque ?

13Des précisions en marge des registres apportent parfois d’utiles éclaircissements. En 1828, Guillaume Le Vannais, né en 1798 à Hénon dans le diocèse de Saint-Brieuc, est envoyé comme vicaire à Paule selon le registre destiné à la Préfecture. Une note en italique, dans le relevé de l’évêché, informe qu’il va en réalité à Lanrodec, le rattachement officiel à Paule n’étant qu’un subterfuge afin d’obtenir un traitement. Passée la satisfaction de saisir une subtilité du jeu des mutations, surgit alors la crainte que des cas similaires existent sans avoir été signalés.

14D’une façon générale, la confidentialité des nominations à des postes non rétribués par l’État pose problème et les débuts de carrière restent mal connus, particulièrement quand l’excédent de prêtres retarde le placement. Les cas individuels élucidés sont toutefois suffisamment nombreux pour savoir quel était le destin de la génération.

15Quelle que soit la connaissance de l’itinéraire, le danger est de ne voir la carrière que comme une succession de postes. Les registres s’avèrent en effet particulièrement peu diserts sur les interruptions de ministère. Par exemple, Joseph Pariscoat (1822-1875), du diocèse de Saint-Brieuc, après avoir occupé diverses fonctions, est nommé vicaire de Plésidy en 1860, de Glomel en 1862, puis desservant de Saint-Nicodème en 1864 et de Squiffiec en 1868. Sans précision supplémentaire, la tentation est alors grande de croire qu’il passe de l’un à l’autre sans hiatus, l’inquiétude suscitée par son instabilité étant atténuée par sa promotion. Pourtant, un vicaire général un peu plus loquace que nombre de ses confrères a pris le temps de préciser qu’il s’était retiré à deux reprises du ministère, en 1861 et 1866, pour raison de santé. Cet exemple invite à interpréter avec prudence les périodes de flou dans les carrières et à se défier de la volonté de donner une linéarité excessive aux trajectoires heurtées. La difficulté est alors de reconstituer un itinéraire simplement à partir de dates de mutation, sans ignorer les accidents qui jalonnent le parcours.

16À l’issue de ces réflexions, se pose naturellement la question de la fiabilité des bases de données constituées. Les développements précédents ont montré comment l’essentiel des mouvements au sein des clergés vannetais et briochin a pu être reconstitué au cours de la période concordataire. Les zones d’ombre se limitent aux fonctions dont le traitement n’est pas pris en charge par l’État, qui restent minoritaires face à l’abondance des charges de desservants, de curés et de vicaires occupant des postes approuvés par le gouvernement.

17La base de données du diocèse de Vannes ne contient que 48 prêtres ordonnés entre 1802 et 1890 qui n’ont laissé aucune trace dans les sources mentionnées. Seuls sept ont un destin inconnu parmi les ecclésiastiques ordonnés à la même période dans le diocèse de Saint-Brieuc. La plupart moururent probablement sans avoir occupé de fonction ou quittèrent l’évêché sans laisser de traces. Même dans le cas où quelques informations échappent à la connaissance, la masse de prêtres est telle que les lacunes sont gommées par le volume d’informations brassées. À défaut de refléter parfaitement la réalité, les calculs statistiques sur les carrières permettent d’établir des comparaisons instructives. Les bases de données, sans être exemptes d’imperfections, offrent ainsi un support valide permettant l’analyse scientifique des carrières sur l’ensemble de la période concordataire.

L’évolution de la population cléricale

18La mesure quantitative du clergé concordataire est le prélude indispensable à l’étude des carrières. La concurrence conditionne en effet l’évolution de la carrière : les excédents ou, à l’inverse, les déficits de prêtres engendrent des frustrations ou des opportunités de promotion. Pour apprécier les fluctuations des effectifs, l’analyse du ratio ordination/décès est nécessaire. L’approche comptable gagne ensuite à être complétée par une réflexion sociale afin de mesurer l’homogénéité du clergé et de tenter d’y discerner des lignes de fractures potentielles, tant dans le temps qu’au sein d’une même génération.

L’élasticité du recrutement

19La courbe des ordinations annuelles dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes, présentée en annexe n° 2, frappe d’emblée par son profil apparemment erratique, signe d’un recrutement irrégulier. Certaines anomalies doivent être tout de suite minorées en raison des biais induits par un relevé annuel. Les courbes d’ordination quinquennales, présentées ci-dessous, permettent de gommer ces irrégularités et de mieux mettre en relief les évolutions au cours de la période concordataire.

20Dans les deux diocèses, les courbes d’ordination quinquennales suivent les mêmes inflexions. Trois périodes fastes se distinguent : les années 1816-1830, 1861-1875 et 1896-1905, le nombre d’ordinations annuel moyen dépassant alors 40 à Saint-Brieuc et 30 à Vannes. Les périodes intermédiaires sont, comparativement, des années de disette. La courbe d’ordinations dans les deux diocèses décrit donc au xixe siècle une sinusoïde comportant deux phases complètes et une troisième interrompue

Ordinations quinquennales dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes au xixe siècle

Ordinations quinquennales dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes au xixe siècle

21Même si l’évolution générale est similaire dans les deux diocèses, quelques détails les distinguent. Le plus évident est la plus forte réactivité de la courbe d’ordinations briochine à la conjoncture. En revanche, le diocèse de Vannes est le plus prompt dans la relance des ordinations au début du xixe siècle ; en 1805, il compte déjà 32 nouveaux prêtres contre 16 dans le diocèse de Saint-Brieuc.

  • 10 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 47.

22Le remodelage des diocèses bretons d’Ancien Régime rend impossible toute comparaison directe avec le recrutement antérieur. L’ancien diocèse de Saint-Brieuc enregistrait 17 à 20 nouveaux prêtres par an entre 1760 et 178910 mais il ne correspond qu’aux paroisses situées dans la zone médiane du nouvel évêché.

  • 11 Calcul effectué grâce aux chiffres fournis par le chanoine Boulard, Essor ou déclin du clergé fran (...)

23Les comparaisons par rapport aux autres diocèses bretons et français permettent de mieux mettre en valeur les singularités des diocèses de Vannes et de Saint-Brieuc en matière de recrutement sacerdotal. Entre 1802 et 1905, l’ensemble de ces deux évêchés fournit en moyenne 4,16 % des nouveaux prêtres français11. Les moyennes quinquennales s’écartent parfois spectaculairement de la moyenne séculaire, indiquant que le dynamisme des deux diocèses ne connaît pas toujours les mêmes variations que la plu part des évêchés français (voir le graphique ci-après).

Part des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes dans le nombre total d’ordinations en France

Part des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes dans le nombre total d’ordinations en France
  • 12 Godel, Jean, Le diocèse de Grenoble et la reconstruction concordataire, 1802-1809, Grenoble, 1968, (...)
  • 13 Cabanel, Patrick, Les cadets de Dieu. Vocations et migrations religieuses en Gévaudan, xviiie-xxe (...)

24Les évêchés de Vannes et de Saint-Brieuc se distinguent par leur fécondité depuis le début du xixe siècle jusqu’au milieu des années 1820. Celle-ci tranche avec la stérilité du diocèse de Grenoble qui n’enregistre une première ordination qu’en 1806 et ne compte que deux nouveaux prêtres en 1807 et quatre en 180812. Les diocèses de Mende et de Bourges, avec tous les deux quinze ordinations entre 1802 et 1815, ne sont guère plus fertiles13.

25La comparaison avec les autres diocèses bretons montre que cette reprise rapide est un phénomène régional (voir le graphique ci-après).

Ordinations quinquennales dans les évêchés bretons

Ordinations quinquennales dans les évêchés bretons
  • 14 Faugeras, Marius, Le diocèse de Nantes sous la Monarchie Censitaire, (1813-1849), Fontenay-le-Comt (...)
  • 15 Langlois, Claude, Le diocèse de Vannes au xixe siècle, 1800-1830, Paris, Klincksieck, 1974, p. 303 (...)

26Certes, l’évêché de Vannes se distingue au cours de la première décennie du xixe siècle, mais les vocations sont nombreuses dans toute la Bretagne, à l’exception du diocèse de Nantes14. La prééminence du diocèse de Vannes s’explique alors par l’énergique reprise en main de son premier évêque concordataire, Mgr Pancemont. Celle-ci se traduit par une volonté précoce de rouvrir le séminaire et la mise en place d’une politique de formation rapide, destinée à intégrer des vocations non satisfaites15.

27Vingt-deux nouveaux prêtres sur les 33 ordonnés à Vannes entre 1802 et 1805 ont plus de trente ans. L’âge des personnes promues au sacerdoce ne trompe pas : les vocations éveillées avant la Révolution et mises en sommeil pendant plusieurs années trouvent alors l’opportunité d’éclore. Dans ce diocèse marqué par l’activisme chouan, la résistance du substrat religieux au phénomène révolutionnaire a peut-être été plus forte qu’ailleurs.

28Il faut attendre 1810, dans l’évêché de Saint-Brieuc, et 1811, dans celui de Vannes, pour que, parmi les nouveaux ecclésiastiques, ne figure plus aucun individu âgé de plus de 30 ans. L’orientation vers la prêtrise ayant été banalisée par des individus dont la vocation avait traversé la Révolution, de nouvelles générations entrent alors plus facilement au séminaire.

  • 16 Dès les années 1950, le chanoine Boulard analyse ces questions dans Essor ou déclin..., op. cit.
  • 17 Hilaire, Yves-Marie, Une chrétienté au xixe siècle. La vie religieuse des populations du diocèse d (...)

29Les fluctuations des courbes d’ordination ont déjà fait l’objet de nombreuses analyses16, que cette recherche ne contredit pas. Mais elle montre qu’en Bretagne au moins, les perspectives de carrière influent sur les vocations. Systématiquement, alors que les possibilités de promotion s’amenuisent et que l’âge moyen auquel un prêtre devient desservant augmente, le nombre d’ordinations diminue et inversement. Cette corrélation permet de comprendre les oscillations autour de la moyenne nationale : les creux peu vent être interprétés comme une régulation du trop-plein enregistré les années précédentes. L’abondance du recrutement ayant été précoce, il est logique que, deux décennies plus tard, les diocèses de Vannes et Saint-Brieuc anticipent de nouveau les évolutions nationales. Alors que le retournement de tendance y est visible dès la fin des années 1820, il faut attendre 1833 dans les diocèses de Cambrai et d’Arras, pour que la profusion de prêtres ait des répercussions sur les vocations17. L’hypothèse se vérifie quelques décennies plus tard. Entre 1866 et 1875, le diocèse de Saint-Brieuc est l’évêché breton le plus fécond en vocations. Logiquement, les vocations se font ensuite plus rares, à tel point qu’il connaît un creux historique par rapport à ses voisins bretons à la fin des années 1870.

30Davantage qu’ils ne se différencient des autres évêchés français, les diocèses de Vannes et de Saint-Brieuc anticipent et exagèrent les évolutions du nombre d’ordinations. Alors qu’ils comptent, selon la date du recensement, entre 3 et 3,1 % de la population française au cours du xixe siècle, ils fournissent plus de 4 % des prêtres et apparaissent comme des diocèses favorisés sur le plan du recrutement. Le mouvement des ordinations doit toutefois être apprécié en fonction de son impact réel sur la démographie cléricale.

Le taux de remplacement

31Mesurer l’évolution numérique du clergé nécessite de mettre en rapport la courbe des ordinations avec celle des décès. Dans le diocèse de Vannes, ceci n’est cependant possible que dans le dernier tiers du xixe siècle, grâce au nécrologe annuel de l’Ordo diocésain. Auparavant, le relevé exhaustif des décès n’est qu’épisodique et empêche le calcul de moyennes quinquennales. La reconstitution des carrières permet toutefois de rassembler de nombreuses dates de décès et de compléter quelques manques.

  • 18 AESB, 22 CE. Nécrologe (1802-1905).

32La courbe annuelle des décès dans le diocèse de Saint-Brieuc, établie grâce au nécrologe rigoureusement tenu18, connaît moins de soubresauts que la courbe des ordinations. Trois phases se distinguent toutefois dans le graphique briochin. Un flot de décès caractérise la première période, correspondant au premier quart du xixe siècle. Entre 1803 et 1825, 30,1 prêtres disparaissent en moyenne chaque année, avec un pic de 65 décès en 1804. Les pertes s’accumulent en 1805 et 1806, avec 47 décès chaque année. En trois ans, le clergé d’Ancien Régime, âgé et fatigué par la Révolution, est décimé.

33La mortalité dans le diocèse de Vannes semble également très élevée à cette période, particulièrement en 1805, année noire d’après les chiffres partiels disponibles. La lecture de la courbe des décès montre que, comme dans le diocèse de Saint-Brieuc, le nombre de décès dépasse fréquemment celui des ordinations jusqu’en 1820, les résultats présentés étant inférieurs à la réalité, surtout dans les premières décennies du xixe siècle. Il creuse alors les rangs du clergé diocésain.

34Dans le diocèse de Saint-Brieuc, une nouvelle phase, caractérisée par un faible nombre de décès, s’amorce dans le deuxième quart du xixe siècle. Entre 1826 et 1850, le nombre de morts n’excède jamais 100 sur une période quinquennale, la moyenne annuelle des disparitions de prêtres se limitant alors à 18,4. La vieille génération ayant disparu, le clergé est rajeuni et la mortalité diminue naturellement. La même tendance s’observe dans le diocèse de Vannes où, en dehors de deux années funestes en 1830 et en 1842, la courbe des décès fléchit régulièrement pour atteindre son minimum séculaire dans les années 1840.

35Entre 1851 et 1905, 30,1 prêtres meurent en moyenne chaque année dans le diocèse de Saint-Brieuc, un chiffre certes identique à celui du premier quart du xixe siècle, mais proportionnellement plus faible en raison de l’augmentation du nombre d’ecclésiastiques au cours des décennies précédentes. Le clergé du diocèse de Vannes, moins nombreux, compte pour sa part 21,4 morts par an entre 1866 et 1905.

36Avec un nombre de décès inférieur à celui des ordinations, le xixe siècle est une période d’accroissement numérique pour le clergé.

37Dans le diocèse de Saint-Brieuc, les effectifs augmentent régulièrement, à l’exception des premières décennies du siècle. Sur l’ensemble du xixe siècle, les effectifs cléricaux y ont ainsi augmenté de 457 unités et la charge pastorale moyenne a été divisée par deux, passant de un prêtre pour 1 084 habitants à un pour 537.

  • 19 AEV, D 7, état du personnel du diocèse de Vannes, 1824-1864.

38Les données disponibles dans le diocèse de Vannes confirment l’augmentation régulière du nombre de prêtres. Le nombre d’ecclésiastiques en service passe ainsi de 511 en 1824 à 717 en 186419. Entre 1866 et 1905, la population cléricale s’accroît de 351 ecclésiastiques, un résultat supérieur au diocèse de Saint-Brieuc où l’excédent enregistré à la même époque n’atteint que 165 unités.

Bilan démographique quinquennal dans le clergé des diocèses de Vannes et Saint-Brieuc

Bilan démographique quinquennal dans le clergé des diocèses de Vannes et Saint-Brieuc

39Au delà de leurs répercussions numériques, les oscillations des courbes d’ordinations et de décès bouleversent le profil du clergé. Un recrutement soudainement tari ou au contraire abondant se répercute pendant plusieurs décennies dans la pyramide des âges (cf. l’annexe n° 3). En 1808, la structure par âge du clergé vannetais est alors sans surprise : les prêtres ordonnés avant la Révolution forment l’essentiel des effectifs cléricaux. La situation n’est guère plus florissante dans le diocèse de Saint-Brieuc. La génération née entre 1753 et 1757 y forme, pour les mêmes raisons, les principales cohortes.

40Vingt ans plus tard, à la faveur d’un recrutement abondant, le profil de la pyramide des âges est transformé. Dans les deux diocèses, apparaît un déséquilibre en faveur des générations les plus jeunes. Ce dynamisme est accru dans le diocèse de Saint-Brieuc par la multiplication des dispenses d’âge accordée aux séminaristes n’ayant pas encore vingt cinq ans.

  • 20 AESB, M 24, statistiques sur le nombre de prêtres âgés de plus de 60 ans.
  • 21 Casta, Michel, Le prêtre corse au xixe siècle, thèse de doctorat, université d’Amiens, 1997, p. 12 (...)

41Le creux observé dans la pyramide des âges en 1807 et 1808 chez les 2540 ans s’est déplacé et concerne maintenant les prêtres dont l’âge est compris entre 45 et 60 ans. Les deux évêchés comptent alors davantage de septuagénaires que de quinquagénaires. Dans celui de Saint-Brieuc, en 1820, le taux des prêtres âgés de plus de 60 ans atteint encore 32,2 %, après avoir culminé à 35,2 % en 181720. Il demeure toutefois bien en deçà du taux du diocèse d’Ajaccio qui compte en 1821 39,2 % d’ecclésiastiques de plus de 60 ans21.

  • 22 Hilaire, Yves-Marie, Une chrétienté au xixe siècle..., op. cit., p. 313.
  • 23 Lagree, Michel, Mentalités, religion et histoire en Haute-Bretagne. Le diocèse de Rennes, 1815-184 (...)
  • 24 AESB, M 24.

42Le pic d’ordinations étant plus précoce et plus fort dans le diocèse de Saint-Brieuc que dans nombre de diocèses français, le clergé y rajeunit plus vite. En 1830, le diocèse de Cambrai, par exemple, compte encore davantage de prêtres de plus de 65 ans que de moins de 45 ans22. Seuls des diocèses au dynamisme similaire, comme celui de Rennes, ont une pyramide des âges aussi déséquilibrée par le poids des jeunes prêtres23. Dans le diocèse de Saint-Brieuc en 1834, les 80 prêtres âgés de plus de 60 ans ne représentent plus que 10,1 % de la population cléricale24. Les dernières générations ordonnées sous l’Ancien Régime se sont alors éteintes.

  • 25 Launay, Marcel, Le diocèse de Nantes..., op. cit., p. 305.

43L’arrivée massive de jeunes ecclésiastiques entre 1815 et 1830 crée un déséquilibre qui se lit pendant plusieurs décennies sur les pyramides des âges des diocèses de Vannes et de Saint-Brieuc. Dans l’évêché de Nantes, seul diocèse breton à n’avoir pas connu une hausse des ordinations sous la Restauration, le profil de la pyramide des âges en 1850, plus lisse, tranche par rapport aux cas vannetais et briochin25.

44À la différence des pyramides des âges de 1857, quelques dizaines de prêtres âgés de moins de 25 ans apparaissent en 1905. De nouveau, les évêques acceptent d’ordonner des jeunes clercs âgés de 23 ans, particulièrement dans le diocèse de Saint-Brieuc. Entre 1900 et 1904, les promotions au sacerdoce de séminaristes de plus de 26 ans sont marginales dans l’évêché de Saint-Brieuc, où elles représentent moins de 5 % du nombre d’ordinations, tandis que le diocèse de Vannes n’en compte aucune. La diminution progressive des vocations tardives est le signe de la mise en place d’une filière scolaire qui impose un rythme de recrutement. Au fur et à mesure que le xixe siècle avance, l’enchaînement école secondaire-séminaire se banalise et traduit la volonté d’avoir un clergé formé dans le même moule. Tout élève qui ne choisit pas le grand séminaire au sortir du petit séminaire ou du collège s’écarte alors presque définitivement de la prêtrise. L’augmentation des vocations semble permettre la fermeture du milieu clérical aux hommes aux parcours originaux. L’âge d’entrée dans la carrière se fixe ainsi autour de 23-24 ans.

45La plupart des prêtres travaillant jusqu’à la fin de leur vie, la durée de la carrière est liée à la longueur de leur existence. Le relevé systématique des décès permet d’estimer l’espérance de vie de la population cléricale. Le calcul réalisé sur l’âge de décès de 3 583 prêtres concordataires du diocèse de Saint-Brieuc révèle que leur mort est intervenue en moyenne à l’âge de 59,8 ans. Dans le diocèse de Vannes, l’âge moyen du décès de 1753 prêtres se situe à 60 ans. La moindre pénibilité du ministère des curés, souvent nommés dans des paroisses urbaines de faible étendue et entourés de plu sieurs vicaires, se vérifie dans leur espérance de vie élevée, qui atteint 68,7 ans dans le diocèse de Saint-Brieuc et 68,1 ans dans le diocèse de Vannes. Dans les deux évêchés, elle excède de deux ans l’espérance de vie moyenne de l’ensemble des prêtres ayant atteint cinquante ans, l’âge moyen de promotion à la fonction de curé.

  • 26 Gonnot, Jean-Pierre, Vocations et carrières..., op. cit., p. 235-238.
  • 27 Ibid., p. 235.
  • 28 Essertel, Yannick, Lyon et les missions lointaines à l’époque contemporaine, 1815-1962. Prosopo gr (...)
  • 29 Avril, Jean-Loup, Faivre, Jean et Pecker, Jean (dir.), La santé en Bretagne, Paris, Éditions Herva (...)
  • 30 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 64.

46L’espérance de vie des prêtres bretons demeure inférieure d’environ cinq ans à celle des prêtres du diocèse de Belley dont l’espérance de vie à 25 ans oscille entre 65,6 et 67,3 ans au cours du xixe siècle26. Elle est même moindre que celle de la génération masculine française de 1820 qui atteint 38,2 ans pour les jeunes hommes âgés de 25 ans, soit l’âge aux environs duquel un prêtre reçoit l’ordination27. Elle demeure toutefois supérieure à celle des missionnaires lyonnais du xixe siècle, dont le décès intervient autour de cinquante ans entre 1861 et 190328. L’âge moyen de la mort des prêtres concordataires briochins et vannetais témoigne en outre d’une amélioration des conditions de vie des ecclésiastiques bretons par rapport à l’Ancien Régime. Sur le long terme, il progresse par paliers, reflétant notamment l’amélioration des conditions sanitaires29 : alors qu’il n’est que de 55 ans entre 1720 et 1780 pour le clergé de Haute-Bretagne, il monte à 58 ans et demi dans les années 178030 avant de progresser de plus d’un an après la Révolution.

  • 31 La Bretagne au xixe siècle, 1789-1914, Morlaix, Skol Vreizh, 1989, tome 4 de l’Histoire de la Bret (...)

47Au xixe siècle, la longévité des prêtres bretons est également supérieure à celle de la population bretonne – l’âge moyen au décès à Saint-Brieuc est de 43 ans entre 1905 et 191031 – ce qui contribue à expliquer l’attrait de la prêtrise dans les milieux populaires.

L’origine sociale des prêtres

  • 32 Gibson, Ralph, A social history..., op. cit., p. 68-76.

48Selon Gibson, les prêtres concordataires sont pour la plupart des fils de paysans modestes et, surtout dans les diocèses les moins fervents, des fils d’artisans32. Plusieurs indices permettent d’affirmer que ses observations se vérifient dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes.

  • 33 AN, F19 819-832.
  • 34 Le terme de « cultivateur », employé par le rédacteur des états, ne permet pas de distinguer les n (...)

49Les « états des jeunes gens qui se destinent à l’état ecclésiastique33 », réalisés dans la plupart des diocèses français pendant le Premier Empire, offrent un portrait collectif des futurs ecclésiastiques de la Restauration. Certes, tous ne seront pas ordonnés, mais l’écrasante prépondérance des fils cultivateurs34 ne laisse pas de doute quant à l’origine paysanne de la plupart des prêtres briochins et vannetais au début du xixe siècle.

  • 35 Les orphelins, marginaux, ont été exclus.

Origine sociale des élèves des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes se destinant à la prêtrise35

Origine sociale des élèves des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes se destinant à la prêtrise35
  • 36 Atlas de la Révolution française, t. 9, Religion, Paris, Éditions de l’École des Hautes Études en (...)
  • 37 Idem.
  • 38 Huot-Pleuroux, Paul, Le recrutement sacerdotal dans le diocèse de Besançon de 1801 à 1960, thèse, (...)

50Les résultats observés dans les deux diocèses sont très proches. La part des cultivateurs est supérieure à la moyenne française (60,4 %36), mais les chiffres observés ne constituent pas pour autant une exception : les proportions sont similaires dans les diocèses de Grenoble, de Mende ou de Cou tances37 ; en 1813, dans le diocèse de Besançon, le taux des étudiants ecclésiastiques ayant des parents cultivateurs monte même à 73 %38.

  • 39 Atlas de la Révolution française..., op. cit., p. 71.
  • 40 Lagree, Michel, Mentalités, religion..., op. cit., p. 181-182.
  • 41 Langlois, Claude, Le diocèse de Vannes..., op. cit., p. 317.

51À l’échelle bretonne, l’évêché de Nantes, avec environ un tiers d’étudiants ecclésiastiques d’origine bourgeoise, se distingue des autres diocèses39. Le futur clergé des diocèses de Saint-Brieuc, de Vannes, de Rennes40 et de Quimper a en effet un profil similaire : 65 à 75 % de fils de paysans, 15 à 20 % de fils d’artisans et une minorité de bourgeois. Le clergé du diocèse de Nantes, plus urbanisé, est plus proche du clergé d’Ancien Régime de l’évêché de Vannes. Alors que marchands et bourgeois de robe représentent plus d’un tiers des clercs vannetais au xviiie siècle41, leur part est inférieure à 10 % parmi les élèves ecclésiastiques de 1813.

  • 42 AESB, 2 CD 1, Lettre de l’évêque au ministre des cultes, 28 février 1809.

52Les sources manquent pour connaître l’aisance financière des uns et des autres, mais la désertion des bourgeois, remplacés par les fils de cultivateurs et d’artisans, montre que le prêtre aisé d’Ancien Régime tend à céder sa place au clerc modeste après la Révolution. Cette image, certes caricaturale, est corroborée par le témoignage de l’évêque de Saint-Brieuc : Mgr Caffarelli pressent, dans une lettre adressée au ministre des cultes, que le destinataire sera frappé par « l’état de pauvreté des élèves. La très grande majorité d’entre eux sont des fermiers-cultivateurs, quelques-uns même sont nés de parents qui ont un état moins honorable ». L’évêque y voit la conséquence du « peu de ressources » que l’état ecclésiastique offre et qui détournerait les enfants des familles aisées42. Le traitement garanti par l’État suffit à attirer les fils des classes sociales modestes tandis qu’il ne satisfait plus la bourgeoisie. Ébranlés par le choc révolutionnaire, les jeunes gens avides de prestige se tournent vers d’autres horizons. La reprise des ordinations après la mise en place du régime concordataire dépasse donc la simple relève de génération. Non seulement de nouveaux prêtres remplacent le clergé d’Ancien Régime vieillissant mais leur profil social accentue la rupture.

  • 43 Petit, Aurélie, Le clergé paroissial à Paris entre 1840 et 1870, mémoire de maîtrise, Paris XII, 1 (...)
  • 44 Martin, Jean, Toiles de Bretagne. La manufacture de Quintin, Uzel et Loudéac, 1670-1830, Rennes, P (...)

53Le rapport numérique entre les différents milieux sociaux n’évolue guère au cours du xixe siècle, comme le confirment quelques sondages paroissiaux. À Ploërmel, ville francophone du diocèse de Vannes, 17 des 32 prêtres concordataires nés au xixe siècle sont des fils d’artisans, soit une part supérieure à celle observée à Paris au milieu du siècle43. Dans le même évêché, parmi les huit prêtres natifs de la paroisse rurale bretonnante de Brech, septont des parents cultivateurs. À Plaintel, paroisse située dans la zone francophone du diocèse de Saint-Brieuc, les fils d’artisans sont neuf à choisir la prêtrise au xixe siècle, contre seulement huit enfants de cultivateurs. Six fils de tisserands figurent parmi les premiers. Or, cinq d’entre eux sont ordonnés après 1850, au moment où l’économie toilière s’effondre dans la région44. Cette reconversion accrédite l’idée que l’état ecclésiastique représente un attrait économique pour les milieux modestes tels que les paysans et les artisans.

  • 45 Statuts synodaux, Saint-Brieuc, Prud’homme, 1852, p. 90-91.
  • 46 AEV, Z 4, correspondance des frères Dubot, lettre de Jean-Marie Dubot du 27 juillet 1896.

54Tout au long de la période concordataire, le profil social dominant du prêtre demeure inchangé. En 1852, les statuts synodaux du diocèse de Saint-Brieuc affirment que « c’est surtout dans les classes les moins aisées que se produisent le plus souvent les vocations45. » En 1896, Jean-Marie Dubot (1853-1918), professeur au grand séminaire de Vannes depuis 1884, certifie qu’« en général, les élèves ecclésiastiques se recrutent dans les familles moyennes de paysans ». Il précise ensuite que « la bourgeoisie fournit extrêmement peu [et que] la noblesse n’a envoyé au grand séminaire depuis 12 ans que cinq sujets46 », confirmant la distinction sociale entre le clergé pré- et post-révolutionnaire.

  • 47 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 101.

55La raréfaction des prêtres nobles constitue en effet une autre caractéristique de l’évolution sociale du clergé entre le xviiie et le xixe siècles. Leur faible nombre, y compris sous l’Ancien Régime, rend cependant cette rupture moins spectaculaire que la perte d’influence de la bourgeoisie. Charles Berthelot du Chesnay a estimé à 4 % le nombre de prêtres d’origine noble dans le diocèse de Saint-Brieuc entre 1740 et 179047. Après la Révolution, leur part est infime dans les deux évêchés étudiés. Seuls treize ecclésiastiques ordonnés dans le diocèse de Vannes entre 1804 et 1905 ont un nom à consonance nobiliaire.

56Le diocèse de Saint-Brieuc n’est guère plus riche en figures nobiliaires. Vingt-quatre prêtres portent un nom laissant supposer une origine noble. L’un des plus illustres, Claude-Louis de Lesquen (1770-1855), un ancien émigré ordonné en 1806 dans le diocèse de Saint-Brieuc, devient évêque de Beauvais en 1823 puis de Rennes en 1825. Autre exemple d’ordination tardive qui résonne comme un désir de se distinguer des autres membres du clergé, Yves-Marie Villiers de l’Isle-Adam (1808-1889), oncle de l’écrivain du même nom, accède à la prêtrise à seulement 39 ans.

57La prédominance du clergé d’origine rurale tout au long du xixe siècle constitue un indice supplémentaire de l’affaiblissement de la part de la bourgeoisie des villes sous le régime concordataire (voir le graphique ci-dessous).

  • 48 Ont été considérées comme urbaines les paroisses dont la population agglomérée était supérieure à (...)

Part des prêtres d’origine urbaine48 dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes

Part des prêtres d’origine urbaine48 dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes
  • 49 Gibson, Ralph, A social history..., op. cit., p. 70.
  • 50 Langlois, Claude, Le diocèse de Vannes..., op. cit., p. 315.
  • 51 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 89.

58Contrairement à la plupart des diocèses français, dans lesquels les villes sont sur-représentées dans les vocations cléricales49, la part des ecclésiastiques d’origine urbaine est conforme au poids des villes. Celles-ci ne rassemblent en effet que 16 à 18 % de la population totale du diocèse de Vannes au cours de cette période et, d’après le recensement de 1806, 9,9 % dans l’évêché de Saint-Brieuc. La part des prêtres concordataires nés en ville est très inférieure à la proportion de clercs d’origine urbaine sous l’Ancien Régime. Dans l’ancien diocèse de Vannes, ce taux grimpe au-dessus de 20 % pour la période 1701-1790 alors que le taux d’urbanisation avoisinait 11 %50. Entre 1740 et 1790, les seules villes de Saint-Brieuc, Loudéac, Lamballe et Quintin fournissent 200 des 850 prêtres recensés par Charles Berthelot du Chesnay dans l’ancien évêché de Saint-Brieuc51.

59Ces statistiques confirment ainsi le changement de profil sociologique du clergé briochin et vannetais après la Révolution. La domination des ecclésiastiques d’origine rurale ne se dément pas tout au long de la période concordataire. Elle s’affaiblit toutefois quelque peu entre 1820 et 1880, sans être remise en cause.

  • 52 Le Bouedec, Gérard, Le port et l’arsenal de Lorient, de la Compagnie des Indes à la marine cuirass (...)
  • 53 Boutry, Philippe, Prêtres et paroisses..., op. cit., p. 191.

60La perte d’influence du clergé d’origine urbaine est encore plus sensible à partir des années 1880. Les vocations se tarissent dans les villes, particulièrement là où les conséquences de l’exode rural et de la Révolution industrielle sont les plus fortes. Lorient, ville à forte population ouvrière52, en est le meilleur exemple. Entre 1890 et 1905, alors que la ville atteint presque 50 000 habitants, six prêtres seulement en sont originaires, soit moins qu’au cours des années 1850, la population étant alors pourtant deux fois moins nombreuse. La même régression du recrutement urbain s’observe dans le diocèse de Belley où la part du clergé d’origine citadine passe de 20,4 à 9,6 % entre 1865 et 190553. Dans le diocèse de Saint-Brieuc, le déficit est aussi lourd dans les villes à forte croissance comme Saint-Brieuc ou Dinan. À l’inverse, là où le tissu urbain ne connaît pas de bouleversement, le nombre de vocations demeure stable. Loudéac, ville où la population reste comprise entre 5 700 et 7 000 habitants au cours du xixe siècle, contribue le plus fortement au recrutement diocésain dans les années 1890, avec neuf prêtres. Les grandes villes apparaissent donc comme les principales responsables du faible recrutement urbain de la fin du xixe siècle.

  • 54 Nicolas, Gilbert, L’école normale primaire de Rennes et la première génération de normaliens en Br (...)

61La plupart des prêtres concordataires des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes proviennent ainsi des campagnes, souvent d’une famille d’agriculteurs, parfois d’artisans. La paysannerie est davantage représentée dans le clergé breton que chez les instituteurs, la première génération des élèves-maîtres morbihannais de l’école normale de Rennes ne comptant que 31 % de fils de cultivateurs54. Cependant, les paroisses rurales ne pourvoient pas toutes également le diocèse en prêtres. De la Haute à la Basse-Bretagne, de l’Armor à l’Argoat, les pays fertiles succèdent aux régions infécondes.

Un recrutement inégal

62La question de l’origine géographique des prêtres des diocèses de Vannes et de Saint-Brieuc se double de l’épineuse question linguistique. La géographie du recrutement laisse apparaître une fertilité inégale sur l’ensemble du territoire, source de contrastes dans l’encadrement clérical.

Les territoires de vocation

63Pendant la période concordataire, les évêchés de Saint-Brieuc et de Vannes sont loin de former une entité homogène, les vocations étant plus abondantes en Haute-Bretagne qu’en pays bretonnant. Le découpage du temps concordataire en trois périodes montre que le déséquilibre du recrutement est maximal au début du xixe siècle, puis tend à s’atténuer par la suite (voir les annexes n° 4 et 5). Entre 1802 et 1820, seules deux communes de Basse-Bretagne (Plouha et Yvias) figurent parmi les 32 plus fertiles du diocèse de Saint-Brieuc. Dans le diocèse de Vannes, les paroisses du nord du pays gallo se distinguent particulièrement. La floraison de vocations est spectaculaire à Mohon, qui donne dix nouveaux prêtres entre 1802 et 1820, à Beignon ou à Mauron, chacune lieu de naissance de sept nouveaux ecclésiastiques. Seize paroissiens de Josselin choisissent l’état clérical, contre seulement onze à Vannes, pourtant quatre fois plus peuplée. Dans le même temps, les vocations au delà du Blavet, c’est-à-dire à l’ouest de la ligne Lorient-Pontivy, sont quasiment inexistantes.

  • 55 Dupuy, Roger, De la Révolution à la Chouannerie..., op. cit.
  • 56 Isambert, François-André, et Terrenoire, Jean-Paul, Atlas de la pratique religieuse des catholique (...)
  • 57 Le Maire, Vincent, À l’école des robes noires. La contribution de la congrégation des Frères de l’ (...)

64La géographie du recrutement ne rappelle que partiellement les clivages observés sous la Révolution55. Le rejet de la Constitution civile du clergé et l’insurrection de 1793 sont certes plus forts en Haute-Bretagne qu’en Basse-Bretagne mais plusieurs paroisses empêchent toute généralisation. Il faudrait réaliser plusieurs micro-enquêtes, à l’échelon paroissial, pour tenter de comprendre pourquoi la restauration religieuse fut rapide ou lente. En revanche, la coïncidence entre la carte du recrutement au début du xixe siècle et la pratique religieuse au milieu du xxe siècle est frappante56. Les terres de prêtres sont celles où le pourcentage de messalisants est élevé un siècle plus tard. Et l’absence de vocations dans certaines paroisses paraît surtout résulter de leur tiédeur religieuse, une hypothèse confirmée par les nombreuses similitudes observées entre la géographie du recrutement des prêtres et des Frères de l’Instruction Chrétienne57.

65Le contraste entre la Haute et la Basse-Bretagne ne se dément pas entre 1821 et 1850. La fertilité des paroisses de la dorsale Saint-Brieuc-Loudéac et des paroisses de l’ancien évêché de Saint-Malo se vérifie. Toutefois, la Basse-Bretagne n’est plus une terre aussi dépourvue de vocations que dans les deux premières décennies du xixe siècle. Un noyau de paroisses fertiles émerge autour des petits séminaires entre 1821 et 1850, preuve que la politique scolaire influence le recrutement. Quatorze jeunes hommes de Plouguernével, où fut ouverte une école ecclésiastique en 1821, deviennent prêtres au cours de ces trois décennies, alors qu’aucun n’avait fait un tel choix depuis le début de la Révolution. Le petit séminaire de Tréguier draine également vers la prêtrise plusieurs dizaines d’adolescents. Dans l’ancienne cité épiscopale, le nombre de vocations passe par exemple de deux entre 1802 et 1820 à onze entre 1821 et 1850, alors qu’à l’échelle du diocèse, les ordinations ne sont que 2,3 fois plus nombreuses dans la seconde période.

66Le dynamisme d’une école ecclésiastique explique ainsi souvent les contrastes observés entre deux paroisses voisines. Son ouverture ou sa fermeture peut permettre de comprendre pourquoi la fécondité d’une paroisse évolue subitement. Ainsi à Plaintel, où Jean Gautho (1768-1829) dirige sous le Premier Empire une école presbytérale faisant office de petit séminaire, quatorze jeunes hommes choisissent la prêtrise entre 1802 et 1820, contre seulement cinq entre 1821 et 1850, alors que la fertilité moyenne des paroisses s’est accrue.

67Dans le diocèse de Vannes, les paroisses du Pays Pourlet et de la Haute-Cornouaille, c’est-à-dire celles situées à l’ouest de la ligne Lorient-Pontivy, fournissent toujours peu de prêtres mais le recrutement s’est uniformisé dans le reste de l’évêché. Un croissant fertile, qui traverse la limite linguistique en passant par Ploërmel, Baud, Vannes et La Roche-Bernard, apparaît désormais.

68Au cours de la troisième période, entre 1851 et 1905, le déséquilibre géo graphique du recrutement, bien que toujours visible, est moins marqué. Dans le diocèse de Saint-Brieuc, les « terres de prêtres », selon l’expression en vigueur dans le clergé au début du xxe siècle, restent situées autour de l’axe Saint-Brieuc-Loudéac et dans l’ancien évêché de Saint-Malo. Mais le contraste entre la Haute et la Basse-Bretagne n’est plus aussi saisissant. Dans le diocèse de Vannes, le déséquilibre de la première partie du xixe siècle s’atténue davantage encore. L’ouverture d’une école secondaire à Gourin en 1849, qui est dirigée par les Pères du Saint-Esprit après son transfert à Langonnet en 1857, n’est probablement pas étrangère au réveil de la Haute-Cornouaille.

69À l’échelle de la période concordataire, même si la géographie du recrutement ne suit pas exactement la frontière linguistique, le déficit bas-breton est patent. Les contrastes observés renforcent ainsi les clivages culturels. Le déséquilibre est le plus sensible dans le diocèse de Saint-Brieuc, où les paroisses les plus fertiles sont situées en Haute-Bretagne.

70L’origine géographique des prêtres pondérée par le nombre d’habitants isole nettement les paroisses situées sur la rive droite du Blavet, c’est-à-dire le nord-ouest de la partie bretonnante (voir l’annexe n° 6). Le pays gallo ne connaît pas un tel vide. L’équilibre des charges pastorales à l’échelle du diocèse repose ainsi sur quelques paroisses rurales situées entre le Blavet et la frontière linguistique, qui forment des réservoirs de prêtres bas-bretons, comme Noyal-Pontivy, où naquirent quarante prêtres concordataires. Parmi les prêtres urbains, tous n’ont pas en effet le bagage linguistique pour exercer leur ministère au sein de populations qui ne comprennent pas le français. La fertilité de quelques paroisses bretonnantes se trouve ainsi diluée dans les vides observés.

  • 58 Pour la première partie du siècle, voir Le Gallo, Yves, Clergé, religion et société en Basse-Breta (...)

71Une zone de faible recrutement sacerdotal traverse donc la Bretagne du nord au sud, de Lannion à Lorient. Elle ne s’arrête pas aux limites des diocèses de Vannes et de Saint-Brieuc. Tout au long du xixe siècle, les paroisses les moins fécondes du diocèse de Quimper se rencontrent sur ses limites orientales58. Avec d’inévitables exceptions dues à des particularismes locaux, la carte des anciens diocèses transparaît approximativement : l’abondance de vocations dans le diocèse de Léon et dans les anciens évêchés de Saint-Brieuc, de Vannes et de Saint-Malo s’oppose à la relative stérilité des diocèses de Quimper et de Tréguier. Dans ses grandes lignes, la géographie du recrutement n’évolue guère entre la fin de l’Ancien Régime et le début du xxe siècle.

72Le diocèse de Saint-Brieuc peut ainsi schématiquement être divisé en deux parties : une partie francophone pourvoyeuse de prêtres et une zone bretonnante moins fertile. La situation dans le diocèse de Vannes est plus complexe : si les vocations aussi nombreuses dans les paroisses francophones que dans le diocèse de Saint-Brieuc, le pays bretonnant doit être divisé en trois. La Haute-Cornouaille, dont la fécondité s’améliore au fil du siècle, forme une entité à part, du fait des difficultés de communication résultant de l’éloignement des dialectes cornouaillais et vannetais. Le reste de la partie bretonnante se divise entre les paroisses peu fécondes, à l’ouest d’une ligne Lorient-Pontivy et celles situées entre le Blavet et la frontière linguistique, où les vocations sont aussi nombreuses que dans le pays gallo.

  • 59 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 60.
  • 60 Dumoulin, Christian, Un séminaire français..., op. cit., p. 47.
  • 61 Petit, Aurélie, Le clergé paroissial à Paris..., op. cit., p. 40.

73Les migrations cléricales ne permettent pas d’atténuer ces déséquilibres. Les prêtres venus d’autres évêchés sont très peu nombreux à exercer une fonction dans les diocèses de Vannes et de Saint-Brieuc pendant la période concordataire et sont pour la plupart francophones. Sous le régime concordataire, seuls 92 prêtres étrangers ordonnés après 1801 exercent une fonction dans le diocèse de Saint-Brieuc, ce qui représente 2,8 % de l’ensemble des ecclésiastiques ordonnés à cette période, soit une proportion voisine de celle observée en 179059. La part est encore plus infime dans le diocèse de Vannes qui ne compte dans son clergé que 1 % de prêtres venus d’autres évêchés. Le recrutement endogène, qui s’explique par l’abondance des vocations, tranche par rapport à d’autres diocèses moins fertiles comme Bourges, dont treize séminaristes sur 52 entre 1809 et 1815 viennent de l’extérieur60, ou Paris, diocèse au profil certes très attractif, qui ne compte que 236 prêtres originaires sur 967 entre 1840 et 187061.

74Dans les évêchés de Vannes et de Saint-Brieuc, les étrangers viennent majoritairement des diocèses voisins, comme le montre le tableau ci-après :

  • 62 Afin de faciliter la lecture, seuls les nouveaux évêchés ont été retenus.

Origine géographique des prêtres étrangers62

Origine géographique des prêtres étrangers62

75L’arrivée de prêtres étrangers au diocèse ne résout donc pas le déséquilibre observé entre prêtres francophones et bretonnants. L’entrée de quelques ecclésiastiques de l’évêché de Quimper dans celui de Saint-Brieuc s’explique par le nombre important de paroisses cornouaillaises qui furent intégrées à ce dernier lors du nouveau découpage. Les prêtres étrangers se résument ainsi pour l’essentiel à des ecclésiastiques d’Ancien Régime déracinés par la Révolution ou à des clercs frontaliers qui font le choix d’aller exercer leur ministère dans le diocèse voisin. Par ailleurs, les migrations de proximité l’emportent sur les lointains déplacements.

76L’entrée dans le nouveau diocèse se fait presque toujours avant l’ordination. Seuls trois exemples contraires ont pu être recensés dans les deux évêchés. François Cosquer (1813-1884), originaire de Saint-Thégonnec dans le diocèse de Quimper, ne passa ainsi dans l’évêché de Saint-Brieuc qu’en 1856, treize ans après son ordination. Il fit le chemin inverse entre 1858, avant de réintégrer définitivement son diocèse d’adoption comme recteur de la paroisse trégorroise de Pouldouran en 1862.

77La fréquence de ces mouvements migratoires semble s’accroître avec le temps. Dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes, les prêtres natifs d’un autre diocèse sont respectivement trois fois et deux fois plus nombreux dans la deuxième moitié du xixe siècle que dans la première. Une fois leur clergé reconstitué, les évêques acceptent mieux le départ de quelques séminaristes.

78Dans un diocèse aux particularismes culturels peu marqués, toute disparité géographique dans le recrutement aurait été secondaire, les zones les plus fertiles jouant le rôle de réservoir pour l’ensemble des paroisses. Mais dans les évêchés de Vannes et de Saint-Brieuc, les répercussions pastorales sont immédiates, les paroisses bretonnantes relativement stériles ne pouvant bénéficier des secours des ecclésiastiques gallos surnuméraires. Les inégalités de recrutement engendrent ainsi de forts contrastes d’encadrement, d’autant plus sensibles que la disette de prêtres était forte.

La Basse-Bretagne au début du xixe siècle : une terre sans prêtres ?

  • 63 Calcul réalisé à partir du catalogue d’Allain de 1808, AEV, D 7.
  • 64 AESB, M 24.

79Le début du xixe siècle, marqué par une forte mortalité cléricale associée à un faible recrutement, se caractérise par des charges pastorales élevées. Le maximum séculaire est atteint entre 1805 et 1815, période au cours de laquelle la crise numérique est la plus aiguë : dans le diocèse de Vannes, chaque vicaire, desservant et curé doit s’occuper en moyenne de 1 004 paroissiens en 180863 ; dans l’évêché de Saint-Brieuc la charge pastorale du clergé paroissial continue d’augmenter quelques années encore, passant entre 1809 et 1816 de un prêtre pour 1 025 habitants à un pour 1 09364. Puis, grâce à un recrutement abondant, elle descend à un prêtre pour 961 habitants en 1830.

  • 65 Voir par exemple Devailly, Guy (dir.), Histoire religieuse de la Bretagne, Chambray-lès-Tours, CLD (...)

80Ce dernier chiffre contredit la valeur qui circule dans la plupart des ouvrages d’histoire religieuse relatifs à la Bretagne, pour lesquels l’encadrement est de un prêtre pour 1 121 habitants65, une erreur imputable à une faute de copie commise par l’évêque de Nantes de l’époque. Une fois rectifié, le travail comparatif de l’évêque permet de placer les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes, lequel compte alors un prêtre pour 848 habitants, parmi les évêchés les plus privilégiés de Bretagne, légèrement derrière l’évêché de Rennes, où la charge pastorale n’est que de 802 habitants par ecclésiastique. Avec respectivement un prêtre pour 1 160 et pour 1 390 habitants, les évêchés de Quimper et de Nantes sont les moins bien lotis.

  • 66 AEV, D 4/1, lettre de Mgr Pancemont aux habitants de Loqueltas et Locmaria, 4 frimaire an XII.

81Ces moyennes cachent de fortes disparités. Au début du xixe siècle, la plupart des paroisses où le nombre de paroissiens dépasse 1 100 pour un prêtre sont situées en Basse-Bretagne. Dans certains cantons, la situation est critique. Dès novembre 1803, Mgr Pancemont, évêque de Vannes, se lamente de ne pouvoir nommer de recteur à Locqueltas66. En 1806, Persquen, Silfiac et Saint-Caradec attendent un prêtre que l’évêque ne peut leur donner. S’adressant au curé de Guéméné, Mgr Pancemont maudit alors la barrière linguistique, qui l’empêche de répartir son clergé comme il l’entend :

  • 67 AEV, D 4, lettre de Mgr Pancemont au desservant de Guémené, 5 et 21 mai 1806.

« Je ne peux m’empêcher de gémir sur l’avenir réservé à vos cantons s’ils ne cultivent pas davantage la langue française. Je perds assez fréquemment des sujets bretons, je n’en ordonne presque point ; quel sera donc le sort de ce pays dans quelques années67 ! »

  • 68 AESB, 2 CD 1, lettre de l’évêque à Portalis, 6 mai 1806.
  • 69 AESB, 2 CD 1, lettre de Mgr Caffarelli à l’empereur, 20 avril 1807.
  • 70 ADCA, V 445, lettre du ministre des cultes au préfet des Côtes-du-Nord, juillet 1808.

82Loin d’être le vecteur de la conservation de la foi qu’il devient dans la deuxième partie du siècle, le breton est au début de la période concordataire un obstacle à une gestion cléricale optimale. Dans le diocèse de Saint-Brieuc où la reprise des ordinations est moins rapide, la situation empire chaque année : huit paroisses sont sans pasteur en 180668, quinze l’année suivante et Mgr Caffarelli annonce à l’Empereur qu’« un plus grand nombre encore va tomber prochainement dans ce triste abandon69 ». En 1808, environ vingt succursales sont vacantes70.

  • 71 AESB, M 24, état du clergé, décembre 1810.
  • 72 Pouthas, Charles-Henri, « Le clergé... », op. cit, p. 23.
  • 73 Dumoulin, Christian, Un séminaire français..., op. cit., p. 83.

83En décembre 1810, il manque, selon l’état du clergé envoyé au ministère, vingt recteurs et 159 vicaires afin de garantir un service religieux satisfaisant dans le diocèse de Saint-Brieuc, qui nécessiterait 662 prêtres71. La situation ne diffère guère ailleurs. En 1814, 112 places sont vacantes sur 644 nécessaires dans le diocèse d’Autun, 291 sur 861 à Troyes72 ; le diocèse de Bourges, avec seulement 307 prêtres en activité sur 541 nécessaires, figure parmi les plus mal lotis73.

  • 74 AESB, 2 CD 3, lettre de Jean-Marie de Lamennais au ministre de l’Intérieur, 9 juin 1815.
  • 75 AESB, 2 CD 4, lettre de Jean-Marie de Lamennais au ministre de l’Intérieur, 5 janvier 1817.

84Dans le diocèse de Saint-Brieuc, le paroxysme de la crise est atteint dans les années 1810. « Vingt-quatre paroisses bretonnantes sont sans prêtres » s’alarme Jean-Marie de Lamennais en juin 181574. En janvier 1817, le décompte du vicaire capitulaire s’élève à 2575. La situation en Basse-Bretagne le préoccupe :

  • 76 AESB, 2 CD 4, lettre de Jean-Marie de Lamennais au ministre de l’Intérieur, 3 décembre 1817.

« Bégard, par exemple, cure de 5 000 âmes, n’a qu’un seul prêtre, vieux, infirme, incapable de remplir ses fonctions ; il avait un vicaire, nous lui avons ôté, pour le mettre à la tête d’une autre paroisse de 2 400 âmes abandonnée depuis plusieurs années aux soins d’un recteur à moitié fou76. »

  • 77 AESB, 2 CD 3, lettre de Mgr Caffarelli au ministre de l’Intérieur, 27 avril 1813.
  • 78 Établie à partir des autorisations à biner, ADCA, V 393.

85Pour gérer la pénurie et permettre une gestion pastorale plus souple, l’évêque de Saint-Brieuc essaye de promouvoir en 1813 l’idée d’une réorganisation paroissiale qui aurait conduit à établir « des paroisses de quinze cents à deux mille âmes et qui auraient deux prêtres77 ». Le projet, difficilement réalisable tant en raison de la disette de prêtres que des bouleversements qui en résulteraient, disparaît avec son auteur, deux ans plus tard. Le binage, solution transitoire qui permet à un ecclésiastique d’apporter un secours spirituel aux populations des paroisses voisines dépourvues de prêtre, est préféré à une utopique et difficile réorganisation du cadre paroissial. La géographie des paroisses desservies par binage entre 1814 et 181978, toutes situées à l’ouest de la frontière linguistique, confirme le manque de prêtres en Basse-Bretagne.

  • 79 AESB, 2 CD 4, lettre de Mgr Le Groing de La Romagère au ministre des Affaires ecclésastiques, 2 dé (...)

86La résorption des difficultés ne se fait que lentement dans les années 1820. En 1822, Moustéru, dont le millier d’habitants était sans pasteur depuis 1806, a enfin un recteur, après avoir été desservie pendant seize ans par les titulaires des paroisses voisines. Selon Mgr Le Groing de La Roma gère, en 1824, « le diocèse de Saint-Brieuc [...] commence à avoir presque suffisamment de prêtres pour le gouvernement des paroisses79 ». À cette date, l’évêché ne compte plus que 3,6 % de succursales vacantes. Le total des ordinations excédant de quinze unités celui des décès en 1825 dans le diocèse de Saint-Brieuc, cette année peut être retenue comme une date charnière, marquant la fin des paroisses sans prêtres. À la fin des années 1820, les charges pastorales restent toutefois très lourdes en Basse-Bretagne.

87Dans l’évêché de Vannes, marqué par une reprise rapide des ordinations, l’amélioration entre 1805 et 1828 est spectaculaire. En 23 ans, les paroisses où la charge pastorale est supérieure à 1 100 habitants par prêtre ont diminué de 49 %. Cet allègement général n’efface pas pour autant les disparités géographiques. Du sud-est au nord-ouest du diocèse, les charges pastorales s’alourdissent, variant presque aux extrêmes du simple au double.

88Dans le diocèse de Saint-Brieuc, où la crise des années 1810 a été plus sévère, les charges pastorales de 1828 sont plus proches de celles enregistrées vingt ans plus tôt. L’allègement moyen de 60 habitants par prêtre profite surtout au sud-ouest du pays gallo.

  • 80 Lagree, Michel, « Les vicaires... », op. cit., p. 151-177.

89La différence de charge pastorale est d’autant plus sensible que la superficie des paroisses bas-bretonnes, plus grandes en moyenne que les paroisses gallèses80, rend le service difficile en raison de la dispersion de l’habitat. Glomel, avant d’être diminué de la paroisse de Trégornan en 1836, fait 14 km dans sa diagonale la plus importante. Pour visiter les 6 000 habitants de Languidic, paroisse bretonnante du diocèse de Vannes, les prêtres doivent parcourir 14 km d’est en ouest et 13 km du nord au sud. Le contraste entre les deux entités linguistiques s’accroît à la suite de la création de nouvelles paroisses. Entre 1802 et 1830, dans le diocèse de Saint-Brieuc où les deux tiers des paroisses sont en Haute-Bretagne, les érections de succursales sont trois fois plus nombreuses dans le pays gallo qu’en pays bretonnant. Dans le diocèse de Vannes, huit nouvelles paroisses naissent à la même période en pays gallo, contre seulement sept en Basse-Bretagne, alors que le rapport numérique est de deux paroisses gallèses pour trois bretonnantes. Les modifications de la géographie paroissiale au début du xixe siècle, accentuent ainsi le déséquilibre est-ouest dans les deux diocèses.

90À la fin des années 1820, la crise numérique est surmontée. Toutes les paroisses bretonnantes des diocèses de Vannes et de Saint-Brieuc disposent certes d’un prêtre mais les charges pastorales y demeurent lourdes en raison de la faiblesse du recrutement de prêtres bretonnants et de la taille des succursales. Dans les décennies suivantes, malgré une amélioration sensible de l’encadrement clérical, la Basse-Bretagne ne rattrape pas son retard sur le pays gallo.

Un déficit bas-breton persistant

  • 81 Boutry, Philippe, Prêtres et paroisses..., op. cit., p. 187.

91Après 1830, les charges pastorales continuent de s’alléger. Dans le diocèse de Saint-Brieuc, les progrès de l’encadrement clérical dans les paroisses sont durables et réguliers : un prêtre pour 967 habitants en 1830, un pour 807 en 1859, un pour 727 et 1874, un pour 709 en 1905. La baisse est plus rapide dans le diocèse de Vannes où le minimum séculaire est atteint dans les années 1850 ; de un prêtre pour 848 habitants en 1830, la charge pastorale moyenne passe à un pour 775 en 1856. De nouveaux secteurs pastoraux aspirant une part croissante du clergé, elle remonte lentement dans la deuxième partie du siècle pour atteindre un prêtre pour 855 habitants en 1905. L’évolution suivie tranche ainsi avec la diminution constante observée dans le diocèse voisin, comme dans l’évêché de Belley, où la charge pastorale moyenne diminue régulièrement entre 1830 et 1880, passant de un prêtre pour 661 habitants à un prêtre pour 523 paroissiens81.

  • 82 AESB, M 24, état du clergé du diocèse de Saint-Brieuc, 1834.

92La lourdeur relative des charges pastorales dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes s’explique davantage par la grande taille des paroisses et par le manque de vicariats reconnus par l’État que par le manque de prêtres, ce que confirme le rédacteur de l’état du clergé de l’évêché de Saint-Brieuc de 1834 : « ce ne sont pas tant les sujets que les titres qui manquent dans ce diocèse82 », note-t-il en marge du document. Le même état précise que 25 prêtres briochins ne sont pas employés, alors qu’ils sont susceptibles de l’être.

93Les titres attendus se multiplient dans les décennies suivantes. La vague de créations de paroisses dans les années 1840 contribue à alléger la charge pastorale et à offrir des opportunités de promotion (voir le tableau ci-après).

  • 83 AEV, AP Saint-Philibert, rapport sur la section de Saint-Philibert, 15 mars 1869.

94Après les nombreuses érections de succursales dans le pays gallo sous la Restauration, un rattrapage s’amorce en pays bretonnant à partir des années 1830. Si, à cette occasion, quelques grandes paroisses comme Carentoir ou Laniscat sont démembrées, la géographie des créations ne coïncide pas toujours, loin s’en faut, avec celle des paroisses étendues et difficiles à desservir. L’exemple de la paroisse de Saint-Philibert, créée en 1870, offre un bon exemple des divers facteurs conduisant à l’érection en succursale83. La topographie des lieux est primordiale. La section de Saint-Philibert est ainsi séparée de la paroisse de Locmariaquer, dont elle relève, par un bras de l’océan Atlantique qui s’engouffre dans les terres. À marée haute, rejoindre l’église paroissiale, distante de quatre km à vol d’oiseau, suppose d’accomplir un trajet terrestre de onze km. Sur le plan matériel, Saint-Philibert possède toutes les garanties laissant augurer un bon fonctionnement temporel et spirituel : une chapelle de 200 places, un cimetière muré et une maison susceptible de servir de presbytère. Avoir été une paroisse dans le passé constitue ainsi un atout pour obtenir le statut de succursale.

Créations de paroisses dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes

Créations de paroisses dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes

95Davantage que celle des paroisses, la multiplication des vicariats a per mis d’accroître l’encadrement clérical. Dans le diocèse de Saint-Brieuc, le nombre de vicaires passe de 295 en 1834 à 408 en 1865, puis à 478 en 1885. En un demi-siècle, il augmente ainsi de 62 %, alors que la population ne s’accroît que de 4 %. L’évolution est moins spectaculaire dans le diocèse de Vannes où la charge pastorale de 1905 avoisine celle de 1830. Les 104 nouveaux vicariats compensent à peine l’accroissement de la population.

  • 84 Lagree, Michel, « Les vicaires... », op. cit., p. 159.

96Michel Lagrée a montré que la géographie de la création de postes de vicaires rétribués par l’État coïncide au xixe siècle avec celle du recrutement sacerdotal et de la pratique religieuse84. L’obtention d’un vicaire dépendait autant de la capacité de la succursale ou de la cure à supporter économiquement la charge d’un prêtre supplémentaire que de sa géographie ou d’une charge pastorale en théorie trop lourde. Loin d’assurer une péréquation des charges pastorales à l’échelle des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes, la création de vicariats fige ainsi les déséquilibres.

97L’allègement de la charge pastorale moyenne entre la fin de la Restau ration et le Second Empire s’est traduit par un progrès de l’encadrement clérical dans de nombreuses paroisses, mais n’efface pas le gradient est-ouest. En 1859, la partie bretonnante du diocèse de Saint-Brieuc concentre les deux tiers des paroisses où la charge pastorale dépasse un prêtre pour 800 habitants et les quatre cinquièmes de celles où elle est supérieure à un prêtre pour 1 100 habitants. En 1905, l’encadrement clérical demeure relativement faible en pays bretonnant.

98Dans la deuxième moitié de la période concordataire, la même dichotomie est-ouest caractérise le diocèse de Vannes, même si ici, la limite linguistique ne marque pas une transition brutale. À l’ouest de la ligne Lorient-Pontivy, les charges pastorales demeurent localement lourdes, sous l’effet conjugué de la faiblesse du recrutement sacerdotal et de l’augmentation de la population. Dans la cure du Faouët, que le dialecte cornouaillais isole du reste du diocèse, la population passe de 14 000 habitants en 1862 à 18 300 en 1905, tandis que le nombre de prêtres stagne à quinze. La continuité du service religieux est assurée mais la situation pastorale demeure tendue, contribuant à propager dans le clergé une image négative de ce territoire.

99Les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes, qui se caractérisent par un recrutement abondant et une forte dichotomie spatiale, sont donc des évêchés singuliers. La diversité culturelle se double dans ces diocèses d’une faiblesse relative des vocations et d’un maillage paroissial plus lâche en Basse-Bretagne. La différence entre un pays gallo aux ressources cléricales abondantes et un pays bretonnant aux charges paroissiales plus lourdes n’est pas sans répercussions sur les carrières des prêtres de ces deux diocèses bretons.

Notes

1 AEV, AP Treffléan, lettre de Joachim Le Guénédal au desservant de Treffléan, 3 décembre 1892.

2 Les archives de l’évêché de Vannes et de Saint-Brieuc possèdent toutes deux un tel registre (non coté).

3 AEV, D 46, registre du conseil épiscopal (1804-1826).

4 AESB, M 24, état du clergé en juin 1811.

5 ADCA, V 376, état du clergé en 1820.

6 AEV, D 7, état du personnel du diocèse de Vannes (1824-1864).

7 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers en Haute-Bretagne au xviiie siècle, Rennes, PUR, 1984, p. 44-46.

8 AESB, 10 CD 2.

9 AEV, D 13, nécrologe du clergé, nominations, démissions, traitements (1848-1863).

10 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 47.

11 Calcul effectué grâce aux chiffres fournis par le chanoine Boulard, Essor ou déclin du clergé français, Paris, Cerf, 1950, p. 465. Les données ne prennent pas en compte l’Alsace et la Moselle à partir de 1870.

12 Godel, Jean, Le diocèse de Grenoble et la reconstruction concordataire, 1802-1809, Grenoble, 1968, 441 p., cité par Bergeron, Louis, L’épisode napoléonien, aspects intérieurs, 1798-1815, Paris, 1972, p. 216.

13 Cabanel, Patrick, Les cadets de Dieu. Vocations et migrations religieuses en Gévaudan, xviiie-xxe siècle, Paris, CNRS Éditions, 1997, p. 96 et Dumoulin, Christian, Un séminaire français au xixe siècle. Le ecrutement, la formation, la vie des clercs à Bourges, Paris, Téqui, 1977, p. 77.

14 Faugeras, Marius, Le diocèse de Nantes sous la Monarchie Censitaire, (1813-1849), Fontenay-le-Comte, Imprimerie Lussaud Frères, 1964, t. II, p. 8.

15 Langlois, Claude, Le diocèse de Vannes au xixe siècle, 1800-1830, Paris, Klincksieck, 1974, p. 303-305.

16 Dès les années 1950, le chanoine Boulard analyse ces questions dans Essor ou déclin..., op. cit.

17 Hilaire, Yves-Marie, Une chrétienté au xixe siècle. La vie religieuse des populations du diocèse d’Arras (1840-1914), Lille, Publications de l’Université de Lille III, 1976, p. 306-309.

18 AESB, 22 CE. Nécrologe (1802-1905).

19 AEV, D 7, état du personnel du diocèse de Vannes, 1824-1864.

20 AESB, M 24, statistiques sur le nombre de prêtres âgés de plus de 60 ans.

21 Casta, Michel, Le prêtre corse au xixe siècle, thèse de doctorat, université d’Amiens, 1997, p. 124.

22 Hilaire, Yves-Marie, Une chrétienté au xixe siècle..., op. cit., p. 313.

23 Lagree, Michel, Mentalités, religion et histoire en Haute-Bretagne. Le diocèse de Rennes, 1815-1848, Paris, Klincksieck, 1977, figure 22 en annexe.

24 AESB, M 24.

25 Launay, Marcel, Le diocèse de Nantes..., op. cit., p. 305.

26 Gonnot, Jean-Pierre, Vocations et carrières..., op. cit., p. 235-238.

27 Ibid., p. 235.

28 Essertel, Yannick, Lyon et les missions lointaines à l’époque contemporaine, 1815-1962. Prosopo graphie du personnel missionnaire du diocèse de Lyon, Thèse, Lyon III, 1994, p. 156.

29 Avril, Jean-Loup, Faivre, Jean et Pecker, Jean (dir.), La santé en Bretagne, Paris, Éditions Hervas, 1992, 546 p.

30 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 64.

31 La Bretagne au xixe siècle, 1789-1914, Morlaix, Skol Vreizh, 1989, tome 4 de l’Histoire de la Bretagne et des pays celtiques, p. 102.

32 Gibson, Ralph, A social history..., op. cit., p. 68-76.

33 AN, F19 819-832.

34 Le terme de « cultivateur », employé par le rédacteur des états, ne permet pas de distinguer les niveaux de richesse au sein de la paysannerie.

35 Les orphelins, marginaux, ont été exclus.

36 Atlas de la Révolution française, t. 9, Religion, Paris, Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, 1996, p. 71.

37 Idem.

38 Huot-Pleuroux, Paul, Le recrutement sacerdotal dans le diocèse de Besançon de 1801 à 1960, thèse, Paris, 1966, p. 260.

39 Atlas de la Révolution française..., op. cit., p. 71.

40 Lagree, Michel, Mentalités, religion..., op. cit., p. 181-182.

41 Langlois, Claude, Le diocèse de Vannes..., op. cit., p. 317.

42 AESB, 2 CD 1, Lettre de l’évêque au ministre des cultes, 28 février 1809.

43 Petit, Aurélie, Le clergé paroissial à Paris entre 1840 et 1870, mémoire de maîtrise, Paris XII, 1999, p. 51. Vingt-sept prêtres sur 111 dont l’origine sociale a été retrouvée sont fils d’artisans.

44 Martin, Jean, Toiles de Bretagne. La manufacture de Quintin, Uzel et Loudéac, 1670-1830, Rennes, PUR, 1998, 374 p.

45 Statuts synodaux, Saint-Brieuc, Prud’homme, 1852, p. 90-91.

46 AEV, Z 4, correspondance des frères Dubot, lettre de Jean-Marie Dubot du 27 juillet 1896.

47 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 101.

48 Ont été considérées comme urbaines les paroisses dont la population agglomérée était supérieure à la population disséminée dans les hameaux.

49 Gibson, Ralph, A social history..., op. cit., p. 70.

50 Langlois, Claude, Le diocèse de Vannes..., op. cit., p. 315.

51 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 89.

52 Le Bouedec, Gérard, Le port et l’arsenal de Lorient, de la Compagnie des Indes à la marine cuirassée. Une reconversion réussie : xviiie-xixe siècles, Paris, Librairie de l’Inde, 5 vol., 935 p.

53 Boutry, Philippe, Prêtres et paroisses..., op. cit., p. 191.

54 Nicolas, Gilbert, L’école normale primaire de Rennes et la première génération de normaliens en Bretagne (1831-1852), thèse d’histoire, Paris IV, 1992, p. 320.

55 Dupuy, Roger, De la Révolution à la Chouannerie..., op. cit.

56 Isambert, François-André, et Terrenoire, Jean-Paul, Atlas de la pratique religieuse des catholiques en France, Paris, Presses de la FNSP, Éditions du CNRS, 1980, p. 34.

57 Le Maire, Vincent, À l’école des robes noires. La contribution de la congrégation des Frères de l’Instruction chrétienne à la scolarisation en Bretagne (1816-1918), DEA, Rennes II, 2000, p. 149.

58 Pour la première partie du siècle, voir Le Gallo, Yves, Clergé, religion et société en Basse-Bretagne de la fin de l’Ancien Régime à 1840, Paris, Les éditions ouvrières, 1991, deux volumes, 1 140 p. et pour la période 1850-1950, l’ouvrage de Lagree, Michel, Religion et cultures..., op. cit., p. 88-106.

59 Berthelot du Chesnay, Charles, Les prêtres séculiers..., op. cit., p. 60.

60 Dumoulin, Christian, Un séminaire français..., op. cit., p. 47.

61 Petit, Aurélie, Le clergé paroissial à Paris..., op. cit., p. 40.

62 Afin de faciliter la lecture, seuls les nouveaux évêchés ont été retenus.

63 Calcul réalisé à partir du catalogue d’Allain de 1808, AEV, D 7.

64 AESB, M 24.

65 Voir par exemple Devailly, Guy (dir.), Histoire religieuse de la Bretagne, Chambray-lès-Tours, CLD, 1980, p. 304.

66 AEV, D 4/1, lettre de Mgr Pancemont aux habitants de Loqueltas et Locmaria, 4 frimaire an XII.

67 AEV, D 4, lettre de Mgr Pancemont au desservant de Guémené, 5 et 21 mai 1806.

68 AESB, 2 CD 1, lettre de l’évêque à Portalis, 6 mai 1806.

69 AESB, 2 CD 1, lettre de Mgr Caffarelli à l’empereur, 20 avril 1807.

70 ADCA, V 445, lettre du ministre des cultes au préfet des Côtes-du-Nord, juillet 1808.

71 AESB, M 24, état du clergé, décembre 1810.

72 Pouthas, Charles-Henri, « Le clergé... », op. cit, p. 23.

73 Dumoulin, Christian, Un séminaire français..., op. cit., p. 83.

74 AESB, 2 CD 3, lettre de Jean-Marie de Lamennais au ministre de l’Intérieur, 9 juin 1815.

75 AESB, 2 CD 4, lettre de Jean-Marie de Lamennais au ministre de l’Intérieur, 5 janvier 1817.

76 AESB, 2 CD 4, lettre de Jean-Marie de Lamennais au ministre de l’Intérieur, 3 décembre 1817.

77 AESB, 2 CD 3, lettre de Mgr Caffarelli au ministre de l’Intérieur, 27 avril 1813.

78 Établie à partir des autorisations à biner, ADCA, V 393.

79 AESB, 2 CD 4, lettre de Mgr Le Groing de La Romagère au ministre des Affaires ecclésastiques, 2 décembre 1824.

80 Lagree, Michel, « Les vicaires... », op. cit., p. 151-177.

81 Boutry, Philippe, Prêtres et paroisses..., op. cit., p. 187.

82 AESB, M 24, état du clergé du diocèse de Saint-Brieuc, 1834.

83 AEV, AP Saint-Philibert, rapport sur la section de Saint-Philibert, 15 mars 1869.

84 Lagree, Michel, « Les vicaires... », op. cit., p. 159.

Table des illustrations

Titre Évolution numérique du clergé vannetais et briochin entre 1805 et 1905
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Titre Ordinations quinquennales dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes au xixe siècle
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Titre Part des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes dans le nombre total d’ordinations en France
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Titre Ordinations quinquennales dans les évêchés bretons
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Titre Bilan démographique quinquennal dans le clergé des diocèses de Vannes et Saint-Brieuc
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Titre Origine sociale des élèves des diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes se destinant à la prêtrise35
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Titre Part des prêtres d’origine urbaine48 dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/3327/img-7.png
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Titre Origine géographique des prêtres étrangers62
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/3327/img-8.png
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Titre Créations de paroisses dans les diocèses de Saint-Brieuc et de Vannes
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/3327/img-9.png
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© Presses universitaires de Rennes, 2008

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