La reconversion par l’apprentissage du code informatique

Une importation différenciée d’un supposé empowerment dans des dispositifs de formation à destination des très diplômés et des publics défavorisés

Michaël Vicente

p. 129-152


Texte intégral

1Depuis 2013, des formations courtes nommées coding bootcamps, qui se concentrent sur l’apprentissage de la programmation informatique, autrefois réservée aux ingénieurs et informaticiens, sont proposées pour tous et sont présentées comme un moyen de reconversion à des métiers de développeur informatique. Venues des États-Unis, ces formations qui sont censées se concentrer sur l’apprentissage du code informatique entendent former dans un délai court (autour de neuf semaines), mais de manière intensive, des programmeurs capables d’occuper ces fonctions dans les entreprises et administrations. Ces formations portent surtout la promesse de s’adresser à tous. Face à leur développement massif et rapide, nous nous poserons ici la question de savoir, comment ces dernières se sont imposées à la fois pour des publics favorisés et défavorisés ? Nous faisons l’hypothèse que c’est en liant le concept d’empowerment à l’apprentissage du code, que ces formations ont réussi à se développer dans le paysage des reconversions professionnelles.

2Cette contribution s’appuie sur l’étude de deux organismes de formation de ce type1. Ces deux formations que nous avons appelées TrainCode et 93CodeSchool sont aujourd’hui les plus importantes du secteur et revendiquent avoir formé respectivement 14 000 et 8 600 personnes2 depuis leur création.

3Dans une publication précédente3, nous avions suivi la création de ces formations de près et notamment l’une d’entre elles, 93CodeSchool, une formation qui s’adressait à un public dit défavorisé. En mobilisant la comparaison avec TrainCode, formation créée au même moment, qui promeut la reconversion dans le secteur du numérique, mais qui s’adresse à un public fortement diplômé, nous verrons que le dispositif utilisé par ces formations est très proche, mais aussi qu’un discours singulier autour d’un concept peu stabilisé, celui d’empowerment, accompagne la création de ces formations.

4Ces deux formations reposent sur des dispositifs et contenus proches inspirés des coding bootcamps américains. 93CodeSchool est présenté comme une formation ayant pour objectif d’orienter des jeunes « issus de ZUS [zones urbaines sensibles] et de la diversité4 » vers l’entrepreneuriat et plus particulièrement l’entrepreneuriat social et solidaire (ESS). TrainCode s’adresse à un public de cadres ou de jeunes diplômés du supérieur souhaitant se reconvertir ou créer une entreprise dans le domaine du numérique.

5Dans un premier temps, nous verrons que ces formations, en faisant la promotion de l’apprentissage du code informatique, mobilisent un discours général d’empowerment qui vise à accompagner leur développement, transformant ces formations au code informatique en acte d’empowerment. Dans un deuxième temps, il s’agira de comprendre comment ce discours est approprié et mobilisé comme ressource par les participants avec plus ou moins de succès et comment cette notion d’empowerment laisse la place à des ajustements pragmatiques de la part des stagiaires et des organismes de formation.

Méthodologie

6Les résultats de l’enquête présentée reposent sur une série d’entretiens réalisée auprès d’élèves qui ont été formés durant les premières années de ces formations (2013 et 2014). Ces entretiens (n = 23) ont été réalisés en 2016 et 2017, soit deux ans après la sortie de la formation.

7Pour l’école 93CodeSchool, l’enquête repose précisément sur l’exploitation de 15 entretiens, réalisés en 2016, avec les élèves de la première promotion de 2013. Nous avons nous-mêmes contacté les anciens élèves sans passer par l’équipe de formation. Ainsi, la plupart de ces entretiens ont eu lieu avant notre rencontre avec les responsables de la structure. D’une durée de 50 minutes à 2 h 25, ces entretiens ont suivi une grille avec un point d’entrée biographique. Nous nous sommes intéressés aux parcours scolaires des enquêtés et à la relation qu’ils entretiennent avec l’informatique et avons réalisé des focales sur les moments de l’entrée dans la formation, son déroulement et sa sortie, et ensuite sur l’insertion et le bilan critique de cette insertion et de la formation.

8Pour la deuxième formation, TrainCode, nous avons adopté la même méthodologie, en réalisant huit entretiens en 2017 avec des élèves ayant suivi leur formation en 2014. Nous avions eu un taux de réponse sensiblement moins important pour cette formation (15 réponses positives sur 32 pour 93CodeSchool, 8 sur 28 pour TrainCode). Mais pour cette dernière, les entretiens étaient sensiblement plus longs, entre 1 h 30 et 2 h 20.

9Nous avons complété cette enquête avec deux entretiens avec les fondateurs et un formateur de ces organismes de formation et par l’analyse des sites Internet de l’époque faisant la promotion des formations.

Comment se former au code informatique est-il devenu un acte d’empowerment ?

La formation au code informatique dans les politiques de formation et d’emploi

10En France, la question de l’apprentissage du code informatique vers un large public n’est pas nouvelle et s’inscrit dans une histoire qui remonte au plan « Informatique pour tous » mis en place en 1985. Il s’agissait notamment de transmettre l’apprentissage du code informatique, via le langage Logo développé par le chercheur américain Seymour Papert. Dispositif de formation qui visait un public scolaire et dont l’échec est largement documenté5.

11En parallèle, on observe que la formation continue en informatique, notamment les formations courtes, s’est concentrée sur la formation à la bureautique, accompagnant ainsi l’informatisation des organisations. Mais plutôt que de reconversion, il s’agissait d’adapter les personnes en poste à la numérisation de leur activité. Ces formations se concentrent sur l’apprentissage de logiciels bureautiques ou plus récemment l’apprentissage et l’adaptation au Web. Après les formations en anglais et en développement personnel, elles sont en effet et depuis de nombreuses années les premières formations courtes suivies par les adultes dans le cadre de la formation continue, représentant, plus d’une formation sur dix6. Ces formations n’abordaient pas à proprement parler le code informatique, qui constitue la couche la moins visible de l’informatique et dont l’apprentissage est traditionnellement réservé aux ingénieurs ou diplômés en informatique. Ceci alors qu’il semblerait que ces compétences spécifiques sont recherchées sur le marché du travail et que cette fonction subisse une pénurie au sein des entreprises.

12C’est en partie sur ce paradoxe apparent que va se construire l’argumentation des fondateurs des organismes de formation que nous étudions. Cette formulation de la pénurie relève en partie d’une approche adéquationniste7, au nom des « emplois non pourvus », qui n’est pas nouvelle en France. En effet, depuis le rapport Tebeka de 19808 jusqu’aux rapports récents (par exemple celui du Fonds d’assurance formation ingénierie et conseil9 [Fafiec] de 2016), nombre d’études régulièrement produites mettent en avant le fait que parmi les « métiers en tension », ceux du numérique occupent l’une des premières places. Des travaux comme ceux de Marc Zune10 ont pu le montrer, et cette place peut être discutée, notamment vis-à-vis des fondements du marché spécifique à l’informatique et au numérique. Loin de reposer sur le modèle de l’appariement, la mobilité professionnelle propre au secteur et le caractère « tripartite » du marché du travail, à savoir que le lien entre employeur et employé passe régulièrement par des prestataires et sociétés de conseil11, font que l’ampleur du déséquilibre entre offre et demande de travail est probablement moindre qu’il n’y paraît à première vue. Il n’en reste pas moins que cet état de pénurie est relayé par les principales organisations patronales et en premier lieu par le Syntec-Numérique12 pour qui la France se prive de leviers de croissance en ne réagissant pas à cette pénurie. Plus précisément, selon France Stratégie, ce sont les formations de développement informatique qui sont visées. En effet, parmi les différents métiers du numérique, ce sont les « activités informatiques – programmation, conseil et autres » et la fonction de développeur en particulier qui seraient le plus en pénurie. Et notamment, « les fonctions de conception, d’intégration ou de production sont souvent fusionnées dans des profils de travail polyvalents, dénommés concepteurs-développeurs, analystes-programmeurs, ingénieurs de développement ou encore développeurs “full-stack13 ». C’est exactement sur ce profil full-stack que se positionnent les formations que nous étudions. Par full-stack, on entend des développeurs généralistes, capables de créer la partie visible des sites ou applications (Front end) en mobilisant les langages dits Web (principalement HTML et CSS) mais également Back end, c’est-à-dire la partie logiciel moins visible qui gère l’ensemble des fonctionnalités et qui anime les fonctions que le site ou l’application sont censés assurer. Dans ce cas précis, les langages et technologies peuvent être différents selon les fonctionnalités, mais font le plus souvent appel a minima à la maîtrise des bases de données14.

13Pour mieux comprendre le positionnement des formations étudiées, il est également nécessaire de resituer le contexte des politiques de formations des années 2013-2017 durant lesquels ont été lancés de larges plans de formation récurrents, les plans 30 000 formations de 2013, celui de 100 000 de 2014 et enfin, 500 000 formations de 201615. Ces politiques présentées comme ambitieuses reposent sur les conclusions du rapport du Conseil d’orientation pour l’emploi (COE), reprenant les données de l’enquête besoin de main-d’œuvre qui font le constat de fortes pénuries pour certains métiers. Dans cette étude, parmi les dix métiers les plus demandés à côté des aides à domicile, serveurs et ouvriers agricoles, figurent les informaticiens. C’est la seule profession à avoir un statut de cadre. Surtout, il s’agit du métier où le taux de projet de recrutement jugé difficile est le plus important (67,2 % contre 40 % pour les vingt métiers en question)16.

14La mise en place de ces plans de formation s’est concentrée dans la plupart des régions sur le BTP (maçons, plâtriers, menuiserie…), l’industrie (chaudronniers, soudeurs…), le transport et la logistique (conducteurs…), les services aux entreprises, services aux personnes/social (aide à domicile, assistantes maternelles…), le commerce (vendeurs…), l’hôtellerie et métiers de bouche (cuisiniers, employés de l’hôtellerie…)17, laissant ainsi l’informatique en quelque sorte à l’écart ces plans. Or, comme nous avions pu le montrer18, la politique de formation au numérique a été structurée à partir de 2015 autour de la Grande école du numérique (GEN) qui se présente comme un dispositif, permettant l’émergence et le renforcement de nouvelles formations spécifiques au numérique. Il s’agit de financements spécifiques d’amorçage via des appels à projets et de soutien aux élèves en leur permettant notamment de pouvoir bénéficier de financements de Pôle emploi pour leur formation, alors même qu’elles n’avaient pas encore la reconnaissance au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ou pour d’autres de pouvoir bénéficier des bourses du Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous) sans être à proprement parler étudiant du supérieur.

Importation de la notion d’empowerment et renouvellement de la formation au code

15Le renforcement du discours conduisant à la création de ces formations s’appuie certes sur cet argument de pénurie, mais également sur une notion qui tend à rendre ces formations désirables pour une multiplicité de publics : celle d’empowerment. Il faut d’emblée noter que cette notion a une définition partiellement stabilisée, ce qui a certainement permis sa circulation dans différents milieux, qu’ils soient entrepreneuriaux, plus spécifiques au numérique ou encore éducatifs.

16Selon Bacqué et Biewener, cette notion a d’abord été introduite dans le champ du travail social à Los Angeles en 1976 par Barbara Solomon19 avec le concept de Black empowerment qui permettait de « qualifier un ensemble de pratiques caractérisées par la recherche d’un processus d’autonomisation des usagers et de transformation des relations entre ces derniers et les professionnels20 » plus généralement en s’adressant aux travailleurs sociaux et qui donnera naissance au « communuty organizing21 ». Ce concept a ensuite circulé jusqu’aux politiques de microfinancement de la Banque mondiale22. Le champ de l’éducation s’est également saisi de cette question, dans un numéro de Spirale. Revue de recherches en éducation, consacré à la question, Yolande Maury et Nassira Hedjerassi soulignent que dans le champ éducatif aux États-Unis et en France, ce concept a irrigué de nombreux domaines. La définition de l’empowerment qu’elles retiennent, met en avant la dimension « émancipatrice », en tant qu’« énergie, un pouvoir génératif, qui place les acteurs en capacité de faire, et d’être promoteurs de changement23 ».

17En parallèle, on observe également une lecture plus libérale et conservatrice autour du concept d’Entreprise Zone, où l’idée est la création d’emploi par de toutes petites entreprises24. L’articulation entre entrepreneuriat et numérique est largement nourrie par des succès entrepreneuriaux issus de la Silicon Valley, qui alimentent l’imaginaire suscité par les plus grandes réussites économiques de cette région25.

18Sur le lien entre empowerment et code informatique, c’est certainement Douglas Rushkoff qui insiste le plus sur la dimension « émancipatrice » de la maîtrise du code informatique : « Dans ce monde émergent, aux contours fortement programmés, soit vous créez le logiciel, soit vous serez le logiciel. C’est aussi simple que ça : programmez ou vous serez programmés. Dans le premier cas, vous aurez accès à la table de commande de la civilisation. Mais si vous choisissez l’autre option, cela pourrait être votre dernier choix26. » Selon lui, la programmation est le « nerf de la guerre » d’une société numérique, ainsi « si nous n’apprenons pas à programmer, nous risquons de l’être nous-mêmes27 ». Il met en avant le paradoxe selon lequel le code informatique est un élément puissant de transformation et que peu de personnes en font l’apprentissage alors même que « la programmation est une chose extrêmement puissante, mais pas difficile à apprendre28 ».

19Cette figure hégémonique du numérique dans tous les registres de l’économie et de la société fait ainsi craindre concurrences et subordinations, qui peuvent également être générationnelles. C’est ce vers quoi tendent certains discours, largement relayés par les médias, sur la « génération Y29 » ou les « digital native30 » qui mobilisent des concepts plus ou moins théorisés, sur des générations nées sous l’ère du numérique. Comme Hélène Stevens31 a pu le montrer, le thème de l’entreprise de soi qui était déjà présent depuis longtemps chez les cadres du secteur informatique dans la construction des carrières et du rapport au travail.

20C’est en substance ce discours qui sera repris par le fondateur de 93CodeSchool, dans un ouvrage qu’il publie en 2014, intitulé Lire, écrire, compter, coder. Il y défend une vision selon laquelle le code donnerait davantage de pouvoir à ceux qui en ont la maîtrise :

« Le code et le numérique favorisent ainsi l’émancipation et l’empowerment, c’est-à-dire la possibilité donnée aux individus de provoquer le changement qu’ils souhaitaient, en plaçant les citoyens au centre de la démarche32. »

21Il s’agit aussi de redonner un pouvoir politique aux citoyens et programmeurs, qui seraient en mesure de « coder et recoder les lois », « mission traditionnelle des lobbys des grandes industries et de la finance » « c’est maintenant au tour des codeurs de s’y essayer33 ». Ainsi à la question : « Comment changer les lois lorsqu’on vient du cyberspace ? », il répond : « D’abord en les manipulant avec les outils des programmeurs. La loi peut être analysée et décortiquée comme un programme informatique34. »

22Ces affirmations peuvent sembler inspirées de la science-fiction, tel le film Matrix, qui comme le montre Razmig Keucheyan35 a eu un impact structurant sur les communautés en ligne. Elles reposent en partie sur le développement théorique de juristes et d’universitaires tels que Lawrence Lessig36 qui a théorisé ce lien entre loi et code informatique à travers l’affirmation « code is law ».

23Mais dans le texte du fondateur de 93CodeSchool, c’est la dimension entrepreneuriale de cette capacité d’émancipation qui est présentée comme la plus visible : « Nous avons souvent en tête l’exemple typique de l’entrepreneur qui, avec un bout de code publié sur Internet, quelques amis et des parts de pizza, va réussir à se lancer et devenir millionnaire37. » Plus prosaïquement, les auteurs présentent la programmation comme un « nouvel ascenseur social » : « Partout, le code et l’informatique engendrent des bouleversements qu’il s’agit de comprendre. Ceux qui maîtriseront la connaissance du code auront certainement plus de chance de s’insérer sur le marché du travail38. »

24En France, ces préoccupations ont notamment été formalisées par le Conseil national du numérique (CNNum), qui est une commission consultative créée en 2011, pour conseiller le Gouvernement sur les enjeux liés au numérique, et qui est composé de membres issus de la société civile, de l’industrie, du monde académique et de la recherche, ainsi que de représentants des différentes administrations et organismes publics. Dans son rapport de 2015 intitulé Ambition numérique, une large partie du propos porte sur cette question et le terme est francisé sous l’appellation « d’empouvoirement39 ». Le rapprochement entre l’émancipation propre à l’empowerment et la sphère économique s’est fait par une reprise du terme par la littérature managériale française, comme le montrent des auteurs comme Philippe Liger et Gaëlle Rohou qui définissent l’empowerment en entreprise comme « habilitation, quelquefois prédéfinie ou délimitée, permettant à un collaborateur ou à une équipe auxquels on en donne les moyens de prendre des initiatives et des décisions dans leur périmètre d’actions et possiblement en dehors de leurs descriptions de postes40 ». Dans son texte « Une brève histoire de l’empowerment : à la reconquête du sens politique », en tant qu’actrice de ce mouvement, Valérie Peugeot expose très bien la trajectoire de cette notion dans le milieu entrepreneurial et son importation, qu’elle situe en 2006 avec le rapport de la Commission européenne intitulé « European i2010 initiative on e-Inclusion ». Selon elle :

« Le terme s’est diffusé largement dans les milieux de l’économie numérique, dans une approche caractéristique de déterminismes technologiques. Le Web 2.0 apparu en 2005 est passé par là : les acteurs du numérique français et d’ailleurs, rejouent les utopies fondatrices des années 1970-1980 aux États-Unis. Le Web devenu distribué et contributif serait intrinsèquement vecteur d’empowerment aussi bien pour le client, le consommateur, que pour le salarié41. »

25Cela illustre dans le domaine du numérique une trajectoire de récupération managériale dont ce terme a plus largement fait l’objet dans d’autres domaines42.

26Plus précisément, on pourrait situer l’importation du concept d’empowerment dans le milieu entrepreneurial français du numérique en 2013 autour du pôle de compétitivité Cap Digital regroupant les principales entreprises parisiennes du secteur. En 2013, est ainsi organisée par ce pôle dans le cadre de l’événement Futur en Seine, une journée intitulée « L’empowerment par le code ? », à laquelle participent son responsable et des chefs d’entreprise du secteur numérique parisien, mais également des chercheurs et enseignants français et étrangers. Lors de ces échanges43, il ressort que le code informatique doit être considéré comme une nouvelle langue dans le monde de l’entreprise et à ce titre son apprentissage devrait être généralisé.

Mise en école de ces formations : les cas TrainCode et 93CodeSchool

27Nous avons choisi d’étudier deux formations créées à peu près au même moment, au printemps 2013, et qui mobilisent l’empowerment au sein de leur programme de formation, mais de manière différente.

28Lorsque nous réalisons ces entretiens en 2016 et 2017, il s’agit des deux formations les plus importantes de ce domaine. Ces deux formations dès leur création revendiquent être ainsi plus proches de celles d’entreprises de type start-up que de celles des centres de formation. Nous voyons que cette différence tiendra également dans la manière dont les organismes de formation financent leur activité.

29Les organismes de formation étudiés se sont forgés dans cette continuité, aux États-Unis principalement, et ceci en dehors des sphères éducatives, autour de la création et diffusion des formations dites coding bootcamps. Aux États-Unis, la première formation de ce type ouvre en 2012. Le modèle pédagogique adopté est directement inspiré du logiciel libre, notamment sur ses aspects intensifs et présentiels que l’on retrouve lors des rencontres physiques de développeurs de logiciel libre appelés hackathons. Ce modèle, longtemps réservé aux seuls membres des communautés de développeurs de logiciel libre s’est démocratisé, formalisé, et ouvert aux béotiens, sous la forme de coding bootcamps, organisés et financés par des entreprises privées et les participants eux-mêmes. Sur un format de neuf semaines, ces projets pédagogiques se sont inscrits dans le mouvement dit des Makers qui, selon la définition de Chris Anderson :

« utilisent les outils numériques pour créer de nouveaux produits et réaliser des prototypes. Grâce à l’open source, ils mettent en commun leurs idées et leurs connaissances. Leurs initiatives dépassent le stade du passe-temps et débouchent sur de véritables entreprises44 ».

30L’organisme de formation TrainCode est issu de l’association de deux frères. Le premier, diplômé de l’École centrale, a travaillé plusieurs années en salle de marché d’une grande banque en tant qu’analyste quantitativiste, tandis que le second est avocat d’affaires. Le projet TrainCode est construit par le premier comme la possibilité de changer sa propre vie, de rompre avec le monde de la grande entreprise et de se lancer dans une expérience entrepreneuriale. Il s’agit en effet, selon les fondateurs, d’un projet de création d’entreprise parmi d’autres possibles. Ils avaient initialement un autre projet d’entreprise du Web et c’est face à l’échec de ce premier projet qu’est lancée l’initiative de cette formation :

« Donc on arrête ce projet gentiment. Et en parallèle [au même moment] notre ami de cette bande-là [anciens de l’École centrale] était en train de faire un coding bootcamp à SF [San Francisco]. Il me disait que c’était génial. Mais du coup n’ayant pas vraiment de projet, et moi j’ai toujours aimé enseigner, même dans la banque j’étais un peu la personne, je bossais dans une équipe technique, j’étais analyste quantitatif, et pour autant c’était moi qui faisais les présentations aux équipes métiers » (entretien fondateur TrainCode).

31Il sera suivi par son frère qui va opérer le même revirement. Les deux fondateurs se sont assez tôt associés avec leur premier formateur qu’ils avaient recruté tout d’abord en tant que vacataire, un informaticien diplômé de l’École polytechnique ayant eu une expérience de développeur dans de grandes entreprises du Web.

32Dans sa construction et sa promotion, le projet adopte tous les codes et méthodes de management des start-up. Les fondateurs le présentent ainsi :

« Le projet s’est lancé step-by-step dans un esprit lean. Au départ, beaucoup de cours gratuits dans des espaces de coworking ou des incubateurs. Pour tester la pédagogie d’abord, mais aussi pour savoir si le TrainCode trouvera son marché ! À la fin de cette étape, on avait nos cinq clients potentiels, prêts à mettre 5 000 euros sur une formation de deux mois45… »

33Initialement financée sur fonds propres, la formation est effectivement payante, de l’ordre de 5 000 euros les neuf semaines au début, contre 7 000 euros aujourd’hui. TrainCode prend la forme d’une société anonyme avec trois associés. Ils sont d’abord appuyés par un incubateur parisien avant d’évoluer, avec leurs propres locaux.

34Concernant le public, il existe une forte homologie entre le profil des fondateurs et celui des formés. En effet, la plupart des personnes interrogées pour l’enquête étaient alors diplômées de grandes écoles, principalement d’écoles de commerce et d’instituts d’études politiques. La totalité des personnes interrogées déclarait en outre avoir un parent cadre ou enseignant. La totalité ayant financé leur formation sur fonds propres, et étaient diplômés depuis moins de cinq ans.

35La deuxième formation étudiée, 93CodeSchool, suit un autre modèle. L’initiative vient de deux anciens étudiants du Celsa (École des hautes études en sciences de l’information et de la communication) et de la rencontre avec un ancien professeur intervenant dans cette formation et d’un ami d’enfance d’un des premiers étudiants, qui était à l’époque développeur informatique indépendant.

36Le discours des fondateurs transforme cette expérience entrepreneuriale en véritable changement de vie. Trois des quatre fondateurs étaient auparavant associés dans une agence de communication Web. La construction de 93CodeSchool se fait initialement sans soutien financier extérieur. Ce projet fait néanmoins suite à leur première expérience entrepreneuriale, dans le domaine du Web :

« On ouvre notre petite agence, et on a tout appris tout seuls en fait […]. C’est ce qu’on a fait pendant trois ans, avec T. Avec un troisième larron V., qui était le cofondateur, et au bout de trois ans, bosser pour de grands comptes, je bosse avec de grosses boîtes ça marche plutôt bien, et c’est là, on s’est dit, si on a tout appris nous-même… […]. On s’est dit si on s’en est sortis tout seuls, on peut certainement faciliter la tâche à d’autres personnes, pour auto-apprendre. C’est ça la promesse de 93CodeSchool » (entretien cofondateur 93CodeSchool).

37Cette formation prend appui sur le code informatique pour proposer une démarche plus large, comme le montre cet extrait du programme proposé :

« 1) Situation initiale : je me trouve face à un problème que je ne sais pas résoudre.
2) Recherche de solution : je teste différentes manières de répondre à mon problème.
3) Identification d’une solution : après plusieurs tentatives infructueuses, je trouve une manière de répondre à mon problème.
4) Acquisition d’une connaissance : je sais à présent comment faire.
5) Partage : Je suis capable de montrer à d’autres ce que j’ai appris.
6) Abstraction : ce qui implique idéalement de généraliser la situation singulière à laquelle je me suis confronté46. »

38C’est donc ici davantage la démarche qui est mise en avant, et qui s’appuie sur le développement de compétences réutilisables dans des contextes variés.

39La formation et son recrutement seraient ainsi « prioritairement tournés vers les débutants en informatique et les profils sous-représentés dans l’entrepreneuriat et le Web (les filles et les jeunes des quartiers populaires notamment)47 ». Nous observons néanmoins un décalage entre cet objectif visé et le public réellement accueilli. La première promotion est ainsi composée de 64 % de demandeurs d’emploi et de 30 % de femmes. Si l’organisme vise effectivement les quartiers populaires et notamment le département de la Seine-Saint-Denis, comme l’affirment ses fondateurs, parmi les étudiants nous ayant répondu (15 sur 32), il y a une sous-représentation des non-diplômés, et une surreprésentation des diplômés bac +5 et bac +2, mais la représentation est plus équilibrée du point de vue du genre, puisque nous avons rencontré quatre femmes sur les huit que comptait la promotion. La formation n’a pas indiqué l’âge moyen des élèves de la promotion, parmi ceux que nous avons rencontrés, ils avaient à l’époque de l’entretien entre 25 et 38 ans. Le public est donc plus défavorisé que celui de TrainCode, mais reste toutefois bien davantage favorisé que la population des jeunes des zones géographiques visées.

40La différenciation entre les publics visés se retrouve dans les modèles de financement de ces organismes de formation et dans la nature des liens qu’ils entretiennent avec les supports institutionnels.

41Le mode de financement de 93CodeSchool diffère de celui des autres organismes de formation, ce qui témoigne d’une rupture. Conformément à ses objectifs, cette formation est financée de manière distincte. Elle a été initialement financée par un prêt bancaire, mais rapidement, elle a bénéficié de financements provenant d’appels à projets. L’un de ces appels, « La France s’engage », entrepris en 2014 par le ministère de la Ville, a été déterminant pour son lancement. On observe également cette différence lorsqu’on suit l’évolution de ces financements dans le temps : 93CodeSchool appuie son modèle économique sur le mécénat via une association habilitée à recevoir le mécénat. Ainsi, les mécènes sont invités à devenir partenaires principaux, à parrainer une promotion ou encore à accompagner les projets.

42À l’inverse, TrainCode a construit son modèle économique de manière plus classique, à la manière d’une PME qui se consacre à la vente d’un produit, comme toute autre entreprise, le produit étant ici la formation de neuf semaines.

43Lorsque nous réalisons l’entretien en mars 2017 avec le fondateur de TrainCode, les médias annoncent une levée de fonds importante concernant 93CodeSchool. Il s’agit en fait d’une prise de participation de la Caisse des dépôts de 750 000 euros48, afin que la structure ne fasse pas faillite. En effet, quatre ans après sa fondation, le modèle économique n’a pas été trouvé et le fonctionnement repose principalement par l’emprunt auprès de financeurs.

44Dans ce secteur concurrentiel, cela renforce le sentiment pour TrainCode d’avoir opté pour un mode de financement plus sain, ils voient cet appui par des financements publics comme étant un avantage concurrentiel à la faveur de 93CodeSchool.

45Le programme Grande école du numérique (GEN) a structuré et financé l’amorçage de ces écoles de code informatique. Comme nous l’avions explicité dans un précédent article49, 93CodeSchool fut un modèle pour la mise en place de ce dispositif, l’école en question ayant été citée à 23 reprises dans le rapport amorçant la création de la GEN. 93CodeSchool a logiquement figuré parmi les premiers à recevoir le Label GEN, cette labellisation a par ailleurs permis d’essaimer cette formation dans d’autres villes françaises. En 2017, il y avait déjà 30 centres de formation en France, aujourd’hui on en dénombre 75.

46Les fondateurs de TrainCode, pour leur part, sont très sceptiques vis-à-vis de ce label. Comme pour les questions de financement, ils expriment une certaine distance vis-à-vis de ce dispositif.

« Nous on l’a demandé, pour le label pas pour la subvention. On a regardé qui avait eu le label et c’était un peu la Cour des miracles […]. Ils ne l’ont pas donné parce qu’ils nous ont dit qu’on était bénéficiaires. C’est vraiment tout ce qui m’énerve dans le système français, nous on est bénéficiaire, on a grossi, on n’est que cinq salariés. Alors du coup l’effet négatif c’est que des gens qui suivaient TrainCode que tu pourrais financer par le Pôle emploi, aujourd’hui ne sont pas financés, car on n’a pas le label. À la rigueur on aurait préféré que ce label n’existe pas. On s’en fout de la subvention, on veut juste un coup de tampon » (entretien avec le fondateur TrainCode).

Appropriations différenciées de l’empowerment

47Au-delà du discours produit par ces organismes de formation, qui peut revêtir un aspect commercial, comprendre l’effet de la notion d’empowerment sur la formation nécessite de s’intéresser à la manière dont elle est traduite dans les dispositifs de formation. Il convient de souligner que l’appropriation de cette notion par les apprenants ne relève pas d’un processus spontané ou automatique, mais qu’elle est largement différenciée selon les publics. Ce phénomène tend à se traduire par une réappropriation pragmatique de la notion d’empowerment, qui peut prendre des formes variées selon les contextes et les acteurs impliqués. Cette différenciation, on l’observe parmi les organismes de formation, mais aussi, et surtout chez les élèves.

Des expressions différenciées de l’empowerment dans les dispositifs de formation

48Un des premiers éléments de cette expression réside dans la sélection des élèves, et c’est là que réside la différenciation entre les deux organismes de formation :

49« Changez de vie : apprenez à coder », tel est le slogan mobilisé par TrainCode. L’usage de l’impératif rend compte d’une injonction au changement, qui va au-delà de la formation et vise la vie de l’individu. Sont ainsi mises en avant des opportunités réputées plus présentes dans le domaine informatique, et notamment le fait que les métiers du numérique de demain n’existent pas encore. Ce mot d’ordre rappelle le modèle des carrières nomades50 ou ce qu’Hélène Stevens51 avait déjà pu démontrer dans l’industrie informatique, qui indique que dans ce secteur faire « carrière » signifie principalement passer d’une entreprise à une autre plutôt que de réaliser une carrière au sein de la même entreprise.

50Cette formation s’adresse à des diplômés de grandes écoles, ce que les fondateurs identifient comme des « cerveaux déjà bien faits », la seconde partie du slogan est la suivante : « Le TrainCode apporte un savoir-faire technique aux esprits créatifs. » L’esprit créatif signifie ainsi qu’il s’agit de s’adresser à des personnes ayant déjà des dispositions pour se lancer dans ce type de changement. Les fondateurs sont d’ailleurs conscients de l’importance de ces prérequis :

« Nous on change des vies, mais sur des gens qui étaient déjà sur les rails, nous on ne fait pas de l’insertion. On a un impact fort sur les gens qu’on forme. Il y a plein d’histoires d’élèves qui nous disent qu’ils ont changé complètement d’itinéraire grâce à nous. Mais ce n’était pas des profils qui étaient forcément à difficultés » (entretien fondateur TrainCode).

51Cette argumentation correspond ainsi à une vision libérale de l’empowerment, qui a marqué la réapposition de ce concept par les acteurs économiques.

52Les premières promotions seront sélectionnées à partir du réseau de l’un des principaux accélérateurs de start-up de Paris, sans nécessiter de communication de masse. Les critères de sélection initiaux étaient basés sur la motivation des candidats et leur capacité à financer leur formation. Par conséquent, cette formation a été conçue dès le départ pour être une étape supplémentaire dans le parcours entrepreneurial des participants.

53Pour 93CodeSchool, le recrutement est différent : comme nous l’avons vu, la formation est présentée comme gratuite pour les élèves et vise ainsi d’autres publics. La formation entend ainsi « confier le design de leur futur aux enfants des ZEP [zone d’éducation prioritaire] et ZUS [zone urbaine sensible] et aux “sous-représentés du numérique” » (présentation Web de la formation).

54La notion d’empowerment est davantage mobilisée dans sa dimension émancipatrice voire politique et passe notamment par la mise en avant de l’économie dite « sociale et solidaire » (ESS). Elle se rapproche ainsi de l’empowerment dans sa définition initiale donnée par Barbara Solomon52.

55Cette formation se présente donc comme très ambitieuse sur le volet social, et entend répondre à de nombreuses demandes sociales et notamment celle de créer des entreprises, qui doivent être sociales et solidaires, auprès d’un public défavorisé, via le numérique, ayant pour but de leur donner des clés d’émancipation. Cependant, cette accumulation de critères et de bonnes intentions rend particulièrement floue la visée de la formation. Les premiers recrutements sont effectués par l’équipe de fondateurs, sans qu’on puisse expliciter clairement quels sont les critères mis en œuvre pour la sélection. Lorsqu’on le fait remarquer, c’est l’argument de l’autonomisation qui est mis en avant dans le discours des fondateurs, sans qu’aucun critère ne soit explicité :

« Parce qu’il y avait une volonté d’autonomiser. On ne prend pas les meilleurs, les plus autonomes et on les laisse tout seuls, on détecte le potentiel d’une autonomisation rapide, d’une montée en progression rapide » (entretien avec le fondateur, 93CodeSchool).

56Si les publics et histoires sont très différents, le modèle et les outils pédagogiques sont en revanche quasi similaires. Chez 93CodeSchool, la démarche pédagogique et les outils mobilisés sont assez proches de ce que l’on retrouve chez TrainCode, les élèves sont ainsi incités à produire un prototype sous forme de minimum viable product (MVP), outils qu’on retrouve dans les deux formations. L’un des premiers exercices demandés aux stagiaires est de reproduire l’interface et la structure d’une application connue, celle d’« AirBnB ». Dans la pédagogie, les exemples mobilisés de manière quasi systématique sont ceux d’entrepreneurs ayant monté leur entreprise dans le secteur du numérique. De plus, dès les premières sessions est mis en place un système d’accompagnement par des mentors, dits « mentors de start-up », c’est-à-dire des entrepreneurs ayant déjà une expertise dans le domaine et dont la visée est d’accompagner les formés sur les aspects techniques du numérique.

57Enfin, le dispositif pédagogique repose sur la présentation finale d’un projet d’application, qui est présenté sous forme de pitch où l’on montre en quoi l’application répond à des besoins commerciaux ou sociétaux et se termine par une démonstration publique de « l’appli ». Cette méthode s’apparente à celles qu’analyse Olivia Chambard53 dans les modules d’éducation à l’entrepreneuriat qui se répandent dans l’enseignement supérieur. La durée de ces modules, leur contenu et le pitch de fin ressemblent à ce que propose TrainCode.

58En ce qui concerne 93CodeSchool, alors qu’il s’agit de mettre « la culture de la start-up au service des jeunes désavantagés, pour une société qui se transforme54 », la pédagogie adoptée repose sur le projet lui-même, dont l’objet est la création d’une véritable entreprise et/ou du site Web qui la supporte.

59Dans les deux cas, la spécification autour d’un projet entrepreneurial pour les élèves se fait dans un contexte institutionnel qui incite à ce type d’initiatives, que ce soit au niveau européen via le livre vert sur l’entrepreneuriat de la Commission européenne de 2003, ou en France avec une convergence des agendas politiques allant dans ce sens, qu’il s’agisse de la loi pour l’innovation économique de 2003 ou la création du statut d’auto-entrepreneur en 2008, analysés par Sarah Abdelnour55. Cette approche est également fort présente dans l’éducation à l’entrepreneuriat56.

Une réappropriation des discours sur l’empowerment par les élèves

60L’appropriation de l’empowerment par les élèves est plus difficile à saisir, et on peut légitimement se questionner sur la manière dont les élèves s’approprient ce même dispositif. En interrogeant les parcours des participants, on peut se rendre compte que les réactions ne sont pas homogènes et que loin de produire une typologie fermée que l’on pourrait mettre en équivalence avec le profil des participants (en fonction de la formation suivie ou de profils sociodémographiques), nous observons plutôt une appropriation pragmatique qui se construit dans le temps. En effet, les abandons sont marginaux, quasi inexistants chez TrainCode, et on n’observe que quelques abandons chez 93CodeSchool. Le coût de la formation semble peu intervenir dans ces renoncements. Néanmoins, sans qu’on puisse exhaustivement lister ici les devenirs professionnels57, suivre le parcours de quelques anciens élèves nous semble être un bon indicateur de cette appropriation ou non appropriation.

Réactions suivistes et rêves d’entrepreneuriat contrariés

61Le code informatique est souvent présenté comme un support privilégié pour l’innovation et l’entrepreneuriat, au nom des opportunités de marchés, de la faible barrière financière à l’entrée, mais également de la supposée facilité d’apprentissage de ce nouveau langage, tous éléments censés faciliter les ponts vers l’entrepreneuriat. Il est certain que cet aspect entrepreneurial de l’empowerment porté par ces deux formations a eu un véritable rôle attracteur sur les élèves. En effet, la dimension entrepreneuriale peut susciter des espoirs, notamment via les exemples de réussites françaises58.

62Cette dimension entrepreneuriale agit sur les deux populations, mais de manière différenciée : pour celle de 93CodeSchool, elle est vue comme une manière de dépasser les difficultés du marché du travail, d’accéder rapidement à une reconnaissance à laquelle le parcours antérieur, même balisé d’un diplôme de l’enseignement supérieur, n’a pas permis d’accéder, et ainsi de faire l’économie d’un long parcours incertain jusqu’à l’emploi pérenne. Ce parcours leur semble ainsi moins laborieux que « l’enchaînement de petits boulots » et est porté par l’envie de devenir « son propre patron », expressions qui reviennent fréquemment lors des entretiens. L’argumentation prend ici les mêmes ressorts que l’on retrouve dans le discours de certains auto-entrepreneurs, plus particulièrement ceux qui sont devenus chauffeurs VTC (véhicule de tourisme avec chauffeur)59.

63Pour comprendre l’engouement du public de TrainCode, il faut resituer le contexte de l’année 2015, où se construit à Paris un « écosystème entrepreneurial du numérique », avec l’ouverture à Paris de la Station F, incubateur de start-up numériques. Ceci a été possible principalement sous l’impulsion de Xavier Niel, qui lui-même a développé quelques années plus tôt une école de formation au code informatique, « École 42 » qui a essaimé depuis en Europe60. Par la suite repris dans le discours présidentiel de la « start-up nation61 », ce discours a trouvé un écho chez les jeunes diplômés de grandes écoles. Ils choisissent à leur manière de s’épargner un parcours classique, jugé comme laborieux :

« Je voyais mes potes de promo [école de commerce] qui entraient dans le conseil, qui travaillaient 12 heures par jour, je n’avais pas envie de ça » (Xavier, sorti de TrainCode en 2014, créateur d’une entreprise numérique au moment de l’entretien).

64En effet, pour les diplômés des écoles de commerce, à l’opposé de la voie du conseil, où le travail est très contraint et hiérarchisé62, celle de l’entrepreneuriat est perçue comme un espace de liberté.

65C’est ce même ressort d’action qui a été mis en lumière par Olivia Chambard63 lorsqu’elle a interrogé des étudiants dont certains sortent d’une grande école de commerce et ont préparé un module de création d’entreprise. Ils opposent cette création, in fine réussie, à un parcours dans les grandes entreprises, considéré comme repoussoir.

66Pour les élèves des formations étudiées, l’un des aspects les plus visibles et mesurables dans leur parcours est la création d’entreprise. Et sur ce point, le premier constat que nous faisons, est que dans un premier temps, la mise en place concrète de l’entrepreneuriat est un échec. Ainsi, chez 93CodeSchool, sur les 32 élèves et alors que tous étaient entrés avec un projet entrepreneurial, seuls sept d’entre eux monteront finalement leur entreprise64. Et même pour eux, la situation est très contrastée, car ils s’orienteront pour la plupart vers le statut d’auto-entrepreneur dont, à la suite d’Alain Fayolle et Brigitte Pereira65, on peut se demander s’il représente un entrepreneuriat d’opportunité ou de nécessité. En effet, le statut d’auto-entrepreneur a d’abord pu susciter un véritable enthousiasme, avant de rapidement, face aux conditions réelles d’exercices, se révéler beaucoup moins attractif et être critiqué, car vu comme le symbole d’une précarisation du travail66 et de faibles revenus. Pour TrainCode, le nombre de créations objectives d’entreprises est également assez faible et l’organisme de formation n’a pas mis en place de structure accompagnant la création d’entreprises. Il est très difficile, voire impossible, d’avoir accès au parcours préalable des étudiants de Traincode. Néanmoins, en 2021, lorsque nous avons fait l’inventaire des start-up montées par les diplômés de TrainCode, sur les plus de 7 000 diplômés annoncés, 116 avaient réellement monté une entreprise. Parmi ces créateurs d’entreprises, on dénombre 101 hommes et 15 femmes, dans leur écrasante majorité venant de grandes écoles de commerce (94 sont diplômés d’école de commerce, dont 11 de l’École des hautes études commerciales [HEC] et 11 de l’École supérieure de commerce de Paris [ESCP], 15 d’écoles d’ingénieur dont sept de l’École polytechnique67). Au vu de l’homogénéité sociale de ces entrepreneurs et du type de formation qu’ils ont validés, on peut supposer qu’ils auraient certainement été capables de monter des entreprises sans avoir suivi TrainCode.

67Les deux formations se sont trouvées confrontées aux problèmes du devenir de leurs élèves. C’est plus particulièrement le cas pour la formation 93CodeSchool qui, s’adressant à des publics plus fragiles, a une certaine responsabilité morale quant à l’insertion des étudiants.

68Pour 93CodeSchool, l’échec de ces initiatives était en partie prévisible, car comme le montre le rapport de Roland Berger et Numa, parmi les entrepreneurs du numérique parisien de 20-25 ans, 31,6 % sont diplômés d’une école de commerce, contre 1,8 % d’autodidactes68. Selon Séverine Le Loarne-Lemaire69, les déterminants sociaux pèsent sur les prétendants entrepreneurs, il s’agit d’un secteur où l’on retrouve une forte reproduction sociale et qui reste très socialement homogène.

69En ce qui concerne TrainCode, c’est plutôt la formation elle-même qui sera en quelque sorte victime de l’effet pervers de la promesse entrepreneuriale. En effet, ces organismes de formation sont assez rapidement mis en contradiction entre l’impératif de formation de compétences propres à l’informatique d’un côté, face à des désirs d’entrepreneuriat des étudiants de l’autre. Elle sera donc confrontée à la difficulté pratique de la mise en place de ce dispositif double, qui aboutira petit à petit à une valorisation moindre de la dimension entrepreneuriale, voire de la pratique du code.

« Après TrainCode, pour moi il était clair que je n’allais pas devenir codeur. En revanche, c’est sûr que j’ai axé mes recherches [d’emploi] vers des postes dans la Tech [secteur des technologies] à l’interface avec des codeurs » (Hélène70, sortie de TrainCode en 2014, qui travaille au moment de l’entretien à Paris pour un groupe informatique asiatique).

70Pour Bertrand, qui était déjà en poste dans une entreprise, cette formation est l’occasion de mieux saisir les éléments techniques : « je comprends davantage les difficultés techniques, que je ne pouvais pas saisir auparavant ». Ceci dans une démarche qui dépasse l’unique visée de l’acculturation technique, car « c’est bien au-delà de la culture Geek, qu’on peut mettre en avant, sans rien y connaître » (Bertrand, sorti de TrainCode en 2014, actuellement chef de projet dans un groupe industriel français). En se recentrant sur cette double compétence, ces formations font ainsi le deuil de leur promesse d’empowerment et se concentrent en quelque sorte sur l’injonction à la formation.

Une réappropriation pragmatique par les élèves

71Aucun enquêté ne met directement en avant le fait que c’est l’aspect « métier en tension » qui a guidé leur reconversion, suivant une stratégie opportuniste d’accès facilité à l’emploi. On pourrait arguer qu’il est délicat d’exprimer ce type de propos dans les entretiens, néanmoins, aucun des interviewés ne présente ce choix comme étant un choix par défaut71. Pour ceux qui ont suivi les deux formations, c’est l’offre de formation qui a été le déclencheur de leur reconversion et non l’inverse. Si les bénéfices à court terme sont bien présents, le moteur de cette reconversion va au-delà et il semble que c’est davantage lié à l’empowerment dont l’argument de pouvoir ouvrir la « boîte noire » est mis en avant par les enquêtés :

« C’est vrai que j’utilise l’ordinateur et le numérique depuis que je suis petite, pour les cours, les réseaux sociaux, et là, c’était la possibilité de voir ce qui se passe derrière… enfin à l’intérieur » (Amélie, sortie de 93CodeSchool en 2015, en recherche d’emploi au moment de l’entretien).

72Il ne s’agit pas ici de suivre le mot d’ordre de Douglas Rushkoff72 « coder pour ne pas être codé », mais davantage comme une complémentarité des compétences, et c’est « la frustration de ne pas avoir de connaissances techniques » et de ne pas pouvoir faire les choses soi-même qui incitent à suivre ce type de formation. En entreprise et notamment pour les cadres, cette frustration limite les capacités de management et de contrôle sur le personnel informatique, ce qui explique la réussite de TrainCode. Nathan Ensmenger73 a pu montrer comment cette prise de contrôle sur les savoirs techniques par les managers a été un enjeu important du développement de l’informatique dans les organisations. Et c’est bien ainsi que des sortants de TrainCode l’envisagent :

« Moi j’étais dans une agence de communication. Ça faisait deux ans et demi que je faisais pas mal d’études d’opinion. On récupère plein de verbatim sur Internet et on faisait des copiés-collés sur des tableaux Excel. Tout ça, c’était à la main. On avait une armée de stagiaires, qui faisait du copié-collé de Twitter, ou de commentaires sur les médias en ligne. J’ai une formation plutôt littéraire, j’ai fait L, ensuite j’ai fait Sciences Po […]. Ensuite je me suis autoformé, à essayer de faire des choses les plus précises possibles, sur Excel dans un premier temps, et arrivé à un certain stade, je me suis rendu compte que j’avais envie d’aller plus loin » (Alexandre, sorti de TrainCode en 2015 et aujourd’hui consultant dans une société de service informatique).

73De manière très prosaïque, c’est également la promesse de pouvoir réaliser un prototype d’application réelle. Cet argument peut être vu comme un désir intrinsèque de connaissance technique, mais également comme un argument commercial. En effet, en se formant eux-mêmes, les futurs entrepreneurs font l’économie du recours à un prestataire qui effectuerait la même tâche et qui serait onéreux. Cette pratique, alors même qu’elle est au cœur de la proposition pédagogique de la formation, est perçue comme opportuniste par les formateurs.

« Ils viennent avec leur projet. Ils voient les démos, ils ont les étoiles plein les yeux. Ils se disent : “C’est le même prix qu’un free-lance, et du coup je vais faire mon projet.” Nous, on leur dit que c’est avant tout un projet d’apprentissage, on est pas une agence de free-lances. La personne qui va être trop obnubilée par son projet. C’est une alternative au free-lance. C’est des gens qui s’en foutent un peu du volet formation. Par exemple sur les quatre premières semaines, ces gens-là sont frustrés. À part sur leur projet, ils ne sont pas TeamPlayer, car ils trop concentrés sur leur truc » (entretien avec le formateur TrainCode).

74Cette appétence affichée pour la pratique traduit en négatif un rejet des savoirs théoriques. Un argument assez présent chez les formés de 93CodeSchool. Beaucoup font état de cette opposition aux savoirs académiques à travers les expériences qu’ils ont pu suivre à l’université et qui le plus souvent se sont traduites par un abandon ou un échec.

75Les participants à TrainCode, qui sont principalement des diplômés de grandes écoles, assument de leur côté davantage de distance vis-à-vis de leurs études. En effet, le dénigrement du théorique est d’autant moins présent qu’ils en ont validé toutes les étapes, en ont tous les titres et ont tiré les bénéfices. Ils apprécient l’acquisition de cette compétence technique, qui pour eux se fait à moindre coût, leur donnant ainsi un double profil technique et managérial.

L’institutionnalisation de cette reconversion pragmatique autour de la certification RNCP

76Cette appropriation pragmatique, on la retrouve au niveau des organismes de formation dans le positionnement qu’ils vont avoir vis-à-vis de la certification professionnelle. On observe en effet que la réappropriation pragmatique par les organismes de formation est marquée par un repositionnement vis-à-vis du monde classique de la formation, de ses outils et méthodes. En effet, alors qu’elles ne vont pas aller dans le sens de la validation de diplômes, ces organismes de formation vont néanmoins évoluer bon gré mal gré pour tenter de valider des « certifications professionnelles » avec inscription au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP).

77Que ce soit pour les organismes de formation étudiés ou pour le dispositif GEN, la logique de certification était pourtant initialement perçue comme un obstacle :

« tout comme l’exigence de labellisation a priori contenue dans la lettre de mission, la volonté formulée par le Premier ministre de labelliser une cinquantaine de structures dès octobre 2015 s’accorde mal avec la reconnaissance des formations par le cadre réglementaire actuel, en particulier via le RNCP74 ».

78Chez TrainCode, on retrouve la même critique adressée plus haut à l’égard de la GEN, mais cette fois-ci vis-à-vis de la certification. Évoluant dans un monde de l’entrepreneuriat, ils ne se sentent pas concernés par les enjeux de la certification, qui selon eux touchent avant tout les autres organismes de formation.

« Ils [en parlant des autres organismes de formation] sont dans une approche de former les gens pour avoir un boulot, ils sont pour avoir le RNCP, ils vont avoir une équipe administrative qui taffe sur des subventions. Nous, on n’est pas du tout focus sur ce truc administratif » (fondateur TrainCode).

79Néanmoins, puisque cette certification permet aux élèves de financer leur formation, ils admettent l’utilité relative que pourrait avoir le RNCP, pour le développement de leur activité.

« RNCP, pour moi, c’est pour les villes de province. À Paris, il y a assez de flux, de personnes qui sont prêtes à payer en propre. C’est moins le cas en province » (fondateur TrainCode).

80La certification en question ne porte pas sur l’entrepreneuriat, mais bien sur le code informatique. Les deux organismes de formation obtiendront en effet chacun la certification RNCP « Développeur Web et Web mobile », en 2017 pour 93CodeSchool, c’est-à-dire après trois ans d’activité. En effet, la demande officielle s’appuie sur l’analyse d’au moins deux promotions de titulaires du projet de certification professionnelle. TrainCode obtiendra cette même certification en 2018 dans le but de développer son activité dans les villes de province.

8193CodeSchool s’est très vite intéressé à ces certifications et a même transformé cette certification en argument commercial. Elle est mise en scène par le fondateur comme une pratique transgressive : « On a hacké [piraté] le système, en proposant une formation à bac +2 à suivre en neuf semaines seulement75. »

82En plus de permettre de trouver des financements pour la formation et de faire gagner du temps aux participants, il est ainsi proposé de suivre une formation de niveau 5 et donc bac +2 en neuf semaines. Ce qui est présenté comme une opportunité spécifique à leur programme n’en est en réalité pas une car cela concerne a priori l’ensemble des formations certifiées par le RNCP.

83Dans les faits, certains participants saisissent cette formation comme un raccourci pour avoir une certification visible :

« J’avais déjà perdu presque trois ans à la fac, pour rien au final… je ne me voyais pas repartir pour deux ans. Et puis financièrement il faut tenir deux ans » (Yannis, sortie de 93CodeSchool en 2015, en formation en alternance au moment de l’entretien).

84Au-delà de nos deux cas, ce chemin de la certification a été suivi par bien d’autres formations du même type puisque dans le rapport de la Grande école du numérique de 2016, 18 % des 400 formations étaient certifiées RNCP et 12 % sous l’intitulé « 5927 Titre développeur logiciel ». En 2017, elles étaient 45 % à avoir cette certification76.

Conclusion

85L’exemple des deux organismes de formation étudiés est, nous semble-t-il, assez illustratif du discours que certains nouveaux acteurs venus dans le champ de la formation portent, à savoir un discours dit de rupture, aussi appelé « disruptif » dans le milieu entrepreneurial. Ici, la proposition des coding bootcamps, importée des États-Unis, a su être mise en cohérence avec un discours et des justifications elles-mêmes issues des États-Unis autour de l’empowerment. La genèse de ces organismes de formation dans des contextes différents rend bien compte de l’irrigation de ce même discours et de ce même dispositif pédagogique autour du code informatique.

86Notre étude montre que si ce discours et son caractère malléable ont pu aider à proposer un modèle pédagogique unique à destination de publics forts différents, visant une véritable émancipation entrepreneuriale, ils réussiraient là où d’autres auraient échoué à aller vers des publics hétérogènes. Le temps a pu confirmer le succès commercial de ces formations. En effet, aujourd’hui, ces dernières revendiquent avoir formé plus de 15 000 personnes, sans qu’il n’y ait pu avoir de véritable évaluation de l’insertion réelle des élèves77.

87Ce que nous mettons ici en lumière est le fait que cette réussite est davantage due aux réappropriations pragmatiques de la part des élèves et des organismes de formation eux-mêmes. D’un côté, pour ces participants, on peut ainsi se rendre compte que la question du code et de l’entrepreneuriat, les deux piliers de ces formations, s’atténue pour faire place à une vision plus classique de la compétence78. D’un autre côté, pour les organismes de formation, on observe une sorte d’ajustement autour du cadre institutionnel classique de la formation continue, principalement autour du RNCP.

Notes de bas de page

1Nous avons choisi de rendre anonymes les noms de ces organismes de formation, afin de respecter les conditions d’entretien telles qu’elles ont été définies lors de leur passation. Ces organismes ayant maintenant une notoriété certaine, ce qui n’était pas le cas à l’époque de l’enquête, les sources externes notamment les éléments de presses ont été volontairement modifiés, mais les dates et les informations restent bien évidemment justes.

2Sites Web respectifs des écoles en mars 2023.

3Vicente Michaël, 2017, « Apprentissage du code informatique et entrepreneuriat : de la création d’entreprise à l’esprit d’entreprendre », Formation emploi, no 140, p. 87-106.

4Site Web de l’école en 2014, sans qu’il en soit dit davantage sur la notion de diversité.

5Baron Georges-Louis et Drot-Delange Béatrice, 2016, « L’informatique comme objet d’enseignement à l’école primaire française ? Mise en perspective historique », Revue française de pédagogie, no 195, p. 51-62.

6[https://www.evolution-perspectives.com/fr/kiosk-formation-consulting/kiosk-formation-consulting/le-marché-de-la-formation-professionnelle#:~:text=Les%20formations%20les%20plus%20demandées,Les%20formations%20en%20management], consulté le 23 août 2023.

7Tanguy Lucie (dir.), 1986, L’introuvable relation formation/emploi : un état des recherches en France, Paris, La Documentation française.

8Tebeka Jacques, 1980, La formation des spécialistes informaticiens, ou la révolution informatique ne peut s’accomplir sans informaticiens, rapport au Premier ministre, Paris, La Documentation française.

9Fafiec, 2016, Étude prospective pour la branche des métiers du numérique en région Île-de-France, étude réalisée par le cabinet Ambroise Bouteille et Associés pour le compte du Fafiec et de la Direccte Île-de-France, mai.

10Zune Marc, 2006, « De la pénurie à la mobilité : le marché du travail des informaticiens », Formation emploi, no 95, p. 5-24.

11Fondeur Yannick, 2013, « Services de conseil en informatique : recruter pour placer », La Revue de l’Ires, no 76, p. 99-125.

12Avant de devenir Numeun en 2021, le premier syndicat professionnel du secteur était le Syntec-Numérique, dans le rapport annuel de leur baromètre de l’emploi, ils mentionnaient régulièrement les difficultés de recrutement du secteur.

13France Stratégie, 2017, Vision prospective partagée des emplois et des compétences la filière numérique, rapport du réseau Emploi Compétences, Paris, France Stratégie, p. 33.

14On trouvera une description de ces fonctions sur différents manuels. Par exemple : Northwood Chris, 2018, The Full Stack Developer: Your Essential Guide to the Everyday Skills Expected of a Modern Full Stack Web Developer, New York, Apress.

15Dans Schechter François, Bergmann Claude, Gaubert-Macon Christine, Azéma Ariane, Christmann Philippe, Castellazzi Mario et Laval Didier, 2016, Les besoins et l’offre de formation aux métiers du numérique, rapport IGEN-IGAENR-CGEIET-IGAS, le comité technique d’évaluation dresse un bilan de ces trois actions.

16Conseil d’orientation pour l’emploi, 2013, Emplois durablement vacants et difficultés de recrutement, Paris, COE, p. 67.

17Ibid.

18Vicente Michaël, 2018, « La Grande École du numérique : les paradoxes d’une politique de promotion des formations techniques centrées sur l’apprentissage du code informatique », Lien social et politiques, no 81, p. 212-229.

19Solomon Barbara, 1976, Black Empowerment. Social Work in Oppressed Communities, New York, Columbia University Press.

20Bacqué Marie-Hélène et Biewener Carole, 2013, L’empowerment, une pratique émancipatrice, Paris, La Découverte, p. 21-22.

21Talpin Julien, 2016, Community Organizing. De l’émeute à l’alliance des classes populaires aux États-Unis, Paris, Raisons d’agir.

22Bacqué Marie-Hélène et Biewener Carole, 2013, L’empowerment…, op. cit., p. 81.

23Maury Yolande et Hedjerassi Nassira, 2020, « Empowerment, pouvoir d’agir, en éducation À la croisée entre théorie(s), discours et pratique(s) », Spirale, no 66, p. 3.

24Bacqué Marie-Hélène et Biewener Carole, 2013, L’empowerment…, op. cit., p. 106.

25Villon de Benveniste Guillaume, 2015, Les secrets des entrepreneurs de la Silicon Valley, Paris, Eyrolles.

26Rushkoff Douglas, 2012, Les 10 commandements de l’ère numérique, Limoges, FYP Éditions, p. 7.

27Ibid., p. 159.

28Ibid., p. 7.

29Rollot Olivier, 2012, La génération Y, Paris, Presses universitaires de France.

30Stenger Thomas, 2015, Digital natives. Culture, génération et consommation, Caen, EMS Éditions.

31Stevens Hélène, 2012, « Autonomie récusée, autonomie fabriquée. Informaticiens à l’épreuve de l’Entreprise de Soi », Genèses, no 87, p. 90-112.

32Bardeau Frédéric et Danet Nicolas, 2014, Lire, écrire, compter, coder, Limoges, FYP Éditions, p. 69.

33Ibid.

34Ibid.

35Keucheyan Razmig, 2006, « Les communautés de fans de Matrix sur Internet : une étude de sociologie de la connaissance », L’Année sociologique, vol. 56, p. 41-66.

36Lessig Lawrence, 1999, Code Is Law. On Liberty in Cyberspace, New York, Basic Books.

37Bardeau Frédéric et Danet Nicolas, 2014, Lire, écrire, compter, coder…, op. cit., p. 78.

38Ibid., p 86-87.

39Conseil national du numérique, 2015, Ambition numérique. Pour une politique française et européenne de la transition numérique, rapport remis au Premier ministre, Paris, CNNum, p. 5-15.

40Liger Philippe et Rohou Gaëlle, 2016, L’empowerment : donner aux salariés le pouvoir d’initiative, Paris, Dunod, p. 2.

41Peugeot Valérie, 2015, « Une brève histoire de l’empowerment : à la reconquête du sens politique », Fondation Internet nouvelle génération, janvier, [https://vecam.org/_old/Breve-histoire-de-l-empowerment-a-la-reconquete-du-sens-politique.html], consulté le 23 août 2023.

42Bacqué Marie-Hélène et Biewener Carole, 2013, L’empowerment…, op. cit.

43Un résumé des échanges peut être consulté sur [http://notesondesign.org/pdffrance-lempowerment-par-le-code/], consulté le 25 février 2015.

44Anderson Chris, 2012, Makers : la nouvelle révolution industrielle, Paris, Pearson, p. 340.

4512 avril 2017, Presse économique.

46Éléments de documentation formation, 93CodeSchool.

47Conseil national du numérique, 2015, Ambition numérique…, op. cit., p. 69.

48Site de la Caisse des dépôts et consignations annonçant la participation au capital de 93CodeSchool.

49Vicente Michaël, 2018, « La Grande École du numérique… », art. cité.

50Arthur Michael et Rousseau Denise, 1996, The Boundaryless Career: A New Employment Principle for a New Organizational Era, Oxford, Oxford University Press.

51Stevens Hélène, 2012, « Autonomie récusée, autonomie fabriquée », art. cité.

52Solomon Barbara, 1976, Black Empowerment…, op. cit.

53Chambard Olivia, 2020, « Tous “startupeurs” ? Les enjeux de la diffusion de la rhétorique entrepreneuriale dans l’enseignement supérieur », Savoir/Agir, no 51, p. 41-49.

54Document de promotion commerciale de 93CodeSchool.

55Abdelnour Sarah, 2017, Moi, petite entreprise. Les auto-entrepreneurs, de l’utopie à la réalité, Paris, Presses universitaires de France.

56Champy-Remoussenard Patricia, 2012, « L’éducation à l’entreprenariat : enjeux, statut, perspectives », Spirales, no 50, p. 39-51.

57Pour aucune de ces formations, les données sur le devenir des élèves n’ont pu être obtenues.

58Alter Norbert, 2012, La force de la différence. Itinéraires de patrons atypiques, Paris, Presses universitaires de France.

59Abdelnour Sarah, 2017, Moi, petite entreprise…, op. cit.

60Dupuy Camille et Sarfati François, 2022, Gouverner par l’emploi. Une histoire de l’école 42, Paris, Presses universitaires de France.

61Discours du 27 juillet 2015 d’Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie et de l’Industrie, dans le cadre d’une rencontre au sein de l’incubateur The Family.

62Thine Sylvain, 2014, Innover pour s’imposer. Consultants et conseil en nouvelles technologies, Rennes, Presses universitaires de Rennes.

63Chambard Olivia, 2020, « Tous “startupeurs” ?… », art. cité.

64Vicente Michaël, 2017, « Apprentissage du code informatique et entrepreneuriat : de la création d’entreprise à l’esprit d’entreprendre », Formation emploi, no 140, p. 87-106.

65Fayolle Alain et Pereira Brigitte, 2012, « L’encouragement à l’auto-entrepreneuriat est-il une bonne politique publique pour l’esprit d’entreprendre et la création d’entreprises ? », Annales des Mines. Gérer et comprendre, no 107, p. 52-62.

66Levratto Nadine et Serverin Évelyne, 2009, « Être entrepreneur de soi-même après la loi du 4 août 2008 : les impasses d’un modèle productif individuel », Revue internationale de droit économique, vol. 3, p. 325-352.

67Décompte à partir des données affichées sur le site de TrainCode.

68Berger Roland et Numa, 2016, 375 startupers. Portraits, tendances et paroles de startups, Paris, Roland Berger/Numa, p. 18.

69Le Loarne-Lemaire Séverine, 2014, « Introuvable diversité entrepreneuriale… », Entreprendre et innover, no 20, p. 14-23.

70Les prénoms ont été modifiés.

71Comme on peut par exemple le retrouver pour les reconversions au service à la personne. Doniol-Shaw Ghislaine, 2011, « Quels diplômes pour le secteur de l’aide à la personne ? », Formation emploi, vol. 3, no 115, p. 51-65.

72Rushkoff Douglas, 2012, Les 10 commandements…, op. cit.

73Ensmenger Nathan, 2011, The Computer Boys Take Over: Computers, Programmers, and the Politics of Technical Expertise, Cambridge, The MIT Press.

74Distinguin Stéphane, Marquis François-Xavier et Roussel Gilles, 2015, La Grande École du numérique, une utopie réaliste, Paris, ministère de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique, p. 34.

758 janvier 2021, Presse généraliste.

76GEN, 2016, Grande École du numérique, rapport d’activité : [https://www.grandeecolenumerique.fr/sites/default/files/rapport_annuel.pdf] ; GEN, 2017, Grande École du numérique. Chiffres Clés 2017 : [https://www.grandeecolenumerique.fr/sites/default/files/chiffrescles2017_gen_webvf.pdf], consultés le 23 août 2023.

77Vicente Michaël, 2018, « La Grande École du numérique… », art. cité.

78Neyrat Frédéric, 2008, « Le travail à l’épreuve de la compétence », Savoir/Agir, no 3, p. 31-36.


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